Language of document : ECLI:EU:T:2011:471

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)

14 septembre 2011 (*)

« FEDER – Réduction d’un concours financier – Retrait de la note de débit attaquée – Disparition de l’objet du litige – Non‑lieu à statuer »

Dans l’affaire T‑239/10,

République italienne, représentée par Me P. Gentili, avvocato dello Stato,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. L. Prete et Mme A. Steiblytė, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la note de débit n° 3241001630, du 26 février 2010, relative à la décision C (2009) 10350 de la Commission, du 22 décembre 2009, portant réduction du concours du Fonds européen de développement régional (FEDER) accordé en application de la décision C (2000) 2349 de la Commission, du 8 août 2000, portant approbation du programme opérationnel POR Puglia, pour la période 2000‑2006, au titre de l’objectif n° 1,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. J. Azizi, président, Mme E. Cremona (rapporteur) et M. S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige et procédure

1        Le 5 octobre 1999, la République italienne a, en application du règlement (CE) n° 1260/1999 du Conseil, du 21 juin 1999, portant dispositions générales sur les Fonds structurels (JO L 161, p. 1), soumis à la Commission des Communautés européennes un projet de programme opérationnel relevant de l’objectif n° 1 pour la Région des Pouilles (Italie).

2        Par décision C (2000) 2349, du 8 août 2000, telle que modifiée, la Commission a approuvé ce programme opérationnel et a mis à la disposition des autorités italiennes, sur ce fondement, un montant total de 1 721 827 000 euros au titre du Fonds européen de développement régional (FEDER). Conformément aux demandes présentées par les autorités italiennes, la Commission a procédé à des paiements préalables et intermédiaires en leur faveur d’un montant total de 1 238 135 702,69 euros.

3        Ayant par la suite constaté différentes irrégularités à l’issue des audits effectués, la Commission a estimé que le concours financier du FEDER devait être réduit. Ainsi, à l’issue de la procédure prévue à l’article 39, paragraphe 2, du règlement n° 1260/1999, elle a, par décision C (2009) 10350, du 22 décembre 2009, portant réduction du concours du FEDER accordé en application de la décision C (2000) 2349 (ci‑après la « décision de réduction du concours »), réclamé à la requérante, la République italienne, le remboursement d’une partie des fonds versés, en appliquant une correction forfaitaire de 10 % des dépenses certifiées par cette dernière jusqu’à la date de suspension des paiements intermédiaires, soit un montant de 79 335 741,11 euros.

4        À la suite de la décision de réduction du concours, le 26 février 2010, la Commission a émis la note de débit portant le numéro 3241001630 (ci-après la « note de débit attaquée »), qui a été reçue par la République italienne le 11 mars 2010. Par cette note, la Commission a ordonné la restitution par la République italienne du montant de 79 335 741,11 euros susmentionné avant le 12 avril 2010. Dans cette note, il était également indiqué que la Commission se réservait le droit de procéder au recouvrement par compensation et que, à défaut de paiement à la date d’échéance, d’une part, la créance portera intérêt au taux appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) à ses opérations principales de refinancement, tel que publié au Journal officiel de l’Union européenne (série C), en vigueur le premier jour du mois de la date d’échéance, soit en l’espèce le 1er avril 2010, majoré de trois points et demi de pourcentage, et, d’autre part, elle se réservait le droit d’exécuter toute garantie financière préalablement fournie et de procéder à l’exécution forcée.

5        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 mars 2010, la République italienne a introduit un recours en annulation à l’encontre de la décision de réduction du concours, recours qui a été enregistré sous la référence T‑117/10.

6        Le 10 mai 2010, le paiement de la somme réclamée n’ayant pas été effectué dans le délai indiqué, la Commission a informé les autorités italiennes qu’elle procéderait à la compensation des créances et dettes conformément à l’article 73 du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1).

7        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 mai 2010, la République italienne a introduit le présent recours visant à l’annulation de la note de débit attaquée.

8        Par lettre du 27 mai 2010, les autorités italiennes ont informé la Commission que le taux appliqué dans la note de débit attaquée pour le calcul des intérêts de retard était erroné.

9        Le 16 juin 2010, la Commission a remplacé la note de débit attaquée par une nouvelle note de débit portant le numéro 32410016303 (ci-après la « note de débit n° 32410016303 »), appliquant un taux d’intérêt de retard inférieur à celui indiqué dans la note de débit attaquée et fixant aux autorités italiennes un nouveau délai, à savoir le 31 août 2010, pour le paiement, et en a informé ces dernières par lettre du même jour.

10      Par lettre du 1er juillet 2010, la Commission a informé les autorités italiennes, en réponse à leur lettre du 27 mai 2010, que, compte tenu d’une erreur dans l’application du taux pour le calcul des intérêts de retard et la fixation du délai pour le paiement, la note de débit attaquée avait été remplacée par la note de débit n° 32410016303. Par cette lettre, la Commission a également indiqué aux autorités italiennes que les compensations déjà exécutées avaient été prises en compte dans la nouvelle note de débit et que les intérêts de retard erronément perçus lors de la compensation seraient restitués.

11      Par acte déposé au greffe le 23 juillet 2010, la Commission a présenté au Tribunal une demande de non‑lieu à statuer. À l’appui de cette demande, la Commission soutient, en substance, que, la note de débit n° 3241006303 se substituant à la note de débit attaquée, le recours n’a plus d’objet.

12      Dans ses observations sur la demande de non‑lieu à statuer, déposées au greffe du Tribunal le 2 septembre 2010, la République italienne s’est opposée à ladite demande. À cet égard, elle fait valoir que la note de débit n° 3241006303 n’a pas totalement fait perdre tout objet à son recours, dès lors que cette note de débit se limitait à rectifier l’erreur du calcul des intérêts entachant la note de débit attaquée, en confirmant toutefois, pour la somme en principal, le contenu de celle‑ci.

 Conclusions des parties

13      La République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la note de débit attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

14      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater que le recours est sans objet ;

–        ordonner la radiation de l’affaire T-239/10 ;

–        décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

15      Dans ses observations sur la demande de non‑lieu à statuer, la République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter la demande de non‑lieu présentée par la Commission et de poursuivre la procédure.

 En droit

16      Par sa demande de non-lieu à statuer, la Commission soulève un incident de procédure qu’il convient, en vertu de l’article 114, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de régler sans ouvrir la procédure orale, le Tribunal s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier.

17      Le présent recours a pour objet une demande d’annulation de la note de débit attaquée.

18      Postérieurement à l’introduction du présent recours, à savoir le 16 juin 2010, la Commission a émis la note de débit n° 3241006303 remplaçant celle attaquée en l’espèce. Il ressort notamment de la partie de cette note intitulée « Motivation de la note de débit », ainsi que de l’explication que la Commission a fournie dans sa lettre du 1er juillet 2010, qu’elle visait à réparer une illégalité dont était affectée la note de débit attaquée, notamment en ce qui concerne la fixation du taux appliqué pour le calcul des intérêts de retard.

19      Il convient, dès lors, de constater que, par l’émission de cette nouvelle note de débit, la Commission a retiré la note de débit attaquée. En outre, ce retrait est intervenu après l’introduction du présent recours dans lequel la République italienne a fait valoir que la note de débit attaquée était illégale, notamment et précisément pour cette raison (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 18 septembre 1996, Langdon/Commission, T‑22/96, Rec. p. II‑1009, point 12).

20      Or, à supposer que la note de débit attaquée émise par la Commission soit un acte attaquable, il importe de rappeler que, si l’objet du recours disparaît au cours de la procédure, une décision du Tribunal sur le fond ne saurait procurer aucun bénéfice au requérant (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C‑362/05 P, Rec. p. I‑4333, points 42 et 43, et ordonnance du Tribunal du 17 octobre 2005, First Data e.a./Commission, T‑28/02, Rec. p. II‑4119, points 35 à 38).

21      La disparition de l’objet du litige peut notamment provenir du retrait ou du remplacement de l’acte attaqué en cours d’instance (arrêt de la Cour du 1er juin 1961, Meroni e.a./Haute Autorité, 5/60, 7/60 et 8/60, Rec. p. 201, 213 ; ordonnances de la Cour du 11 novembre 1985, Eurasian Corporation/Commission, 82/85, Rec. p. 3603, point 11, et du 8 mars 1993, Lezzi Pietro/Commission, C‑123/92, Rec. p. I‑809, point 8).

22      Dans ce contexte, il convient de relever que, si l’effet juridique d’un acte abrogé expire, sauf disposition contraire, à la date de son abrogation (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 12 février 1960, Geitling e.a./Haute Autorité, 16/59 à 18/59, Rec. p. 45, 65), un acte qui est retiré et remplacé disparaît complètement de l’ordre juridique de l’Union. Le retrait d’un acte a donc normalement un effet ex tunc (voir, en ce sens, ordonnances du Tribunal du 28 mai 1997, Proderec/Commission, T‑145/95, Rec. p. II‑8231, point 26 ; du 10 mars 2005, IMS Health/Commission, T‑184/01, Rec. p. II‑817, points 34 à 41, et du 9 septembre 2010, Phoenix-Reisen et DRV/Commission, T‑120/09, non publiée au Recueil, point 23, et la jurisprudence citée).

23      À cet égard, il convient encore de constater qu’un recours en annulation peut, à titre exceptionnel, ne pas devenir sans objet, malgré le retrait de l’acte dont l’annulation est recherchée, lorsque le requérant conserve néanmoins un intérêt suffisant à obtenir un arrêt annulant cet acte de manière formelle (voir, en ce sens, arrêt Wunenburger/Commission, point 20 supra, points 50 à 52, et arrêt du Tribunal du 27 septembre 2002, Tideland Signal/Commission, T‑211/02, Rec. p. II‑3781, points 48 et 49, et la jurisprudence citée).

24      En l’espèce, la République italienne ne demande que l’annulation de la note de débit attaquée. En effet, malgré l’émission par la Commission de la note de débit n° 3241006303, remplaçant la note de débit attaquée en cours d’instance, la République italienne n’a pas, dans ses observations sur la demande de non‑lieu à statuer, demandé à être autorisée à adapter ses moyens et/ou à substituer des nouvelles conclusions à celles de sa requête, ni indiqué vouloir adapter ses conclusions afin de couvrir la note de débit n° 3241006303, bien que, selon une jurisprudence constante, cela lui était loisible (voir arrêts du Tribunal du 3 février 2000, CCRE/Commission, T‑46/98 et T‑151/98, Rec. p. II‑167, point 33, et la jurisprudence citée, et du 12 décembre 2006, Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, T‑228/02, Rec. p. II‑4665, points 28 et 29).

25      Dans de telles circonstances, il doit être considéré que, eu égard à la jurisprudence citée aux points 21 à 23 ci-dessus, le retrait de la note de débit attaquée a donné à la République italienne le résultat qu’elle visait à obtenir par le présent recours, à savoir la disparition de celle‑ci de l’ordre juridique de l’Union. En effet, un arrêt qui annulerait la note de débit attaquée, à présent retirée, n’entraînerait aucune conséquence juridique s’ajoutant aux conséquences du retrait opéré par la Commission, celui‑ci ayant, en l’espèce, un effet rétroactif. D’ailleurs, la République italienne n’a avancé aucun élément justifiant un intérêt à obtenir un arrêt constatant l’illégalité formelle de la note de débit attaquée.

26      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours.

 Sur les dépens

27      La République italienne n’a pas conclu, dans ses observations sur la demande de non‑lieu à statuer, à ce que la Commission soit condamnée aux dépens. La Commission a conclu à ce que chaque partie supporte ses propres dépens. Aux termes de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non‑lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.

28      À cet égard, il convient de relever que le non‑lieu à statuer résulte de l’émission par la Commission de la note de débit n° 3241006303, qui a remplacé la note de débit attaquée, car cette dernière était entachée d’erreurs relatives au taux appliqué pour le calcul des intérêts de retard et au délai pour le paiement. Cependant, il y a également lieu de constater qu’il ressort du dossier que la Commission a procédé à l’émission de cette note à la suite de la lettre que la République italienne lui a adressée le 27 mai 2010, à savoir sept jours après l’introduction du présent recours, dans laquelle cette dernière avançait que le taux d’intérêt appliqué était erroné.

29      Dans ces conditions, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

ordonne :

1)      Il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 14 septembre 2011.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. Azizi


* Langue de procédure : l’italien.