Language of document : ECLI:EU:T:2011:551

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

29 septembre 2011(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale NATURAVIVA – Marque communautaire verbale antérieure VIVA – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de similitude des signes »

Dans l’affaire T‑107/10,

Procter & Gamble Manufacturing Cologne GmbH, établie à Cologne (Allemagne), représentée par MK. Sandberg, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Geroulakos, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Natura Cosméticos, SA, établie à São Paulo (Brésil), représentée par MC. Bercial Arias, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 23 novembre 2009 (affaire R 1558/2008-2), relative à une procédure d’opposition entre Procter & Gamble Manufacturing Cologne GmbH et Natura Cosméticos, SA,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. E. Moavero Milanesi, président, N. Wahl et S. Soldevila Fragoso (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 3 mars 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 16 juin 2010,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du tribunal le 2 juin 2010,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience, présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite, et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 5 janvier 2006, l’intervenante, Natura Cosméticos, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement est demandé est le signe verbal NATURAVIVA.

3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent des classes 3, 5 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; produits pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser ; savons, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, gels pour le bain et la douche, huiles de bain, sels de bain, perles pour le bain, préparations de soin de la peau, à savoir, lotions, crèmes, produits nettoyants, exfoliants, masques et produits tonifiants ; produits pour le soin des cheveux et produits coiffants, à savoir, shampooings, après-shampooings, produits hydratants pour les cheveux, laques de finition, lotions pour les cheveux, laques, cires, gels, mousses, crèmes, masques et baumes, produits sous forme d’aérosol pour la coiffure et le soin des cheveux, laques pour les cheveux ; produits pour l’ondulation et la mise en plis des cheveux ; produits de coloration et de décoloration des cheveux ; déodorants corporels; produits pour le bronzage ; laits, gels et huiles de bronzage et après-soleil (cosmétiques) ; huiles, gels et lotions de protection solaire ; préparations pour favoriser le bronzage de la peau ; produits pour le rasage ; savons à raser ; mousses à raser ; produits pour l’après-rasage ; parfums d’ambiance, baguettes d’encens et cônes d’encens, pots-pourris et sachets ; produits aromatiques et huiles essentielles pour produits ménagers ; produits parfumés désodorisants ; sprays parfumés pour intérieurs ; produits pour parfumer l’air ; dentifrices ; sels à usage non médical ; hydratants ; aérosols rafraîchissants pour la peau ; articles de toilette ; produits de parfumerie, de maquillage, produits de beauté et de soins personnels ; kits, tampons et crayons cosmétiques ; préparations cosmétiques pour l’amincissement ; cosmétiques pour animaux ; coton à usage cosmétique ; serviettes imprégnées de lotions cosmétiques ; serviettes humides à usage hygiénique et cosmétique ; vernis à ongles à usage cosmétique ; vernis à ongles ; dissolvants pour vernis à ongles ; produits démaquillants ; adhésifs (matières collantes) à usage cosmétique ; motifs décoratifs à usage cosmétique ; tatouages temporaires (produits cosmétiques) pour le corps et les ongles ; produits cosmétiques de soin et de traitement du corps ; lotions pour les mains et crèmes ; crème pour blanchir la peau ; produits pour le soin des lèvres ; rouges à lèvres ; dépilatoires, cires à épiler ; talc pour la toilette ; ongles postiches ; cils postiches ; huiles pour bébés ; talc pour bébés ; produits hygiéniques de beauté, produits de toilette et produits de parfumerie pour bébés » ;

–        classe 5 : « Articles parfumés pour le rafraîchissement de l’air » ;

–        classe 44 : « Soins d’hygiène et de beauté pour êtres humains ou pour animaux ; physiothérapie ; massage ; salons de beauté ; services de thermalisme, y compris services de soins cosmétiques pour le corps ; services de salons de bronzage ; salons de beauté, salons de coiffure ; services de soins d’hygiène et de beauté pour le visage et le corps (à domicile ou dans des instituts de santé et de beauté) ; instituts de beauté, soins d’hygiène et de beauté fournis dans des instituts de thalassothérapie ou de balnéothérapie ; services d’aromathérapie, services de manucure ; services d’assistance liés aux soins diététiques et esthétiques ».

4        La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires nº 34/2006, du 21 août 2006.

5        Le 13 novembre 2006, Mülhens GmbH & Co. KG a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009].

7        L’opposition était fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        marque verbale allemande n° 39 539 494, VIVA, déposée le 27 septembre 1995 et enregistrée le 13 mars 1996, pour les produits suivants de la classe 3 : « Parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux, dentifrices » ;

–        marque verbale communautaire nº 3 944 411, VIVA, déposée le 27 juillet 2004 et enregistrée le 3 janvier 2008 pour les produits suivants de la classe 3 : « Fragrances et produits cosmétiques dans le cadre d’une ligne de fragrances, y compris, entre autres, parfums, eau de toilette, déodorants, gel de douche, lotions pour le corps ; produits pour le soin des cheveux et colorants pour les cheveux (après limitation) ».

8        Au cours de la procédure, l’intervenante a demandé à Mülhens GmbH & Co. KG de fournir la preuve de l’usage de la marque allemande antérieure, en se prévalant des dispositions de l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement nº 40/94 [devenu article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009]. La preuve de l’usage apportée par celle‑ci ayant été jugée insuffisante, la procédure d’opposition a été poursuivie uniquement sur le fondement de la marque communautaire antérieure.

9        Le 29 août 2008, la division d’opposition a accueilli l’opposition et rejeté dans son intégralité la demande de marque communautaire.

10      Le 27 octobre 2008, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 [devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009], contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 23 novembre 2009 (ci‑après « la décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a fait droit au recours. Elle a estimé que les différences visuelle et phonétique entre la marque verbale demandée NATURAVIVA et la marque verbale antérieure VIVA l’emportaient sur les similitudes et que, au niveau conceptuel, les signes étaient différents dans les États membres où les mots « natura » et « viva » étaient compris. De même, sur le plan conceptuel, elle a précisé que le signe NATURAVIVA serait perçu par le public pertinent comme un mot unique et indivisible et que les éléments « natura » et « viva » étaient également faibles du point de vue de leur caractère distinctif par rapport aux produits pour le corps et aux soins de beauté. Dès lors, le terme « viva » ne serait pas l’élément dominant de la marque demandée. Dans la mesure où l’absence de similitude entre les signes en conflit ne pouvait être compensée par l’identité ou la similitude des produits et des services en cause, la chambre de recours a conclu à l’absence d’un risque de confusion entre lesdits signes.

12      Par décision de l’assemblée des associés de Mülhens GmbH & Co. KG, du 27 janvier 2010, cette société a changé de forme juridique et de raison sociale pour devenir Procter & Gamble Manufacturing Cologne GmbH, qui conserve la qualité de requérante en l’espèce.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens ;

–        condamner l’intervenante aux dépens engagés devant l’OHMI.

14      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité des pièces présentées pour la première fois devant le Tribunal

15      L’OHMI fait valoir que les annexes A 10 et A 11 de la requête, en l’occurrence une liste de marques détenues par l’intervenante, ainsi que des copies de son site internet, constituent de nouveaux éléments de preuve n’ayant pas été produits lors de la procédure administrative devant l’OHMI, de sorte que ces pièces seraient irrecevables.

16      Selon une jurisprudence constante, le recours en annulation porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Des éléments de fait qui sont invoqués devant le Tribunal sans avoir été portés auparavant devant les instances de l’OHMI ne sauraient affecter la légalité d’une telle décision que si l’OHMI avait dû les prendre en considération d’office [arrêts du Tribunal du 13 juillet 2004, Samar/OHMI – Grotto (GAS STATION), T‑115/03, Rec. p. II‑2939, point 13, et du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 19].

17      En l’espèce, les annexes A 10 et A 11 de la requête sont produites pour la première fois devant le Tribunal. Elles doivent, par conséquent, être jugées irrecevables et écartées des débats, sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante (voir arrêt ARTHUR ET FELICIE, précité, point 19, et la jurisprudence citée).

 Sur le fond

18      La requérante soulève un moyen unique à l’appui de son recours, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

20      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

21      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

22      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de la Communauté, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits et des services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque communautaire, il suffit qu’un motif relatif de refus, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, n’existe que dans une partie de la Communauté [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 76, et la jurisprudence citée].

23      En l’espèce, la requérante conteste le bien-fondé de la décision attaquée en ce qui concerne la similitude des signes en cause, à savoir la marque communautaire verbale antérieure VIVA et la marque verbale demandée NATURAVIVA.

24      En revanche, elle ne conteste pas que, eu égard à l’examen de l’existence d’un risque de confusion, d’une part, les produits et les services en cause, concernant, en substance, des produits d’hygiène générale, des cosmétiques et des services de soins corporels, sont similaires, voire identiques, et d’autre part, le public pertinent est composé de consommateurs moyens de l’Union européenne, territoire pour lequel le signe antérieur bénéficie de protection. De même, la requérante ne conteste pas l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle, compte tenu de l’importance qu’ils accordent à leur bien-être physique, à leur hygiène et à leur apparence personnelle, les consommateurs de ces produits et services auront tendance à prêter davantage attention au moment de leur achat que lorsqu’ils achètent des produits quotidiens communs (point 22 de la décision attaquée).

25      À cet égard, il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

26      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuels, phonétiques et conceptuels [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 30, et du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié au Recueil, point 89].

27      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt OHMI/Shaker, précité, point 41, et la jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts de la Cour OHMI/Shaker, précité, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt Nestlé/OHMI, précité, point 43).

28      Conformément à la jurisprudence, lors de l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe (arrêt MATRATZEN, précité, point 35).

29      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner l’existence d’une similitude entre la marque verbale demandée NATURAVIVA et la marque verbale antérieure VIVA.

30      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les signes litigieux étaient différents sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Elle a relevé, d’abord, que la marque demandée était plus longue que la marque antérieure, ensuite, que l’élément commun « viva » se trouvait dans la partie finale de la marque demandée et, de ce fait, attirerait moins l’attention des consommateurs et serait prononcé de manière moins emphatique et, enfin , que les signes en conflit avaient une signification différente pour une partie du public pertinent tandis que, pour le reste dudit public, ils n’avaient aucune signification, de sorte qu’une comparaison conceptuelle entre les signes en cause était impossible (voir points 24 à 29 de la décision attaquée).

31      La chambre de recours a aussi affirmé que le signe NATURAVIVA se présentait sous la forme d’un seul mot indivisible et que l’élément « viva » ne saurait être l’élément dominant de la marque demandée, dans la mesure où il faisait allusion à la santé et au bien-être du corps, de sorte que son caractère distinctif était aussi faible que celui de l’élément « natura » (voir points 32 et 33 de la décision attaquée).

32      En revanche, la requérante considère que les différences existant entre les signes en conflit ne sont pas pertinentes dans la mesure où l’élément verbal « viva » sera perçu soit comme l’élément dominant de la marque, soit comme un élément qui a un rôle distinctif indépendant au sein d’un signe composé de deux éléments. À cet égard, elle considère que l’élément « natura » n’a qu’un faible caractère distinctif, dans la mesure où il est descriptif à l’égard des produits désignés par la marque demandée. Ainsi, les consommateurs écarteront l’élément « natura » de la marque demandée et ne garderont à l’esprit que l’élément « viva » pour désigner les produits en cause, lui-même identique à la marque antérieure VIVA. Cette circonstance pourrait les amener à penser que les produits portant les marques VIVA et NATURAVIVA ont la même origine commerciale ou proviennent d’entreprises liées économiquement.

33      En outre, elle soutient que, à supposer même que l’élément « viva » ne puisse être considéré comme l’élément dominant de la marque demandée, il conserverait néanmoins une position distinctive autonome au sein du signe NATURAVIVA, dans la mesure où le consommateur pourra faire une distinction entre l’élément « natura », en tant que composante de la dénomination sociale de l’entreprise titulaire de la marque, Natura Cosméticos, et l’élément verbal coïncidant avec la marque antérieure, « viva ».

34      Il y a lieu, tout d’abord, de constater que la marque demandée est constituée par un seul élément, à savoir le terme « naturaviva », créé par la juxtaposition des termes « natura » et « viva ». Ainsi, le terme « viva » est l’un des deux éléments constituant la marque demandée NATURAVIVA et le seul élément constituant la marque antérieure VIVA.

35      Le terme « natura » est un mot latin signifiant « nature », qui existe également en espagnol, en portugais et en italien, avec des équivalents assez proches en français, en anglais (nature) et en allemand (Natur). À cet égard, il convient de rappeler que, contrairement à ce qu’a indiqué la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée, le terme « natura » a une signification précise en espagnol. En effet, le Diccionario de la lengua española de la Real Academia Española (dictionnaire de la langue espagnole de l’académie royale espagnole) définit le mot « natura » comme un mot d’origine latine, dont la première signification est « naturaleza », c’est-à-dire la nature.

36      Le terme « viva » est un mot d’origine latine signifiant soit « vivante » ou « vive », soit « que vive… ! ». Les deux significations existent en espagnol et en portugais, seule la seconde existe en italien et en anglais, mais des équivalents assez proches existent en italien pour la première signification et, en français, pour les deux.

37      Au vu de la place qu’il occupe par rapport à l’élément « natura », l’élément « viva » ne sera pas perçu par les consommateurs qui comprennent sa signification comme l’exclamation « que vive... ! », puisque, dans cette hypothèse, il devrait être placé devant le nom. Il sera plutôt perçu comme un adjectif qui, placé derrière le nom « natura », qualifie celui-ci.

38      Dès lors, le signe NATURAVIVA sera compris, tout au moins par les consommateurs espagnols et portugais, mais aussi par les consommateurs italiens et français, en raison de la proximité existant entre les termes « natura » et « viva » et leurs équivalents dans les langues française et italienne, comme une unité logique signifiant « nature vive » ou « nature vivante ». Le reste du public pertinent percevra ledit signe comme étant composé d’un seul élément, qui soit renvoie à la notion de nature, en raison des similitudes existant entre le terme « natura » et ses équivalents dans les différentes langues pratiquées par ledit public, soit n’a aucune signification claire et précise, en tant que terme de fantaisie. Le fait qu’il n’y ait pas de séparation entre les deux termes contribue à renforcer cette perception unitaire.

39      La circonstance selon laquelle le terme « natura » pourrait, selon la requérante, être considéré comme allusif et, donc, comme ne possédant qu’un faible caractère distinctif, ne saurait jouer aucun rôle en l’espèce.

40      À cet égard, il convient de préciser que le terme « natura » n’est pas le seul terme pouvant être considéré comme faiblement distinctif, en raison de son caractère allusif, au regard des produits et des services en cause. Le terme « viva », en tant qu’adjectif qualificatif signifiant « vive » ou « vivant », ainsi que l’ensemble résultant de la juxtaposition des mots « natura » et « viva » sont également allusifs ou évocateurs au regard des produits et des services en cause.

41      En effet, eu égard aux produits et aux services désignés par la marque demandée, à savoir, en substance, des produits d’hygiène générale, des cosmétiques et des services liés aux soins corporels, l’adjectif qualificatif « viva » est susceptible d’être compris, par les consommateurs espagnols, portugais, français et italiens, de même que par ceux qui pratiquent les langues de ces pays, comme évoquant ce qui est plein de vie, de sorte qu’il véhicule une idée de vitalité liée à la peau, au corps, aux cheveux ou, même, à l’esprit. La signification de l’ensemble résultant de la juxtaposition des termes « natura » et « viva » ne sera pas différente de celle de chacun des termes pris séparément et cet ensemble sera lui-même compris par lesdits consommateurs comme évoquant ce qui est naturel ou écologique et, en même temps, plein de vie et, dès lors, susceptible de restaurer la vitalité perdue de la peau, du corps, des cheveux et de l’esprit.

42      Il résulte de ce qui précède que les deux termes composant la marque demandée ont un faible caractère distinctif et, contrairement à ce que prétend la requérante, qu’ils ont donc la même importance du point de vue du public pertinent, sans qu’aucun d’eux ne puisse être considéré comme négligeable. Pour une partie importante du public pertinent, les deux termes accolés intègrent une unité logique signifiant « nature vive » ou « nature vivante », tandis que le reste du public pertinent percevra la marque demandée comme un seul mot de fantaisie ou, tout au plus, qui fait référence à la nature. Dès lors, il n’est pas justifié, contrairement à ce que la requérante prétend, d’exclure le terme « natura » de l’impression d’ensemble produite par le signe NATURAVIVA et de considérer le terme « viva » comme l’élément dominant dudit signe [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 4 mai 2005, Reemark/OHMI – Bluenet (Westlife), T‑22/04, Rec. p. II‑1559, point 36].

43      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel le terme « viva » a une position distinctive autonome au sein de la marque demandée, il y a lieu de souligner que, même si l’élément « natura » fait partie de la dénomination sociale de l’intervenante tout en étant utilisé par celle-ci dans d’autres marques, l’élément « viva » sera perçu, comme indiqué au point 37 ci-dessus, par une partie importante du public pertinent comme un adjectif qualificatif accompagnant le nom « natura » et constituant donc, avec celui-ci, l’unité logique « naturaviva ». Dès lors, il ne saurait être perçu comme ayant une position distinctive autonome au sein de la marque demandée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04, Rec. p. I‑8551, point 37).

44      Après avoir établi que le terme « viva » n’est ni l’élément dominant de la marque demandée ni un élément ayant une position distinctive autonome au sein de celle-ci, il y a lieu d’examiner s’il existe des similitudes entre les signes en conflit.

45      La requérante admet que les signes en conflit ne seraient identiques qu’en ce qui concerne le terme « viva », tandis qu’ils seraient différents « dans la mesure où [la marque demandée] possède un composant supplémentaire [‘natura’] qui crée une différence de longueur entre les marques lorsqu’on les compare dans l’ensemble chacune au niveau phonétique et visuel ».

46      En effet, même si, sur les plans visuel et phonétique, le terme « viva » est présent dans les deux signes en conflit, ces derniers présentent toutefois des différences significatives.

47      Sur le plan visuel, comme la chambre de recours l’a signalé au point 24 de la décision attaquée, d’une part, la marque demandée NATURAVIVA est plus longue que la marque antérieure VIVA et, d’autre part, le début de la marque demandée est différent de celui de la marque antérieure. De plus, étant placé au début de la marque demandée, l’élément « natura » sera susceptible d’exercer un impact plus important que le reste de la marque demandée et d’établir ainsi une différence significative par rapport à l’impression d’ensemble de la marque antérieure [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, Rec. p. II‑965, point 81, et du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec. p. II‑949, point 64].

48      L’argument de la requérante selon lequel, en l’espèce, le consommateur n’attachera pas une importance plus grande à la partie initiale de la marque demandée, du fait de son faible caractère distinctif, n’est pas pertinent. En effet, dans la mesure où, comme indiqué aux points 40 et 41 ci-dessus, les éléments « natura » et « viva », dont la juxtaposition compose la marque demandée, sont faiblement distinctifs, la jurisprudence invoquée par la requérante ne trouve pas à s’appliquer au cas d’espèce.

49      Sur le plan phonétique, comme la chambre de recours l’a également relevé au point 25 de la décision attaquée, la marque demandée est composée des cinq syllabes « na », « tu », « ra », « vi » et « va », tandis que la marque antérieure ne comporte que les deux syllabes « vi » et « va ». Ces deux syllabes coïncident, certes, avec les deux dernières syllabes de la marque demandée. Néanmoins, les trois premières syllabes de celle-ci, sur lesquelles normalement le consommateur dirige son attention, sont différentes (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal MUNDICOR, point 83). De même, le public pertinent aura tendance à prononcer de manière plus emphatique le début de la marque demandée que la fin de celle-ci et, de cette façon, à faire ressortir les différences existant entre les deux signes. Il y a donc lieu de considérer que les signes en conflit présentent des séquences phonétiques différentes.

50      Sur le plan conceptuel, ainsi que cela a été relevé au point 38 ci-dessus, les signes en conflit sont clairement différents pour la partie du public pertinent qui en comprend la signification, tandis que, pour le reste dudit public, leur comparaison sur le plan conceptuel n’est pas pertinente, ceux-ci n’ayant pas une signification claire et précise.

51      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de conclure que la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 30 de la décision attaquée, que les signes NATURAVIVA et VIVA étaient différents.

52      En ce qui concerne l’appréciation globale du risque de confusion, celle-ci implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêt VENADO avec cadre e.a., précité, point 74, et voir, par analogie, arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17).

53      En l’espèce, il a été établi, d’une part, que les produits et les services en cause étaient similaires, voire identiques (voir point 24 ci dessus), et, d’autre part, que les signes en conflit, pour la partie du public pertinent qui n’en comprend pas la signification, étaient différents sur les plans visuel et phonétique et que, pour la partie du public pertinent qui comprend leur signification, outre leurs différences sur les plans visuel et phonétique, les signes étaient également différents sur le plan conceptuel (voir points 46, 50 et 51 ci-dessus).

54      La chambre de recours a considéré, au point 35 de la décision attaquée, que l’identité des produits et des services en cause ne pouvait compenser l’absence de similitude entre les signes en conflit et elle a, dès lors, conclu qu’il n’existait pas de risque de confusion.

55      En effet, conformément à une jurisprudence constante, l’absence de similitude des signes en cause ne saurait être compensée, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, par le fait qu’une partie des produits désignés sont identiques et que ceux-ci appartiennent au même secteur de production et de commercialisation, l’identité des produits ne suffisant pas pour reconnaître l’existence d’un risque de confusion [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 5 octobre 2005, Bunker & BKR/OHMI – Marine Stock (B.K.R.), T‑423/04, Rec. p. II‑4035, point 76, et du 13 juin 2007, Grether/OHMI – Crisgo (Thailand) (FENNEL), T‑167/05, non publié au Recueil, point 74].

56      Au vu de l’ensemble de ce qui précède, il apparaît que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant qu’il n’existait pas, en l’espèce, un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Dès lors, le moyen unique invoqué par la requérante n’étant pas fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

57      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Procter & Gamble Manufacturing Cologne GmbH est condamnée aux dépens.

Moavero Milanesi

Wahl

Soldevila Fragoso

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 septembre 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.