Language of document : ECLI:EU:C:2021:526

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

29 juin 2021 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑185/21 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 25 mars 2021,

Turk Hava Yollari AO, établie à Istanbul (Turquie), représentée par Me R. Almaraz Palmero, avocate,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

Sky Ltd, établie à Isleworth (Royaume-Uni), représentée par Mme A. M. Brackenbury, solicitor, et Me A. Zalewska, adwokat,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, vice‑présidente de la Cour, MM. N. Piçarra et D. Šváby (rapporteur), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. G. Pitruzzella, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Turk Hava Yollari AO demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 27 janvier 2021, Turk Hava Yollari/EUIPO – Sky (skylife) (T‑382/19, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:45), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 23 avril 2019 (affaire R 880/2018‑4), relative à une procédure de nullité entre Sky et Turk Hava Yollari.

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante invoque trois arguments.

7        Par son premier argument, la partie requérante reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en décidant de ne pas suspendre la procédure, bien qu’il y ait eu un accord entre les parties principales sur la demande de suspension et Sky ne s’y soit pas opposée. Elle fait à cet égard valoir que le Tribunal aurait violé les principes généraux de sécurité juridique et d’équité de la procédure au sens de l’article 7 TFUE ainsi que l’article 69, sous c) et d), du règlement de procédure du Tribunal.

8        Selon la partie requérante, s’il n’était pas non plus fait droit à la demande de suspension dans le cadre de la présente procédure de pourvoi devant la Cour, celle-ci deviendrait de toute manière sans objet dès que l’enregistrement antérieur de la marque de l’Union européenne SKY, invoqué par Sky à l’appui de sa demande en nullité, perdrait sa validité dans la cadre de la procédure d’annulation engagée par un tiers.

9        Par son deuxième argument, la partie requérante reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit, en conférant un droit exclusif à un enregistrement de marque antérieur, qui serait très probablement nul, et qui impliquerait un monopole du mot « sky ». À cet égard, la partie requérante fait valoir que le Tribunal aurait violé le principe de libre concurrence au sens des articles 101 et 102 TFUE.

10      Dans ce contexte, la partie requérante invoque l’arrêt de la Cour du 29 janvier 2020, Sky e.a. (C‑371/18, EU:C:2020:45) qui ferait référence à l’intention de Sky, au moyen des marques Sky, d’interdire et de monopoliser l’usage du mot « sky » et non pas de l’utiliser de bonne foi et en suivant les règles en matière de concurrence loyale. Partant, elle soutient que Sky semble vouloir faire obstacle aux tiers d’enregistrer d’autres marques contenant le mot « sky », même si celui‑ci serait enregistré avec d’autres combinaisons de mots et de manière stylisée, accompagné d’autres éléments figuratifs.

11      Par son troisième argument, la partie requérante reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit, aux points 48 à 50 de l’arrêt attaqué, en jugeant, en substance, qu’elle n’avait pas soulevé, devant la chambre de recours, la question de l’éventuelle forclusion par tolérance. Le Tribunal aurait ainsi violé l’article 61 du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lu en combinaison avec l’article 54, paragraphe 1, de ce règlement.

12      En particulier, la partie requérante soutient que Sky aurait commis un abus de droit en introduisant de mauvaise foi une demande en nullité à l’encontre de l’enregistrement d’une marque notoire telle que SKYLIFE, alors que le délai de forclusion par tolérance était sur le point d’expirer. Elle ajoute que Sky ou ses filiales ont agi en annulation ou en opposition devant l’EUIPO afin de faire annuler ou de s’opposer à toutes les marques contenant le mot « sky », dans toutes les classes de la classification de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci‑après l’« arrangement de Nice »). Partant, selon la partie requérante, l’enregistrement international du signe figuratif SKYLIFE devrait demeurer valable pour tous les services relevant des classes 39 et 41 de l’arrangement de Nice visés par l’enregistrement.

13      Afin d’examiner la demande d’admission du pourvoi présentée par la partie requérante, il convient de relever, à titre liminaire, que c’est à celle‑ci qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 26 novembre 2020, Scorify/EUIPO, C‑418/20 P, non publiée, EU:C:2020:968, point 17 et jurisprudence citée).

14      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnance du 26 novembre 2020, Scorify/EUIPO, C‑418/20 P, non publiée, EU:C:2020:968, point 18 et jurisprudence citée).

15      Ainsi, une demande d’admission d’un pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été violée par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la violation de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 15 et jurisprudence citée).

16      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait être, d’emblée, susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 16 et jurisprudence citée).

17      En l’occurrence, s’agissant des arguments évoqués aux points 7 à 12 de la présente ordonnance, il importe de relever que la partie requérante se borne à exposer les erreurs prétendument commises par le Tribunal, sans nullement alléguer ni, a fortiori, démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

18      Dans ces conditions, il convient de conclure que la demande présentée par la partie requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

19      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

20      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

21      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Turk Hava Yollari AO supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.