Language of document : ECLI:EU:T:2005:170

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

11 mai 2005 (*)

« Marque communautaire – Procédure d'opposition – Marque figurative antérieure comprenant l'expression ‘capital markets CM’ – Demande de marque communautaire figurative comprenant l'élément ‘CM’ – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l'affaire T-390/03,

CM Capital Markets Holding, SA, établie à Madrid (Espagne), représentée initialement par Mes N. Moya Fernández et J. Calderón Chavero, puis par Mes Calderón Chavero et T. Villate Consonni, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. O. Montalto et I. de Medrano Caballero, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

l'autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l'OHMI ayant été

Caja de Ahorros de Murcia, établie à Murcie (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l'OHMI du 17 septembre 2003 (affaire R 244/2003-1), relative à une procédure d'opposition entre CM Capital Markets Holding, SA et Caja de Ahorros de Murcia,


LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme V. Tiili et M. O. Czúcz, juges,

greffier : Mme B. Pastor, greffier adjoint,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 24 novembre 2003,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 2 avril 2004,

à la suite de l'audience du 28 octobre 2004,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1       Le 7 décembre 1999, Caja de Ahorros de Murcia (ci-après la « demanderesse ») a sollicité auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié, l’enregistrement en tant que marque communautaire d’un signe figuratif, formé par l’image d’un carré de couleur rouge barré d’une ligne jaune à l’intérieur duquel sont inscrites les lettres « C » et « M » de couleur blanche, représenté comme suit :

Image not found

2       Cette demande a été présentée pour désigner des produits et services des classes 1 à 42 de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

3       Le 23 octobre 2000, la demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 84/2000.

4       Le 23 janvier 2001, CM Capital Markets Holding, SA a formé une opposition à l’encontre de la marque demandée en se fondant sur les enregistrements espagnols nos 2 000 040, 2 000 041, 2 000 042 et 2 000 043, désignant des services des classes 35, 36, 38 et 42, de la marque figurative suivante (ci-après la « marque antérieure ») :

Image not found

5       L’opposition était fondée sur tous les services protégés par la marque antérieure et formée contre une partie des produits et services désignés dans la demande de marque communautaire. Les motifs invoqués étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), et paragraphe 4, du règlement n° 40/94.

6       Par décision du 27 janvier 2003, la division d’opposition a en partie accueilli l’opposition pour les services considérés comme identiques ou similaires, à savoir les services « Gestion des affaires commerciales, administration commerciale, travaux de bureau » relevant de la classe 35 ; « Assurances, affaires financières, affaires monétaires, affaires bancaires, affaires immobilières » relevant de la classe 36 ; « Télécommunications » relevant de la classe 38 ; « Services juridiques, recherche scientifique et industrielle » relevant de la classe 42, au motif qu’il existait un risque de confusion pour ces services dans l’esprit du public espagnol.

7       Le 25 mars 2003, la demanderesse a formé un recours contre la décision de la division d’opposition.

8       Par décision du 17 septembre 2003 (ci‑après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a accueilli le recours et a annulé la décision de la division d’opposition. La chambre de recours a jugé qu’il n’y avait pas de similitude entre les signes en cause et a, en conséquence, rejeté l’existence d’un risque de confusion.

 Conclusions des parties

9       La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       annuler la décision attaquée ;

–       par voie de conséquence, faire entièrement droit à l’opposition ;

–       ordonner à la division d’opposition de l’OHMI de procéder au refus d’enregistrement de la marque en cause ;

–       condamner l’OHMI aux dépens.

10     L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       rejeter le recours comme non fondé ;

–       condamner la requérante aux dépens.

11     Lors de l’audience, la requérante s’est désistée du deuxième chef de ses conclusions tendant à ce qu’il soit fait entièrement droit à l’opposition.

 En droit

 Sur la recevabilité des conclusions de la partie requérante

12     Par son troisième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal d’ordonner à la division d’opposition de l’OHMI de procéder au refus d’enregistrement de la marque en cause. La requérante sollicite ainsi, en substance, qu’il soit fait injonction à l’OHMI de refuser l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et services en question.

13     À cet égard, il convient de rappeler que, dans le cadre d’un recours introduit devant le juge communautaire contre la décision d’une chambre de recours de l’OHMI, celui-ci est tenu, conformément à l’article 63, paragraphe 6, du règlement n° 40/94, de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser à l’OHMI des injonctions. Il incombe, en effet, à ce dernier de tirer les conséquences du dispositif et des motifs de l’arrêt du Tribunal. La conclusion de la requérante visant à ce que le Tribunal ordonne à la division d’opposition de l’OHMI de procéder au refus d’enregistrement de la marque en cause est donc irrecevable [arrêts du Tribunal du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T‑331/99, Rec. p. II-433, point 33 ; du 23 octobre 2002, Institut für Lernsysteme/OHMI – Educational Services (ELS), T‑388/00, Rec. p. II-4301, point 19, et du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II‑683, point 12].

 Sur le fond

14     La requérante invoque un moyen unique tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Arguments des parties

15     La requérante estime que la chambre de recours a procédé à un examen erroné du risque de confusion entre les marques faisant l’objet du litige.

16     Elle soutient que l’appréciation de la chambre de recours concernant les différences entre les marques est erronée. S’il est certain que la marque antérieure est composée de l’élément « CM » ainsi que de l’expression « capital markets », cette dernière ne devrait cependant pas être prise en compte, étant donné qu’il s’agit d’une expression générique pour les services protégés par la marque antérieure.

17     Elle fait valoir, en outre, que la marque demandée reproduit la partie la plus distinctive de la marque antérieure, ce qui crée un risque de confusion, surtout lorsque la publicité faite pour les services en cause a un caractère phonétique, les graphies et couleurs composant lesdites marques n’ayant dans ce cas aucune importance.

18     La requérante souligne l’importance de l’élément phonétique et sa prédominance sur l’élément visuel de la marque en raison de la portée que revêt la transmission orale des marques dans le commerce par la publicité et par les consommateurs lors d’acquisitions. La grande similitude de l’élément phonétique entre les marques en conflit ne saurait être négligée.

19     La requérante conteste l’importance que la chambre de recours a donnée aux couleurs et à la graphie des marques en conflit, qui ne seraient qu’un aspect accessoire par rapport au fait que les marques partagent l’élément « CM » et ont un champ d’application identique ou très similaire, ce qui serait décisif quant à la vision globale que le consommateur a des marques concernées et serait de nature à créer un risque de confusion.

20     La requérante se réfère à une précédente décision de l’OHMI, du 4 septembre 2002, rendue dans l’affaire R 223/2001-4, dans laquelle la quatrième chambre de recours aurait considéré que la marque antérieure et la marque « CM 1824 » étaient incompatibles, car « CM » était l’élément prédominant dans les deux marques, malgré leur graphie et leur représentation différentes et bien que l’élément « CM » ait été accompagné d’autres éléments. La chambre de recours aurait relevé, dans cette décision, que l’expression « capital markets » s’appliquait à tous les services que la marque antérieure protégeait et qu’elle ne serait pas perçue par les consommateurs comme faisant partie intégrante de cette dernière. Elle aurait dès lors considéré que l’enregistrement de la nouvelle demande provoquerait un risque de confusion.

21     Selon la requérante, en transposant les critères exposés dans cette décision au cas d’espèce, il conviendrait de souligner l’identité phonétique de l’élément prédominant, « CM », et l’identité du champ d’application des marques en conflit, confirmant les risques d’association et de confusion qui existent entre elles.

22     L’OHMI soutient que la chambre de recours n’a commis aucune erreur de fait ou de droit et a appliqué correctement la législation et la jurisprudence communautaires en concluant que les signes en cause n’étaient ni identiques ni similaires et que, partant, il n’existait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Appréciation du Tribunal

23     Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée.

24     En vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 40/94, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

25     En l’espèce, la marque antérieure sur laquelle était fondée l’opposition est protégée en Espagne. Partant, afin d’établir l’existence éventuelle d’un risque de confusion entre les marques en conflit, il convient de tenir compte du point de vue du public pertinent en Espagne.

26     Le Tribunal adopte, à cet égard, la définition que donne la chambre de recours du public ciblé. Celle-ci a considéré à bon droit que les services désignés par les marques qui font l’objet du présent litige s’adressent à un éventail spécialisé de personnes, incluant, d’une part, des spécialistes et, d’autre part, des personnes qui ont besoin de conseils professionnels sur des sujets financiers, juridiques ou commerciaux, telles que, notamment, les clients de banques ou de cabinets juridiques. Il s’agit, partant, d’un profil d’utilisateurs assez spécialisés ou informés. Il convient de relever, en outre, que la requérante ne conteste pas cette définition.

27     Dès lors, il y a lieu de considérer que le risque de confusion doit être apprécié par rapport à un consommateur espagnol très attentif et avisé.

28     Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

29     Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 31 à 33, et la jurisprudence citée].

30     D’abord, il y a lieu d’indiquer qu’il est constant qu’il existe une identité entre les services couverts par les marques en cause.

31     Dans ces conditions, l’issue du recours dépend du degré de similitude des signes en cause. Il convient donc d’examiner, ensuite, si le degré de similitude entre les signes en cause est suffisamment élevé pour permettre de considérer qu’il existe un risque de confusion entre les marques.

32     Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II-4335, point 47, et la jurisprudence citée].

33     Il y a donc lieu de procéder à une comparaison des signes en conflit en l’espèce sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

34     En premier lieu, en ce qui concerne la comparaison visuelle des marques en conflit, il convient de rappeler que la chambre de recours a relevé que, dans la marque antérieure, le signe était composé de deux éléments, l’expression « capital markets », écrite en lettres noires courantes, d’une part, et les lettres « C » et « M » superposées, d’autre part, tandis que la marque demandée était composée des seules lettres « C » et « M » en caractères normalisés, de couleur blanche, dans un carré de couleur rouge barré d’une ligne jaune. La chambre de recours a en outre constaté, dans la décision attaquée, que les lettres « C » et « M » de la marque demandée n’étaient pas superposées, mais alignées, qu’elles s’inscrivaient dans un carré de couleur vive et qu’elles étaient de couleur blanche, tandis que, dans la marque antérieure, les lettres étaient de couleur noire. Selon la chambre de recours, l’impression visuelle produite par les deux marques est totalement différente et cette différence est accentuée par la présence, dans la marque antérieure, de l’expression « capital markets ».

35     Il convient de constater d’emblée que les éléments figuratifs revendiqués par la marque demandée constituent un ensemble graphique particulier différent de celui formé par la marque antérieure. En effet, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué à juste titre, les lettres « C » et « M » ne sont pas superposées, mais alignées et s’inscrivent dans un cadre de couleur vive. En outre, elles sont de couleur blanche, tandis que, dans la marque antérieure, les lettres sont de couleur noire.

36     Par ailleurs, l’expression « capital markets » est importante dans la perception visuelle de la marque antérieure, compte tenu de sa position initiale, à l’endroit le plus visible. Elle est, pour cette raison, immédiatement perceptible.

37     Certes, l’importance de l’expression « capital markets » est atténuée par le fait qu’elle a un sens évocateur des services protégés par la marque antérieure. Ainsi, l’élément prédominant dans les deux marques, malgré sa graphie et sa représentation différentes, est l’élément commun « CM ». L’importance réduite de l’expression « capital markets » est, partant, susceptible de faire apparaître une certaine similitude visuelle entre les marques en cause.

38     Toutefois, cette similitude visuelle n’a qu’une incidence mineure. En effet, l’élément « CM » se présente, dans chacun des signes, dans une composition dissemblable, avec des couleurs et des caractères totalement différents.

39     Il ressort de ces considérations que, bien que les deux marques aient en commun l’élément « CM », elles présentent des différences visuelles non négligeables. Dès lors, dans la perception visuelle globale des signes en cause, l’existence d’éléments particuliers à chaque signe fait que l’impression d’ensemble de chaque signe est différente.

40     En conséquence, comme la chambre de recours l’a constaté à juste titre, les signes en cause, considérés dans leur ensemble, ne sont pas visuellement similaires.

41     S’agissant, en deuxième lieu, de la comparaison phonétique, il convient de rappeler, d’abord, que la requérante fait valoir l’importance de l’élément phonétique et sa prédominance sur l’élément visuel en ce qui concerne l’utilisation des marques sur le marché et dans la publicité. Elle soutient que la grande similitude de l’élément phonétique des marques en conflit ne saurait être négligée.

42     Force est ensuite de constater que la chambre de recours n’a pas procédé à une comparaison spécifique, sur le plan phonétique, des signes en cause.

43     À cet égard, il y a lieu de relever, de façon générale, que deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II-4335, point 30, et du 25 novembre 2003, Oriental Kitchen/OHMI – Mou Dybfrost (KIAP MOU), T‑286/02, Rec. p. II-4953, point 38].

44     En l’espèce, il convient de relever que l’élément « CM » constitue, à la fois, l’élément verbal de la marque demandée et l’un des éléments verbaux composant la marque antérieure. Dès lors, il y a lieu de considérer que la marque demandée est identique, sur le plan phonétique, à un des éléments composant la marque antérieure. Cependant, selon la jurisprudence, cette constatation n’est pas suffisante en elle-même pour considérer que les marques en cause, considérées chacune dans leur ensemble, sont similaires (arrêt MATRATZEN, point 43 supra, point 31).

45     En effet, comme il a déjà été rappelé, l’appréciation de la similitude entre deux marques doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C-251/95, Rec. p. I‑6191, point 23, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C-342/97, Rec. p. I-3819, point 25).

46     Selon la jurisprudence, une marque complexe ne peut être considérée comme étant analogue à une autre marque, similaire ou identique à un des composants de la marque complexe que si celui-ci constitue l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par la marque complexe. Tel est le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt MATRATZEN, point 43 supra, point 33).

47     La jurisprudence a précisé que cette approche ne revient pas à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer une telle comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans leur ensemble. Cependant, cela n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (arrêt MATRATZEN, point 43 supra, point 34).

48     Il convient de rappeler, en outre, que, en général, le public ciblé ne considérera pas un élément descriptif faisant partie d’une marque complexe comme l’élément distinctif et dominant de l’impression d’ensemble produite par celle-ci [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 53, et du 6 juillet 2004, Grupo El Prado Cervera/OHMI – Héritiers Debuschewitz (CHUFAFIT), T-117/02, Rec. p. II-0000, point 51].

49     En l’espèce, il y a lieu de constater que l’expression « capital markets » a un sens évocateur des services désignés par la marque antérieure. Partant, l’élément dominant dans cette marque est l’élément « CM ».

50     La marque demandée étant identique, sur le plan phonétique, à l’élément dominant de la marque antérieure, il existe une similitude phonétique entre les signes en cause.

51     Certes, il convient d’observer que, comme le fait valoir l’OHMI, les marques en cause présentent certaines différences phonétiques. En effet, d’une part, dans la prononciation espagnole, la marque antérieure se compose de cinq syllabes (« ca‑pi-tal-mar-kets ») et de deux phonèmes (« ce-eme »), tandis que la marque demandée ne contient que deux phonèmes (« ce-eme »). D’autre part, les cinq syllabes initiales (« ca-pi-tal-mar-kets ») de la marque antérieure produisent un son très différent de celui produit par les phonèmes qui composent la marque demandée.

52     Toutefois, il y a lieu de constater que ces différences résultent du fait que la marque antérieure est composée d’un ensemble formé par l’élément « CM » et par l’expression « capital markets ». À cet égard, il convient de rappeler que l’expression « capital markets » a un sens évocateur des services couverts par la marque antérieure et que, partant, son importance se voit réduite.

53     Il ressort de ces considérations que les signes en cause, considérées dans leur ensemble, présentent une certaine similitude phonétique.

54     En troisième lieu, en ce qui concerne la comparaison conceptuelle des signes en cause, il convient d’indiquer que la requérante fait valoir que l’expression « capital markets » de la marque antérieure ne devrait pas être prise en considération, étant donné qu’il s’agit d’une expression générique pour les services protégés par cette marque.

55     Dans la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas procédé à une comparaison des signes en cause sur l’aspect sémantique. Toutefois, dans le cadre de l’analyse du caractère distinctif de la marque antérieure, elle a indiqué qu’il n’y avait pas lieu d’ignorer l’expression « capital markets », qui a pour fonction non seulement de faire référence au secteur d’activité auquel l’entreprise se consacre, mais aussi de contribuer, avec l’élément « CM », à identifier la provenance commerciale des services fournis, de sorte qu’un consommateur désignera, mentionnera et rappellera la marque antérieure sous l’expression « capital markets CM », et non simplement au moyen de l’élément « CM ».

56     À cet égard, il y a lieu tout d’abord d’insister sur la circonstance que l’élément dominant de la marque antérieure est l’élément « CM », du fait que « capital markets » constitue un terme évocateur des services protégés par la marque.

57     Toutefois, en l’espèce, en dépit du fait que l’expression « capital markets » ne peut être considérée comme un élément dominant de la marque antérieure, il convient de constater, tout comme l’OHMI, que cette expression peut constituer un élément pertinent aux fins de l’analyse conceptuelle des marques en cause.

58     En effet, il convient premièrement d’observer que, si le public concerné connaît le sens de l’expression « capital markets », les marques en cause lui apparaîtront différentes sur le plan conceptuel et, s’il ne le connaît pas, il ne percevra pas non plus de coïncidence conceptuelle entre elles, étant donné qu’aucune d’entre elles n’aura de sens pour lui.

59     Deuxièmement, l’élément dominant de la marque antérieure, à savoir l’élément « CM », n’ayant, en soi, aucune valeur sémantique, il en résulte que l’expression « capital markets », malgré son caractère descriptif des services couverts par la marque, voit, du point de vue conceptuel, son importance renforcée. À cet égard, il y a lieu d’observer, comme le fait valoir l’OHMI, que l’expression « capital markets » faisant référence aux marchés de capitaux en anglais, est susceptible d’être reliée par le public en cause avec l’élément qui accompagne cette expression, à savoir « CM ». Ainsi, l’expression « capital markets » est susceptible de donner une valeur sémantique à l’élément « CM », en lui donnant l’idée de marchés financiers. En revanche, l’élément « CM » de la marque demandée n’a, en principe, aucun sens en soi.

60     Il convient, troisièmement, d’ajouter qu’il n’est pas à exclure totalement que le public ciblé soit capable d’établir un lien conceptuel entre la marque demandée et l’entreprise fournissant les services désignés par cette marque, « CM » étant le sigle abrégé de la raison sociale de la demanderesse, la Caja de Ahorros de Murcia. À cet égard, il y a lieu de tenir compte du fait que le public pertinent en l’espèce est composé d’un éventail spécialisé de personnes, à savoir un public très attentif et avisé.

61     Il ressort de ces considérations que les signes en cause ne sont pas conceptuellement similaires.

62     La comparaison des signes en conflit en l’espèce sur les plans visuel, phonétique et conceptuel ayant été effectuée, il convient encore de rappeler qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour que le caractère distinctif de la marque antérieure, que celui-ci dérive des qualités intrinsèques de cette marque ou de sa renommée, doit être pris en compte pour apprécier si, le cas échéant, la similitude entre les produits ou les services désignés par les deux marques est suffisante pour donner lieu a un risque de confusion (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C-39/97, Rec. p. I-5507, points 18 et 24, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 45 supra, point 20). En outre, la Cour a estimé que, comme le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important (voir, par analogie, arrêt SABEL, point 45 supra, point 24), les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts Canon, précité, point 18, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 45 supra, point 20).

63      À cet égard, il convient d’observer que la requérante ne conteste pas les appréciations effectuées par la chambre de recours dans la décision attaquée en ce qui concerne le caractère distinctif de la marque antérieure. Il y a lieu de rappeler que la chambre de recours a affirmé qu’elle partageait l’analyse effectuée par la demanderesse, selon laquelle la marque antérieure avait un caractère distinctif réduit.

64     Il y a dès lors lieu de considérer que la marque antérieure ne présente pas un caractère distinctif élevé.

65     Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il y a par conséquent lieu de tenir compte, comme il résulte des considérations ci-dessus, de ce que le risque de confusion doit être apprécié par rapport à un consommateur espagnol très attentif et avisé, de ce qu’il existe une identité entre les services couverts par les marques en cause, de ce que les signes en cause ne sont ni visuellement ni conceptuellement similaires, mais de ce qu’il existe une certaine similitude phonétique entre les deux marques et, enfin, de ce que la marque antérieure ne présente pas un caractère distinctif élevé.

66     Compte tenu de l’ensemble de ces circonstances, il y lieu d’observer que le degré de similitude entre les marques en cause n’est pas suffisamment élevé pour pouvoir considérer qu’il existe un risque de confusion entre celles-ci. En effet, sans qu’il soit besoin d’examiner l’argument invoqué par la requérante tiré de la prédominance de l’élément phonétique de la marque par rapport à l’élément visuel, il suffit de constater que, en tout état de cause, les différences visuelles et conceptuelles entre les signes en cause sont de nature, en l’espèce, à neutraliser la similitude phonétique relevée ci-dessus.

67     Cette conclusion est corroborée par le fait que le public pertinent est hautement spécialisé dans le domaine des services concernés et, partant, susceptible de manifester un degré élevé d’attention lors du choix de ces services.

68     Enfin, s’agissant, de la prétendue pratique décisionnelle divergente de l’OHMI, il y a lieu de rappeler que la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base du règlement nº 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI (voir arrêt CHUFAFIT, point 48 supra, point 57, et la jurisprudence citée). Dès lors, l’argument tiré d’une éventuelle discordance de la décision attaquée avec la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI dans l’affaire R 223/2001-4 est inopérant et ne saurait être retenu.

69     Compte tenu de ce qui précède, la chambre de recours a considéré à juste titre qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en cause.

70     Il s’ensuit que le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

71     Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, tout partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.


2)      La requérante est condamnée aux dépens.

Jaeger

Tiili

Czúcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 mai 2005.

Le greffier

 

       Le président

H. Jung

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l'espagnol.