Language of document : ECLI:EU:T:2015:599

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

8 septembre 2015 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de l’Iran dans le but d’empêcher la prolifération nucléaire – Gel des fonds – Obligation de motivation – Droits de la défense – Droit à une protection juridictionnelle effective – Erreur d’appréciation – Violation des droits fondamentaux – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑564/12,

Ministry of Energy of Iran, établi à Téhéran (Iran), représenté par Mme M. Lester, barrister,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Bishop et A. De Elera, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision 2012/635/PESC du Conseil, du 15 octobre 2012, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 282, p. 58), et du règlement d’exécution (UE) no 945/2012 du Conseil, du 15 octobre 2012, mettant en œuvre le règlement (UE) no 267/2012 concernant l’adoption des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 282, p. 16),

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen, président, Mme I. Pelikánová (rapporteur) et M. E. Buttigieg, juges,

greffier : M. L. Grzegorczyk, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 novembre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, le ministère de l’Énergie iranien, est responsable notamment de la fourniture et de la gestion de l’eau, de l’électricité, de l’énergie et des services relatifs aux eaux usées en Iran.

2        La présente affaire s’inscrit dans le cadre du régime de mesures restrictives instauré en vue de faire pression sur la République islamique d’Iran afin que cette dernière mette fin aux activités nucléaires présentant un risque de prolifération et à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires (ci‑après la « prolifération nucléaire »).

3        En vertu de la décision 2012/635/PESC du Conseil, du 15 octobre 2012, modifiant la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 282, p. 58), le nom du requérant a été inscrit sur la liste des entités concourant à la prolifération nucléaire iranienne qui figure à l’annexe II de la décision 2010/413/PESC du Conseil, du 26 juillet 2010, concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant la position commune 2007/140/PESC (JO L 195, p. 39).

4        Par voie de conséquence, en vertu du règlement d’exécution (UE) no 945/2012 du Conseil, du 15 octobre 2012, mettant en œuvre le règlement (UE) no 267/2012 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO L 282, p. 16), le nom du requérant a été inscrit sur la liste qui figure à l’annexe IX du règlement (UE) no 267/2012 du Conseil, du 23 mars 2012, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement (UE) no 961/2010 (JO L 88, p. 1).

5        L’inscription du nom du requérant sur la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/413 et sur celle figurant à l’annexe IX du règlement no 267/2012 a eu pour conséquence le gel de ses fonds et de ses ressources économiques.

6        En ce qui concerne le requérant, la décision 2012/635 et le règlement d’exécution no 945/2012 sont motivés comme suit :

« Responsable de la politique dans le secteur de l’énergie, qui fournit une source substantielle de revenus pour le gouvernement iranien. »

7        Par lettre du 16 octobre 2012, le Conseil de l’Union européenne a informé le requérant de l’inscription de son nom sur la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/413 et sur celle figurant à l’annexe IX du règlement no 267/2012.

8        Le 16 octobre 2012 également, le Conseil a publié au Journal officiel un avis à l’attention de la personne à laquelle s’appliquent les mesures restrictives prévues dans la décision 2010/413, mise en œuvre par la décision 2012/635, et dans le règlement no 267/2012, mis en œuvre par le règlement d’exécution no 945/2012 (JO C 312, p. 21). Par cet avis, les personnes en question ont notamment été informées du fait qu’elles pouvaient envoyer au Conseil une demande de réexamen de l’inscription de leurs noms sur les listes en cause.

9        Par lettre du 8 décembre 2012, le requérant a contesté le bien‑fondé de l’inscription de son nom sur les listes en cause et a demandé au Conseil de procéder à un réexamen. Il a également demandé à avoir accès aux informations et aux preuves étayant ladite inscription.

10      Le 11 décembre 2012, le Conseil a publié au Journal officiel un avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues par la décision 2010/413 et par le règlement no 267/2012 (JO C 380, p. 7). Cet avis précisait que les personnes et entités en question pouvaient envoyer au Conseil, avant le 31 janvier 2013, leurs observations à prendre en considération aux fins du réexamen périodique de la liste des personnes et entités désignées.

11      Par lettre du 31 janvier 2013, envoyée en réponse à l’avis du 11 décembre 2012, le requérant a réitéré sa demande de réexamen.

12      Par lettre du 12 mars 2013, le Conseil a répondu à la demande d’accès au dossier du requérant, en lui communiquant une copie d’une proposition d’adoption des mesures restrictives datée du 19 septembre 2012 ainsi que des procès‑verbaux des réunions des instances préparatoires du Conseil.

13      Par lettre du 14 mars 2014, le Conseil a répondu à la lettre du requérant du 31 janvier 2013. Il a précisé que, selon lui, les mesures restrictives visant le requérant étaient toujours justifiées pour les raisons exposées dans la motivation des actes attaqués. Le Conseil a indiqué à cet égard que, selon des données publiées par le requérant, les exportations d’électricité dont il était responsable généraient des revenus substantiels.

 Procédure et conclusions des parties

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 décembre 2012, le requérant a introduit le présent recours.

15      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, les parties ont été invitées, par lettre du 30 septembre 2014, à répondre par écrit à certaines questions et à présenter certains documents. Le Conseil et le requérant ont présenté leurs réponses, respectivement, le 20 octobre et le 5 novembre 2014.

16      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal à l’audience du 25 novembre 2014.

17      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision 2012/635 et le règlement d’exécution no 945/2012, pour autant que ces actes le concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

18      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

19      Dans ses écritures, le Conseil a par ailleurs invoqué le fait que le présent recours était irrecevable, dans la mesure où le requérant, en tant que ramification du gouvernement iranien, n’avait pas qualité pour invoquer une violation de ses droits fondamentaux. Toutefois, le Conseil s’est désisté de cette fin de non‑recevoir lors de l’audience.

 En droit

20      Avant d’examiner les quatre moyens soulevés par le requérant au soutien de ses chefs de conclusions, il y a lieu d’examiner, d’office, la recevabilité du présent recours au regard du statut juridique du requérant.

 Sur la recevabilité du recours

21      En vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, un recours en annulation peut être introduit par « [t]oute personne physique ou morale ».

22      En l’espèce, il ressort de la réponse du requérant à une question du Tribunal que, en tant que ministère du gouvernement iranien, il n’est pas pourvu d’une personnalité juridique distincte de celle dudit gouvernement.

23      Toutefois, il ressort de la jurisprudence que, si le Conseil a estimé que le requérant avait une existence suffisante pour faire l’objet de mesures restrictives, la cohérence et la justice imposaient de reconnaître qu’il jouissait d’une existence suffisante pour contester ces mesures. Toute autre conclusion aurait pour résultat qu’une organisation pourrait être incluse dans la liste des entités visées par des mesures restrictives sans pouvoir former un recours contre cette inclusion (voir, par analogie, arrêt du 18 janvier 2007, PKK et KNK/Conseil, C‑229/05 P, Rec, EU:C:2007:32, point 112).

24      Il convient d’ajouter à cela que les mesures restrictives prévues par la décision 2010/413 et par le règlement no 267/2012 visent explicitement non seulement des « personnes », mais également des « entités et organismes ». Ainsi, la réglementation applicable envisage explicitement que les mesures restrictives puissent viser des entités qui ne sont pas pourvues d’une personnalité juridique propre.

25      Dans ces circonstances, pour que le présent recours soit recevable, il est nécessaire de démontrer que le requérant a réellement l’intention de l’introduire et que les avocats qui prétendent le représenter ont effectivement été mandatés à cette fin (voir, en ce sens, arrêt PKK et KNK/Conseil, point 23 supra, EU:C:2007:32, point 113).

26      À cet égard, le mandat donné à l’avocat représentant le requérant présenté devant le Tribunal a été signé par le ministre de l’Énergie, qui a confirmé à cette occasion qu’il disposait de la compétence pour accorder un tel mandat au nom du requérant.

27      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que le présent recours est recevable, nonobstant le fait que le requérant n’est pas pourvu de personnalité juridique distincte.

 Sur le fond

28      Le requérant invoque quatre moyens, tirés, le premier, d’une erreur d’appréciation, le deuxième, d’une violation de l’obligation de motivation, le troisième, d’une violation de ses droits de la défense et de son droit à une protection juridictionnelle effective et, le quatrième, d’une violation de ses droits fondamentaux et du principe de proportionnalité.

29      Il y a lieu d’examiner, d’abord, le deuxième moyen, avant d’examiner le troisième, puis le premier et, finalement, le quatrième moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

30      Le requérant soutient que les actes attaqués ne sont pas motivés à suffisance de droit.

31      Le Conseil conteste le bien‑fondé des arguments du requérant.

32      Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, qui constitue un corollaire du principe du respect des droits de la défense, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir arrêt du 15 novembre 2012, Conseil/Bamba, C‑417/11 P, Rec, EU:C:2012:718, point 49 et jurisprudence citée).

33      La motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre à l’intéressé de connaître les justifications des mesures prises et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir arrêt Conseil/Bamba, point 32 supra, EU:C:2012:718, point 50 et jurisprudence citée).

34      Dans la mesure où la personne concernée ne dispose pas d’un droit d’audition préalable à l’adoption d’une décision initiale de gel des fonds, le respect de l’obligation de motivation est d’autant plus important, puisqu’il constitue l’unique garantie permettant à l’intéressé, à tout le moins après l’adoption de cette décision, de se prévaloir utilement des voies de recours à sa disposition pour contester la légalité de ladite décision (arrêt Conseil/Bamba, point 32 supra, EU:C:2012:718, point 51).

35      Partant, la motivation d’un acte du Conseil imposant une mesure de gel des fonds doit identifier les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles le Conseil considère, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’appréciation, que l’intéressé doit faire l’objet d’une telle mesure (arrêt Conseil/Bamba, point 32 supra, EU:C:2012:718, point 52).

36      Cependant, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt Conseil/Bamba, point 32 supra, EU:C:2012:718, point 53 et jurisprudence citée).

37      En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt Conseil/Bamba, point 32 supra, EU:C:2012:718, point 54 et jurisprudence citée).

38      En l’espèce, le Conseil a retenu la motivation suivante à l’encontre du requérant :

« Responsable de la politique dans le secteur de l’énergie, qui fournit une source substantielle de revenus pour le gouvernement iranien. »

39      Premièrement, le requérant soutient que cette motivation ne permet pas d’identifier le critère que le Conseil a retenu pour adopter les mesures restrictives le visant. Ce critère n’aurait pas non plus été indiqué par la suite.

40      À cet égard, il est certes exact que la motivation fournie n’indique pas explicitement le critère retenu par le Conseil.

41      Toutefois, l’indication selon laquelle le requérant est responsable d’un secteur fournissant une source substantielle de revenus pour le gouvernement iranien, lue conjointement avec les dispositions de l’article 20, paragraphe 1, de la décision 2010/413 et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 267/2012, qui prévoient les différents critères permettant l’adoption des mesures restrictives visant une personne ou une entité, permet de déduire que le critère mis en œuvre en l’espèce par le Conseil est celui visant les entités apportant un appui audit gouvernement.

42      Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter le premier grief du requérant.

43      Deuxièmement, selon le requérant, les motifs fournis sont vagues en ce qu’ils n’indiquent pas, d’abord, la raison pour laquelle sa responsabilité dans la politique du secteur de l’énergie est pertinente au regard de l’adoption des mesures restrictives, ensuite, le type ou le montant des revenus concernés et, enfin, la pertinence de ces facteurs au regard de la prolifération nucléaire. Dans ce contexte, selon la jurisprudence, des motifs supplémentaires ne sauraient être présentés dans le cadre de la procédure devant le Tribunal.

44      À cet égard, tout d’abord, il convient de relever que la motivation des actes attaqués permet de comprendre que la responsabilité du requérant dans le secteur de l’énergie est pertinente en ce que ce secteur est, selon le Conseil, une source substantielle de revenus pour le gouvernement iranien. En effet, c’est cette circonstance qui permet de considérer, selon le Conseil, que le requérant apporte un appui audit gouvernement, ce qui justifie l’adoption des mesures restrictives le visant.

45      Ensuite, la motivation des actes attaqués est certes très succincte en ce qui concerne la nature des revenus en question, dès lors qu’elle se borne à préciser qu’ils relèvent du secteur de l’énergie. Il n’en demeure pas moins que, tant dans les lettres adressées au Conseil que dans la requête, le requérant a été en mesure de contester le bien‑fondé de l’inscription de son nom en faisant valoir, en particulier, que ses activités dans le domaine de l’énergie ne constituaient pas une source de revenus pour le gouvernement iranien, mais nécessitaient, au contraire, l’apport de fonds publics, sous forme de subventions. Dans ces circonstances, tout en admettant que des motifs plus détaillés auraient été préférables, il convient de conclure que la motivation fournie a permis au requérant de connaître, de manière suffisamment précise, la justification des mesures restrictives le visant et de la contester. De même, ladite motivation permet au Tribunal d’exercer le contrôle de légalité des actes attaqués.

46      Ce constat implique en outre que les précisions fournies par le Conseil dans le mémoire en défense quant à la nature et au montant des revenus concernés ne constituent pas une motivation a posteriori qui ne pourrait être prise en considération par le Tribunal, mais tendent à compléter la motivation déjà fournie.

47      Enfin, il y a lieu de relever que la pertinence de la fourniture des ressources financières au gouvernement iranien dans le contexte de la prolifération nucléaire ressort de manière suffisamment claire des considérants des textes sur lesquels sont fondées les mesures restrictives visant le requérant.

48      En effet, selon le considérant 13 de la décision 2012/35/PESC du Conseil, du 23 janvier 2012, modifiant la décision 2010/413 (JO L 19, p. 22), à laquelle renvoie le considérant 11 du règlement no 267/2012, « [l]es restrictions à l’admission et le gel des fonds et des ressources économiques devraient être appliquées à l’égard d’autres personnes et entités qui fournissent un appui au gouvernement iranien lui permettant de poursuivre des activités nucléaires posant un risque de prolifération ou la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires, en particulier les personnes et entités apportant un soutien financier, logistique ou matériel au gouvernement iranien ». Il ressort clairement de ce considérant que le gel des fonds des entités fournissant un appui au gouvernement iranien est motivé par la volonté de priver ce dernier des ressources, notamment financières, lui permettant de poursuivre la prolifération nucléaire.

49      Dans ces circonstances, il convient de rejeter le deuxième grief du requérant.

50      Troisièmement, selon le requérant, la motivation fournie par le Conseil n’explique pas pourquoi ses observations présentées devant ce dernier ont été écartées.

51      Or, ce grief est inopérant dans le cadre du présent moyen, étant donné que les observations auxquelles le requérant se réfère sont postérieures à l’adoption des actes attaqués et que le Conseil n’était donc pas en mesure, par hypothèse, d’y répondre dans la motivation desdits actes.

52      Au demeurant, il y a lieu de relever que, dans le cadre du troisième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense et du droit à une protection juridictionnelle effective, le requérant a soulevé un grief selon lequel le Conseil aurait méconnu ses observations. Le bien‑fondé de ce grief sera examiné aux points 67 à 77 ci‑après.

53      Dès lors, il y a lieu de rejeter également le troisième grief du requérant et, par voie de conséquence, le deuxième moyen dans son intégralité.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense et du droit à une protection juridictionnelle effective

54      Le requérant soutient que le Conseil a violé ses droits de la défense et son droit à une protection juridictionnelle effective.

55      Le Conseil conteste le bien‑fondé des arguments du requérant.

56      Premièrement, le requérant fait valoir qu’une violation des droits en question résulte de la violation par le Conseil de l’obligation de motivation.

57      Or, dans la mesure où le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, a été rejeté au point 53 ci‑dessus, ce grief ne saurait prospérer.

58      Deuxièmement, le requérant soutient que, nonobstant sa demande en ce sens, il n’a pas obtenu la communication des informations et des preuves étayant l’inscription de son nom sur les listes en cause. Dans ce contexte, le Conseil n’aurait pas invoqué de raisons concrètes s’opposant à la communication desdites informations et preuves.

59      À cet égard, il y a lieu de relever que, lorsque des informations suffisamment précises, permettant à l’entité intéressée de faire connaître utilement son point de vue sur les éléments retenus à sa charge par le Conseil, ont été communiquées, le principe du respect des droits de la défense n’implique pas l’obligation pour cette institution de donner spontanément accès aux documents contenus dans son dossier. Ce n’est que sur demande de la partie intéressée que le Conseil est tenu de donner accès à tous les documents administratifs non confidentiels concernant la mesure en cause (voir arrêt du 6 septembre 2013, Bank Melli Iran/Conseil, T‑35/10 et T‑7/11, Rec, EU:T:2013:397, point 84 et jurisprudence citée).

60      En l’espèce, le requérant a demandé à avoir accès au dossier le 8 décembre 2012. Le Conseil a répondu à sa demande le 12 mars 2013, en lui communiquant une copie d’une proposition d’adoption des mesures restrictives datée du 19 septembre 2012 ainsi que des procès‑verbaux des réunions des instances préparatoires du Conseil.

61      En outre, le Conseil a confirmé, en réponse à une question écrite posée par le Tribunal, que son dossier visant le requérant ne contenait pas d’autres éléments que ceux communiqués avec la réponse du 12 mars 2013. Pour sa part, le requérant n’a pas allégué l’existence de tels autres éléments.

62      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que le requérant a obtenu accès au dossier du Conseil, en conformité avec le principe du respect des droits de la défense, et de rejeter, par conséquent, son deuxième grief.

63      Troisièmement, le requérant soutient qu’il n’a pas eu l’occasion de faire valoir son point de vue avant l’adoption des mesures restrictives. Une fois lesdites mesures adoptées, sa capacité à présenter des observations aurait été sérieusement entravée par l’absence de communication des informations et des preuves étayant l’inscription de son nom sur les listes litigieuses.

64      Or, d’une part, selon la jurisprudence, le Conseil n’est pas tenu de communiquer au préalable à la personne ou à l’entité concernée les motifs sur lesquels cette institution entend fonder l’inclusion initiale de son nom dans la liste des personnes et entités dont les fonds sont gelés. En effet, une telle mesure, afin de ne pas compromettre son efficacité, doit, par sa nature même, pouvoir bénéficier d’un effet de surprise et s’appliquer immédiatement. Dans un tel cas, il suffit, en principe, que l’institution procède à la communication des motifs à la personne ou à l’entité concernée et ouvre le droit à l’audition de celle‑ci concomitamment avec ou immédiatement après l’adoption de la décision (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, Rec, EU:C:2011:853, point 61).

65      D’autre part, dans la mesure où le requérant a présenté, le 8 décembre 2012, ses observations au Conseil concomitamment avec sa demande d’accès au dossier, lesdites observations ne pouvaient pas, par définition, prendre en considération les éléments du dossier. Cela étant, après que l’accès au dossier a été accordé le 12 mars 2013, le requérant avait la possibilité d’adresser au Conseil des observations supplémentaires pour réagir aux éléments communiqués.

66      Partant, aucune violation des droits de la défense ne saurait être reprochée au Conseil en ce qui concerne la possibilité pour le requérant de formuler des observations, ce qui implique qu’il y a lieu de rejeter le troisième grief du requérant.

67      Quatrièmement, selon le requérant, le Conseil a méconnu les observations qu’il lui a effectivement présentées.

68      À cet égard, les dispositions de l’article 24, paragraphes 2 à 4, de la décision 2010/413 mentionnent :

« 2.      Lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne ou une entité les mesures visées à l’article 19, paragraphe 1, point b), et à l’article 20, paragraphe 1, point b), il modifie l’annexe II en conséquence.

3.      Le Conseil communique sa décision à la personne ou à l’entité visée […] en lui donnant la possibilité de présenter des observations.

4.      Si des observations sont formulées ou si de nouveaux éléments de preuve substantiels sont présentés, le Conseil revoit sa décision et en informe la personne ou l’entité. »

69      L’article 46, paragraphes 3 et 4, du règlement no 267/2012 prévoit des règles analogues en ce qui concerne l’inscription d’un nom dans l’annexe IX dudit règlement.

70      Il ressort de ces dispositions que le Conseil était tenu de revoir l’inscription du requérant à la lumière de ses observations des 8 décembre 2012 et 31 janvier 2013. En l’absence d’un délai exact, il y a lieu de considérer que cette révision devait avoir lieu dans un délai raisonnable. Cela étant, lors de l’examen du caractère raisonnable du délai écoulé, il convient de tenir compte du fait que, pour les raisons exposées au point 64 ci‑dessus, les observations en question constituaient la première opportunité pour le requérant de faire valoir son point de vue s’agissant du bien‑fondé de l’inscription de son nom sur les listes en cause, ce qui implique qu’il avait un intérêt particulier à ce que le Conseil procède à la révision et l’informe de son résultat.

71      En l’espèce, la lettre du Conseil du 14 mars 2014 constitue une réponse aux observations du requérant, auxquelles elle se réfère explicitement. Toutefois, elle a été envoyée plus de 15 mois après que le requérant a présenté ses premières observations, le 8 décembre 2012.

72      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que le Conseil a répondu aux observations du requérant dans un délai manifestement déraisonnable.

73      Cela étant, il y a lieu d’examiner si cette violation des droits de la défense du requérant justifie l’annulation des actes attaqués.

74      À cet égard, il convient de relever que l’objectif de l’obligation en question est d’assurer que les mesures restrictives visant une personne ou une entité sont justifiées au moment où elles sont adoptées, à la lumière des observations qu’elle a formulées.

75      Or, il ressort du point 71 ci‑dessus que la lettre du 14 mars 2014 répond à cette finalité.

76      Dans ces circonstances, l’objectif des dispositions prévoyant l’obligation du Conseil de répondre aux observations formulées par la personne ou l’entité visée a été respecté, quoique de manière tardive, et la violation commise par le Conseil ne produit donc plus d’effets néfastes sur la situation du requérant.

77      Partant, sans préjudice du droit du requérant de demander l’indemnisation du préjudice que, le cas échéant, il aurait subi du fait du retard pris par le Conseil dans l’exécution de l’obligation en question, en vertu de l’article 340 TFUE, il ne saurait se prévaloir du retard en question pour obtenir l’annulation des mesures restrictives le visant, adoptées en vertu des actes attaqués.

78      Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter le quatrième grief et, par voie de conséquence, le troisième moyen dans son intégralité.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation

79      Le requérant soutient que, dans la mesure où il ne répond à aucun des critères prévus par la décision 2010/413 et par le règlement no 267/2012 pour l’adoption des mesures restrictives, le Conseil a commis une erreur d’appréciation en ayant adopté de telles mesures à son égard.

80      Le Conseil conteste le bien‑fondé de l’argumentation du requérant.

81      Ainsi que la Cour l’a rappelé lors du contrôle de mesures restrictives, les juridictions de l’Union doivent, conformément aux compétences dont elles sont investies en vertu du traité FUE, assurer un contrôle, en principe complet, de la légalité de l’ensemble des actes de l’Union au regard des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union (voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Fulmen et Mahmoudian, C‑280/12 P, Rec, EU:C:2013:775, point 58 et jurisprudence citée).

82      Au rang de ces droits fondamentaux figure, notamment, le droit à une protection juridictionnelle effective (voir arrêt Conseil/Fulmen et Mahmoudian, point 81 supra, EU:C:2013:775, point 59 et jurisprudence citée).

83      L’effectivité du contrôle juridictionnel, garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, exige notamment que le juge de l’Union s’assure que l’acte en question, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernée, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous‑tend ledit acte, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur le point de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir ce même acte, sont étayés (voir, en ce sens, arrêt Conseil/Fulmen et Mahmoudian, point 81 supra, EU:C:2013:775, point 64 et jurisprudence citée).

84      À cette fin, il incombe au juge de l’Union de procéder à cet examen en demandant, le cas échéant, à l’autorité compétente de l’Union de produire des informations ou des éléments de preuve, confidentiels ou non, pertinents aux fins d’un tel examen (voir arrêt Conseil/Fulmen et Mahmoudian, point 81 supra, EU:C:2013:775, point 65 et jurisprudence citée).

85      C’est en effet à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien‑fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne concernée, et non à cette dernière d’apporter la preuve négative de l’absence de bien‑fondé desdits motifs (voir arrêt Conseil/Fulmen et Mahmoudian, point 81 supra, EU:C:2013:775, point 66 et jurisprudence citée).

86      En l’espèce, le requérant soutient, à titre liminaire, que le Conseil ne lui a jamais indiqué le critère qu’il avait retenu pour adopter les mesures restrictives le visant.

87      Or, ce grief a déjà été examiné et rejeté dans le cadre de l’examen du deuxième moyen. En effet, ainsi qu’il ressort des points 39 à 42 ci‑dessus, l’indication selon laquelle le requérant est responsable d’un secteur fournissant une source substantielle de revenus pour le gouvernement iranien, lue conjointement avec les dispositions de l’article 20, paragraphe 1, de la décision 2010/413 et de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 267/2012, lui permet de comprendre qu’il a été visé par des mesures restrictives sur le fondement du critère visant les entités apportant un appui au gouvernement iranien.

88      Par conséquent, il y a lieu de vérifier si c’est à juste titre que le Conseil a considéré que le requérant avait apporté un appui au gouvernement iranien.

89      Dans ce contexte, il ressort de la jurisprudence que le critère en question vise des activités propres à la personne ou à l’entité concernée qui, même si elles n’ont en tant que telles aucun lien direct ou indirect avec la prolifération nucléaire, sont cependant susceptibles de la favoriser, en fournissant au gouvernement iranien des ressources ou des facilités d’ordre matériel, financier ou logistique lui permettant de poursuivre les activités de prolifération. Ainsi, ledit critère vise les formes d’appui qui, par leur importance quantitative ou qualitative, contribuent à la poursuite des activités nucléaires iraniennes (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2014, National Iranian Oil Company/Conseil, T‑578/12, sous pourvoi, EU:T:2014:678, points 119 et 120). Son objectif consiste à priver le gouvernement iranien de ses sources de revenus, en vue de le contraindre à cesser le développement de son programme de prolifération nucléaire, faute de ressources financières suffisantes (arrêt National Iranian Oil Company/Conseil, précité, sous pourvoi, EU:T:2014:678, point 140).

90      En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que le requérant est impliqué, en tant que ministère du gouvernement iranien, dans les activités d’exportation d’électricité, en particulier en ce qu’il encaisse les sommes payées par les acheteurs de l’électricité exportée. La valeur des exportations en question était de 0,67 milliard de dollars des États‑Unis (USD) entre mars 2009 et mars 2010, de 0,87 milliard de USD entre mars 2010 et mars 2011 et de 1,1 milliard de USD entre mars 2011 et mars 2012.

91      Au vu de ces constats, il y a lieu de considérer que les activités du requérant dans le domaine de l’exportation d’électricité fournissent une source de revenus au gouvernement iranien et, partant, constituent un appui à ce dernier, sous forme de soutien financier.

92      Le requérant objecte néanmoins que, de par ses attributions et du fait qu’il fournit ses services à des prix réglementés sur le marché iranien, il est un bénéficiaire net des fonds du gouvernement, plutôt qu’une source de revenus importants pour celui‑ci. Il ajoute, dans ce contexte, que les fonds générés par l’exportation d’électricité sont utilisés, notamment, pour subventionner la fourniture d’électricité aux citoyens iraniens.

93      Or, le fait que le requérant fournisse des services d’intérêt public déficitaires n’implique pas que ses activités d’exportation d’électricité ne puissent être qualifiées de soutien financier au gouvernement iranien, ni ne puissent, par conséquent, justifier l’adoption des mesures restrictives le visant.

94      En effet, les activités du requérant liées à l’exportation d’électricité se distinguent de ses autres attributions, en ce qu’elles ne constituent pas un service d’intérêt public fourni à la population iranienne. Dès lors, il n’existe pas de lien intrinsèque entre l’ensemble des activités et attributions du requérant qui exigerait qu’elles soient examinées globalement. Tel est d’autant plus le cas que, ainsi qu’il ressort des éléments du dossier, les ressources financières générées par les activités d’exportation d’électricité ne sont pas soumises à une affectation budgétaire particulière.

95      De même, le fait de limiter la qualification d’entité apportant un soutien financier au gouvernement iranien aux seules entités dont les activités sont profitables dans leur globalité permettrait un contournement du but des mesures restrictives en question et affecterait ainsi leur efficacité. En effet, pour éviter l’application desdites mesures, il suffirait de conférer à chaque entité concernée, outre des compétences et activités génératrices de ressources, des compétences et activités déficitaires d’un montant comparable.

96      En outre, le gel des fonds du requérant, motivé par ses activités d’exportation d’électricité, correspond à l’objectif évoqué au point 89 ci‑dessus et consistant à priver le gouvernement iranien de ses sources de revenus, et ce indépendamment du caractère déficitaire des autres activités du requérant. En effet, en raison dudit gel, le gouvernement iranien, dont le requérant constitue une partie intégrante, est privé de la jouissance d’une partie des ressources financières nécessaires pour assurer l’ensemble de ses activités, en ce compris celles situées en dehors du ressort du requérant et liées à la prolifération nucléaire.

97      Par voie de conséquence, la question essentielle pour apprécier si le requérant apporte un soutien financier au gouvernement iranien n’est pas sa profitabilité globale, mais le caractère profitable ou non de ses activités d’exportation d’électricité. Or, le requérant ne conteste pas que lesdites activités sont profitables.

98      Dans ces circonstances, il convient de constater que le requérant a apporté un appui au gouvernement iranien, sous forme de soutien financier, indépendamment du fait que ses activités sont, le cas échéant, globalement déficitaires. En outre, au vu des indications figurant au point 90 ci‑dessus, le soutien en question ne saurait être qualifié de négligeable, nonobstant l’allégation du requérant selon laquelle il ne constitue qu’une part minime du budget du gouvernement iranien.

99      Par conséquent, le Conseil n’a pas commis d’erreur en visant le requérant par des mesures restrictives du fait qu’il est une entité apportant un appui au gouvernement iranien.

100    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’allégation du requérant selon laquelle le Conseil n’aurait pas valablement étayé les motifs retenus à son égard.

101    À cet égard, il ressort de l’examen mené aux points 89 à 99 ci‑dessus que le requérant ne conteste pas la circonstance factuelle essentielle retenue par le Conseil à son égard, à savoir le fait que ses activités génèrent des ressources financières qui sont à la disposition du gouvernement iranien, mais la pertinence de cette circonstance au regard du critère juridique mis en œuvre par le Conseil. Or, en l’absence d’une contestation, le Conseil n’était pas tenu d’apporter des éléments de preuve pour étayer le bien‑fondé de la circonstance factuelle en question, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 85 ci‑dessus.

102    En dernier lieu, le requérant conteste être responsable de la formulation de la politique nucléaire de l’Iran, contrairement à ce que suggèrent des éléments du dossier du Conseil.

103    À cet égard, il est certes exact que la proposition du 19 septembre 2012 et le document du Conseil du 17 janvier 2013 portant la référence « Coreu PESC/0711/12 COR 1 », figurant au dossier de ce dernier, se réfèrent au rôle du requérant dans le cadre de la politique nucléaire de l’Iran.

104    Toutefois, d’une part, au vu de la motivation des actes attaqués, il y a lieu de relever que l’argument du requérant vise une circonstance qui n’a pas été retenue par le Conseil lors de leur adoption. Ledit argument doit donc être rejeté comme inopérant.

105    D’autre part, en tout état de cause, il ressort de l’examen mené ci‑dessus que le motif tiré de ce que le requérant apporte un appui au gouvernement iranien est fondé. Étant donné que ce motif est suffisant, à lui seul, pour justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes litigieuses, l’inexactitude d’autres allégations éventuelles du Conseil n’est pas susceptible d’affecter la légalité des actes attaqués, conformément à la jurisprudence citée au point 83 ci‑dessus.

106    Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le premier moyen.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation des droits fondamentaux du requérant et du principe de proportionnalité

107    Le requérant soutient que, en adoptant les mesures restrictives le visant, le Conseil a restreint, de façon disproportionnée, ses droits fondamentaux, dont le droit de propriété, le droit d’exercer une activité économique et le droit au respect de sa réputation.

108    Premièrement, il explique que les mesures restrictives le visant ont des conséquences graves, notamment en ce qu’elles affectent l’exercice de ses fonctions, cruciales pour la santé et le bien‑être du peuple iranien. Or, lesdites mesures ne seraient ni nécessaires ni proportionnées pour atteindre l’objectif consistant à empêcher la prolifération nucléaire et son financement, étant donné que le requérant n’est pas impliqué dans cette dernière. En effet, l’approche du Conseil justifierait le gel des fonds de tout ministère du gouvernement iranien, indépendamment de ses liens avec le programme nucléaire, ce qui serait manifestement disproportionné.

109    Deuxièmement, le requérant estime que les mesures restrictives le visant violent les principes de sécurité juridique et de prévisibilité. En effet, selon le requérant, dans la mesure où il n’apporte pas de soutien financier au gouvernement iranien, lesdites mesures sont fondées sur le simple fait qu’il est un ministère de ce dernier. Or, dans ces circonstances, le requérant ne disposerait d’aucun moyen de savoir comment obtenir le retrait desdites mesures.

110    Troisièmement, une violation du principe de proportionnalité découlerait également de la violation des droits procéduraux du requérant.

111    Le Conseil conteste le bien‑fondé des arguments du requérant.

112    À titre liminaire, en ce qui concerne l’argument exposé au point 110 ci‑dessus, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort des points 30 à 78 ci‑dessus, les actes attaqués ne sont pas entachés d’une violation des droits procéduraux du requérant justifiant leur annulation. Dans ces circonstances, la thèse défendue par le requérant selon laquelle la violation de ses droits procéduraux entraînerait une violation du principe de proportionnalité ne saurait davantage aboutir à l’annulation des actes attaqués.

113    S’agissant des autres griefs, il y a lieu de rappeler que, en vertu du principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, la légalité de l’interdiction d’une activité économique est subordonnée à la condition que les mesures d’interdiction soient appropriées et nécessaires à la réalisation des objectifs légitimement poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (voir arrêt Bank Melli Iran/Conseil, point 59 supra, EU:T:2013:397, point 179 et jurisprudence citée).

114    Or, d’une part, ainsi qu’il a déjà été rappelé ci‑dessus, selon la jurisprudence, le gel des fonds des entités apportant un appui au gouvernement iranien vise à priver ce dernier de ses sources de revenus, en vue de le contraindre à cesser le développement de son programme de prolifération nucléaire, faute de ressources financières suffisantes (arrêt National Iranian Oil Company/Conseil, point 89 supra, sous pourvoi, EU:T:2014:678, point 140). Ainsi, les mesures restrictives visant le requérant correspondent à l’objectif poursuivi par le Conseil, nonobstant le fait qu’il n’est pas lui‑même impliqué dans la prolifération nucléaire.

115    D’autre part, si le requérant fait valoir que les mesures restrictives le visant ont des répercussions graves sur lui, notamment en ce qui concerne la volonté des sociétés iraniennes de coopérer avec lui dans le domaine de la purification et de l’assainissement de l’eau, il n’a pas étayé ses allégations par des éléments de preuve ou des informations concrètes.

116    En tout état de cause, il est certes exact que les droits du requérant, dont notamment le droit de propriété, sont restreints de façon considérable par lesdites mesures, dès lors qu’il ne peut, notamment, ni disposer de ses fonds situés sur le territoire de l’Union ou détenus par les ressortissants de cette dernière, ni transférer ses fonds vers l’Union, sauf en vertu d’autorisations particulières.

117    Toutefois, il ressort de la jurisprudence que les droits fondamentaux invoqués par le requérant ne sont pas des prérogatives absolues et que leur exercice peut faire l’objet de restrictions justifiées par des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union. Ainsi, toute mesure restrictive économique ou financière comporte, par définition, des effets qui affectent notamment les droits de propriété, causant ainsi des préjudices à des parties dont la responsabilité quant à la situation ayant conduit à l’adoption des mesures en cause n’a pas été établie. L’importance des objectifs poursuivis par la réglementation litigieuse est de nature à justifier des conséquences négatives, même considérables, pour certains opérateurs (voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2009, Melli Bank/Conseil, T‑246/08 et T‑332/08, Rec, EU:T:2009:266, point 111 et jurisprudence citée).

118    En l’espèce, étant donné l’importance primordiale du maintien de la paix et de la sécurité internationale, les inconvénients causés au requérant ne sont pas démesurés par rapport aux buts visés. Tel est d’autant plus le cas que, d’une part, ces restrictions ne concernent qu’une partie des actifs du requérant et que, d’autre part, la décision 2010/413 et le règlement no 267/2012 prévoient certaines exceptions au gel des fonds des entités visées par des mesures restrictives.

119    En dernier lieu, il y a lieu de relever que l’argument tiré d’une prétendue violation des principes de sécurité juridique et de prévisibilité est fondé sur une prémisse erronée. En effet, ainsi qu’il ressort de l’examen du premier moyen, le requérant n’a pas été visé par des mesures restrictives du seul fait qu’il serait un ministère du gouvernement iranien, mais en raison du soutien financier qu’il a apporté à ce dernier. Dans ces circonstances l’argument du requérant ne saurait prospérer.

120    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen et, par voie de conséquence, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

121    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Conseil.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Ministry of Energy of Iran est condamné aux dépens.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 septembre 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.