Language of document : ECLI:EU:T:2013:435

ORDONNANCE du président de la première chambre du TRIBUNAL

3 septembre 2013(*)

« Intervention »

Dans l’affaire T-486/11,

Telekomunikacja Polska SA, établie à Varsovie (Pologne), représentée initialement par Mes M. Modzelewska de Raad, P. Paśnik et S. Hautbourg, avocats, M. C. Vajda, QC, et Mme A. Howard, barrister, puis par Mes Modzelewska de Raad, Paśnik et Hautbourg, avocats, et Mme  Howard, barrister,

partie requérante,

soutenue par

Polska Izba Informatyki i Telekomunikacji, établie à Varsovie (Pologne), représentée par Me P. Rosiak, avocat,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes K. Mojzesowicz, G. Koleva et M. L. Malferrari, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Netia SA, établie à Varsovie (Pologne), représentée par MM. P. Alexiadis et E. Dziadykiewicz, solicitors,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission, du 22 juin 2011, relative à une procédure d’application de l’article 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) (Affaire COMP/39.525 – Telekomunikacja Polska) [notifiée sous le numéro C (2011) 4378] (JO C 334, p. 7),

LE président de la première chambre du TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Faits et procédure

1        Par décision du 22 juin 2011, relative à une procédure d’application de l’article 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) (Affaire COMP/39.525 – Telekomunikacja Polska), (ci-après la « décision attaquée »), la Commission a constaté que Telekomunikacja Polska S.A. (ci-après « TP »), unique fournisseur des offres de gros LLU (dégroupage de la boucle locale) et BSA (accès haut débit) pour l’accès à l’Internet à large bande en Pologne, a violé l’article 102 TFUE en refusant de donner accès à son réseau et de fournir les produits de gros BSA et LLU à des opérateurs alternatifs sur le marché de détail de l’accès à l’Internet fixe à large bande et lui a, à ce titre, imposé une amende de 127 554 194 euros.

2        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 septembre 2011, la requérante a introduit un recours, enregistré sous le numéro T-486/11, visant, à titre principal, l’annulation de la décision attaquée et, à titre subsidiaire, l’annulation ou la réduction de l’amende infligée.

3        En vertu de l’article 24, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, le résumé de la requête introductive d’instance dans la présente affaire a été publié au Journal officiel de l’Union européenne le 19 novembre 2011(JO C 340, p. 27).

4        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 23 décembre 2011, Netia S.A. (ci-après « Netia ») a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

5        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 28 décembre 2011, Polska Izba Informatyki i Telekomunikacji (ci-après « PIIT ») a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la requérante.

6        Par ordonnance du 29 juin 2012, le président de la première chambre du Tribunal a admis l’intervention de Netia.

7        Par ordonnance du 7 novembre 2012, le président de la première chambre a admis l’intervention de PIIT.

8        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 24 janvier 2013, European Competitive Telecommunications Association (ci-après l’« ECTA ») a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

9        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 13 février 2013, la Commission a indiqué qu’elle n’avait pas d’objection à ce qu’ECTA soit admise en tant qu’intervenante au soutien de ses conclusions.

10      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 15 février 2013, TP a soulevé des objections à l’encontre de cette intervention.

 En droit

11      En vertu de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, dudit statut, toute personne pouvant justifier d’un intérêt à la solution d’un litige autre qu’un litige entre États membres, entre institutions de l’Union ou entre États membres, d’une part, et institutions de l’Union, d’autre part, est en droit d’intervenir à ce litige.

12      La notion d’intérêt à la solution du litige doit se définir au regard de l’objet même du litige et s’entendre comme un intérêt direct et actuel au sort réservé aux conclusions elles-mêmes, et non comme un intérêt par rapport aux moyens et aux arguments soulevés (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 12 avril 1978, Amylum e.a./Conseil et Commission, 116/77, 124/77 et 143/77, Rec. p. 893, points 7 et 9, et ordonnance du Tribunal du 25 février 2003, BASF/Commission, T‑15/02, Rec. p. II-213, point 26).

13      Conformément à une jurisprudence constante, l’association représentative ayant pour objet la protection de ses membres, qui demande à intervenir dans un litige soulevant des questions de principe de nature à affecter ces derniers, justifie d’un tel intérêt [voir, en ce sens, ordonnances du président de la Cour du 17 juin 1997, National Power et PowerGen/British Coal et Commission, C-151/97 P(I) et C‑157/97 P(I), Rec. p. I-3491, point 66, et du 28 septembre 1998, Pharos/Commission, C-151/98 P, Rec. p. I‑5441, point 6]. Plus particulièrement, une association peut être admise à intervenir dans une affaire si elle est représentative d’un nombre important d’opérateurs actifs dans le secteur concerné, ses objets incluent celui de la protection des intérêts de ses membres, l’affaire peut soulever des questions de principe affectant le fonctionnement du secteur concerné et, donc, les intérêts de ses membres peuvent être affectés dans une mesure importante par l’arrêt à venir (voir ordonnance du président de la première chambre du Tribunal du 26 février 2007, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission, T‑253/03, Rec. p. II-479, point 15, et la jurisprudence citée). Cette interprétation large du droit d’intervention vise à permettre de mieux apprécier le cadre des affaires tout en évitant une multiplicité d’interventions individuelles qui compromettraient l’efficacité et le bon déroulement de la procédure (ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 9 mars 2005, Microsoft/Commission, T-201/04, non publiée au Recueil, point 31).

14      Par ailleurs, il convient de rappeler que, conformément à l’article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, si la demande d’intervention a été présentée après l’expiration du délai de six semaines prévu à l’article 115, paragraphe 1, dudit règlement, l’intervenant peut, sur la base du rapport d’audience qui lui est communiqué, présenter ses observations lors de la procédure orale.

15      En l’espèce, il convient d’observer que, ainsi qu’il ressort de l’article 2 de ses statuts, l’ECTA est une association d’entreprises regroupant des opérateurs du secteur des communications électroniques engagés dans une démarche pro-compétitive en Europe et ailleurs.

16      Il ressort également de l’annexe A desdits statuts, que l’ECTA a pour buts de promouvoir la libéralisation et la concurrence dans les marchés des télécommunications, de représenter les intérêts des opérateurs de télécommunication pro-compétitifs auprès de gouvernements et d’instances de régulations clés, d’assister les entrants sur le marché à travers des politiques pro-compétitives, de maintenir un forum pour la mise en réseau et le développement des affaires en Europe et, enfin, de refléter de façon continue la nature dynamique de l’industrie des télécommunications.

17      Par ailleurs, il ressort de la liste des membres de l’ECTA, que ceux-ci comprennent des opérateurs exerçant une activité significative dans le secteur des télécommunications en Europe ainsi que plusieurs associations elles-mêmes représentatives de tels opérateurs. L’ECTA peut dès lors être considérée comme une association représentative dans le secteur des télécommunications.

18      La requérante soutient que, premièrement, l’ECTA ne dispose pas d’un intérêt suffisant quant à la solution du présent litige. La requérante fait ainsi valoir que le présent litige est relatif à une amende imposée à une entreprise individuelle, concernant une situation passée en Pologne dans des circonstances particulières, qui ne soulève pas de question de principe affectant le secteur des télécommunications en général. Deuxièmement, la requérante soutient que l’argument avancé par l’ECTA dans sa demande d’intervention selon lequel elle pourrait apporter la preuve de ce qui constitue les « Best practices » concernant la pénétration de l’Internet à bande large à travers tous les États membres de l’Union européenne, ne serait pas pertinent dans le cadre du présent litige. En outre, une telle preuve ne pourrait pas être produite de façon équitable lors de la procédure orale. Troisièmement, la requérante soutient que le président de l’ECTA est le « Chief Legal Officer » de Netia et un membre du « Management Board » de cette dernière. Il en découlerait que l’ECTA n’a aucun intérêt réel à la solution du litige et ne pourrait rien ajouter de pertinent aux longues écritures de la Commission et de Netia elle-même.

19      À cet égard, tout d’abord, il y a lieu de constater que le présent litige a trait à la légalité d’une décision par laquelle la Commission a estimé que les pratiques de la requérante, seul opérateur sur le marché de gros de l’accès à l’Internet à large bande en Pologne, qui ont consisté, du 3 août 2005 au 22 octobre 2009, à priver d’accès à ses produits ses concurrents sur le marché de détail de l’accès à l’Internet à large bande, étaient constitutives d’une infraction unique et continue à l’article 102 TFUE. Dès lors, la présente affaire est susceptible de soulever des questions de principe affectant le fonctionnement du secteur concerné et, donc, les intérêts des membres de l’ECTA peuvent être affectés dans une mesure importante par l’arrêt à venir.

20      Ensuite, eu égard à la nature des pratiques de la requérante qui ont fait l’objet de la décision attaquée, la proposition de l’ECTA dans sa demande d’intervention d’apporter des précisions dans le cadre de la procédure orale quant à ce qu’elle considère comme étant les « Best practices » concernant la pénétration de l’Internet à large bande et le dégroupage de la boucle locale dans l’Union européenne apparait pertinente. S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel le fait de laisser la possibilité à l’ECTA de rapporter la preuve lors de l’audience quant à l’existence de ces « Best practices » pourrait porter atteinte à son droit à un procès équitable, il convient de rappeler que la procédure orale a un caractère contradictoire et que la requérante aura donc, en tout état de cause, l’occasion de prendre position sur tout élément de preuve qui serait produit par l’ECTA lors de cette phase de la procédure.

21      Enfin, pour ce qui est de l’argument de la requérante selon lequel l’intervention de l’ECTA n’apporterait rien de plus par rapport aux écritures de la Commission et de Netia au motif que le président de l’ECTA serait le responsable du service juridique de Netia dont il serait également membre du conseil d’administration, il convient de relever qu’un tel argument repose sur l’idée que l’intervention de l’ECTA ne reflèterait que la position de son président et donc de Netia. Or, il y a lieu de relever que, d’une part, la requérante ne rapporte pas la preuve que l’intervention de l’ECTA viserait uniquement à refléter la position de Netia et, d’autre part, il ressort de la déclaration signée par le président et le Trésorier de l’ECTA annexée à la demande d’intervention, que la décision d’autoriser le secrétaire général et le vice-président de l’ECTA à signer le pouvoir autorisant les représentants de l’ECTA à déposer une demande d’intervention dans la présente affaire a été prise à l’unanimité des membres du conseil d’administration de l’ECTA.

22      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que l’ECTA a dûment justifié son intérêt à la solution du litige. En outre, sa demande d’intervention a été produite conformément à l’article 115, paragraphe 2, du règlement de procédure. Partant, il y a lieu de l’admettre, conformément à l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de son article 53, premier alinéa.

23      Ladite demande n’ayant pas été présentée avant l’expiration du délai de six semaines qui prend cours à la publication au Journal officiel de l'Union européenne de la communication visée par l’article 24, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, l’intervention de l’ECTA devra se limiter à présenter des observations lors de la procédure orale, en vertu de l’article 116, paragraphe 6, dudit règlement. De ce fait, l’ECTA ne pourra obtenir communication, le moment venu, que du seul rapport d’audience qui sera rédigé dans la présente affaire. Les droits de la partie intervenante seront ceux prévus à l'article 116, paragraphe 6, dudit règlement.

 Sur les dépens

24      L'article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, prévoit qu'il est statué sur les dépens dans l'arrêt ou l'ordonnance qui met fin à l'instance.

25      À ce stade de l'instance, les dépens doivent donc être réservés.

Par ces motifs,

LE Président de la première chambre du TRIBUNAL

ordonne :

1)      European Competitive Telecommunications Association est admise à intervenir dans l’affaire T-486/11 au soutien des conclusions de la Commission. Conformément aux dispositions de l’article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, le greffier lui communiquera en temps utile le rapport d’audience en vue de la présentation de ses observations éventuelles lors de la procédure orale.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 3 septembre 2013.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. Azizi


* Langue de procédure : l’anglais.