Language of document : ECLI:EU:T:2009:1

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (septième chambre)

13 janvier 2009 (*)

« Recours en annulation – Délai de recours – Tardiveté – Absence d’erreur excusable – Irrecevabilité manifeste »

Dans l'affaire T‑456/08,

Sociedad General de Autores y Editores de España (SGAE), établie à Madrid (Espagne), représentée par Mes R. Allendesalazar Corcho et R. Vallina Hoset, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision C (2008) 3435 final de la Commission, du 16 juillet 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/C2/38.698 – CISAC),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (septième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood (rapporteur), président, D. Šváby et E. Moavero Milanesi, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

1        La requérante, Sociedad General de Autores y Editores de España (SGAE), est une entité de gestion collective de droits d’auteur, établie en Espagne.

2        Par lettre du 23 juillet 2008, la requérante s’est vu notifier la décision C (2008) 3435 final de la Commission, du 16 juillet 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/C2/38.698 – CISAC) concernant une entente dans le cadre des conditions de gestion des droits d’exécution publique des œuvres musicales ainsi que d’octroi des licences correspondantes par les sociétés de gestion collective, portant sur l’utilisation, dans les accords de représentation réciproque, des restrictions d’affiliation contenues dans le contrat type de la Confédération internationale des sociétés d’auteurs et compositeurs ou sur l’application de facto de ces restrictions d’affiliation (ci-après la « décision attaquée »).

3        Par télécopie parvenue au greffe du Tribunal le 6 octobre 2008, la requérante a transmis copie de la requête par laquelle elle a introduit le présent recours. L’original de la requête a été déposé au greffe du Tribunal le 9 octobre suivant.

4        Par lettre du greffier du Tribunal du 15 octobre 2008, la requérante a été informée que le présent recours n’avait pas été formé dans le délai prévu par l’article 230 CE. Par cette même lettre, la requérante a été invitée, à la demande du président du Tribunal, à exposer, pour le 28 octobre 2008, les raisons du dépôt tardif de la requête.

5        Par décision du président du Tribunal du 23 octobre 2008, l’affaire a été attribuée à la septième chambre.

6        Par lettre du 27 octobre 2008, transmise par télécopie au greffe du Tribunal le même jour, la requérante se prévaut d’une erreur excusable pour qu’il soit dérogé au délai en cause en exposant les circonstances, qu’elle considère comme exceptionnelles, justifiant, selon elle, le dépôt de la requête le 6 octobre 2008.

 Conclusions de la requérante

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’article 3 et l’article 4, paragraphe 3, de la décision attaquée ;

–        annuler l’article 4, paragraphes 1 et 3, de la décision attaquée, dans la mesure où ils appliquent l’article 3 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

 En droit 

8        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

9        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

10      Aux termes de l’article 230, cinquième alinéa, CE, le recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois à compter, en l’occurrence, de la notification à la requérante de l’acte attaqué.

11      Conformément aux dispositions de l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure, ce délai doit, en outre, être augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

12      Selon une jurisprudence constante, ce délai de recours est d’ordre public, ayant été institué en vue d’assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques et d’éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l’administration de la justice, et il appartient au juge communautaire de vérifier, d’office, s’il a été respecté (arrêts de la Cour du 23 janvier 1997, Coen, C‑246/95, Rec. p. I‑403, point 21, et du Tribunal du 18 septembre 1997, Mutual Aid Administration Services/Commission, T‑121/96 et T‑151/96, Rec. p. II‑1355, points 38 et 39).

13      En l’espèce, conformément à l’article 101, paragraphe 1, sous a) et b), et paragraphe 2, du règlement de procédure, le délai de recours a commencé à courir le 24 juillet 2008, jour suivant la date de la notification de la décision attaquée, et a expiré le 3 octobre 2008, délai de distance inclus.

14      Étant donné que la copie de la requête a été transmise par télécopie au greffe du Tribunal le 6 octobre 2008, l’original ayant été déposé le 9 octobre 2008, le présent recours a été introduit après l’expiration du délai, donc tardivement.

15      Se prévalant cependant, dans sa lettre du 27 octobre 2008, d’une erreur excusable, la requérante souligne qu’elle a interprété l’article 101, paragraphe 1, sous a) et b), et paragraphe 2, du règlement de procédure de la même façon que la Commission avait interprété l’article 3, paragraphes 1 et 2, du règlement (CEE, Euratom) n° 1182/71 du Conseil, du 3 juin 1971, portant détermination des règles applicables aux délais, aux dates et aux termes (JO L 124 du 8 juin 1971, p. 1) au cours de la procédure qui a donné lieu à la décision attaquée. Le contenu des deux dispositions étant essentiellement identique, la Commission aurait toutefois retenu une interprétation différente de celle que le Tribunal a fait de l’article 101, paragraphe 1, sous a) et b), et paragraphe 2, de son règlement de procédure.

16      La requérante ajoute qu’elle s’est efforcée de vérifier que son calcul était correct en s’adressant à la Commission pour obtenir confirmation écrite de la date de notification de la décision attaquée. Après avoir obtenu cette confirmation écrite, elle aurait également pris contact avec le greffe du Tribunal afin de se voir confirmer l’exactitude du décompte du délai qu’elle avait effectué. Il lui aurait été répondu qu’il n’était pas possible de répondre à sa consultation. Par ailleurs, aucun élément ne lui aurait été fourni pour lui permettre de connaître l’interprétation faite par le Tribunal de l’article 101, paragraphe 1, du règlement de procédure.

17      Il est de jurisprudence constante qu’une erreur excusable peut, dans des circonstances exceptionnelles, avoir pour effet de ne pas mettre la partie requérante hors délai (ordonnance de la Cour du 26 octobre 2000, Autriche/Commission, C‑165/99, non publiée au Recueil, point 17).

18      Selon une jurisprudence constante, la notion d’erreur excusable, qui trouve sa source directement dans le souci du respect des principes de sécurité juridique et de confiance légitime, ne peut viser que des circonstances tout à fait exceptionnelles dans lesquelles, notamment, l’institution concernée a adopté un comportement de nature, à lui seul ou dans une mesure déterminante, à provoquer une confusion admissible dans l’esprit d’un justiciable de bonne foi et faisant preuve de toute la diligence requise d’une personne normalement avertie (voir arrêt du Tribunal du 29 mai 1991, Bayer/Commission, T‑12/90, Rec. p. II‑219, points 28 et 29, confirmé par arrêt de la Cour du 15 décembre 1994, Bayer/Commission, C‑195/91 P, Rec. p. I‑5619, point 26 ; ordonnances du Tribunal du 21 mars 2002, Laboratoire Monique Rémy/Commission, T‑218/01, Rec. p. II‑2139, point 30, et du 11 décembre 2006, MMT/Commission, T‑392/05, non publiée au Recueil, point 36, et la jurisprudence citée).

19      Toutefois, une erreur excusable ne saurait être reconnue en l’espèce, dès lors que, premièrement, pour calculer le délai de recours, la requérante n’a pas appliqué l’article 101, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement de procédure selon son libellé clair, mais conformément à une interprétation faite par une autre institution d’une autre disposition, dont le libellé est différent, qui figure dans une autre réglementation, applicable dans le cadre d’une procédure devant cette autre institution. Or, il y a lieu de constater, sans que la requérante l’ait prétendu, que le comportement de l’institution concernée, à savoir le Tribunal, ne l’a pas incité à procéder ainsi.

20      Deuxièmement, la réglementation relative aux délais applicable en l’espèce est limpide et ne présente pas de difficulté d’interprétation particulière (ordonnance du Tribunal du 19 janvier 2001, Confindustria e.a./Commission, T‑126/00, Rec. p. II‑85, point 21, et arrêt du Tribunal du 28 janvier 2004, OPTUC/Commission, T‑142/01 et T‑283/01, Rec. p. II‑329, point 44).

21      Troisièmement, la requérante n’a pas fait preuve de diligence, notamment en cherchant confirmation auprès du greffe du Tribunal du décompte du délai auquel elle avait procédé en vue d’un dépôt de la requête dans le délai imparti. En effet, il n’entre pas dans les attributions et compétences des fonctionnaires du greffe de se prononcer sur le calcul du délai pour l’introduction d’un recours (ordonnance du Tribunal du 24 février 2000, AS Bolderaja e. a./Conseil, T‑104/99, Rec. p. II‑451, point 26).

22      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours comme étant manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de le signifier à la partie défenderesse.

 Sur les dépens

23      La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête à la partie défenderesse et avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il suffit de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Sociedad General de Autores y Editores de España (SGAE) supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 13 janvier 2009.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       N. J. Forwood


* Langue de procédure : l’espagnol.