Language of document : ECLI:EU:T:2021:82

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

11 février 2021 (*)

« Responsabilité non contractuelle – Aides d’État – Règlements d’exemption par catégorie – Programme d’aides octroyées par les autorités tchèques en faveur de certaines entreprises – Décision de la Commission approuvant ledit programme – Recours en annulation rejeté comme tardif – Préjudice prétendument causé par les actes de la Commission et des juridictions de l’Union – Prescription – Recours en partie manifestement irrecevable – Lien de causalité – Recours en partie manifestement dépourvu de tout fondement en droit »

Dans l’affaire T‑92/20,

Petr Fryč, demeurant à Pardubice (République tchèque), représenté par Me Š. Oharková, avocate,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. G. Braga da Cruz, Mmes C. Georgieva-Kecsmar et K. Walkerová, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 268 TFUE et tendant à obtenir réparation du préjudice que le requérant aurait prétendument subi en raison, premièrement, de l’adoption du règlement (CE) no 800/2008 de la Commission, du 6 août 2008, déclarant certaines catégories d’aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d’exemption par catégorie) (JO 2008, L 214, p. 3), deuxièmement, de l’adoption par la Commission de la décision du 3 décembre 2007 et de l’absence de publication de ladite décision, troisièmement, des lacunes dans le traitement par la Commission des plaintes déposées par le requérant entre 2016 et 2018 et, quatrièmement, des ordonnances du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C‑230/19 P, non publiée, EU:C:2019:685), et du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T‑513/18, non publiée, EU:T:2019:22),

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović (rapporteure), présidente, P. Škvařilová‑Pelzl et M. I. Nõmm, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        De 1997 à 2014, le requérant a exercé des activités dans le secteur de l’imprimerie en République tchèque.

2        Par la décision du 3 décembre 2007, enregistrée sous le numéro C (2007) 6104 (ci-après la « décision du 3 décembre 2007 »), la Commission a adopté le programme opérationnel Entreprise et innovation 2007-2013 pour une intervention communautaire du Fonds européen de développement régional (FEDER) dans le cadre de l’objectif « Convergence » (ci-après le « POEI »), élaboré par la République tchèque. De 2007 à 2013, dans le cadre du POEI, la République tchèque a mis en œuvre quinze programmes d’aides, dont une aide accordée au secteur de l’imprimerie.

3        Le 1er juillet 2016, le requérant a déposé auprès de la Commission une plainte enregistrée sous le numéro SA.46123 (2016/CP, 2017/FC), portant sur l’aide accordée au secteur de l’imprimerie en République tchèque.  Par courrier du 26 janvier 2017 adressé au requérant et à deux autres plaignants, la Commission a indiqué que l’aide faisant l’objet de la plainte semblait à première vue conforme au règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d'État en faveur des petites et moyennes entreprises (JO 2001, L 10, p. 33) et à l’article 13 du règlement (CE) no 800/2008 de la Commission, du 6 août 2008, déclarant certaines catégories d’aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d’exemption par catégorie) (JO 2008, L 214, p. 3, ci-après le « RGEC »).

4        Le 10 mai 2018, le requérant a déposé un complément de plainte, faisant suite à celle de 2016, enregistré sous le numéro SA.51203(2018/CP), concernant également l’aide au secteur de l’imprimerie en République tchèque. Par courrier du 4 juillet 2018, la Commission a répondu que la sélection des projets dans le cadre d’un programme opérationnel relevait de la responsabilité de l’État membre et que si les aides d’État étaient accordées conformément à des conditions d’exemption par catégorie telles que celles du RGEC, elle ne réévaluait pas la compatibilité de telles mesures.

5        Par requête du 28 août 2018, le requérant a saisi le Tribunal d’un recours en annulation du règlement nº 70/2001, du RGEC et du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission, du 17 juin 2014, déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 [TFUE] (JO 2014, L 187, p. 1). Par ordonnance du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T‑513/18, non publiée, EU:T:2019:22), le Tribunal a déclaré le recours manifestement irrecevable, pour cause de tardiveté, en se fondant sur l’article 126 du règlement de procédure. Par ordonnance du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C‑230/19 P, non publiée, EU:C:2019:685), la Cour de justice a rejeté le pourvoi du requérant et a confirmé la décision du Tribunal.

 Procédure et conclusions des parties

6        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 février 2020, le requérant, Petr Fryč, a introduit le présent recours.

7        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 19 juin 2020, la République tchèque a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la Commission.

8        La Commission a déposé un mémoire en défense le 3 juillet 2020.

9        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater que les institutions de l’Union européenne ont gravement manqué à leurs obligations et lui ont causé un dommage, en ce que :

–        la Commission a adopté le RGEC sous une forme qui va, entre autres, au-delà de l’habilitation législative découlant des traités, qui n’assure pas le respect des principes constitutionnels concernant le caractère exceptionnel et la motivation des atteintes à la concurrence affectant le marché commun, et qui a illégalement permis la mise en œuvre de l’aide d’État accordée au secteur de l’imprimerie en République tchèque dans le cadre du POEI ce qui a nui à l’activité de son entreprise ;

–        la Commission a, par la décision du 3 décembre 2007 adopté le POEI, lequel est non conforme aux traités et à la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et n’a pas publié ladite décision ;

–        la Commission n’a pas dûment traité ses plaintes contestant la légalité du POEI, car, d’une part, elle n’a pas vérifié les circonstances de la création et de la réalisation du POEI, et, d’autre part, elle n’a pas dûment motivé son rejet de sa plainte ;

–        la Cour de justice de l’Union européenne a refusé d’examiner le fond de l’affaire dans le recours en annulation formé contre le RGEC et a rejeté son recours comme étant manifestement non fondé, violant ainsi son obligation constitutionnelle d’appliquer le principe de proportionnalité, et, en agissant de manière exagérément formaliste, elle a violé son droit constitutionnel à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial ;

–        condamner la Commission à lui verser la somme de 4 800 000 euros à titre de réparation du préjudice subi, et ce dans les trois jours à compter du jour où l’arrêt devient définitif ;

–        condamner la Commission aux dépens.

10      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

11      Aux termes de l’article 126 du règlement de procédure du Tribunal, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

12      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

13      Sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité au sens de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure, la Commission soutient que le recours est irrecevable et, en tout état de cause, manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

14      À titre liminaire, il convient de relever qu’il ressort de la requête que le requérant invoque quatre séries d’actes ou d’omissions de la Commission et de la Cour de justice de l’Union européenne qui seraient illégales, à savoir :

–        premièrement, l’adoption du RGEC ;

–        deuxièmement, l’adoption par la Commission de la décision du 3 décembre 2007 et l’absence de publication de ladite décision ;

–        troisièmement, l’abstention de la Commission dans le traitement des plaintes qu’il a déposées entre 2016 et 2018 et

–        quatrièmement, les ordonnances du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C‑230/19 P, non publiée, EU:C:2019:685), et du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T‑513/18, non publiée, EU:T:2019:22).

15      S’agissant de l’identification du préjudice qui aurait été subi par le requérant ainsi que du lien de causalité qui existerait entre ce préjudice et les comportements prétendument illégaux de la Commission et de la Cour de justice de l’Union européenne, le Tribunal relève que, aux points 63 à 65 de la requête, le requérant soutient que, du fait de l’aide publique accordée à ses concurrents par la République tchèque dans le cadre du POEI, il a subi un préjudice concurrentiel qui a engendré une baisse de son chiffre d’affaires annuel, à partir de 2007, puis l’insolvabilité de sa société et la cessation de son activité en 2014.

16      Selon le requérant, il existe un lien de causalité clair entre les illégalités identifiées et la survenance du dommage, de sorte que chacun des quatre comportements prétendument illégaux engage à lui seul la responsabilité de l’Union. Dans ces conditions, le Tribunal estime opportun d’examiner successivement chacune des quatre demandes en réparation.

 Sur la demande visant à obtenir la réparation du dommage prétendument causé par l’adoption du RGEC

17      S’agissant de la demande visant à obtenir réparation du dommage prétendument causé par le RGEC, le Tribunal rappelle que, ainsi que la Commission le souligne, l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, prévoit que les actions contre l’Union en matière de responsabilité non contractuelle se prescrivent par cinq ans à compter de la survenance du fait qui y donne lieu.

18      Selon une jurisprudence constante, ce délai commence à courir dès lors que l’ensemble des conditions auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation sont réunies, et notamment lorsque le dommage à réparer s’est concrétisé (voir arrêt du 8 novembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑469/11 P, EU:C:2012:705, point 34 et jurisprudence citée). Le délai de prescription ne saurait commencer à courir avant que les effets dommageables ne se soient produits et, partant, avant le moment où les intéressés ont dû subir un préjudice certain (arrêt du 17 juillet 2008, Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., C‑51/05 P, EU:C:2008:409, point 54).

19      En l’espèce, le requérant fonde sa demande en indemnité sur le RGEC, lequel a été adopté en 2008, et invoque à titre de préjudice une perte de chiffre d’affaires, à partir de 2007, puis, in fine, la cessation de l’activité de son entreprise en 2014. Il y a lieu de relever à cet égard que le dommage invoqué se serait réalisé, au plus tard, en 2014, soit plus de cinq années avant l’introduction du présent recours, le 14 février 2020.

20      Il découle de ce qui précède que l’action en indemnité, fondée sur l’adoption du RGEC, est prescrite. En effet, à supposer même que, ainsi que le fait valoir le requérant, les conditions pour engager une telle action, à savoir l’existence d’un comportement prétendument illégal et d’un dommage causé par ledit comportement, aient été satisfaites, celles-ci auraient été réunies au plus tard en 2014, soit plus de cinq années avant l’introduction du recours.

21      Certes, l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne prévoit que la prescription est interrompue, en matière de responsabilité non contractuelle, « soit par la requête formée devant la Cour de justice, soit par la demande préalable que la victime peut adresser à l’institution compétente de l’Union » et que, « [d]ans ce dernier cas, la requête doit être formée dans le délai de deux mois prévu à l’article 263 [TFUE] ; les dispositions de l’article 265, deuxième alinéa, [TFUE] sont, le cas échéant, applicables ». Toutefois, il ne ressort pas du dossier devant le Tribunal que la prescription ait pu être interrompue en l’espèce.

22      D’une part, il y a lieu de préciser que, selon la jurisprudence, l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne étant relatif aux actions en matière de responsabilité non contractuelle, la « requête » au sens de ce texte, qui est d’ailleurs considérée comme interruptive de la prescription, est celle tendant à mettre en cause cette responsabilité, sur le fondement de l’article 340, paragraphe 2, TFUE. Un recours en annulation ne saurait donc être considéré comme étant une « requête » de nature à interrompre le délai de prescription au sens de l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne [voir, en ce sens, arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, C‑282/05 P, EU:C:2007:226 point 36]. Dès lors, la procédure engagée par le requérant devant le Tribunal ayant pour objet une demande en annulation du RGEC, et ayant abouti aux ordonnances du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C‑230/19 P, non publiée, EU:C:2019:685), et du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T‑513/18, non publiée, EU:T:2019:22), lesquelles font également l’objet du présent recours en indemnité, ne peut être considérée comme ayant interrompu le délai de prescription au sens de l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne.

23      D’autre part, si le délai de prescription peut être interrompu par la présentation d’une demande préalable adressée à l’institution compétente, les plaintes adressées par le requérant à la Commission avaient pour objet, ainsi qu’il le décrit lui-même, de demander à la Commission d’enquêter sur une aide d’État illégale et ses effets négatifs sur la concurrence dans l’industrie de l’imprimerie. De telles plaintes, qui n’avaient pas pour objet de demander à la Commission la réparation de préjudices prétendument subis du fait de l’adoption du RGEC, ne constituent pas une demande préalable au sens de l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne.

24      En tout état de cause, à supposer même que les plaintes adressées par le requérant puissent être qualifiées de demandes préalables au sens de l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, il convient de relever que, dans le cas où une demande préalable est présentée, l’interruption de la prescription n’est acquise que si la demande est suivie d’une requête dans le délai déterminé par référence à l’article 263 TFUE ou à l’article 265 TFUE, selon le cas (ordonnance du 20 mars 2014, Donnici/Parlement, T‑43/13, EU:T:2014:167, point 57 ; voir également, en ce sens, arrêt du 28 octobre 2004, van den Berg/Conseil et Commission, C‑164/01 P, EU:C:2004:665, point 102). En l’espèce, le présent recours en indemnité ayant été introduit plus de deux mois après la dernière plainte, et après la lettre du 4 juillet 2018 par laquelle la Commission a indiqué au requérant ne pas donner suite à cette plainte, force est de constater que, en toute hypothèse, la prescription n’a pas été interrompue au sens de l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne.

25      Force est donc de constater que, en tant qu’il est fondé sur l’adoption du RGEC, le présent recours en responsabilité non contractuelle a été introduit plus de cinq ans à compter de la survenance des faits qui y ont donné lieu, au sens de l’article 46 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne.

26      Il découle de ce qui précède que l’action indemnitaire du requérant est prescrite et, partant, irrecevable, pour autant qu’elle vise à la réparation du dommage résultant de la perte de chiffre d’affaires et de la cessation de l’activité de son entreprise qu’il aurait subies du fait de l’adoption du RGEC.

 Sur la demande visant à obtenir la réparation du dommage prétendument causé par l’adoption et l’absence de publication de la décision du 3 décembre 2007

27      S’agissant de la demande visant à obtenir la réparation du dommage prétendument causé par l’adoption et l’absence de publication de la décision du 3 décembre 2007, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si, ainsi que la Commission le soutient, cette action en indemnité est prescrite, et ce quand bien même le requérant n’aurait pas eu connaissance de ladite décision avant le 15 mars 2017, date à laquelle la Commission la lui aurait communiquée, il y a lieu de constater que, en tout état de cause, ladite demande en réparation est manifestement dépourvue de tout fondement en droit.

28      Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union au sens de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (voir ordonnance du 6 septembre 2011, Mugraby/Conseil et Commission, T‑292/09, non publiée, EU:T:2011:418, point 54 et jurisprudence citée).

29      S’agissant de la condition liée à la réalité du dommage, tout préjudice dont il est demandé réparation dans le cadre d’un recours en responsabilité non contractuelle de l’Union au titre de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE doit être réel et certain, ce qu’il appartient à la partie requérante de prouver. Il incombe à cette dernière d’apporter des preuves concluantes tant de l’existence que de l’étendue du préjudice qu’elle invoque (voir arrêt du 6 septembre 2018, Klein/Commission, C‑346/17 P, EU:C:2018:679, point 147 et jurisprudence citée).

30      S’agissant de la condition relative au lien de causalité, celle-ci est remplie dès lors qu’il existe un lien suffisamment direct de cause à effet entre le comportement reproché à l’institution concernée et le préjudice invoqué, lien dont il appartient à la partie requérante d’apporter la preuve. Le comportement reproché doit ainsi être la cause déterminante du préjudice (voir ordonnance du 29 juin 2010, Mauerhofer/Commission, T‑515/08, non publiée, EU:T:2010:260, point 80 et jurisprudence citée).

31      Le caractère cumulatif de ces conditions implique que, dès lors que l’une d’entre elles n’est pas remplie, la responsabilité non contractuelle de l’Union ne saurait être engagée (voir arrêt du 8 mai 2003, T. Port/Commission, C‑122/01 P, EU:C:2003:259, point 30 et jurisprudence citée).

32      En l’espèce, s’agissant, premièrement, de la demande visant à obtenir réparation du dommage prétendument causé par l’adoption de la décision du 3 décembre 2007 il y a lieu de constater, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les illégalités invoquées par le requérant, que celui-ci n’est manifestement pas parvenu à établir l’existence d’un lien de causalité entre l’adoption de cette décision et le préjudice qu’il aurait subi.

33      En effet, le requérant soutient que son dommage trouve son origine dans l’aide publique accordée à ses concurrents par la République tchèque dans le cadre du POEI.

34      Toutefois, ainsi que le relève à juste titre la Commission dans son mémoire en défense, la décision du 3 décembre 2007 ne portait pas approbation des aides visées par le requérant.

35      En effet, d’une part, ladite décision n’avait pas pour objet d’approuver les aides octroyées par la République tchèque, mais seulement un programme opérationnel, lequel constitue, ainsi que défini à l’article 2, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1083/2006 du Conseil, du 11 juillet 2006, portant dispositions générales sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1260/1999 (JO 2006, L 210, p. 25), un document soumis par un État membre et adopté par la Commission définissant une stratégie de développement selon un ensemble cohérent de priorités, pour la réalisation duquel il est fait appel à un fonds ou, dans le cadre de l’objectif convergence, au Fonds de cohésion et au FEDER. D’autre part, l’article 4 de la décision du 3 décembre 2007 précise clairement que les aides publiques octroyées dans le cadre d’un programme opérationnel doivent respecter les règles de procédure et de fond en matière d’aides d’État applicables au moment de l’octroi de l’aide publique.

36      Il en découle que le requérant n’est pas parvenu à établir l’existence d’un lien de causalité suffisamment direct entre l’adoption de la décision du 3 décembre 2007 et la baisse de son chiffre d’affaires et la cessation de l’activité de son entreprise.

37      S’agissant, deuxièmement, de la demande visant à obtenir réparation du dommage prétendument causé par l’absence de publication de la décision du 3 décembre 2007, le requérant n’indique pas avec précision les raisons pour lesquelles il estime qu’il existe un lien de causalité entre ce comportement et le dommage allégué. Tout au plus, il affirme que, la décision n’étant pas publique, elle n’a pas permis aux concurrents de contester sa conformité au droit de l’Union. En conséquence, il y a lieu de constater que le requérant ne fournit aucun élément permettant d’établir que l’absence de publication de ladite décision serait la cause directe du préjudice allégué, à savoir la cessation de l’activité de son entreprise.

38      L’une au moins des trois conditions nécessaires pour engager la responsabilité non contractuelle de l’Union faisant ainsi défaut, il en résulte que le recours en indemnité est manifestement dépourvu de tout fondement en droit, en ce qu’il est fondé sur l’adoption de la décision du 3 décembre 2007 et son absence de publication.

 Sur la demande visant à obtenir réparation du dommage prétendument causé par les abstentions de la Commission dans le traitement des plaintes déposées par le requérant entre 2016 et 2018

39      S’agissant de la demande visant à obtenir réparation du dommage causé par les absentions de la Commission dans le traitement des plaintes déposées par le requérant entre 2016 et 2018, il y a lieu de relever que les seuls dommages invoqués par le requérant, à savoir la perte de chiffre d’affaires, à partir de 2007, et la cessation de l’activité de son entreprise en 2014, sont antérieurs à la survenance de ces comportements.

40      Dans ces conditions, force est de constater que, au regard des exigences exposées aux points 28 à 31 ci-dessus, le requérant est resté en défaut d’établir l’existence d’un lien de cause à effet entre les comportements reprochés à la Commission et le préjudice invoqué. En outre, la requête ne contient aucun élément permettant au Tribunal d’apprécier si ces comportements prétendument illégaux ont occasionné un préjudice au requérant.

41      L’une au moins des trois conditions nécessaires pour engager la responsabilité non contractuelle de l’Union faisant ainsi défaut, il en résulte que le recours en indemnité est manifestement dépourvu de tout fondement en droit, en ce qu’il porte sur les abstentions de la Commission dans le traitement des plaintes déposées par le requérant entre 2016 et 2018.

 Sur la demande visant à obtenir réparation du dommage prétendument causé par les ordonnances du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C230/19 P), et du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T513/18)

42      S’agissant de la demande visant à obtenir réparation du dommage prétendument causé par les ordonnances du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C‑230/19 P, non publiée, EU:C:2019:685), et du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T‑513/18, non publiée, EU:T:2019:22), adoptées en 2019, à l’instar de ce qui a été constaté à propos du dommage prétendument causé par les absentions dans le traitement des plaintes déposées entre 2016 et 2018, il y a lieu de relever que les seuls dommages invoqués par le requérant, à savoir la perte de chiffre d’affaires, à partir de 2007, et la cessation de l’activité de son entreprise en 2014, sont antérieurs à l’adoption de ces ordonnances.

43      Dans ces conditions, force est de constater que, au regard des exigences exposées aux points 28 à 31 ci-dessus, le requérant est resté en défaut d’établir l’existence d’un lien de cause à effet entre les ordonnances du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C‑230/19 P, non publiée, EU:C:2019:685), et du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T‑513/18, non publiée, EU:T:2019:22), et le préjudice invoqué. En outre, la requête ne contient aucun élément permettant au Tribunal d’apprécier si ces comportements prétendument illégaux ont occasionné un préjudice au requérant.

44      L’une au moins des trois conditions nécessaires pour engager la responsabilité non contractuelle de l’Union faisant ainsi défaut, il en résulte que le recours en indemnité est manifestement dépourvu de tout fondement en droit, en ce qu’il porte sur les ordonnances du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C‑230/19 P, non publiée, EU:C:2019:685), et du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T‑513/18, non publiée, EU:T:2019:22).

45      Par ailleurs, dans ces conditions, il n’apparaît pas nécessaire d’examiner si, ainsi que le soutient la Commission, la demande de réparation des préjudices qui auraient été subis en raison des ordonnances du 5 septembre 2019, Fryč/Commission (C‑230/19 P, non publiée, EU:C:2019:685), et du 15 janvier 2019, Fryč/Commission (T‑513/18, non publiée, EU:T:2019:22), est irrecevable en ce qu’elle est dirigée contre l’Union, représentée par elle. Il n’apparaît pas non plus nécessaire d’examiner si la requête peut être interprétée en ce sens que le recours est dirigé contre l’Union représentée par la Cour de justice de l’Union européenne.

46      Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le recours comme manifestement irrecevable pour autant qu’il tend à la réparation du dommage résultant de la perte de chiffre d’affaires et de la cessation de l’activité de l’entreprise du requérant qui aurait été subi du fait de l’adoption du REGC et, pour le surplus, comme manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

 Sur la demande d’intervention de la République tchèque

47      Conformément à l’article 142, paragraphe 2, du règlement de procédure, l’intervention est accessoire au litige principal et perd son objet, notamment, lorsque la requête est déclarée irrecevable. Le recours étant rejeté pour partie comme manifestement irrecevable et pour partie comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit, il n’y a plus lieu de statuer sur la demande en intervention présentée par la République tchèque.

 Sur les dépens

48      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière, à l’exception de ceux afférents à la demande d’intervention.

49      En application de l’article 144, paragraphe 10, du règlement de procédure, dès lors qu’il est mis fin à l’instance dans l’affaire principale avant qu’il soit statué sur la demande d’intervention, la République tchèque, le requérant et la Commission supporteront chacun leurs propres dépens afférents à la demande d’intervention.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Il n’y a plus lieu de statuer sur la demande d’intervention de la République tchèque.

3)      M. Petr Fryč est condamné à supporter ses propres dépens, ainsi que ceux exposés par la Commission européenne, à l’exception de ceux afférents à la demande d’intervention.

4)      M. Petr Fryč et la Commission supporteront chacun leurs propres dépens afférents à demande d’intervention.

Fait à Luxembourg, le 11 février 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

V. Tomljenović


*      Langue de procédure : le tchèque.