Language of document : ECLI:EU:C:2004:161

Arrêt de la Cour

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
18 mars 2004 (1)


Libre prestation des services – Régime d'aide applicable aux fonctionnaires en cas de maladie – Cure thermale effectuée dans un autre État membre – Dépenses afférentes à l'hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l'élaboration d'un rapport médical final – Conditions de prise en charge – Déclaration préalable d'éligibilité à l'aide – Critères – Justification

Dans l'affaire C-8/02,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par le Verwaltungsgericht Sigmaringen (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Ludwig Leichtle

et

Bundesanstalt für Arbeit,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 49 CE et 50 CE,



LA COUR (cinquième chambre)



composée de M. C. W. A. Timmermans, faisant fonction de président de la cinquième chambre, MM. A. La Pergola (rapporteur) et S. von Bahr, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,
greffier: M. R. Grass,

considérant les observations écrites présentées:

pour le gouvernement espagnol, par Mme L. Fraguas Gadea, en qualité d'agent,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme Ph. Ormond, en qualité d'agent, assistée de Mme S. Moore, barrister,

pour la Commission des Communautés européennes, par Mmes H. Michard et C. Schmidt, en qualité d'agents,

vu le rapport du juge rapporteur,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 10 juillet 2003,

rend le présent



Arrêt



1
Par ordonnance du 28 novembre 2001, parvenue à la Cour le 11 janvier 2002, le Verwaltungsgericht Sigmaringen a posé, en vertu de l’article 234 CE, deux questions préjudicielles sur l’interprétation des articles 49 CE et 50 CE.

2
Ces questions ont été soulevées dans le cadre d’un litige opposant M. Leichtle à la Bundesanstalt für Arbeit (Office fédéral de l’emploi, ci-après la «Bundesanstalt») au sujet du refus de cette dernière d’assumer la prise en charge de dépenses liées à une cure thermale que le requérant au principal envisageait de suivre en Italie.


La réglementation nationale

3
L’Allgemeine Verwaltungsvorschrift für Beihilfen in Krankheits-, Pflege-, Geburts- und Todesfällen (disposition générale d’application relative à l’aide versée aux fonctionnaires en cas de maladie, de soins, de maternité et de décès), dénommée «Beihilfevorschriften» (dispositions sur l’aide), dans sa version du 10 juillet 1995 (Gemeinsames Ministerialblatt, p. 470), telle que modifiée en dernier lieu le 20 février 2001 (Gemeinsames Ministerialblatt, p. 186, ci-après les «BhV»), régit l’octroi d’aides aux fonctionnaires et aux juges fédéraux ainsi qu’aux fonctionnaires retraités de l’État fédéral, en cas de maladie, de soins, de naissance et de décès.

4
Aux termes de l’article 1er des BhV, lesdites aides «complètent la couverture personnelle supportée par la rémunération courante», les intéressés étant censés avoir contracté une assurance maladie privée.

5
La prise en charge des soins par l’assurance maladie privée ou par le biais des aides prévues par les BhV intervient sous forme de remboursement aux intéressés des montants exposés par ceux-ci.

6
Intitulé «[d]épenses engagées pour une cure thermale éligibles à l’aide», l’article 8 des BhV prévoit:

«[…]

2)      Satisfont aux conditions d’octroi de l’aide en raison d’une cure thermale:

1. les dépenses prévues à l’article 6, paragraphe 1, sous 1) à 3),

2. les dépenses engagées pour l’hébergement et la restauration pour une durée maximale de 23 jours calendaires incluant les jours de voyage, à concurrence d’une somme journalière de 30 DEM; […]

3. les dépenses prévues à l’article 6, paragraphe 1, sous 9),

4. les dépenses engagées pour la taxe de séjour […],

5. les dépenses engagées pour le rapport médical final.

3)      Les dépenses prévues au paragraphe 2, sous 2) à 5), ne sont éligibles à l’aide que:

1. si la cure thermale est, d’après une expertise délivrée par les services de santé publique ou par le médecin-conseil, indispensable pour rétablir ou maintenir l’aptitude à exercer des fonctions après une maladie grave ou si, en cas de douleur chronique importante, une balnéo ou une climatothérapie est d’une impérieuse nécessité et qu’elle ne peut pas être remplacée par d’autres actions thérapeutiques présentant des chances égales de réussite, en particulier par un traitement dispensé au lieu de résidence du fonctionnaire ou à son lieu d’affectation au sens du Bundesumzugskostengesetz [loi fédérale allemande sur les frais de déménagement];

2. si l’autorité chargée de fixer le montant de l’aide a préalablement reconnu cette éligibilité. Cette reconnaissance ne vaut que si le traitement est entamé dans un délai de 4 mois à compter de la notification de la décision;

[...]

6)      Une cure thermale au sens de la présente disposition est une cure effectuée sous contrôle médical et selon un plan de cure dans une station thermale figurant sur la liste ad hoc; le logement doit se trouver dans la station thermale et y être rattaché.»

7
Aux termes de l’article 13 des BhV, intitulé «[d]épenses engagées hors de la République fédérale d’Allemagne éligibles à l’aide»:

«1)    Les dépenses engagées hors de la République fédérale d’Allemagne ne sont éligibles à l’aide que s’il s’agit de dépenses prévues aux articles 6 et 9 à 12 et dans la seule mesure où elles auraient été exposées en République fédérale d’Allemagne et éligibles à l’aide à concurrence du montant prévu si le traitement avait été suivi au lieu de résidence de la personne concernée.

2)      [...]

3)      Les dépenses engagées en raison d’une cure thermale effectuée hors de la République fédérale d’Allemagne et visées à l’article 8, paragraphe 2, sous 2) à 5), ne sont exceptionnellement éligibles à l’aide que:

1. s’il a été établi par l’expertise des services de santé publique ou d’un médecin-conseil que la cure thermale est d’une impérieuse nécessité en raison des chances de réussite beaucoup plus élevées hors de la République fédérale d’Allemagne, et

2. si la station thermale figure sur la liste ad hoc et

3. si les autres conditions énumérées à l’article 8 sont remplies.

Les dépenses visées à l’article 8, paragraphe 2, sous 1), 3) à 5), sont éligibles à l’aide sans limitation aux frais exposés en République fédérale d’Allemagne.

4)      [...]»


Le litige au principal et les questions préjudicielles

8
M. Leichtle est fonctionnaire de la Bundesanstalt. Le 22 février 2000, il a demandé à cette dernière que les dépenses liées à une cure thermale qu’il envisageait de suivre à Ischia (Italie) soient reconnues éligibles à l’aide prévue par les BhV.

9
Cette demande a été rejetée par la Bundesanstalt le 29 février 2000, au motif qu’il n’était pas satisfait à la condition prescrite par l’article 13, paragraphe 3, sous 1), des BhV. Selon le médecin du personnel de la Bundesanstalt, les informations médicales disponibles ne permettaient pas en effet de considérer que la cure dispensée à Ischia offrait des chances de succès beaucoup plus élevées que les cures thermales accessibles en Allemagne.

10
La réclamation introduite par M. Leichtle contre cette décision a été rejetée par la Bundesanstalt par décision du 22 mars 2000.

11
M. Leichtle a alors introduit un recours devant le Verwaltungsgericht Sigmaringen en vue d’obtenir l’annulation de ces décisions. Il s’est ensuite rendu à Ischia où il a suivi une cure thermale du 29 avril au 13 mai 2000.

12
À l’appui de son recours, M. Leichtle soutient que l’article 13, paragraphe 3, des BhV méconnaît les articles 49 CE et 50 CE. Cette disposition aurait pour conséquence de rendre l’accès aux cures dispensées dans d’autres États membres pratiquement impossible pour les intéressés et l’obstacle à la libre prestation des services ainsi engendré ne pourrait être justifié par la nécessité d’assurer le maintien d’une capacité de soins ou d’une capacité médicale essentielle sur le territoire national.

13
La Bundesanstalt objecte qu’une libéralisation totale de l’accès aux établissements thermaux européens mettrait en danger l’équilibre financier, la compétence médicale et hospitalière ainsi que le niveau médical du système des établissements thermaux allemands.

14
La Bundesanstalt conteste, par ailleurs, l’intérêt à agir de M. Leichtle. Elle souligne que les dépenses relatives aux actes strictement médicaux reçus par l’intéressé à Ischia, soit un montant de 239,10 euros, ont été reconnues éligibles à l’aide à concurrence d’un montant de 154,41 euros, si bien que demeurerait seule en question l’éligibilité des frais connexes de 326,72 euros et de 1 124,84 euros relatifs au transport et à l’hébergement. Or, M. Leichtle ne pourrait pas, en tout état de cause, prétendre au remboursement desdits frais, dans la mesure où il a suivi la cure litigieuse sans que la condition impérative de reconnaissance préalable de l’éligibilité de l’aide ait été satisfaite.

15
Le Verwaltungsgericht Sigmaringen souligne qu’il n’est pas contesté entre les parties que les conditions sanitaires prévues à l’article 8, paragraphe 3, sous 1), des BhV sont remplies, à savoir que la cure suivie par M. Leichtle était nécessaire et ne pouvait être remplacée par d’autres actions thérapeutiques présentant des chances égales de réussite dispensées au lieu de résidence ou d’affectation de celui-ci.

16
Selon le Verwaltungsgericht Sigmaringen, il est de même établi que l’application du critère prévu à l’article 13, paragraphe 3, sous 1), des BhV doit, en l’occurrence, conduire à un refus de reconnaissance d’éligibilité à l’aide, compte tenu de l’existence, en Allemagne, notamment à Bad Steben ou à Bad Münster am Stein, de centres thermaux à même de dispenser des cures alternatives équivalentes à celle suivie par M. Leichtle en Italie.

17
Il s’ensuit que l’issue du litige au principal dépend principalement de la question de savoir si c’est à bon droit que cette dernière disposition soumet l’octroi d’une aide, à l’égard de certaines dépenses afférentes à des cures thermales effectuées dans d’autres États membres, à des conditions restrictives particulières par rapport à celles qui s’appliquent lorsque la cure a lieu sur le territoire national ou si les articles 49 CE et 50 CE s’y opposent.

18
Le Verwaltungsgericht Sigmaringen estime, tout d’abord, qu’il se déduit de la jurisprudence de la Cour, en particulier des arrêts du 28 avril 1998, Kohll (C‑158/96, Rec. p. I-1931), et du 12 juillet 2001, Smits et Peerbooms (C‑157/99, Rec. p. I‑5473), que la disposition nationale susmentionnée constitue, tant pour le fonctionnaire concerné que pour les prestataires établis dans d’autres États membres, un obstacle à la libre prestation de services médicaux.

19
Certes, les dispositions des BhV ne s’opposent pas à l’octroi d’une aide en ce qui concerne les prestations proprement médicales dispensées lors d’une cure suivie dans un autre État membre, le montant de l’aide étant, en pareille hypothèse, limité, ainsi qu’il ressort des articles 13, paragraphe 1, et 8, paragraphes 2, sous 1), et 3, des BhV, à celui qui aurait été versé si les traitements avaient été effectués en Allemagne. Toutefois, le fait de soumettre l’octroi d’une aide pour l’hébergement, la restauration, les frais de voyage, la taxe de séjour et le rapport médical final, liés à une cure suivie hors d’Allemagne, à l’obtention d’une reconnaissance préalable d’éligibilité qui n’est délivrée qu’aux conditions très restrictives que prévoit l’article 13, paragraphe 3, sous 1), des BhV aurait pour conséquence pratique d’empêcher le fonctionnaire de suivre une telle cure. En effet, les facteurs de coût susmentionnés ne devraient pas être considérés séparément des prestations proprement médicales dont ils constitueraient l’accessoire inévitable, une cure thermale nécessitant par nature du temps, un déplacement et un séjour sur place du patient, ce qui l’apparenterait du reste à un traitement hospitalier.

20
Le Verwaltungsgericht Sigmaringen demande dès lors si le régime que prévoit l’article 13, paragraphe 3, sous 1), des BhV est ou non susceptible d’être justifié au regard des règles du traité.

21
Il considère, à cet égard, que l’arrêt Smits et Peerbooms, précité, ne permettrait pas, à lui seul, de résoudre les questions posées en l’espèce, dans la mesure où, à la différence du système national qui était en cause dans cette affaire, les BhV ne garantiraient pas aux fonctionnaires des prestations en nature ni ne planifieraient, au moyen par exemple d’un conventionnement, un système de couverture sociale qu’il y aurait lieu de protéger à l’aide des restrictions que prévoient les BhV.

22
Le Verwaltungsgericht Sigmaringen doute par ailleurs de la pertinence de l’argument de la Bundesanstalt selon lequel une libéralisation totale de l’accès aux établissements thermaux européens impliquerait un véritable danger pour l’équilibre financier et la compétence médicale et hospitalière du système des établissements thermaux allemands. Il relève, en particulier, que, dans l’arrêt Smits et Peerbooms, précité, la Cour aurait notamment considéré qu’il ne pouvait être admis qu’une priorité soit donnée aux établissements hospitaliers nationaux avec lesquels la caisse d’assurance maladie de l’assuré n’a pas conclu de convention, au détriment d’établissements hospitaliers situés dans d’autres États membres.

23
Dans l’hypothèse où la Cour interpréterait les articles 49 CE et 50 CE en ce sens qu’ils s’opposent à la condition particulière que pose l’article 13, paragraphe 3, sous 1), des BhV, le Verwaltungsgericht Sigmaringen est d’avis que, en présence d’une cure dont la nécessité médicale est établie et à propos de laquelle la seule question litigieuse est de savoir si les dispositions nationales qui conditionnent l’octroi d’une aide sont conformes au droit communautaire, on ne saurait exiger de l’intéressé qu’il obtienne une reconnaissance préalable d’éligibilité à l’aide, y compris devant la juridiction compétente, avant de suivre la cure thermale envisagée. Selon le Verwaltungsgericht Sigmaringen, ceci reviendrait en effet à priver l’intéressé de toute possibilité effective de suivre une telle cure dans un autre État membre et, partant, de bénéficier des règles communautaires sur la libre prestation des services. Ne pouvant médicalement retarder ladite cure durant le temps nécessaire au déroulement des procédures administrative et judiciaire, l’intéressé se trouverait en effet contraint de suivre une cure en Allemagne.

24
Selon le Verwaltungsgericht Sigmaringen, il s’ensuivrait que doit être rejeté l’argument de la Bundesanstalt selon lequel la demande de M. Leichtle doit être déclarée irrecevable au motif que l’intéressé a effectué la cure litigieuse sans avoir au préalable obtenu une reconnaissance d’éligibilité à l’aide des dépenses qui y sont afférentes.

25
Relevant que, même si la jurisprudence du Bundesverwaltungsgericht (Allemagne) contient des indications qui semblent militer en faveur de l’interprétation ainsi préconisée, il n’existe pas de jurisprudence nationale fermement établie sur la question, le Verwaltungsgericht Sigmaringen souhaite savoir si ladite interprétation est susceptible de s’imposer en droit communautaire.

26
C’est dans ces conditions que cette juridiction a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)
Faut-il interpréter les articles 49 CE et 50 CE en ce sens qu’ils s’opposent à l’application d’une réglementation nationale (en l’espèce, l’article 13, paragraphe 3, [des […] BhV]) qui subordonne la prise en charge des frais exposés lors d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre à son impérieuse nécessité du fait de chances de succès beaucoup plus élevées hors de la République fédérale d’Allemagne, à ce que cela soit établi par une expertise des services de santé publique ou par un médecin-conseil et à ce que la station thermale figure sur la liste ad hoc?

2)
Faut-il interpréter les articles 49 CE et 50 CE en ce sens qu’ils s’opposent à l’application d’une réglementation nationale [en l’espèce, l’article 13, paragraphe 3, première phrase, sous 3), des BhV en liaison avec l’article 8, paragraphe 3, sous 2), des BhV] suivant laquelle la reconnaissance préalable d’une cure thermale est exclue si l’auteur de la demande n’attend pas la clôture de la procédure de demande ou d’une procédure contentieuse consécutive avant d’entamer la cure et que la seule question litigieuse est de savoir si ladite réglementation exclut à bon droit l’éligibilité d’une cure thermale faite dans un autre État membre de l’Union européenne aux fins de la prise en charge des dépenses?»


Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

27
Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui subordonne la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, d’une part, à l’obtention d’une reconnaissance préalable d’éligibilité qui n’est octroyée que pour autant qu’il est établi, par une expertise des services de santé publique ou par un médecin-conseil, que la cure envisagée revêt une impérieuse nécessité du fait de chances de succès beaucoup plus élevées dans cet autre État membre et, d’autre part, à la condition que la station thermale concernée figure sur une liste ad hoc.

28
En vue de répondre à cette question, il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que, selon une jurisprudence constante, les activités médicales relèvent du champ d’application de l’article 50 CE, sans qu’il y ait lieu de distinguer à cet égard selon que les soins sont dispensés dans un cadre hospitalier ou en dehors d’un tel cadre (voir, notamment, arrêts du 12 juillet 2001, Vanbraekel e.a., C-368/98, Rec. p. I‑5363, point 41 ; Smits et Peerbooms, précité, point 53, ainsi que du 13 mai 2003, Müller-Fauré et Van Riet, C-385/99, Rec. p. I-4509, point 38).

29
Par ailleurs, s’il est constant que le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des États membres pour aménager leur système de sécurité sociale et que, en l’absence d’une harmonisation au niveau communautaire, il appartient à la législation de chaque État membre de déterminer les conditions d’octroi des prestations en matière de sécurité sociale, il demeure toutefois que, dans l’exercice de cette compétence, les États membres doivent respecter le droit communautaire (voir, notamment, arrêts précités Smits et Peerbooms, points 44 à 46, ainsi que Müller-Fauré et Van Riet, point 100, et jurisprudence citée).

30
C’est ainsi que la Cour a notamment jugé que l’article 49 CE s’oppose à l’application de toute réglementation nationale subordonnant le remboursement de frais médicaux encourus dans un autre État membre à un système d’autorisation préalable lorsqu’il apparaît qu’un tel système décourage, voire empêche, les assurés sociaux de s’adresser aux prestataires de services médicaux établis dans des États membres autres que celui d’affiliation, à moins que l’obstacle à la libre prestation des services qui en résulte puisse être justifié au regard de l’une des exceptions admises par le traité CE (voir, en ce sens, arrêts précités Kohll, points 33 à 36 ; Smits et Peerbooms, points 62, 69 et 71, ainsi que Müller-Fauré et Van Riet, points 44 et 45).

31
S’agissant de la présente affaire, il convient, certes, de relever que la question préjudicielle ne porte pas sur la prise en charge des dépenses afférentes aux prestations de soins proprement dites dispensées à l’occasion d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, de telles dépenses ayant, en l’occurrence, déjà fait l’objet d’un remboursement conformément aux dispositions des BhV.

32
Il n’en demeure pas moins toutefois que le fait pour une législation d’un État membre de soumettre le remboursement des autres dépenses exposées en raison d’une telle cure à des conditions différentes de celles qui prévalent en ce qui concerne les cures effectuées dans cet État membre est susceptible de décourager les assurés sociaux de s’adresser aux prestataires de services médicaux établis dans des États membres autres que celui d’affiliation.

33
Ainsi que le relève la juridiction de renvoi, les dépenses liées à l’hébergement et à la restauration peuvent en effet être considérées comme faisant partie intégrante de la cure thermale elle-même. À cet égard, il ressort de l’article 8, paragraphe 6, des BhV que l’aide octroyée sur le fondement de cette législation n’est susceptible de bénéficier qu’aux cures effectuées sous contrôle médical et selon un plan de cure dans une station thermale, le logement devant se trouver dans la station et y être rattaché. De la même manière que les soins dispensés à l’hôpital peuvent impliquer un séjour hospitalier, la cure thermale effectuée à des fins thérapeutiques est donc, par nature, susceptible d’englober le séjour sur place du patient.

34
Pour sa part, le rapport médical élaboré en fin de cure relève directement de l’activité médicale.

35
Quant aux frais de voyage et à l’éventuelle taxe de séjour, même s’ils ne revêtent pas un caractère médical ni ne sont en principe acquittés au profit de prestataires de soins de santé, il demeure qu’ils apparaissent indissociablement liés à la cure elle-même en ce que cette dernière implique nécessairement, ainsi que précédemment relevé, le déplacement et le séjour sur place du patient.

36
Il s’ensuit que les conditions éventuelles de prise en charge de ces diverses dépenses par un régime tel que les BhV sont bien susceptibles d’avoir une influence directe sur le choix du lieu de cure et, partant, sur la sélection d’un centre de cure thermale à même de fournir ce type de services.

37
En ce qui concerne, en premier lieu, le principe même de l’exigence d’une reconnaissance préalable de l’éligibilité à l’aide des dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, et abstraction faite des conditions auxquelles se trouve soumise l’obtention d’une telle reconnaissance, il convient de relever qu’il ressort des articles 8, paragraphe 3, et 13, paragraphe 3, des BhV que ce principe s’applique en ce qui concerne les dépenses occasionnées par une cure thermale effectuée tant en Allemagne qu’en dehors de cette dernière. Il s’ensuit que ladite exigence n’a pas, comme telle, pour effet de rendre les prestations de services entre États membres, en l’occurrence celles qu’offrent les centres de cure situés dans d’autres États membres, plus difficiles que les prestations qui sont purement internes, à savoir celles qu’offrent les centres de cure situés en Allemagne (voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 1994, Commission/France, C‑381/93, Rec. p. I‑5145, point 17; Kohll, précité, point 33, ainsi que Smits et Peerbooms, précité, point 61).

38
S’agissant, en second lieu, des conditions auxquelles les BhV subordonnent la reconnaissance d’éligibilité à l’aide de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée en dehors d’Allemagne, il convient de relever qu’elles sont, ainsi qu’il ressort de la combinaison des articles 8, paragraphe 3, et 13, paragraphe 3, des BhV, au nombre de deux.

39
La première de ces conditions requiert soit qu’une expertise délivrée par les services de santé publique ou par le médecin-conseil établisse que la cure est indispensable pour rétablir ou maintenir l’aptitude du fonctionnaire à exercer des fonctions après une maladie grave, soit que, en cas de douleur chronique importante, une balnéothérapie ou une climatothérapie soit d’une impérieuse nécessité et qu’elle ne puisse être remplacée par d’autres actions thérapeutiques présentant des chances égales de réussite, en particulier par un traitement dispensé au lieu de résidence ou au lieu d’affectation du fonctionnaire.

40
À cet égard, il y a lieu de constater que de telles exigences, qui, ainsi qu’il ressort des articles 8, paragraphe 3, sous 1), et 13, paragraphe 3, sous 3), des BhV, s’appliquent indistinctement selon qu’il s’agit de dépenses occasionnées en raison de cures thermales effectuées en Allemagne ou en dehors de cette dernière, n’ont pas pour effet de rendre les prestations de services entre États membres plus difficiles que les prestations qui sont purement internes (voir, en ce sens, jurisprudence citée au point 37 du présent arrêt).

41
Posée par l’article 13, paragraphe 3, sous 1), des BhV, la seconde condition ne s’applique, en revanche, qu’en ce qui concerne les dépenses occasionnées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre que l’Allemagne, puisqu’elle implique précisément, pour que lesdites dépenses soient reconnues éligibles à l’aide, que soit établie, par expertise des services de santé publique ou par le médecin-conseil, l’impérieuse nécessité de la cure thermale en raison des chances de réussite beaucoup plus élevées hors d’Allemagne.

42
Ainsi qu’il résulte de la jurisprudence rappelée au point 30 du présent arrêt, ne saurait être admise une telle condition qui, de par sa nature même, a pour effet de dissuader les fonctionnaires relevant du champ d’application des BhV de s’adresser aux centres de cure thermale établis dans d’autres États membres, à moins que l’obstacle à la libre prestation des services qui en résulte puisse être justifié au regard du traité.

43
Conformément à une jurisprudence constante, il importe à cet égard de s’assurer, en cas de justification tirée d’une exception prévue par le traité, comme, au demeurant, d’une raison impérieuse d’intérêt général, que les mesures prises à ce titre n’excèdent pas ce qui est objectivement nécessaire à cette fin et que ce résultat ne puisse être obtenu par des règles moins contraignantes (voir arrêt Müller-Fauré et Van Riet, précité, point 68, et jurisprudence citée).

44
Ainsi qu’il ressort de l’ordonnance de renvoi, la Bundesanstalt soutient, en se référant à un courrier du ministère fédéral de l’Intérieur, qu’une libéralisation totale de l’accès aux établissements thermaux européens impliquerait un véritable danger pour l’équilibre financier et la compétence médicale et hospitalière du système des établissements thermaux allemands. De la même manière, le gouvernement espagnol fait valoir, dans ses observations écrites, que la condition litigieuse serait justifiée au regard de la nécessité de préserver l’équilibre financier en matière de cures thermales et d’assurer le maintien d’une capacité de soins ainsi que d’une compétence médicale dans ce secteur sur le territoire allemand.

45
Il importe toutefois de rappeler que les raisons justificatives susceptibles d’être invoquées par un État membre doivent être accompagnées d’une analyse de l’aptitude et de la proportionnalité de la mesure restrictive adoptée par cet État.

46
Force est à cet égard de constater que ni le dossier transmis à la Cour par la juridiction de renvoi ni les observations soumises à la Cour ne comportent d’éléments précis permettant d’étayer l’argument selon lequel la disposition de l’article 13, paragraphe 3, sous 1), des BhV serait nécessaire aux fins de maintenir une capacité de soins ou une compétence médicale essentielle à la protection de la santé publique (voir, dans un sens analogue, arrêt Müller-Fauré et Van Riet, précité, point 70).

47
Quant à la justification tirée de la nécessité d’éviter un risque d’atteinte grave à l’équilibre financier du système de sécurité sociale, il convient de relever qu’aucun argument précis n’a été avancé devant la Cour à l’appui de l’affirmation selon laquelle la disposition de l’article 13, paragraphe 3, sous 1), des BhV serait nécessaire à de telles fins (voir, dans un sens analogue, arrêt Müller-Fauré et Van Riet, précité, point 93).

48
Il convient en outre de rappeler qu’il appartient aux seuls États membres de déterminer l’étendue de la couverture maladie dont bénéficient les assurés (arrêt Müller-Fauré et Van Riet, précité, point 98). Il s’ensuit que rien ne s’opposerait à ce que le montant à concurrence duquel peuvent être reconnues éligibles à l’aide les dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, soit plafonné aux montants à concurrence desquels de telles dépenses eussent été reconnues éligibles à l’aide si une cure disponible et offrant une efficacité thérapeutique équivalente avait été effectuée en Allemagne. En effet, un tel plafonnement, qui, ainsi que l’a fait valoir la Commission, peut être justifié par la considération que les coûts à supporter par l’État doivent être limités à ce qui est nécessaire sur un plan médical, repose sur un critère objectif, non discriminatoire et transparent (arrêt Müller-Fauré et Van Riet, précité, point 107).

49
S’agissant, en troisième lieu, de la condition posée par l’article 13, paragraphe 3, sous 2), des BhV selon laquelle la station thermale concernée doit figurer sur une liste ad hoc, il convient de relever qu’une telle exigence qui, ainsi que M. l’avocat général l’a souligné au point 34 de ses conclusions, vise vraisemblablement à s’assurer que les établissements thermaux concernés sont en mesure de dispenser les soins jugés nécessaires est également prévue en ce qui concerne la prise en charge des dépenses afférentes à des cures thermales effectuées en Allemagne, ainsi qu’il ressort de l’article 8, paragraphe 6, des BhV. Il s’ensuit qu’une telle exigence ne paraît pas, a priori et en principe, de nature à avoir pour effet de rendre les prestations de services entre États membres plus difficiles que les prestations qui sont purement internes (voir jurisprudence citée au point 37 du présent arrêt).

50
Il appartient toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier, notamment au vu des conditions auxquelles est éventuellement subordonnée l’inscription des stations thermales sur une telle liste ad hoc, si cette exigence d’inscription est ou non de nature à engendrer l’effet décrit au point 49 du présent arrêt et de s’assurer que lesdites conditions revêtent un caractère objectif.

51
Compte tenu de toutes les considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que:

les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui subordonne la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, à l’obtention d’une reconnaissance préalable d’éligibilité qui n’est octroyée que pour autant qu’il est établi, par une expertise des services de santé publique ou par un médecin-conseil, que la cure envisagée revêt une impérieuse nécessité du fait de chances de succès beaucoup plus élevées dans cet autre État membre ;

les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas, en principe, à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui subordonne la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale, qu’elle soit effectuée dans cet État membre ou dans un autre État membre, à la condition que la station thermale concernée figure sur une liste ad hoc. Il appartient toutefois à la juridiction nationale de s’assurer que les conditions éventuelles auxquelles se trouve soumise l’inscription d’une station thermale sur une telle liste revêtent un caractère objectif et n’ont pas pour effet de rendre les prestations de services entre États membres plus difficiles que les prestations qui sont purement internes à l’État membre concerné.

Sur la seconde question

52
Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande si les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’application d’une réglementation nationale en vertu de laquelle la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, est exclue au cas où l’intéressé n’a pas attendu la clôture de la procédure en obtention d’une reconnaissance préalable d’éligibilité à l’aide que prévoit ladite réglementation ou d’une procédure contentieuse consécutive, avant d’entamer la cure en question.

53
Il convient d’observer à titre liminaire qu’il ressort de l’ordonnance de renvoi que, au moment où le requérant au principal s’est rendu à Ischia aux fins d’y effectuer la cure litigieuse, la Bundesanstalt avait déjà rejeté sa demande de reconnaissance d’éligibilité à l’aide en ce qui concerne ladite cure et que l’intéressé avait déjà saisi la juridiction de renvoi d’un recours à l’encontre de cette décision.

54
Aussi suffit-il, aux fins de donner à la juridiction de renvoi les précisions que requiert la solution du litige au principal, d’indiquer si les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’application d’une réglementation nationale en vertu de laquelle la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, est exclue au cas où l’intéressé n’a pas attendu la clôture de la procédure judiciaire initiée à l’encontre d’une décision refusant de reconnaître l’éligibilité à l’aide desdites dépenses avant d’entamer la cure en question.

55
À cet égard, il y a lieu de relever que, statuant à propos d’une problématique assez similaire, la Cour a précédemment jugé, s’agissant de l’autorisation préalable conditionnant la prise en charge de soins de santé dispensés dans un autre État membre à laquelle se réfère l’article 22, paragraphe 1, sous c), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983 (JO L 230, p. 6), que l’effet utile et l’esprit de cette disposition commandaient de considérer que, lorsqu’un assuré social ayant introduit une demande d’autorisation sur le fondement de ladite disposition a essuyé un refus de la part de l’institution compétente et que le caractère non fondé d’un tel refus est ultérieurement établi par une décision judiciaire, cet assuré est en droit d’obtenir directement à charge de l’institution compétente le remboursement d’un montant équivalent à celui qui aurait normalement été pris en charge si l’autorisation avait été dûment délivrée dès l’origine (arrêt Vanbraekel e.a., précité, point 34).

56
Ainsi que l’a fait valoir à juste titre la Commission, une approche analogue doit prévaloir en l’espèce.

57
En effet, ainsi que l’ont souligné aussi bien la juridiction de renvoi que la Commission et M. l’avocat général au point 39 de ses conclusions, à défaut d’admettre que la constatation judiciaire de la violation des articles 49 CE et 50 CE par la décision litigieuse de la Bundesanstalt puisse rétroactivement justifier la prise en charge des dépenses en cause, l’effet utile de ces dispositions communautaires se trouverait mis à mal, les patients ne pouvant, dans la plupart des cas, attendre l’issue d’une procédure judiciaire avant de bénéficier des soins que requiert leur état et se voyant dès lors contraints de renoncer à se rendre dans un autre État membre aux fins d’y recevoir lesdits soins.

58
Compte tenu, notamment, des précisions figurant dans l’ordonnance de renvoi et reproduites au point 25 du présent arrêt, il convient de rappeler, par ailleurs, que, ainsi qu’il résulte d’une jurisprudence constante, en présence de dispositions du traité directement applicables, tel l’article 49 CE, il appartient à la juridiction nationale de donner à la loi interne, dans toute la mesure où une marge d’appréciation lui est accordée par son droit national, une interprétation et une application conformes aux exigences du droit communautaire et de laisser, pour autant qu’une telle interprétation conforme n’est pas possible, inappliquée toute règle nationale contraire (arrêts du 4 février 1988, Murphy e.a., 157/86, Rec. p. 673, point 11, et du 28 septembre 1994, Coloroll Pension Trustees, C‑200/91, Rec. p. I-4389, point 29).

59
Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu, dès lors, de répondre à la seconde question que les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’application d’une réglementation nationale en vertu de laquelle la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, est exclue au cas où l’intéressé n’a pas attendu la clôture de la procédure judiciaire initiée à l’encontre d’une décision de refus de reconnaître l’éligibilité à l’aide desdites dépenses avant d’entamer la cure en question.


Sur les dépens

60
Les frais exposés par les gouvernements espagnol et du Royaume-Uni ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.


Par ces motifs,

LA COUR (cinquième chambre)

statuant sur les questions à elle soumises par le Verwaltungsgericht Sigmaringen, par ordonnance du 28 novembre 2001, dit pour droit:

1)
Les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui subordonne la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, à l’obtention d’une reconnaissance préalable d’éligibilité qui n’est octroyée que pour autant qu’il est établi, par une expertise des services de santé publique ou par un médecin-conseil, que la cure envisagée revêt une impérieuse nécessité du fait de chances de succès beaucoup plus élevées dans cet autre État membre.

2)
Les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas, en principe, à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui subordonne la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale, qu’elle soit effectuée dans cet État membre ou dans un autre État membre, à la condition que la station thermale concernée figure sur une liste ad hoc. Il appartient toutefois à la juridiction nationale de s’assurer que les conditions éventuelles auxquelles se trouve soumise l’inscription d’une station thermale sur une telle liste revêtent un caractère objectif et n’ont pas pour effet de rendre les prestations de services entre États membres plus difficiles que les prestations qui sont purement internes à l’État membre concerné.

3)
Les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à l’application d’une réglementation nationale en vertu de laquelle la prise en charge de dépenses afférentes à l’hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l’élaboration d’un rapport médical final, engagées en raison d’une cure thermale effectuée dans un autre État membre, est exclue au cas où l’intéressé n’a pas attendu la clôture de la procédure judiciaire initiée à l’encontre d’une décision de refus de reconnaître l’éligibilité à l’aide desdites dépenses avant d’entamer la cure en question.

Timmermans

La Pergola

von Bahr

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 mars 2004.

Le greffier

Le président

R. Grass

V. Skouris


1
Langue de procédure: l'allemand.