Language of document : ECLI:EU:T:2002:262

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

23 octobre 2002 (1)

«Marque communautaire - Opposition - Marque antérieure figurative comprenant le terme ‘miss fifties’ - Demande de marque communautaire verbale Fifties - Motif relatif de refus - Risque de confusion - Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94»

Dans l'affaire T-104/01,

Claudia Oberhauser , demeurant à Munich (Allemagne), représentée par Me M. Graf, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d'agent,

partie défenderesse,

l'autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) étant

Petit Liberto, SA, établie à Vidreres (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) du 28 février 2001 (affaire R 757/1999-2),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. M. Vilaras, président, Mme V. Tiili et M. P. Mengozzi juges,

greffier: Mme D. Christensen, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 mai 2001,

vu le mémoire en réponse de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) déposé au greffe du Tribunal le 1er octobre 2001,

vu les mesures d'organisation de la procédure,

à la suite de l'audience du 12 mars 2002,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

    

1.
    Le 14 mars 1997, la requérante a présenté, en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié, une demande de marque communautaire à l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

2.
    La marque dont l'enregistrement a été demandé est le vocable Fifties (ci-après la «marque demandée»).

3.
    Les produits pour lesquels l'enregistrement a été demandé relèvent de la classe 25 au sens de l'arrangement de Nice concernant la classification des produits et des services aux fins de l'enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante: «vêtements en jean».

4.
    Cette demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 38/98, du 25 mai 1998.

5.
    Le 24 juillet 1998, Petit Liberto, SA (ci-après l'«opposante»), a formé une opposition, au titre de l'article 42 du règlement n° 40/94, à l'encontre de l'enregistrement de cette marque communautaire. Le motif invoqué à l'appui de l'opposition était le risque de confusion visé par l'article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, entre la marque demandée et une marque antérieure dont l'opposante est la titulaire. La marque antérieure en question (ci-après la «marque antérieure») est l'enregistrement espagnol n° 1.723.310 d'un signe mixte, verbal et figuratif en couleurs, reproduit ci-dessous, pour désigner des «vêtements, chaussures, chapellerie» de la classe 25 de l'arrangement de Nice:

image: missfift

6.
    Par décision du 30 septembre 1999, la division d'opposition de l'OHMI a accueilli l'opposition et a, par conséquent, refusé l'enregistrement de la marque demandée, en raison de sa similitude avec la marque antérieure et de l'identité des produits que les deux marques désignent, qui risquent de créer une confusion dans l'esprit du public en Espagne où la marque antérieure est protégée.

7.
    Le 19 novembre 1999, la requérante a formé un recours auprès de l'OHMI, au titre de l'article 59 du règlement n° 40/94, contre la décision de la division d'opposition.

8.
    Ce recours a été rejeté par décision du 28 février 2001 (ci-après la «décision attaquée») de la deuxième chambre de recours, qui a été notifiée à la requérante le 13 mars 2001.

9.
    La chambre de recours a estimé que la décision de la division d'opposition est bien fondée. En substance, la chambre de recours a considéré qu'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public concerné en Espagne, en raison de l'identité des produits désignés par chacune des deux marques et du fait que les signes en conflit, appréciés globalement, sont similaires.

Conclusions des parties

    

10.
    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la décision attaquée;

-    condamner l'OHMI aux dépens et la partie intervenante aux dépens de la procédure devant l'OHMI.

11.
    L'OHMI conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours;

-    condamner la requérante aux dépens.

En droit

12.
    La requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l'article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

Arguments des parties

13.
    La requérante soutient que la décision attaquée est infondée. Selon elle, la chambre de recours aurait considéré, à tort, qu'il existe un risque de confusion entre les marques en question.

14.
    En premier lieu, tant l'examinateur que la deuxième chambre de recours de l'OHMI auraient méconnu le fait que la marque antérieure n'est pas constituée par le seul terme «miss fifties», mais correspond à un signe mixte composé, d'une part, de différents éléments figuratifs en couleurs et, d'autre part, de différents éléments verbaux, tels que les termes en langue italienne «ECCELLENTE NELLA TRADIZIONE», qui feraient passer inaperçue l'expression «miss fifties» dans la marque en général.

15.
    En deuxième lieu, la chambre de recours, tout en constatant, à juste titre, que le consommateur moyen considère une marque dans son ensemble, aurait, toutefois, méconnu le fait que, en l'espèce, l'élément caractéristique de la marque de l'opposante n'est pas constitué par le terme isolé «fifties», mais bien par l'expression «miss fifties».

16.
    En troisième lieu, la chambre de recours n'aurait pas motivé sa constatation de l'existence d'un lien conceptuel entre la marque antérieure et le terme «fifties», susceptible de provoquer un risque de confusion dans l'esprit du consommateur moyen quant à l'origine commerciale des produits désignés par les deux marques en conflit. Selon la requérante, le public ciblé ne considérera pas un pantalon en jean portant la marque Fifties comme un produit désigné par une sous-marque de la marque antérieure. En revanche, un tel lien conceptuel pourrait éventuellement exister entre, par exemple, les signes dénominatifs «misses fifties» et «miss fifties», ou entre les dénominations «Mr. fifties» et «miss fifties». Le lien conceptuel en question pourrait, également, exister si la marque antérieure était «fifties». Dans ce cas, il serait possible de considérer la marque antérieure comme faisant partie d'une série de marques développées à partir du tronc commun «fifties». Toutefois, en l'espèce, le cas serait totalement inverse, dès lors que c'est la marque antérieure qui est composée de plusieurs éléments. Ainsi, un seul élément de la marque antérieure ne saurait, en soi, être à la base d'une série de marques et fonder, ainsi, l'existence d'un lien conceptuel entre les signes en cause.

17.
    L'OHMI, rappelle, tout d'abord, que, en vertu du règlement n° 40/94, il y a lieu d'interpréter la notion de similitude en relation avec le risque de confusion, dont l'appréciation dépend de nombreux facteurs et, notamment, de la connaissance de la marque sur le marché, de l'association qui peut en être faite avec le signe utilisé ou enregistré, et du degré de similitude entre les marques et entre les produits qu'elles désignent. Se référant à la jurisprudence de la Cour en la matière, l'OHMI ajoute que le risque de confusion est apprécié globalement en tenant compte d'une certaine interdépendance entre les différents facteurs considérés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement.

18.
    Ensuite, en ce qui concerne la comparaison des produits en cause, l'OHMI fait valoir qu'il existe une identité entre les produits couverts par la marque antérieure et ceux visés par la demande de marque (articles en jean) et que ce fait n'a pas été contesté par la requérante.

19.
    Enfin, pour ce qui est de la similitude des marques, l'OHMI considère que son examen doit prendre en compte le public de l'État membre dans lequel la marque antérieure est protégée, à savoir, en l'espèce, le consommateur moyen espagnol. Ainsi, l'appréciation de la chambre de recours selon laquelle le public ciblé n'est pas en mesure de comprendre, de manière immédiate, le mot anglais «fifties» comme désignant une décennie caractérisée par une mode particulière, ne serait pas erronée. En revanche, le public ciblé serait capable de comprendre le mot «miss» en raison, notamment, de l'organisation en Espagne de plusieurs concours de «Miss» et, en particulier, celui de «Miss Espagne». En outre, l'OHMI conteste l'affirmation de la requérante selon laquelle la chambre de recours n'aurait pas tenu compte de l'élément verbal, en langue italienne, «ECCELLENTE NELLA TRADIZIONE», dans la marque antérieure. Il ressortirait, en effet, du point 19 de la décision attaquée que le consommateur espagnol comprendrait ledit élément verbal dans le sens d'une précision laudative.

20.
    S'agissant, en particulier, de la comparaison visuelle et phonétique des signes en cause, l'OHMI estime que c'est à bon droit que la division d'opposition et la chambre de recours ont considéré le terme «fifties» comme l'élément dominant de la marque antérieure. Dans ce contexte, l'OHMI considère qu'il existe une identité visuelle et phonétique évidente entre l'élément caractéristique de la marque antérieure et la marque demandée.

21.
    Quant à la comparaison conceptuelle, l'OHMI réfute l'argument avancé par la requérante devant la chambre de recours, selon lequel le public ciblé pourrait considérer le vocable «fifties» comme une référence aux années 50, aucun élément ne permettant de soutenir une telle thèse.

22.
    Sur la base de ces considérations, l'OHMI estime qu'il existe un risque de confusion indirecte entre les marques en conflit. En effet, selon l'OHMI, même si le public ciblé discerne les différences entre les deux marques et n'est donc pas victime d'une confusion directe, il attribuera à l'élément basique commun des deux marques la fonction d'indication d'origine qui est la fonction essentielle de la marque. De plus, l'OHMI fait valoir que, étant donné l'importance que les consommateurs attachent aux marques dans le domaine de la mode, leur attention se portera directement sur l'élément verbal dominant de la marque antérieure, à savoir, en l'espèce, le terme «fifties».

23.
    L'OHMI conclut que c'est à bon droit que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré qu'il existe en l'espèce un risque de confusion dans l'esprit du public ciblé, en raison de l'identité des produits et de la similitude des marques en conflit.

Appréciation du Tribunal

24.
    Aux termes de l'article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d'une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l'enregistrement «lorsqu'en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l'identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l'esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d'association avec la marque antérieure». Par ailleurs, en vertu de l'article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 40/94, on entend par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

25.
    Selon la jurisprudence de la Cour relative à l'interprétation de l'article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), dont le contenu normatif est, en substance, identique à celui de l'article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement (arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C-39/97, Rec. p. I-5507, point 29, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C-342/97, Rec. p. I-3819, point 17).

26.
    Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion dans l'esprit du public doit être apprécié globalement en tenant en compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce (arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C-251/95, Rec. p. I-6191, point 22, Canon, précité, point 16, Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 18, et du 22 juin 2000, Marca Mode, C-425/98, Rec. p. I-4861, point 40).

27.
    Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte, et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts Canon, précité, point 17, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 19). L'interdépendance entre ces facteurs trouve son expression au septième considérant du règlement n° 40/94, selon lequel il y a lieu d'interpréter la notion de similitude en relation avec le risque de confusion dont l'appréciation, quant à elle, dépend notamment de la connaissance de la marque sur le marché et du degré de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou les services désignés.

28.
    En outre, la perception des marques qu'a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l'appréciation globale du risque de confusion. Or, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (arrêts SABEL, précité, point 23, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 25). Aux fins de cette appréciation globale, le consommateur moyen des produits concernés est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Par ailleurs, il convient de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n'a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques mais doit se fier à l'image imparfaite de celles-ci qu'il a gardée en mémoire. Il y a lieu également de prendre en considération le fait que le niveau d'attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause (arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 26).

29.
    En l'espèce, étant donné la nature des produits concernés (vêtements en jean), qui sont des articles de consommation courante, et le fait que la marque antérieure sur laquelle était fondée l'opposition est enregistrée et protégée en Espagne, le public ciblé par rapport auquel l'analyse du risque de confusion doit s'effectuer est constitué par le consommateur moyen de cet État membre.

30.
    À la lumière des considérations qui précèdent, il y a lieu de procéder à la comparaison, d'une part, des produits concernés et, d'autre part, des signes en conflit.

31.
    En premier lieu, en ce qui concerne la comparaison des produits, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (arrêt Canon, précité, point 23).

32.
    En l'espèce, force est de constater que les produits visés par la marque demandée, à savoir les «vêtements en jean», relevant de la classe 25, font partie de la catégorie des produits couverts par la marque antérieure, à savoir les «vêtements, chaussures, chapellerie» relevant de la même classe. Cette dernière famille de produits couvre toutes sortes de produits d'habillement, y compris ceux qui sont fabriqués en jean.

33.
    Dès lors, il convient de conclure, tout comme la chambre de recours (point 12 de la décision attaquée), que les produits visés par la marque demandée et ceux couverts par la marque antérieure sont identiques. Par ailleurs, ainsi que le souligne à juste titre l'OHMI, il convient d'observer que la requérante ne soulève aucun moyen ou argument dans la requête à l'encontre de cette constatation de la chambre de recours.

34.
    En deuxième lieu, s'agissant de la comparaison des signes, il ressort de la jurisprudence que l'appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, en particulier, de leurs éléments distinctifs et dominants (arrêts SABEL, précité, point 23, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 25). En outre, la Cour a considéré qu'il ne saurait être exclu que la seule similitude phonétique entre deux marques puisse créer un risque de confusion (voir, en ce sens, arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 28). Il convient donc de procéder à une comparaison des signes en conflit en l'espèce sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

35.
    En ce qui concerne, tout d'abord, la comparaison visuelle, il y a lieu de constater que la marque antérieure est composée d'une étiquette de jean classique dans les tons bleu, rose et or. La partie supérieure de l'étiquette représente un groupe d'hommes qui semblent se disputer un pantalon en jean. Tous les hommes portent des jeans. La partie centrale de l'étiquette est constituée des termes «miss fifties» écrits en caractères blancs fantaisistes sur fond rose. Sous ces mots, figurent les termes «ECCELLENTE NELLA TRADIZIONE», écrits en petites lettres majuscules de couleur noire. Cette partie de l'étiquette est entourée de part et d'autre d'un motif de feuilles dorées. La partie inférieure de l'étiquette est composée d'une jeune femme blonde portant un jean pourpre et un chemisier marron. Elle se tient sur la pointe des pieds et paraît surprise. L'arrière-plan comprend un écusson bleu clair avec le terme «miss fifties» écrit en rouge. Deux pièces de monnaie en or sont représentées de part et d'autre de l'écusson. La marque demandée, quant à elle, est composée du vocable Fifties.

36.
    Il ressort de cette description que l'élément verbal «miss fifties», qui est redoublé dans la partie inférieure de l'étiquette, détient une place prépondérante dans le signe antérieur. L'autre élément verbal de la marque antérieure, à savoir l'expression, en italien, «ECCELLENTE NELLA TRADIZIONE», occupe une place secondaire dans le signe, étant placée en dessous des mots «miss fifties» et étant écrite en caractères plus petits que ceux employés pour cette dernière expression. Il est donc accessoire par rapport à l'élément verbal dominant «miss fifties».

37.
    Cette comparaison entre l'élément verbal dominant de la marque antérieure et la marque verbale demandée fait apparaître une certaine similitude visuelle entre elles. En effet, la différence provoquée par l'ajout du mot «miss» dans la marque antérieure n'est pas suffisamment importante pour écarter toute similitude créée par la coïncidence de la partie essentielle, à savoir, le vocable «fifties».

38.
    Cependant, dans l'appréciation visuelle d'ensemble des signes en cause, il y a lieu de relever la nature assez complexe de la marque antérieure qui est un signe mixte, composé non seulement des éléments verbaux précités, mais aussi de plusieurs éléments figuratifs en couleurs très variées. Par conséquent, il y a lieu de considérer, tout comme la chambre de recours (point 18 de la décision attaquée), que les signes en cause, appréciés globalement, ne sont pas visuellement similaires.

39.
    S'agissant, ensuite, de la comparaison phonétique, la chambre de recours a considéré au point 18 de la décision attaquée que les marques en conflit paraissent dissemblables.

40.
    Néanmoins, il y a lieu de relever que, au regard des considérations évoquées ci-dessus concernant la similitude entre l'élément dominant de la marque antérieure et la marque demandée, les deux signes sont similaires du point de vue phonétique. En effet, l'inclusion complète du signe visé par la marque demandée dans l'élément dominant du signe de la marque antérieure permet de conclure à une similitude phonétique importante. De plus, l'absence de prise en compte des éléments figuratifs lors de la comparaison phonétique des signes rend les ressemblances entre ceux-ci plus évidentes que dans la comparaison visuelle.

41.
    Enfin, quant à la comparaison conceptuelle des marques en conflit, la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée, qu'il existe une similitude conceptuelle évidente entre les marques en cause. Selon elle, «la relation conceptuelle existant entre les marques est si forte qu'elle trompe le consommateur moyen de vêtements en ce sens qu'il pensera que les produits proviennent du même fabricant - en d'autres termes que ‘Fifties’ est une ligne de vêtements en jean commercialisée par les promoteurs de la marque antérieure de vêtements» (point 20 de la décision attaquée). La chambre de recours a, en outre, estimé que l'élément verbal dominant de la marque antérieure permet à l'acheteur moyen de vêtements en Espagne de comprendre et de se souvenir de celle-ci. Eu égard, d'une part, à la nature composite de la marque antérieure et, d'autre part, au caractère verbal de la marque demandée, la chambre de recours a estimé, au point 19 de la décision attaquée, que l'acheteur espagnol moyen de vêtements ne considérera pas le terme anglais «fifties» comme étant descriptif et donc peu marquant.

42.
    À cet égard, il convient de relever que, ainsi que l'OHMI l'a fait observer à juste titre (voir point 19 ci-dessus), le public ciblé est capable de comprendre la signification du mot anglais «miss». Quant au terme «fifties», il ne saurait être exclu que le public ciblé soit également capable d'en comprendre le sens, puisque, même si le consommateur espagnol moyen n'est pas très familiarisé avec la langue anglaise, la jeunesse espagnole, qui est l'acheteur habituel de vêtements en jean, a une connaissance meilleure de la langue anglaise que les générations précédentes.

43.
    Toutefois, dans le cadre de la comparaison conceptuelle des marques en cause, la question de savoir si le public ciblé peut ou non comprendre le mot anglais «fifties» comme une référence à une décennie, à savoir les années 50, est dénuée de pertinence. En effet, si ce public comprend le mot «fifties» comme une référence aux années 50, il comprendra, par voie d'association d'idées, le terme «miss fifties» comme se référant à la femme de cette décennie. En revanche, s'il ne comprend pas le sens de «fifties», il considérera simplement le terme «miss fifties» comme la variante féminine d'un vocable anglais dont il ne connaît pas la signification. Partant, il ne saurait être question, pour ce qui concerne cet élément, d'une différence conceptuelle entre les marques.

44.
    Quant à l'autre élément verbal de la marque antérieure, à savoir l'expression, en italien, «ECCELLENTE NELLA TRADIZIONE», c'est à juste titre que la chambre de recours a estimé, au point 19 de la décision attaquée, que le consommateur espagnol moyen le comprendra comme une simple référence laudative pas ou peu marquante. En effet, eu égard à son caractère laudatif, l'élément verbal en question a, du point de vue conceptuel, une importance mineure par rapport à l'élément verbal dominant «miss fifties» de ladite marque.

45.
    Dès lors, les marques en cause présentent une similitude conceptuelle due à l'élément verbal dominant «fifties» contenu dans chaque signe.

46.
    Compte tenu des considérations qui précèdent, et, notamment, des similitudes phonétique et conceptuelle entre les signes en cause et de l'identité entre les produits désignés par les marques en conflit, les différences visuelles précitées entre les signes ne sont pas de nature à écarter l'existence d'un risque de confusion dans la perception du public ciblé.

47.
    En effet, dans le cadre de l'appréciation globale du risque de confusion, il convient de relever que le fait que le consommateur moyen ne garde en mémoire qu'une image imparfaite de la marque confère une importance majeure à l'élément prédominant de la marque en cause. Ainsi, l'élément verbal dominant «miss fifties» de la marque antérieure a une importance majeure dans l'analyse d'ensemble du signe, puisque le consommateur observant une étiquette de jean prend en considération et retient l'élément dénominatif prédominant du signe qui lui permet, lors d'une acquisition ultérieure, de répéter l'expérience. À cet égard, il convient d'observer que le consommateur n'appréhende pas les différents éléments figuratifs de la marque antérieure, puisqu'il les perçoit en tant que parties décoratives d'une étiquette ayant une forme et des composants habituels dans le secteur du jean et non pas comme le composant principal indiquant l'origine du produit.

48.
    Or, étant donné que le consommateur moyen gardera notamment à l'esprit l'élément dénominatif prédominant de la marque antérieure, à savoir le terme «miss fifties», lorsqu'il trouvera des produits d'habillement identiques désignés par la marque demandée, il pourra attribuer la même origine commerciale aux produits en question. Par conséquent, même si le consommateur moyen est capable d'appréhender certaines différences entre les deux signes, le risque d'établir un lien entre les deux marques est très réel.

49.
    En outre, pour ce qui est des conditions dans lesquelles les produits en cause sont commercialisés, il y a lieu de relever qu'il est fréquent, dans le secteur de l'habillement, que la même marque présente différentes configurations selon le type de produits qu'elle désigne. Il est également habituel que la même entreprise de confection utilise des sous-marques, à savoir des signes dérivant d'une marque principale et partageant avec elle un élément dominant commun, pour distinguer ses différentes lignes de production (féminine, masculine, jeune). Dans ces conditions, il est concevable que le public ciblé considère les vêtements désignés par les marques en conflit comme appartenant, certes, à deux gammes de produits distinctes, mais provenant, toutefois, de la même entreprise de confection.

50.
    L'application du principe de l'interdépendance entre les différents facteurs à prendre en compte, qu'implique l'appréciation globale du risque de confusion, confirme cette conclusion. En effet, il peut exister un risque de confusion, malgré un faible degré de similitude entre les marques, lorsque la similitude des produits ou des services couverts par celles-ci est grande (voir arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 21). En l'espèce, ainsi qu'il a déjà été constaté, les produits désignés par la marque demandée et les produits couverts par la marque antérieure sont identiques. Cette identité, par ailleurs non contestée par la requérante, a pour corollaire que les différences éventuelles entre les signes en cause sont atténuées.

51.
    Enfin, il convient de rejeter l'argument de la requérante, tiré de ce que la préexistence de la marque antérieure rendrait impossible la «déclinaison des marques» à partir du tronc commun «fifties». À cet égard, il suffit de relever que le consommateur moyen n'a pas nécessairement connaissance de l'ordre d'apparition chronologique des différentes marques sur le marché.

52.
    Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que la chambre de recours a conclu qu'il existe un risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure au titre de l'article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Le recours doit, dès lors, être rejeté.

Sur les dépens

53.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l'OHMI, conformément aux conclusions de ce dernier.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté.

2)    La requérante est condamnée aux dépens.

Vilaras
Tiili
Mengozzi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 octobre 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

V. Tiili


1: Langue de procédure: l'allemand.