Language of document : ECLI:EU:T:2012:198

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA SEPTIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

24 avril 2012 (*)

« Confidentialité – Contestation »

Dans l’affaire T‑75/10,

Empresa Brasileira de Aeronáutica, SA (Embraer), établie à São José dos Campos (Brésil),

Embraer Aviation Europe SAS (EAE), établie à Villepinte (France),

Indústria Aeronáutica de Portugal, SA (OGMA), établie à Alverca do Ribatejo (Portugal),

représentées initialement par Mmes U. O’Dwyer et A.S. Martin, solicitors, puis par Mme O’Dwyer, solicitor,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. E. Gippini Fournier, D. Grespan et S. Thomas, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Short Brothers plc, établie à Belfast (Royaume-Uni),

Bombardier, Inc., établie à Québec (Canada),

représentées initialement par MM. A. Renshaw, M. O’Regan, Mme S. Southwell, solicitors, puis par MM. Renshaw et O’Regan, solicitors,

et par

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté initialement par Mme S. Behzadi-Spencer, en qualité d’agent, puis par Mme H. Walker, en qualité d’agent, assisté de Mme K. Bacon, barrister,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2009) 4541 final de la Commission, du 17 juin 2009, de ne pas soulever d’objections à l’encontre de l’aide d’État octroyée par les autorités britanniques en faveur de Short Brothers plc, filiale de Bombardier Inc., (aide d’État N 654/2008 – United Kingdom Large R&D aid to Bombardier, JO C 298, p.2),

LE PRÉSIDENT DE LA SEPTIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Procédure

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 février 2010, Empresa Brasileira de Aeronáutica, SA (Embraer), Embraer Aviation Europe SAS (EAE) et Indústria Aeronáutica de Portugal, SA (OGMA), les requérantes, ont introduit un recours tendant à l’annulation de la décision de la Commission C (2009) 4541 final, du 17 juin 2009, de ne pas soulever d’objections à l’encontre de l’aide d’État octroyée par les autorités britanniques en faveur de Short Brothers plc, filiale de Bombardier Inc. (aide d’État N 654/2008 – United Kingdom Large R&D aid to Bombardier, JO C 298, p.2).

2        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 17 juin 2010, Short Brothers plc et Bombardier Inc. ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission européenne.

3        Par lettre du 22 septembre 2010, les requérantes ont adressé au Tribunal une demande de traitement confidentiel, vis-à-vis de Short Brothers et Bombardier, de certaines données et informations contenues dans la requête et ses annexes, le mémoire en défense et le mémoire en réplique.

4        Par lettre du 11 novembre 2010, les requérantes ont adressé au Tribunal une demande de traitement confidentiel, vis-à-vis de Short Brothers et Bombardier, de certaines données et informations contenues dans le mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.

5        Par lettre du 31 janvier 2011, Short Brothers et Bombardier ont émis des objections à l’encontre de l’ensemble des demandes de traitement confidentiel présentées par les requérantes.

6        Par lettre du 2 mars 2011, les requérantes ont adressé au Tribunal une demande de traitement confidentiel, vis-à-vis de Short Brothers et Bombardier, de certaines informations contenues dans leurs observations sur le mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.

7        Par lettre du 8 avril 2011, Short Brothers et Bombardier ont émis des objections à l’encontre de la demande de traitement confidentiel mentionnée au point 6 ci-dessus.

8        Par lettre du 24 juin 2011, les requérantes ont adressé au Tribunal une demande de traitement confidentiel, vis-à-vis de Short Brothers et Bombardier, de certaines informations contenues dans leurs observations sur le mémoire en intervention de Short Brothers et Bombardier.

9        Par lettre du 27 juillet 2011, Short Brothers et Bombardier ont émis des objections à l’encontre de la demande de traitement confidentiel mentionnée au point 8 ci-dessus.

 Sur les demandes de traitement confidentiel

 Objet des demandes

10      Les requérantes ont présenté des demandes de traitement confidentiel portant sur certaines données et informations contenues dans la requête et ses annexes, dans le mémoire en défense, dans le mémoire en réplique, dans le mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et dans leurs observations sur ce mémoire, ainsi que dans leurs observations sur le mémoire en intervention de Short Brothers et Bombardier, concernant les éléments suivants :

–        le point 33 et les éléments occultés au point 42 de la requête ;

–        les points 37, 54 à 62 et les éléments occultés au point 226 de l’annexe A.5 de la requête ;

–        les annexes A.15 et A.28 de la requête dans leur entièreté ;  

–        les éléments occultés au point 30 du mémoire en défense ;

–        les éléments occultés au point 21 du mémoire en réplique ;

–        les éléments occultés aux notes de bas de page nos 20 et 50 du mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ;

–        les éléments occultés au point 45 de leurs observations sur le mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ;

–        les éléments occultés à la note de bas de page n° 51 de leurs observations sur le mémoire en intervention de Short Brothers et Bombardier.

11      Il convient de souligner que les requérantes ont également effectué, dans leur lettre en date du 11 novembre 2010, une demande de traitement confidentiel d’éléments figurant à la note de bas de page n° 26 du mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord. Elles n’ont, cependant, occulté aucun aspect de ladite note de bas de page dans la version non confidentielle de ce mémoire qu’elles ont communiquée au greffe. Il y a donc lieu de conclure que ladite demande est sans objet.  

12      Short Brothers et Bombardier ont émis des objections à l’encontre de l’ensemble des demandes effectuées par les requérantes.

 Sur le bien fondé des demandes de traitement confidentiel

13      Il convient de rappeler que l’article 116, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal dispose :

« Si une intervention dont la demande a été présentée dans le délai de six semaines prévu à l’article 115, paragraphe 1, est admise, l’intervenant reçoit communication de tous les actes de procédure signifiés aux parties. Le président peut, cependant, à la demande d’une partie, exclure de cette communication des pièces secrètes ou confidentielles. »

14      Cette disposition pose le principe que tous les actes de procédure signifiés aux parties doivent être communiqués aux parties intervenantes et ne permet qu’à titre dérogatoire d’exclure certaines pièces ou informations secrètes ou confidentielles de cette communication (ordonnances du Tribunal du 4 avril 1990, Hilti/Commission, T‑30/89, Rec. p. II‑163, publication par extraits, point 10, et du président de la huitième chambre du Tribunal du 2 mars 2010, Telefónica et Telefónica de España/Commission, T‑336/07, non publiée au Recueil, point 26).

15      À cet égard, en premier lieu, il incombe à la partie qui présente une demande de confidentialité de préciser les pièces ou les informations visées et de dûment motiver leur caractère confidentiel (ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 22 février 2005, Hynix Semiconductor/Conseil, T‑383/03, Rec. p. II‑621, point 31).

16      En deuxième lieu, lorsqu’une partie présente une demande au titre de l’article 116, paragraphe 2, seconde phase, du règlement de procédure, il appartient au président de statuer uniquement sur les pièces et informations dont la confidentialité est contestée (ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 36, et Telefónica et Telefónica de España/Commission, précitée, point 30).

17      La contestation de la confidentialité par les parties intervenantes doit porter sur des éléments précis des pièces de procédure qui sont restés occultés et indiquer les motifs pour lesquels la confidentialité à l’égard de ces éléments doit être refusée. Partant, une demande de traitement confidentiel doit être accueillie pour autant qu’elle porte sur des éléments qui n’ont pas été contestés par l’intervenante, ou qui ne l’ont pas été de manière explicite et précise (ordonnances du président de la cinquième chambre du Tribunal du 15 juin 2006, Deutsche Telekom/Commission, T‑271/03, Rec. p. II‑1747, points 12, 14 et 15, et Telefónica et Telefónica de España/Commission, précitée, point 31).

18      En troisième lieu, dans la mesure où une demande présentée au titre de l’article 116, paragraphe 2, seconde phrase, du règlement de procédure est contestée, il appartient au président, dans un premier temps, d’examiner si chacune des pièces et informations dont la confidentialité est contestée et à propos desquelles une demande de traitement confidentiel a été présentée, revêt un caractère secret ou confidentiel (voir, en ce sens, ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 38, et du président de la septième chambre du Tribunal du 14 octobre 2009, vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, T‑353/08, non publiée au Recueil, point 15).

19      C’est au regard du caractère secret ou confidentiel de chacune des pièces et informations visées qu’il convient d’apprécier l’exigence de motivation de la demande de confidentialité à laquelle est soumise la requérante. En effet, il y a lieu de faire une distinction entre, d’une part, les informations qui sont par nature secrètes, telles que les secrets d’affaires d’ordre commercial, concurrentiel, financier ou comptable, ou confidentielles, telles que les informations purement internes, et, d’autre part, les pièces ou informations susceptibles de revêtir un caractère secret ou confidentiel pour un motif qu’il appartient au demandeur de rapporter (voir, en ce sens, ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 34, et vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, précitée, point 16).

20      Ainsi, le caractère secret ou confidentiel des pièces ou informations, pour lesquelles n’est apportée aucune motivation autre que celle consistant en la description de leur contenu, ne sera admis que pour autant que ces informations puissent être considérées comme secrètes ou confidentielles de par leur nature (ordonnances du président de la sixième chambre du Tribunal du 18 novembre 2008, Zhejiang Harmonic Hardware Products/Conseil, T‑274/07, non publiée au Recueil, point 25 ; vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, précitée, point 27, et Telefónica et Telefónica de España/Commission, précitée, point 34).

21      En quatrième lieu, lorsque son examen le conduit à conclure que certaines des pièces et informations dont la confidentialité est contestée sont secrètes ou confidentielles, il appartient au président de procéder, dans un second temps, à l’appréciation et à la mise en balance des intérêts en présence, pour chacune de celles-ci (ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 42 ; vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, précitée, point 24, et Telefónica et Telefónica de España/Commission, précitée, point 35).

22      Lorsque le traitement confidentiel est demandé dans l’intérêt de la requérante, cette appréciation conduit le président, pour chaque pièce ou information visée, à mettre en balance le souci légitime de cette partie d’éviter que ne soit portée une atteinte sérieuse à ses intérêts et le souci tout aussi légitime des parties intervenantes de disposer des informations nécessaires à l’exercice de leurs droits procéduraux (ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 44, et vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, précitée, point 25).

23      En toute hypothèse, la requérante doit envisager, eu égard au caractère contradictoire et public du débat judiciaire, la possibilité que certaines des pièces ou informations secrètes ou confidentielles qu’elle a entendu produire au dossier apparaissent nécessaires à l’exercice des droits procéduraux des parties intervenantes et, par suite, doivent être communiquées à ces derniers (ordonnances du président de la première chambre élargie du Tribunal du 29 mai 1997, British Steel/Commission, T‑89/96, Rec. p. II‑835, point 24, et Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 46).

24      C’est au regard de ces principes qu’il convient d’examiner les demandes de traitement confidentiel déposées dans la présente affaire.

25      De manière liminaire, il y a lieu de répondre à l’objection présentée par Short Brothers et Bombardier, tirée de ce que les demandes de traitement confidentiel présentées par les requérantes ne comprennent pas une motivation suffisante. Dans ce cadre, elles soulignent, notamment, que les requérantes ne démontrent pas que les éléments dont elles demandent la confidentialité ne sont pas connus du public.

26      Il convient, tout d’abord, de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 20 ci-dessus, que l’étendue de l’obligation de justification dépend du caractère confidentiel ou secret par nature ou non d’une information. Ainsi, dans l’éventualité où il serait conclu que les éléments occultés peuvent être considérés comme étant de par leur nature confidentiel ou secret, le caractère sommaire de la motivation avancée par les requérantes ne constituera pas un obstacle à l’octroi de la demande de confidentialité. Il en ira différemment si le caractère confidentiel ou secret desdits éléments ne s’impose pas avec un degré suffisant d’évidence et aurait, dès lors, impliqué une motivation supplémentaire.

27      En outre, s’il est exact que des informations peuvent perdre leur nature secrète ou confidentielle par nature lorsque le grand public ou certains milieux spécialisés peuvent y avoir accès (voir en ce sens, ordonnance vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, précitée, point 71), c’est à la partie qui conteste la nature secrète ou confidentielle desdites informations d’amener la preuve d’une telle perte. Short Brothers et Bombardier ne sauraient, dès lors, utilement faire valoir que les requérantes n’ont pas démontré le maintien du caractère confidentiel ou secret desdites informations.

28      S’agissant, en premier lieu, de la demande de confidentialité du point 33 de la requête, des éléments occultés au point 30 du mémoire en défense et à la note de bas de page n° 20 du mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, les requérantes la justifient par la circonstance qu’ils concernent le plan d’affaires d’OGMA.

29      Short Brothers et Bombardier estiment que la demande de traitement confidentiel de ces éléments devrait être rejetée dès lors qu’elle n’est assortie d’aucune explication quant au contenu de ces plans, à leur date ou à leur nature confidentielle et que les requérantes ne démontrent pas que lesdits éléments ne sont pas connus du public ou demeurent suffisamment récents pour être protégés au titre de la confidentialité. Short Brothers et Bombardier font également valoir que, en toute hypothèse, la communication de ces éléments devrait leur être accordée afin qu’elles puissent exercer leurs droits procéduraux. Elles notent, à cet égard, que tant la Commission que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord se réfèrent au point 33 de la requête pour contester la recevabilité du recours en ce qu’il est introduit par OGMA.

30      Un plan d’affaires constituant une information qui peut être qualifiée de secrète ou de confidentielle de par sa nature, les requérantes n’étaient pas tenues d’apporter de motivation autre que la description de son contenu.

31      Toutefois, il convient de constater que les informations contenues au point 33 de la requête ne revêtent plus un caractère confidentiel ou secret à l’égard de Short Brothers et Bombardier dans la mesure où elles figurent également, et de manière plus détaillée, aux points 52 à 62 de la version non confidentielle de la plainte que les requérantes ont adressée à la Commission, qui leur a été communiquée par cette dernière et dont des extraits figurent à l’annexe O.8 des observations de Short Brothers et Bombardier. La demande de confidentialité doit, dès lors, être rejetée à leur égard. Il en va de même des informations contenues dans le point 30 du mémoire en défense, dès lors qu’elles figurent également au point 60 de la version non confidentielle de la plainte.

32      Partant, il convient de rejeter la demande de confidentialité en ce qu’elle concerne le point 33 de la requête et les éléments occultés au point 30 du mémoire en défense. Il en va de même des éléments occultés à la note de bas de page n° 20 du mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, en ce qu’ils consistent en un simple renvoi au point 33 de la requête et ne revêtent, dès lors, aucun caractère confidentiel ou secret.

33      S’agissant, en deuxième lieu, des éléments occultés aux points 42 de la requête, 21 de la réplique, 45 des observations des requérantes sur le mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et à la note de bas de page n° 51 de leurs observations sur le mémoire en intervention de Short Brothers et Bombardier, ainsi que de l’annexe A.15 de la requête (« Estimation des revenus générés par les [avions E190 et E195] pour 2008 et les trois premiers trimestres de 2009 »), leur traitement confidentiel est demandé au motif qu’il comprennent des informations relatives aux recettes d’Embraer au titre des années 2008 et 2009. Plus précisément, lesdites informations portent sur la part des recettes provenant de la vente des avions E 190 et E 195.

34      Short Brothers et Bombardier font valoir que les requérantes ne prétendent pas que les informations dont elles demandent la confidentialité n’ont pas fait l’objet d’une publication ou qu’elles ne peuvent être déduites d’autres informations publiques telles que le nombre d’avions livrés et les prix de ventes proposés. En l’absence d’explication sur ce point, la confidentialité ne saurait être admise. En outre, il conviendrait, en toute hypothèse, de rejeter la demande de confidentialité en ce qui concerne l’annexe A.15, dès lors qu’elle concerne l’intégralité de ladite annexe, et que les requérantes ne se réfèrent à aucune circonstance exceptionnelle susceptible de la justifier. Short Brothers et Bombardier soutiennent que l’accès à ces informations leur est nécessaire aux fins de présenter leurs observations sur la recevabilité d’Embraer à contester le bien-fondé de la décision attaquée.

35      Il y a lieu de souligner que les informations en question revêtent un caractère secret ou confidentiel par nature. En outre, dès lors qu’elles concernent les années 2008 et 2009, elles ne sauraient être tenues pour historiques en ce qu’elles datent de moins de cinq ans (voir, en ce sens, ordonnance du président de la cinquième chambre du Tribunal du 1er mars 2007, TVDanmark and Kanal 5 Denmark/Commission, T‑336/04, Rec. p. II‑491, point 56 et ordonnance Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 60).

36      Toutefois, il ressort de la lecture de certains éléments de preuve avancés par Short Brothers et Bombardier qu’Embraer a rendu public différentes informations portant sur le nombre d’avions vendus, leur prix de vente ou encore ses résultats (annexes O.1 « Extraits du bilan annuel d’Embraer 2009 », O.2 « Communiqué de presse d’Embraer, Embraer communique ses résultats trimestriels dans US GAAP » et O.3 « Liste de prix des aéronefs »). Or, il peut raisonnablement être considéré que de telles informations permettent d’obtenir une estimation assez précise de l’importance que peut avoir la vente des avions E 190 et E 195 pour Embraer.

37      En outre, la communication de telles informations doit être considérée comme nécessaire à l’exercice des droits procéduraux de Short Brothers et Bombardier. En effet, dans leur requête, les requérantes justifient le droit d’Embraer de contester le bien-fondé de la décision attaquée, entre autre, par la circonstance que sa position sur le marché des avions finis de 100 à 149 sièges serait substantiellement affectée par l’aide litigieuse au regard, notamment, de la part des recettes provenant de ce marché, par l’intermédiaire de la vente de ses avions E 190 et E 195. L’exercice des droits procéduraux de Short Brothers et Bombardier implique donc qu’ils soient en mesure d’avoir accès aux informations concernant la part des recettes d’Embraer provenant de la vente des avions actifs sur ce marché aux fins de pouvoir utilement faire valoir leurs observations sur cette allégation des requérantes.

38      Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que la balance des intérêts en présence conduit à la communication d’informations dont le maintien du caractère secret ou confidentiel peut apparaître douteux et qui sont nécessaires à l’exercice des droits procéduraux de Short Brothers et Bombardier.

39      Il convient, dès lors, de rejeter la demande de confidentialité en ce qu’elle concerne les éléments occultés aux points 42 de la requête, 21 de la réplique, 45 des observations des requérantes sur le mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et à la note de bas page de n° 51 des observations des requérantes sur le mémoire en intervention de Short Brothers et Bombardier ainsi que l’annexe A.15 de la requête.

40      S’agissant, en troisième lieu, des points 37, 54 à 62 et des éléments occultés au point 226 de l’annexe A.5 de la requête (« Version confidentielle de la [plainte] »), ainsi que de la note de bas de page n° 26 du mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, les requérantes justifient leur demande de confidentialité par la circonstance que leur plainte contient des précisions sur leurs activités commerciales, listes de clients, et informations sur les investissements en matière de recherche et de développement.

41      Short Brothers et Bombardier notent que la demande des requérantes ne comprend aucune explication quant aux informations dont elles demandent la confidentialité. Elles soulignent, en outre, que la liste des clients d’Embraer figurant au point 37 de l’annexe A.5 revêt un caractère public. Quant aux points 54 à 62 de l’annexe A.5, ils seraient déjà en la possession de Short Brothers et Bombardier, dès lors qu’ils n’ont été que très peu modifiés dans la version non confidentielle de la plainte que leur a fournie la Commission. Enfin, elles affirment que la communication de l’annexe A.5 dans son ensemble est nécessaire au bon exercice de leurs droits procéduraux.

42      En ce qui concerne, premièrement, la liste des clients figurant au point 37 de l’annexe A.5, il y a lieu de souligner qu’il ressort des documents fournis par Short Brothers et Bombardier et provenant d’Embraer (annexes O.5 « Extrait du site internet d’Embraer montrant des clients », O.6 « Communiqué de presse [du 17 janvier 2011], Embraer termine l’année 2010 avec 246 aéronefs livrés » et O.7 «Who is flying E-Jets? »), que celui-ci dévoile l’identité de certains de ses clients sur son site internet ainsi que dans différents documents accessibles au public. Partant, les requérantes ne sauraient alléguer qu’une telle information revêt un caractère confidentiel ou secret. Certes, la liste présente au point 37 de l’annexe A.5 apparaît plus complète que celle qui peut être déduite de la lecture des annexes O.5, O.6 et O.7. Toutefois, dans un contexte de communication tout au moins partielle de l’identité des clients d’Embraer, il appartenait aux requérantes de déterminer ceux des clients présents au point 37 de l’annexe A.5 dont l’identité a conservé un caractère secret ou confidentiel et de limiter sa demande de confidentialité à ceux-ci. En l’absence de précision sur ce point, il y a lieu de rejeter la demande de confidentialité à l’égard du point 37 dans son ensemble.

43      En ce qui concerne, deuxièmement, les points 54 à 62 de l’annexe A.5, il ressort de l’annexe O.8. (« Extraits d’une version non confidentielle de la plainte d’Embraer ») que Short Brothers et Bombardier se sont vues communiquer par la Commission une version de la plainte des requérantes contenant plusieurs des éléments dont les requérantes demandent la confidentialité. Il en découle nécessairement que de tels éléments ne revêtent plus un caractère secret ou confidentiel à l’égard de Short Brothers et Bombardier. Il en est ainsi du point 54 dans son ensemble, du point 55, premier alinéa, débutant par « PC-12 », ainsi que du dernier alinéa débutant par « Boeing », du point 56 dans son ensemble, du point 57 à l’exception du tableau y figurant, des points 58 à 60 dans leur ensemble, du point 61 à l’exception du tableau y figurant et du point 62 dans son ensemble.

44      En ce qui concerne, troisièmement, les éléments occultés au point 226 de l’annexe A.5 ainsi que les passages des points 55, 57 et 61 de cette même annexe dont Short Brothers et Bombardier n’ont pas démontré avoir connaissance, il convient de conclure qu’ils disposent d’un caractère secret ou confidentiel par nature. En outre, dans la mesure où Short Brothers et Bombardier ne précisent pas en quoi la connaissance de ces informations serait nécessaire à l’exercice de leurs droits procéduraux, la balance des intérêts en présence conduit à accepter la demande de confidentialité à leur égard.

45      S’agissant, en quatrième lieu, de l’annexe A.28 (« Prévisions de marché d’Embraer ») et de la note de bas de page 50 du mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, les requérantes justifient leur demande de confidentialité par le caractère secret ou confidentiel de leurs prévisions en ce qui concerne l’évolution du marché des avions finis de 100 à 149 sièges.

46      Short Brothers et Bombardier soulignent le caractère sommaire de la motivation de la demande de confidentialité en ce qui concerne l’annexe A.28. Ils notent également que des prévisions sur l’évolution du marché sont fréquemment publiées par les producteurs d’avions, y compris Embraer. Ils observent, en outre, en substance, que l’annexe A.28 sert de justification à l’affirmation contenue dans la requête selon laquelle leurs avions obtiendraient une part de marché de 33% et estiment que l’exercice de leurs droits procéduraux implique qu’ils soient en mesure de vérifier la véracité de cette affirmation aux fins de pouvoir utilement présenter leurs observations sur le premier et le quatrième moyens des requérantes.

47      L’annexe A.28 est constituée d’un tableau présentant les prévisions d’Embraer quant à l’évolution des ventes des différents avions sur la période 2014-2027. Ainsi que le démontrent les éléments de preuve avancés par Short Brothers et Bombardier (annexe O.9 « Document d’Embraer, Perspective de marché 2010-2019 ») ou par les requérantes elles-mêmes (annexe A.29 « Perspectives actuelles de marché de Boeing 2008-2027 » et annexe A.30 « Prévisions globales de marché d’Airbus 2007-2026 »), la publication de prévisions quant aux ventes dans le secteur aéronautique apparaît relativement commune. Certes, de telles estimations ne concernent pas nécessairement le marché spécifique des avions de 100 à 149 sièges. Toutefois, la publication même de ces prévisions tend à les ranger dans la catégorie des pièces ou informations susceptibles de revêtir un caractère secret ou confidentiel pour un motif qu’il appartient au demandeur de rapporter, plutôt que dans celle des informations secrètes ou confidentielles par nature. Dans ces conditions, la seule mention de ce que l’annexe A.28 comprend des « Prévisions sur le marché de la requérante » n’est pas susceptible de démontrer son caractère confidentiel.

48      En toute hypothèse, il convient de souligner que la balance des intérêts en présence devrait conduire à la communication des informations qu’elle contient à Short Brothers et Bombardier. Dans la mesure où les requérantes font grief à la Commission d’avoir retenu que les avions produits par Short Brothers et Bombardier obtiendraient une part de marché de l’ordre de 15 à 25% alors qu’elles l’estiment à 33%, l’exercice des droits procéduraux de Short Brothers et Bombardier implique que celles-ci soient en mesure de connaître les informations sur la base desquelles se fondent les requérantes, aux fins de pouvoir utilement faire valoir leurs observations.

49      Il convient dès lors de rejeter la demande de confidentialité en ce qui concerne l’annexe A.28. Il en va de même des éléments occultés à la note de bas de page 50 du mémoire en intervention du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, en ce qu’ils consistent en un simple renvoi à l’annexe A.28 et ne sauraient, dès lors, disposer d’un quelconque caractère confidentiel ou secret.

Par ces motifs,

LE PRESIDENT DE LA SEPTIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      Il est fait droit aux demandes de traitement confidentiel, à l’égard de Short Brothers plc et Bombardier, Inc., du point 55 (deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas), des tableaux figurant aux points 57 et 61, et des éléments occultés au point 226 de l’annexe A.5 de la requête.

2)      Les demandes de traitement confidentiel sont rejetées pour le surplus. 

3)      Une version non confidentielle de la requête, conforme au point 1) du présent dispositif, communiquée par les requérantes dans le délai imparti par le greffier, sera signifiée par les soins du greffier à Short Brothers et Bombardier.

4)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 24 avril 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       A. Dittrich


* Langue de procédure : l'anglais.