Language of document : ECLI:EU:T:2013:470

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

16 septembre 2013(*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de l’Iran dans le but d’empêcher la prolifération nucléaire – Gel des fonds – Obligation de motivation – Droits de la défense – Droit à une protection juridictionnelle effective – Confiance légitime – Réexamen des mesures restrictives adoptées – Erreur d’appréciation – Égalité de traitement – Base juridique – Formes substantielles – Proportionnalité – Droit de propriété »

Dans l’affaire T‑8/11,

Bank Kargoshaei, établie à Téhéran (Iran),

Bank Melli Iran Investment Company, établie à Téhéran,

Bank Melli Iran Printing and Publishing Company, établie à Téhéran,

Cement Investment & Development Co., établie à Téhéran,

Mazandaran Cement Company, établie à Téhéran,

Melli Agro-chemical Company, établie à Téhéran,

Shomal Cement Co., établie à Téhéran,

représentées initialement par Mes  L. Defalque et S. Woog, puis par Mes Defalque et C. Malherbe, avocats,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. M. Bishop et Mme R. Liudvinaviciute-Cordeiro, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par MM. F. Erlbacher et M. Konstantinidis, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet, d’une part, une demande d’annulation partielle de la décision 2010/644/PESC du Conseil, du 25 octobre 2010, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant la position commune 2007/140/PESC (JO L 281, p. 81), du règlement (UE) n° 961/2010 du Conseil, du 25 octobre 2010, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement (CE) n° 423/2007 (JO L 281, p. 1), de la décision 2011/783/PESC du Conseil, du 1er décembre 2011, modifiant la décision 2010/413/PESC (JO L 319, p. 71), du règlement d’exécution (UE) n° 1245/2011 du Conseil, du 1er décembre 2011, mettant en œuvre le règlement n° 961/2010 (JO L 319, p. 11), et du règlement (UE) n° 267/2012 du Conseil, du 23 mars 2012, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement n° 961/2010 (JO L 88, p. 1), et, d’autre part, une demande d’annulation de tout règlement futur ou de toute décision future complétant ou modifiant l’un des actes attaqués qui serait en vigueur à la date de la clôture de la procédure orale,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová (rapporteur), président, K. Jürimäe et M. M. van der Woude, juges,

greffier : M. N. Rosner, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 avril 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Les requérantes, la Bank Kargoshaei, la Bank Melli Iran Investment Company (ci-après la « BMIIC »), la Bank Melli Iran Printing and Publishing Company (ci-après la « BMIPPC »), la Cement Investment & Development Co. (ci-après la « CIDCO »), la Mazandaran Cement Company, la Melli Agro-chemical Company et la Shomal Cement Co., sont des sociétés iraniennes.

2        La Bank Melli Iran (ci-après la « BMI ») est une banque commerciale iranienne détenue par l’État iranien.

3        La présente affaire s’inscrit dans le cadre du régime de mesures restrictives instauré en vue de faire pression sur la République islamique d’Iran afin que cette dernière mette fin aux activités nucléaires présentant un risque de prolifération et à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires (ci‑après la « prolifération nucléaire »).

4        Le nom de la BMI a été inscrit sur la liste figurant à l’annexe II de la position commune 2007/140/PESC du Conseil, du 27 février 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 61, p. 49) par la position commune 2008/479/PESC du Conseil, du 23 juin 2008, modifiant la position commune 2007/140 (JO L 163, p. 43).

5        Par voie de conséquence, le nom de la BMI a été inscrit sur la liste figurant à l’annexe V du règlement (CE) n° 423/2007 du Conseil, du 19 avril 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 103, p. 1) par la décision 2008/475/CE du Conseil, du 23 juin 2008, mettant en œuvre l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 423/2007 (JO L 163, p. 29), avec pour conséquence le gel de ses fonds.

6        La BMI a formé un recours devant le Tribunal visant, en substance, à l’annulation de l’inscription de son nom sur la liste de l’annexe V du règlement n° 423/2007. Ce recours a été rejeté par l’arrêt du Tribunal du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil (T‑390/08, Rec. p. II‑3967).

7        Dès l’adoption de la décision 2010/413/PESC du Conseil, du 26 juillet 2010, concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant la position commune 2007/140 (JO L 195, p. 39), tant la BMI que les requérantes ont été inscrites dans la liste de l’annexe II de ladite décision. La motivation suivante a été retenue à l’égard de la BMI :

« Apporte ou tente d’apporter un soutien financier à des sociétés participant aux programmes nucléaire et de missiles de l’Iran ou achetant des biens destinés à ces programmes (AIO, SHIG, SBIG, AEOI, Novin Energy Company, Mesbah Energy Company, Kalaye Electric Company et DIO). La [BMI] sert de facilitateur pour les activités sensibles de l’Iran. Elle a facilité de nombreux achats de matériels sensibles pour les programmes nucléaires et de missiles iraniens. Elle a fourni une série de services financiers pour le compte d’entités liées aux industries nucléaires et de missiles de l’Iran, y compris l’ouverture de lettres de crédit et la gestion de comptes. La plupart des sociétés précitées sont visées dans les résolutions 1737 et 1747 du [Conseil de sécurité des Nations unies]. La [BMI] poursuit ce rôle, en adoptant un comportement qui soutient et facilite les activités sensibles de l’Iran. Grâce à ses relations bancaires, elle continue à fournir un appui et des services financiers à des entités figurant sur les listes des Nations unies et de l’[Union Européenne] en raison de leur implication dans de telles activités. Elle agit également pour le compte et sur instruction de telles entités, y compris la Bank Sepah, souvent à travers leurs filiales et des sociétés apparentées. »

8        S’agissant des requérantes, qui ont été inscrites comme étant des « filiales » de la BMI, les motifs suivants ont été retenus dans la décision 2010/413 :

–        la Bank Kargoshaei a été identifiée comme étant la « propriété de [la BMI] » ;

–        la BMIIC a été identifiée comme étant « [a]ffiliée à des entités qui depuis 2000 font l’objet de sanctions imposées par les États-[U]nis, l’Union européenne ou les Nations unies » et « [d]ésignée par les États-Unis, car elle est la propriété de [la BMI] ou placée sous son contrôle » ;

–        la BMIPPC a été identifiée comme étant « [d]ésignée par les États-Unis, car elle est la propriété de [la BMI] ou placée sous son contrôle » ;

–        la CIDCO a été identifiée comme étant « entièrement détenue par la Bank Melli Investment Co. Holding Company pour gérer toutes les sociétés de ciment détenues par [la BMIIC] » ;

–        la Mazandaran Cement Company a été identifiée comme étant une « [e]ntreprise de ciment implantée à Téhéran, majoritairement détenue par CIDCO » qui « [p]articipe à des projets de construction d’envergure » ;

–        la Melli Agro-chemical Company a été identifiée comme étant la « [p]ropriété de [la BMI] ou placée sous le contrôle de celle‑ci » ;

–        la Shomal Cement Co. a été identifiée comme une société qui « est la propriété, se trouve sous le contrôle ou agit pour le compte de l’Organisation des industries de la défense.»

9        Les noms des requérantes ont été inscrits à l’annexe V du règlement n° 423/2007 par le règlement d’exécution (UE) n° 668/2010 du Conseil, du 26 juillet 2010, mettant en œuvre l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 423/2007 (JO L 195, p. 25). L’inscription de la BMI à cette même annexe n’a pas été affectée par l’adoption dudit règlement d’exécution. Les motifs retenus à l’égard des requérantes sont, en substance, identiques à ceux retenus dans la décision 2010/413.

10      Par lettres envoyées entre le 7 et le 22 septembre 2010, les requérantes ont présenté leurs observations au Conseil de l’Union européenne et ont demandé que ce dernier procède à un réexamen de la décision d’inclure leurs noms dans la liste de l’annexe II de la décision 2010/413 et dans celle de l’annexe V du règlement n° 423/2007. Elles ont fait valoir, notamment, qu’elles étaient indépendantes à l’égard de la BMI, que leurs activités étaient sans rapport avec la prolifération nucléaire et que l’adoption des mesures restrictives leur causait un préjudice important. La Mazandaran Cement Company a soutenu, en outre, que l’allégation selon laquelle elle était majoritairement détenue par la CIDCO était erronée. De même, la Shomal Cement Co. a contesté être détenue ou contrôlée par l’Organisation des industries de la défense (ci-après la « DIO »).

11      L’inscription des noms de la BMI et des requérantes dans l’annexe II de la décision 2010/413 a été maintenue par la décision 2010/644/PESC du Conseil, du 25 octobre 2010, modifiant la décision 2010/413 (JO L 281, p. 81).

12      Le règlement n° 423/2007 ayant été abrogé par le règlement (UE) n° 961/2010 du Conseil, du 25 octobre 2010, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 281, p. 1), les noms de la BMI et des requérantes ont été inclus par le Conseil dans l’annexe VIII de ce dernier règlement. Par conséquent, les fonds et les ressources économiques des requérantes ont été gelés en vertu de l’article 16, paragraphe 2, dudit règlement.

13      Les motifs retenus dans la décision 2010/644 et dans le règlement n° 961/2010 à l’égard de la BMI, de la Bank Kargoshaei, de la BMIIC, de la BMIPPC, de la CIDCO et de la Melli Agro-chemical Company sont les mêmes que ceux figurant dans la décision 2010/413. La Mazandaran Cement Company et la Shomal Cement Co. sont identifiées comme étant contrôlées par la BMI.

14      Par lettres du 28 octobre 2010, le Conseil a informé les requérantes du maintien de leur nom dans la liste de l’annexe II de la décision 2010/413 et de leur inclusion dans celle de l’annexe VIII du règlement n° 961/2010. Il a précisé, à cet égard, qu’il n’y avait pas d’éléments nouveaux justifiant la levée des mesures restrictives visant les requérantes.

15      Par lettre du 27 décembre 2010, les requérantes ont demandé à obtenir l’accès au dossier du Conseil.

16      Par lettres des 22 février et 8 mars 2011, le Conseil a communiqué aux requérantes les propositions d’adoption des mesures restrictives les concernant.

17      Par lettre du 29 juillet 2011, les requérantes ont demandé au Conseil de procéder à un réexamen de la décision de les maintenir dans la liste de l’annexe II de la décision 2010/413 et dans celle de l’annexe VIII du règlement n° 961/2010. Elles ont constaté, dans ce contexte, que la BMI contestait son implication dans la prolifération nucléaire et que leur situation individuelle devait être appréciée au vu des circonstances de l’espèce.

18      Par arrêt du 16 novembre 2011, Bank Melli Iran/Conseil (C‑548/09 P, non encore publié au Recueil), la Cour a rejeté le pourvoi formé par la BMI contre l’arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra.

19      L’inscription des noms de la BMI et des requérantes dans l’annexe II de la décision 2010/413 et dans l’annexe VIII du règlement n° 961/2010 n’a pas été affectée par l’entrée en vigueur de la décision 2011/783/PESC du Conseil, du 1er décembre 2011, modifiant la décision 2010/413 (JO L 319, p. 71), et du règlement d’exécution (UE) n° 1245/2011 du Conseil, du 1er décembre 2011, mettant en œuvre le règlement n° 961/2010 (JO L 319, p. 11).

20      Par lettre du 5 décembre 2011, le Conseil a informé les requérantes du maintien de leur nom dans les listes de l’annexe II de la décision 2010/413 et de l’annexe VIII du règlement n° 961/2010. Il a constaté que les observations présentées par les requérantes le 29 juillet 2011 ne justifiaient pas la levée des mesures restrictives les visant, étant donné qu’elles ne contestaient pas qu’elles étaient détenues ou contrôlées par la BMI et que cette dernière avait fourni des services financiers aux entités impliquées dans la prolifération nucléaire.

21      Par lettre du 16 janvier 2012, les requérantes ont demandé à obtenir l’accès aux preuves relatives à l’adoption des mesures restrictives les visant et à leur maintien. Le Conseil a répondu par lettre du 21 février 2012, à laquelle étaient joints trois documents portant sur la procédure d’adoption des mesures restrictives.

22      Le règlement n° 961/2010 ayant été abrogé par le règlement (UE) n° 267/2012 du Conseil, du 23 mars 2012, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 88, p. 1), les noms de la BMI et des requérantes ont été inclus par le Conseil dans l’annexe IX de ce dernier règlement. Les motifs retenus à l’égard de la BMI et des requérantes sont les mêmes que ceux figurant dans le règlement n° 961/2010. Par conséquent, les fonds et les ressources économiques des requérantes sont gelés en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 267/2012.

 Procédure et conclusions des parties

23      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 janvier 2011, les requérantes ont introduit le présent recours.

24      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 20 avril 2011, la Commission européenne a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien du Conseil. Par ordonnance du 9 juin 2011, le président de la quatrième chambre du Tribunal a admis cette intervention.

25      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 15 février 2012, les requérantes ont adapté leurs chefs de conclusions à la suite de l’adoption de la décision 2011/783, du règlement d’exécution n° 1245/2011, de la décision 2012/35/PESC du Conseil, du 23 janvier 2012, modifiant la décision 2010/413 (JO L 19, p. 22), du règlement d’exécution (UE) n° 54/2012 du Conseil, du 23 janvier 2012, mettant en œuvre le règlement n° 961/2010 (JO L 19, p. 1), et du règlement (UE) n° 56/2012 du Conseil, du 23 janvier 2012, modifiant le règlement n° 961/2010 (JO L 19, p. 10).

26      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 30 juillet 2012, d’une part, les requérantes ont adapté leurs chefs de conclusions à la suite de l’adoption du règlement n° 267/2012 et, d’autre part, elles ont demandé l’annulation de tout règlement futur ou de toute décision future complétant ou modifiant l’un des actes attaqués qui serait en vigueur à la date de la clôture de la procédure orale.

27      Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 5 mars 2013, les affaires T-35/10, T-7/11 et T-8/11 ont été jointes aux fins de la procédure orale, conformément à l’article 50 du règlement de procédure du Tribunal.

28      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, a posé par écrit des questions aux parties. Les parties ont répondu aux questions du Tribunal dans le délai imparti.

29      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions écrites et orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 17 avril 2013.

30      Dans leurs écritures, les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le point 5 de la partie B de l’annexe de la décision 2010/644, le point 5 de la partie B de l’annexe VIII du règlement n° 961/2010, la décision 2011/783, le règlement d’exécution n° 1245/2011, la décision 2012/35, le règlement d’exécution n° 54/2012, le règlement n° 56/2012 et le point 5 de la partie I.B de l’annexe IX du règlement n° 267/2012, pour autant que ces actes les concernent ;

–        annuler les décisions du Conseil communiquées par lettres de ce dernier des 28 octobre 2010 et 5 décembre 2011 ;

–        déclarer que l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413 et l’article 16, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 961/2010 ne leur sont pas applicables ;

–        annuler tout règlement futur ou toute décision future complétant ou modifiant l’un des actes attaqués qui serait en vigueur à la date de la clôture de la procédure orale ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

31      Lors de l’audience, les requérantes se sont, d’une part, désistées de leur recours pour autant qu’il vise à l’annulation de la décision 2012/35, du règlement d’exécution n° 54/2012 et du règlement n° 56/2012 et, d’autre part, elles ont exposé que leur deuxième chef de conclusions se confondait, en réalité, avec le premier chef de conclusions et qu’elles se désistaient, par conséquent, de leur recours pour autant qu’il vise à l’annulation des lettres des 28 octobre 2010 et 5 décembre 2011.

32      Le Conseil, soutenu par la Commission, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

33      À titre liminaire, il y a lieu de relever que le troisième chef de conclusions, tendant à la déclaration d’inapplicabilité, aux requérantes, de l’article 20, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/413 et de l’article 16, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 961/2010, se confond, en réalité, avec les arguments contestant la légalité de la décision 2010/413 et du règlement n° 961/2010, soulevés au soutien du premier chef de conclusions des requérantes. Par conséquent, le troisième chef de conclusions n’a pas à être examiné par le Tribunal de manière autonome.

34      Au soutien de leur premier chef de conclusions, les requérantes ont invoqué cinq moyens dans leurs écritures. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 215 TFUE, de l’article 40 TUE et du principe d’égalité de traitement. Le deuxième moyen est tiré d’une erreur de droit s’agissant de la base juridique de la décision 2010/644 et du règlement n° 961/2010. Le troisième moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense de la BMI et des requérantes, de leur droit à une protection juridictionnelle effective, des principes de bonne administration et de protection de la confiance légitime ainsi que de l’obligation du Conseil de réexaminer les mesures restrictives adoptées à la lumière des observations formulées. Le quatrième moyen est tiré d’une erreur d’appréciation en ce que le Conseil a considéré que les requérantes devaient être visées par des mesures restrictives. Le cinquième moyen est tiré d’une violation du principe de proportionnalité et du droit de propriété des requérantes résultant du fait que le Conseil n’a pas pris en considération les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies.

35      Lors de l’audience, les requérantes ont, en outre, fait valoir que le règlement n° 267/2012 ne leur a pas été communiqué individuellement.

36      Le Conseil et la Commission contestent le bien-fondé des moyens des requérantes. Le Conseil soutient, par ailleurs, que la Bank Kargoshaei, à tout le moins, est une émanation de l’État iranien et ne peut donc pas invoquer à son profit les protections et garanties liées aux droits fondamentaux. Le Conseil invoque, également, l’irrecevabilité du quatrième chef de conclusions des requérantes.

37      Outre les moyens et arguments des parties, il y a lieu d’examiner la recevabilité des demandes d’adaptation de conclusions formulées par les requérantes.

 Sur la recevabilité

 Sur les demandes d’adaptation de conclusions des requérantes

38      Selon la jurisprudence, lorsqu’une décision ou un règlement concernant directement et individuellement un particulier sont, en cours de procédure, remplacés par un acte ayant le même objet, celui‑ci doit être considéré comme un élément nouveau permettant au requérant d’adapter ses conclusions et moyens. Il serait, en effet, contraire à une bonne administration de la justice et à une exigence d’économie de la procédure d’obliger le requérant à introduire un nouveau recours. Il serait, en outre, injuste que l’institution en cause puisse, pour faire face aux critiques contenues dans une requête présentée au juge de l’Union européenne contre un acte, adapter l’acte attaqué ou lui en substituer un autre et se prévaloir, en cours d’instance, de cette modification ou de cette substitution pour priver l’autre partie de la possibilité d’étendre ses conclusions et ses moyens initiaux à l’acte ultérieur ou de présenter des conclusions et moyens supplémentaires contre celui-ci (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 23 octobre 2008, People’s Mojahedin Organization of Iran/Conseil, T‑256/07, Rec. p. II‑3019, point 46, et la jurisprudence citée).

39      La même conclusion s’applique aux actes, tels que la décision 2011/783 et le règlement d’exécution n° 1245/2011, lesquels, sans abroger un acte antérieur, maintiennent l’inscription d’une entité sur les listes des entités visées par des mesures restrictives, à la suite d’une procédure de réexamen expressément imposée par la réglementation applicable.

40      Toutefois, pour être recevable, une demande d’adaptation des conclusions doit être présentée dans le délai de recours prévu par l’article 263, sixième alinéa, TFUE. En effet, selon une jurisprudence constante, ce délai de recours est d’ordre public, et doit être appliqué par le juge de l’Union de manière à assurer la sécurité juridique ainsi que l’égalité des justiciables devant la loi (arrêt de la Cour du 18 janvier 2007, PKK et KNK/Conseil, C‑229/05 P, Rec. p. I‑439, point 101). Il appartient ainsi au juge de vérifier, le cas échéant d’office, si ce délai a été respecté (ordonnance du Tribunal du 11 janvier 2012, Ben Ali/Conseil, T‑301/11, non publiée au Recueil, point 16).

41      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, le principe de protection juridictionnelle effective implique que l’autorité de l’Union qui adopte des mesures restrictives individuelles à l’égard d’une personne ou d’une entité communique les motifs sur lesquels ces mesures sont fondées soit au moment où ces mesures sont adoptées, soit, à tout le moins, aussi rapidement que possible après leur adoption, afin de permettre à ces personnes ou entités l’exercice de leur droit de recours (voir, en ce sens, arrêt du 16 novembre 2011, Bank Melli Iran/Conseil, point 18 supra, point 47, et la jurisprudence citée).

42      Il en découle que le délai pour l’introduction d’un recours en annulation contre un acte imposant des mesures restrictives à l’égard d’une personne ou d’une entité commence uniquement à courir à partir de la date de la communication de cet acte à l’intéressé. De même, le délai pour la présentation d’une demande visant à étendre les conclusions et moyens à un acte qui maintient de telles mesures commence uniquement à courir à partir de la date de la communication de ce nouvel acte à la personne ou à l’entité concernée.

43      En l’espèce, d’une part, la décision 2011/783 et le règlement d’exécution n° 1245/2011 ont été communiqués individuellement aux requérantes par lettre du 5 décembre 2011. Par conséquent, la demande d’adaptation des conclusions du 15 février 2012 visant ces derniers actes a été présentée dans le délai de deux mois prévu à l’article 263, sixième alinéa, TFUE, augmenté du délai de distance forfaitaire de dix jours prévu à l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure.

44      D’autre part, le règlement n° 267/2012 n’a pas été communiqué individuellement aux requérantes, alors même que le Conseil connaît leur adresse. Dans ces circonstances, le délai pour l’adaptation des chefs de conclusions des requérantes en ce qui concerne le règlement n° 267/2012 n’a pas commencé à courir, de sorte que la demande des requérantes du 30 juillet 2012 ne saurait être considérée comme tardive.

45      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que les requérantes sont recevables à demander l’annulation de la décision 2011/783, du règlement d’exécution n° 1245/2011 et du règlement n° 267/2012.

 Sur le chef de conclusions tendant à l’annulation de tout règlement futur ou de toute décision future complétant ou modifiant l’un des actes attaqués qui serait en vigueur à la date de la clôture de la procédure orale

46      Le Conseil conteste la recevabilité du quatrième chef de conclusions des requérantes, tendant à l’annulation de tout règlement futur ou de toute décision future complétant ou modifiant l’un des actes attaqués qui serait en vigueur à la date de la clôture de la procédure orale.

47      À cet égard, selon la jurisprudence, le Tribunal ne peut être valablement saisi que d’une demande tendant à l’annulation d’un acte existant et faisant grief. Si les requérantes peuvent donc être autorisées à reformuler leurs conclusions de façon que celles-ci visent l’annulation des actes qui ont, en cours de procédure, remplacé les actes initialement attaqués, cette solution ne saurait autoriser le contrôle spéculatif de la légalité d’actes hypothétiques non encore adoptés (voir arrêt du Tribunal du 12 décembre 2006, Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, T‑228/02, Rec. p. II‑4665, point 32, et la jurisprudence citée).

48      Partant, le quatrième chef de conclusions des requérantes doit être rejeté comme étant irrecevable.

 Sur le fond

49      Dans un premier temps, il convient d’examiner l’argumentation du Conseil et de la Commission selon laquelle les requérantes ne peuvent pas invoquer à leur profit les protections et garanties liées aux droits fondamentaux. Par la suite, les moyens invoqués par les requérantes seront traités dans un ordre différent de celui dans lequel ils ont été exposés. Ainsi, le Tribunal examinera le troisième moyen, le quatrième moyen, le deuxième moyen, le cinquième moyen et, en dernier lieu, le premier moyen.

 Sur la possibilité pour les requérantes d’invoquer les protections et garanties liées aux droits fondamentaux

50      Le Conseil, soutenu par la Commission, fait valoir que, au regard du droit de l’Union, des personnes morales qui constituent des émanations des États tiers ne peuvent pas invoquer les protections et garanties liées aux droits fondamentaux. Dans la mesure où, à tout le moins, la Bank Kargoshaei est, selon eux, une émanation de l’État iranien, cette règle lui serait applicable.

51      À cet égard, il convient d’observer que ni la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2010, C 83, p. 389) ni le droit primaire de l’Union ne prévoient de dispositions excluant les personnes morales qui sont des émanations des États du bénéfice de la protection des droits fondamentaux. Au contraire, les dispositions de ladite charte qui sont pertinentes par rapport aux moyens soulevés par les requérantes, et notamment ses articles 17, 41 et 47, garantissent les droits de « [t]oute personne », formulation qui inclut des personnes morales telles que la Bank Kargoshaei et les autres requérantes.

52      Le Conseil invoque néanmoins, dans ce contexte, l’article 34 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), qui n’admet pas la recevabilité des requêtes présentées devant la Cour européenne des droits de l’homme par des organisations gouvernementales.

53      Or, d’une part, l’article 34 de la CEDH est une disposition procédurale qui n’est pas applicable aux procédures devant le juge de l’Union et, d’autre part, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, le but de cette disposition est d’éviter qu’un État partie à la CEDH soit à la fois requérant et défendeur devant ladite Cour (voir, en ce sens, Cour. eur. D. H., arrêt Compagnie de navigation de la République islamique d’Iran c. Turquie du 13 décembre 2007, Recueil des arrêts et décisions, 2007-V, § 81). Ce raisonnement n’est pas applicable au cas d’espèce.

54      Le Conseil fait également valoir que la règle qu’il invoque est justifiée par le fait qu’un État est garant du respect des droits fondamentaux sur son territoire, mais ne peut pas bénéficier de tels droits.

55      Toutefois, à supposer même que cette justification trouve à s’appliquer en ce qui concerne une situation interne, la circonstance selon laquelle un État est le garant du respect des droits fondamentaux sur son propre territoire est sans pertinence s’agissant de l’étendue des droits dont peuvent bénéficier des personnes morales qui sont des émanations de ce même État sur le territoire des États tiers.

56      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que le droit de l’Union ne comporte pas de règle empêchant des personnes morales qui sont des émanations des États tiers d’invoquer à leur profit les protections et garanties liées aux droits fondamentaux. Ces mêmes droits peuvent donc être invoqués par lesdites personnes devant le juge de l’Union pour autant qu’ils sont compatibles avec leur qualité de personne morale.

57      Au demeurant et en tout état de cause, le Conseil n’a pas avancé d’éléments permettant d’établir que les requérantes, et notamment la Bank Kargoshaei, étaient effectivement des émanations de l’État iranien, à savoir des entités qui participaient à l’exercice de la puissance publique ou qui géraient un service public sous le contrôle des autorités (voir, en ce sens, Cour. eur. D. H., arrêt Compagnie de navigation de la République islamique d’Iran c. Turquie, point 53 supra, § 79).

58      À cet égard, le Conseil soutient que la Bank Kargoshaei gère un service public sous le contrôle des autorités iraniennes dans la mesure où elle fournit des services financiers qui sont nécessaires pour le fonctionnement de l’économie iranienne. Or, il ne conteste pas les allégations de la Bank Kargoshaei selon lesquelles lesdits services représentent des activités commerciales exercées dans un secteur concurrentiel et soumises au droit commun. Dans ces circonstances, le fait que lesdites activités soient nécessaires pour le fonctionnement de l’économie d’un État ne leur confère pas, à lui seul, la qualité de service public.

59      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de conclure que les requérantes, y compris la Bank Kargoshaei, peuvent invoquer à leur profit les protections et garanties liées aux droits fondamentaux.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense de la BMI et des requérantes, de leur droit à une protection juridictionnelle effective, des principes de bonne administration et de protection de la confiance légitime ainsi que de l’obligation du Conseil de réexaminer les mesures restrictives adoptées à la lumière des observations formulées

60      Les requérantes soutiennent que, dans le contexte de l’adoption des actes attaqués, le Conseil a violé l’obligation de motivation, leurs droits de la défense ainsi que ceux de la BMI et l’obligation de réexaminer les mesures restrictives adoptées à la lumière des observations formulées. Par ailleurs, ces violations impliqueraient une violation de leur droit à une protection juridictionnelle effective ainsi que des principes de bonne administration et de protection de la confiance légitime.

61      Le Conseil et la Commission contestent le bien‑fondé des arguments des requérantes.

62      Il y a lieu de rappeler, en premier lieu, que l’obligation de motiver un acte faisant grief, telle que prévue à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et, plus particulièrement en l’espèce, à l’article 24, paragraphe 3, de la décision 2010/413, à l’article 36, paragraphe 3, du règlement n° 961/2010 et à l’article 46, paragraphe 3, du règlement n° 267/2012, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte. L’obligation de motivation ainsi édictée constitue un principe essentiel du droit de l’Union auquel il ne saurait être dérogé qu’en raison de considérations impérieuses. Partant, la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que l’acte lui faisant grief, son absence ne pouvant être régularisée par le fait que l’intéressé prend connaissance des motifs de l’acte au cours de la procédure devant le juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, point 80, et la jurisprudence citée).

63      Partant, à moins que des considérations impérieuses touchant à la sûreté de l’Union ou de ses États membres ou à la conduite de leurs relations internationales ne s’opposent à la communication de certains éléments, le Conseil est tenu de porter à la connaissance d’une entité visée par des mesures restrictives les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles il considère qu’elles devaient être adoptées. Il doit ainsi mentionner les éléments de fait et de droit dont dépend la justification légale des mesures concernées et les considérations qui l’ont amené à les prendre (voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, point 81, et la jurisprudence citée).

64      Par ailleurs, la motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, point 82, et la jurisprudence citée).

65      En deuxième lieu, selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense, et notamment du droit d’être entendu, dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une entité et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle‑ci, constitue un principe fondamental du droit de l’Union et doit être assuré, même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure en cause (arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, point 91).

66      Le principe du respect des droits de la défense exige, d’une part, que les éléments retenus à la charge de l’entité intéressée pour fonder l’acte lui faisant grief lui soient communiqués et, d’autre part, elle doit être mise en mesure de faire valoir utilement son point de vue au sujet de ces éléments (voir, par analogie, arrêt Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, point 47 supra, point 93).

67      Partant, s’agissant d’un premier acte par lequel les fonds d’une entité sont gelés, à moins que des considérations impérieuses touchant à la sûreté de l’Union ou de ses États membres ou à la conduite de leurs relations internationales ne s’y opposent, la communication des éléments à charge doit avoir lieu soit concomitamment à l’adoption de l’acte concerné, soit aussitôt que possible après ladite adoption. Sur demande de l’entité concernée, cette dernière a également le droit de faire valoir son point de vue au sujet de ces éléments une fois l’acte adopté. Sous les mêmes réserves, toute décision subséquente de gel des fonds doit en principe être précédée d’une communication des nouveaux éléments à charge et d’une nouvelle possibilité pour l’entité concernée de faire valoir son point de vue (voir, par analogie, arrêt Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, point 47 supra, point 137).

68      Il y a lieu, en outre, de relever que, lorsque des informations suffisamment précises, permettant à l’entité intéressée de faire connaître utilement son point de vue sur les éléments retenus à sa charge par le Conseil, ont été communiquées, le principe du respect des droits de la défense n’implique pas l’obligation pour cette institution de donner spontanément accès aux documents contenus dans son dossier. Ce n’est que sur demande de la partie intéressée que le Conseil est tenu de donner accès à tous les documents administratifs non confidentiels concernant la mesure en cause (voir arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, point 97, et la jurisprudence citée).

69      En troisième lieu, le principe de protection juridictionnelle effective constitue un principe général du droit de l’Union, qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres et qui a été consacré par les articles 6 et 13 de la CEDH ainsi que par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux. L’efficacité du contrôle juridictionnel implique que l’autorité de l’Union en cause est tenue de communiquer les motifs d’une mesure restrictive à l’entité concernée, dans toute la mesure du possible, soit au moment où ladite mesure est adoptée, soit, à tout le moins, aussi rapidement que possible après qu’elle l’a été, afin de permettre à l’entité concernée l’exercice, dans les délais, de son droit de recours. Le respect de cette obligation de communiquer lesdits motifs est en effet nécessaire, tant pour permettre aux destinataires des mesures restrictives de défendre leurs droits dans les meilleures conditions possibles et de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge de l’Union, que pour mettre ce dernier pleinement en mesure d’exercer le contrôle de la légalité de l’acte en cause qui lui incombe (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, Rec. p. I‑6351, points 335 à 337, et la jurisprudence citée).

–       Sur l’obligation de motivation

70      Selon les requérantes, la motivation des actes attaqués est insuffisante, dès lors notamment que les motifs visant la BMI sont vagues et imprécis, de sorte qu’elles ne sont pas en mesure de les vérifier et d’y répondre.

71      Le Conseil et la Commission contestent le bien‑fondé des arguments des requérantes.

72      À titre liminaire, il y a lieu de relever que l’adoption et le maintien des mesures restrictives visant les requérantes reposent sur deux constats cumulatifs selon lesquels, d’une part, elles sont détenues ou contrôlées par la BMI, et, d’autre part, cette dernière a apporté un appui à la prolifération nucléaire. Par conséquent, la motivation concernant la prétendue implication de la BMI dans la prolifération nucléaire constitue une partie intégrante de la motivation des mesures restrictives visant les requérantes. Dès lors, au vu des arguments invoqués par les requérantes, il convient de vérifier, dans le cadre du présent grief, si les actes attaqués sont motivés à suffisance de droit en ce qui concerne les deux constats susmentionnés.

73      S’agissant, en premier lieu, des motifs visant la BMI, il convient de rappeler que cette dernière est visée par des mesures restrictives depuis le 23 juin 2008. Entre cette date et la date d’adoption des actes attaqués plusieurs documents ont été échangés entre la BMI et le Conseil dont, notamment, la lettre de ce dernier du 1er octobre 2009 par laquelle il a informé la BMI des motifs supplémentaires d’adoption des mesures restrictives la visant.

74      Alors même que la lettre du Conseil du 1er octobre 2009 n’a pas été communiquée aux requérantes directement par le Conseil, elle a néanmoins été portée à leur attention, en temps utile, par une autre source, étant donné qu’elles ont été en mesure d’en joindre une copie à la requête. Dans ces circonstances, ladite lettre fait partie du contexte de l’adoption des actes attaqués dans la présente affaire et peut, par conséquent, être prise en considération lors de leur examen.

75      Or, les motifs énoncés dans les actes attaqués, tels que complétés et développés par les motifs supplémentaires communiqués le 1er octobre 2009, sont suffisamment précis pour satisfaire à l’obligation de motivation incombant au Conseil en ce qui concerne les comportements reprochés à la BMI. Ainsi, ces motifs permettent d’identifier les entités auxquelles la BMI aurait fourni des services financiers et qui sont visées par des mesures restrictives adoptées par l’Union ou par le Conseil de sécurité des Nations unies, de même que la période pendant laquelle les services en cause auraient été fournis et, dans certains cas, les transactions spécifiques auxquelles ils auraient été liés.

76      En ce qui concerne, en second lieu, les motifs concernant les requérantes, les actes attaqués indiquent, pour chacune d’entre elles, en substance, qu’elles sont détenues ou contrôlées, directement ou indirectement, par la BMI. Si cette description est, dans certains cas, succincte, il n’en demeure pas moins qu’elle a permis aux requérantes de comprendre que le Conseil s’était fondé sur les liens capitalistiques ou de contrôle qui les unissaient à la BMI, liens qui sont connus des requérantes et dont elles ne contestent pas, par ailleurs, la réalité.

77      Dans ces circonstances, le grief tiré de la violation de l’obligation de motivation doit être rejeté.

–       Sur la violation du principe du respect des droits de la défense

78      Les requérantes font valoir que, malgré des demandes répétées, la BMI et elles‑mêmes n’ont obtenu ni un accès suffisant au dossier du Conseil ni une audition devant ce dernier, de sorte qu’elles ignorent les preuves retenues à leur égard et qu’elles ne sont pas, par conséquent, en mesure de se défendre. Au demeurant, pour autant que le Conseil leur a communiqué des éléments de son dossier, cette communication aurait été tardive.

79      À titre liminaire, le Conseil et la Commission contestent l’applicabilité du principe du respect des droits de la défense au cas d’espèce, en se référant au fait que les requérantes n’ont pas été visées par des mesures restrictives en raison de leurs activités propres, mais en raison de leur appartenance à la catégorie générale des entités détenues ou contrôlées par des entités ayant apporté un appui à la prolifération nucléaire.

80      Cette argumentation ne saurait être retenue. En effet, l’article 24, paragraphes 3 et 4, de la décision 2010/413, l’article 36, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 961/2010 et l’article 46, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 267/2012 prévoient des dispositions garantissant les droits de la défense des entités visées par des mesures restrictives adoptées en vertu de ces textes. Le respect de ces droits fait l’objet du contrôle du juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, point 37).

81      Le Conseil soutient également qu’il ne peut pas être tenu de fournir aux entités intéressées les éléments de preuve et d’information soutenant les motifs des mesures restrictives lorsque ceux-ci sont issus de sources confidentielles et sont, comme tels, conservés par les États membres qui les détiennent, voire par des États tiers avec lesquels ces derniers coopèrent, et ce dans un souci de protection des sources.

82      À cet égard, il ressort de la jurisprudence citée au point 67 ci‑dessus que la communication des éléments à charge aux entités intéressées peut effectivement ne pas avoir lieu lorsque des considérations impérieuses touchant à la sûreté de l’Union ou de ses États membres ou à la conduite de leurs relations internationales s’y opposent.

83      Toutefois, compte tenu du rôle essentiel du contrôle juridictionnel dans le contexte de l’adoption et du maintien des mesures restrictives, le juge de l’Union doit pouvoir contrôler la légalité et le bien-fondé de telles mesures, en ce compris le respect des garanties procédurales dont bénéficient les entités intéressées (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, point 47 supra, point 155), étant entendu que le caractère confidentiel de certains éléments peut, éventuellement, justifier des restrictions s’agissant de la communication de ces éléments aux requérantes ou à leurs avocats, applicables à l’ensemble de la procédure devant le Tribunal (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, point 47 supra, point 155).

84      S’agissant des griefs des requérantes, à titre liminaire, il y a lieu de rappeler que les mesures restrictives visant les requérantes reposent sur deux constats cumulatifs selon lesquels, d’une part, elles sont détenues ou contrôlées par la BMI et, d’autre part, cette dernière a apporté un appui à la prolifération nucléaire. Par conséquent, les éléments retenus par le Conseil à l’encontre des requérantes incluent, outre ceux relatifs à leurs prétendus liens avec la BMI, ceux concernant la prétendue implication de cette dernière dans la prolifération nucléaire, ce qui implique que les requérantes peuvent invoquer une violation de leurs droits de la défense en ce qui concerne les deux catégories d’éléments.

85      En revanche, les requérantes ne sauraient valablement invoquer une violation des droits de la défense de la BMI, dont elles ne sont pas les titulaires et qu’elles ne pourraient donc, en tout état de cause, exercer.

86      Quant à la prétendue violation des droits de la défense des requérantes, en premier lieu, il y a lieu de relever qu’il ressort des points 70 à 75 ci‑dessus que les actes attaqués sont suffisamment motivés. Dans ces circonstances, le Conseil a également respecté son obligation de communication initiale des éléments à charge.

87      En deuxième lieu, quant à l’accès au dossier, il y a lieu de relever que les mesures restrictives visant la BMI et les requérantes reposent sur trois catégories d’éléments. Ainsi, l’adoption initiale des mesures visant la BMI, en 2008, a été effectuée en vertu d’une première proposition présentée par un État membre (ci‑après la « proposition initiale »). Les motifs supplémentaires, communiqués par le Conseil à la BMI le 1er octobre 2009, sont étayés par une autre proposition provenant d’un État membre, dont une copie non confidentielle a été transmise à la BMI le 18 novembre 2009 (ci-après la « proposition supplémentaire »). L’adoption des mesures restrictives visant les requérantes elles-mêmes est fondée sur une série de propositions des États membres datant de 2010, dont une copie non confidentielle leur a été transmise les 22 février et 8 mars 2011.

88      S’agissant, d’une part, des éléments sous-tendant l’adoption et le maintien des mesures restrictives visant la BMI, il ressort des éléments du dossier que ni la proposition initiale ni la proposition supplémentaire n’ont été communiquées par le Conseil aux requérantes. Toutefois, il y a lieu de constater que les requérantes ont néanmoins obtenu communication de la proposition supplémentaire, en temps utile, par une autre source, étant donné qu’elles ont été en mesure d’en joindre une copie à la requête.

89      À cet égard, il y a lieu de considérer que l’absence de communication d’un document sur lequel le Conseil s’est fondé pour adopter ou pour maintenir les mesures restrictives visant une entité ne constitue une violation des droits de la défense justifiant l’annulation des actes concernés que s’il est établi que les mesures restrictives concernées n’auraient pas pu être adoptées ou maintenues à bon droit si le document non communiqué avait été écarté comme élément à charge.

90      Par conséquent, en l’espèce, le fait que les requérantes n’ont pas obtenu accès à la proposition initiale ne pourrait justifier l’annulation des actes attaqués que s’il était par ailleurs établi que l’adoption et le maintien des mesures restrictives les visant ne pouvaient pas être justifiés par les éléments auxquels elles ont obtenu accès en temps utile, à savoir les motifs figurant dans les actes attaqués, les motifs supplémentaires contenus dans la lettre du Conseil du 1er octobre 2009 et la proposition supplémentaire.

91      Or, il ressort des points 111 à 147 ci-après que les arguments invoqués par les requérantes ne permettent pas de mettre en cause le bien-fondé de la justification des mesures restrictives les visant, telle qu’elle ressort des éléments auxquels elles ont eu accès. Dans ces circonstances, le fait qu’elles n’ont pas obtenu accès à la proposition initiale n’est, en tout état de cause, pas susceptible de justifier l’annulation des actes attaqués.

92      S’agissant, d’autre part, de la série de propositions des États membres datant de 2010 (voir point 85 ci-dessus), les requérantes font valoir qu’elles ne leur ont été communiquées qu’après l’introduction du présent recours.

93      À cet égard, il y a lieu de relever que, si, en vertu de la jurisprudence citée au point 68 ci‑dessus, le Conseil est tenu, sur demande de la partie intéressée, de donner accès à tous les documents administratifs non confidentiels, il convient de lui accorder un délai raisonnable pour respecter cette obligation. Or, en l’espèce, la demande d’accès au dossier n’a été formulée par les requérantes que le 27 décembre 2010, soit onze jours avant le dépôt de leur recours. Dans ces circonstances, il ne saurait être conclu que le Conseil a violé les droits de la défense des requérantes en n’ayant pas répondu à ladite demande avant l’introduction du recours.

94      En troisième lieu, c’est à tort que les requérantes soutiennent qu’elles n’ont pas pu obtenir une audition auprès du Conseil.

95      En effet, d’une part, les requérantes ne contestent pas qu’elles ont été en mesure de présenter au Conseil des observations écrites entre le 7 et le 22 septembre 2010 ainsi que le 29 juillet 2011.

96      D’autre part, contrairement à ce que laissent entendre les requérantes, ni la réglementation en cause ni le principe général du respect des droits de la défense ne leur confèrent le droit à une audition formelle (voir, par analogie, arrêt People’s Mojahedin Organization of Iran/Conseil, point 38 supra, point 93, et la jurisprudence citée), la possibilité de présenter leurs observations par écrit étant suffisante.

97      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter les griefs tirés d’une violation du principe du respect des droits de la défense comme étant, en partie, inopérants et, en partie, non fondés.

–       Sur les vices affectant prétendument le réexamen effectué par le Conseil

98      Selon les requérantes, le Conseil a violé l’obligation de réexaminer les mesures restrictives adoptées à la lumière de leurs observations. En particulier, il n’aurait ni révisé effectivement lesdites mesures ni réagi en détail auxdites observations, se bornant à envoyer des lettres types. De même, le réexamen qu’il a opéré ne serait pas fondé sur les éléments d’information et de preuve pertinents.

99      À cet égard, d’une part, le Conseil fait valoir, sans être contredit par les requérantes, que, avant l’adoption des actes attaqués, les délégations des États membres avaient reçu les observations soumises par elles. Par conséquent, ces observations, qui incluent des informations détaillées portant sur les relations de la BMI avec les entités mentionnées dans la motivation des actes attaqués ainsi que des éléments de preuve étayant ces mêmes informations, ont pu être prises en considération.

100    D’autre part, il ressort des lettres du Conseil du 28 octobre 2010 et du 5 décembre 2011 que ce dernier a examiné lesdites observations et qu’il y a répondu, en insistant notamment sur le fait que les requérantes étaient détenues ou contrôlées par la BMI, qui avait, à son tour, fourni des services financiers à des entités impliquées dans la prolifération nucléaire.

101    Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter comme non fondés les arguments tirés de l’existence de vices affectant prétendument le réexamen des mesures restrictives visant les requérantes.

–       Sur l’absence de communication individuelle du règlement n° 267/2012 aux requérantes

102    Lors de l’audience, les requérantes ont fait valoir, sans être contredites par le Conseil, que le règlement n° 267/2012 ne leur a pas été communiqué individuellement.

103    Or, d’une part, s’il est vrai qu’un acte adoptant ou maintenant des mesures restrictives à l’égard d’une personne ou entité doit être communiqué à cette dernière et que c’est cette communication qui fait courir le délai pour l’introduction, par la personne ou entité concernée, d’un recours en annulation contre l’acte en question en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, cette circonstance n’implique pas que l’absence d’une telle communication justifie, à elle seule, l’annulation de l’acte en question.

104    D’autre part, les requérantes n’invoquent pas d’arguments tendant à démontrer que, dans le cas d’espèce, l’absence de communication individuelle du règlement n° 267/2012 a eu pour conséquence une atteinte à leurs droits qui justifierait l’annulation de ce dernier pour autant qu’il les concerne. L’existence d’une telle atteinte ne ressort, par ailleurs, pas des éléments du dossier, étant donné, tout d’abord, que les motifs retenus à l’égard des requérantes dans le règlement n° 267/2012 sont identiques aux motifs figurant dans les actes antérieurs connus d’elles, ensuite, qu’elles ont été en mesure d’adapter leurs conclusions pour demander l’annulation du règlement n° 267/2012 et, enfin, qu’elles ont été en mesure de prendre connaissance de ce dernier par une autre source et d’en joindre une copie à l’acte par lequel elles ont opéré l’adaptation de leurs conclusions.

105    Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter l’argument des requérantes tiré de la violation de l’obligation du Conseil de leur communiquer le règlement n° 267/2012, sans qu’il soit nécessaire d’examiner sa recevabilité.

–       Sur les autres violations alléguées

106    Selon les requérantes, les violations de l’obligation de motivation, de leurs droits de la défense et de l’obligation de réexaminer les mesures restrictives adoptées impliquent, par ailleurs, une violation de leur droit à une protection juridictionnelle effective et des principes de bonne administration et de protection de la confiance légitime, étant donné que le Conseil n’a pas agi de bonne foi et avec diligence.

107    Or, il ressort de l’examen mené ci‑dessus que les griefs tirés de la violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense des requérantes et de l’obligation du Conseil de réexaminer les mesures restrictives ne justifient pas l’annulation des actes attaqués. Dans ces circonstances, le grief tiré d’une violation du droit des requérantes à une protection juridictionnelle effective et des principes de bonne administration et de protection de la confiance légitime, qui n’est pas étayé par des arguments spécifiques et n’a donc pas de portée autonome, doit également être rejeté.

108    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le troisième moyen comme étant, en partie, inopérant et, en partie, non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une erreur d’appréciation en ce que le Conseil a considéré que les requérantes devaient être visées par des mesures restrictives

109    Les requérantes soutiennent que le Conseil a commis une erreur d’appréciation en ayant considéré que tant la BMI qu’elles-mêmes devaient être visées par des mesures restrictives.

110    Par ailleurs, selon les requérantes, l’erreur du Conseil implique un abus de pouvoir de sa part.

111    Le Conseil et la Commission contestent le bien‑fondé des arguments des requérantes.

112    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou, à tout le moins, déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, point 50, et la jurisprudence citée). Or, en l’espèce, les requérantes n’ont pas apporté d’éléments suggérant que, en adoptant les actes attaqués, le Conseil poursuivait un but autre que celui d’empêcher la prolifération nucléaire et son financement. Partant, il y a lieu de rejeter, d’emblée, l’argument tiré d’un prétendu « abus de pouvoir » de la part du Conseil.

113    S’agissant des autres arguments des requérantes, il ressort de la jurisprudence que le contrôle juridictionnel de la légalité d’un acte par lequel des mesures restrictives ont été adoptées à l’égard d’une entité s’étend à l’appréciation des faits et des circonstances invoqués comme le justifiant, de même qu’à la vérification des éléments de preuve et d’information sur lesquels est fondée cette appréciation. En cas de contestation, il appartient au Conseil de présenter ces éléments en vue de leur vérification par le juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, points 37 et 107).

114    À cet égard, le Conseil réitère l’argument exposé au point 80 ci‑dessus, selon lequel il ne peut pas être tenu de produire les éléments de preuve et d’information soutenant les motifs des mesures restrictives lorsque ceux-ci sont issus de sources confidentielles et sont, comme tels, conservés par les États membres qui les détiennent, voire par des États tiers avec lesquels ces derniers coopèrent, et ce dans un souci de protection des sources. Il précise que, dans ces circonstances, le Tribunal devrait se limiter à vérifier la « plausibilité objective » des allégations des États membres.

115    Or, cette argumentation ne saurait prospérer.

116    En effet, la circonstance que les mesures restrictives à l’égard des requérantes ont été adoptées sur le fondement des éléments recueillis par un État membre n’ôte rien au fait que les actes attaqués sont des actes du Conseil, qui doit, partant, s’assurer que leur adoption est justifiée, le cas échéant en demandant à l’État membre concerné de lui présenter les éléments de preuve et d’information nécessaires à cette fin.

117    De même, le Conseil ne peut se prévaloir de ce que les éléments concernés proviennent de sources confidentielles et ne peuvent, par conséquent, être divulgués. En effet, si cette circonstance pourrait, éventuellement, justifier des restrictions s’agissant de la communication de ces éléments aux requérantes ou à leurs avocats, il n’en demeure pas moins que, compte tenu du rôle essentiel du contrôle juridictionnel dans le contexte de l’adoption des mesures restrictives, le juge de l’Union doit pouvoir contrôler la légalité et le bien-fondé de telles mesures, sans que puissent lui être opposés le secret ou la confidentialité des éléments de preuve et d’information utilisés par le Conseil. Par ailleurs, le Conseil n’est pas en droit de fonder un acte adoptant des mesures restrictives sur des informations ou sur des éléments de dossier communiqués par un État membre, si cet État membre n’est pas disposé à en autoriser la communication à la juridiction de l’Union investie du contrôle de la légalité de cette décision.

118    Par conséquent, il y a lieu d’examiner le bien‑fondé de la justification des mesures restrictives visant les requérantes au regard des éléments d’information et de preuve communiqués tant à ces dernières qu’au Tribunal.

119    À cet égard, il y a lieu de rappeler que les mesures restrictives visant les requérantes reposent sur deux constats cumulatifs selon lesquels, d’une part, elles sont détenues ou contrôlées par la BMI et, d’autre part, cette dernière a apporté un appui à la prolifération nucléaire. Par conséquent, l’appréciation du bien‑fondé des mesures restrictives visant les requérantes implique l’examen du bien‑fondé de chacun des deux constats susmentionnés.

120    Le Tribunal examinera, dans un premier temps, les arguments des requérantes relatifs au constat selon lequel la BMI a apporté un appui à la prolifération nucléaire. Il y aura lieu d’apprécier, dans un second temps, les arguments des requérantes selon lesquels elles n’auraient pas dû, en tout état de cause, être visées par des mesures restrictives.

–       Sur l’appui prétendument apporté par la BMI à la prolifération nucléaire

121    La motivation des actes attaqués et les éléments communiqués par le Conseil les 1er octobre et 18 novembre 2009 se réfèrent, au total, à neuf entités prétendument impliquées dans la prolifération nucléaire auxquelles la BMI aurait fourni des services financiers : l’Organisation des industries aérospatiales (AIO), le Groupe industriel Shahid Hemmat (SHIG), le Groupe industriel Shahid Bagheri (SBIG), l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (AEOI), la Novin Energy Company, la Mesbah Energy Company, la Kalaye Electric Company, l’Organisation des industries de la défense (DIO) et la Bank Sepah.

122    Les requérantes contestent que la BMI ait fourni des services financiers au SHIG, au SBIG, à la Novin Energy Company et à la Kalaye Electric Company. Le Conseil n’ayant pas présenté d’éléments de preuve ou d’information pour étayer ses allégations visant les services prétendument fournis à ces quatre sociétés, lesdites allégations ne sauraient justifier les mesures restrictives visant la BMI, conformément à la jurisprudence citée au point 111 ci‑dessus.

123    En revanche, les requérantes ne contestent pas que la BMI ait fourni des services financiers à l’AIO, l’AEOI, la Mesbah Energy Company, la DIO et la Bank Sepah. Il convient donc d’examiner si, ainsi que le soutient le Conseil, ces services constituent un appui à la prolifération nucléaire au sens de la décision 2010/413, du règlement n° 423/2007, du règlement n° 961/2010 et du règlement n° 267/2012.

124    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 18 du règlement n° 423/2007, de l’article 39 du règlement n° 961/2010 et de l’article 49 du règlement n° 267/2012, lesdits règlements s’appliquent au territoire de l’Union, y compris à son espace aérien, à bord de tout aéronef ou de tout navire relevant de la juridiction d’un État membre, à tout ressortissant d’un État membre à l’intérieur ou à l’extérieur du territoire de l’Union, à toute personne morale, toute entité ou tout organisme, établi ou constitué selon le droit d’un État membre, ainsi qu’à toute personne morale, à toute entité ou à tout organisme en ce qui concerne toute opération commerciale réalisée intégralement ou en partie dans l’Union.

125    Ainsi, s’agissant des transactions réalisées en dehors de l’Union, le règlement n° 423/2007, le règlement n° 961/2010 et le règlement n° 267/2012 ne sont pas susceptibles de créer des obligations juridiques à l’égard d’un établissement financier établi dans un État tiers et constitué selon le droit de ce même État (ci‑après un « établissement financier étranger »), tel que la BMI. Par conséquent, un tel établissement financier n’est pas tenu, en vertu desdits règlements, de geler les fonds des entités impliquées dans la prolifération nucléaire.

126    Il n’en demeure pas moins que, si un établissement financier étranger participe, est directement associé ou apporte un appui à la prolifération nucléaire, ses fonds et ses ressources économiques situés sur le territoire de l’Union, impliqués dans une opération commerciale réalisée intégralement ou en partie dans l’Union ou détenus par des ressortissants des États membres ou par des personnes morales, entités ou organismes établis ou constitués selon le droit d’un État membre, peuvent être frappés par des mesures restrictives adoptées en vertu du règlement n° 423/2007, du règlement n° 961/2010 et du règlement n° 267/2012.

127    Il s’ensuit qu’un établissement financier étranger a tout intérêt à s’assurer qu’il ne participe pas, n’est pas directement associé et n’apporte pas d’appui à la prolifération nucléaire, notamment en fournissant des services financiers à une entité impliquée dans cette dernière. Par conséquent, lorsqu’il sait ou peut raisonnablement suspecter que l’un de ses clients est impliqué dans la prolifération nucléaire, il lui revient de cesser la fourniture de services financiers à ce dernier sans délai, compte tenu des obligations légales applicables, et de ne lui fournir aucun nouveau service.

128    En l’espèce, le Conseil n’allègue pas que les services litigieux rentraient dans le champ d’application du règlement n° 423/2007, du règlement n° 961/2010 et du règlement n° 267/2012, tel que rappelé au point 121 ci‑dessus. Partant, il convient d’examiner si la BMI a agi sans délai afin de cesser la fourniture de services financiers à chacune des cinq entités mentionnées au point 120 ci‑dessus lorsqu’elle a su ou qu’elle pouvait raisonnablement suspecter qu’elles étaient impliquées dans la prolifération nucléaire.

129    À cet égard, premièrement, les requérantes soutiennent que la BMI n’a effectué qu’un versement au profit de l’AIO le 14 mars 2007, c’est-à-dire avant l’adoption des mesures restrictives à l’égard de cette dernière par le Conseil, intervenue le 23 avril 2007.

130    Or, le Conseil n’apporte pas d’éléments de preuve ou d’information concrets suggérant soit que des services ont été fournis par la BMI à l’AIO après l’adoption des mesures restrictives visant cette dernière, soit que la BMI savait ou pouvait raisonnablement suspecter que l’AIO participait à la prolifération nucléaire à la date du 14 mars 2007.

131    Dans ces circonstances, le versement effectué au profit de l’AIO ne justifie pas les mesures restrictives à l’égard de la BMI.

132    Deuxièmement, les requérantes admettent que la BMI a réalisé des opérations pour le compte de la Bank Sepah, de la Mesbah Energy Company et de la DIO, tant avant qu’après l’adoption de mesures restrictives visant ces entités. Elles soutiennent, toutefois, que toutes les opérations réalisées résultaient des engagements souscrits avant l’adoption desdites mesures et que, en tout état de cause, elles n’étaient pas liées à la prolifération nucléaire.

133    À cet égard, il y a lieu de relever que l’article 20, paragraphe 6, de la décision 2010/413, l’article 9 du règlement n° 423/2007, l’article 18 du règlement n° 961/2010 et l’article 25 du règlement n° 267/2012 autorisent, en substance, que les fonds des entités visées par des mesures restrictives soient débloqués pour effectuer des paiements en vertu des obligations souscrites par elles antérieurement à leur désignation, pour autant que lesdits paiements ne sont pas liés à la prolifération nucléaire. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu d’exiger de la BMI, qui n’était pas tenue, en l’espèce, de geler les fonds de la Bank Sepah, de la Mesbah Energy Company et de la DIO en vertu des textes susmentionnés, ainsi qu’il ressort des points 122 et 125 ci‑dessus, qu’elle applique un régime plus strict à l’égard de ces dernières.

134    Or, le Conseil n’apporte pas d’éléments de preuve ou d’information suggérant soit que la BMI savait ou pouvait raisonnablement suspecter que la Bank Sepah, la Mesbah Energy Company et la DIO étaient impliquées dans la prolifération nucléaire avant l’adoption des mesures restrictives les visant, soit qu’elle a réalisé des opérations sur le fondement des instructions postérieures à l’adoption desdites mesures, soit encore que les opérations réalisées après l’adoption desdites mesures étaient liées à la prolifération nucléaire.

135    Dans ces circonstances, les opérations réalisées pour le compte de la Bank Sepah, de la Mesbah Energy Company et de la DIO ne justifient pas non plus les mesures restrictives visant la BMI.

136    Troisièmement, les requérantes admettent que la BMI réalisait, jusqu’au 18 avril 2007, des opérations pour le compte de l’AEOI liées au paiement des bourses et des frais liés à l’éducation et portant sur des sommes ne dépassant pas 8 000 euros.

137    Or, l’AEOI est visée par des mesures restrictives adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies depuis le 23 décembre 2006. Ainsi, à partir de cette date, la BMI pouvait, à tout le moins, suspecter que l’AEOI était impliquée dans la prolifération nucléaire.

138    En outre, les requérantes ne prétendent pas que les opérations réalisées après le 23 décembre 2006 étaient fondées sur des instructions reçues avant cette date.

139    En tout état de cause, dans la mesure où l’AEOI est chargée des activités de recherche et développement dans le domaine nucléaire, il est justifié de considérer que les bourses payées en son nom sont liées à ces mêmes activités et, partant, à la prolifération nucléaire.

140    Par conséquent, les considérations exposées au point 130 ci‑dessus ne sont pas applicables aux opérations réalisées pour le compte de l’AEOI.

141    Au demeurant, c’est à tort que les requérantes invoquent le montant peu important des paiements réalisés par la BMI pour le compte de l’AEOI. En effet, d’une part, selon les indications fournies par elles, le montant total de ces paiements réalisés en 2007 s’élève à 17 768 euros, 68 341 dollars des États-Unis (USD) et 2 041 dollars australiens (AUD), soit une somme non négligeable. D’autre part, dans la mesure où le fait de disposer de personnel hautement qualifié est d’une importance primordiale pour les activités de recherche et développement dans le domaine nucléaire, le paiement des bourses destinées à assurer l’éducation dans ce domaine, même d’un montant individuel relativement faible, constitue un appui aux activités en cause et, par voie de conséquence, à la prolifération nucléaire.

142    Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que le fait pour la BMI de réaliser les paiements des bourses et des frais liés à l’éducation pour le compte de l’AEOI après l’adoption des mesures restrictives visant cette dernière par le Conseil de sécurité des Nations Unies constitue un appui à la prolifération nucléaire qui justifie les mesures restrictives la visant.

143    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le grief des requérantes selon lequel la BMI ne devait pas être visée par des mesures restrictives.

–       Sur les mesures restrictives visant les requérantes

144    Les requérantes font valoir que, en tout état de cause, elles ne devaient pas être visées elles-mêmes par des mesures restrictives. Elles précisent, à cet égard, que leurs activités n’ont aucun lien avec la prolifération nucléaire, et aucun élément de preuve n’a été présenté sur ce point par le Conseil. Ainsi, les requérantes autres que la Bank Kargoshaei ne seraient pas des banques. La Bank Kargoshaei, quant à elle, ne fournirait que des services de nature sociale à des personnes physiques et n’aurait pas d’activités internationales. Dès lors, les requérantes ne seraient pas susceptibles d’être utilisées par la BMI pour contourner les mesures restrictives la visant.

145    Les requérantes ajoutent que le Conseil a lui-même implicitement reconnu le caractère injustifié des mesures restrictives les visant dès lors qu’il a retiré, après réexamen, les mesures visant une autre entité détenue par la BMI, la Mazandaran Textile Company.

146    À titre liminaire, il convient de relever que les requérantes ne contestent pas qu’elles sont détenues ou contrôlées par la BMI.

147    Or, selon la jurisprudence, lorsque les fonds d’une entité reconnue comme participant à la prolifération nucléaire sont gelés, il existe un risque non négligeable que celle‑ci exerce une pression sur les entités qu’elle détient ou contrôle pour contourner l’effet des mesures qui la visent, en les incitant soit à lui transférer directement ou indirectement leurs fonds, soit à effectuer des transactions qu’elle ne peut pas opérer elle‑même du fait du gel de ses fonds. Dans ces circonstances, le gel des fonds des entités détenues ou contrôlées par une entité reconnue comme participant à la prolifération nucléaire est nécessaire et approprié pour assurer l’efficacité des mesures adoptées à l’encontre de cette dernière et pour garantir que ces mesures ne seront pas contournées (arrêt du Tribunal du 9 juillet 2009, Melli Bank/Conseil, T‑246/08 et T‑332/08, Rec. p. II‑2629, point 103).

148    La validité de ce constat n’est pas affectée par les arguments selon lesquels les requérantes n’ont pas d’activités internationales et, à l’exception de la Bank Kargoshaei, ne sont pas des établissements financiers. En effet, ces circonstances n’impliquent pas qu’elles ne pourraient pas être utilisées par la BMI pour contourner les mesures restrictives la visant, de la manière décrite au point 144 ci‑dessus.

149    En outre, il y a lieu de relever que le cas de la Mazandaran Textile Company n’est pas comparable à celui des requérantes. En effet, le Conseil fait valoir, sans que son allégation soit contestée par les requérantes, que la Mazandaran Textile Company n’était plus détenue ou contrôlée par la BMI au moment de l’adoption de la décision 2010/644 et du règlement n° 961/2010.

150    Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter le grief tiré de ce que les requérantes ne devaient pas être visées elles-mêmes par des mesures restrictives.

151    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen comme étant non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit s’agissant de la base juridique de la décision 2010/644 et du règlement n° 961/2010

152    Les requérantes soutiennent que, dans la mesure où la décision 2010/644 et le règlement n° 961/2010 prévoient des mesures restrictives à l’encontre des entités qui ne sont pas visées dans les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, ils auraient dû être adoptés non en vertu de la procédure prévue à l’article 215 TFUE, mais selon celle prévue à l’article 75 TFUE. Alternativement, les actes attaqués auraient pu être fondés sur les articles 75 TFUE et 215 TFUE appliqués conjointement.

153    Le Conseil et la Commission contestent le bien‑fondé des arguments des requérantes.

154    Selon une jurisprudence constante, le choix de la base juridique d’un acte de l’Union doit se fonder sur des éléments objectifs susceptibles de contrôle juridictionnel, parmi lesquels figurent la finalité et le contenu de cet acte (voir arrêt de la Cour du 19 juillet 2012, Parlement/Conseil, C‑130/10, non encore publié au Recueil, point 42, et la jurisprudence citée).

155    À cet égard, l’article 75 TFUE est inclus dans le titre V de la troisième partie du traité FUE, consacré à l’espace de liberté, de sécurité et de justice au sein de l’Union. Il permet d’adopter des mesures restrictives visant à la réalisation des objectifs définis par ledit titre, visés à l’article 67 TFUE, et ce uniquement en ce qui concerne la prévention du terrorisme et des activités connexes ainsi que la lutte contre ces phénomènes.

156    L’article 215 TFUE, quant à lui, est inclus dans le titre IV de la cinquième partie du traité FUE qui concerne l’action extérieure de l’Union. Il permet l’adoption de mesures restrictives à l’égard des pays tiers ainsi que des personnes physiques ou morales, de groupes et d’entités non étatiques, afin de mettre en œuvre une décision adoptée conformément au chapitre 2 du titre V du traité UE, dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité commune (ci-après la « PESC »).

157    En l’espèce, il y a lieu de relever, à titre liminaire, que c’est à tort que les requérantes prétendent que la décision 2010/644 aurait dû être fondée sur l’article 75 TFUE. En effet, ladite décision a été adoptée en vertu du traité UE, et non pas en vertu du traité FUE, de sorte qu’elle ne saurait avoir pour base juridique une disposition quelconque de ce dernier traité.

158    Quant au règlement n° 961/2010, le Conseil fait valoir à juste titre que les mesures restrictives que celui‑ci prévoit ne concernent ni les objectifs visés à l’article 67 TFUE ni, a fortiori, la prévention du terrorisme et des activités connexes ou la lutte contre ces phénomènes. Elles visent les activités de la République islamique d’Iran, soit un pays tiers, liées à la prolifération nucléaire. Ainsi, elles concernent le domaine de la PESC.

159    De surcroît, le règlement n° 961/2010 met en œuvre la décision 2010/413 et la décision 2010/644, qui sont des actes adoptés en vertu de l’article 29 TUE. Cette dernière disposition est incluse dans le chapitre 2 du titre V du traité UE, consacré à la PESC.

160    Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que l’article 215 TFUE constitue une base juridique appropriée et suffisante pour l’adoption du règlement n° 961/2010, les mesures restrictives prévues par ce dernier tombant en dehors du champ d’application ratione materiae de l’article 75 TFUE.

161    La circonstance, invoquée par les requérantes, selon laquelle les mesures restrictives les visant vont au-delà de celles adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies, est inopérante dans ce contexte.

162    À cet égard, il ressort de la jurisprudence que rien dans les articles 60 CE et 301 CE ne permet de considérer que la compétence que ces dispositions conféraient à la Communauté européenne était limitée à la mise en œuvre des mesures décidées par le Conseil de sécurité des Nations unies  (voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, points 51, 52 et 64). Ces constats sont transposables aux mesures restrictives adoptées en vertu de l’article 215 TFUE, qui reflète le contenu des articles 60 CE et 301 CE (voir, en ce sens, arrêt Parlement/Conseil, point 151 supra, point 51).

163    Partant, le fait que des mesures restrictives adoptées dans le cadre de la PESC vont au-delà de celles décidées par le Conseil de sécurité des Nations unies n’a pas d’impact sur le caractère approprié et suffisant de l’article 215 TFUE en tant que base juridique de celles‑ci.

164    En outre, selon la jurisprudence, les différences de procédures applicables en vertu de l’article 75 TFUE et de l’article 215, paragraphe 1, TFUE empêchent que ces deux dispositions puissent être cumulées l’une avec l’autre pour servir de double base juridique d’un acte tel que le règlement n° 961/2010 (voir, par analogie, arrêt Parlement/Conseil, point 151 supra, point 49).

165    Pour autant que les requérantes soutiennent encore, dans ce contexte, que le recours à l’article 75 TFUE permettrait d’assurer un niveau approprié de contrôle démocratique grâce à l’intervention du Parlement européen, il y a lieu de relever, tout d’abord, que ce ne sont pas les procédures qui définissent la base juridique d’un acte, mais la base juridique d’un acte qui détermine les procédures à suivre pour adopter ce dernier (arrêt Parlement/Conseil, point 151 supra, point 80). Ainsi, la volonté d’associer le Parlement au processus d’adoption des mesures restrictives ne saurait avoir pour conséquence que les actes concernés doivent être fondés sur une base juridique qui n’est pas applicable ratione materiae, telle que, en l’espèce, l’article 75 TFUE.

166    Ensuite, la différence entre les articles 75 TFUE et 215 TFUE quant à l’implication du Parlement résulte d’un choix opéré par les auteurs du traité de Lisbonne de lui conférer un rôle plus limité à l’égard de l’action de l’Union dans le cadre de la PESC (arrêt Parlement/Conseil, point 151 supra, point 82).

167    Enfin, aux termes de l’article 215, paragraphe 3, TFUE, les actes visés par cet article contiennent les dispositions nécessaires en matière de garanties juridiques (arrêt Parlement/Conseil, point 151 supra, point 83).

168    Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que le Conseil n’a pas commis d’erreur en ce qui concerne la base juridique de la décision 2010/644 et du règlement n° 961/2010.

169    Il y a donc lieu de rejeter le deuxième moyen comme étant, pour partie, inopérant et, pour partie, non fondé.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité et du droit de propriété des requérantes résultant du fait que le Conseil n’a pas pris en considération les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies

170    Les requérantes soutiennent que le Conseil a violé le principe de proportionnalité ainsi que leur droit de propriété.

171    Le Conseil, soutenu par la Commission, conteste le bien‑fondé des arguments des requérantes.

172    Selon la jurisprudence, en vertu du principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, la légalité de l’interdiction d’une activité économique est subordonnée à la condition que les mesures d’interdiction soient appropriées et nécessaires à la réalisation des objectifs légitimement poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 6 supra, point 66).

173    En l’espèce, en premier lieu, les requérantes soutiennent qu’elles sont visées par des mesures restrictives allant au-delà des mesures prévues dans les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, alors que les actes attaqués sont censés refléter ces mêmes résolutions. Partant, les mesures restrictives les visant seraient disproportionnées, étant donné que le Conseil n’a fourni aucune justification objective par rapport à cette disparité.

174    À cet égard, il a déjà été exposé au point 159 ci‑dessus que le Conseil était compétent pour adopter, en vertu de l’article 215 TFUE, des mesures restrictives allant au-delà de celles décidées par le Conseil de sécurité des Nations unies, telles que celles prévues par le règlement n° 961/2010 et par le règlement n° 267/2012.

175    La même conclusion doit être appliquée, par analogie, aux mesures restrictives adoptées en vertu de l’article 29 TUE, telles que celles prévues par la décision 2010/413 et par les décisions adoptées pour la mettre en œuvre. En effet, l’article 29 TUE ne limite pas non plus les pouvoirs qu’il confère au Conseil à la mise en œuvre des mesures décidées par le Conseil de sécurité des Nations unies.

176    Par conséquent, le simple fait que les mesures restrictives visant les requérantes vont au-delà de celles adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies n’implique pas que le Conseil a violé le principe de proportionnalité.

177    Au demeurant, les requérantes soutiennent à tort que le Conseil était tenu de fournir une « justification objective » par rapport au fait qu’il adoptait des mesures restrictives autonomes à leur égard. En effet, selon la jurisprudence, des mesures restrictives autonomes visant des entités détenues ou contrôlées par une entité reconnue comme participant à la prolifération nucléaire poursuivent un objectif légitime qui correspond aux objectifs poursuivis par les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, à savoir empêcher la prolifération nucléaire et son financement. Elles sont, par ailleurs, appropriées et nécessaires à la réalisation dudit objectif (voir, en ce sens, arrêt Melli Bank/Conseil, point 144 supra, points 102 et 103). Dans ces circonstances, le Conseil n’était pas tenu de fournir aux requérantes une « justification objective », mais uniquement les raisons concrètes et spécifiques pour lesquelles il estimait que les critères d’adoption des mesures restrictives autonomes s’appliquaient à elles. Or, ainsi qu’il ressort des points 70 à 75 ci‑dessus, le Conseil a respecté cette obligation.

178    Dans ces circonstances, le grief tiré de ce que les mesures restrictives visant les requérantes sont disproportionnées en ce qu’elles vont au-delà de celles prévues par le Conseil de sécurité des Nations unies doit être rejeté comme étant non fondé.

179    En second lieu, les requérantes font valoir que les mesures restrictives visant la BMI s’appliquent non seulement à ses fonds propres, mais également à ceux de ses déposants, dont les requérantes, ce qui serait incompatible avec les résolutions en question du Conseil de sécurité des Nations unies.

180    Or, d’une part, ainsi que le fait valoir le Conseil, l’article 20, paragraphe 6, de la décision 2010/413, l’article 9 du règlement n° 423/2007, l’article 18 du règlement n° 961/2010 et l’article 25 du règlement n° 267/2012 permettent aux clients de la BMI qui ne sont pas eux‑mêmes visés par des mesures restrictives de retirer, sous certaines conditions, les fonds qui ont été déposés auprès d’elle avant l’adoption des mesures restrictives la visant. Par conséquent, l’argument des requérantes manque en fait en ce qui concerne les déposants qui ne sont pas visés par des mesures restrictives.

181    D’autre part, s’agissant des déposants visés par des mesures restrictives, tels que les requérantes, l’impossibilité de retirer leurs fonds déposés auprès de la BMI et faisant l’objet d’un gel est la conséquence de l’adoption de ces mêmes mesures. Or, ainsi qu’il ressort des points 169 à 173 ci‑dessus, le simple fait que ces dernières vont au-delà des mesures adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies n’implique pas que le Conseil a violé le principe de proportionnalité.

182    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen comme étant non fondé.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 215 TFUE et de l’article 40 TUE ainsi que du principe d’égalité de traitement

183    Les requérantes soutiennent que, en adoptant le règlement n° 961/2010, le Conseil a violé l’article 215 TFUE et l’article 40 TUE ainsi que le principe d’égalité de traitement.

184    Le Conseil conteste le bien‑fondé des arguments des requérantes.

185    Premièrement, les requérantes font valoir que, alors que l’article 215, paragraphe 2, TFUE prévoit que le Conseil « peut » adopter des mesures restrictives, ce qui implique qu’il dispose d’un pouvoir d’appréciation sur ce point, la décision 2010/413, adoptée dans le cadre de la PESC, aurait imposé au Conseil l’adoption des mesures restrictives, en violation de l’article 215 TFUE et, par voie de conséquence, de l’article 40 TUE.

186    À cet égard, il y a lieu de relever que, si l’adoption préalable d’une décision conformément au chapitre 2 du titre V du traité UE constitue une condition nécessaire pour que le Conseil puisse adopter des mesures restrictives en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 215 TFUE, la simple existence d’une telle décision n’est pas susceptible de créer une obligation du Conseil d’adopter de telles mesures.

187    En effet, le Conseil reste libre d’apprécier, dans le cadre de l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par le traité FUE, les modalités de mise en œuvre des décisions adoptées conformément au chapitre 2 du titre V du traité UE, en ce compris l’adoption éventuelle des mesures restrictives fondées sur l’article 215 TFUE.

188    Par conséquent, c’est à tort que les requérantes prétendent que la décision 2010/413 impose au Conseil d’adopter des mesures restrictives. Il n’y a donc pas lieu de constater une violation de l’article 215 TFUE ou de l’article 40 TUE.

189    Deuxièmement, selon les requérantes, contrairement à ce qu’exige l’article 29 TUE, la décision 2010/413 ne définit pas la position de l’Union sur une question particulière de nature géographique ou thématique, mais impose des obligations précises aux États membres et aux personnes relevant de leur juridiction. Par conséquent, ladite décision serait dépourvue de base légale, et le Conseil aurait donc violé l’article 215, paragraphe 2, TFUE, en se fondant sur elle lors de l’adoption du règlement n° 961/2010.

190    À cet égard, il convient de relever que rien dans l’article 29 TUE n’exclut que la définition d’une position géographique ou thématique porte également sur des mesures concrètes qui doivent être mises en œuvre par l’ensemble des États membres face à un événement ou à un phénomène.

191    Tel est d’autant plus le cas que l’article 29 TUE impose aux États membres de veiller à la conformité de leurs politiques nationales avec les positions ainsi définies. Or, la définition exacte, à la fois, des mesures à prendre et des personnes, entités et organismes visés par ces mêmes mesures peut s’avérer nécessaire afin d’assurer une mise en œuvre cohérente de la position du Conseil par l’ensemble des États membres.

192    En l’espèce, l’objectif consistant à empêcher la prolifération nucléaire et son financement, qui est sous-jacent à l’adoption de la décision 2010/413, se traduit, notamment, par le gel des fonds de certaines personnes, entités et organismes. Or, l’efficacité de telles mesures dépend, dans une large mesure, de leur mise en œuvre uniforme et simultanée par l’ensemble des États membres, qui est tributaire d’une définition précise tant de leur contenu que des personnes, entités et organismes visés.

193    Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que la décision 2010/413 est conforme à l’article 29 TUE. Par voie de conséquence, c’est sans violer l’article 215 TFUE que le Conseil a pu s’y référer lors de l’adoption du règlement n° 961/2010.

194    Troisièmement, les requérantes estiment que le règlement n° 961/2010 et le règlement n° 267/2012 ne contiennent pas les dispositions nécessaires en matière de garanties juridiques, contrairement à ce qu’exige l’article 215, paragraphe 3, TFUE. L’absence de telles dispositions, tant dans le règlement n° 961/2010 et le règlement n° 267/2012 que dans la décision 2010/413, impliquerait par ailleurs une violation du principe d’égalité de traitement par rapport aux entités visées par les actes prévoyant des mesures restrictives adoptés en vertu de l’article 75 TFUE. Dans ce contexte, les dispositions de l’article 24 de la décision 2010/413, de l’article 36 du règlement n° 961/2010 et de l’article 46 du règlement n° 267/2012 ne constituent pas des garanties juridiques suffisantes selon les requérantes, compte tenu également de ce qu’elles ne sont pas effectivement mises en œuvre par le Conseil.

195    À cet égard, l’argument tiré de l’absence de garanties juridiques dans les actes concernés manque en fait. En effet, ainsi qu’il a été rappelé au point 79 ci‑dessus, l’article 24, paragraphes 3 et 4, de la décision 2010/413, l’article 36, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 961/2010 et l’article 46, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 267/2012 prévoient des dispositions garantissant les droits de la défense des entités visées par des mesures restrictives adoptées en vertu de ces textes, le respect de ces droits faisant, par ailleurs, l’objet du contrôle du juge de l’Union. Ainsi, les entités visées par des mesures restrictives ont, notamment, le droit de se voir communiquer les motifs de l’adoption desdites mesures et de présenter leurs observations sur ces dernières. De même, lorsque des observations sont présentées, le Conseil est tenu de procéder au réexamen des mesures restrictives et d’informer l’entité intéressée du résultat de son réexamen.

196    Dans ce contexte, la question de savoir si la décision 2010/413, le règlement n° 961/2010 et le règlement n° 267/2012 prévoient des garanties juridiques exigées par l’article 215, paragraphe 3, TFUE, est distincte de celle de savoir si ces mêmes garanties sont effectivement mises en œuvre par le Conseil lors de l’adoption des mesures restrictives à l’égard des personnes, entités ou organismes déterminés. Par conséquent, l’argument tiré de l’absence de mise en œuvre effective desdites mesures est inopérant dans le cadre du grief tiré d’une violation de l’article 215, paragraphe 3, TFUE et d’une violation du principe d’égalité de traitement qui en découlerait. Au demeurant, le respect des garanties juridiques prévues par la décision 2010/413, le règlement n° 961/2010 et le règlement n° 267/2012 dans le cadre de l’adoption et du maintien des mesures restrictives visant les requérantes a été examiné aux points 60 à 106 ci‑dessus, l’examen des arguments des requérantes n’ayant pas révélé d’illégalités justifiant l’annulation des actes attaqués.

197    S’agissant du grief tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement, il y a lieu de constater, en l’absence d’arguments plus précis des requérantes, que les garanties juridiques prévues dans la décision 2010/413, le règlement n° 961/2010 et le règlement n° 267/2012, dont la teneur a été rappelée au point 192 ci‑dessus, correspondent au niveau de garanties juridiques exigé par l’article 75 TFUE. Par conséquent, le grief tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement doit être rejeté.

198    Partant, il y a lieu de constater que le Conseil n’a violé ni l’article 215, paragraphe 3, TFUE ni le principe d’égalité de traitement.

199    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme étant, en partie, inopérant et, en partie, non fondé.

200    Tous les moyens étant rejetés, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

201    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

202    Toutefois, aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut, d’une part, répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens pour des motifs exceptionnels et, d’autre part, condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l’autre partie les frais qu’elle lui a fait exposer et qui sont jugés frustratoires ou vexatoires.

203    En l’espèce, si les requérantes ont succombé en leurs chefs de conclusions, il ressort des points 73 et 86 ci‑dessus que le Conseil a omis de leur communiquer une partie importante de la motivation des actes attaqués ainsi que les éléments de son dossier sous-tendant cette dernière, les incitant ainsi à former le présent recours et à exposer les frais qui y sont afférents. Dans ces circonstances, lesdits frais doivent être jugés vexatoires et il y a lieu de condamner le Conseil à les rembourser. Pour la même raison, le Conseil supportera ses propres dépens.

204    Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs dépens. Par conséquent, la Commission supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Conseil de l’Union européenne supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Bank Kargoshaei, la Bank Melli Iran Investment Company, la Bank Melli Iran Printing and Publishing Company, la Cement Investment & Development Co., la Mazandaran Cement Company, la Melli Agro-chemical Company et la Shomal Cement Co.

3)      La Commission européenne supportera ses propres dépens.

Pelikánová

Jürimäe

Van der Woude

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 septembre 2013.

Signatures

Table des matières



Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur la recevabilité

Sur les demandes d’adaptation de conclusions des requérantes

Sur le chef de conclusions tendant à l’annulation de tout règlement futur ou de toute décision future complétant ou modifiant l’un des actes attaqués qui serait en vigueur à la date de la clôture de la procédure orale

Sur le fond

Sur la possibilité pour les requérantes d’invoquer les protections et garanties liées aux droits fondamentaux

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense de la BMI et des requérantes, de leur droit à une protection juridictionnelle effective, des principes de bonne administration et de protection de la confiance légitime ainsi que de l’obligation du Conseil de réexaminer les mesures restrictives adoptées à la lumière des observations formulées

– Sur l’obligation de motivation

– Sur la violation du principe du respect des droits de la défense

– Sur les vices affectant prétendument le réexamen effectué par le Conseil

– Sur l’absence de communication individuelle du règlement n° 267/2012 aux requérantes

– Sur les autres violations alléguées

Sur le quatrième moyen, tiré d’une erreur d’appréciation en ce que le Conseil a considéré que les requérantes devaient être visées par des mesures restrictives

– Sur l’appui prétendument apporté par la BMI à la prolifération nucléaire

– Sur les mesures restrictives visant les requérantes

Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit s’agissant de la base juridique de la décision 2010/644 et du règlement n° 961/2010

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité et du droit de propriété des requérantes résultant du fait que le Conseil n’a pas pris en considération les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 215 TFUE et de l’article 40 TUE ainsi que du principe d’égalité de traitement

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’anglais.