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CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 4 mai 2023 (1)

Affaire C88/22 P

QB

contre

Commission européenne

« Pourvoi – Fonction publique – Article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut – Indemnité de dépaysement – Notion d’“activité professionnelle principale” exercée de façon habituelle – Notion de “services effectués pour un autre État” »






I.      Introduction

1.        Pour exercer leur activité, les agents de l’Union européenne doivent souvent quitter leur État membre d’origine et déplacer leur résidence dans l’État membre d’affectation. Afin de compenser les désagréments qui en découlent et de permettre le recrutement de ressortissants des États membres de l’Union sur une base géographique aussi large que possible, le législateur de l’Union a conçu une indemnité de dépaysement, dont les conditions sont fixées à l’article 69 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») (2). Les conditions de cette indemnité sont régies par l’article 4, paragraphe 1, sous a) et b), de l’annexe VII du statut. Ces dispositions sont applicables par analogie au personnel temporaire, en vertu de l’article 20, paragraphe 2, du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »), lu en combinaison avec l’article 69 du statut.

2.        Selon l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, l’indemnité de dépaysement est accordée, aux termes du premier tiret de cette disposition, à l’agent « qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation » (ci‑après l’« État d’affectation ») et, aux termes de son second tiret, première phrase, à l’agent « qui n’a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions [ci-après la “période de référence”], habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire européen dudit État ». À cet égard cependant, les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale ne sont pas à prendre en considération (second tiret, seconde phrase). Il s’ensuit que, en principe, une résidence habituelle ou une activité professionnelle principale exercée de façon habituelle dans l’État d’affectation pendant la période de référence entraînent le refus d’octroi de l’indemnité de dépaysement. Toutefois, tel n’est pas le cas lorsque, au cours de la période de référence, l’agent a effectué des services pour un autre État ou une organisation internationale. Ces services « neutralisent » donc le fait d’avoir une résidence habituelle ou d’exercer, de façon habituelle, une activité professionnelle principale dans l’État d’affectation et ont pour effet que le droit de l’agent à se voir octroyer l’indemnité de dépaysement est maintenu. Ainsi, dans les développements qui suivent, nous qualifierons également de « règle de neutralisation » l’article 4, paragraphe 1, sous a), second tiret, seconde phrase, de l’annexe VII du statut.

3.        Qu’en est-il d’un agent, qui, au cours de la période de référence de cinq ans, était détaché en tant que juge polonais auprès de la Krajowa Szkola Sadownictwa i Prokuratury (École nationale de la magistrature et du parquet, ci‑après l’« ENMP »), tout en exerçant la fonction de secrétaire général du Réseau européen de formation judiciaire (ci-après le « Réseau européen »), une association internationale à but non lucratif de droit belge ayant son siège à Bruxelles (Belgique), lieu d’affectation ultérieur de l’agent ? Dans un tel cas, où l’agent a-t-il, pendant la période de référence, exercé, de façon habituelle, son activité professionnelle principale ? Et si le lieu de cette activité se situe en Belgique, ladite activité peut-elle être qualifiée de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale, de sorte que l’agent bénéficierait de la règle de neutralisation ?

4.        Telles sont les questions sur lesquelles la Cour doit se prononcer dans le cadre du présent pourvoi, par lequel le requérant conteste l’arrêt du Tribunal du tribunal de l’      Union européenne du 8 décembre 2021 (3) (ci-après l’« arrêt attaqué »).

II.    Le cadre juridique

5.        C’est le statut qui détermine le cadre juridique de la présente affaire.

6.        Aux termes de l’article 69, première phrase, du statut :

« L’indemnité de dépaysement est égale à 16 % du total du traitement de base et de l’allocation de foyer ainsi que de l’allocation pour enfant à charge, auxquelles le fonctionnaire a droit. »

7.        L’article 69 du statut, relatif à l’indemnité de dépaysement, s’applique par analogie au personnel temporaire, en vertu de l’article 20, paragraphe 2, du RAA.

8.        L’article 4, paragraphes 1 et 2, de l’annexe VII du statut dispose :

« 1.      L’indemnité de dépaysement égale à 16 % du montant total du traitement de base ainsi que de l’allocation de foyer et de l’allocation pour enfant à charge versées au fonctionnaire, est accordée :

a)      Au fonctionnaire :

–        qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation et,

–        qui n’a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire européen dudit État. Pour l’application de cette disposition, les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale ne sont pas à prendre en considération.

b)      Au fonctionnaire qui, ayant ou ayant eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation, a, de façon habituelle, pendant la période de dix années expirant lors de son entrée en service, habité hors du territoire européen dudit État pour une raison autre que l’exercice de fonctions dans un service d’un État ou dans une organisation internationale.

[...]

2.      Le fonctionnaire qui, n’ayant pas et n’ayant jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation, ne remplit pas les conditions prévues au paragraphe 1 a droit à une indemnité d’expatriation égale à un quart de l’indemnité de dépaysement. »

III. Les antécédents du litige et l’arrêt attaqué

9.        Les antécédents du présent litige sont exposés aux points 3 à 13 de l’arrêt attaqué et peuvent être résumés comme suit.

10.      À partir de l’année 2005, le requérant, de nationalité polonaise, a exercé les fonctions de juge auprès d’un tribunal d’arrondissement en Pologne.

11.      À compter de mars 2009, par décision du ministère de la Justice polonais, le requérant a été détaché auprès de l’ENMP. Cette dernière est un organisme central de l’État polonais, qui vise à assurer la formation des membres des juridictions de droit commun et du ministère public en Pologne.

12.      En décembre 2013, le ministère de la Justice polonais et le Réseau européen ont conclu un accord par lequel le requérant s’est vu chargé des fonctions de secrétaire général du Réseau européen. Celui-ci est une association internationale à but non lucratif de droit belge, dépourvue de la personnalité juridique et ayant son siège à Bruxelles. Il a pour but le développement de programmes de formation ayant une dimension européenne pour les membres et le personnel des juridictions. Peuvent être membres du Réseau européen les institutions des États membres responsables de la formation des juges et procureurs ou celles qui sont impliquées dans la formation judiciaire au niveau de l’Union.

13.      Concernant le lieu d’exercice des fonctions, il était prévu que la présence du requérant serait requise non pas uniquement au siège de l’ENMP en Pologne, mais aussi dans les locaux du Réseau européen à Bruxelles et dans tout autre lieu où les activités de ce Réseau européen se déroulent ou dans lequel la présence du requérant serait considérée comme étant dans l’intérêt du Réseau européen.

14.      Du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2019, le requérant a occupé, en outre, la position d’expert en chef au sein du Centre international de coopération de l’ENMP. Il était chargé d’assurer la bonne coopération et la mise en œuvre des activités découlant de l’adhésion de l’ENMP au Réseau européen.

15.      Le requérant a vécu à Bruxelles, avec sa famille, entre le 1er janvier 2014 et le 30 juin 2019. Après l’expiration de son mandat au sein du Réseau européen, en juin 2019, le requérant et sa famille sont repartis en Pologne.

16.      Le requérant est entré au service de la Commission européenne en tant qu’agent temporaire, à Bruxelles, le 1er janvier 2020.

17.      Par décision du 6 avril 2020 (ci-après la « décision litigieuse »), à la suite de la prise de fonctions du requérant au sein de la Commission, l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) a accordé au requérant le bénéfice de l’indemnité d’expatriation prévue à l’article 4, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut, mais a refusé de lui octroyer l’indemnité de dépaysement.

18.      Le 16 juin 2020, le requérant a demandé une médiation avec le PMO au sujet de l’indemnité de dépaysement, à laquelle ce dernier a refusé de donner une suite favorable.

19.      Le 3 juillet 2020, le requérant a formé une réclamation contre la décision litigieuse, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut.

20.      Par décision du 3 novembre 2020, l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC ») de la Commission a rejeté cette réclamation.

21.      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 février 2021, le requérant a introduit un recours au titre de l’article 270 TFUE. Il a conclu à l’annulation de la décision litigieuse et de la décision ayant rejeté sa réclamation, dans la mesure où la Commission a refusé de lui octroyer l’indemnité de dépaysement.

22.      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours et condamné le requérant aux dépens.

23.      Le Tribunal a rejeté le premier moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, comme non fondé, au motif qu’il avait été remédié à l’absence de motivation dans la décision litigieuse par une motivation suffisante dans la décision de rejet de la réclamation.

24.      Le Tribunal a également jugé non fondé le deuxième moyen, par lequel le requérant invoquait une violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut. À cet égard, il a considéré, à l’instar de la Commission dans la décision litigieuse, que le requérant avait, au cours de la période de référence, exercé son activité professionnelle principale à Bruxelles et que les services fournis par celui-ci n’étaient pas des services effectués pour un autre État ou une organisation internationale.

25.      Enfin, le Tribunal a également rejeté comme non fondé le troisième moyen du requérant, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission. Il a motivé sa position en indiquant que la Commission avait correctement appliqué l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut et n’a reconnu à celle‑ci aucune marge d’appréciation à cet égard.

IV.    La procédure de pourvoi et les conclusions des parties

26.      Par acte déposé au greffe de la Cour le 8 février 2022, le requérant a introduit le présent pourvoi contre l’arrêt attaqué.

27.      Le requérant conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

–        annuler l’arrêt attaqué et annuler les décisions de la Commission du 6 avril 2020 et du 3 novembre 2020 ou, à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue ;

–        condamner la Commission à supporter ses propres dépens ainsi que ceux qu’il a exposés dans les deux instances.

28.      La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

–        rejeter le pourvoi ;

–        condamner le requérant aux dépens.

29.      Les parties ont présenté des observations écrites. La Cour a décidé de ne pas tenir d’audience, s’estimant suffisamment informée sur le fondement de la procédure écrite.

V.      Appréciation

30.      L’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut prévoit que l’indemnité de dépaysement est accordée aux agents de l’Union qui n’ont pas et n’ont jamais eu la nationalité de l’État de leur lieu d’affectation et qui n’ont pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant leur entrée en fonctions, habité ou exercé leur activité professionnelle principale sur le territoire européen de cet État ou qui bénéficient de la règle de neutralisation.

31.      Le PMO a accordé au requérant, après l’entrée en service de celui-ci à la Commission, l’indemnité d’expatriation, et non l’indemnité de dépaysement, car il a considéré que les conditions prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut n’étaient pas réunies. La réclamation introduite par le requérant contre cette décision a été rejetée par l’AHCC.

32.      Le requérant a attaqué en vain ladite décision devant le Tribunal et conteste désormais l’arrêt de celui-ci rejetant son argumentation en première instance.

33.      Par son moyen unique, qui correspond, en substance, au deuxième moyen soulevé devant le Tribunal, le requérant fait grief à celui-ci d’avoir violé l’article 4, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut. Ce moyen comporte deux branches.

34.      En premier lieu, le requérant fait valoir que le Tribunal a déterminé de manière erronée le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de son activité professionnelle principale, dans la mesure où celui-ci se trouvait en réalité en Pologne, et non en Belgique.

35.      En second lieu, le requérant avance que le Tribunal a défini de manière erronée les conditions auxquelles il convient de subordonner les « services effectués pour un autre État » et qu’il n’a tenu compte ni de son activité pour l’État polonais ni de son statut de juge.

36.      La question de savoir si le Réseau européen constitue une « organisation internationale » au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), second tiret, seconde phrase, de l’annexe VII du statut ne fait en revanche pas partie de l’objet du litige et, partant, n’a pas à être tranchée (4).

37.      Nous exposerons ci-après, dans un premier temps, que c’est à bon droit que le Tribunal a jugé que, pendant la période de référence, le requérant a exercé, de façon habituelle, son activité professionnelle principale en Belgique (A). Par conséquent, le requérant ne pouvait avoir droit à l’indemnité de dépaysement prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut que si l’activité qu’il avait exercée en Belgique pouvait être qualifiée de services effectués pour un autre État, car il aurait alors bénéficié de la règle de neutralisation. C’est ce que nous examinerons dans un second temps (B).

A.      L’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale

38.      Selon le requérant, c’est à tort que le Tribunal a considéré que, au cours de la période de référence, il avait, en raison du travail effectué pour le Réseau européen, exercé de façon habituelle son activité professionnelle principale à Bruxelles.

39.      Le Tribunal a relevé, aux points 62 à 74 de l’arrêt attaqué, que le requérant, en tant que secrétaire général du Réseau européen, accomplissait de nombreuses tâches administratives et de représentation, auxquelles il consacrait une grande partie de son temps de travail et qui exigeaient sa présence non seulement en Pologne, mais notamment dans les locaux du Réseau européen à Bruxelles et dans d’autres lieux ; que cela se reflétait également dans le niveau du salaire versé en fin de compte par le Réseau européen ; que, en outre, le Réseau européen avait mis à la disposition du requérant un logement de fonction à Bruxelles ; qu’il ressortait de ces éléments que le travail pour le Réseau européen n’était pas une simple activité subsidiaire ou accessoire ou une activité pour un autre organisme ; que le requérant n’avait pas rapporté la preuve de tâches ou activités exercées pour le compte de l’ENMP au cours de la période de référence ; que, par conséquent, le requérant avait exercé, de façon habituelle, son activité professionnelle principale pour le compte du Réseau européen à Bruxelles.

40.      Selon le Tribunal, ce constat n’est pas mis en doute par le fait que, dans le cadre de ses fonctions à Bruxelles, le requérant a eu principalement des relations avec des étrangers, qu’il a effectué de nombreux voyages professionnels en Europe, qu’il a déclaré ne parler couramment aucune des langues officielles de la Belgique et que son épouse a conservé son contrat de travail auprès d’une juridiction polonaise ; en effet, il ne ressort pas de ces circonstances que le requérant a exercé d’autres activités que celles qui étaient pertinentes pour ses fonctions pour le Réseau européen.

41.      Le Tribunal a indiqué, en outre, que la circonstance que le requérant ait conservé son statut de juge polonais pendant la période de référence n’impliquait pas qu’il avait exercé, de façon habituelle, son activité professionnelle principale en Pologne ; que ce statut n’était pas incompatible avec les responsabilités qui lui étaient confiées pour le Réseau européen ; que, de plus, le requérant, en sa qualité de secrétaire général du Réseau européen, était soumis au contrôle du comité de pilotage de celui-ci.

42.      Selon le requérant, cette conclusion est entachée d’une erreur de droit. Il fait valoir que c’est pour le compte de l’ENMP qu’il a exécuté des tâches pour le Réseau européen ; que, en outre, le Réseau européen n’est qu’un groupement d’institutions nationales à caractère subsidiaire ; qu’il n’existe pas non plus de relation juridique entre le Réseau européen et son secrétaire général ; que, au contraire, il convient de tenir compte du fait que, pendant la durée de son activité pour le Réseau européen, il a conservé son statut de juge national, qu’il était employé par l’État polonais et qu’il était placé sous le contrôle de l’ENMP ; que, enfin, le principe d’indépendance et d’impartialité de la justice s’oppose à ce qu’il puisse être considéré comme ayant exercé de façon habituelle son activité professionnelle principale pour le compte du RJTN.

43.      Dans les développements qui suivent, nous expliquerons d’abord comment il convient de déterminer le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut (1). Sur cette base, nous exposerons ensuite que c’est à bon droit que le Tribunal a considéré que, pendant la période de référence, le requérant avait exercé de façon habituelle son activité professionnelle principale à Bruxelles (2).

1.      Les critères applicables pour déterminer le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale

44.      La Cour ne s’est jusqu’à présent pas encore penchée ni sur la question de savoir comment il convient de déterminer le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale ni sur les critères applicables pour qualifier un tel exercice d’une telle activité au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut.

45.      Conformément à une jurisprudence constante de la Cour, il y a lieu, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (5). À cet égard, il convient de tenir compte du fait que les dispositions du droit de l’Union sont rédigées en plusieurs langues et que les diverses versions linguistiques font également foi, de sorte qu’aucune d’entre elles ne peut prévaloir et qu’une comparaison des versions linguistiques peut se révéler nécessaire (6).

46.      Il ressort du libellé de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut que l’activité en cause doit être exercée dans l’État du lieu d’affectation ultérieur en tant qu’activité principale. Une simple activité subsidiaire ou accessoire n’est pas suffisante. Lorsqu’un agent a exercé plusieurs activités au cours de la période de référence précédant son entrée en fonctions, il convient de déterminer laquelle de ces activités était ou est son activité professionnelle principale. Il ne peut s’agir que d’une seule activité. Pour déterminer quelle est, parmi plusieurs activités exercées, l’activité professionnelle principale, le critère applicable en premier lieu est celui du temps de travail qui leur est consacré. D’autres éléments, tels que l’ampleur des activités et le niveau de rémunération, peuvent, à cet égard, être pris en considération en tant qu’indices (7).

47.      En outre, selon le libellé de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, c’est le lieu d’exercice de cette activité sur le territoire européen de l’État d’affectation qui importe.

48.      Cela est confirmé par l’esprit et par la finalité de l’indemnité de dépaysement. Selon la jurisprudence constante de la Cour, « l’indemnité de dépaysement a pour objet de compenser les charges et les désavantages particuliers résultant de la prise de fonctions auprès des institutions de l’Union pour les agents qui sont, de ce fait, obligés de transférer leur résidence de l’État de leur domicile à l’État d’affectation et de s’intégrer dans un nouveau milieu. La notion de dépaysement dépend également de la situation subjective de l’agent, à savoir de son degré d’intégration dans le nouveau milieu résultant, par exemple, [...] de l’exercice d’une activité professionnelle principale. L’octroi de l’indemnité de dépaysement vise ainsi à remédier aux inégalités de fait survenant entre les agents entièrement intégrés dans la société du pays d’affectation et ceux qui ne le sont pas » (8).

49.      Ainsi, un « dépaysement » intervenu avant même l’entrée en fonctions (9), soit une intégration de l’agent dans l’État de son lieu d’affectation, qui justifie un refus d’accorder l’indemnité de dépaysement, peut découler de l’exercice, de façon habituelle, d’une activité professionnelle principale dans cet État. Dans un tel cas, l’environnement dans lequel se trouve l’agent ne lui est pas nouveau (10). Or, typiquement, un degré d’intégration suffisant n’existe que lorsqu’il s’agit non pas d’une activité subsidiaire ou accessoire, mais de l’activité exercée à titre principal. Les critères qui s’appliquent pour déterminer cette activité principale sont, notamment, le temps de travail qui lui est consacré et un niveau de salaire qui lui correspond (11).

50.      L’intégration d’une personne en un lieu dépend directement de ses conditions de vie et de travail effectives. Le cadre juridique des circonstances de travail et le statut de l’intéressé en matière de droit du travail n’ont une incidence qu’indirecte sur cette intégration. Compte tenu de la finalité de l’indemnité de dépaysement qui a été indiquée, il me semble donc judicieux de se fonder sur des éléments factuels pour déterminer le lieu d’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale. À cet égard, il importe, notamment, de savoir quel est le lieu où la personne a effectivement effectué son travail en exécution des actes contractuels qu’elle a signés (12).

2.      Bruxelles, lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale

51.      Le requérant n’ayant invoqué aucune dénaturation des faits par le Tribunal, les constatations effectuées dans l’arrêt attaqué doivent être considérées comme établies. Le Tribunal a constaté, aux points 6, 8 et 64 à 66 de cet arrêt, que le requérant a été nommé au poste de secrétaire général du Réseau européen par un accord conclu entre le ministre de la Justice polonais et ce Réseau. Il en découle que le requérant a passé une grande partie de son temps de travail au siège du Réseau européen à Bruxelles. À cette fin, le Réseau européen a mis à sa disposition un logement de fonction à Bruxelles, dans lequel il a vécu avec sa famille pendant la durée de la période de référence. Certes, ainsi qu’il ressort des points 42 à 44 de l’arrêt attaqué, le requérant a perçu son salaire directement du tribunal d’arrondissement polonais même pendant son activité au sein du Réseau européen. Toutefois, ce salaire a, in fine, été remboursé par le Réseau européen à la Pologne à concurrence d’un montant maximal significatif. Ce montant correspond, compte tenu du profil d’activité d’un secrétaire général, à la rémunération d’une activité professionnelle principale.

52.      Le Tribunal en a déduit que le requérant avait exercé son activité pour le Réseau européen principalement au siège de celui-ci à Bruxelles. Cette constatation n’a pas été remise en cause par le requérant dans son pourvoi.

53.      Ainsi que le Tribunal l’a relevé au point 67 de l’arrêt attaqué, ce constat n’est pas mis en doute par le fait que, dans le cadre de ses fonctions à Bruxelles, le requérant a eu principalement des relations avec des étrangers ou qu’il a déclaré ne parler couramment aucune des langues officielles de la Belgique. S’il est vrai que ces aspects sont susceptibles d’avoir, de facto, des effets sur l’intégration du requérant à Bruxelles, ils n’ont pas d’incidence sur le lieu d’exercice de son activité. En outre, le fait de ne pas en tenir compte n’est en contradiction ni avec l’objectif ni avec le contexte de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut. En effet, le rattachement à l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale est également destiné à établir un critère simple et objectif pour appréhender la situation des agents qui sont obligés, du fait de leur prise de fonction auprès de l’Union, de s’intégrer dans un nouveau milieu (13). Il est ainsi tenu compte du besoin de sécurité juridique.

54.      La conclusion selon laquelle le requérant a exercé son activité pour le Réseau européen principalement à Bruxelles n’est pas non plus remise en cause par les nombreuses missions qu’il a effectuées en Europe. Lorsqu’une activité se caractérise précisément par l’activité de voyage et par la prestation de services à des endroits différents, il n’apparaît certes pas exclu qu’il puisse, dans un cas particulier, ne pas exister de lieu fixe où l’activité professionnelle principale est exercée. Toutefois, en l’espèce, aucun élément ne plaide en ce sens, d’autant plus que, ainsi qu’il a été constaté au point 66 de l’arrêt attaqué, le requérant a, durant l’intégralité de la période de référence, vécu avec sa famille à Bruxelles dans le logement de fonction mis à sa disposition par le Réseau européen.

55.      Enfin, n’est pas non plus pertinent le fait que, pendant la période de référence, l’épouse du requérant a conservé son contrat de travail auprès d’une juridiction polonaise. En effet, pour déterminer le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de son activité professionnelle principale, seules des circonstances propres à sa personne et de nature professionnelle peuvent être déterminantes. La relation de travail d’une personne qui lui est proche, telle que son épouse, est, à cet égard, dépourvue de pertinence (14).

56.      En outre, il ressort des constatations du Tribunal mentionnées au point 51 des présentes conclusions que l’activité du requérant pour le Réseau européen n’était pas une simple activité subsidiaire ou accessoire, mais constituait son activité professionnelle principale au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut.

57.      Ainsi que le Tribunal l’a considéré sans commettre d’erreur de droit aux points 65 et 66 de l’arrêt attaqué, il résulte des nombreuses fonctions à exercer par le secrétaire général du Réseau européen ainsi que du niveau de rémunération correspondant que la fonction de secrétaire général doit être qualifiée d’activité professionnelle principale, et non de simple activité subsidiaire ou accessoire. Il en résulte, a contrario, que l’activité d’expert en chef au sein de l’ENMP en Pologne exercée par le requérant n’était qu’une activité accessoire et qu’elle était donc dénuée de pertinence aux fins de l’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut.

58.      Contrairement à ce que soutient le requérant, la détermination du lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale ne dépend pas de la question de savoir pour quel organisme l’activité a été exercée au premier chef. Ainsi qu’il a été relevé aux points 48 à 50 ci-dessus, la finalité de l’indemnité de dépaysement impose de se fonder sur des éléments factuels pour déterminer le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale. C’est le lieu d’exécution de la prestation de travail qui est déterminant.

59.      La question de savoir si les fonctions exercées par le requérant pour le Réseau européen ont été effectuées pour le compte de l’ENMP et donc, en définitive, de l’État polonais n’est donc pas pertinente pour déterminer le lieu de son activité, mais tout au plus pour déterminer s’il a effectué des services pour un autre État. Autrement dit, au cours de la période de référence, le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale du requérant se situe à Bruxelles, même en se fondant sur l’argumentation de celui-ci selon laquelle c’est en premier lieu pour l’ENMP et uniquement à titre subsidiaire pour le Réseau européen qu’il a effectué les tâches qui lui ont été confiées. Les arguments du requérant résumés au point 42 ci-dessus sont donc dénués de pertinence pour déterminer le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale du requérant.

3.      Conclusion intermédiaire

60.      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que c’est à bon droit que le Tribunal a considéré que, pendant la période de référence, le lieu de l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale du requérant était situé à Bruxelles.

B.      Les services effectués pour un autre État

61.      Le requérant estime, de plus, que le Tribunal a mal défini les conditions auxquelles il convient de subordonner les « services effectués pour un autre État ». Selon le requérant, le Tribunal n’a tenu compte ni de son activité pour l’État polonais ni de son statut de juge.

62.      Il ressort des considérations exposées aux points 78 à 83 de l’arrêt attaqué que la notion d’« État » au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut ne vise que l’État en tant que personne juridique et sujet unitaire du droit international et ses organes de gouvernement. Selon le Tribunal, les services fournis pour une association internationale à but non lucratif de droit belge, telle que le Réseau européen, ne relèvent pas de cette notion. Le Tribunal en a conclu que l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut ne s’appliquait pas au travail accompli par le requérant pour le Réseau européen.

63.      Le requérant fait valoir que la jurisprudence n’appuie pas une interprétation aussi stricte de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut ; qu’il convient en outre de tenir compte du fait que, en vertu du principe de séparation des pouvoirs, les membres du pouvoir judiciaire ne sauraient être intégrés à une représentation permanente d’un État ; que, par l’interprétation qu’il a retenue, le Tribunal a exclu que les membres du pouvoir judiciaire puissent bénéficier de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), second tiret, seconde phrase, de l’annexe VII du statut ; que la notion de « services effectués pour un autre État » doit donc être interprétée en ce sens qu’elle couvre toutes les circonstances résultant de l’activité pour un autre État, sans que ces services soient limités à des services liés à une représentation officielle de cet État.

64.      En outre, selon le requérant, le Tribunal, en jugeant que les services effectués pour le Réseau européen ne relevaient pas de la notion de « services effectués pour un autre État », n’a tenu compte ni de son activité pour l’État polonais ni de son statut de juge. Le requérant fait valoir que, en exerçant les fonctions et responsabilités de secrétaire général du Réseau européen, il a en même temps accompli les fonctions qui lui avaient été confiées par l’ENMP.

65.      Dans les développements qui suivent, nous commencerons par présenter les exigences auxquelles il convient de soumettre le critère tenant aux « services effectués pour un autre État » (1). Dans ce contexte, nous expliquerons en particulier que, à cet effet, une activité au sein d’une institution de cet autre État est nécessaire dans l’État d’affectation. Nous exposerons ensuite que, au cours de la période de référence, le requérant n’a effectué aucun service pour un autre État (2).

1.      Les exigences relatives au critère des « services effectués pour un autre État »

a)      Le libellé et l’esprit de la réglementation

66.      Ainsi que l’avocat général Bot l’a exposé en détail, la notion d’« État » revêt un contenu large ou restrictif en fonction du contexte dans lequel elle trouve à s’appliquer (15). Elle ne peut donc être détachée de l’expression dont elle fait partie pour faire l’objet d’une interprétation distincte ; au contraire, la notion de « services effectués pour un autre État » doit être appréciée dans son ensemble et interprétée en fonction de l’économie et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (16).

67.      Ainsi qu’il a été exposé au point 48 des présentes conclusions, l’indemnité de dépaysement a pour objet de compenser les charges et les désavantages particuliers résultant de la prise de fonctions auprès des institutions de l’Union pour les agents qui sont, de ce fait, obligés de s’intégrer dans un nouveau milieu. La règle de neutralisation prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), second tiret, seconde phrase, de l’annexe VII du statut repose sur le postulat selon lequel « se trouve également dans une telle situation de dépaysement [l’agent] qui, tout en ayant habité ou exercé une activité professionnelle sur le territoire européen de l’État où est situé le lieu de son affectation pendant une période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, a effectué des services pour un autre État » (17). Cette jurisprudence repose sur la présomption selon laquelle, du fait de l’exercice de ces services, l’intéressé conserve un lien de rattachement spécifique avec cet autre État. Ce lien de rattachement fait obstacle à la création d’un lien de rattachement durable avec l’État d’affectation et donc à l’intégration suffisante de l’intéressé dans la société de ce dernier (18). Autrement dit, dans une telle situation, l’« extranéité » maintenue de l’agent dans l’État d’affectation est présumée, ce qui justifie qu’il soit traité de la même manière que les agents qui sont de nouveaux arrivants et qu’il conserve son droit au versement de l’indemnité de dépaysement.

68.      Comment cette présomption se justifie-t-elle au regard des objectifs et de l’économie des règles applicables ?

69.      Elle peut l’être, premièrement, par le fait que l’exercice d’une activité à l’étranger pour le compte d’un autre État n’est généralement que temporaire et que l’intéressé n’a donc aucun intérêt à tisser un lien de rattachement durable avec cet État d’affectation. Deuxièmement, l’environnement de travail particulier dans lequel se trouve, dans l’État d’affectation, l’intéressé qui effectue des services pour un autre État est susceptible de rendre plus difficile l’intégration sociale dans l’État d’affectation. Troisièmement, la règle de neutralisation répond à la nécessité de maintenir la capacité de recrutement des institutions de l’Union et d’en préserver le pouvoir d’attraction pour les citoyens autres que ceux de l’État où est situé leur siège, même si ceux-ci ont déjà fourni des services dans l’État d’affectation pendant une période limitée (19).

70.      Or, ainsi que l’avocat général Mengozzi l’a déjà relevé, ces tentatives de motivation apparaissent en tant que telles insuffisantes, car elles n’expliquent pas le traitement plus favorable des personnes qui fournissent des services à l’étranger pour d’autres États ou des organisations internationales et qui bénéficient donc de la règle de neutralisation, par rapport au traitement des personnes qui fournissent des services pour d’autres organismes et qui n’en bénéficient donc pas (20).

71.      Une autre approche pour expliquer cette différenciation consisterait à considérer la règle de neutralisation comme un privilège au profit d’autres États ou des organisations internationales, qui se traduit par un régime spécial en faveur de ceux qui ont exercé une activité pour leurs institutions, et qui vise à faciliter la mobilité géographique du personnel d’autres États et des organisations internationales (21).

72.      Toutefois, l’article 4, paragraphe 1, sous b), de l’annexe VII du statut, qui a un champ d’application différent de celui de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de cette annexe, plaide contre une telle interprétation : alors que le point a) présuppose que l’agent ne possède pas la nationalité de l’État d’affectation, le point b) régit l’octroi de l’indemnité de dépaysement dans les cas où l’agent est ressortissant de cet État. En vertu du point b), ce n’est qu’à titre exceptionnel que les agents bénéficient de l’indemnité de dépaysement, à savoir lorsque, pendant la période de dix années expirant lors de leur entrée en service, ils n’ont pas, de façon habituelle, habité dans l’État d’affectation pour une raison autre que l’exercice de fonctions dans un service d’un État ou dans une organisation internationale. Cette autre raison ne peut donc pas avoir de rapport avec l’exercice d’une activité dans un service d’un État ou dans une organisation internationale.

73.      Ainsi, dans le champ d’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, un agent bénéficie certes d’avoir été au service d’un autre État ou d’une organisation internationale, puisque cette disposition maintient, en principe, son droit à l’indemnité de dépaysement ; inversement, l’exercice, dans le champ d’application de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de cette annexe, d’une activité antérieure dans un service d’un État ou dans une organisation internationale lui est défavorable, en ce qu’il fait disparaître ce droit (22). Il ne saurait donc être question d’un traitement privilégié général des services effectués pour un autre État ou une organisation internationale.

74.      Il ressort donc de l’économie des points a) et b) de ce paragraphe 1 que la possession ou non de la nationalité de l’État d’affectation détermine uniquement quelle est la période pertinente pour apprécier la résidence habituelle ou l’exercice, de façon habituelle, de l’activité professionnelle principale avant l’entrée en fonctions et, partant, pour le critère de l’« extranéité » dans l’État d’affectation au moment de cette entrée en fonctions (23). De même qu’un non‑ressortissant de l’État d’affectation peut tisser un lien particulier avec cet État, du fait d’une résidence ou de l’exercice, de façon habituelle, d’une activité professionnelle principale pendant la période de référence et, partant, faire disparaître le critère de l’« extranéité » (créateur du droit en cause), un ressortissant peut perdre, en raison d’une absence continue de dix ans, ce lien particulier avec l’État qui découle de la nationalité et donc remplir ce critère à son retour dans l’État d’affectation (24). Or, cette activité, qui soit établit un lien particulier avec l’État d’affectation [sous a)], soit le fait disparaître [sous b)], ne peut précisément pas consister en des services pour un autre État ou être exercée dans un service d’un autre État. Le législateur a donc considéré qu’une activité consistant en des services pour un autre État ou une activité exercée dans un service d’un autre État ne pouvait pas créer de lien particulier avec l’État dans lequel elle est exercée.

75.      Il ressort ainsi d’une lecture d’ensemble tenant compte de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de l’annexe VII du statut que le législateur a privilégié la situation visée par le point a) de ce paragraphe 1, qui résulte de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale, uniquement en raison du fait que, dans de tels cas, il a considéré, en établissant une catégorie, que le lien de rattachement spécifique de l’intéressé avec cet autre État ou cette organisation internationale faisait obstacle à l’intégration suffisante de celui-ci dans la société de l’État d’affectation et qu’il y était, de ce fait, « étranger ».

76.      Cette catégorisation est effectuée pour des raisons de sécurité juridique et répond au besoin de procéder à l’examen de l’octroi de l’indemnité de dépaysement sur la base de critères objectifs et aisément applicables (25). Cette conclusion n’est pas infirmée par le fait que, dans des cas individuels, cette catégorisation peut conduire à ce que des agents ne bénéficient pas de l’indemnité de dépaysement, bien que leur situation soit proche des cas qui relèvent de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut (26), ces agents ayant travaillé, avant leur entrée au service de l’Union, pour un autre organisme qu’un service d’un autre État ou une organisation internationale (27).

b)      L’exigence que l’activité soit exercée dans un organisme de cet autre État

77.      Compte tenu de ces objectifs, quelles sont les exigences auxquelles doivent répondre les services effectués pour un autre État ?

1)      La jurisprudence rendue jusqu’à présent par la Cour

78.      Dans son arrêt Commission/Hosman-Chevalier, la Cour a constaté que, dans le pays d’affectation de l’agent concerné, les autres États sont « représentés par les ambassades ou [par] les missions diplomatiques ainsi que par les représentations permanentes auprès des organisations internationales » (28).

79.      La Cour a donc conclu qu’une personne qui, bien que n’étant pas employée par l’administration centrale de cet État, était membre du personnel de la représentation permanente dudit État devait être considérée comme ayant effectué des services pour ce même État (29). À cet égard, elle a considéré qu’il n’était pas pertinent de savoir quelles étaient les fonctions spécifiques particulières exercées par la personne en cause au sein de la représentation permanente (30). Au contraire, elle s’est fondée de manière déterminante sur le statut privilégié de cette personne, qui lui permettait de bénéficier de différents privilèges et immunités, en vertu de la convention de Vienne, du 18 avril 1961, sur les relations diplomatiques, et qui créait donc, selon la Cour, son lien de rattachement spécifique avec l’État en cause (31). La Cour a également jugé qu’un lien juridique direct entre ladite personne et cet État n’était pas nécessaire (32).

80.      Sur ce fondement, la Cour a jugé, dans ses arrêts Salvador García/Commission, Herrero Romeu/Commission, Salazar Brier/Commission et De Bustamante Tello/Conseil, que, aux fins de l’interprétation de la notion de « services effectués pour un autre État », doit être considéré comme seul pertinent le fait que les services sont effectués au sein d’une représentation permanente d’un État (33). Toutefois, cette affirmation doit être lue dans le contexte des particularités des affaires jugées et ne doit pas, selon nous, être interprétée de manière trop restrictive. Selon l’acception exposée au point 78 des présentes conclusions, les services dans les ambassades et les missions diplomatiques doivent, en tout état de cause, également être visés.

81.      Est-il cependant nécessaire en tout état de cause que les services fournis pour un autre État le soient dans un organisme de cet autre État dans l’État d’affectation, tel qu’une ambassade, une mission diplomatique ou une représentation permanente ?

2)      Le libellé « services effectués pour un autre État »

82.      Le libellé « services effectués pour un autre État » ne l’exige pas nécessairement. À cet égard, il existe, en tout état de cause dans la version de langue allemande, une différence par rapport à l’article 4, paragraphe 1, sous b), de l’annexe VII du statut, qui parle, de manière plus restrictive, de l’activité exercée « in einer Dienststelle eines Staates ». Des nuances similaires se retrouvent également dans d’autres versions linguistiques. Ainsi, dans la version en langue française, l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut mentionne des « services effectués pour un autre État » (34) et l’article 4, paragraphe 1, sous b), de cette annexe mentionne « l’exercice de fonctions dans un service d’un État » (35).

83.      Le Tribunal en a déduit, dans son arrêt Vardakas/Commission, que la notion retenue au point a) de ce paragraphe 1 devait faire l’objet d’une interprétation large, celle retenue au point b) dudit paragraphe 1 d’une interprétation stricte (36). Toutefois, il ne me paraît pas obligatoire de procéder à une telle interprétation différenciée. En effet, ainsi qu’il a été exposé aux points 72 à 75 des présentes conclusions, tant le point a) que le point b) reposent sur la même idée selon laquelle, en cas d’activité pour un autre État ou dans un service d’un (autre) État, il demeure, entre la personne en cause et cet État, un lien de rattachement spécifique qui empêche l’intégration suffisante de celle-ci dans l’État où cette activité est exercée. Cela plaide en faveur de l’attribution du même contenu aux notions utilisées à ces points a) et b), malgré leur libellé différent.

84.      En outre, les différences entre les libellés sont, dans d’autres versions linguistiques, moins claires. Ainsi, dans la version de langue anglaise, il est question, à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, de « work done for another State » et, à l’article 4, paragraphe 1, sous b), de cette annexe, de « duties in the service of a State » ; la version néerlandaise parle de « diensten, verricht voor een andere staat » [sous a)] et de « functie in dienst van een staat » [sous b)].

3)      L’esprit et la finalité de la règle de neutralisation

85.      La ratio legis de la règle de neutralisation plaide, selon nous, pour exiger que la personne exerce une activité dans l’État d’affectation lui-même directement dans un organisme de l’autre État. Ainsi qu’il a été exposé aux points 67 et suivants des présentes conclusions, la règle de neutralisation comporte une présomption fondée sur des critères simples et objectifs selon laquelle la personne en cause conserve un lien de rattachement spécifique avec l’autre État. Dans l’approche catégorielle qui s’impose, cette présomption n’apparaît justifiée que si l’activité en cause est exercée directement dans un organisme de l’autre État, même si un lien juridique direct entre la personne et cet État n’est pas nécessaire (37). En revanche, si cette activité est exercée, bien que sur délégation et pour le compte de l’autre État, dans un organisme tiers ou dans différents organismes, cela distend le lien qui unit la personne à cet État.

86.      Si une autre approche était retenue, l’application du droit serait nettement plus difficile et une insécurité juridique considérable serait à redouter. S’il était considéré qu’une activité dans un organisme de l’autre État n’est pas nécessaire dans l’État d’affectation, il serait difficile de déterminer dans quels cas il existe effectivement des services pour un autre État.

87.      La relation statutaire ou la relation de travail avec cet autre État ne serait pas suffisante à cette fin, car il ne semble pas exclu que, dans des cas individuels, les services effectués pour un autre État puissent également être effectués au moyen d’une activité indépendante (38) ou d’un emploi auprès d’un tiers. Une telle autre approche serait d’ailleurs en contradiction avec la jurisprudence rendue jusqu’à présent par la Cour selon laquelle un lien juridique direct entre la personne concernée et l’autre État n’est justement pas nécessaire (39).

88.      De même, de tels cas ne sauraient être déterminés de manière fiable en fonction des activités concrètement exercées. L’appréciation effective de ces activités qui serait alors requise irait à l’encontre du besoin de critères simples pour appliquer le droit. En outre, l’activité exercée me semble être un élément d’intégration dans l’État d’affectation beaucoup moins important que d’autres facteurs, tels que l’environnement de travail ou le statut et, le cas échéant, les privilèges de la personne qui s’y rattachent. Autrement dit, l’activité concrètement exercée, quel que soit son contenu, ne me paraît pas, en soi, de nature à fonder la présomption qu’il existe avec l’autre État un lien de rattachement spécifique à un point tel que celui-ci empêche une intégration dans l’État d’affectation. À cet égard, la Cour a d’ailleurs déjà jugé que les fonctions spécifiques exercées au sein de l’organisme sont dépourvues de pertinence (40).

4)      Conclusion intermédiaire

89.      Nous en déduisons que l’applicabilité de la règle de neutralisation exige que les services effectués dans l’État d’affectation l’aient été dans un organisme de l’autre État (41). La question de savoir si cet organisme de l’autre État dans l’État d’affectation doit nécessairement être une ambassade, une mission diplomatique ou une représentation permanente, ce que semble impliquer la jurisprudence rendue jusqu’à présent par la Cour et ce que le Tribunal a également admis aux points 78 à 83 de l’arrêt attaqué, ou si d’autres institutions étatiques, telles que des bases militaires à l’étranger ou des écoles à l’étranger placées sous le contrôle d’un autre État, peuvent également être visées n’est pas décisif pour statuer en l’espèce (42).

2.      L’application de ce critère à la situation du requérant

90.      Au regard de ces critères, l’activité exercée par le requérant au cours de la période de référence peut-elle être qualifiée de services effectués pour l’État polonais ?

91.      En l’occurrence, il est constant que le requérant a certes continué à jouir du statut de juge polonais pendant l’exercice de son activité à Bruxelles. Or, ainsi qu’il ressort des développements précédents, le critère déterminant pour l’application de la règle de neutralisation n’est ni l’activité concrètement exercée par la personne en cause, ni le lien juridique spécifique de celle-ci avec cet autre État, mais son intégration dans un organisme dudit autre État dans l’État d’affectation.

92.      Au cours de la période de référence, le requérant a, selon les constatations figurant aux points 64, 66 et 73 de l’arrêt attaqué, exercé une grande partie de son activité dans les locaux du Réseau européen à Bruxelles. Il était également soumis au contrôle du comité de pilotage du Réseau européen, qui avait le pouvoir de le suspendre et de proposer à l’assemblée générale de mettre fin à son mandat. Ces éléments indiquent qu’il était intégré, en Belgique, dans un organisme du Réseau européen. Ainsi qu’il ressort des points 3 et 82 de l’arrêt attaqué, le Réseau européen est une association internationale à but non lucratif de droit belge ayant pour objet de promouvoir, pour ses membres et le personnel des juridictions, des programmes de formation ayant une dimension européenne. Il ne s’agit donc pas d’un organisme de l’État polonais.

93.      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument du requérant selon lequel l’interprétation retenue par le Tribunal, lorsque celui-ci considère qu’une intégration dans une représentation permanente d’un État membre est nécessaire, exclurait l’ensemble des membres du pouvoir judiciaire du bénéfice de la règle de neutralisation.

94.      Premièrement, en l’espèce, il n’est pas nécessaire, en fin de compte, de se prononcer sur la question de savoir si une intégration dans une ambassade, une mission diplomatique ou une représentation permanente est requise ou si une intégration même dans un autre organisme de l’État dans le pays d’affectation est suffisante.

95.      Deuxièmement, il n’apparaît pas exclu que même des membres du pouvoir judiciaire, en dépit de leur indépendance en tant que juge, puissent être intégrés dans un tel organisme, par exemple à la suite d’un détachement. L’exemple du requérant lui-même le montre : l’indépendance en tant que juge de celui-ci n’a pas été affectée par le fait que, dans le cadre de sa fonction pour le Réseau européen, laquelle était distincte de celle de juge, il était intégré à cet organisme et était soumis au contrôle du comité de pilotage de celui-ci.

96.      Troisièmement, le besoin d’appliquer la règle de neutralisation sur la base de critères simples et objectifs permettrait d’exclure certains groupes de personnes, à l’instar du caractère non pertinent des services dans le secteur purement privé. En effet, ainsi qu’il a été exposé aux points 67 et suivants ci‑dessus, cette règle ne doit justement pas être considérée comme un privilège : elle ne fait que se fonder, en établissant une catégorie, sur le lien de rattachement spécifique du demandeur avec l’autre État. Si le requérant ne se trouvait pas dans le champ d’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, mais dans celui de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de cette annexe, une interprétation large de la notion d’« activité dans un service d’un État », qui doit recevoir la même interprétation, lui serait même défavorable (43).

97.      Contrairement à ce que soutient le requérant, le Tribunal n’a pas non plus commis d’erreur de droit en considérant, sans tenir compte de son statut de juge et de sa relation juridique avec l’État polonais, que le travail effectué pour le Réseau européen était le seul facteur pertinent.

98.      En effet, ainsi que nous venons de l’exposer, pour l’application du critère des « services effectués pour un autre État », le statut de la personne concernée et le rapport juridique de celle-ci avec l’autre État ne sont pas décisifs. Par conséquent, il est également sans incidence que, pendant la période de référence, le requérant ait continué à être employé en qualité de juge dans un tribunal d’arrondissement auprès de l’État polonais et qu’il ait perçu son salaire directement de ce tribunal.

3.      Conclusion intermédiaire

99.      C’est donc sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a jugé que l’exception tenant aux « services effectués pour un autre État », prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), second tiret, seconde phrase, de l’annexe VII du statut, ne s’applique pas au travail effectué par le requérant pour le Réseau européen.

VI.    Sur les dépens

100. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi doit être rejeté. Par conséquent, la Cour statue sur les dépens conformément à l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure. Selon l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu en ce sens, il y a lieu de condamner le requérant à supporter tant ses propres dépens que ceux exposés par la Commission.

VII. Conclusion

101. En résumé, nous proposons à la Cour de statuer comme suit :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Le requérant est condamné aux dépens de la procédure de pourvoi.


1      Langue originale : l’allemand.


2      Règlement no 31 (CEE), 11 (CEEA) fixant le statut des fonctionnaires et le régime applicable aux autres agents de la Communauté économique européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 1962, 45, p. 1385).


3      Arrêt QB/Commission (T‑71/21, non publié, EU:T:2021:868).


4      À cet égard, il convient de rappeler, par exemple, l’arrêt du 30 mars 1993, Vardakas/Commission (T‑4/92, EU:T:1993:29), dans lequel le Tribunal a jugé que le Comité européen de normalisation, une association internationale à but non lucratif de droit belge, est une « organisation internationale » au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), second tiret, seconde phrase, de l’annexe VII du statut.


5      Arrêts du 14 juin 2012, Banco Español de Crédito (C‑618/10, EU:C:2012:349, point 61) ; du 14 janvier 2016, Vodafone (C‑395/14, EU:C:2016:9, point 40) ; du 25 janvier 2018, Commission/République tchèque (C‑314/16, EU:C:2018:42, point 47) ; du 15 mars 2022, Autorité des marchés financiers (C‑302/20, EU:C:2022:190, point 63), et du 12 janvier 2023, Österreichische Post (Informations relatives aux destinataires de données personnelles) (C‑154/21, EU:C:2023:3, point 29).


6      Voir, en ce sens, arrêts du 26 janvier 2021, Hessischer Rundfunk (C‑422/19 et C‑423/19, EU:C:2021:63, point 65), et du 17 janvier 2023, Espagne/Commission (C‑632/20 P, EU:C:2023:28, points 40 à 42).


7      Dans des cas particuliers, il est concevable que l’activité professionnelle principale exercée par un agent ne puisse pas être déterminée, car celui-ci exerce plusieurs activités auxquelles il consacre le même temps. Dans de tels cas, l’exercice, pendant la période de référence, de l’une de ces activités dans l’État d’affectation ultérieur ne ferait pas obstacle à l’octroi de l’indemnité de dépaysement.


8      Arrêts du 24 janvier 2008, Adam/Commission (C‑211/06 P, EU:C:2008:34, points 38 et 39) ; du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, points 35 et 36) ; du 29 novembre 2007, Salvador García/Commission (C‑7/06 P, EU:C:2007:724, points 43 et 44) ; du 29 novembre 2007, Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P, EU:C:2007:725, points 37 et 38) ; du 29 novembre 2007, Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P, EU:C:2007:726, points 41 et 42) ; du 29 novembre 2007, de Bustamante Tello/Conseil (C‑10/06 P, EU:C:2007:727, points 33 et 34) ; du 25 mars 2021, Alvarez y Bejarano e.a./Commission (C‑517/19 P et C‑518/19 P, EU:C:2021:240, point 69) ; voir, également, arrêts du 15 septembre 1994, Magdalena Fernández/Commission (C‑452/93 P, EU:C:1994:332, point 20), et du 15 septembre 2022, Brown/Commission et Conseil (C‑675/20 P, EU:C:2022:686, point 46).


9      Conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Commission/HosmanChevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:169, point 44, note en bas de page 23).


10      Voir arrêt du 28 février 2019, Pozza/Parlement (T‑216/18, non publié, EU:T:2019:118, point 39).


11      Voir, en ce sens, arrêts du 30 juin 2005, Olesen/Commission (T‑190/03, EU:T:2005:264, point 34), et du 28 février 2019, Pozza/Parlement (T‑216/18, non publié, EU:T:2019:118, point 50).


12      Voir, en ce sens, arrêt du 25 novembre 2020, UI/Commission (T‑362/19, non publié, EU:T:2020:562, point 53) ; voir, dans le même sens, arrêt du 13 décembre 2004, E/Commission (T‑251/02, EU:T:2004:357, points 57 et 72).


13      Arrêts du 31 mai 1988, Nuñez/Commission (211/87, EU:C:1988:275, point 10) ; du 8 avril 1992, Costacurta Gelabert/Commission (T‑18/91, EU:T:1992:56, point 41) ; du 13 avril 2000, Reichert/Parlement (T‑18/98, EU:T:2000:113, point 25) ; du 3 mai 2001, Liaskou/Conseil (T‑60/00, EU:T:2001:129, point 52) ; du 30 juin 2005, Olesen/Commission (T‑190/03, EU:T:2005:264, point 61), et du 25 novembre 2020, UI/Commission (T‑362/19, non publié, EU:T:2020:562, point 37).


14      Voir ordonnance du 6 juillet 2021, Karpeta-Kovalyova/Commission (C‑717/20 P, non publiée, EU:C:2021:542, points 11 et 12).


15      Conclusions jointes de l’avocat général Bot dans les affaires Salvador García/Commission (C‑7/06 P), Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P), Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P), et De Bustamante Tello/Conseil (C‑10/06 P) (EU:C:2007:324, points 123 à 131).


16      Arrêts du 29 novembre 2007, Salvador García/Commission (C‑7/06 P, EU:C:2007:724, point 42) ; du 29 novembre 2007, Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P, EU:C:2007:725, point 36) et du 29 novembre 2007, Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P, EU:C:2007:726, point 40) ; conclusions jointes de l’avocat général Bot dans les affaires Salvador García/Commission (C‑7/06 P), Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P), Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P), et De Bustamante Tello/Conseil (C‑10/06 P) (EU:C:2007:324, point 136).


17      Arrêts du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 37) ; du 29 novembre 2007, Salvador García/Commission (C‑7/06 P, EU:C:2007:724, point 45), Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P, EU:C:2007:725, point 39), Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P, EU:C:2007:726, point 43), De Bustamante Tello/Conseil (C‑10/06 P, EU:C:2007:727, point 35), et du 24 janvier 2008, Adam/Commission (C‑211/06 P, EU:C:2008:34, point 40).


18      Arrêts du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 38) ; du 29 novembre 2007, Salvador García/Commission (C‑7/06 P, EU:C:2007:724, point 46), Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P, EU:C:2007:725, point 40), Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P, EU:C:2007:726, point 44), De Bustamante Tello/Conseil (C‑10/06 P, EU:C:2007:727, point 36), et du 24 janvier 2008, Adam/Commission (C‑211/06 P, EU:C:2008:34, point 41).


19      Sur ces considérations, voir, déjà, conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:169, points 54 à 56).


20      Conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:169, point 57).


21      Conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:169, point 57).


22      La présente affaire se situe dans le champ d’application de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, étant donné que le requérant n’a pas la nationalité de son État d’affectation (la Belgique), mais est de nationalité polonaise. Étant donné que, au cours de la période de référence, le requérant a exercé, de façon habituelle, son activité professionnelle principale en Belgique, il n’a pas droit à l’indemnité de dépaysement, sauf s’il a effectué des services pour un autre État (ou une organisation internationale). Dans ces conditions, une interprétation large de la notion de « services effectués pour un autre État » lui serait favorable. S’il s’agissait cependant d’une entrée en fonctions en Pologne et si le requérant avait exercé son activité professionnelle principale en Belgique pendant une période d’au moins dix ans, il ne bénéficierait de l’indemnité de dépaysement que s’il n’avait pas effectué d’activité dans un service d’un État ou dans une organisation internationale. Une interprétation large de cette expression lui serait donc défavorable dans ce cas de figure, qui n’est pas celui de l’espèce.


23      Voir, à cet égard, en détail, nos conclusions dans l’affaire Brown/Commission (C‑675/20 P, EU:C:2022:287, points 36 à 42 et 50).


24      Voir nos conclusions dans l’affaire Brown/Commission (C‑675/20 P, EU:C:2022:287, points 40 et 41).


25      Conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:169, point 90) ; sur cette considération relative à l’interprétation du critère de l’exercice, « de façon habituelle », de l’« activité professionnelle principale », voir également point 53 des présentes conclusions.


26      Voir arrêts du 15 janvier 1981, Vutera/Commission (1322/79, EU:C:1981:6, point 9), et du 13 décembre 2004, E/Commission (T‑251/02, EU:T:2004:357, point 126).


27      Un exemple de ces situations serait le détachement pour une durée déterminée d’un salarié d’une entreprise privée dans un bureau de cette entreprise situé à l’étranger. C’est ainsi que le Tribunal a jugé, dans l’arrêt du 13 décembre 2004, E/Commission (T‑251/02, EU:T:2004:357), qu’une personne qui était salariée d’un cabinet d’avocats anglais à Londres (Royaume-Uni) et avait été détachée pour une durée déterminée au bureau de Bruxelles de ce cabinet ne bénéficiait pas de la règle de neutralisation.


28      Arrêt du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 39).


29      Arrêt du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 42).


30      Arrêt du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 44).


31      Arrêt du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, points 42 et 43) ; voir, également, les arrêts qui s’y réfèrent, du 29 novembre 2007, Salvador García/Commission (C‑7/06 P, EU:C:2007:724, point 51), Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P, EU:C:2007:725, point 45), Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P, EU:C:2007:726, point 49), et De Bustamante Tello/Conseil (C‑10/06 P, EU:C:2007:727, point 41).


32      Arrêt du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 45).


33      Arrêts du 29 novembre 2007, Salvador García/Commission (C‑7/06 P, EU:C:2007:724, points 56 et 60) ; Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P, EU:C:2007:725, points 50 et 54) ; Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P, EU:C:2007:726, points 54 et 58), et De Bustamante Tello/Conseil (C‑10/06 P, EU:C:2007:727, points 46 et 50).


34      Des formulations analogues se retrouvent, par exemple, dans les versions en langues italienne (« servizi effettuati per un altro Stato »), espagnole (« servicios prestados a otro Estado ») et portugaise (« serviços prestados a um outro Estado »).


35      Des formulations analogues se retrouvent, par exemple, dans les versions en langues italienne (« esercizio di funzioni al servizio di uno Stato »), espagnole (« ejercicio de funciones al servicio de un Estado ») et portugaise (« exercício de funções num serviço de qualquer Estado »).


36      Arrêt du 30 mars 1993 (T‑4/92, EU:T:1993:29, point 36) ; de même, arrêt du 28 novembre 2019, Wywiał-Prząda/Commission (T‑592/18, EU:T:2019:820, point 35).


37      Arrêt du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 45).


38      À cet égard, le Tribunal a jugé qu’une activité indépendante de consultant pour la Commission relevait de l’exception relative aux services pour une organisation internationale, voir arrêt du 14 décembre 1995, Diamantaras/Commission (T‑72/94, EU:T:1995:212, point 52).


39      Arrêt du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 45).


40      Arrêt du 21 juin 2007, Commission/Hosman-Chevalier (C‑424/05 P, EU:C:2007:367, point 44).


41      Pour statuer en l’espèce, il n’est pas décisif de savoir si les services qui sont fournis à une subdivision politique d’un État, telle que les gouvernements des régions, les communautés autonomes ou d’autres entités territoriales, relèvent de la règle de neutralisation. Il n’est donc pas nécessaire de se prononcer, en l’espèce, sur la question de savoir si c’est à bon droit que la Cour a donné une réponse négative à cette question, dans ses arrêts du 29 novembre 2007, Salvador García/Commission (C‑7/06 P, EU:C:2007:724), Herrero Romeu/Commission (C‑8/06 P, EU:C:2007:725), Salazar Brier/Commission (C‑9/06 P, EU:C:2007:726), et De Bustamante Tello/Conseil (C‑10/06 P, EU:C:2007:727).


42      Il pourrait être envisagé d’effectuer à cet égard une distinction selon que les services en cause sont assortis de certains privilèges et immunités, tels que ceux qui peuvent résulter, par exemple, de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, du 18 avril 1961, ou d’autres traités internationaux. En effet, en tout état de cause dans de tels cas, il existe une différence suffisamment pertinente par rapport aux personnes qui sont détachées de manière temporaire à l’étranger par une personne privée, physique ou morale, et qui y exercent une activité, par exemple, dans une succursale. En outre, le critère tenant à l’existence de certains privilèges et immunités en faveur de la personne concernée permettrait une application objective et claire de la règle de neutralisation.


43      Voir, à cet égard, nos développements aux points 71 à 73 des présentes conclusions.