Language of document : ECLI:EU:T:2010:106

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (huitième chambre)

22 mars 2010 (*)

« Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑93/06 DEP,

Mülhens GmbH & Co. KG, établie à Cologne (Allemagne), représentée par MT. Schulte-Beckhausen, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Spa Monopole, compagnie fermière de Spa SA/NV, établie à Spa (Belgique), représentée par Mes L. de Brouwer, É. Cornu et D. Moreau, avocats,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens, introduite par Spa Monopole, compagnie fermière de Spa SA/NV, à la suite de l’arrêt du Tribunal du 19 juin 2008, Mülhens/OHMI – Spa Monopole (MINERAL SPA) (T‑93/06, non publié au Recueil),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. N. Wahl (rapporteur) et A. Dittrich, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 mars 2006, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 11 janvier 2006 (affaire R 825/2004‑2), relative à une procédure d’opposition entre Spa Monopole, compagnie fermière de Spa SA/NV et Mülhens GmbH & Co. KG.

2        Spa Monopole, compagnie fermière de Spa SA/NV, est intervenue dans le litige au soutien des conclusions de l’OHMI. Elle a conclu à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours et de condamner la requérante aux dépens.

3        Par arrêt du 19 juin 2008, Mülhens/OHMI – Spa Monopole (MINERAL SPA) (T‑93/06, non publié au Recueil), le Tribunal a rejeté le recours et a condamné la requérante aux dépens, sur le fondement de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.

4        Par lettre du 2 février 2009, l’intervenante a demandé à la requérante de lui régler le montant de ses dépens, estimés à 19 185,45 euros. Elle précisait que cette somme correspondait, d’une part, aux honoraires d’avocats (17 980 euros) et, d’autre part, aux divers frais de secrétariat, de photocopies et d’envoi de documents ainsi que de déplacement de ses avocats en vue de l’audience (1 205,45 euros). Un tableau relatant le détail de ses divers autres frais était joint à cette lettre.

5        Par lettre du 19 mars 2009, la requérante a répondu que les dépens dont l’intervenante demandait le paiement n’étaient pas identifiables.

6        Par lettre du 15 juillet 2009, l’intervenante a produit, premièrement, un tableau décrivant les divers frais engagés dans le cadre de la procédure contentieuse et, d’autre part, une liste des prestations fournies par ses avocats du 12 avril 2006 (date de notification du recours dans l’affaire T‑93/06) au 4 juillet 2008 (date à laquelle l’arrêt MINERAL SPA, précité, lui a été notifié). Le montant total des dépens récupérables s’élevait selon elle à un montant de 19 150,45 euros.

7        En date du 24 août 2009, la requérante a informé l’intervenante qu’elle refusait de payer les dépens demandés car, selon elle, le nombre d’heures prétendument consacrées par les avocats de l’intervenante aux fins de la procédure était trop élevé.

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 octobre 2009, l’intervenante a formé, au titre de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, une demande de taxation des dépens par laquelle elle a invité le Tribunal à fixer le montant des dépens récupérables, dont le remboursement incombe à la requérante, à 19 150 euros, correspondant, d’une part, aux honoraires d’avocats (17 945 euros) et, d’autre part, aux autres frais (1 205 euros).

9        Par mémoire du 9 décembre 2009, la requérante a présenté ses observations sur cette demande. En substance, elle a avancé que le montant des dépens réclamés par l’intervenante lui paraissait excessif et proposait que le montant des dépens récupérables soit fixé, s’agissant des honoraires d’avocats, à 9 000 euros et, s’agissant des autres frais, à une somme que le Tribunal jugera appropriée.

 En droit

10      Selon l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme des dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins [ordonnances du Tribunal du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, Rec. p. II‑1785, point 13, et du 7 janvier 2008, Rodrigues Carvalhais/OHMI – Profilpas (PERFIX), T‑206/04 DEP, non publiées au Recueil, point 7].

11      À cet égard, les dépens se rapportant à une période postérieure à la procédure orale n’apparaissent pas directement liés à son intervention devant le Tribunal et ne sauraient, par conséquent, être considérés comme des frais indispensables aux fins de la procédure, au sens de l’article 91 du règlement de procédure [voir ordonnance du Tribunal du 9 novembre 2009, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06 DEP, non publiée au Recueil, point 9, et la jurisprudence citée].

12      S’agissant des dépens relatifs à la procédure devant le Tribunal, il convient de rappeler que le juge communautaire n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces émoluments peuvent être récupérés auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (ordonnances Airtours/Commission, précitée, point 17, et PERFIX, précitée, point 8).

13      Il est également de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions communautaires de nature tarifaire, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit communautaire ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représentés pour les parties (ordonnances Airtours/Commission, précitée, point 18, et PERFIX, précitée, point 9).

14      C’est en fonction de ces éléments qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce.

15      En premier lieu, le Tribunal relève que l’affaire au principal ne présentait, quant à son objet et à sa nature, aucune complexité particulière. Cette affaire concernait une opposition formée par l’intervenante à l’encontre de l’enregistrement de la marque communautaire demandée par la requérante, le motif principal invoqué à l’appui de l’opposition étant le risque que l’usage sans motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure visé à l’article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [devenu article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)]. À cet égard, l’arrêt MINERAL SPA, précité, fait apparaître que l’affaire, qui ne concernait ni une question de droit nouvelle ni une question de fait complexe et qui n’impliquait pas une analyse complexe, ne saurait être considérée comme particulièrement difficile. Enfin, il y a lieu de considérer que l’affaire ne revêtait pas d’importance particulière au regard du droit communautaire.

16      En deuxième lieu, il y a lieu de relever que, si l’affaire présentait, certes, un intérêt économique pour l’intervenante, en l’absence totale d’éléments concrets apportés par cette dernière, cet intérêt ne saurait être considéré comme inhabituel ou significativement différent de celui qui sous-tend toute opposition formée à l’encontre d’une demande d’enregistrement d’une marque communautaire.

17      En troisième lieu, en ce qui concerne l’ampleur du travail que la procédure a pu engendrer pour le conseil de l’intervenante, il appartient au juge communautaire de prendre en considération le travail objectivement indispensable à l’ensemble de la procédure judiciaire. Par ailleurs, il importe de rappeler que la possibilité pour le juge communautaire d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies (voir ordonnance Airtours/Commission, précitée, point 30, et la jurisprudence citée).

18      En l’espèce, force est de constater que l’intervenante a produit, à l’appui de sa demande de taxation des dépens, un décompte précis des frais et honoraires dont elle demande le paiement.

19      S’agissant, tout d’abord, des honoraires d’avocats, l’intervenante a fourni une liste des prestations fournies par ses avocats entre le 12 avril 2006 et le 4 juillet 2008. Le nombre d’heures consacrées à ces prestations est de plus de 96 et le montant total des honoraires demandés à ce titre s’élève à 17 945,44 euros.

20      D’emblée, conformément à la jurisprudence rappelée au point 11 ci-dessus, il convient d’exclure du montant des dépens récupérables les honoraires d’un montant de 1 335,84 euros se rapportant aux actes et démarches accomplies postérieurement à la procédure orale, soit l’ensemble des prestations, auxquelles les avocats de l’intervenante ont consacré près de six heures, effectuées entre le 5 décembre 2007, après l’audience, et le 4 juillet 2008.

21      S’agissant des autres prestations fournies, s’il était en l’occurrence loisible à l’intervenante de confier son intervention à plusieurs conseils à la fois, il appartient cependant au Tribunal de tenir compte principalement du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure contentieuse, indépendamment du nombre d’avocats entre lesquels les prestations effectuées ont pu être réparties (voir ordonnance du Tribunal du 12 décembre 2008, Endesa/Commission, T‑417/05 DEP, non publiée au Recueil, point 44, et la jurisprudence citée).

22      Par ailleurs, la rétribution horaire dont l’application est demandée doit être prise en considération, dans la mesure où la prise en compte d’un taux horaire d’un niveau élevé n’apparaît appropriée que pour rémunérer les services de professionnels capables de travailler de façon efficace et rapide et doit, par voie de conséquence, avoir pour contrepartie une évaluation nécessairement stricte du nombre total d’heures de travail indispensables aux fins de la procédure contentieuse (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 17 octobre 2008, Infront WM/Commission, T‑33/01 DEP, non publiée au Recueil, point 31, et la jurisprudence citée).

23      Or, le Tribunal estime que, si les rétributions horaires dont l’application est demandée (qui se situent entre 180 et 260 euros) sont raisonnables, le nombre total d’heures consacrées par les avocats de l’intervenante aux fins de la procédure contentieuse apparaît, eu égard aux considérations exposées aux points 15 à 17 ci-dessus, excessif.

24      Dans les circonstances de l’espèce, il sera fait une juste appréciation des honoraires d’avocats récupérables en fixant leur montant à 10 000 euros.

25      S’agissant des autres frais dont l’intervenante demande le paiement, qui s’élèvent à une somme totale de 1 205,45 euros, il convient de constater que s’il est incontestable que les frais de photocopies et d’envoi de documents ainsi que les frais de déplacement des avocats en vue de l’audience doivent être considérés comme des dépens récupérables au sens de l’article 91 du règlement de procédure, tel n’est pas le cas des frais de secrétariat qui, ainsi que l’a souligné la requérante, sont en principe couverts par les honoraires d’avocats. Il convient de déduire ces frais, d’un montant de 620 euros, du montant total des frais dont l’intervenante demande le remboursement, ce qui ramène le montant des dépens récupérables à ce titre à 585,45 euros.

26      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation de l’ensemble des dépens récupérables par l’intervenante en fixant leur montant à 10 585,45 euros, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens à rembourser par Mülhens GmbH & Co. KG à Spa Monopole, compagnie fermière de Spa SA/NV est fixé à 10 585,45 euros.

Fait à Luxembourg, le 22 mars 2010.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. E. Martins Ribeiro


* Langue de procédure : l’anglais.