Language of document : ECLI:EU:T:2019:826

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

28 novembre 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Bergsteiger – Marques Benelux verbale et de l’Union européenne figurative et verbale antérieures BERG – Motif relatif de refus – Article 47, paragraphes 1 et 2, du règlement (UE) 2017/1001 – Recevabilité d’une demande de preuve de l’usage sérieux – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑736/18,

Runnebaum Invest GmbH, établie à Diepholz (Allemagne), représentée par Me W. Prinz, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. J. Crespo Carrillo et H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Berg Toys Beheer BV, établie à Ede (Pays-Bas), représentée par Me E. van Gelderen, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 22 octobre 2018 (affaire R 572/2018-4), relative à une procédure d’opposition entre Berg Toys Beheer et Runnebaum Invest,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé, lors des délibérations, de M. S. Gervasoni, président, Mme K. Kowalik‑Bańczyk (rapporteure) et M. C. Mac Eochaidh, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 décembre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 12 mars 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 8 mars 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 24 février 2016, le prédécesseur en droit de la requérante, Runnebaum Invest GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Bergsteiger.

3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été initialement demandé relèvent des classes 12 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 12 : « Véhicules : appareils de locomotion par terre » ;

–        classe 35 : « Services de vente au détail pour des véhicules, appareils de locomotion par terre ; publicité ; gestion des affaires commerciales ».

4        La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 2016/055, du 21 mars 2016.

5        Le 21 juin 2016, l’intervenante, Berg Toys Beheer BV, a formé opposition au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001). L’opposition était fondée sur :

–        la marque Benelux verbale antérieure BERG (ci-après la « première marque antérieure »), enregistrée le 25 janvier 1999 sous le numéro 653413 et renouvelée jusqu’au 2 février 2019 pour les produits relevant des classes 12 et 28 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 12 : « Véhicules terrestres.» ;

–        classe 28 : « Karts à pédales (jouets), wagons-jouets, chariots de plage (jouets), remorques-jouets, brouettes-jouets, remorques à benne basculante-jouets, trottinettes (jouets), excavateurs-jouets, remorques à citerne-jouets, grues-jouets » ;

–        la marque de l’Union européenne figurative antérieure BERG (ci-après la « deuxième marque antérieure »), enregistrée le 18 juin 2011 sous le numéro 6446439 pour les produits et services relevant des classes 12, 28 et 41 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 12 : « Moyens de transport, à l’exception des bicyclettes et bicyclettes pour enfants ; véhicules mobiles pour enfants »;

–        classe 28 : « Jouets, y compris jouets de construction, jouets mobiles, autres équipements de jeu mobiles et trampolines »;

–        classe 41 : « Services liés à l’éducation, la formation, le divertissement et le sport »;

–        la marque de l’Union européenne verbale antérieure BERG (ci-après la « troisième marque antérieure », enregistrée le 18 mai 2011 sous le numéro 8305393 pour les produits relevant de la classe 28 et correspondant à la description suivante : « Jeux, jouets, articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes ; décorations pour arbres de Noël ».

6        La deuxième marque antérieure, sur laquelle l’opposition était notamment fondée, est représentée ci-après :

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7        Il ressort de la décision attaquée que les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient « ceux énoncés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne [(JO L 154, p. 1)] ». L’opposition était dirigée contre tous les produits et services visés par la marque demandée et était fondée sur tous les produits et services désignés par les marques antérieures.

8        Le 6 avril 2017, la requérante a déposé sa réponse à l’opposition. Il y figurait, à la dernière page, sous le titre « Absence d’usage », la phrase suivante : « En outre, nous soulevons l’objection tirée de l’absence d’usage (art. 15). »

9        Par notification du 11 avril 2017, la division d’opposition a invité l’intervenante à prouver l’usage de la première marque antérieure pour tous les produits et services sur lesquels l’opposition était fondée et l’a informée que la demande de preuve de l’usage pour les deuxième et troisième marques antérieures ne pouvait pas être prise en compte, puisqu’elle concernait des marques qui, à la date de dépôt de la demande de marque, n’étaient pas enregistrées depuis au moins cinq ans. En réponse, l’intervenante a produit des preuves de l’usage.

10      Le 22 février 2018, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité.

11      Le 28 mars 2018, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

12      Le 5 septembre 2018, la requérante a sollicité une limitation de la liste des produits et services visés par sa demande d’enregistrement (ci-après la « première demande de limitation ») pour ne plus viser que les produits et services correspondant à la description suivante :

–        classe 12 : « Véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir : voitures ; motocyclettes ; scooters ; bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes] ; sièges de sécurité pour enfants »;

–        classe 35 : « Services de vente au détail pour des véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir les produits suivants : voitures ; motocyclettes ; scooters ; bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes] ; sièges de sécurité pour enfants ; Publicité concernant les produits suivants, à savoir les produits suivants [sic] : voitures ; motocyclettes ; scooters ; bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes] ; sièges de sécurité pour enfants ; Gestion des affaires commerciales concernant les produits suivants, à savoir : voitures ; motocyclettes ; scooters ; bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes] ; sièges de sécurité pour enfants ».

13      Par décision du 22 octobre 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a partiellement fait droit au recours de l’intervenante. Elle a accueilli l’opposition pour les « véhicules : appareils de locomotion par terre », relevant de la classe 12, et pour les « services de vente au détail pour les véhicules, appareils de locomotion par terre », relevant de la classe 35.

14      La chambre de recours a considéré que l’opposition était fondée, d’une part, sur la première marque antérieure et, d’autre part, sur la deuxième marque antérieure. En ce qui concerne la troisième marque antérieure, la chambre de recours a constaté, en substance, qu’elle ne saurait servir de base à l’appui de l’opposition, puisqu’elle n’était enregistrée que pour les produits compris dans la classe 28, qui étaient différents des produits et services désignés dans la demande de marque.

15      Les considérations de la chambre de recours relatives au bien-fondé de l’opposition peuvent être résumées comme suit.

16      En premier lieu, en ce qui concerne la première marque antérieure, la chambre de recours a considéré que la demande de preuve de l’usage déposée par la requérante (voir point 8 ci-dessus) ne répondait pas aux conditions de l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001, faute de précisions relatives à la disposition sur laquelle elle était fondée, à la marque antérieure concernée et aux produits et services visés. Elle a donc considéré qu’« aucune demande de preuve de l’usage n’a[vait] été déposée pour la [première] marque antérieure ».

17      S’agissant de l’appréciation de l’opposition sur le fond, la chambre de recours a estimé, en substance, que les produits compris dans la classe 12 visés par la demande de marque, à savoir les « véhicules : appareils de locomotion par terre », étaient identiques aux produits « véhicules terrestres » de cette même classe, pour lesquels était enregistrée la première marque antérieure. En ce qui concerne les services de la classe 35 visés par la demande de marque, la chambre de recours a, d’une part, considéré que les « services de vente au détail pour des véhicules, appareils de locomotion par terre » étaient similaires à un degré moyen aux produits visés par la première marque antérieure relevant de la classe 12 et a, d’autre part, souligné le rapport de complémentarité existant entre ces services et les produits visés par la première marque antérieure. Elle a considéré, en revanche, que les services de « publicité et de gestion d’affaires commerciales », relevant de la classe 35, n’étaient similaires à aucun des produits visés par la première marque antérieure. S’agissant de la comparaison des signes, la marque demandée et la première marque antérieure étaient, selon la chambre de recours, moyennement similaires sur les plans visuel et phonétique et conceptuellement similaires à un degré moyen pour le public pertinent néerlandophone, majoritaire dans les pays du Benelux. La chambre de recours a également relevé le niveau normal de caractère distinctif intrinsèque de la première marque antérieure et, en se fondant sur l’ensemble des éléments susmentionnés, a conclu que l’opposition devait être accueillie pour tous les produits et services des classes 12 et 35 visés par la demande de marque, à l’exception des services de « publicité et de gestion des affaires commerciales », relevant de la classe 35, en raison de l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure était protégée, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/2001.

18      En deuxième lieu, en ce qui concerne la deuxième marque antérieure, la chambre de recours a considéré que les produits compris dans la classe 12 visés par la demande de marque, à savoir les « véhicules : appareils de locomotion par terre », comprenaient, dans une catégorie plus générale, les produits compris dans la classe 12 visés par la deuxième marque antérieure, à savoir les « véhicules mobiles pour enfants », et que, partant, ils étaient identiques. En ce qui concerne les services de la classe 35 visés par la demande de marque, la chambre de recours a appliqué le même raisonnement que celui exposé dans la partie de la décision attaquée relative à la première marque antérieure. En ce qui concerne la comparaison des signes, la chambre de recours a considéré que les marques en conflit présentaient un degré de similitude inférieur à la moyenne sur le plan visuel et moyen sur le plan phonétique. Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a renvoyé à son analyse relative à la première marque antérieure. Les éléments susmentionnés ont amené la chambre de recours à la conclusion que l’opposition était fondée en ce qui concerne tous les produits et services des classes 12 et 35 visés par la demande de marque, à l’exception des services de « publicité et de gestion des affaires commerciales », relevant de la classe 35, en raison de l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit de public du territoire dans lequel la marque antérieure était protégée, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/2001.

19      Enfin, en troisième lieu, la chambre de recours a examiné la première demande de limitation (voir point 12 ci-dessus). Elle a relevé à cet égard, en substance, que, bien que la limitation demandée restreignît explicitement les termes généraux « véhicules, appareils de locomotion par terre », figurant dans la demande initiale d’enregistrement déposée par la requérante, par l’ajout des termes « à savoir » et d’une énumération des différents types de véhicules et d’appareils de locomotion par terre, et, en particulier, des diverses catégories de vélos et de poussettes pour enfants, cette énumération recouvrait également les « sièges de sécurité pour enfants ». Or, selon la chambre de recours, ces derniers produits n’étant pas des véhicules ou des appareils de locomotion par terre, la demande de limitation impliquait, pour ce qui concerne ces produits, une extension inadmissible de la liste des produits et des services. En raison de cette extension, la chambre de recours a rejeté intégralement la première demande de limitation.

20      Il n’en reste pas moins que, aux points 67 à 74 de la décision attaquée, la chambre de recours a effectué la comparaison des produits et services tels que visés par la partie recevable de la première demande de limitation avec les produits et services pour lesquels étaient enregistrées la première et la deuxième marques antérieures. Elle a conclu que, même « si la requérante avait sollicité la limitation uniquement pour la partie recevable (quod non), l’issue de l’opposition telle que motivée [dans la décision attaquée] n’en [au]rait pas [été] modifiée ».

21      Le 12 novembre 2018, la requérante a sollicité une seconde limitation de la liste des produits et services visés par sa demande d’enregistrement (ci-après la « seconde demande de limitation »).

 Conclusions des parties

22      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

23      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

24      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Précision générale

25      Il ressort de l’exposé des antécédents du litige fait aux points 1 à 20 ci-dessus que, bien que la demande de marque ait été introduite sous l’empire du règlement no 207/2009, la décision attaquée a été rendue par la chambre de recours de l’EUIPO après que le règlement 2017/1001 est entré en vigueur.

26      Ce dernier règlement ayant toutefois opéré une codification du règlement no 207/2009 sans modifier de façon substantielle les dispositions de celui-ci pertinentes pour le présent litige, il sera, dans la suite du présent arrêt, exclusivement fait référence aux dispositions du règlement 2017/1001.

 Sur l’objet du litige

27      Dans la requête, la requérante indique que, en novembre 2018, elle a « mis à jour » la première demande de limitation. Elle précise que la liste des produits et services visés par la demande de marque issue de cette limitation est la suivante :

–        classe 12 : « Véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir : voitures ; motocyclettes ; scooters ; bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes] »;

–        classe 35 : « Services de vente au détail pour des véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir les produits suivants : voitures ; motocyclettes ; scooters ; bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes] ; Publicité concernant les produits suivants, […] : voitures ; motocyclettes ; scooters ; bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes] ; Gestion des affaires commerciales concernant les produits suivants, à savoir : voitures ; motocyclettes ; scooters ; bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes] ».

28      Par lettre du 13 mars 2019, l’EUIPO a précisé que la seconde demande de limitation, déposée par la requérante le 12 novembre 2018, correspondait exactement à la partie recevable de la première demande de limitation, en ce qu’elle ne contenait dans aucune des classes concernées les « sièges de sécurité pour enfants ». Pour cette raison, l’EUIPO est d’avis que la seconde demande de limitation est recevable et qu’elle ne modifie pas l’objet du recours devant la chambre de recours.

29      En réponse à la mesure d’organisation de la procédure du 18 juillet 2019, par laquelle le Tribunal a invité les parties à se prononcer sur la lettre de l’EUIPO du 13 mars 2019, l’intervenante affirme que cette lettre peut être ignorée, dès lors que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a conclu, en substance, que la deuxième demande de limitation n’affecterait pas l’issue de l’opposition.

30      Aux termes de l’article 31, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, « la demande de marque de l’Union européenne doit contenir […] la liste des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé ». L’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 prévoit que « [l]e demandeur peut à tout moment retirer sa demande de marque de l’Union européenne ou limiter la liste des produits ou services qu’elle contient ».

31      Aux termes de l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal, les mémoires déposés par les parties dans le cadre de la procédure devant le Tribunal ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours.

32      Selon une jurisprudence constante, le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO que si, au moment où celle-ci a été prise, elle était entachée de l’un des motifs d’annulation ou de réformation visés à l’article 72, paragraphe 2, du règlement 2017/1001. En effet, conformément à l’article 95 dudit règlement, le Tribunal doit statuer au regard du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours [voir arrêt du 20 novembre 2007, Tegometall International/OHMI – Wuppermann (TEK), T‑458/05, EU:T:2007:349, points 19 et 20 et jurisprudence citée]. Il ne saurait annuler ou réformer une décision de la chambre de recours pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement au prononcé de celle-ci [arrêts du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 55, et du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, EU:T:2008:268, point 24].

33      Par ailleurs, une déclaration du demandeur de marque, postérieure à la décision de la chambre de recours, par laquelle celui-ci retire sa demande pour certains des produits initialement visés, peut être interprétée comme une déclaration que la décision attaquée n’est contestée que pour autant qu’elle vise le reste des produits concernés ou comme un désistement partiel, dans le cas où cette déclaration est intervenue à un stade avancé de la procédure devant le Tribunal. Ainsi, une telle limitation doit être prise en compte par le Tribunal, dans la mesure où il lui est demandé de ne pas contrôler la légalité de la décision de la chambre de recours, pour autant qu’elle porte sur les produits ou services retirés de la liste, mais seulement dans la mesure où elle concerne les autres produits ou services, maintenus sur la même liste (voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2008, Mozart, T‑304/06, EU:T:2008:268, points 27 et 28 et jurisprudence citée).

34      En l’espèce, il est constant que la seconde demande de limitation a été introduite postérieurement à l’adoption de la décision attaquée.

35      Il n’en reste pas moins que, d’une part, cette limitation correspond exactement à la partie de la première demande de limitation qui a été jugée recevable dans la décision attaquée et que, d’autre part, dans ladite décision, la chambre de recours a examiné le bien-fondé de l’opposition en tenant compte tant de la version initiale de la liste des produits et services visés par la demande de marque que, à titre surabondant, de la version de cette liste modifiée par la partie recevable de la première demande de limitation. Elle a conclu, à l’issue de cet examen, que son appréciation de l’opposition n’était pas affectée par la partie recevable de la limitation (voir points 19 et 20 ci-dessus).

36      Il s’ensuit que la chambre de recours a examiné le bien-fondé de l’opposition en tenant compte non seulement de la liste des produits et services visés par la demande de marque dans sa version initiale, mais également dans sa version correspondant exactement à la seconde demande de limitation. La seconde demande de limitation ne saurait donc être considérée comme modifiant l’objet du litige devant la chambre de recours.

37      Dès lors, il convient de tenir compte de la seconde demande de limitation et d’interpréter la requête en ce sens que, par son recours, la requérante demande l’annulation de la décision attaquée en ce que, dans son appréciation du bien-fondé de l’opposition, la chambre de recours a tenu compte de la liste de produits et services visés par la demande de marque telle que modifiée par la partie recevable de la première demande de limitation.

 Sur les moyens invoqués à l’appui du recours

38      Dans la requête, la requérante n’invoque explicitement que la seule violation de l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001. Toutefois, comme le relève à juste titre l’EUIPO, il peut être facilement déduit des arguments avancés dans la requête que, à l’appui de son recours, la requérante formule deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001 et, le second, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001

39      Par le premier moyen, la requérante soutient que, en considérant que l’objection tirée du non-usage de la première marque antérieure, qu’elle avait soulevée le 6 avril 2017, était irrecevable, la chambre de recours a violé l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001.

40      Selon la requérante, sa demande de preuve d’usage était conforme tant aux dispositions mentionnées au point 39 ci-dessus qu’aux directives d’examen de l’EUIPO. En particulier, la requérante fait valoir que la chambre de recours a considéré à tort que sa demande de preuve de l’usage n’était pas suffisamment précise.

41      La requérante soutient que l’intervenante n’était en mesure d’apporter la preuve de l’usage de la première marque antérieure qu’en ce qui concerne les « karts à pédales (jouet) » et les « trampolines pour enfants ». Ces produits seraient protégés en tant que jouets, dans la classe 28, mais ne pourraient être considérés comme des « véhicules » ou des « appareils de locomotion par terre », relevant de la classe 12. La chambre de recours aurait donc commis une erreur en ne tenant pas compte de l’objection tirée de l’absence d’usage et en fondant sa comparaison sur tous les produits couverts par la marque antérieure au lieu de se fonder uniquement sur les produits susmentionnés.

42      L’EUIPO reconnaît le bien-fondé du premier moyen.

43      L’intervenante fait valoir qu’elle a apporté la preuve de l’usage sérieux de la première marque antérieure non seulement pour les karts à pédales et les trampolines, mais également pour les vélos, scooters et racers, les remorques pour karts à pédales et pour les vélos à pousser. Tous ces produits relèveraient de la classe 12, ce qui serait confirmé par l’outil de classification de l’EUIPO « TMclass ». En outre, compte tenu de l’expression « en particulier » figurant dans la liste de la classe 12, la preuve de l’usage sérieux apportée pour seulement certains des produits compris dans cette classe suffirait pour démontrer l’usage sérieux de la première marque antérieure pour tous les produits de cette classe.

44      En premier lieu, il résulte de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, que « sur requête du demandeur », le titulaire d’une marque antérieure qui a formé opposition apporte la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure sur laquelle l’opposition est fondée.

45      La règle 22 du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1) relative à la preuve de l’usage et applicable rationae temporis aux demandes de preuve de l’usage déposées avant le 1er octobre 2017, conformément à l’article 80 du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), lu en combinaison avec l’article 82, paragraphe 1, sous d), de ce règlement, prévoit que, si l’opposant doit apporter la preuve de l’usage de la marque ou de l’existence de justes motifs pour son non-usage, l’EUIPO l’invite à le faire dans un délai qu’il lui impartit. Lorsque l’opposant ne fournit pas cette preuve dans le délai imparti, l’opposition est rejetée.

46      Force est de constater que les dispositions des règlements régissant la marque de l’Union européenne applicables en l’espèce n’établissent pas d’exigences particulières relatives à la forme et au contenu de la requête du demandeur visée à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001.

47      Comme le relève l’EUIPO, de telles conditions n’ont pas été, non plus, formulées par la jurisprudence. En effet, selon la jurisprudence, une requête au sens de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 doit être formulée expressément et en temps utile devant l’EUIPO, sachant que l’expression « en temps utile » ne concerne pas seulement le respect d’un éventuel délai imparti, mais implique également l’exigence de présenter cette requête devant la division d’opposition, et non pour la première fois devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI – Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, EU:T:2007:96, points 34 à 41 et jurisprudence citée].

48      D’ailleurs, comme le soulèvent tant la requérante que l’EUIPO, le point 3.1.3 des directives de l’EUIPO, figurant dans la partie C, intitulée « Opposition », section 6 , intitulée « La preuve de l’usage », point 3, intitulé « La procédure », point 3.1, intitulé « Recevabilité de la demande de preuve de l’usage », de ces directives énumère différents exemples de demandes de preuve de l’usage considérés comme « suffisamment explicites et claires ». Parmi ces exemples figure la phrase indiquant que « [l]e demandeur soulève l’objection du non-usage ».

49      Or, en l’espèce, il résulte du dossier que, dans sa réponse à l’opposition déposée devant la division d’opposition le 6 avril 2017, la requérante a inscrit sous le point 4, intitulé « Absence d’usage », la phrase suivante : « En outre, nous soulevons l’objection tirée de l’absence d’usage (art. 15) » (voir point 8 ci-dessus).

50      Selon le Tribunal, contrairement à ce que la chambre de recours a affirmé au point 27 de la décision attaquée, cette phrase doit être considérée comme une requête au sens de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, formulée conformément aux exigences découlant de ce règlement, ainsi que du règlement no 2868/95 et de la jurisprudence. En effet, par cette phrase, insérée dans un point séparé de sa réponse à l’opposition, portant un intitulé faisant référence à l’absence d’usage, la requérante a contesté de manière expresse et suffisamment claire l’usage sérieux des marques antérieures.

51      À cet égard, la requérante relève à juste titre que, eu égard à la manière dont elle a formulé sa demande (voir point 49 ci-dessus), il n’était pas nécessaire de préciser que celle-ci se fondait sur l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001. De même, compte tenu du contexte de la demande de preuve de l’usage litigieuse, notamment le fait que la deuxième et la troisième marques antérieures bénéficiaient de la période de grâce, il était suffisamment clair que cette demande portait sur la première marque antérieure. Enfin, comme le relèvent la requérante et l’EUIPO, il résulte de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, en particulier du passage selon lequel la preuve de l’usage doit être apportée « pour les produits ou services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée », que, lorsqu’une demande de preuve de l’usage sérieux ne précise pas qu’elle porte sur des produits et services spécifiques, il est supposé par défaut qu’elle porte sur tous ceux sur lesquels se fonde l’opposition.

52      Il résulte de ce qui précède que, comme le reconnaît d’ailleurs l’EUIPO, la chambre de recours a, à tort, estimé dans la décision attaquée qu’aucune demande de preuve de l’usage n’avait été déposée devant la division d’opposition pour la première marque antérieure.

53      En deuxième lieu, selon une jurisprudence constante, lorsque le demandeur de marque soulève la question de l’usage sérieux de la marque antérieure, la chambre de recours est tenue d’examiner cette question préalablement à son examen de l’opposition proprement dite. En omettant d’effectuer l’examen de la question de l’usage sérieux dans ces circonstances, la chambre de recours commet une erreur de droit [voir, en ce sens, arrêts du 22 mars 2007, PAM PLUVIAL, T‑364/05, EU:T:2007:96, point 37 ; du 26 septembre 2014, Koscher + Würtz/OHMI – Kirchner & Wilhelm (KW SURGICAL INSTRUMENTS), T‑445/12, EU:T:2014:829, points 30 et 34, et du 11 juillet 2017, Dogg Label/EUIPO – Chemoul (JAPRAG), T‑406/16, non publié, EU:T:2017:482, points 79 et 83].

54      Dès lors que, en l’espèce, la requérante a valablement soulevé la question de l’usage sérieux de la première marque antérieure, la chambre de recours a commis une erreur de droit en omettant d’effectuer l’examen de cette question avant d’examiner l’opposition en ce qu’elle se fondait sur cette marque.

55      En troisième lieu, il existe un désaccord entre la requérante et l’intervenante en ce qui concerne l’appréciation au fond de la preuve de l’usage sérieux de la première marque antérieure apportée par cette dernière. À cet égard, il convient de rappeler que le pouvoir de réformation reconnu au Tribunal en vertu de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de procéder à une appréciation sur laquelle la chambre de recours n’a pas encore pris position. L’exercice du pouvoir de réformation doit, par conséquent, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par la chambre de recours, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 72).

56      En l’espèce, la chambre de recours ne s’est pas prononcée sur l’usage sérieux de la première marque antérieure. Les conditions de l’exercice du pouvoir de réformation du Tribunal, telles qu’elles ressortent de l’arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI (C‑263/09 P, EU:C:2011:452), ne sont donc pas réunies et le Tribunal ne saurait procéder à l’appréciation au fond de la question de l’usage sérieux de ladite marque.

57      Il résulte de ce qui précède que, en constatant, en substance, que la demande de preuve de l’usage de la première marque antérieure déposée par la requérante était irrecevable et en omettant, par conséquent, de tenir compte de cette demande dans l’examen de l’opposition en ce que celle-ci était fondée sur cette marque, la chambre de recours a violé l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001. Il convient donc d’accueillir le premier moyen du recours.

58      À cet égard, il y a lieu de rappeler que la décision de la chambre de recours d’annuler la décision de la division d’opposition et d’accueillir l’opposition est fondée tant sur la première que sur la deuxième marque antérieure (voir points 14 à 18 ci-dessus). Or, l’intervenante n’était pas tenue d’apporter la preuve de l’usage sérieux de la deuxième marque antérieure, puisque celle-ci n’était pas enregistrée depuis au moins cinq ans à la date de dépôt de la demande de marque (voir point 9 ci-dessus).

59      Il s’ensuit que, comme le relève à juste titre l’EUIPO, l’erreur commise par la chambre de recours dans l’examen de l’opposition en ce qu’elle est fondée sur la première marque antérieure ne saurait en soi entraîner l’annulation de la décision attaquée.

60      Il convient donc d’examiner le second moyen du recours. Cependant, parmi tous les arguments avancés par la requérante dans le cadre du second moyen, il suffit d’examiner ceux par lesquels elle conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle l’opposition, en ce qu’elle était fondée sur la deuxième marque antérieure, devait être accueillie.

 Sur le deuxième moyen,tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

61      Par les arguments présentés aux points 46 à 55 de la requête, qui peuvent être interprétés comme formant un moyen tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, la requérante soutient, en substance, que c’est à tort que la chambre de recours a accueilli l’opposition sur le fondement de la deuxième marque antérieure (voir point 5, deuxième tiret, ci-dessus). Selon la requérante, en raison des différences entre les produits et les services couverts par la marque demandée, tels que définis dans la deuxième demande de limitation (voir point 37 ci-dessus), et ceux couverts par la deuxième marque antérieure, ainsi qu’en raison de différences entre les signes en conflit, il n’existe aucun risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée, au sens de la disposition susmentionnée.

62      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante et renvoient, en substance, à la motivation de la décision attaquée.

63      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

64      En l’espèce, il convient d’apprécier si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, résultant de l’identité ou de la similitude entre la marque demandée et la deuxième marque antérieure et de l’identité ou de la similitude entre les produits et services désignés par ces marques.

–       Sur le public pertinent

65      La décision attaquée ne contient pas de passage consacré à la définition du public pertinent et de son niveau d’attention. Il peut néanmoins être déduit de la décision attaquée, en particulier de ses points 38, 40, 46, 58 et 60, que la chambre de recours a apprécié l’existence d’un risque de confusion du point de vue du public du Benelux parlant le néerlandais et qu’elle a estimé que le niveau d’attention de ce public pouvait être accru.

66      À cet égard, d’une part, il est vrai que la deuxième marque antérieure est une marque de l’Union européenne et que, de ce fait, l’appréciation du risque de confusion aurait dû, normalement, prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits et services en cause sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne et non seulement du Benelux. Toutefois, il est de jurisprudence constante qu’il suffit, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 n’existe que dans une partie de ce territoire [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

67      D’autre part, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

68      Or, en ce qui concerne les produits de la classe 12, il résulte de la jurisprudence que le public pertinent peut être composé du grand public ou bien des professionnels et que son niveau d’attention peut varier de moyen à très élevé, notamment en fonction du prix du produit concerné [voir, en ce sens, pour les « véhicules et appareils de locomotion par terre », notamment les voitures et autres véhicules à moteur, arrêts du 22 mars 2011, Ford Motor/OHMI – Alkar Automotive (CA), T‑486/07, non publié, EU:T:2011:104, point 35, et du 21 mars 2012, Volkswagen/OHMI – Suzuki Motor (SWIFT GTi), T‑63/09, non publié, EU:T:2012:137, points 41 et 42 ; pour les « poussettes » et « véhicules et leur pièces et accessoires », arrêt du 28 octobre 2015, Verus/OHMI – Joie International (MIRUS), T‑576/13, non publié, EU:T:2015:810, point 32, et, pour les « vélos » et « motocyclettes », arrêt du 14 mai 2019, Zweirad-Center Stadler/EUIPO – Triumph Designs (Triumph), T‑12/18, non publié, EU:T:2019:328, point 21].

69      La définition du public pertinent et de son niveau d’attention retenue par la chambre de recours est donc dépourvue d’erreur d’appréciation, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté par la requérante.

–       Sur la comparaison des produits et services

70      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

71      C’est en tenant compte de cette jurisprudence qu’il convient d’examiner l’existence d’une similitude entre les produits et services, relevant des classes 12 et 35, tels que désignés dans les listes modifiées par la seconde demande de limitation (voir point 27 ci-dessus) et les produits pour lesquels a été enregistrée la deuxième marque antérieure, relevant de la classe 12 (voir point 5, deuxième tiret, ci-dessus).

72      Aux point 71 à 74 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, en ce qui concerne les produits de la classe 12, d’une part, que les « véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir : voitures ; motocyclettes ; scooters » étaient tous inclus dans la catégorie plus générale des produits relevant de la classe 12 et correspondant aux « moyens de transport, à l’exception des bicyclettes et bicyclettes pour enfants » et que ces produits étaient donc identiques.

73      D’autre part, la chambre de recours a estimé que les « “véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir : bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ; [poussettes]” n’[étaient] pas des “moyens de transport” tels que visés dans la classe 12 par la [deuxième marque antérieure] ». Selon la chambre de recours, ces produits étaient « toutefois identiques ou très similaires aux produits [visés par la marque antérieure et correspondant aux] “véhicules mobiles pour enfants”, qui compren[ai]ent non seulement les bicyclettes, mais aussi, par exemple, les karts à pédales, les trottinettes ou les autopeds ».

74      En ce qui concerne les services compris dans la classe 35, la chambre de recours n’a pas effectué une nouvelle analyse de similitude entre les services tels que désignés dans la liste modifiée par la seconde demande de limitation et les produits pour lesquels avait été enregistrée la deuxième marque antérieure, mais s’est bornée à renvoyer à son analyse effectuée dans la partie de la décision attaquée consacrée à la comparaison entre les services désignés dans la demande initiale de marque et les produits pour lesquels avait été enregistrée la première marque antérieure. Cette analyse se résume au constat selon lequel les services de vente des produits visés par la demande de marque étaient similaires à un degré moyen aux produits pour lesquels avait été enregistrée la deuxième marque antérieure, parce que tous ces produits étaient identiques. La chambre de recours en a déduit que les services visés par la demande de marque pourraient être proposés dans les mêmes lieux que ceux dans lesquels les produits visés par la deuxième marque antérieure étaient vendus (points 32 à 34 et 73 de la décision attaquée).

–       Sur les produits relevant de la classe 12

75      En premier lieu, en ce qui concerne les « véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir : voitures ; motocyclettes ; scooters », visés par la demande de marque, il ressort d’une jurisprudence constante que des produits peuvent être considérés comme identiques lorsque les produits que désigne la marque antérieure sont inclus dans une catégorie plus générale visée par la demande de marque ou lorsque les produits visés par la demande de marque sont inclus dans une catégorie plus générale visée par la marque antérieure [voir arrêt du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY-PROP), T‑133/05, EU:T:2006:247, point 29 et jurisprudence citée].

76      Au vu de cette jurisprudence, la chambre de recours a pu conclure, sans commettre d’erreur d’appréciation, que les « véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir : voitures ; motocyclettes ; scooters » étaient tous inclus dans la catégorie plus générale des produits relevant de la classe 12 et correspondant aux « moyens de transport, à l’exception des bicyclettes et bicyclettes pour enfants », désignés par la deuxième marque antérieure, et que ces produits étaient donc identiques.

77      En deuxième lieu, en ce qui concerne les différents types de bicyclettes visées par la demande de marque, il convient de rappeler que la seconde demande de limitation introduite par la requérante, qui consistait, en ce qui concerne la classe 12, en un ajout d’une liste de produits précédée de l’expression « à savoir », a eu pour effet de créer un catalogue fermé des produits désignés par la marque demandée. Mis à part les « voitures ; motocyclettes ; scooters », visés au point 76 ci-dessus, et les « poussettes », qui seront abordées au point 87 ci-après, ce catalogue comprend précisément les différents types de bicyclettes, telles qu’énumérées au point 73 ci-dessus.

78      Il convient de rappeler également que la deuxième marque antérieure est enregistrée pour les « moyens de transport, à l’exception des bicyclettes et bicyclettes pour enfants ; véhicules mobiles pour enfants ». Il s’ensuit que l’intervenante a également opéré une limitation de la liste de produits visant à exclure de tous les moyens de transport « les bicyclettes et les bicyclettes pour enfants ».

79      À cet égard, il importe d’observer que le cas d’espèce révèle une imprécision de la liste de produits désignés par la deuxième marque antérieure. En effet, la notion de « moyens de transport » est à ce point générale et large qu’elle peut naturellement être comprise comme incluant les « véhicules mobiles pour enfants ». Ainsi, la réponse à la question de savoir si la limitation opérée par l’intervenante évoquée au point 78 ci-dessus couvre seulement les « moyens de transport » ou bien si elle vise tous les produits pour lesquels est enregistrée la marque antérieure, soit les « moyens de transport » et les « véhicules mobiles pour enfants » entendus comme faisant partie des « moyens de transport », n’apparaît pas clairement. Selon le Tribunal, une interprétation de la limitation opérée par l’intervenante en ce sens qu’elle vise seulement les « moyens de transport » et qu’elle ne concerne pas les « véhicules mobiles pour enfants » n’est pas admissible. Cette interprétation aboutit à ce que ces derniers peuvent toujours être considérés comme incluant les « bicyclettes et bicyclettes pour enfants » et, ce faisant, elle prive la limitation en cause de son effet utile. En effet, cette interprétation permet à l’intervenante d’étendre la protection conférée par la deuxième marque antérieure à des produits qui ont, par ailleurs, été exclus de la liste des produits pour lesquels cette marque a été enregistrée. Dans une situation de conflit telle que celle de l’espèce, dans laquelle les produits visés par la marque antérieure sont comparés à des bicyclettes, cette interprétation donne ainsi à l’intervenante la possibilité de tirer profit de l’imprécision de la liste de produits évoquée ci-dessus.

80      Or, selon la jurisprudence, les produits ou les services pour lesquels une marque de l’Union européenne est demandée doivent être identifiés par le demandeur avec suffisamment de clarté et de précision pour permettre aux autorités compétentes et aux opérateurs économiques, sur cette seule base, de déterminer l’étendue de la protection conférée par la marque. Le titulaire de la marque ne saurait tirer profit d’une violation de son obligation d’indiquer la liste des produits de manière claire et précise [voir, en ce sens, arrêt du 6 avril 2017, Nanu-Nana Joachim Hoepp/EUIPO – Fink (NANA FINK), T‑39/16, EU:T:2017:263, points 45 et 48 et jurisprudence citée].

81      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 72 de la décision attaquée, que les diverses « bicyclettes » visées par la demande de marque n’étaient pas des « moyens de transport », mais qu’elles étaient, en revanche, comprises dans la notion de « véhicules mobiles pour enfants », à côté des produits correspondant aux « karts à pédales, [aux] trottinettes ou [aux] autopeds ». En tant que telles, les « bicyclettes » seraient identiques ou très similaires auxdits « véhicules mobiles pour enfants ».

82      Cette conclusion de la chambre de recours est erronée.

83      En effet, d’une part, contrairement à ce qu’a soutenu la chambre de recours, les bicyclettes constituent bien un moyen de transport des personnes et des biens, que ce soit dans le contexte du transport au lieu de travail, de la pratique du sport ou du cyclotourisme. Dans ces conditions, il convient de considérer que les différentes bicyclettes visées par la marque demandée sont similaires à un faible degré aux « moyens de transport, à l’exception des bicyclettes et bicyclettes pour enfants » visés par la deuxième marque antérieure, lesquels englobent, ainsi qu’il a été dit au point 76 ci-dessus, les motocyclettes (voir, en ce sens, arrêt du 14 mai 2019, Triumph, T‑12/18, non publié, EU:T:2019:328, points 34 et 35).

84      D’autre part, la conclusion de la chambre de recours est fondée sur une interprétation restrictive de la limitation opérée par l’intervenante qui ne saurait être admise pour les raisons exposées aux points 79 et 80 ci-dessus. Il résulte en effet desdits points qu’une telle interprétation de l’exclusion des « bicyclettes et bicyclettes pour enfants » introduite par l’intervenante dans la liste des produits couverts par la deuxième marque antérieure la priverait de son effet utile.

85      À cet égard, selon une jurisprudence constante invoquée au point 70 ci-dessus, la similitude entre les produits ou les services en cause doit être appréciée en tenant compte de tous les facteurs pertinents caractérisant le rapport entre eux.

86      Or, comme cela a été évoqué au point 83 ci-dessus, les différentes bicyclettes visées par la demande de marque sont utilisées pour transporter des personnes et des biens au lieu de travail, ainsi que pour pratiquer le sport ou le cyclotourisme. Elles sont, en outre, à l’exception des « bicyclettes pour enfants », destinées à être utilisées par les adultes. En revanche, les « véhicules mobiles pour enfants », parmi lesquels figurent, comme l’a relevé la chambre de recours, les karts à pédales ou les trottinettes, bien qu’ils puissent être utilisés aux fins de transport, ont pour finalité principalement le jeu et le loisir et s’adressent à un public défini, à savoir les enfants. Compte tenu de ces finalités différentes et du public visé par les produits concernés, les différentes bicyclettes et les « véhicules mobiles pour enfants » ne peuvent pas être considérés comme identiques. Au contraire, il y a lieu d’admettre qu’il n’y a entre ces produits qu’une faible similitude.

87      Enfin, en troisième lieu, s’agissant des poussettes, il ressort de la jurisprudence qu’elles sont proches des couffins ou des lits d’enfants dans la finalité de transporter, sur des roues, des enfants, par l’énergie dérivée de la poussée d’un adulte et de façon non motorisée, différentes des « véhicules » (voir, en ce sens, arrêt du 28 octobre 2015, MIRUS, T‑576/13, non publié, EU:T:2015:810, point 37). En tant que telles, elles différent des « véhicules mobiles pour enfants » et ne sauraient, contrairement à ce qu’a conclu la chambre de recours, être considérées comme identiques auxdits véhicules. En effet, d’une part, de toute évidence, elles n’ont pas pour finalité le jeu ou le loisir et, d’autre part, contrairement aux jouets, elles ne sont pas utilisées par les enfants eux-mêmes, mais plutôt par les adultes qui les emploient pour transporter les enfants. Il n’en reste pas moins que tous ces produits partagent les mêmes canaux de distribution et peuvent être vendus dans les mêmes magasins avec des équipements pour les enfants. Pour cette raison, il y a lieu de les considérer comme similaires à un degré moyen.

88      Il résulte de ce qui précède que, en ce qui concerne les différents « véhicules et appareils de locomotion par terre » visés par la demande de marque, ils sont en partie identiques (« voitures ; motocyclettes ; scooters »), en partie similaires à un faible degré (« bicyclettes électriques ; vélos électriques ; bicyclettes ; bicyclettes pour adultes ; vélos de randonnée ; vélos de ville ; vélos BMX ; vélos de course ; vélos pliables ; vélos de cross ; vélos tout-terrain ; bicyclettes pour adolescents ; bicyclettes pour enfants ») et en partie similaires à un niveau moyen (« poussettes ») aux produits visés par la deuxième marque antérieure.

–       Sur les services relevant de la classe 35

89      En ce qui concerne les services relevant de la classe 35, mis à part le caractère extrêmement générique de la motivation de la décision attaquée, il suffit d’observer que l’analyse de la chambre de recours repose sur la prémisse que tous les produits visés par la demande de marque sont identiques aux produits visés par la deuxième marque antérieure. Or, comme cela découle du raisonnement présenté aux points 77 à 87 ci-dessus, cette prémisse est fausse.

90      À cet égard, l’EUIPO rappelle, à juste titre, la jurisprudence dont il ressort que le degré de similitude entre les services de vente au détail d’un produit spécifique et le produit lui-même est considéré comme n’étant « pas faible » [voir, en ce sens, arrêt du 20 mars 2018, Grupo Osborne/EUIPO – Ostermann (DONTORO dog friendship), T‑390/16, non publié, EU:T:2018:156, points 30 à 33].

91      Il s’ensuit que les services de vente en détail des produits visés par la demande de marque qui sont identiques et moyennement similaires aux produits visés par la marque antérieure doivent être considérés comme étant similaires à un niveau moyen aux produits visés par la marque antérieure respectifs. Les services de vente en détail des produits visés par la demande de marque qui sont faiblement similaires aux produits visés par la marque antérieure doivent être considérés comme étant faiblement similaires à ces derniers produits.

–       Sur la comparaison des signes

92      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

93      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée).

94      Par ailleurs, rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence d’une similitude visuelle entre une marque verbale et une marque figurative, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique capable de donner lieu à une impression visuelle [voir arrêt du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, EU:T:2005:156, point 43 et jurisprudence citée].

95      C’est à la lumière de cette jurisprudence qu’il convient d’examiner l’existence d’une similitude entre la marque demandée, qui est une marque verbale, et la deuxième marque antérieure, qui est une marque figurative en noir et blanc, composée d’un élément verbal « berg » écrit en majuscules et en caractères gras et d’éléments figuratifs, à savoir un rectangle entourant le mot « berg » et un motif de lignes en forme de triangle, dont les côtés sont légèrement courbés, placé derrière ledit rectangle (voir point 6 ci-dessus).

–       Sur la similitude visuelle

96      Aux points 54 à 56 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé, notamment, que les éléments figuratifs de la deuxième marque antérieure seraient perçus comme des éléments décoratifs, dont le rôle serait secondaire, alors que le mot « berg » constituerait l’élément dominant et le seul élément distinctif de la marque antérieure. Elle a estimé que, sur le plan visuel, les marques en conflit présentaient un degré de similitude inférieur à la moyenne.

97      À cet égard, d’une part, il ressort de la jurisprudence que lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, l’élément verbal de la marque est, en principe, plus distinctif que l’élément figuratif, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom de la marque qu’en en décrivant l’élément figuratif [voir arrêt du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, EU:T:2008:319, point 30 et jurisprudence citée ; arrêt du 17 janvier 2012, Kitzinger/OHMI – Mitteldeutscher Rundfunk et Zweites Deutsches Fernsehen (KICO), T‑249/10, non publié, EU:T:2012:7, point 42].

98      Au regard de cette jurisprudence, la chambre de recours a correctement conclu que le mot « berg » constituait l’élément distinctif de la marque antérieure. C’est également sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a tenu compte du fait que ce mot, en tant qu’élément distinctif de la marque antérieure, était reproduit à l’identique par la première partie de la marque demandée. Il n’en reste pas moins que, comme relève à juste titre la requérante, l’élément verbal de la marque antérieure est présenté en lettres majuscules et en gras, ce qui n’est pas le cas de la première partie de la marque demandée.

99      D’autre part, compte tenu de sa taille, de sa position centrale et de son caractère distinctif, le mot « berg » doit être considéré comme l’élément dominant de la marque antérieure.

100    Toutefois, il convient de rappeler que ce n’est que lorsque tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43). Or, compte tenu de la taille et de l’agencement des éléments figuratifs de la deuxième marque antérieure, ainsi que du fait qu’ils sont dessinés avec une ligne de la même épaisseur que le mot « berg », il y a lieu de considérer que ces éléments ne peuvent pas être considérés comme négligeables. Partant, la chambre de recours ne pouvait pas limiter l’appréciation de la similitude visuelle des marques en conflit à la seule considération relative à la présence, dans ces deux marques, de l’élément verbal « berg ».

101    Il s’ensuit que sur le plan visuel, le degré de similitude des marques en cause n’est pas « inférieur à la moyenne », comme l’a considéré la chambre de recours, mais faible.

–       Sur la similitude phonétique

102    Au point 57 de la décision attaquée, la chambre de recours a reconnu une similitude moyenne des marques en conflit sur le plan phonétique, en tenant principalement compte du fait que la deuxième marque antérieure se prononçait de la même manière que la première partie de la marque demandée (bèrg), sur laquelle les consommateurs focalisent habituellement leur attention.

103    À cet égard, d’une part, il ressort de la jurisprudence que, sur le plan phonétique, une marque figurative peut faire l’objet d’une comparaison utile avec une autre marque, si cette marque figurative contient un élément verbal [voir, en ce sens, arrêt du 7 février 2012, Dosenbach-Ochsner/OHMI – Sisma (Représentation d’éléphants dans un rectangle), T‑424/10, EU:T:2012:58, point 45 et jurisprudence citée]. La chambre de recours a donc pu effectuer une comparaison phonétique des marques en cause, ayant constaté que la deuxième marque antérieure pouvait être prononcée en tant que telle.

104    D’autre part, une jurisprudence constante reconnaît que le consommateur prête généralement une plus grande attention au début d’une marque qu’à sa fin et que le mot placé au début du signe est susceptible d’avoir un impact plus important que le reste du signe [voir arrêt du 11 mai 2010, Wessang/OHMI – Greinwald (star foods), T‑492/08, non publié, EU:T:2010:186, point 46 et jurisprudence citée ]. Toutefois, il ressort d’une jurisprudence tout aussi constante, rappelée aux points 92 et 93 ci-dessus, que la comparaison des marques en conflit doit être effectuée au regard de l’impression produite par ces marques dans leur ensemble.

105    Or, comme le soutient à juste titre la requérante, la similitude entre la première syllabe de la marque demandée et l’élément verbal de la deuxième marque antérieure est fortement atténuée par le fait que ce dernier est composé d’une seule syllabe, alors que la marque demandée est composée de trois syllabes. En effet, mis à part une différence évidente dans la prononciation d’un mot court et d’un mot long, il y a lieu de relever que, dans la plupart des langues utilisées au sein de l’Union, un mot composé de trois syllabes sera prononcé avec l’accent tonique tombant sur l’avant dernière syllabe, autrement dit la syllabe du milieu. C’est cette syllabe, en l’occurrence prononcée « chtaï », et non la première syllabe, prononcée « bèrg », qui dominera phonétiquement lorsque le mot « bergsteiger » sera prononcé.

106    Par conséquent, il y a lieu de considérer que, sur le plan phonétique, les marques en conflit ne sont pas moyennement similaires, mais seulement faiblement similaires.

–       Sur la similitude conceptuelle

107    Il résulte des points 40 et 58 de la décision attaquée que, sur le plan conceptuel, la chambre de recours a tenu compte uniquement de la perception des marques en conflit par le public pertinent néerlandophone. La chambre de recours a considéré que la marque demandée, considérée dans son ensemble, était dépourvue de signification en néerlandais. Elle a néanmoins conclu que les marques en conflit étaient conceptuellement similaires à un degré moyen pour la partie néerlandophone du public pertinent, dans la mesure où elles avaient en commun le vocable « berg », qui véhicule la même notion de montagne, alors qu’elles se distinguent par la notion véhiculée par l’autre mot de la marque demandée, « steiger ».

108    Il convient de constater que la chambre de recours a correctement conclu que le mot « bergsteiger » était dépourvu de signification en néerlandais, alors que le mot « berg » signifiait « montagne » dans cette langue.

109    À cet égard, il ressort, certes, de la jurisprudence que, lorsque l’un des deux signes en conflit n’a pas de signification pour le public pertinent, tandis que l’autre évoque un concept, il y a lieu de considérer que la comparaison de ces signes ne peut être effectuée [voir, en ce sens, arrêts du 16 septembre 2013, Gitana/OHMI – Teddy (GITANA), T‑569/11, non publié, EU:T:2013:462, point 67 ; du 13 mai 2015, Harper Hygienics/OHMI – Clinique Laboratories (CLEANIC intimate), T‑363/13, non publié, EU:T:2015:276, points 73 et 74, et du 21 janvier 2016, Spokey/OHMI – Leder Jaeger (SPOKeY), T‑846/14, non publié, EU:T:2016:24, point 63] ou bien que les deux signes sont conceptuellement différents [voir, en ce sens, arrêts du 24 septembre 2008, Anvil Knitwear/OHMI – Aprile e Aprile (Aprile), T‑179/07, non publié, EU:T:2008:401, point 60 ; du 9 mars 2012, EyeSense/OHMI – Osypka Medical (ISENSE), T‑207/11, non publié, EU:T:2012:121, point 34, et du 19 septembre 2017, RP Technik/EUIPO – Tecnomarmi (RP ROYAL PALLADIUM), T‑768/15, non publié, EU:T:2017:630, points 88 et 89].

110    Toutefois, comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre au point 38 de la décision attaquée, si le mot « bergsteiger » n’a aucune signification en néerlandais, le mot « steiger » existe dans cette langue et signifie « lieu de débarquement » (par exemple pour un bateau) ou « échafaudage ».

111    Or, il ressort de la jurisprudence que, même si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en reste pas moins que, en percevant un signe verbal, il identifiera des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou ressemblent à des mots qu’il connaît [arrêts du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, EU:T:2004:292, point 51 ; du 13 février 2007, RESPICUR, T‑256/04, EU:T:2007:46, point 57, et du 19 septembre 2012, TeamBank/OHMI – Fercredit Servizi Finanziari (f@ir Credit), T‑220/11, non publié, EU:T:2012:444, point 38].

112    Partant, la chambre de recours a pu admettre, sans commettre d’erreur d’appréciation, que le public pertinent néerlandophone décomposera le mot « bergsteiger » en deux mots, « berg » et « steiger », et qu’il fera un lien conceptuel entre le premier de ces mots et l’élément verbal de la deuxième marque antérieure.

113    Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en focalisant son appréciation de la similitude conceptuelle des marques en conflit sur le mot « berg », signifiant « montagne » en néerlandais, et en constatant que, en raison de la présence de ce mot dans ces deux marques, elles étaient moyennement similaires sur le plan conceptuel.

114    La requérante soutient que les signes en conflit ne sont pas similaires sur le plan conceptuel. Elle se fonde sur la signification des termes qui correspondent aux deux signes en allemand et soutient que le mot « berg », qui signifie « montagne », diffère conceptuellement du mot « bergsteiger », qui signifie « alpiniste », puisque le premier se réfère à un élément géologique du paysage et l’autre à une activité sportive ou à une profession.

115    L’argument de la requérante ne saurait renverser la conclusion présentée au point 113 ci-dessus. D’une part, cet argument est fondé sur la comparaison de la signification qu’ont les signes en conflit en allemand alors que la chambre de recours a fondé son raisonnement sur la signification de ces signes en néerlandais. D’autre part, les concepts véhiculés par les mots « montagne » et « alpiniste » sont proches, l’alpinisme étant généralement exercée en montagne.

–       Sur l’appréciation globale du risque de confusion

116    Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

117    Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

118    Au point 60 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu que, compte tenu de l’identité des produits en cause compris dans la classe 12 et du niveau moyen de similitude des services de vente au détail en cause compris dans la classe 35, du niveau de similitude visuelle inférieur à la moyenne, du niveau moyen de similitude phonétique et conceptuelle des signes en conflit, ainsi que du niveau normal de caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, du moins dans l’esprit du public du Benelux, même en tenant compte d’un niveau d’attention accru.

119    Or, l’examen des arguments avancés par la requérante dans le cadre du deuxième moyen de recours a révélé plusieurs erreurs d’appréciation qui entachent cette conclusion.

120    Tout d’abord, en ce qui concerne les « véhicules et appareils de locomotion par terre, à savoir voitures ; motocyclettes ; scooters », relevant de la classe 12, il y a lieu de rappeler qu’ils sont considérés comme identiques aux « moyens de transport, à l’exception des bicyclettes et les bicyclettes pour enfants », couverts par la deuxième marque antérieure (voir point 76 ci-dessus). Toutefois, compte tenu de la faible similitude visuelle et phonétique des marques en conflit ainsi que du fait que le public pertinent fait en général preuve d’une grande attention lors de l’achat des voitures, des motocyclettes et des scooters, notamment en raison de leur complexité technique et de leur prix (voir, en ce sens, arrêts du 22 mars 2011, CA, T‑486/07, non publié, EU:T:2011:104, point 35 ; du 21 mars 2012, SWIFT GTi, T‑63/09, non publié, EU:T:2012:137, points 41 et 42, et du 14 mai 2019, Triumph, T‑12/18, non publié, EU:T:2019:328, point 21), il y a lieu de considérer qu’il n’existe pas de risque que le public puisse croire que ces produits proviennent de la même entreprise que les produits pour lesquels est enregistrée la deuxième marque antérieure ou d’une entreprise liée économiquement à ladite entreprise, et ce malgré le niveau moyen de similitude conceptuelle entre les marques en conflit. Cette conclusion s’applique mutatis mutandis aux services de vente en détail des produits concernés, relevant de la classe 35.

121    Ensuite, il résulte des observations présentées aux points 77 à 84 et 91 ci-dessus que les différents types de bicyclettes, relevant de la classe 12, ainsi que les services de vente en détail de ces bicyclettes, relevant de la classe 35, désignés par la demande de marque doivent être considérés comme faiblement similaires aux « moyens de transport » et aux « véhicules mobiles pour enfants » désignés par la deuxième marque antérieure. Toutefois, compte tenu de la faible similitude visuelle et phonétique des marques en conflit, il n’y a pas de risque que le public puisse croire que lesdites bicyclettes proviennent de la même entreprise que les produits pour lesquels est enregistrée la deuxième marque antérieure ou d’une entreprise liée économiquement à ladite entreprise, et ce malgré le niveau moyen de similitude conceptuelle entre les marques en conflit.

122    Enfin, en ce qui concerne les poussettes, relevant de la classe 12, elles présentent un degré moyen de similitude avec les « véhicules mobiles pour enfants » pour lesquels est enregistrée la deuxième marque antérieure (voir point 87 ci-dessus). Toutefois, il résulte de la jurisprudence que le public pertinent fait preuve d’un degré d’attention très élevé en achetant ce type de produits (arrêt du 28 octobre 2015, MIRUS, T‑576/13, non publié, EU:T:2015:810, point 32). Compte tenu de ce niveau élevé d’attention du public pertinent, ainsi que de la faible similitude visuelle et phonétique des marques en conflit, il n’existe pas de risque que le public puisse croire que les poussettes visées par la demande de marque proviennent de la même entreprise que les « véhicules mobiles pour enfants » pour lesquels est enregistrée la deuxième marque antérieure ou d’une entreprise liée économiquement à ladite entreprise, et ce malgré le niveau moyen de similitude conceptuelle entre les marques en conflit. Cette conclusion s’applique mutatis mutandis aux services de vente en détail des poussettes, relevant de la classe 35.

123    Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu d’accueillir également le deuxième moyen du recours et d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

124    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

125    L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de celle-ci.

126    En application de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, l’intervenante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 22 octobre 2018 (affaire R 572/2018-4) est annulée.

2)      L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Runnebaum Invest GmbH.

3)      Berg Toys Beheer BV supportera ses propres dépens.

Gervasoni

Kowalik-Bańczyk

Mac Eochaidh

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 novembre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.