Language of document : ECLI:EU:T:2019:265

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

30 avril 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative K – Cause de nullité absolue – Mauvaise foi – Article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑136/18,

Kuota International Corp. Ltd, établie à Road Town (Îles Vierges britanniques), représentée par Me C. Herissay Ducamp, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. V. Ruzek, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Sintema Sport Srl, établie à Albiate (Italie),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 15 décembre 2017 (affaire R 3111/2014-1), relative à une procédure de nullité entre Kuota International et Sintema Sport,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de Mme I. Pelikánová, président, MM. P. Nihoul (rapporteur) et J. Svenningsen, juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 1er mars 2018,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 29 juin 2018,

vu les questions écrites du Tribunal aux parties et leurs réponses à ces questions déposées au greffe du Tribunal les 12 et 13 décembre 2018,

à la suite de l’audience du 17 janvier 2019,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Les 5 septembre 2001 et 2002, Martec Industrial Corp. (ci-après « Martec »), qui est établie à Taïwan et fabrique des cadres et des accessoires de vélos en fibre de carbone, a conclu, avec la société de droit italien Sintema Forks, devenue Sintema Sport Srl (ci-après « Sintema »), trois contrats organisant leurs relations pour le développement, la fabrication et la commercialisation de vélos et d’éléments de vélos portant la marque KUOTA. Le 14 juin 2001, l’enregistrement de cette marque avait été demandé par M. Lin Sheng Yuan, représentant légal de Martec.

2        Le 12 décembre 2001, Martec a créé la requérante, Kuota International Corporation Ltd, en vue d’assurer la gestion commerciale du projet.

3        L’enregistrement de la marque de l’Union européenne figurative KUOTA a eu lieu le 5 février 2003.

4        Les modèles vendus par Sintema étaient dénommés, notamment, Kom, Kredo, Khan, Kharma et Kalibur. Outre la marque KUOTA, ils portaient le signe K.

5        En 2010, les relations entre la requérante et Sintema se sont dégradées si bien que, le 30 novembre 2012, la première a résilié les contrats qui l’unissaient à la seconde.

6        Le 28 novembre 2012, Sintema a présenté une demande de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)]. La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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7        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 12, 25 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Publications numériques (téléchargeables électroniquement) ; lunettes spécialement conçues pour la pratique du cyclisme sportif ; casques de protection pour cyclistes ; appareils électroniques de mesure, instruments de mesure, appareils et instruments de navigation, montres électroniques (mesureurs) pour activités sportives et équipements sportifs ; logiciel pour le sport et l’entraînement physique ; compte-pas (podomètres) ; ordinateurs de cyclisme ; ordinateurs de sport » ;

–        classe 12 : « Vélos et pièces de vélos ; cycles ; accessoires de vélos pour le transport de bagages ; accessoires de vélos pour le transport de boissons ; potences de cintres [pièces de vélos] ; équipement pour la réparation de crevaisons de pneus de vélos ; sacoches (paniers) de vélos ; cassettes [pièces de vélos] ; chambres à air (pour véhicules deux roues motorisés ou vélos) ; sonnettes de vélos ; tiges de selles de vélos ; chaînes de vélos ; béquilles de vélos ; patins de freins [pièces de vélos] ; jantes de vélos ; courroies de cale-pieds de vélos ; dérailleurs de vélos ; housses de selles pour vélos ou motos ; fourches [pièces de vélos] ; freins [pièces de vélos] ; groupes moteur [pièces de vélos] ; poignées de guidons de vélos ; feux clignotants de vélos ; guidons de vélos, cycles ; moyeux de roues de vélos ; pédales de vélos ; pièces de vélos, ou chaînes ; rayons de vélos ; porte-bagages de vélos ; remorques de vélos (riyakah) ; protections pour jeu de direction [pièces de vélos] ; housses pour vélos ; feux clignotants pour vélos ; selles pour vélos et cycles ; stabilisateurs pour vélos ; supports vélos ; cadres vélos » ;

–        classe 25 : « Tenues de cyclisme, chaussures de cyclisme, bonnets, casquettes et bandeaux de cyclisme ; tenues de sport ; chaussures de sport ; casquettes, bonnets et bandeaux de sport » ;

–        classe 35 : « Organisation d’événements, de séminaires, de formations, de compétitions et de présentations de produits à des fins publicitaires et promotionnelles ; services promotionnels ; publicités ; services de vente en gros, au détail et en ligne de produits et équipements inhérents au cyclisme ; gestion d’affaires commerciales, administration commerciale, tâches de bureau ; distribution d’échantillons de produits relatifs au cyclisme ; transmission d’informations sur les produits et équipements inhérents au secteur du cyclisme vendus en gros, au détail et en ligne ; franchise, ou conseil et assistance dans la gestion, l’organisation et la promotion de l’entreprise ».

8        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 13/2013, du 18 janvier 2013. La marque contestée a été enregistrée, le 15 mai 2013, sous le numéro 11380771.

9        Le 12 août 2013, la requérante a déposé une demande en nullité de cette marque (ci-après la « marque contestée »).

10      Dans cette demande, la requérante faisait valoir que les relations commerciales entre Martec et Sintema étaient constitutives d’un contrat de distribution, que, dans le cadre de ce contrat, Martec avait attribué à Sintema une licence portant sur le droit d’utiliser la marque KUOTA et que c’était à son insu, et sans que soit demandé son consentement, que Sintema avait fait enregistrer la marque contestée.

11      Selon la requérante, la marque enregistrée par Sintema dans ces conditions aurait dû faire l’objet d’une annulation pour deux raisons.

12      En premier lieu, la marque contestée aurait dû être annulée sur le fondement de l’article 53, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 60, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001], lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 3, du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 3, du règlement 2017/1001]. Il résulte de ces dispositions que la nullité d’une marque de l’Union européenne doit être déclarée lorsque l’enregistrement de la marque a été demandé par l’agent ou le représentant du titulaire de la marque, en son nom propre et sans le consentement du titulaire, à moins que cet agent ou ce représentant ne justifie ses agissements.

13      En second lieu, l’annulation se serait imposée sur la base de l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001], qui aurait prévu que la marque de l’Union européenne devait être déclarée nulle lorsque le demandeur était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande de marque.

14      Par décision du 8 octobre 2014, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité.

15      Sur le premier motif de nullité invoqué par la requérante, la division d’annulation a estimé que celle-ci n’avait démontré ni qu’elle était titulaire de la marque d’usage correspondant à la marque contestée ni que Sintema était son agent ou son représentant au sens de l’article 8, paragraphe 3, du règlement no 207/2009.

16      Sur le second motif de nullité invoqué par la requérante, la division d’annulation a décidé que celle-ci n’avait pas démontré avoir acquis une meilleure protection que Sintema pour le signe ayant donné lieu à la marque contestée. Par ailleurs, la requérante n’aurait pas établi que l’objectif poursuivi par Sintema n’était pas légitime. Dans ces conditions, le principe du « premier déposant » devait s’appliquer et le motif de nullité fondé sur la mauvaise foi du titulaire lors du dépôt devait être rejeté.

17      Le 5 décembre 2014, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO au titre de l’article 53, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 3, du même règlement, et de l’article 52, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, contre la décision de la division d’annulation.

18      Par décision du 15 décembre 2017 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. Dans cette décision, le premier motif de nullité invoqué par la requérante a été écarté pour les mêmes raisons que celles retenues par la division d’annulation.

19      Quant au second motif invoqué par la requérante, premièrement, la chambre de recours a constaté, sur la base du dossier, que les parties avaient été liées, pendant dix ans environ, par une collaboration fondamentalement paritaire, où chacune assumait des rôles et des fonctions distincts (point 58 de la décision attaquée).

20      Deuxièmement, la chambre de recours a rappelé que, en application de la jurisprudence, la bonne foi devait être présumée jusqu’à preuve du contraire, une conclusion quant à l’existence d’une mauvaise foi ne pouvant être fondée sur de simples présomptions (point 60 de la décision attaquée).

21      Troisièmement, la chambre de recours a estimé que les affirmations de la requérante quant aux intentions frauduleuses de Sintema n’étaient pas corroborées par des éléments de preuve objectifs (point 62 de la décision attaquée).

22      Quatrièmement, la chambre de recours a relevé que, contrairement à ce que soutenait la requérante, Sintema avait présenté des arguments et des documents rendant plausible la légitimité de son intention et mettant en doute la bienveillance des réclamations de la requérante (point 63 de la décision attaquée).

23      En conséquence, la chambre de recours a estimé que la demande en nullité fondée sur l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 devait être rejetée.

 Procédure et conclusions des parties

24      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer la requête recevable ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la marque contestée sur le fondement de l’article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

25      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

26      Par courrier du 4 mai 2018, la requérante a demandé la suspension de la procédure au motif que Sintema avait interjeté appel dans une procédure l’opposant à un de ses distributeurs devant les juridictions françaises.

27      Le 26 juin 2018, cette demande a été rejetée par le président de la première chambre du Tribunal.

 En droit

 Sur la recevabilité de l’annexe 6 à la requête

28      En annexe 6 à la requête, la requérante produit un jugement rendu, le 9 février 2018, par le tribunal de grande instance de Paris (France) dans un litige opposant Sintema à l’un de ses distributeurs. Ce document tend à démontrer que l’objectif du dépôt de la marque contestée était de faire pression sur les distributeurs de produits de la marque KUOTA en Europe.

29      Comme l’indique l’EUIPO, selon une jurisprudence constante, dès lors que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, l’admission de telles preuves est contraire à l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours [voir arrêt du 18 novembre 2014, Conrad Electronic/OHMI – British Sky Broadcasting Group et Sky IP International (EuroSky), T‑510/12, non publié, EU:T:2014:966, point 26 et jurisprudence citée].

30      En l’espèce, force est de constater que le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 9 février 2018 n’a pas pu être soumis à la chambre de recours de l’EUIPO, puisqu’il est postérieur à la décision attaquée, qui, comme il ressort du point 18 ci-dessus, a été adoptée le 15 décembre 2017.

31      Dans ces conditions, il convient d’écarter l’annexe 6 de la requête comme étant irrecevable.

 Sur la demande visant à l’annulation de la décision attaquée

32      Dans un moyen unique tiré de la violation de l’article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant qu’il n’était pas démontré que le dépôt par Sintema de la marque contestée avait été réalisé de mauvaise foi.

33      L’EUIPO conteste le bien-fondé du moyen.

 Sur le principe du premier déposant

34      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon l’article 8, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, le régime de la marque de l’Union européenne repose sur le principe selon lequel un droit exclusif est conféré au premier déposant.

35      En vertu de ce principe, un signe ne peut être enregistré en tant que marque de l’Union européenne que pour autant qu’une marque antérieure n’y fasse pas obstacle, qu’il s’agisse, notamment, d’une marque de l’Union européenne, d’une marque enregistrée dans un État membre ou par l’Office Benelux de la propriété intellectuelle, d’une marque ayant fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans un État membre ou encore d’une marque ayant fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans l’Union européenne [voir arrêt du 29 juin 2017, Cipriani/EUIPO – Hotel Cipriani (CIPRIANI), T‑343/14, EU:T:2017:458, point 23 et jurisprudence citée].

36      En revanche, sans préjudice d’une éventuelle application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, le seul fait de l’utilisation, par un tiers, d’une marque non enregistrée ne fait pas obstacle à ce qu’une marque identique ou similaire soit enregistrée en tant que marque de l’Union européenne, pour des produits ou des services identiques ou similaires (voir arrêt du 29 juin 2017, CIPRIANI, T‑343/14, EU:T:2017:458, point 23 et jurisprudence citée).

37      En l’espèce, il est constant que la marque contestée a été déposée par Sintema en premier.

 Sur l’appréciation de l’existence de la mauvaise foi

38      L’application du « principe du premier déposant » est nuancée, notamment, par l’article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, selon lequel la nullité d’une marque de l’Union européenne doit être déclarée, sur demande présentée devant l’EUIPO, ou sur demande reconventionnelle introduite dans le cadre d’une action en contrefaçon, lorsque le demandeur était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque (voir arrêt du 29 juin 2017, CIPRIANI, T‑343/14, EU:T:2017:458, point 24 et jurisprudence citée).

39      C’est au demandeur en nullité qui entend se fonder sur ce motif d’établir les circonstances qui permettent de conclure que le titulaire d’une marque de l’Union européenne était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande d’enregistrement de cette dernière (voir arrêt du 29 juin 2017, CIPRIANI, T‑343/14, EU:T:2017:458, point 24 et jurisprudence citée).

40      La notion de mauvaise foi n’est ni définie, ni délimitée, ni même décrite d’une quelconque manière dans la législation (voir arrêt du 29 juin 2017, CIPRIANI, T‑343/14, EU:T:2017:458, point 25 et jurisprudence citée).

41      Selon la jurisprudence, pour apprécier l’existence de la mauvaise foi de celui qui a fait enregistrer une marque, il convient de prendre en compte tous les facteurs pertinents qui sont propres au cas d’espèce et existaient au moment du dépôt de la demande d’enregistrement (arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 53).

42      Il ressort du point 53 de l’arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (C‑529/07, EU:C:2009:361), que, parmi ces facteurs, figurent notamment :

–        le fait que le demandeur sait ou doit savoir qu’un tiers utilise, dans au moins un État membre, un signe identique ou similaire pour un produit ou service identique ou similaire prêtant à confusion avec le signe dont l’enregistrement est demandé ;

–        l’intention du demandeur d’empêcher ce tiers de continuer à utiliser un tel signe ;

–        le degré de protection juridique dont jouissent le signe du tiers et le signe dont l’enregistrement est demandé.

43      Ces facteurs ne sont que des illustrations parmi un ensemble d’éléments susceptibles d’être pris en compte afin d’établir l’éventuelle mauvaise foi d’un demandeur d’enregistrement au moment du dépôt de la demande de marque (voir arrêt du 29 juin 2017, CIPRIANI, T‑343/14, EU:T:2017:458, point 28 et jurisprudence citée).

44      Ainsi, dans le cadre de l’analyse globale opérée au titre de l’article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, il peut également être tenu compte de l’origine du signe contesté et de son usage depuis sa création, de la logique commerciale dans laquelle s’est inscrit le dépôt de la demande d’enregistrement du signe en tant que marque de l’Union européenne ainsi que de la chronologie des événements ayant caractérisé la survenance dudit dépôt (voir arrêt du 29 juin 2017, CIPRIANI, T‑343/14, EU:T:2017:458, point 29 et jurisprudence citée).

45      De même, les relations contractuelles entre les parties avant le dépôt de la marque contestée peuvent fournir des indices de l’existence de la mauvaise foi du déposant [voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2013, SA.PAR./OHMI – Salini Costruttori (GRUPPO SALINI), T‑321/10, EU:T:2013:372, point 28].

 Sur l’appréciation de la mauvaise foi dans le cas d’espèce

46      En l’espèce, il résulte du dossier et de l’échange des mémoires entre les parties qu’il convient d’examiner successivement les facteurs suivants : la question de savoir si Sintema savait, au moment du dépôt de la marque contestée, que la requérante avait utilisé antérieurement le signe correspondant à la marque contestée, la nature des relations contractuelles entre Sintema et Martec et/ou la requérante, l’origine du signe correspondant à la marque contestée, le degré de protection juridique du signe correspondant à la marque contestée et l’intention de Sintema au moment de l’enregistrement de la marque.

–       Sur la question de savoir si Sintema savait, au moment du dépôt de la marque contestée, que la requérante avait utilisé antérieurement le signe correspondant à ladite marque

47      La requérante soutient que Sintema savait, au moment du dépôt de la marque contestée, le 28 novembre 2012, qu’elle avait utilisé antérieurement le signe qui y correspondait.

48      Selon la requérante, cette affirmation peut être déduite du fait que le signe correspondant à la marque contestée était apparu sur des catalogues de produits vendus sous la marque KUOTA de 2010 à 2012, sur des factures adressées à des distributeurs et sur des cadres de vélos portant également la marque KUOTA.

49      À cet égard, il convient de relever que, déjà dans sa décision, la division d’annulation a considéré qu’il était constant que Sintema savait que la requérante utilisait le signe en cause avant sa demande d’enregistrement.

50      Cette position est confirmée par plusieurs pièces déposées dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO, notamment les catalogues de produits vendus sous la marque KUOTA, qui montrent que les vélos, assemblés à partir d’éléments fabriqués par Martec et vendus par Sintema, portaient ce signe aux côtés de la marque KUOTA.

51      De plus, il résulte de la pièce 22 du dossier déposé par la requérante devant l’EUIPO que les factures qu’elle a adressées à Sintema en 2011 portaient, outre la marque KUOTA, le signe correspondant à la marque contestée.

52      Toutefois, selon la jurisprudence, la circonstance que le demandeur sait ou doit savoir qu’un tiers utilise, dans au moins un État membre, depuis longtemps un signe identique ou similaire pour un produit identique ou similaire prêtant à confusion avec le signe dont l’enregistrement est demandé ne permet pas de conclure à elle seule à la mauvaise foi du titulaire (voir, en ce sens, arrêts du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 40, et du 11 juillet 2013, GRUPPO SALINI, T‑321/10, EU:T:2013:372, point 26). Il convient dès lors de prendre en compte les autres circonstances de l’espèce.

–       Sur les relations contractuelles entre les parties

53      Au point 58 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé qu’il ressortait des documents produits que les parties avaient été liées pendant environ dix ans par une collaboration commerciale, dans laquelle elles avaient assumé des rôles et des fonctions distincts, dans une position fondamentalement paritaire. Elle a exclu, à la lumière des éléments produits dans le cadre de la procédure, que Sintema fût dans une position de subordination et de dépendance à l’égard de la requérante.

54      La requérante conteste cette position au motif que les contrats conclus entre Martec et Sintema faisaient de cette dernière le distributeur des produits conçus et fabriqués par Martec et revêtus de la marque KUOTA. En vertu de ces contrats, Martec et la requérante auraient été chargées de la recherche et du développement des produits et de tous les aspects techniques de ceux-ci, tandis que Sintema aurait été responsable de la vente, du marketing et de la distribution des produits, notamment, en Europe. À cet effet, Martec aurait accordé à Sintema une licence d’usage de la marque KUOTA, dont elle aurait été seule titulaire.

55      À cet égard, il y a lieu de relever que les contrats conclus entre Martec et Sintema font apparaître que celle-ci n’était pas seulement le distributeur des produits fabriqués par Martec sur le marché européen, mais qu’elle bénéficiait également d’un contrat d’approvisionnement exclusif auprès de cette société. En effet, outre qu’il est intitulé « Contrat de licence de fabrication et de distribution », l’un de ces contrats prévoit, sous le titre « Objet de la licence », que « Martec accorde à Sintema le droit d’acheter des cadres en carbone complets, caractérisés par une conception spécifique, de taille standard, à vendre sur le marché sous la marque ‘‘Kuota’’ », ainsi que « le droit d’acheter et d’assembler, en exclusivité, des raccords, tubes et accessoires (kit complet) pour cadres en carbone, à vendre sur le marché, dans toute autre taille demandée par les clients ».

56      S’il ressort ainsi desdits contrats que Sintema était appelée à jouer les rôles de distributeur et d’acheteur, le premier rôle apparaît toutefois comme prépondérant. Premièrement, dans les contrats, Sintema est désignée, à plusieurs reprises, comme « Kuota dealer » (distributeur de Kuota). Deuxièmement, les clauses des contrats intitulées « Cessation du contrat » précisent que, en cas de rupture de l’accord, Sintema devra « cesser toute activité » avec pour seule réserve un possible écoulement des stocks. Troisièmement, les contrats autorisent Sintema à vendre des produits fabriqués par Martec sous la marque KUOTA, dont l’enregistrement préalable avait été demandé par M. Lin Sheng Yuan, représentant légal de Martec, le 14 juin 2001, et donc antérieurement à ces contrats. Quatrièmement, les contrats prévoient que Martec devra se conformer à ses propres standards de qualité, sans préciser que Sintema participera à l’élaboration de ceux-ci. Enfin, dans la pièce 37 du dossier déposé par la requérante devant l’EUIPO, le gérant de Sintema lui-même a affirmé que cette société était le « distributeur officiel de Kuota », et ce depuis le début de la mise en œuvre du contrat.

57      Au vu de ces différents éléments, c’est de manière erronée que la chambre de recours a considéré que les deux parties se trouvaient dans une position fondamentalement paritaire.

–       Sur l’origine du signe correspondant à la marque contestée

58      S’agissant de l’origine de la marque contestée, la chambre de recours a, au point 59 de la décision attaquée, relevé que les parties avaient défendu des positions opposées.

59      D’une part, la requérante aurait revendiqué la pré-utilisation de la lettre stylisée « K » dans différents pays en combinaison avec la marque KUOTA depuis 2001. En outre, elle aurait affirmé avoir utilisé depuis 2006 le signe qui se trouvait à l’origine de la marque contestée.

60      D’autre part, Sintema aurait fait valoir que, en 2000, elle avait fait élaborer par une agence de communication le graphisme de la marque KUOTA qu’elle avait ensuite utilisé pour la vente de lunettes et de fourches sur autorisation de la société Kuota Eye et que, en 2006, elle avait demandé au même bureau de communication la mise au point du signe qui était à l’origine de la marque contestée.

61      Au point 60 de la décision attaquée, la chambre de recours a, dès lors, considéré qu’il était impossible d’établir si Sintema avait fait preuve de mauvaise foi.

62      La requérante conteste ces affirmations au motif que le développement du signe K, qui est à l’origine de la marque contestée, a été réalisé par Sintema en exécution des missions de développement et de marketing qu’elle lui avait confiées dans le cadre des contrats de distribution, dans l’intérêt et au profit du fournisseur des produits concernés.

63      À cet égard, il importe de relever, en premier lieu, que, dans les pièces 3 à 5 du dossier qu’elle a déposé devant l’EUIPO, Sintema a établi avoir utilisé la dénomination « Kuota », depuis 2000, pour la vente de lunettes et, depuis 2001, pour la vente de fourches de vélos, et donc avant que débute sa relation contractuelle avec la société Martec. De la même manière, il paraît résulter de la pièce 6 que Sintema a fait concevoir, en décembre 2000, par une agence de communication, le graphisme de la marque KUOTA.

64      Les circonstances dans lesquelles est née la marque KUOTA ne sont cependant pas pertinentes dans le cadre du présent litige pour deux motifs.

65      D’une part, le présent litige ne concerne pas la marque KUOTA, déposée le 14 juin 2001, mais la marque contestée, déposée le 28 novembre 2012.

66      D’autre part, il résulte des contrats conclus les 5 septembre 2001 et 2002 que, postérieurement à l’élaboration du design de la marque KUOTA, Sintema a accepté de vendre et de distribuer les produits fabriqués par Martec sous la marque KUOTA à un moment où cette marque était déjà déposée.

67      Dans ces conditions, il est indifférent que Sintema soit ou non à l’origine de la marque KUOTA.

68      En second lieu, la pièce 6 du dossier déposé par Sintema devant l’EUIPO montre que, en 2006, elle avait demandé au même bureau de communication la mise au point du signe qui est à l’origine de la marque contestée.

69      Cependant, comme l’affirme la requérante, la nature des relations entre les parties tend à démontrer que la mise au point du signe qui est à l’origine de la marque contestée a, en réalité, été effectuée par Sintema pour le compte de Martec ou de la requérante dans le cadre de la mission de marketing qui lui avait été confiée par celles-ci.

70      Ainsi, contrairement à ce qu’a décidé la chambre de recours, l’origine de la marque contestée ne fait pas obstacle à ce qu’il soit considéré que Sintema a fait preuve de mauvaise foi lors de son dépôt.

–       Sur le degré de protection juridique dont jouissait le signe correspondant à la marque contestée avant l’enregistrement de celle-ci

71      S’agissant du niveau de protection juridique dont bénéficiait le signe correspondant à la marque contestée avant son enregistrement, la chambre de recours a considéré, au point 62 de la décision attaquée, que la requérante n’avait pas fourni de documents démontrant avec certitude la propriété exclusive de la marque contestée et qu’elle ne l’avait pas protégée bien qu’elle en revendiquait la propriété exclusive depuis 2006.

72      Ces constats, qui ne sont d’ailleurs pas contestés par la requérante, doivent être considérés comme établis. En effet, à la date de la décision attaquée, la requérante n’avait pas fait enregistrer le signe K en tant que marque et les contrats conclus entre Martec et Sintema ne contenaient aucune clause spécifique qui en aurait précisé les modalités d’utilisation.

–       Sur l’intention de Sintema au moment de l’enregistrement de la marque contestée

73      Au point 64 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé qu’il n’était pas évident que Sintema avait déposé la marque contestée sans intention de l’utiliser et dans le seul but d’empêcher les produits vendus sous la marque KUOTA d’entrer sur le marché européen. À cet égard, elle a rappelé que le dépôt avait eu lieu à la fin du mois de novembre 2012 et que, au début du mois d’avril 2013, la requérante avait introduit une procédure à titre conservatoire devant le Tribunale di Milano (tribunal de Milan, Italie) et, en août de la même année, une action en nullité devant l’EUIPO. La chambre de recours en a déduit que le choix de ne pas utiliser la marque contestée et d’envisager l’adoption d’une marque s’inspirant de celle-ci, mais différente, ne semblait pas incompréhensible dans une optique entrepreneuriale.

74      La requérante prétend au contraire que, en l’espèce, Sintema, en enregistrant la marque contestée, cherchait non pas à protéger celle-ci, mais à empêcher ses distributeurs de poursuivre leur activité commerciale et à obtenir de ces derniers, par le biais de procédures judiciaires, des sommes exorbitantes à titre de dommages et intérêts.

75      À l’appui de sa position, la requérante avance trois arguments. Tout d’abord, l’enregistrement serait intervenu alors que ses relations contractuelles avec Sintema auraient été tendues depuis deux ans. Ensuite, Sintema n’aurait jamais eu l’intention véritable d’exploiter la marque contestée, étant donné que, parallèlement, elle aurait lancé la marque concurrente de cycles Kemo et que, dans le cadre de cette nouvelle activité, elle n’aurait jamais fait usage de la marque contestée, mais aurait utilisé une autre marque figurative K. Enfin, Sintema aurait fait enregistrer la marque contestée en vue de faire pression sur les distributeurs de produits enregistrés sous la marque KUOTA par l’introduction de procédures judiciaires et l’envoi de mises en demeure. La requérante se réfère à cet égard au jugement du tribunal de grande instance de Paris du 9 février 2018, évoqué au point 28 ci-dessus, et à des lettres de mise en demeure à certains de ses distributeurs.

76      À cet égard, il importe de constater tout d’abord que l’enregistrement de la marque contestée a été demandé le 28 novembre 2012, soit l’avant-veille du jour de la rupture des relations contractuelles entre Sintema et la requérante, cette rupture intervenant au terme d’une période de deux années au cours desquelles ces relations s’étaient dégradées.

77      Ensuite, il convient de relever que, le jour même où Sintema a demandé l’enregistrement de la marque contestée, elle a également sollicité l’enregistrement d’une autre marque figurative K, alors même qu’elle lançait une nouvelle marque, la marque Kemo, pour la commercialisation d’autres vélos.

78      Certes, comme la chambre de recours l’a observé, les procédures intentées par la requérante en avril et août 2013 à l’encontre de Sintema peuvent expliquer que cette dernière, craignant le cas échéant de s’exposer à des demandes en dommages et intérêts, n’ait pas fait usage, dans les faits, de la marque contestée, alors même qu’elle en avait demandé, et obtenu, l’enregistrement.

79      Toutefois, il y a lieu de constater qu’une telle explication est hypothétique et impliquerait, pour que sa pertinence et sa véracité puissent être vérifiées, l’examen d’éléments qui, appartenant à la stratégie de Sintema, et à supposer qu’ils puissent être établis, sont et demeurent inconnus du Tribunal.

80      Par ailleurs, il convient de relever que les procédures entamées par la requérante ne peuvent expliquer à elles seules que, dès le 28 novembre 2012, Sintema a demandé l’enregistrement d’une autre marque figurative K pour la commercialisation de ses produits, puisque ce dernier enregistrement rendait inutile en pratique l’enregistrement de la marque contestée, Sintema disposant alors d’une marque qui lui était propre et lui permettait de commercialiser ses produits avec un signe susceptible d’identifier clairement, aux yeux des clients intéressés, leur origine commerciale.

81      Cette analyse est confirmée par l’envoi de mises en demeure par les conseils de Sintema à trois distributeurs de la requérante pour leur intimer de cesser leurs ventes sous la marque contestée, ainsi qu’en attestent les pièces A, B et C communiquées à l’EUIPO le 9 février 2015.

82      Au vu de l’absence de commercialisation de vélos par Sintema sous la marque contestée et du fait que celle-ci l’a utilisée aux fins de mettre en demeure des distributeurs de la requérante, il convient de considérer que cette marque a eu, dans les faits, pour Sintema, après la cessation de la relation commerciale avec la requérante, une fonction unique, à savoir celle de rendre plus difficile la commercialisation de produits concurrents, voire même de faire obstacle à cette commercialisation.

83      Il ressort des considérations qui précèdent que, premièrement, Sintema avait connaissance de l’usage antérieur par la requérante du signe K correspondant à la marque contestée, deuxièmement, cette société était le distributeur chargé du marketing et de la commercialisation des produits fabriqués par Martec, troisièmement, elle a participé à la mise au point dudit signe dans le cadre de cette mission de commercialisation et de marketing, quatrièmement, le jour même de la demande d’enregistrement de cette marque, elle a fait enregistrer une autre marque pour la commercialisation de ses produits et, cinquièmement, elle a utilisé la marque contestée pour rendre plus difficile ou faire obstacle à la distribution de produits concurrents.

84      Par conséquent, c’est à tort que la chambre de recours a considéré que la requérante n’avait pas démontré l’existence d’une mauvaise foi de Sintema au moment du dépôt de la marque contestée et, partant, que cette dernière en avait fait un usage frauduleux.

85      Parmi les éléments démontrant la mauvaise foi de Sintema, l’absence d’intention véritable d’utiliser la marque, qui est accréditée par les éléments relevés en quatrième et cinquième lieux au point 83 ci-dessus, est d’une importance particulière parce qu’elle va à l’encontre de la fonction essentielle d’une marque, consistant à garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service concerné, en lui permettant de distinguer, sans confusion possible, ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, point 45 et jurisprudence citée).

86      Il y a donc lieu d’accueillir le moyen et, partant, d’annuler la décision attaquée.

 Sur la demande visant l’annulation de la marque contestée

87      Par son troisième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal d’annuler la marque contestée.

88      L’EUIPO estime que, sauf s’il fallait l’interpréter comme visant à solliciter la réformation de la décision attaquée, cette demande est irrecevable au motif qu’il ne peut être donné d’injonction à l’EUIPO.

89      En l’espèce, il convient de constater que la requérante demande, en substance, au Tribunal d’adopter la décision que, selon elle, l’EUIPO aurait dû prendre, à savoir une décision constatant que les conditions pour prononcer la nullité de la marque contestée étaient remplies.

90      Partant, la requérante demande la réformation de la décision attaquée, telle qu’elle est prévue à l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001. En effet, cette demande ne consiste pas à solliciter du Tribunal qu’il condamne l’EUIPO à une quelconque obligation de faire ou de ne pas faire, ce qui constituerait une injonction adressée à ce dernier. Elle vise, au contraire, à ce que le Tribunal décide, au même titre que la chambre de recours, si la marque demandée doit être annulée au regard de l’article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Or, une telle décision figure parmi les mesures qui, en principe, peuvent être prises par le Tribunal au titre de son pouvoir de réformation [voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 2016, Gugler France/OHMI – Gugler (GUGLER), T‑674/13, non publié, EU:T:2016:44, point 98 et jurisprudence citée].

91      Il s’ensuit que le troisième chef de conclusions de la requérante est recevable.

92      Cependant, il y a lieu de rappeler que le pouvoir de réformation, reconnu au Tribunal en vertu de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de procéder à une appréciation sur laquelle la chambre de recours n’a pas encore pris position. L’exercice du pouvoir de réformation doit, par conséquent, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par ladite chambre, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (voir arrêt du 28 janvier 2016, GUGLER, T‑674/13, non publié, EU:T:2016:44, point 100 et jurisprudence citée).

93      En l’espèce, force est de constater que les conditions pour l’exercice du pouvoir de réformation du Tribunal ne sont pas réunies.

94      En effet, la chambre de recours n’a pas examiné, pour apprécier la mauvaise foi de Sintema, le fait que, le jour même de la demande d’enregistrement de la marque contestée, cette société avait demandé l’enregistrement d’une autre marque figurative K. 

95      Partant, le Tribunal n’est pas en mesure de déterminer la décision que la chambre de recours était tenue de prendre et ne peut donc exercer son pouvoir de réformation.

96      Au vu de ce qui précède, le troisième chef de conclusions de la requérante doit être rejeté.

 Sur les dépens

97      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

98      L’EUIPO ayant succombé pour l’essentiel de ses conclusions, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de celle-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 15 décembre 2017 (affaire R 3111/2014-1) est annulée.


2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      L’EUIPO est condamné aux dépens.

Pelikánová

Nihoul

Svenningsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 avril 2019.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

      S. Frimodt Nielsen


*      Langue de procédure : le français.