Language of document : ECLI:EU:T:2000:214

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

20 septembre 2000 (1)

«Fonctionnaires - Nomination par voie de promotion - Grade LA 3 -

Examen comparatif des mérites»

Dans l'affaire T-220/99,

Joachim Behmer, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Luxembourg (Luxembourg), représenté par Mes J.-N. Louis, G.-F. Parmentier et V. Peere, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la Société de gestion fiduciaire SARL, 13, avenue du Bois,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par MM. H. von Hertzen, chef de division au service juridique, et J. Sant'Anna, membre du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision du 7 janvier 1999, d'une part, en ce qu'elle porte nomination de Mme Dhyvert en qualité de chef de division adjoint à la division de la traduction de langue allemande du Parlement européen et, d'autre part, en ce qu'elle porte rejet de la candidature du requérant à cet emploi,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de Mme V. Tiili, président, MM. R. M. Moura Ramos et P. Mengozzi, juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 13 avril 2000,

rend le présent

Arrêt

Faits

1.
    Le 2 mars 1998, le Parlement européen a publié l'avis de vacance n° 8340 pour l'emploi de chef de division adjoint à la division de la traduction allemande de grade LA 3.

2.
    L'emploi concerné était décrit, dans l'avis, comme suit:

«Le chef de division adjoint est appelé à assister le chef de la division dans toutes ses fonctions notamment dans les domaines:

-    de la gestion du personnel linguistique et de secrétariat et de l'affectation du personnel LA aux tâches de traduction et de révision suivant leurs spécialisations et qualifications;

-    de la planification générale et l'attribution des travaux de la division en prenant toute disposition nécessaire pour tenir compte des priorités et assurer le respect des délais;

-    de l'organisation de tous les aspects matériels de la gestion de la division;

-    du contrôle de la qualité des textes traduits et révisés.

Le chef de division adjoint est appelé à remplacer en cas d'absence le chef de la division.

Ces travaux exigent des qualités d'organisation pour assurer la coordination des ressources humaines et financières disponibles, ainsi que l'aptitude à diriger une équipe nombreuse.»

3.
    Cette description était suivie d'une énumération des «qualifications et connaissances requises»:

«-    Formation de niveau universitaire sanctionnée par un diplôme ou expérience professionnelle garantissant un niveau équivalent;

-    expérience professionnelle dans le domaine de la traduction et de la révision;

-    aptitude à la gestion du personnel et à l'organisation d'une unité administrative;

-    connaissances linguistiques: parfaite maîtrise de la langue allemande; connaissance approfondie de deux autres langues officielles de l'Union européenne; bonne connaissance d'une quatrième de ces langues; la connaissance d'autres langues sera prise en considération.»

4.
    Le requérant, qui est réviseur de grade LA 4, et Mme Dhyvert, qui était traductrice principale de grade LA 4, ont posé leur candidature à l'emploi concerné.

5.
    Les deux candidats ont eu un entretien les 23 et 24 mars 1998, chacun séparément, avec le directeur et avec le directeur général de la direction générale de la traduction (DG VII).

6.
    Les résultats de ces entretiens étaient résumés comme suit dans une note du 16 avril 1998, adressée au directeur du personnel:

«En ce qui concerne les qualifications requises par l'avis de vacance:

-    les deux candidats possèdent les diplômes universitaires et les connaissances linguistiques requises;

-    les deux démontrent des aptitudes au management. M. Behmer d'une façon plus théorique, Mme Dhyvert avec une approche plus pragmatique;

-    Mme Dhyvert est la seule à satisfaire complètement la condition de l'expérience professionnelle de traduction et révision à un niveau approprié et sur une période de temps substantielle.»

7.
    Par note du 19 mai 1998 adressée au président du Parlement, qui était en l'occurrence l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l'«AIPN»), le secrétaire général du Parlement a communiqué les rapports dans lesquels étaient consignés les résultats des entretiens, ainsi que des informations sur les carrières des candidats et leurs deux derniers rapports de notation. Dans cette note, le secrétaire général précisait:

«Sur la base de l'examen des dossiers personnels des candidats, ainsi que du résultat des entretiens, il apparaît que les deux candidats, tant par leur formation que par leur expérience professionnelle, répondent aux exigences de l'avis de vacance d'emploi. Ils ont par ailleurs démontré, au cours des entretiens, qu'ils possèdent les qualités nécessaires pour assumer les tâches de gestion et d'organisation liées aux fonctions de chef de division adjoint. La DG VII a cependant une préférence pour la candidature de Mme Dhyvert qui, de par sa très longue expérience du travail de traduction et révision dans la division de la traduction allemande (21 ans dont 12 dans le grade LA 4), possède une meilleure connaissance du fonctionnement de ce service; elle a par conséquent une approche plus pragmatique de ses problèmes spécifiques et fait preuve de plus de réalisme dans les solutions proposées. Par ailleurs, comme le fait remarquer le directeur général de la traduction et des services généraux, les femmes, largement majoritaires au sein de la division allemande (62 femmes sur un effectif total de 80), sont sous-représentées dans les postes de management de grade LA 3 à la DG VII (6 femmes sur 18 postes LA 3).»

8.
    Le 22 septembre 1998, le contrôleur financier a refusé de donner son visa à la proposition de nomination de Mme Dhyvert. Le 4 novembre 1998, le bureau du Parlement a proposé, sous réserve d'examen de l'avis de la commission du contrôle budgétaire, de passer outre au refus de visa du contrôleur financier, en faisant remarquer que ce refus de visa mettait en cause une décision prise dans le respect des procédures et des attributions de l'AIPN à la suite des appréciations des qualifications et des mérites des candidats.

9.
    Le 18 novembre 1998, le vice-président de la commission du contrôle budgétaire a informé le président du Parlement que cette commission avait décidé de ne pas émettre d'avis sur la proposition de passer outre au refus de visa. Le lendemain, le président du Parlement a signé la décision du bureau de passer outre au refus de visa.

10.
    Par décision du 7 janvier 1999, l'AIPN a promu Mme Dhyvert à l'emploi concerné.

11.
    Par note du 18 janvier 1999, le requérant a reçu notification de cette décision.

12.
    Le 19 avril 1999, le requérant a introduit une réclamation contre la décision en ce qu'elle porte nomination de Mme Dhyvert et rejet de sa candidature.

13.
    Par décision du 1er juillet 1999, l'AIPN a rejeté cette réclamation.

Procédure et conclusions des parties

14.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 septembre 1999, le requérant a introduit le présent recours.

15.
    La procédure écrite s'est terminée le 25 février 2000.

16.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l'audience publique qui s'est déroulée le 13 avril 2000.

17.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la décision en ce qu'elle porte rejet de sa candidature à l'emploi concerné;

-    annuler la décision en ce qu'elle porte nomination de Mme Dhyvert;

-    condamner le défendeur aux dépens.

18.
    Le défendeur conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours;

-    statuer sur les dépens comme de droit.

Sur le fond

19.
    Le requérant invoque trois moyens à l'appui de son recours. Le premier moyen est tiré de la violation des articles 7, 29 et 45 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut») au regard de l'avis de vacance . Le deuxième moyen est tiré de la violation de l'article 25 du statut. Le troisièmemoyen est tiré d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'examen comparatif des mérites et, ainsi, de la méconnaissance de l'article 7 du statut.

Sur le premier moyen, tiré d'une violation des articles 7, 29 et 45 du statut

Arguments des parties

20.
    Le requérant fait valoir qu'il existe un faisceau d'indices suffisamment concordants pour conclure, dans le cas d'espèce, à l'absence d'un véritable examen comparatif des mérites dans le cadre de légalité fixé par l'avis de vacance. L'AIPN aurait ainsi violé les principes et garanties conférés par les articles 29 et 45 du statut, qui expriment en même temps le principe de l'égalité de traitement des fonctionnaires et le principe de vocation des fonctionnaires à la carrière.

21.
    Parmi les indices d'absence d'un réel examen comparatif, le requérant mentionne, entre autres circonstances, le fait que dans sa note du 19 mai 1998 le secrétaire général du Parlement s'est borné à mettre en évidence les qualités de Mme Dhyvert, sans mentionner celles du requérant , le fait que les qualifications des deux candidats ont systématiquement été nivelées par minimisation des différences et le fait que l'AIPN se serait basée sur un résumé du curriculum vitae du requérant et non pas sur le texte intégral dudit document .

22.
    Comparant ses mérites avec ceux de Mme Dhyvert, le requérant fait observer d'abord qu'il dispose d'une expérience de près de dix ans en matière de révision de textes produits par la division de la traduction allemande, ce qui lui a permis d'acquérir une connaissance précise du fonctionnement et des nécessités de ce service, tandis que Mme Dhyvert avait exercé, depuis 1996, sous le régime du télétravail et n'a donc plus travaillé dans le domaine de la révision depuis un certain temps. Dans ce même contexte, le requérant donne aussi un aperçu des congés de convenance personnelle pris par Mme Dhyvert entre 1990 et 1993.

23.
    Le requérant fait observer ensuite que, en étant titulaire d'un diplôme de Master of Business Administration (ci-après le «diplôme MBA»), en ayant participé à une formation interne de chef d'unité, en possédant une expérience de gestion et d'administration d'un parti politique au niveau local et, depuis 20 ans, une expérience syndicale, notamment celle de président de l'Union syndicale-Luxembourg, et, enfin, en ayant travaillé pendant un an comme chef d'unité au ministère de l'Économie du Land de Mecklenbourg-Poméranie, il a une formation et une expérience particulièrement significatives en matière de gestion du personnel et d'organisation d'une unité administrative, tandis que Mme Dhyvert ne possédait au jour de sa nomination aucune formation ou expérience en matière de gestion et d'organisation d'une unité administrative mais était, au contraire, en pratiquant le télétravail depuis un certain temps, privée de la réalité quotidienne de la division. Le requérant conclut que, comme l'AIPN l'aurait par ailleurs admis dans sa décision de rejet de la réclamation, Mme Dhyvert a été choisie exclusivement sur la base d'une présomption, découlant de son entretien avec l'AIPN, selon laquelle elle était apte à la gestion. Le requérant estime qu'une telle présomption étaitinsuffisante pour justifier une nomination, vu le niveau de responsabilité du poste à pourvoir (grade LA 3) . Selon le requérant, l'aptitude à la gestion ne peut se présumer sur la base d'un entretien et certainement pas en l'absence de tout autre élément accréditant cette aptitude.

24.
    Ensuite, le requérant fait observer qu'il connaît, outre l'allemand, dix autres langues. Mme Dhyvert connaîtrait moins de langues. En s'abstenant de tenir compte de cette différence, l'AIPN serait sortie du cadre de légalité de l'avis de vacance, ce dernier précisant que «[l]a connaissance d'autres langues [serait] prise en considération».

25.
    Le requérant souligne encore que l'affirmation, dans la note du 16 avril 1998 adressée au directeur du personnel, selon laquelle Mme Dhyvert était «la seule à satisfaire complètement la condition de l'expérience professionnelle de traduction et révision à un niveau approprié et sur une période substantielle», est manifestement inexacte. À cet égard, le requérant précise qu'il avait quinze ans d'expérience professionnelle dans le domaine de la traduction, dont neuf ans dans celui de la révision. Il aurait été chargé de travailler sur un grand nombre de documents émanant du service de la traduction allemande. En plus, les tâches de «collationnement» et de «mise en forme», accomplies par le requérant au sein de la division du procès-verbal, seraient des tâches de révision de haut niveau.

26.
    Le requérant conclut que, en nommant Mme Dhyvert sans avoir comparé sérieusement et objectivement leurs deux candidatures, l'AIPN aurait pris sa décision dans l'intérêt de Mme Dhyvert et non dans l'intérêt du service . L'AIPN serait, par ailleurs, sortie du cadre de légalité fixé par l'avis de vacance en prenant en compte la plus grande ancienneté de service de Mme Dhyvert à la division de la traduction allemande, sa maîtrise des outils informatiques ainsi qu'une approche pragmatique des problèmes et un plus grand sens de la gestion et des relations humaines. À cet égard, le requérant fait remarquer que l'ancienneté ne saurait être prise en compte pour les nominations au grade LA 3, celles-ci devant être faites exclusivement à la lumière d'un examen comparatif des mérites et des qualifications des candidats au regard de l'avis de vacance. Il fait observer également que ses connaissances informatiques sont au moins équivalentes à celles de Mme Dhyvert, notamment dans le domaine de la publication électronique, notamment sur Internet .

27.
    Le requérant conclut que l'AIPN n'a pu fournir aucun indice permettant d'établir que Mme Dhyvert disposait de qualifications supérieures ou même égales aux siennes et qu'elle remplissait les conditions exigées par l'avis de vacance.

28.
    Le défendeur expose d'abord que Mme Dhyvert possédait les qualifications requises par l'avis de vacance et que, par conséquent, l'AIPN n'a pas dépassé le cadre de légalité fixé par cet avis. À cet égard, le défendeur fait observer que Mme Dhyvert est traductrice au Parlement depuis 1977 et que ses rapports de notation successifspour les périodes 1985 à 1995 font état de travaux de traduction et de révision. En revanche, le requérant aurait été traducteur au service de traduction de la Commission de janvier 1987 à mai 1989, puis a été recruté au Parlement européen à la division du procès-verbal de la séance [relevant de la direction générale «Présidence» (DG I)] et non au service de traduction du Parlement (DG VII), où il n'a jamais travaillé . Le défendeur fait observer également que l'avis de vacance exigeait une aptitude à la gestion du personnel et à l'organisation d'une unité administrative, et non des diplômes ou des certificats, ni même une expérience professionnelle précédente en la matière. Or, Mme Dhyvert aurait démontré, lors de son entretien, avoir l'aptitude requise en matière de gestion du personnel et d'organisation d'une unité administrative, faisant même preuve d'une approche plus pragmatique et réaliste que le requérant. Enfin, le défendeur souligne que Mme Dhyvert satisfaisait pleinement à l'exigence de connaissances linguistiques .

29.
    Ensuite, le défendeur conteste l'affirmation du requérant selon laquelle il n'y aurait pas eu un véritable examen comparatif des mérites des candidats. Il fait observer qu'il résulte clairement du dossier qu'il y a eu un véritable examen comparatif.

30.
    Le défendeur conteste également que le secrétaire général du Parlement se soit borné à mettre en évidence les qualités de Mme Dhyvert. Il cite, à cet égard, la note de transmission du dossier au président du Parlement, dans laquelle le secrétaire général écrit:

«[S]ur la base de l'examen des dossiers personnels des candidats, ainsi que du résultat des entretiens, il apparaît que les deux candidats, tant par leur formation que par leur expérience professionnelle, répondent aux exigences de l'avis de vacance d'emploi.»

Appréciation du Tribunal

31.
    Selon une jurisprudence constante, l'exercice du pouvoir d'appréciation dont dispose l'AIPN en matière de nomination suppose un examen comparatif scrupuleux des dossiers de candidature et une observation consciencieuse des exigences énoncées dans l'avis de vacance. L'avis de vacance constitue, en effet, un cadre légal que l'AIPN s'impose et qu'elle doit respecter scrupuleusement (arrêt de la Cour du 18 mars 1993, Parlement/Frederiksen, C-35/92 P, Rec. p. I-991, points 15 et 16, et arrêt du Tribunal du 19 mars 1997, Giannini/Commission, T-21/96, RecFP p. I-A-69 et II-211, point 19).

32.
    En vue de contrôler si l'AIPN n'a pas dépassé les limites de ce cadre légal et a ainsi agi dans le seul intérêt du service, il appartient au Tribunal de constater d'abord quelles étaient, en l'occurrence, les conditions requises au titre de l'avis de vacance, et de vérifier ensuite si le candidat choisi par l'AIPN pour occuper le poste vacant satisfaisait effectivement à ces conditions (arrêt Parlement/Frederiksen, précité, point 17, et arrêt Giannini/Commission, précité, point 20). Un tel examen n'implique pas que le Tribunal substitue sa propre appréciation des mérites des candidats à celle de l'AIPN, mais se limite à laquestion de savoir si, eu égard aux considérations qui ont pu conduire l'administration à son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée (arrêt du Tribunal du 11 décembre 1991, Frederiksen/Parlement, T-169/89, Rec. p. II-1403, point 69; voir également arrêts de la Cour du 12 février 1987, Bonino/Commission, 233/85, Rec. p. 739, point 5, et du Tribunal du 9 février 1994, Latham/Commission, T-82/91, RecFP p. I-A-15 et II-61, point 62).

33.
    Force est de constater que la candidature de Mme Dhyvert satisfaisait aux conditions requises au titre de l'avis de vacance, énumérées ci-dessus (point 3, ainsi que point 2, in fine).

34.
    Il ressort d'abord du curriculum vitae de Mme Dhyvert que celle-ci dispose du diplôme de traducteur, et qu'elle possède une expérience professionnelle depuis 1977 en tant que traductrice et depuis 1982 en tant que traductrice principale. Il ressort, en outre, de son rapport de notation pour la période du 1er janvier 1993 au 1er janvier 1995 qu'elle a une expérience professionnelle dans le domaine de la révision.

35.
    Ensuite, les données disponibles pour l'AIPN permettaient de croire que Mme Dhyvert possédait une aptitude à la gestion et à l'organisation d'une unité administrative et d'une équipe nombreuse. À cet égard, il est utile de rappeler que l'avis de vacance n'exigeait ni une expérience ni une connaissance en matière de gestion, mais uniquement une aptitude. Par ailleurs, étant donné qu'il est normal que les chefs de division adjoints soient recrutés parmi des fonctionnaires qui n'ont pas encore exercé la fonction de chef d'unité ou de division, il est également normal que l'aptitude à la gestion et à l'organisation soit évaluée à l'aide d'indices tels que les appréciations figurant aux rubriques «Capacité d'organisation - esprit de méthode» et «Relations humaines dans le travail: aptitude au travail collectif, esprit d'équipe; aptitude à faire confiance aux collaborateurs, à leur donner des responsabilités», des rapports de notation et selon la performance du candidat face aux questions posées lors de l'entretien. Or, il s'avère que Mme Dhyvert avait obtenu un «bon» pour lesdites rubriques et avait, selon ses réponses au cours de son entretien figurant dans le compte rendu de celui-ci, fait preuve des qualités requises pour gérer et organiser une équipe.

36.
    Enfin, il ressort du dossier, et notamment du rapport de notation le plus récent de Mme Dhyvert au moment de sa candidature, qu'elle avait, outre la connaissance de sa langue maternelle (l'allemand), une très bonne connaissance de l'anglais, du français et du néerlandais, une bonne connaissance de l'italien et une connaissance passable du danois.

37.
    Il convient de constater, ensuite, que l'AIPN a réellement et scrupuleusement comparé les mérites du requérant avec ceux de Mme Dhyvert. Il ressort, en effet, des documents communiqués par le défendeur au Tribunal que le dossier soumispour décision à l'AIPN comprenait un compte rendu détaillé des entretiens des deux candidats ainsi que les conclusions comparatives tirées par le directeur et le directeur général de la DG VII de leur valeur. Il ressort, en outre, des mêmes documents que lesdits entretiens ont eux-mêmes été détaillés, pertinents et sérieux. Il s'avère, enfin, que le dossier soumis à l'AIPN comportait également le curriculum vitae intégral de chacun des candidats ainsi que leurs rapports de notation et que le contenu de ces documents a réellement servi à comparer les mérites des candidats. Ainsi, dans les conclusions comparatives faisant suite aux entretiens, il est fait état du diplôme MBA du requérant et du parcours professionnel plus varié de celui-ci comparé à celui de Mme Dhyvert.

38.
    Il résulte de ce qui précède que la candidature de Mme Dhyvert satisfaisait aux conditions requises au titre de l'avis de vacance et qu'elle a été examinée et comparée scrupuleusement avec celle du requérant. Quant à la question de savoir si, eu égard aux considérations qui ont pu conduire l'AIPN à son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée lors de l'examen comparatif des mérites des candidats, il convient de constater que les arguments présentés par le requérant à cet égard se confondent avec le troisième moyen. Par conséquent, cette partie des prétentions du requérant sera examinée ci-après dans le cadre du troisième moyen.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l'article 25 du statut

Arguments des parties

39.
    Selon le requérant, le Parlement a méconnu l'obligation de motivation énoncée par l'article 25 du statut. En effet, ni dans les décisions attaquées ni dans la décision de rejet de la réclamation le Parlement n'aurait fourni les éléments objectifs permettant au requérant de comprendre les raisons pour lesquelles la candidature de Mme Dhyvert a été préférée à la sienne et garantissant que le rejet de sa candidature est intervenu sur la base d'un véritable examen comparatif .

40.
    Le défendeur rappelle que l'AIPN n'est pas tenue de motiver les décisions de promotion, notamment à l'égard des candidats non promus. En revanche, il lui incomberait de motiver sa décision portant rejet d'une réclamation introduite par un candidat non promu . Or, l'AIPN aurait précisé, dans sa décision du 1er juillet 1999 rejetant la réclamation du requérant, les motifs qui l'ont amenée à ne pas retenir la candidature de celui-ci.

Appréciation du Tribunal

41.
    Il convient de rappeler que l'AIPN n'est pas tenue de motiver les décisions de promotion ou de mutation à l'égard des candidats non choisis, mais qu'elle est, en revanche, tenue de motiver sa décision portant rejet d'une réclamation introduite par un candidat non choisi (arrêts de la Cour du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, points 11 à 17, et du 9 décembre 1993, Parlement/Volger, C-115/92 P, Rec. p. I-6549, point 22). Or, en l'espèce, la motivation de la décisionde rejet de la réclamation est adéquate. Il y est, en effet, indiqué pour quelles raisons l'AIPN a estimé que la candidature de Mme Dhyvert satisfaisait aux conditions de l'avis de vacance. Il en ressort, de plus, que la candidature du requérant satisfaisait également aux conditions de l'avis et que, finalement, Mme Dhyvert a été choisie à cause de sa connaissance approfondie des services de la traduction, qualité jugée mieux adaptée au profil du poste de chef de division adjoint.

Sur le troisième moyen, tiré d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'examen comparatif des mérites menant à une méconnaissance de l'intérêt du service

Arguments des parties

42.
    Le requérant fait valoir que l'AIPN a commis une erreur manifeste d'appréciation, en considérant comme équivalents les mérites des deux candidats tels qu'ils ressortent des rapports de notation, et qu'elle a méconnu, par conséquent, l'intérêt du service au sens de l'article 7 du statut. Selon le requérant, il ressort d'un examen des derniers rapports de notation des deux candidats que sa notation est globalement supérieure à celle de Mme Dhyvert. En particulier, la notation du requérant apparaîtrait, pour chacune des rubriques pertinentes de l'avis de vacance, soit égale, soit légèrement supérieure à celle de Mme Dhyvert. Par exemple, le requérant a obtenu un «excellent» à la rubrique «Capacités d'initiative et de proposition», alors que Mme Dhyvert n'a obtenu qu'un «bon» pour cette rubrique. Sous la rubrique «Capacités d'organisation et esprit de méthode», le requérant a obtenu un «très bon», alors que Mme Dhyvert n'a reçu qu'un «bon». À la rubrique «Relations dans le travail, aptitudes au travail en équipe», le requérant a obtenu un «très bon», alors que Mme Dhyvert n'a obtenu qu'un «bon». Enfin, il ressortirait des avis émis dans les rapports de notation que, du point de vue de l'expérience, des performances et des dispositions, le requérant est plus qualifié pour l'emploi concerné que Mme Dhyvert. Le requérant souligne que les rapports de notation sont le critère déterminant en matière de promotion .

43.
    Le défendeur réaffirme qu'il était justifié, au regard de l'exigence de l'avis de vacance concernant l'aptitude à la gestion, que l'AIPN ait donné une importance prépondérante aux entretiens effectués, aux réponses obtenues et aux aptitudes que ces réponses ont permis de confirmer, et que l'AIPN ait valorisé l'expérience nettement plus approfondie de Mme Dhyvert des services de la traduction de la DG VII, ainsi que la force de conviction dont faisait preuve Mme Dhyvert lors de son entretien.

44.
    Le défendeur signale également que les rapports de notation des deux candidats ne sont pas directement comparables, étant donné qu'ils ont été établis par deux directions générales différentes, à savoir la DG VII dans le cas de Mme Dhyvert etla DG I dans le cas du requérant. Il explique que, pour permettre une comparaison fiable des mérites évalués dans les rapports de notation, la réglementation du Parlement concernant le régime des promotions prévoit l'application de coefficients correcteurs aux différents rapports de notation. Il expose que, après application des coefficients correcteurs, les points des deux derniers rapports de notation du requérant s'élevaient à 55,25 pour l'année 1995 et à 56 pour l'année 1997, tandis que ceux de Mme Dhyvert s'élevaient respectivement à 55 et à 55,75. Le défendeur conclut qu'une comparaison objective des rapports de notation ne permettait pas de considérer les mérites du requérant comme supérieurs à ceux de Mme Dhyvert.

Appréciation du Tribunal

45.
    Il ressort de la décision rejetant la réclamation du requérant que l'AIPN a considéré que tant Mme Dhyvert que le requérant satisfaisaient aux conditions de l'avis de vacance, que leurs mérites étaient dans l'ensemble équivalents et que, en définitive, la candidature de Mme Dhyvert était mieux adaptée au profil du poste à pourvoir, et cela, entre autres choses, à la lumière de la «connaissance approfondie que possédait Mme Dhyvert des services de la traduction, lui [donnant] la compréhension immédiate des situations, la force de conviction et l'autorité nécessaires à l'exercice des pouvoirs dévolus à un chef de division adjoint à la DG VII».

46.
    Force est de constater que, en suivant ce raisonnement, l'AIPN s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation. Il résulte, en particulier, de la description du poste à pourvoir (voir ci-dessus point 2) que les connaissances spécifiques que Mme Dhyvert possédait des services de traduction pouvaient en effet constituer un réel atout dans l'exécution des tâches qui sont attribuées, selon ladite description, à un chef adjoint dans les services de traduction. Dans ces circonstances, il ne saurait être reproché à l'AIPN d'avoir commis une erreur en préférant les connaissances et mérites spécifiques relatifs au service de traduction de Mme Dhyvert aux expériences plus variées du requérant, qui n'avait pas, quant à lui, travaillé à la direction générale de la traduction. Pour les mêmes raisons, et vu le fait que les connaissances linguistiques telles qu'exigées par l'avis de vacance et les rapports de notation des deux candidats ne différaient pas sensiblement, le requérant ne saurait prétendre être mieux qualifié pour le poste à pourvoir.

47.
    Il résulte de tout ce qui précède que chacun des moyens invoqués par le requérant est non fondé. En conséquence, le recours doit être rejeté.

Sur les dépens

48.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre lesCommunautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. En l'espèce, chaque partie supportera donc ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté.

2)    Chaque partie supportera ses propres dépens.

Tiili                    Moura Ramos                    Mengozzi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 septembre 2000.

Le greffier

Le président

H. Jung

V. Tiili


1: Langue de procédure: le français.