Language of document : ECLI:EU:T:2007:1

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

9 janvier 2007 (*)

« Fonctionnaires – Nomination – Classement en grade et en échelon – Bulletins de rémunération – Réclamation tardive – Recevabilité »

Dans l’affaire T‑288/04,

Kris Van Neyghem, fonctionnaire du Comité des régions de l’Union européenne, demeurant à Tirlemont (Belgique), représenté par Me D. Janssens, avocat,

partie requérante,

contre

Comité des régions de l’Union européenne, représenté par M. P. Cervilla, en qualité d’agent, assisté de Mes B. Wägenbaur et R. Van der Hout, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours en annulation contre la décision n° 87/03 du Comité des régions, du 26 mars 2003, classant définitivement le requérant au grade B 5, échelon 4,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. J. Pirrung, président, A. W. H. Meij et Mme I. Pelikánová, juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 juin 2006,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Ingénieur de formation et ayant exercé des activités professionnelles depuis 1987, le requérant a rempli, de 1996 à 2000, les fonctions d’ingénieur à la Commission européenne, et ce en qualité d’agent temporaire de grade A 7, à partir du 1er juillet 1997.

2        En 1998, le requérant a été lauréat du concours EUR/B/141/98 organisé par le Parlement et la Commission, qui portait sur la carrière B 4/B 5. Le nom du requérant figurait en troisième place sur la liste de réserve constituée à l’issue de ce concours.

3        De 2000 à 2002, le requérant était agent temporaire de grade A 7, échelon 4, affecté aux services conjoints du Comité des régions de l’Union européenne et du Comité économique et social européen (CESE).

4        Le 28 mai 2002, le Comité des régions a publié un avis de vacance d’emploi concernant un emploi d’assistant adjoint aux services conjoints du Comité des régions et du CESE. Cet avis concernait un poste de grade B 5.

5        Le requérant ayant présenté sa candidature pour ce poste, le Comité des régions l’informa par courrier du 6 novembre 2002 de son recrutement au 1er décembre 2002. Par décision n° 230/02, du 12 novembre 2002, le requérant fut nommé fonctionnaire stagiaire dans le grade B 5, échelon 1, avec effet au 1er décembre 2002. Cette décision précisait que ce classement était provisoire.

6        Par décision n° 258/02, du 17 décembre 2002, le requérant fut mis à la disposition du service « Infrastructures – Nouveaux bâtiments ».

7        Par décision n° 87/03, du 26 mars 2003 (ci-après la « décision attaquée »), le classement définitif du requérant fut fixé au grade B 5, échelon 4, avec une ancienneté d’échelon au 1er janvier 2002.

8        Par décision n° 182/03, du 17 septembre 2003, le requérant fut titularisé en tant que fonctionnaire à compter du 1er septembre 2003 et classé au grade B 5, échelon 4, avec une ancienneté de grade fixée au 1er décembre 2002 et une ancienneté d’échelon fixée au 1er janvier 2002.

9        Le 18 septembre 2003, le requérant s’est présenté auprès de l’unité du personnel pour prendre réception de la décision attaquée.

10      Le 15 décembre 2003, le requérant a introduit une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable à la présente espèce (ci-après le « statut ») contre la décision attaquée.

11      Par note du 12 avril 2004, adressée au directeur de l’administration, le service juridique du Comité des régions a indiqué qu’il n’y avait pas, d’un point de vue juridique, d’inconvénient à ce que le requérant se voie accorder une révision de son classement, dans la mesure où il existait une disponibilité budgétaire à cet effet. Dans cette note, le service juridique attirait également l’attention sur le fait qu’il serait, selon lui, recommandable d’établir des critères cohérents dans la politique du personnel.

 Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 juillet 2004, le requérant a introduit le présent recours.

13      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, posé des questions aux parties, lesquelles y ont répondu dans le délai imparti.

14      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience qui s’est déroulée le 13 juin 2006.

15      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable et fondé ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler toute décision se rapportant à la décision attaquée ou découlant de celle-ci ;

–        classer le requérant au grade B 1 ou, à tout le moins, au grade B 4, échelon 4 ;

–        condamner le Comité des régions aux dépens.

16      Le Comité des régions conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner chaque partie à supporter ses propres dépens.

 En droit

17      À l’appui de son recours, le requérant avance divers griefs qui peuvent être regroupés sous trois moyens, tirés respectivement de la violation de l’obligation de motivation, de la violation du droit d’être entendu et de la violation de l’article 5, paragraphe 3, du statut, des articles 31 et 32 du statut, ainsi que du principe d’égalité de traitement. Le Comité des régions fait toutefois valoir que le recours est irrecevable.

18      Il y a lieu d’examiner la recevabilité du présent recours.

 Arguments des parties

19      Le Comité des régions soutient que le recours est irrecevable au motif que le requérant n’a pas respecté la procédure précontentieuse. Il fait valoir que le délai de trois mois pour introduire une réclamation contre un acte faisant grief, prévu à l’article 90, paragraphe 2, du statut, n’a pas été respecté par le requérant.

20      Le Comité des régions soutient que le requérant connaissait l’existence de la décision attaquée dès le mois d’avril 2003 dans la mesure où l’unité du personnel avait, à plusieurs reprises, dès ce moment, invité le requérant, par voie de courriers électroniques restés sans réponse, à se présenter afin de se voir notifier la décision attaquée. De plus, le requérant devait savoir, depuis la réception de la décision n° 230/02, relative à son classement provisoire au grade B 5, échelon 1, qu’une décision fixant définitivement son classement devait intervenir dans les mois suivants.

21      Par ailleurs, selon le Comité des régions, le requérant aurait dû introduire une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre les bulletins de rémunération, ceux-ci constituant des actes faisant grief, susceptibles de faire l’objet d’une réclamation et faisant courir les délais de recours (arrêt du Tribunal du 27 octobre 1994, Chavane de Dalmassy e.a./Commission, T‑64/92, RecFP p. I‑A‑227 et II‑723, points 20 et suivants), dès lors que ceux-ci faisaient apparaître clairement l’existence et la portée de la décision attaquée.

22      S’agissant de l’existence de la décision attaquée, le Comité des régions fait valoir que le requérant a reçu un bulletin de rémunération additionnel durant le mois d’avril faisant apparaître un montant de 1 524 euros. Le requérant devait par conséquent savoir, eu égard au fait qu’il était en possession de la décision n° 230/02 du 12 novembre 2002, que les quatre mois de traitement de base qui lui avaient été versés entre décembre 2002, date de sa nomination en tant que fonctionnaire stagiaire, et mars 2003, avaient fait l’objet d’une régularisation rétroactive. Tout fonctionnaire ayant un intérêt personnel à vérifier les paiements qui lui sont mensuellement versés (arrêt du Tribunal du 10 février 1994, White/Commission, T‑107/92, RecFP p. I‑A‑41 et II‑143, points 32, 33 et 38 à 39), le requérant ne saurait soutenir qu’il ne se serait pas aperçu de la régularisation de son traitement de base et donc de l’existence de la décision litigieuse.

23      Par ailleurs, les bulletins de salaire communiqués au requérant à partir du mois d’avril 2003 indiquaient un traitement de base supérieur à celui qu’il avait perçu au cours de la période comprise entre décembre 2002 et mars 2003. Selon le Comité des régions, ces bulletins de salaire mensuels faisaient aussi clairement apparaître l’existence de la décision attaquée.

24      S’agissant de la portée de la décision attaquée, le Comité des régions fait valoir que les bulletins de salaire indiquent le montant exact du traitement de base et qu’il ressort du tableau des traitements de base figurant à l’article 66 du statut, auquel le requérant avait accès, que le nouveau traitement mensuel correspondait au grade B 5, échelon 4. À cet égard, le Comité des régions renvoie notamment à l’arrêt du Tribunal du 16 juillet 1998, Jensen/Commission (T‑156/96, RecFP p. I‑A‑411 et II‑1173, point 63), selon lequel un fonctionnaire est censé connaître les règles régissant son traitement.

25      En réponse à l’argument du requérant selon lequel le service juridique aurait été d’avis que la réclamation était recevable dès lors qu’il n’avait soulevé aucune objection à cet égard, le Comité des régions rappelle que le fait qu’une institution n’a pas souligné le caractère tardif de la réclamation au cours de la phase précontentieuse ne saurait la priver de soulever une exception d’irrecevabilité au stade de la procédure juridictionnelle et encore moins dispenser le Tribunal de vérifier le respect des délais statutaires (arrêt du Tribunal du 17 octobre 1991, Offermann/Parlement, T‑129/89, Rec. p. II‑855, points 31 et 34). Le Comité des régions conteste également que le chef du personnel et le chef du service juridique aient assuré oralement le requérant qu’une réclamation pouvait être déposée après le 18 septembre 2003.

26      Le requérant fait valoir que la réception de la décision attaquée n’a eu lieu que le 18 septembre 2003. Il nie avoir eu connaissance d’un courrier électronique l’informant de l’adoption de la décision attaquée. Selon lui, il incomberait à l’administration de démontrer que la réception de la décision attaquée a eu lieu avant le 18 septembre 2003.

27      Le requérant conteste ensuite qu’un bulletin de rémunération puisse constituer une modalité de notification suffisante de la décision attaquée pour faire débuter le délai de trois mois prévu à l’article 90, paragraphe 2, du statut, ce document n’étant pas mentionné en tant que tel dans le statut ou dans la décision n° 57/95 du Comité des régions, du 27 juillet 1995, relative aux critères applicables à la nomination en grade et au classement en échelon lors du recrutement. Il conteste également la pertinence de la jurisprudence invoquée par le défendeur à cet égard.

28      Le requérant fait par ailleurs valoir qu’il ne suffit pas qu’un bulletin de rémunération constitue une décision faisant grief, susceptible de faire l’objet d’une réclamation et d’un recours, pour que l’envoi d’un tel bulletin fasse courir le délai de trois mois aux fins du dépôt d’une réclamation contre une décision de classement définitif adoptée séparément. L’administration aurait dû envoyer une lettre à tous les fonctionnaires concernés par une procédure de classement définitif et rappeler les délais au requérant, notamment lorsqu’elle entend notifier une décision au moyen d’un bulletin de rémunération. Il ajoute qu’aucune communication du Comité des régions n’avait indiqué qu’un examen quant à son classement définitif allait intervenir.

29      Selon le requérant, le service juridique du Comité des régions aurait considéré que la réclamation avait été introduite dans les délais, dès lors que ce dernier n’avait pas soulevé la question de sa recevabilité dans la note du 12 avril 2004. Par ailleurs, le chef du service du personnel et celui du service juridique auraient verbalement confirmé au requérant que cette réclamation pouvait être introduite à partir du 18 septembre 2003.

30      Le requérant fait également valoir que, dès lors que l’AIPN a, selon les prétentions du défendeur, procédé à un examen approfondi de sa réclamation, elle a nécessairement examiné si les délais avaient été respectés et considéré la réclamation comme recevable.

31      Lors de l’audience, en réponse aux questions du Tribunal, le requérant a précisé que l’absence de réaction de sa part durant la période comprise entre la réception des bulletins de rémunération d’avril 2003 et la date de l’introduction de sa réclamation s’explique par le fait que des accords avaient été passés avec l’administration en vue de son classement à un grade supérieur et qu’il avait essayé, en toute bonne foi, de trouver une solution avec l’administration sans engager, dans un premier temps, de procédure formelle. Il se serait résolu à suivre la procédure formelle seulement après avoir reçu une « dernière notification » de la décision attaquée.

 Appréciation du Tribunal

32      Selon l’article 90, paragraphe 2, premier alinéa, du statut, l’AIPN peut être saisie d’une réclamation contre un acte faisant grief dans un délai de trois mois. Lorsque l’acte faisant grief consiste en une décision individuelle, il résulte du deuxième tiret de cette disposition que ce délai court « du jour de la notification de la décision au destinataire et en tout cas au plus tard du jour où l’intéressé en a connaissance ».

33      Par ailleurs, l’article 25, deuxième alinéa, du statut dispose que « toute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé ». Il a également été jugé que l’administration a l’obligation de s’assurer que les fonctionnaires peuvent effectivement et facilement prendre connaissance des actes administratifs qui les concernent individuellement (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 18 mars 1997, Rasmussen/Commission, T‑35/96, RecFP p. I‑A‑61 et II‑187, point 36, et arrêt du Tribunal du 23 mars 2000, Rudolph/Commission, T‑197/98, RecFP p. I‑A‑55 et II‑241, point 46).

34      En l’espèce, il n’est pas contesté que la décision attaquée, adoptée le 26 mars 2003, a été formellement notifiée au requérant le 18 septembre 2003. Le Comité des régions soutient toutefois que la réclamation introduite le 15 décembre 2003 était tardive dans la mesure où le requérant connaissait l’existence de la décision attaquée avant que celle-ci lui ait été formellement notifiée.

35      Il ressort de la jurisprudence que si le délai de recours ne saurait courir à l’égard du destinataire d’une décision individuelle qu’à partir du moment où celui-ci a une connaissance exacte du contenu et, le cas échéant, des motifs de l’acte en cause, il en va différemment lorsque le destinataire de cette décision a eu connaissance de l’existence de celle-ci. En effet, dans une telle situation, il appartient à celui qui a connaissance de l’existence d’un acte qui le concerne d’en demander le texte intégral dans un délai raisonnable, le délai de recours ne commençant à courir qu’à partir du moment où l’intéressé a une connaissance exacte du contenu et des motifs de l’acte en cause de manière à pouvoir faire fruit de son droit d’introduire une réclamation ou, le cas échéant, de son droit de recours (voir, en ce sens et par analogie, arrêts de la Cour du 6 juillet 1988, Dillinger Hüttenwerke/Commission, 236/86, Rec. p. 3761, point 14, et du 19 février 1998, Commission/Conseil, C‑309/95, Rec. p. I‑655, point 18, et arrêt du Tribunal du 15 mars 1994, La Pietra/Commission, T‑100/92, RecFP p. I-A-83 et II-275, points 30 et 32).

36      Par ailleurs, il appartient à la partie qui se prévaut de la tardiveté d’un recours au regard des délais fixés de faire la preuve de la date à laquelle la décision attaquée a été notifiée (arrêt du Tribunal du 7 février 2001, Bonaiti Brighina/Commission, T‑118/99, RecFP p. I‑A‑25 et II‑97, point 19). Il en est de même concernant la date à laquelle le requérant a pris connaissance de l’existence d’une décision le concernant.

37      S’agissant, tout d’abord, de l’allégation du Comité des régions, contestée par le requérant, selon laquelle l’administration aurait, à plusieurs reprises, invité le requérant, par voie de courriers électroniques, à se présenter auprès de l’unité du personnel afin de prendre connaissance de la décision attaquée, force est de constater que l’institution n’a produit aucun de ces prétendus courriers électroniques.

38      Il s’ensuit que cet argument ne saurait être accueilli.

39      S’agissant, ensuite, de l’argument du Comité des régions selon lequel le requérant aurait dû introduire une réclamation contre les bulletins de rémunération, il convient de relever qu’il résulte d’une jurisprudence constante que les bulletins de rémunération constituent des actes faisant grief susceptibles de faire l’objet d’une réclamation et d’un recours. La communication de la fiche mensuelle de traitement a pour effet de faire courir les délais de recours contre une décision administrative lorsque cette fiche fait apparaître clairement l’existence et la portée de cette décision (ordonnance du Tribunal du 24 mars 1998, Becret-Danieau e.a./Parlement, T‑232/97, RecFP p. I‑A‑157 et II‑495, points 31 et 32, et arrêt du Tribunal du 16 février 2005, Reggimenti/Parlement, T‑354/03, non encore publié au Recueil, points 38 et 39).

40      Il y a toutefois lieu d’observer que cette jurisprudence a été appliquée dans des situations où les bulletins de rémunération contre lesquels les recours étaient dirigés faisaient apparaître l’existence et la portée de décisions ayant un objet purement pécuniaire, susceptibles, de par leur nature, d’être reflétées par de telles fiches de traitement. En effet, les bulletins de rémunération ont été considérés comme constituant des actes faisant grief lorsqu’ils reflétaient des décisions concernant, notamment, le versement du traitement au fonctionnaire (arrêt du Tribunal du 24 avril 1996, A/Parlement, T‑6/94, RecFP p. I‑A‑191 et II‑555, points 1, 57 et 58), les intérêts de rappel de traitement (arrêt de la Cour du 4 juillet 1985, Delhez e.a./Commission, 264/83, Rec. p. 2179, points 1 et 20), l’application d’un coefficient correcteur à la rémunération du fonctionnaire (arrêts du Tribunal du 26 février 1992, Herkenrath e.a./Commission, T‑16/89, Rec. p. II‑275, points 1 et 23 ; Chavane de Dalmassy e.a./Commission, précité, points 5, 6 et 20, et du 2 mars 2004, Di Marzio/Commission, T‑14/03, RecFP p. I‑A‑43 et II‑167, points 19, 20, 30 et 39), le remboursement des frais de voyage (arrêts du Tribunal du 18 septembre 2003, Lebedef e.a./Commission, T‑221/02, RecFP p. I‑A‑211 et II‑1037, points 5 à 7 et 24 à 27, et Reggimenti/Parlement, précité, points 23, 29, 38 et 39), l’indemnité de dépaysement (arrêts du Tribunal du 1er octobre 1992, Schavoir/Conseil, T‑7/91, Rec. p. II‑2307, points 2, 5, 34 et 35, et Di Marzio/Commission, précité, points 20, 30 et 39), le montant des allocations familiales (ordonnances du Tribunal du 24 mars 1998, Meyer e.a./Cour de justice, T‑181/97, RecFP p. I‑A‑151 et II‑481, points 5 et 24 à 26, et Becret-Danieau e.a./Parlement, précitée, points 6 et 31 à 33), ou encore la fixation du barème des contributions parentales pour les services de garderie d’enfants (arrêts du Tribunal du 29 janvier 1997, Adriaenssens e.a./Commission, T‑7/94, RecFP p. I‑A‑1 et II‑1, points 3 et 29, et Vanderhaeghen/Commission, T‑297/94, RecFP p. I‑A‑7 et II‑13, points 5, 23 et 24).

41      En l’espèce, si la décision attaquée produit nécessairement des effets quant au traitement de base du requérant, force est toutefois de constater que son objet principal n’est pas, en tant que tel, d’ordre purement pécuniaire, mais concerne un élément essentiel de la situation professionnelle du fonctionnaire, à savoir son classement en grade et en échelon. Or, une décision de cette importance n’est pas de nature à pouvoir apparaître clairement au vu d’un simple bulletin de rémunération.

42      Eu égard à la règle énoncée à l’article 25, deuxième alinéa, du statut et au principe rappelé au point 33 ci-dessus, selon lequel l’administration a l’obligation de s’assurer que les fonctionnaires peuvent effectivement et facilement prendre connaissance des actes administratifs qui les concernent individuellement, principe qui trouve notamment son fondement dans le devoir de sollicitude qui s’impose aux institutions vis-à-vis de leurs fonctionnaires, il y a lieu de considérer que des bulletins de rémunération qui, comme en l’espèce, ne font aucunement mention du grade et de l’échelon du requérant, constituent un moyen particulièrement impropre pour informer celui-ci de l’adoption d’une décision de cette importance. En effet, un fonctionnaire normalement diligent et censé connaître les règles régissant son traitement pouvait légitimement escompter que la décision établissant son classement définitif en grade et en échelon lui serait communiquée par écrit.

43      Il convient toutefois de relever que le fait que l’administration n’ait pas satisfait à son obligation de communiquer par écrit au requérant la décision de classement définitif le concernant ne dispensait pas pour autant le requérant de faire preuve de toute diligence, notamment lorsque ce dernier s’avère, en fait, être conscient de l’existence de la décision en cause.

44      À cet égard, le Tribunal relève qu’il ressort des réponses du requérant, lors de l’audience, aux questions du Tribunal que celui-ci n’ignorait pas qu’une décision fixant son classement en grade et en échelon était intervenue. En effet, ainsi qu’il a été mentionné au point 31 ci-dessus, le requérant a indiqué que l’absence de réaction formelle de sa part durant la période comprise entre la réception des bulletins de rémunération d’avril 2003 et la date d’introduction de sa réclamation s’explique par le fait que des accords avaient été passés avec l’administration en vue de le classer à un grade supérieur et qu’il avait essayé de trouver une solution avec l’administration sans engager, dans un premier temps, de procédure formelle. Le requérant a affirmé qu’il s’était résolu à suivre la procédure formelle seulement après avoir reçu une « dernière notification » de la décision attaquée.

45      Il convient, par ailleurs, de constater que les bulletins de rémunération mensuels communiqués au requérant à partir du mois d’avril 2003 faisaient apparaître une augmentation significative de son traitement de base. Il ressort également du dossier que le requérant a reçu un bulletin de rémunération additionnel au mois d’avril 2003, l’informant du versement à son profit d’une somme de 1 524 euros. Ce montant correspondait à la régularisation rétroactive des salaires versés entre décembre 2002, date de l’entrée en fonction du requérant, et mars 2003, suite au classement définitif au grade B 5, échelon 4.

46      Or, ainsi que le Comité des régions le fait observer, la décision n° 230/02, qui avait nommé le requérant fonctionnaire stagiaire, précisait que celui-ci avait été provisoirement classé au grade B 5, échelon 1. Le requérant ne pouvait, par conséquent, ignorer qu’une décision de classement définitif devait intervenir, même si aucune communication supplémentaire du Comité des régions ne l’en avait averti.

47      Bien que ces bulletins de rémunération ne précisent ni les raisons de l’augmentation du traitement de base ni celles du versement additionnel de la somme de 1 524 euros, ceux-ci étaient néanmoins, eu égard au contexte juridique et factuel prévalant au moment de leur communication, de nature à alerter le requérant de ce qu’une modification de sa situation individuelle était intervenue, la modification du traitement de base ne pouvant raisonnablement échapper à une personne faisant preuve de toute la diligence requise d’un fonctionnaire normalement averti (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 16 mars 1993, Blackman/Parlement, T‑33/89 et T‑74/89, Rec. p. II‑249, point 34, et A/Parlement, précité, point 52).

48      Dans la situation de l’espèce, où, ainsi qu’il ressort des points 44 à 47 ci-dessus, le requérant n’ignorait pas, en réalité, qu’une décision de classement était intervenue à son égard, où celui-ci ne pouvait ignorer qu’une décision de classement définitif devait intervenir et où celui-ci ne conteste pas qu’il avait reçu les bulletins de rémunération faisant apparaître une modification substantielle ainsi que la régularisation de son traitement de base, il lui incombait à tout le moins de s’informer auprès de l’administration de la cause de cette modification de son traitement de base et, le cas échéant, de lui demander le texte intégral de la décision à l’origine de cette modification dans un délai raisonnable, afin de prendre une connaissance exacte du contenu et des motifs de l’acte en cause de manière à pouvoir faire fruit de son droit d’introduire une réclamation.

49      Il est toutefois constant que le requérant s’est rendu auprès de l’administration afin de réceptionner la décision attaquée uniquement le 18 septembre 2003, à savoir plus de cinq mois après avoir reçu les premiers bulletins de rémunération, communiqués en avril 2003. Un tel laps de temps ne saurait en aucune manière être considéré comme raisonnable.

50      Le requérant ne saurait exciper qu’un accord avait été conclu et qu’il pensait, en toute bonne foi, qu’une solution serait trouvée sans qu’il soit besoin d’introduire une réclamation. En effet, sans qu’il soit nécessaire de s’attarder sur le caractère peu circonstancié de l’allégation du requérant relative à un prétendu accord, dont l’existence est contestée par le Comité des régions, il suffit de rappeler que les délais de réclamation et de recours fixés aux articles 90 et 91 du statut sont d’ordre public et ne sont pas à la disposition des parties et du juge (arrêt de la Cour du 23 janvier 1997, Coen, C-246/95, Rec. p. I-403, point 21 ; arrêts du Tribunal du 24 juin 2004, Österholm/Commission, T‑190/02, RecFP p. I‑A‑197 et II‑877, point 32, et du 4 mai 2005, Schmit/Commission, T‑144/03, non encore publié au Recueil, point 146). Il y a dès lors lieu de constater que l’existence éventuelle d’un accord avec l’administration ne dispensait pas le fonctionnaire de respecter les délais de réclamation.

51      Pour cette même raison, le fait que le service juridique du Comité des régions n’ait pas, dans sa note du 12 avril 2004, soulevé la tardiveté de la réclamation, ou encore que l’AIPN ait éventuellement procédé à un examen approfondi de la réclamation, ne saurait modifier la constatation selon laquelle celle-ci a, en tout état de cause, été introduite tardivement. Enfin, les assurances orales prétendument fournies par le chef du service du personnel et celui du service juridique, selon lesquelles la réclamation pouvait être introduite à partir du 18 septembre 2003, ne sauraient non plus, en aucune manière, influencer l’application des règles relatives aux délais de réclamation, celles-ci étant d’ordre public et, par conséquent, n’étant pas à la disposition des parties.

52      Il résulte de ce qui précède que, bien que l’administration n’ait pas satisfait à son obligation de communiquer la décision attaquée au requérant, ce dernier était néanmoins conscient de l’existence de la décision attaquée, mais a négligé d’en demander la communication dans un délai raisonnable afin d’en prendre dûment connaissance.

53      Or, la recevabilité d’un recours introduit devant le Tribunal, au titre de l’article 236 CE et de l’article 91 du statut, est subordonnée au déroulement régulier de la procédure précontentieuse et au respect des délais qu’elle prévoit (ordonnances du Tribunal du 11 mai 1992, Whitehead/Commission, T‑34/91, Rec. p. II‑1723, point 18, et du 20 juillet 1994, Branco/Cour des comptes, T‑45/93, RecFP p. I‑A‑197 et II‑641, point 22, et arrêt du Tribunal du 6 juillet 2004, Huygens/Commission, T‑281/01, RecFP p. I‑A‑203 et II‑903, point 125).

54      Il y a lieu, par conséquent, de rejeter le recours comme irrecevable.

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels. Par ailleurs, selon l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

56      En l’espèce, il a été constaté que le Comité des régions a manqué à son obligation de communiquer au requérant la décision de classement définitif le concernant. Cette négligence est d’autant plus regrettable que la décision en cause portait sur un élément important de la situation professionnelle du requérant.

57      Le Tribunal estime que, eu égard au manquement dont l’institution a fait preuve par rapport à son devoir de sollicitude, il convient de faire supporter à cette dernière, outre ses propres dépens, les dépens qui ont été exposés par le requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Le Comité des régions de l’Union européenne supportera l’ensemble des dépens.

Pirrung

Meij

Pelikánová

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 janvier 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. Pirrung


* Langue de procédure : le néerlandais.