Language of document : ECLI:EU:T:2012:625

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

27 novembre 2012 (*)

« Recours en annulation – Accès aux documents – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Documents relatifs à des décisions de financement concernant des subventions accordées à des organisations non gouvernementales israéliennes et palestiniennes dans le cadre du programme ‘Partenariat pour la paix’ et de l’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme – Refus partiel d’accès – Exception relative à la protection de l’intérêt public en matière de sécurité publique – Obligation de motivation – Recours en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement dépourvu de tout fondement en droit »

Dans l’affaire T‑17/10,

Gerald Steinberg, demeurant à Jérusalem (Israël), représenté par M. T. Asserson, solicitor,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes C. Tufvesson et C. ten Dam, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision SG.E.3/MV/psi D (2009) 3914 de la Commission, du 15 mai 2009, refusant partiellement au requérant l’accès à certains documents relatifs à des décisions de financement concernant des subventions accordées à des organisations non gouvernementales israéliennes et palestiniennes dans le cadre du programme « Partenariat pour la paix » et de l’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme (IEDDH),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, président, V. Vadapalas et K. O’Higgins (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Cadre juridique

1        Le règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), a pour objet de définir les principes, les conditions et les limites du droit d’accès aux documents de ces institutions prévu à l’article 255 CE.

2        Selon l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001 :

« Tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un État membre a un droit d’accès aux documents des institutions, sous réserve des principes, conditions et limites définis par le présent règlement. »

3        Sous l’intitulé « Exceptions », l’article 4 du règlement n° 1049/2001 dispose notamment :

« 1. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où la divulgation porterait atteinte à la protection :

a) de l’intérêt public, en ce qui concerne :

–        la sécurité publique,

–        […]

b) de la vie privée et de l’intégrité de l’individu, notamment en conformité avec la législation communautaire relative à la protection des données à caractère personnel.

2. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection :

–        des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle,

–        […] 

à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé. »

4        Aux termes de l’article 8 du règlement n° 1049/2001, intitulé « Traitement des demandes confirmatives » :

« 1. Les demandes confirmatives sont traitées avec promptitude. Dans un délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande, l’institution soit octroie l’accès au document demandé et le fournit dans le même délai conformément à l’article 10, soit communique, dans une réponse écrite, les motifs de son refus total ou partiel. Si elle refuse totalement ou partiellement l’accès, l’institution informe le demandeur des voies de recours dont il dispose, à savoir former un recours juridictionnel contre l’institution et/ou présenter une plainte au médiateur, selon les conditions prévues respectivement aux articles [255 CE] et [195 CE].

2. À titre exceptionnel, par exemple lorsque la demande porte sur un document très long ou sur un très grand nombre de documents, le délai prévu au paragraphe 1 peut, moyennant information préalable du demandeur et motivation circonstanciée, être prolongé de quinze jours ouvrables.

3. L’absence de réponse de l’institution dans le délai requis est considérée comme une réponse négative, et habilite le demandeur à former un recours juridictionnel contre l’institution et/ou à présenter une plainte au Médiateur, selon les dispositions pertinentes du traité CE. »

 Antécédents du litige

5        Le requérant, M. Gerald Steinberg, est le président de NGO Monitor, une organisation non gouvernementale (ONG) ayant son siège à Jérusalem (Israël).

6        Par lettre du 23 octobre 2008, le requérant a demandé à la Commission des Communautés européennes, sur le fondement du règlement n° 1049/2001, l’accès à une série de documents relatifs à des décisions de financement concernant des subventions accordées à des ONG israéliennes et palestiniennes dans le cadre du programme « Partenariat pour la paix » (ci-après le « PPP ») et de l’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme (IEDDH).

7        Par lettre du 21 novembre 2008 (ci-après la « réponse à la demande initiale »), la Commission a refusé l’accès à ces documents en invoquant les exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous b, à l’article 4, paragraphe 2, et à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001.

8        Par lettre du 27 novembre 2008, le requérant a déposé une demande confirmative, au sens de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001, auprès du secrétaire général de la Commission.

9        Par lettre du 3 décembre 2008, le secrétariat général de la Commission a accusé réception de cette demande confirmative.

10      Par lettre du 5 janvier 2009, le secrétariat général de la Commission a indiqué au requérant qu’il n’était pas encore parvenu à identifier tous les documents qui étaient couverts par la demande d’accès et qu’il n’était donc pas en mesure de procéder à une analyse en bonne et due forme de ces documents. Par conséquent, il a prolongé le délai de réponse de quinze jours ouvrables.

11      Par courriel du 26 janvier 2009, le secrétariat général de la Commission a informé le requérant que sa demande confirmative ne pouvait être traitée dans le délai prolongé au motif qu’elle portait sur des centaines de documents. Il l’a invité, en vertu de l’article 6, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001, à restreindre la portée de sa demande en fournissant une description plus précise du type de documents qu’il souhaitait recevoir ou, si cela n’était pas possible, à classer par ordre de priorité les différentes catégories de documents visées par ladite demande.

12      Par lettre du 5 février 2009, le requérant a indiqué au secrétariat général de la Commission qu’il n’était pas en mesure de restreindre la portée de sa demande. En revanche, il lui a communiqué un ordre de priorité pour les différentes catégories de documents concernées.

13      Par courriel du 4 mars 2009, le secrétariat général de la Commission a informé le requérant que, eu égard au fait qu’il n’avait pas restreint la portée de sa demande, il avait besoin d’un délai supplémentaire pour y répondre et qu’il espérait pouvoir lui communiquer une réponse finale avant la fin du mois d’avril 2009.

14      Par courriel du 29 avril 2009, le secrétariat général de la Commission a indiqué au requérant que l’analyse des documents demandés était achevée, mais qu’un délai supplémentaire était nécessaire pour « formaliser » la réponse finale et préparer les documents d’accompagnement. Il précisait que cette réponse lui serait communiquée au plus tard le 15 mai 2009.

15      Par décision du 15 mai 2009, le secrétaire général de la Commission a accordé au requérant un accès partiel aux documents demandés (ci-après la « décision attaquée »). En substance, il a considéré que les parties non divulguées de ces documents étaient couvertes par l’exception relative à la protection de l’intérêt public en matière de sécurité publique telle qu’elle est prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001, par l’exception relative à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu telle qu’elle est prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001 et par l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux d’un tiers telle qu’elle est prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement n° 1049/2001.

16      La Commission prétend que la décision attaquée était jointe à un courriel envoyé par son secrétariat général au requérant le 15 mai 2009, dans lequel il était indiqué que l’annexe à cette décision, qui contenait une liste de projets ayant bénéficié d’un financement de l’Union ainsi que les documents demandés, expurgés des passages couverts par les exceptions invoquées, figurait sur un CD-ROM qui lui serait transmis par courrier postal.

17      Par lettres des 5, 12 et 16 juillet 2009, le requérant a indiqué au secrétariat général de la Commission que, le 24 mai 2009, il avait reçu de sa part certains documents incomplets, et ce sans la moindre explication sur les raisons pour lesquelles une version intégrale desdits documents ne pouvait lui être fournie.

18      Le 31 juillet 2009, le secrétariat général de la Commission a répondu aux lettres du requérant des 5, 12 et 16 juillet 2009. Il y confirmait que tous les documents visés par la demande d’accès avaient été examinés et lui avaient été envoyés, à tout le moins dans une version expurgée. Par ailleurs, il a joint à sa lettre une liste contenant des informations sur chaque organisation ou projet à l’égard desquels le requérant prétendait que les documents n’avaient pas été divulgués. Enfin, il indiquait notamment que « les informations qui [n’étaient] pas divulguées ainsi que les raisons qui justifi[aient] de ne pas accorder l’accès complet aux documents [étaient] exposées en détail dans la [décision attaquée] » et que celle-ci « expos[ait] la position définitive de la Commission à l’égard de [la] demande d’accès ».

19      Le 17 septembre 2009, le requérant a adressé une lettre au secrétariat général de la Commission, dans laquelle il indiquait qu’il n’avait pas reçu de sa part la décision attaquée, mais uniquement une enveloppe, qui n’était accompagnée par aucune lettre de couverture, contenant un CD-ROM et un document sur lequel figurait la mention manuscrite « annexes de la demande confirmative ». Il invitait le secrétariat général à lui communiquer sans délai la décision attaquée.

20      Les 18 et 19 octobre 2009, le requérant a envoyé de nouveau au secrétariat général de la Commission la même lettre que celle du 17 septembre 2009.

21      Par lettre en date du 10 novembre 2009, envoyée par courrier postal recommandé avec accusé de réception, le secrétariat général de la Commission a transmis au requérant une copie de la décision attaquée ainsi que du courriel d’accompagnement prétendument envoyés le 15 mai 2009.

 Décision attaquée

22      Au point 1 de la décision attaquée, la Commission procède à un rappel des échanges de correspondance intervenus entre elle-même et le requérant préalablement à l’adoption de cette décision.

23      Au point 2 de la décision attaquée, la Commission décrit la portée de la demande d’accès aux documents présentée par le requérant ainsi que le contexte dans lequel cette dernière se situe. Après avoir décrit les objectifs et le fonctionnement du PPP et de l’IEDDH, elle indique que les documents demandés relèvent de quatre catégories et concernent des ONG présentes ou menant des activités en Israël et/ou sur le territoire palestinien occupé et recevant des subventions de l’Union pour lesquelles les décisions de financement ont été prises en 2006, 2007 et 2008 à la suite d’appels à propositions dans le cadre du PPP et de l’IEDDH.

24      La Commission définit les quatre catégories de documents en cause comme suit :

–        catégorie A : 208 grilles d’évaluation de proposition concernant 104 projets lauréats dans le cadre de 9 appels à propositions lancés au titre de l’IEDDH et de 2 appels à propositions lancés au titre du PPP, une demande de subvention directe et une décision concernant un projet dans le cadre du PPP ;

–        catégorie B : 11 rapports d’évaluation/décisions de financement relatifs à 9 appels à propositions lancés au titre de l’IEDDH et à 2 appels à propositions lancés au titre du PPP ;

–        catégorie C : 8 rapports de suivi axé sur les résultats concernant des projets subventionnés au titre de l’IEDDH et du PPP ;

–        catégorie D : 6 audits financiers/vérifications de dépenses concernant des projets subventionnés au titre de l’IEDDH et du PPP.

25      La Commission explique ensuite pourquoi le nombre de documents relevant des catégories C et D est inférieur au nombre de projets financés. Elle ajoute qu’elle joint en annexe à la décision attaquée une liste détaillant les 105 projets qui ont bénéficié d’une subvention de l’Union sur la base des 11 appels à propositions lancés au titre de l’IEDDH et du PPP et qui sont couverts par la demande d’accès du requérant.

26      Enfin, toujours au point 2, la Commission détaille, pour chacune des catégories visées au point précédent, la nature des parties occultées comme suit :

« En ce qui concerne la catégorie A :

i) l’identité d’un fonctionnaire de la Commission dans son rôle d’évaluateur ;

ii) les notes détaillées relatives aux sections et sous-sections individuelles de chaque grille d’évaluation remplie par un fonctionnaire de la Commission dans son rôle d’évaluateur à propos des sujets suivants : capacité financière et opérationnelle, pertinence, méthodologie, durabilité et budget et rapport coûts-efficacité (cela ne s’applique pas aux notes d’évaluation totales) ;

iii) remarques complémentaires faites par un évaluateur.

En ce qui concerne la catégorie B :

i) l’identité des fonctionnaires de la Commission participant aux comités d’évaluation ;

ii) les notes attribuées par les évaluateurs individuels ;

iii) remarques complémentaires faites par le comité d’évaluation dans son ensemble ou par l’un de ses membres ;

En outre, toute information figurant dans les rapports d’évaluation concernant des projets non couverts par [la] demande d’accès [du requérant] a été retirée.

En ce qui concerne la catégorie C :

i) l’identité de la personne responsable du suivi et des fonctionnaires de la Commission impliqués ;

ii) les conclusions du suivi.

En ce qui concerne la catégorie D :

i) l’identité de la société d’audit ;

ii) les conclusions de l’audit. »

27      Aux points 3 à 5 de la décision attaquée, la Commission expose les motifs de son refus d’accorder l’accès aux parties des documents demandés telles que mentionnées au point 26 ci-dessus.

28      Ainsi, au point 3, intitulé « Protection de la sécurité publique », la Commission indique que toutes les parties occultées sont couvertes par l’exception visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001 « [e]u égard aux circonstances particulières dans lesquelles les activités [concernées] sont menées ». À cet égard, elle relève que les projets concernés sont mis en œuvre « dans des circonstances particulièrement difficiles » et concernent des sujets sensibles qui touchent soit aux intérêts particuliers soit aux convictions profondes d’un certain nombre d’organes, tant en Israël que sur le territoire palestinien occupé, que les ONG exercent leurs activités dans un environnement instable et sous la menace constante de conflits armés et qu’il existe un risque élevé que ces activités suscitent des attitudes hostiles pouvant aller de la publication d’articles dans les journaux ou sur Internet jusqu’à la diffusion de courriers haineux, voire jusqu’à des menaces à l’intégrité morale et/ou physique, ce qui pourrait troubler la sécurité publique. La divulgation des parties occultées des documents demandés aurait pour effet de rendre publiques des informations détaillées sur les projets concernés qui pourraient être utilisées pour exercer des pressions sur les personnes concernées, en ce compris des menaces à leur intégrité. La Commission précise que lesdites personnes incluent non seulement les personnes travaillant pour les ONG en cause et les autres bénéficiaires des subventions, mais également les personnes impliquées dans le processus de sélection et d’évaluation des différents projets concernés.

29      Au point 4, intitulé « Protection de la vie privée et de l’intégrité », la Commission relève que les grilles d’évaluation des propositions et les rapports d’évaluation/décisions de financement mentionnent les noms de ses fonctionnaires qui ont participé aux comités d’évaluation des différents appels à propositions. Elle considère que la divulgation de leur identité pourrait les exposer au risque d’être victimes de harcèlement de la part de personnes ou organisations en désaccord avec les conclusions de ces comités. Les sociétés d’audit extérieures et les personnes effectuant des activités de suivi seraient exposées au même risque si leur identité venait à être dévoilée. La Commission en conclut que l’accès aux noms des membres des comités d’évaluation, des sociétés d’audit et des personnes ayant effectué des activités de suivi doit être refusé sur le fondement de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001. Elle estime qu’il en va de même en ce qui concerne les notes spécifiques attribuées aux projets visés par la demande d’accès, les remarques faites par les évaluateurs individuels et les comités d’évaluation et les conclusions des rapports de suivi ex-post, dès lors que, eu égard aux circonstances particulièrement difficiles dans lesquelles les projets concernés sont mis en œuvre par les ONG concernées, le fait de rendre publiques ces informations risquerait de porter atteinte à l’intégrité desdites ONG.

30      Au point 5, intitulé « Protection des intérêts commerciaux », la Commission indique que tous les documents contiennent des informations détaillées sur les ONG concernées, les projets subventionnés et la manière dont ils sont, ou ont été, mis en œuvre. Se référant de nouveau aux circonstances particulières dans lesquelles ces ONG exercent leurs activités, elle fait valoir qu’il existe un risque élevé que ces informations soient utilisées par des groupes ou personnes antagonistes pour porter atteinte à la réputation desdites ONG et, par voie de conséquence, mettre en péril leur capacité à mener à bien leurs activités. Elle en conclut que l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement n° 1049/2001 est applicable auxdites informations.

31      Enfin, au point 6 de la décision attaquée, la Commission examine s’il existe un intérêt public supérieur, au sens de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 1049/2001, justifiant la divulgation des parties occultées des documents demandés. D’une part, elle relève que les exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 1, de ce règlement sont absolues en ce sens qu’elles ne doivent pas être mises en balance avec un éventuel intérêt public supérieur. D’autre part, tout en reconnaissant l’importance de la transparence et de la responsabilisation dans le cadre de l’attribution de fonds de l’Union, elle relève qu’elle ne dispose d’aucun élément susceptible d’indiquer l’existence d’un éventuel intérêt public supérieur et qu’elle a trouvé un juste équilibre entre le principe de transparence et les autres intérêts légitimes en accordant un accès partiel à tous les documents demandés.

 Procédure et conclusions des parties

32      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 janvier 2010, le requérant a introduit le présent recours.

33      Le 7 mai 2010, le Tribunal (quatrième chambre) a adressé au requérant, au titre des mesures d’organisation de la procédure, une demande de renseignements à laquelle ce dernier a répondu dans les délais impartis.

34      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 19 juillet 2010, le requérant a présenté une demande de mesures d’organisation de la procédure tendant à ce que le Tribunal ordonne à la Commission de répondre à une série de questions. Dans les observations qu’elle a présentées à ce sujet dans les délais qui lui avaient été impartis, la Commission s’est opposée à cette demande.

35      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la cinquième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

36       Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        ordonner à la Commission de divulguer sous quinzaine les documents identifiés dans l’annexe A14 de la requête ;

–        condamner la Commission aux dépens.

37      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

38      En vertu de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

39      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, conformément à l’article 111 du règlement de procédure, de statuer sur le présent recours sans ouvrir la procédure orale.

40      À l’appui de son recours, le requérant invoque quatre moyens, tirés de la violation, premièrement, de l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001, deuxièmement, de l’article 4 du règlement n° 1049/2001, troisièmement, de l’article 7 du règlement n° 1049/2001 et, quatrièmement, de l’article 8 du règlement n° 1049/2001.

41      Sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure, la Commission soulève trois griefs d’irrecevabilité à l’encontre des conclusions du requérant. Le premier concerne le point de départ du délai de recours et l’acquisition de la forclusion à l’égard dudit recours. Le deuxième porte sur le chef de conclusions visant à ordonner à la Commission de divulguer les documents énumérés dans l’annexe A14 de la requête. Le troisième concerne la demande d’annulation de la réponse à la demande initiale, formulée au point 51 de la requête.

42      Le Tribunal estime opportun de procéder à l’examen, tout d’abord, des deuxième et troisième griefs d’irrecevabilité soulevés par la Commission et, ensuite, des moyens invoqués par le requérant.

 Sur les deuxième et troisième griefs d’irrecevabilité soulevés par la Commission

 Sur la recevabilité du chef de conclusions visant à ordonner à la Commission de divulguer les documents énumérés dans l’annexe A14 de la requête

43      La Commission soutient que ce chef de conclusions est irrecevable au motif qu’il n’appartient pas au Tribunal de lui adresser des injonctions quant à la manière dont elle devrait exécuter un arrêt rendu dans le cadre d’un recours en annulation.

44      Il ressort d’une jurisprudence constante que le Tribunal ne peut adresser une injonction aux institutions ou se substituer à ces dernières dans le cadre du contrôle de légalité qu’il exerce. Cette limitation du contrôle de légalité s’applique dans tous les domaines contentieux que le Tribunal est susceptible de connaître, y compris celui de l’accès aux documents (voir arrêt de la Cour du 22 janvier 2004, Mattila/Conseil et Commission, C‑353/01 P, Rec. p. I‑1073, point 15, et la jurisprudence citée).

45      Dès lors, le requérant n’est manifestement pas recevable à demander au Tribunal d’ordonner à la Commission de lui accorder l’accès aux documents énumérés dans l’annexe A14 de la requête.

 Sur la recevabilité de la demande d’annulation de la réponse à la demande initiale

46      La Commission fait valoir que la demande du requérant, formulée au point 51 de la requête, visant à obtenir l’annulation de la réponse à la demande initiale est irrecevable au motif qu’il ne s’agit pas d’un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE.

47      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, s’agissant d’actes ou de décisions dont l’élaboration s’effectue en plusieurs phases, ne constituent, en principe, des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation que les mesures qui fixent définitivement la position de l’institution concernée au terme de la procédure, les mesures préliminaires ou de nature purement préparatoire ne pouvant, elles, faire l’objet d’un recours en annulation (arrêts de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, points 9 et 10, et du 10 janvier 2006, Commission/Alvarez Moreno, C‑373/04 P, non publié au Recueil, point 42).

48      Il est également de jurisprudence constante que la procédure d’accès aux documents se déroule en deux temps. La réponse à une demande initiale d’accès aux documents ne constitue qu’une première prise de position, conférant aux requérants la possibilité d’inviter la Commission à réexaminer la position en cause et seule la mesure adoptée par la Commission en réponse à une demande confirmative, qui remplace la prise de position initiale, présente la nature d’une décision et est susceptible de produire des effets juridiques de nature à affecter les intérêts des requérants et, partant, de faire l’objet d’un recours en annulation en vertu de l’article 263 TFUE (ordonnance de la Cour du 15 février 2012, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑208/11 P, non publiée au Recueil, points 29 et 30 ; arrêt du Tribunal du 19 janvier 2010, Co-Frutta/Commission, T‑355/04 et T‑446/04, Rec. p. II‑1, points 34 et 35).

49      Dès lors, la réponse à la demande initiale ne produit pas d’effets juridiques et ne peut être considérée comme constituant un acte attaquable. Il en résulte que le recours doit être rejeté comme manifestement irrecevable en ce qu’il est dirigé contre ladite réponse.

 Sur les moyens invoqués par le requérant

50      Après avoir exposé certaines considérations liminaires, il sera procédé à l’examen du deuxième moyen, puis du premier moyen et, enfin, des troisième et quatrième moyens.

 Considérations liminaires

51      Le règlement n° 1049/2001 vise, comme l’indiquent son article 1er et son article 2, paragraphes 1 et 3, à accorder au public un droit d’accès aux documents des institutions dans tous les domaines d’activité de l’Union, sous réserve de certaines exceptions qu’il définit.

52      Conformément à son considérant 1, ce règlement s’inscrit dans la volonté exprimée à l’article 1er, deuxième alinéa, UE, introduit par le traité d’Amsterdam, de marquer une nouvelle étape dans le processus créant une union sans cesse plus étroite entre les peuples de l’Europe, dans laquelle les décisions sont prises dans le plus grand respect possible du principe d’ouverture et le plus près possible des citoyens. Ainsi que le rappelle le considérant 2 du règlement n° 1049/2001, le droit d’accès du public aux documents des institutions se rattache au caractère démocratique de ces dernières.

53      Selon une jurisprudence constante, les exceptions à l’accès aux documents doivent être interprétées et appliquées de manière stricte, de façon à ne pas tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions (arrêts de la Cour du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, Rec. p. I‑11389, point 66, et du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, Rec. p. I‑4723, point 36).

54      En outre, l’examen requis pour le traitement d’une demande d’accès à des documents doit revêtir un caractère concret. En effet, d’une part, la seule circonstance qu’un document concerne un intérêt protégé par une exception ne saurait suffire à justifier l’application de cette dernière (arrêt du Tribunal du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, Rec. p. II‑1121, point 69). Une telle application ne saurait, en principe, être justifiée que dans l’hypothèse où l’institution a préalablement apprécié, premièrement, si l’accès au document était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé et, deuxièmement, dans les hypothèses visées à l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1049/2001, s’il n’existait pas un intérêt public supérieur justifiant la divulgation du document visé (voir, en ce sens, arrêt Co-Frutta/Commission, point 48 supra, point 123). D’autre part, le risque d’atteinte à l’intérêt protégé doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir arrêt du Tribunal du 11 mars 2009, Borax Europe/Commission, T‑166/05, non publié au Recueil, point 88, et la jurisprudence citée). Cet examen doit ressortir des motifs de la décision (arrêt Verein für Konsumenteninformation/Commission, précité, point 69).

55      Un examen concret et individuel de chaque document est également nécessaire dès lors que, même dans l’hypothèse où il est clair qu’une demande d’accès vise des documents couverts par une exception, seul un tel examen peut permettre à l’institution d’apprécier la possibilité d’accorder un accès partiel au demandeur, conformément à l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 octobre 2000, JT’s Corporation/Commission, T‑123/99, Rec. p. II‑3269, point 46).

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 4 du règlement n° 1049/2001

56      Le requérant fait valoir que, en refusant de lui donner accès aux documents visés par sa demande du 23 octobre 2008, la Commission a violé les dispositions de l’article 4 du règlement n° 1049/2001.

57      Au soutien de ce moyen, en premier lieu, le requérant soutient que « [sa] demande […] n’implique pas que l’on ait recours à l’une des exceptions prévues à l’article 4 » et qu’« aucun argument, fait ou preuve n’a été fourni afin d’étayer le recours à l’une de ces exceptions ». Dans la réplique, il précise que la Commission n’a pas indiqué « quelle(s) exception(s) spécifique(s) s’appliqu[aient] à chaque document » et prétend que la motivation contenue dans la décision attaquée ne permet pas d’établir que chaque document a été évalué individuellement.

58      Dans la réplique également, le requérant précise qu’il conteste que l’accès aux parties non divulguées des documents demandés ait pu être refusé pour des motifs liés à la protection de la sécurité publique, de la vie privée et de l’intégrité de l’individu et des intérêts commerciaux. Il ajoute que les exceptions invoquées n’ont pas été appliquées de manière cohérente, ni interprétées et appliquées de manière stricte.

59      En second lieu, le requérant fait valoir que, en tout état de cause, « la procédure par laquelle des dizaines de millions d’euros de fonds publics sont octroyés à des ONG et à des organisations de la société civile concernées par le conflit arabo-israélien crée un ‘intérêt public supérieur justifiant la divulgation’ ».

60      Selon la Commission, ce deuxième moyen doit être compris en ce sens que le requérant lui fait grief de ne pas avoir suffisamment motivé la décision attaquée. Elle prétend que ce grief n’est pas fondé. Dans la duplique, elle ajoute qu’elle a fait une correcte application des exceptions visées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001 et à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001.

61      Il convient de constater que, dans la décision attaquée, la Commission a considéré que tous les passages occultés des documents demandés étaient couverts par l’exception visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001 et que certains de ces passages étaient également couverts par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), de ce règlement ou par celle prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du même règlement.

62      Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001, les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection de l’intérêt public, en ce qui concerne la sécurité publique.

63      Il y a lieu de rappeler que la décision devant être prise par l’institution en application de la disposition visée au point ci-dessus revêt un caractère complexe et délicat nécessitant un degré de prudence tout particulier, eu égard notamment à la nature singulièrement sensible et essentielle de l’intérêt protégé.

64      Dès lors qu’une telle décision requiert une large marge d’appréciation, le contrôle exercé par le Tribunal sur sa légalité doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation des faits et de détournement de pouvoir (arrêt de la Cour du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, Rec. p. I‑1233, point 34).

65      En premier lieu, le requérant conteste le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne, notamment, cette exception.

66      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et au juge de l’Union d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 63, et Sison/Conseil, point 64 supra, point 80).

67      Dans le cas d’une décision de refus d’accès à un document au titre d’une exception visée à l’article 4 du règlement n° 1049/2001, la motivation doit fournir des explications quant à la question de savoir comment l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par cette exception (arrêts Suède et Turco/Conseil, point 53 supra, point 49, et Borax Europe/Commission, point 54 supra, point 44).

68      Au soutien de son grief tiré d’une insuffisance de motivation, le requérant, premièrement, affirme, de manière tout à fait générale, qu’« aucun argument, fait ou preuve n’a été fourni afin d’étayer le recours à », notamment, l’exception relative à la protection de l’intérêt public en matière de sécurité publique.

69      À cet égard, il suffit de relever que cette affirmation est manifestement non fondée. En effet, ainsi qu’il ressort de l’exposé figurant aux points 2 et 3 de la décision attaquée (voir points 23 et 28 ci-dessus), la Commission a indiqué avec précision les motifs pour lesquels elle considérait que les passages occultés des documents demandés étaient couverts par ladite exception.

70      Deuxièmement, le requérant reproche à la Commission de ne pas avoir indiqué quelle exception s’appliquait spécifiquement à chaque document.

71      Force est de constater que ce reproche est totalement injustifié, s’agissant de l’exception considérée, à savoir celle visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001. En effet, ainsi qu’il a déjà été relevé aux points 28 et 61 ci-dessus, cette exception couvre toutes les parties occultées des documents demandés. Il convient d’ajouter que, dans la décision attaquée, la Commission a détaillé les documents qui étaient couverts par la demande du requérant, en les classant dans quatre catégories (voir points 23 et 24 ci-dessus), ainsi que la nature des passages occultés de ceux-ci (voir point 26 ci-dessus).

72      Troisièmement, le requérant affirme que la motivation contenue dans la décision attaquée ne permet pas d’établir que chaque document a été évalué individuellement.

73      Cette affirmation est manifestement non fondée. En effet, il ressort clairement de la décision attaquée que la Commission a procédé à un examen concret et individuel des documents demandés. Cela est notamment démontré par le fait que chacun desdits documents contient des passages occultés en application de l’exception considérée.

74      Eu égard à ce qui précède, le grief tiré d’une insuffisance de motivation doit être rejeté comme étant manifestement non fondé.

75      En deuxième lieu, le requérant conteste l’applicabilité de l’exception relative à la protection de l’intérêt public en matière de sécurité publique au cas d’espèce.

76      Il ressort de la décision attaquée que le refus d’accès aux passages occultés des documents demandés est, en substance, fondé sur la crainte que les informations détaillées sur les projets en cause qu’ils contiennent puissent être utilisées pour exercer des pressions sur les personnes concernées, pouvant aller de la publication d’articles dans la presse ou sur internet, à la diffusion de courriers haineux, voire jusqu’à des atteintes à leur intégrité physique ou morale et, ainsi, troubler la sécurité publique.

77      Pour conclure à l’existence des risques évoqués ci-dessus, la Commission se fonde sur une série d’éléments tenant aux objectifs du PPP et de l’IEDDH, aux circonstances particulières dans lesquelles les ONG concernées exercent leurs activités et à la nature des projets subventionnés.

78      Ainsi, tout d’abord, au point 2 de la décision attaquée, il est fait référence aux objectifs du PPP et de l’IEDDH, qui sont le programme et l’instrument au titre desquels les subventions faisant l’objet des décisions de financement visées par la demande d’accès du requérant ont été accordées.

79      Le PPP est un programme de l’Union européenne qui soutient des initiatives de la société civile au niveau local et international en faveur de la paix, de la tolérance et de la non-violence au Proche-Orient. Il vise à renforcer et consolider les relations et la coopération directes avec la société civile, fondées sur l’égalité et la réciprocité entre les Israéliens, les Palestiniens et les autres Arabes, et à établir la confiance entre ces différentes parties. Les projets soutenus incluent la définition et la mise en œuvre de mécanismes de gestion des conflits et l’éducation des communautés aux aspects et techniques de gestion des conflits et de promotion de la paix.

80      L’IEDDH est un instrument financier de l’Union européenne pour la promotion de la démocratie et des droits de l’homme dans le monde institué par le règlement (CE) n° 1889/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006 (JO L 386, p. 1). L’aide octroyée au titre de cet instrument vise, en particulier, à renforcer le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, tels qu’ils sont proclamés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée par l’assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948, et dans les autres instruments internationaux et régionaux dédiés aux droits de l’homme, à promouvoir et renforcer la démocratie et les réformes démocratiques dans les pays tiers, essentiellement par le soutien aux organisations de la société civile, à apporter soutien et solidarité aux défenseurs des droits de l’homme et aux victimes de la répression ou d’exactions et à renforcer la société civile qui œuvre dans le domaine de la promotion des droits de l’homme et de la démocratie. L’aide peut être octroyée sans le consentement des gouvernements ou autres autorités publiques des pays tiers concernés.

81      Ensuite, au point 2 de la décision attaquée, il est indiqué que les documents demandés concernent des ONG présentes ou actives en Israël et/ou sur le territoire palestinien occupé. Ainsi qu’il est relevé au point 3 de la décision attaquée, cette région du monde est instable, en proie à de fortes tensions et présente une situation sécuritaire très tendue, avec des risques de confrontations violentes, voire d’affrontements armés. Les ONG, tant israéliennes que palestiniennes, exercent donc leurs activités dans des conditions difficiles. Comme la Commission le précise dans ses écritures, la situation est particulièrement complexe pour les ONG palestiniennes, dès lors que l’Autorité palestinienne de la Cisjordanie et de la bande de Gaza interdit formellement toute coopération entre celles-ci et les ONG israéliennes et que la réalisation, par les ONG palestiniennes, de projets du type de ceux couverts par le PPP ou l’IEDDH peuvent être perçus par certains groupes radicaux comme une activité de collaboration avec Israël.

82      Enfin, toujours au point 3 de la décision attaquée, il est relevé que les projets bénéficiant de subventions de l’Union au titre du PPP ou de l’IEDDH concernent des sujets sensibles qui sont susceptibles d’aller à l’encontre des intérêts particuliers de certains groupes de personnes ou d’entités, situés tant en Israël que sur le territoire palestinien occupé, ou de heurter leurs convictions. Il résulte de la liste de projets figurant sur le CD-ROM annexé à la décision attaquée que, effectivement, ceux-ci concernaient notamment des sujets aussi délicats sur les plans religieux, éthique ou politique que la promotion des droits des femmes palestiniennes, l’égalité de traitement entre hommes et femmes dans le domaine du travail, la violence sexuelle et conjugale, la violence à l’encontre des enfants, le respect des droits de l’homme, la promotion des droits des Palestiniens par l’intermédiaire des médias, les travailleurs migrants victimes de la traite, les relations entre la police et la communauté arabe, l’égalité des droits pour les arabes en Israël, les conditions de détention des Palestiniens emprisonnés en Israël, la promotion de la liberté de mouvement et du droit à un statut pour les résidents palestiniens, la lutte contre la torture, la couverture du conflit israélo-palestinien par les médias et le statut final de Jérusalem.

83      Force est de constater que le requérant ne conteste nullement l’exactitude des faits décrits aux points 78 à 82 ci-dessus ni ne fait valoir le moindre argument de nature à démontrer que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant qu’il existait un risque élevé que les activités des ONG concernées suscitent des attitudes hostiles pouvant aller jusqu’à des atteintes à l’intégrité morale et/ou physique des différents acteurs concernés et, ainsi, troubler la sécurité publique, de sorte qu’il convenait d’occulter dans les documents demandés certaines informations détaillées sur les projets en cause. Il se contente, en substance, de faire valoir des affirmations tout à fait générales.

84      Il convient d’ajouter que le requérant ne prétend pas que la Commission aurait commis un détournement de pouvoir en faisant application, en l’espèce, de l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001 et qu’aucun élément du dossier ne permet de conclure à une méconnaissance des règles de procédure.

85      Partant, le grief tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001 doit être rejeté comme étant manifestement non fondé.

86      En troisième lieu, le requérant reproche à la Commission de ne pas avoir tenu compte du fait qu’il existait, en l’espèce, un intérêt public supérieur justifiant la divulgation intégrale des documents demandés.

87      À cet égard, il suffit de rappeler que les exceptions à l’accès aux documents prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1049/2001 sont rédigées en termes impératifs. Il s’ensuit que les institutions doivent refuser l’accès aux documents relevant de ces exceptions lorsque la preuve des circonstances visées est rapportée et qu’aucune mise en balance avec un « intérêt public supérieur » n’est prévue par le texte, à l’inverse des exceptions mentionnées à l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1049/2001.

88      Il convient d’ajouter que, en tout état de cause, la Commission a examiné s’il existait un tel intérêt public supérieur en l’espèce et a conclu par la négative (voir point 31 ci-dessus).

89      Au vu de tout ce qui précède, il convient de considérer que le requérant n’a pas établi que la Commission avait fait une application incorrecte de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001. Cette exception couvrant l’ensemble des parties occultées des documents demandés, il n’y a pas lieu d’examiner si la Commission a également fait une correcte application des exceptions visées à l’article 4, paragraphe 1, sous b), et à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du même règlement.

90      Par conséquent, le deuxième moyen du recours doit être rejeté comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001

91      Le requérant fait valoir que, en refusant de lui donner accès aux documents visés par sa demande du 23 octobre 2008, la Commission a violé les dispositions de l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001.

92      Il convient de rappeler que même si le règlement n° 1049/2001 vise à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible, ce droit est toutefois soumis, à la lumière du régime d’exceptions prévues à l’article 4 de ce règlement, à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, non encore publié au Recueil, point 53, et la jurisprudence citée). Ainsi, comme le relève à juste titre le requérant, si l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001 prévoit que « [t]out citoyen de l’Union […] a un droit d’accès aux documents des institutions », le même article précise toutefois que c’est « sous réserve des principes, conditions et limites définis par [ledit] règlement ».

93      La demande d’accès ayant été examinée conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous a), premier tiret, du règlement n° 1049/2001, il en résulte que la Commission n’a commis aucune violation de l’article 2, paragraphe 1, dudit règlement (voir points 61 à 90 ci-dessus).

94      Partant, le premier moyen doit être rejeté comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 7 du règlement n° 1049/2001

95      Au point 51 de la requête, le requérant prétend que la réponse à la demande initiale est erronée et doit être annulée au motif qu’elle aurait été adoptée avant que la Commission n’ait examiné les documents demandés.

96      Ce moyen doit être rejeté comme étant manifestement inopérant, dès lors que, ainsi qu’il a été constaté aux points 47 à 49 ci-dessus et ainsi que la Commission le fait valoir à juste titre dans ses écritures, le recours est irrecevable en ce qu’il est dirigé contre la réponse à la demande initiale.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 8 du règlement n° 1049/2001

97      Le requérant fait grief à la Commission d’avoir mis près de six mois pour répondre à sa demande confirmative, méconnaissant ainsi l’article 8 du règlement n° 1049/2001, qui impose de traiter ce type de demande avec promptitude.

98      Force est de constater que, comme la Commission le reconnaît d’ailleurs elle-même dans ses écritures, la demande confirmative du requérant n’a effectivement pas été traitée dans les délais prescrits par l’article 8 du règlement n° 1049/2001. Ainsi, à la suite de cette demande, enregistrée le 3 décembre 2008, le secrétariat général de la Commission, par lettre du 5 janvier 2009, a, conformément à l’article 8, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001, prolongé le délai de réponse de quinze jours ouvrables et a indiqué au requérant que ce délai expirait donc le 26 janvier 2009. Toutefois, par courriel du 26 janvier 2009, il a informé le requérant de son incapacité à répondre à la demande dans le délai ainsi prolongé au motif qu’elle portait sur des centaines de documents. Par courriels des 4 mars et 29 avril 2009, il lui a de nouveau indiqué qu’il avait besoin d’un délai supplémentaire pour répondre à sa demande confirmative.

99      Or, en vertu de l’article 8 du règlement n° 1049/2001, la Commission ne pouvait prolonger le délai initial qu’une seule fois et, à l’expiration du délai prolongé, une décision implicite de refus d’accès est réputée adoptée. À cet égard, il y a lieu de rappeler que le délai prévu par l’article 8, paragraphe 1, de ce règlement a un caractère impératif et ne saurait être prolongé en dehors des circonstances prévues à l’article 8, paragraphe 2, dudit règlement, sauf à priver cet article de tout effet utile, puisque le demandeur ne saurait plus exactement à partir de quelle date il pourrait introduire le recours ou la plainte prévus à l’article 8, paragraphe 3, du même règlement (voir arrêt du Tribunal du 10 décembre 2010, Ryanair/Commission, T‑494/08 à T‑500/08 et T‑509/08, Rec. p. II‑5723, points 38 et 39, et la jurisprudence citée).

100    En l’espèce, l’absence de réponse de la Commission à la demande confirmative dans les délais impartis par l’article 8 du règlement n° 1049/2001 et, singulièrement, à l’issue du délai prolongé pour la première fois, à savoir le 26 janvier 2009, doit être considérée comme une décision implicite de refus d’accès.

101    Conformément à l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001, cette décision implicite aurait pu faire l’objet, de la part du requérant, d’un recours juridictionnel conformément aux dispositions de l’article 263 TFUE ou d’une plainte auprès du Médiateur européen. Le requérant n’a toutefois fait usage d’aucune de ces possibilités, ayant préféré introduire un recours en annulation contre la décision attaquée, par laquelle la Commission a répondu de manière explicite et définitive à sa demande confirmative et, partant, implicitement procédé au retrait de la décision implicite de refus d’accès.

102    Telles sont les seules conséquences juridiques à tirer en l’espèce de l’absence de réponse de la Commission à la demande confirmative dans les délais prescrits. En particulier, cette circonstance n’est pas susceptible d’entacher la décision attaquée d’une illégalité justifiant son annulation.

103    Il s’ensuit que le présent moyen doit être rejeté comme étant manifestement inopérant.

104    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement dépourvu de tout fondement en droit, et ce sans qu’il soit nécessaire d’examiner le premier grief d’irrecevabilité formulé par la Commission.

 Sur la demande de mesures d’organisation de la procédure présentée par le requérant

105    Le requérant invite le Tribunal à ordonner à la Commission, au titre des mesures d’organisation de la procédure, conformément à l’article 64 du règlement de procédure, de répondre à une série de questions destinées, en substance, à préciser et compléter les raisons pour lesquelles elle a estimé que les parties occultées des documents demandés ne pouvaient être divulguées.

106    Ainsi qu’il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent, le Tribunal a pu utilement statuer sur le recours sur la base des conclusions, moyens et arguments développés en cours d’instance et au vu des documents déposés par les parties. Il y a donc lieu de rejeter la demande de mesures d’organisation de la procédure présentée par le requérant.

 Sur les dépens

107    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

108    Le requérant ayant succombé, il y a lieu de décider qu’il supportera, outre ses propres dépens, ceux de la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

2)      M. Gerald Steinberg supportera, outre ses propres dépens, ceux de la Commission européenne.

Fait à Luxembourg, le 27 novembre 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       S. Papasavvas


* Langue de procédure : l’anglais.