Language of document : ECLI:EU:T:2012:197

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

24 avril 2012 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale EcoPerfect  –  Motif absolu de refus – Caractère descriptif –  Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑328/11,

Leifheit AG, établie à Nassau (Allemagne), représentée par Me G. Hasselblatt, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme K. Klüpfel, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 31 mars 2011 (affaire R 1658/2010‑1), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal EcoPerfect comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová, président, K. Jürimäe et M. M. van der Woude (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 21 juin 2011,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 23 septembre 2011,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 24 novembre 2009, la requérante, Leifheit AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal EcoPerfect.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 21 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine (à l’exception de ceux en métaux précieux ou plaqués) ; peignes et éponges (à l’exception des pinceaux) ; matériaux pour la brosserie ; matériel de nettoyage ; paille de fer ; verre brut ou mi-ouvré (à l’exception du verre de construction) ; verrerie, porcelaine et faïence, dans la mesure où elles sont comprises dans la classe 21 ; balais ; plumeaux ; instruments de nettoyage des sols actionnés manuellement ; instruments de brossage de tapis actionnés manuellement ; matériel de nettoyage (non électrique) ; instruments de nettoyage actionnés manuellement, notamment dépoussiéreurs, serpillières, essuie-meubles et torchons [chiffons] de nettoyage, tampons à nettoyer, étoupe de nettoyage ; raclettes actionnées manuellement (instruments de nettoyage) ; seaux, notamment avec supports intégrés ou surélevés pour essorer ; dispositifs pour essorer les torchons [chiffons] et les instruments de nettoyage ; instruments de nettoyage actionnés manuellement pour les ustensiles pour le ménage ; essoreuses pour serpillières ; brosses pour les sols ; plumeaux ; torchons [chiffons] pour les fenêtres ; planches à repasser ; tables à repasser ; housses pour planches et tables à repasser ; supports muraux pour tables à repasser ; supports de fer à repasser ; accessoires pour tables à repasser, à savoir planches à repasser les manches, tapis anti-dérapant et de repassage, accessoires pour tables à repasser, guides-cordons non électriques ; étendoirs ; pinces à linge ; séchoirs non électriques ».

4        Par décision du 6 juillet 2010, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement pour tous les produits en cause, en considérant, d’une part, que la marque EcoPerfect était descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, et, d’autre part, qu’elle ne revêtait pas un caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

5        Le 26 août 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 31 mars 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours.

7        Premièrement, la chambre de recours a considéré, aux points 11 et 12 de la décision attaquée, que le public pertinent à l’égard duquel il fallait examiner la demande d’enregistrement de la marque englobait, d’une part, les consommateurs moyens d’ustensiles de ménage et, d’autre part, les professionnels qui fabriquent de tels ustensiles ou qui les utilisent dans l’industrie. Étant donné que le signe EcoPerfect se compose de deux termes (« eco » et « perfect ») qui font partie de la langue anglaise, la chambre de recours a estimé qu’il convenait de se référer à des consommateurs moyens et des professionnels possédant des connaissances de l’anglais sur le territoire de l’Union européenne.

8        Deuxièmement, la chambre de recours a considéré, aux points 13 à 17 de la décision attaquée, que la marque EcoPerfect serait comprise par le public pertinent comme renvoyant à l’expression « ecologically perfect » (« écologiquement parfait ») sans qu’il soit nécessaire de se livrer à une analyse comportant plusieurs niveaux de réflexion. La chambre de recours a également estimé que le public pertinent ne percevrait pas le signe EcoPerfect comme étant inhabituel, mais comme étant une expression ayant une signification par rapport aux produits visés par la demande d’enregistrement. En particulier, ledit terme serait compris comme désignant, selon les cas, des produits dont le fonctionnement est écologique ou des produits qui ont été fabriqués à partir de matériaux écologiques ou en recourant à des processus de fabrication respectueux de l’environnement. Sur cette base, la chambre de recours a conclu que le signe EcoPerfect était une indication descriptive des produits visés, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

9        Troisièmement, la chambre de recours a considéré, aux points 18 à 23 de la décision attaquée, que le signe EcoPerfect était, par ailleurs, dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en ce que le public pertinent la percevrait comme un « simple message objectif » et non comme une indication permettant d’identifier l’entreprise dont les produits proviennent.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        faire droit à la publication de la marque communautaire EcoPerfect ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

11      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      À l’appui du recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens tirés, premièrement, d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et, deuxièmement, d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009

13      Dans le cadre du premier moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, dès lors que le signe EcoPerfect n’est pas descriptif des produits visés par la demande d’enregistrement de la marque en cause.

14      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». Selon le paragraphe 2 du même article, « [l]e paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

15      L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que ces signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec. p. I‑551, point 62, et la jurisprudence citée).

16      Pour qu’un signe relève de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou de l’une de leurs caractéristiques [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 25]. À cet égard, il doit être précisé que le choix par le législateur du terme « caractéristique » met en exergue le fait que les signes visés par ladite disposition ne sont que ceux qui servent à désigner une propriété, facilement reconnaissable par les milieux intéressés, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par les milieux intéressés comme une description de l’une desdites caractéristiques (voir arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, non encore publié au Recueil, point 50, et la jurisprudence citée).

17      Il en ressort que le caractère descriptif d’un signe doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent qui est constitué par les consommateurs de ces produits ou de ces services [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 juin 2007, Europig/OHMI (EUROPIG), T‑207/06, Rec. p. II‑1961, point 30].

18      Lors de son examen, la chambre de recours est tenue de procéder à l’appréciation du caractère descriptif de la marque considérée dans son ensemble (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 avril 2007, OHMI/Celltech, C‑273/05 P, Rec. p. I‑2883, points 78 à 80).

19      Une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits ou de ces services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sauf s’il existe un écart perceptible entre le néologisme ou le mot et la simple addition des éléments qui le composent. Cela suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le néologisme ou le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, de sorte qu’il prime l’addition desdits éléments. À cet égard, l’analyse du terme en cause au vu des règles lexicales et grammaticales appropriées est également pertinente [voir arrêt du Tribunal du 12 juin 2007, MacLean-Fogg/OHMI (LOKTHREAD), T‑339/05, non publié au Recueil, point 31, et la jurisprudence citée].

20      En l’espèce, il y a lieu de relever, à titre liminaire, que la chambre de recours a constaté, à bon droit, sans être contredite par la requérante, que les produits visés par la demande d’enregistrement de la marque en cause étaient destinés à des consommateurs anglophones et à des professionnels, ayant des connaissances de l’anglais, qui fabriquent ou utilisent les produits en cause, ce public étant situé sur le territoire de l’Union. Il convient, dès lors, de se référer à la manière dont un public anglophone averti, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, percevrait le signe en cause.

21      À l’appui du moyen, la requérante avance, en substance, quatre arguments tirés, premièrement, des particularités du signe EcoPerfect, deuxièmement, de la nécessité, pour le public pertinent, de se livrer à une analyse comportant plusieurs niveaux de réflexion pour déduire le caractère descriptif du signe en cause par rapport aux produits visés, troisièmement, de l’absence d’analyse faite par la chambre de recours, produit par produit, des motifs de refus allégués et, quatrièmement, de l’absence de prise en considération par la chambre de recours de la pratique décisionnelle de l’OHMI.

 Sur les particularités du signe EcoPerfect

22      La requérante fait valoir que le signe EcoPerfect est un néologisme qui crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des éléments qui le composent et qu’il ne revêt donc pas un caractère descriptif.

23      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

24      Il convient, tout d’abord, d’observer que, contrairement à ce que la requérante fait valoir, la chambre de recours n’a pas affirmé que le terme « eco » était utilisé en tant que tel, de manière isolée, en anglais. La chambre de recours s’est, au contraire, référée à l’existence de ce terme en tant que préfixe.

25      À cet égard, il y a lieu de relever que le préfixe « eco » constitue une abréviation couramment utilisée du terme anglais « ecological » (écologique) et qu’il est perçu ainsi par le public pertinent. Il ne fait pas de doute non plus que le terme anglais « perfect » signifie « parfait » ou « exempt de faute ».

26      S’agissant du terme composé « ecoperfect », force est de constater, à l’instar de la chambre de recours, que ce néologisme sera immédiatement compris par le public pertinent comme étant la juxtaposition des mots « eco » et « perfect » et comme signifiant « écologiquement parfait ».

27      La conclusion de la chambre de recours exposée au point précédent ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

28      Premièrement, la requérante fait valoir que le signe EcoPerfect constitue un néologisme et qu’il ne fait pas partie du vocabulaire de la langue anglaise.

29      Or, conformément à la jurisprudence, l’OHMI n’a pas d’obligation de prouver que le signe en cause figure dans le dictionnaire. Le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur la base de la réglementation pertinente telle qu’interprétée par le juge de l’Union. Dès lors, il suffit que la chambre de recours ait appliqué le critère du caractère descriptif, tel qu’interprété par la jurisprudence, pour prendre sa décision [voir arrêts du Tribunal du 21 janvier 2009, Korsch/OHMI (PharmaCheck), T‑296/07, non publié au Recueil, point 44, et du 17 juin 2009, Korsch/OHMI (PharmaResearch), T‑464/07, non publié au Recueil, point 40, et la jurisprudence citée], ce qui a été le cas en l’espèce.

30      Deuxièmement, la requérante soutient que le terme « ecoperfect » est contraire à l’usage de la langue anglaise en matière d’écologie, car, en anglais, d’autres expressions, comme « environmentally friendly » ou « non-polluting », sont utilisées.

31      Or, il est de jurisprudence constante que, pour que l’OHMI oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il n’est pas nécessaire que les signes et indications composant la marque visée par cet article soient effectivement utilisés au moment de la demande d’enregistrement à des fins descriptives de produits tels que ceux pour lesquels la demande est présentée ou des caractéristiques de ces produits. Il suffit, comme l’indique le contenu même de cette disposition, que ces signes et indications puissent être utilisés à de telles fins (voir arrêts PharmaCheck, précité, point 43, et PharmaResearch, précité, point 39, et la jurisprudence citée).

32      Troisièmement, la requérante fait valoir que la construction du signe EcoPerfect est contraire aux règles linguistiques et grammaticales anglaises, en raison de l’écriture en majuscules de la première lettre des termes « eco » et « perfect », ainsi que de l’absence de tiret ou d’espace entre les deux termes.

33      À cet égard, il convient de souligner que le simple fait qu’un signe soit doté d’une structure grammaticale incorrecte ne permet pas de considérer qu’il crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par les termes qui le composent [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 7 juin 2005, Münchener Rückversicherungs‑Gesellschaft/OHMI (MunichFinancialServices), T‑316/03, Rec. p. II‑1951, point 36].

34      En tout état de cause, force est de constater, en ce qui concerne le fait que les deux termes qui composent le signe EcoPerfect sont juxtaposés sans espace ou tiret et qu’ils commencent par une majuscule, que ces deux facteurs ne sont pas susceptibles de rendre le signe dans son ensemble apte à distinguer les produits d’une entreprise de ceux d’autres entreprises. Cela est d’autant plus vrai que l’éventuel effet d’une juxtaposition sans espace est complètement neutralisé par le fait que le second terme « perfect » commence par une majuscule (arrêt MunichFinancialServices, précité, point 37).

35      Il y a donc lieu de conclure que le signe Eco Perfect ne crée pas, auprès du public pertinent, une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple juxtaposition des termes « eco » et « perfect » et qu’il sera directement compris comme renvoyant à l’expression « ecologically perfect » (écologiquement parfait).

36      Il convient, dès lors, de rejeter comme non fondé l’argument de la requérante relatif aux particularités du signe EcoPerfect.

 Sur la nécessité de procéder à une analyse comportant plusieurs niveaux de réflexion pour déduire la nature descriptive du signe EcoPerfect en ce qui concerne les produits en cause

37      La requérante fait valoir que le signe EcoPerfect fait vaguement référence, en tant que « marque évocatrice », au respect de l’environnement. Pour parvenir à la conclusion de la chambre de recours, selon laquelle les produits en cause seraient réputés être fabriqués de manière écologique ou être particulièrement écologiques, il faudrait se livrer à une analyse, à plusieurs niveaux de réflexion, notamment aboutissant à établir un lien entre la notion de « perfect » et le processus de fabrication des produits en cause. Il n’existerait donc pas de rapport direct et concret entre le signe EcoPerfect et la description des produits concernés.

38      L’OHMI conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

39      Il convient de rappeler que l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 interdit l’enregistrement des marques pouvant servir, dans le commerce, pour désigner non seulement « l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service [en cause] », mais également « d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

40      Comme il a été indiqué au point 16 ci-dessus, par « caractéristiques » il faut comprendre les propriétés, facilement reconnaissables par les milieux intéressés, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé (voir, en ce sens, arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, point 50, et la jurisprudence citée).

41      Conformément à la jurisprudence, il est indifférent que les caractéristiques décrites par le signe demandé soient essentielles sur le plan commercial ou accessoires, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 n’opérant pas de distinction à cet égard [voir arrêt du Tribunal du 13 novembre 2008, Duro Sweden/OHMI (EASYCOVER), T‑346/07, non publié au Recueil, point 60, et la jurisprudence citée].

42      De même, un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 32, et arrêt du Tribunal du 16 mars 2006, Telefon & Buch/OHMI – Herold Business Data (WEISSE SEITEN), T‑322/03, Rec. p. II‑835, point 92].

43      En l’espèce, il convient de constater, comme le fait valoir à juste titre l’OHMI, que l’adjectif « ecological », auquel renvoie le préfixe « eco », peut être utilisé dans plusieurs sens, pouvant, par exemple, désigner les objectifs écologiques d’un mouvement politique (eco‑politics), une attitude ou conscience respectueuse de l’environnement (eco‑sensitive) ou la construction d’immeubles dans le respect de l’environnement (eco‑architecture).

44      S’agissant du signe EcoPerfect, il renvoie directement à l’expression « ecologically perfect » qui évoque un respect parfait de la nature et de l’environnement.

45      À cet égard, il y a lieu de noter que les consommateurs et les producteurs sont de plus en plus attentifs à la qualité écologique des produits et aux processus de fabrication respectueux de l’environnement. La référence « eco » est souvent utilisée dans le cadre de la commercialisation de biens et de services pour indiquer l’origine écologique du produit ou l’absence d’impact sur l’environnement de son utilisation. Ainsi, la garantie du respect de l’environnement est de nature à influencer la décision d’achat tant des consommateurs que des professionnels.

46      Comme souligné, à juste titre, par la chambre de recours, ce constat est d’autant plus vrai concernant les « ustensiles de ménage et de cuisine » visés dans la demande d’enregistrement. En effet, ces produits sont des biens de consommation, achetés et utilisés de manière régulière, par un grand nombre d’utilisateurs, pour leur environnement personnel, ce qui les confronte directement à la problématique de la propreté et des déchets.

47      Compte tenu des significations potentielles du préfixe « eco » et de l’attention particulière généralement accordée au respect de l’environnement par les producteurs et les consommateurs, notamment lorsqu’il s’agit de leur environnement direct, la chambre de recours a pu conclure, à bon droit, que le public pertinent percevrait facilement le signe EcoPerfect comme faisant référence à des ustensiles de ménage ou de cuisine respectueux de l’environnement, soit en raison de leur mode d’utilisation écologique, soit en raison des matériaux utilisés ou du processus suivi pour leur fabrication. La marque EcoPerfect n’est donc pas purement évocatrice, comme le prétend la requérante, mais elle informe directement et immédiatement le public pertinent de l’origine ou de l’utilisation écologiques des produits en cause.

48      Le signe EcoPerfect pouvant servir à désigner le caractère écologique des produits concernés, il y a lieu de garantir qu’il puisse être utilisé par tous les opérateurs et qu’il ne soit pas réservé à un seul opérateur (voir, en ce sens, arrêt Deutsche SiSi‑Werke/OHMI, précité, point 62).

49      Il y a lieu donc de conclure que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que le signe EcoPerfect renvoyait à des produits respectueux de l’environnement sans qu’il soit nécessaire pour le public pertinent de se livrer à une analyse comportant plusieurs niveaux de réflexion.

50      L’argument de la requérante selon lequel il n’existerait pas de lien direct et concret entre le signe EcoPerfect et les produits concernés doit dès lors être rejeté comme non fondé.

 Sur l’absence d’analyse de la chambre de recours, produit par produit, des motifs de refus allégués

51      La requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas vérifié, pour chacun des produits en cause, les motifs de refus allégués, conformément à la jurisprudence (arrêt de la Cour du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec. p. I‑1619, point 73). Ainsi, par exemple, la référence vague, au point 15 de la décision attaquée, au processus de fabrication écologique de certains produits visés par la demande d’enregistrement serait à peine compréhensible et ne saurait donc être retenue comme motif de refus.

52      L’OHMI conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

53      Il y a lieu de rappeler que, lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services, l’OHMI peut se limiter à une motivation globale pour tous les produits ou services concernés. Cette faculté ne saurait s’étendre qu’à des produits présentant entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils forment une catégorie d’une homogénéité suffisante pour permettre que l’ensemble des considérations de fait et de droit qui constituent la motivation de la décision en cause, d’une part, explicite à suffisance le raisonnement suivi par la chambre de recours pour chacun des produits appartenant à cette catégorie et, d’autre part, puisse être appliqué indifféremment à chacun des produits concernés [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 19 mai 2010, Zeta Europe/OHMI (Superleggera), T‑464/08, non publié au Recueil, point 49, et la jurisprudence citée].

54      La décision attaquée répond à ces exigences dès lors que, à son point 15, il est procédé à la distinction de trois catégories homogènes de produits présentant entre eux un lien suffisamment direct et concret.

55      Comme il a été indiqué aux points 8 et 47 ci-dessus, ces catégories correspondent, premièrement, aux produits pouvant être caractérisés par un mode d’utilisation écologique (comme les ustensiles permettant une économie d’énergie ou pouvant fonctionner avec des produits plus respectueux de l’environnement ou une quantité moindre de produits de nettoyage), deuxièmement, aux produits pouvant être fabriqués à partir de matériaux naturels ou recyclés (comme les peignes, les brosses, les balais, les dépoussiéreurs, les planches à repasser, les étendoirs, etc.) et, troisièmement, aux produits dont le processus de fabrication peut être écologique (comme les produits en verre, en porcelaine ou en faïence).

56      Contrairement à ce que fait valoir la requérante, l’analyse de la chambre de recours concernant ces trois catégories, en particulier, celle se référant aux produits dont le processus de fabrication peut respecter l’environnement, ressort clairement de la décision attaquée. Comme il a été souligné aux points 37 à 50 ci‑dessus, une telle analyse est conforme à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

57      Quant aux produits qui ne sont pas expressément cités au point 15 de la décision attaquée, comme la paille de fer, force est de constater qu’ils présentent un lien suffisamment direct et concret avec les catégories de produits concernées.

58      Sur la base de ce qui précède, il y a lieu d’écarter l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas analysé, produit par produit, les motifs de refus allégués.

 Sur l’absence de prise en considération par la chambre de recours de la pratique décisionnelle de l’OHMI

59      La requérante fait valoir que l’OHMI aurait dû accepter l’enregistrement de la marque EcoPerfect à la lumière de sa pratique décisionnelle. En effet, la requérante souligne que d’autres marques verbales communautaires construites de façon similaire, comme Eco Intelligence, Eco Clic, ECO ATTITUDE, ECO LUXE, PERFECT BROWNIE, Eco logic, ECO BAKE, Café Eco et Aqua Eco, ont été enregistrées pour des produits relevant également de la classe 21.

60      L’OHMI conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

61      Il ressort de la jurisprudence que l’OHMI est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union. Si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’OHMI doit prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (voir, en ce sens, arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, points 73 à 77, et la jurisprudence citée).

62      En l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 13 à 58 ci-dessus, la chambre de recours a considéré, à bon droit, que la marque demandée se heurtait au motif de refus tiré de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, de sorte que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’OHMI.

63      L’argument de la requérante selon lequel l’OHMI aurait dû accepter l’enregistrement de la marque EcoPerfect à la lumière de sa pratique décisionnelle antérieure ne saurait donc être accueilli.

64      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le premier moyen de la requérante doit donc être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

65      Dans le cadre du second moyen, la requérante fait valoir que le signe en cause revêt un caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

66      Le premier moyen avancé par la requérante ayant été rejeté, il n’y a plus lieu d’examiner ce moyen.

67      En effet, dans la mesure où il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire, il n’y a pas lieu de s’interroger sur la question de savoir si, comme ľa estimé la chambre de recours et comme le conteste la requérante, la marque en cause est également dépourvue de tout caractère distinctif [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 septembre 2004, Applied Molecular Evolution/OHMI (APPLIED MOLECULAR EVOLUTION), T‑183/03, Rec. p. II‑3113, point 29].

68      Par conséquent, le recours doit être rejeté dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante visant à faire droit à la publication de la marque communautaire EcoPerfect.

 Sur les dépens

69      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Leifheit AG est condamnée aux dépens.

Pelikánová

Jürimäe

Van der Woude

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 avril 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.