Language of document : ECLI:EU:T:2012:589

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

8 novembre 2012 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale Nutriskin Protection Complex – Motifs absolus de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 – Pratique décisionnelle de l’OHMI – Obligation de motivation – Article 75 du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑415/11,

Paul Hartmann AG, établie à Heidenheim an der Brenz (Allemagne), représentée par Me N. Aicher, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mmes K. Klüpfel et A. Poch, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 26 mai 2011 (affaire R 1524/2010-1), concernant une demande d’enregistrement du signe Nutriskin Protection Complex comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. S. Papasavvas, (rapporteur) président, Mme K. Jürimäe et M. K. O’Higgins, juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 1er août 2011,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 26 octobre 2011,

à la suite de l’audience du 12 septembre 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 31 mars 2010, la requérante, Paul Hartmann AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Nutriskin Protection Complex.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 3 et 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits médicinaux pour le soin des cheveux » ;

–        classe 5 : « Produits pharmaceutiques ; produits chimiques à usage hygiénique pour la protection, le soin et le nettoyage de la peau ; produits médicinaux de soin de la peau ».

4        Par décision du 29 juin 2010, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009.

5        Le 5 août 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009 contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 26 mai 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours au motif que le signe demandé était descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement. En substance, la chambre de recours a relevé que le signe verbal Nutriskin Protection Complex serait compris par le public pertinent comme désignant un produit (ou un complexe) contribuant à la nutrition et à la protection de la peau. Ainsi, ledit signe aurait un effet descriptif de la fonction des produits visés par la demande d’enregistrement. En outre, la chambre de recours a considéré que l’expression « nutriskin protection complex » avait une signification claire par rapport aux produits demandés en ce qu’elle fait concrètement référence à leur destination et à leur contenu. Ainsi, elle ne serait pas propre à les distinguer en fonction de leur provenance et serait, dès lors, dépourvu de caractère distinctif.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens, y compris ceux exposés dans le cadre de la procédure devant la chambre de recours.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

9        L’OHMI considère que la requête ne respecte pas les exigences de recevabilité. Il fait valoir que la requérante omet de mentionner une norme juridique sur le fondement de laquelle elle forme son recours et ne fait pas clairement et expressément grief d’une violation d’une norme juridique du règlement n° 207/2009 par la décision attaquée. Ainsi, l’argumentation de la requérante ne serait pas suffisamment claire pour que l’OHMI puisse identifier sans difficultés la règle de droit spécifique sur laquelle celle-ci fonde ses griefs et les moyens invoqués par elle.

10      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit contenir l’indication de l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Ces précisions doivent être suffisamment claires pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (arrêts du Tribunal du 29 janvier 1998, Dubois et Fils/Conseil et Commission, T‑113/96, Rec. p. II‑125, point 29 ; du 10 avril 2003, Travelex Global and Financial Services et Interpayment Services/Commission, T‑195/00, Rec. p. II-1677, point 26, et du 10 mai 2006, Galileo International Technology e.a./Commission, T‑279/03, Rec. p. II‑1291, point 36).

11      Cependant, il ressort également de la jurisprudence qu’un requérant n’est pas tenu d’indiquer explicitement la règle de droit spécifique sur laquelle il fonde son grief, à condition que son argumentation soit suffisamment claire pour que la partie adverse et le juge communautaire puissent identifier sans difficultés cette règle (arrêts du Tribunal Galileo International Technology e.a./Commission, précité, point 47, et du 30 septembre 2009, JOOP!/OHMI (!), T‑75/08, non publié au Recueil, point 17).

12      En l’espèce, il y a lieu de constater que la requête ne précise pas sur quelle norme juridique le recours est formé, ne contient pas d’exposé sommaire des moyens invoqués et n’indique pas expressément de motifs de recours au sens du règlement n° 207/2009.

13      Toutefois, il convient, d’une part, de considérer que le présent recours a été introduit sur la base de l’article 65, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, étant donné qu’il a pour objet l’annulation d’une décision d’une chambre de recours de l’OHMI au sens dudit article.

14      D’autre part, il y a lieu de constater que les différents moyens invoqués par la requérante peuvent être déduits du contenu de la requête. Il ressort, d’ailleurs, du mémoire en réponse de l’OHMI que ce dernier a également pu identifier tant la base juridique que les différents moyens invoqués et les arguments avancés par la requérante, et y répondre.

15      Il s’ensuit que la requête apporte des précisions suffisantes pour permettre au Tribunal et à l’OHMI d’identifier le fondement juridique du recours ainsi que les moyens invoqués et correspond ainsi aux exigences de précision susmentionnées.

16      Le recours doit, dès lors, être déclaré recevable.

 Sur le fond

17      À l’appui de son recours, la requérante soulève, en substance, trois moyens, tirés, le premier, d’une application erronée de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, le deuxième, du non-respect de la pratique décisionnelle de l’OHMI et d’un défaut de motivation à cet égard et, le troisième, d’une application erronée de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Sur le premier moyen, tiré d’une application erronée de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009

18      La requérante fait valoir, en substance, que, en considérant que le signe demandé était descriptif des produits visés par la demande d’enregistrement, la chambre de recours a fait une application erronée de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. Elle soutient que l’élément « nutriskin » du signe demandé constitue un néologisme dont la somme des composantes forme un terme qui, en raison du caractère inhabituel de sa combinaison, ne crée pas d’impression directement descriptive. La requérante fait également valoir que l’OHMI n’a pas pu constater un usage descriptif du terme « nutriskin » par rapport aux produits visés et que, dès lors, l’allégation d’une aptitude descriptive dudit terme serait purement spéculative. Ainsi, on ne saurait déduire de la signification descriptive des autres éléments du signe, « protection » et « complex », une signification descriptive du signe dans son ensemble.

19      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

20      Il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que, selon l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques descriptives, à savoir les marques composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir pour désigner les caractéristiques des catégories de produits ou de services pour lesquelles l’enregistrement est demandé. Ce faisant, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications descriptives des catégories de produits ou services pour lesquelles l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que de tels signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque [arrêts de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, points 29 à 31 ; du Tribunal du 12 juin 2007, MacLean‑Fogg/OHMI (LOKTHREAD), T‑339/05, non publié au Recueil, point 27, et du 10 février 2010, O2 (Germany)/OHMI (Homezone), T‑344/07, Rec. p. II‑153, point 20].

21      Seules les indications directement descriptives sont refusées à l’enregistrement en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. À cet égard, il n’est cependant pas nécessaire que le signe visé par la demande d’enregistrement soit déjà connu en tant qu’indication descriptive, mais il suffit qu’il puisse être utilisé à de telles fins. L’examinateur n’a lui non plus pas à prouver que le signe demandé est déjà communément utilisé dans les communications commerciales et, notamment, publicitaires. Un signe verbal doit ainsi se voir opposer un refus d’enregistrement si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou services concernés (arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 32).

22      Pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [arrêts du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II-2383, point 25, et LOKTHREAD, précité, point 29].

23      En outre, pour qu’une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot résultant d’une combinaison d’éléments soit considérée comme descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il ne suffit pas qu’un éventuel caractère descriptif soit constaté pour chacun de ces éléments. Un tel caractère doit également être constaté pour le néologisme ou le mot composé lui-même (arrêts PAPERLAB, précité, point 26 ; LOKTHREAD, précité, point 30, et Homezone, précité, point 26).

24      Selon la jurisprudence, une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif des caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé, est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits ou services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sauf s’il existe un écart perceptible entre le néologisme ou le mot et la simple somme des éléments qui le composent. Cela suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le néologisme ou le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime la somme desdits éléments (arrêt PAPERLAB, précité, point 27, et, par analogie, arrêt de la Cour du 12 février 2004, Campina Melkunie, C‑265/00, Rec. p. I-1699, point 39 à 41). À cet égard, l’analyse du terme en cause au vu des règles lexicales et grammaticales appropriées est également pertinente [arrêts du Tribunal du 12 novembre 2008, EOS/OHMI (PrimeCast), T‑373/07, non publié au Recueil, point 20, et Homezone, précité, point 27].

25      En l’espèce, il y a lieu de constater, en premier lieu, qu’il n’est pas contesté que le public pertinent est composé, d’une part, du public général, et notamment des consommateurs finaux des produits visés par la demande d’enregistrement normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés, et, d’autre part, du public spécialisé du domaine du soin des cheveux, de la peau et du corps, et du domaine pharmaceutique. Étant donné que, ainsi que la chambre de recours l’a relevé, le signe verbal demandé est une expression composée de mots anglais, la compréhension du public anglophone est déterminante, conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009. Enfin, en tenant compte du type de produits faisant l’objet de la procédure, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que le public pertinent en l’espèce a un degré d’attention moyen.

26      En deuxième lieu, il doit être relevé que le signe demandé se compose de trois éléments. Les deux derniers, « protection » et « complex », font partie du vocabulaire de base de la langue anglaise et ont un sens descriptif direct, non contesté par la requérante. S’agissant de l’élément « nutriskin », il y a lieu de constater, ainsi que l’a fait la chambre de recours, qu’il constitue un néologisme composé des termes « nutri » et « skin ». La requérante conteste le caractère descriptif dudit élément.

27      Il convient de relever, tout d’abord, que le terme « skin » est le mot anglais pour peau et que le terme « nutri » doit être compris comme faisant référence à la nutrition, en ce que le public pertinent l’apercevra comme une abréviation du mot nutrition et d’autres mots de sens similaire provenant du verbe latin « nutrire ». Ensuite, il faut constater qu’il n’existe pas de différence notable entre le néologisme « nutriskin » et la simple somme de ses composantes descriptives, « nutri » et « skin ». Il s’ensuit que l’élément « nutriskin » sera perçu par le public pertinent anglophone comme signifiant « nutrition de la peau » et désignera, ainsi, des produits de nutrition de la peau. L’argument de la requérante selon lequel l’élément « nutriskin » signifie « peau de l’alimentation » et est, dès lors, descriptif des produits contenant de la peau, qui ne sont pas visés par la demande d’enregistrement, ne peut être accueilli. En effet, la signification du signe demandé doit être appréciée par rapport aux produits concernés, qui sont en l’espèce des produits de soin des cheveux et de la peau. Ainsi, il faut examiner la signification que le terme « nutriskin » pourrait avoir pour le public pertinent en relation avec les produits en cause. À cet égard, il y a lieu de constater que ledit terme ne pourra pas être perçu par le public pertinent comme désignant des produits contenant de la peau. Au contraire, ce terme, en relation avec les produits revendiqués, sera compris par ledit public comme une description d’une caractéristique des produits de soin des cheveux et de la peau, à savoir leur fonction de nourrir la peau. Cette signification descriptive de l’élément « nutriskin » est, en outre, renforcée par les deux éléments, également descriptifs, qui complètent le signe, à savoir « protection » et « complex ».

28      Il ressort de ce qui précède que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le terme « nutriskin » est descriptif des produits visés par la demande d’enregistrement en ce qu’il représenterait pour le public pertinent une référence à la fonction desdits produits de nourrir la peau.

29      En troisième lieu, s’agissant de l’appréciation globale du signe demandé, il faut relever tout d’abord qu’il ressort de l’analyse figurant aux points 26 à 28 ci-dessus que celui-ci est composé de trois éléments descriptifs. Il convient de remarquer, ensuite, que, vu en son entier, le signe Nutriskin Protection Complex n’est pas inhabituel dans sa structure. En effet, la juxtaposition de ses éléments correspond aux règles de grammaire de la langue anglaise. Enfin, il y a lieu de constater que, pris dans sa globalité, le signe demandé ne crée pas, auprès du public pertinent, une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple juxtaposition des éléments descriptifs qui le composent pour en modifier le sens ou la portée.

30      Ainsi, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que l’une des significations possibles du signe demandé serait celle d’un produit ou d’un complexe contribuant à protéger la peau en la soignant (ou en la nourrissant) et que le rapport entre cette signification et les produits désignés par la demande d’enregistrement est suffisamment direct et concret, permettant au public pertinent de reconnaître directement et sans réflexion supplémentaire une description des produits ou l’une de leurs caractéristiques, et que, par conséquent, le signe demandé est descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

31      Enfin, s’agissant du grief tiré de l’absence d’usage descriptif du signe demandé, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence (voir point 21 ci-dessus), l’OHMI n’est pas tenu de prouver que le signe verbal demandé est effectivement utilisé comme indication descriptive. Il suffit au contraire que le signe puisse servir à cette fin et qu’un tel usage puisse raisonnablement être attendu à l’avenir. Le grief de la requérante à ce sujet doit donc être rejeté.

32      Eu égard à ce qui précède, le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré du non-respect de la pratique décisionnelle de l’OHMI et d’un défaut de motivation à cet égard

33      La requérante fait valoir, en substance, que des critères trop stricts ont arbitrairement été appliqués aux fins de l’appréciation du caractère distinctif de sa demande d’enregistrement par rapport à d’autres marques similaires qui ont bénéficié d’un enregistrement. La chambre de recours n’aurait, d’ailleurs, pas examiné les décisions contraires expressément citées par la requérante et n’aurait pas expliqué pourquoi une décision divergente semblait justifiée en l’espèce.

34      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

35      À titre liminaire, il y a lieu de constater que, dans sa requête, la requérante fait grief à l’application de critères trop stricts à l’appréciation du caractère distinctif du signe demandé. Or, il convient de remarquer que les arguments qu’elle avance à ce sujet sont présentés dans le cadre de son exposé sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et qu’il ressort du contexte de son argumentation à cet égard que celle-ci concerne l’appréciation du caractère descriptif du signe. Ainsi, il y a lieu de considérer que la requérante se réfère à l’appréciation du caractère descriptif et non pas distinctif du signe demandé, ce qu’elle a d’ailleurs confirmé lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal.

36      S’agissant, en premier lieu, des arguments tirés du non-respect de la pratique décisionnelle de l’OHMI, il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que ce dernier est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union. Si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’OHMI doit prendre en considération les décisions prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit, toutefois, être conciliée avec le respect du principe de légalité. Ainsi, la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, non encore publié au Recueil, points 73 à 77, et la jurisprudence citée).

37      En l’espèce, la chambre de recours a conclu que le signe demandé était descriptif sur la base d’un examen strict et complet en tenant compte des produits visés par la demande d’enregistrement et de la perception du public pertinent. Ainsi qu’il a été relevé dans le cadre de l’analyse du Tribunal sur le premier moyen (voir points 20 à 31 ci-dessus), la chambre de recours a constaté à juste titre que l’enregistrement du signe demandé en tant que marque communautaire se heurtait au motif de refus de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. Contrairement aux allégations de la requérante, l’appréciation du signe visé par sa demande d’enregistrement n’a pas été faite sur la base de critères trop stricts, mais de manière conforme à la jurisprudence, sur la base d’une interprétation et d’une application correctes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

38      Partant, dès lors que la légalité de la décision attaquée concernant le caractère enregistrable du signe demandé en tant que marque communautaire est établie directement sur la base de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il ressort de la jurisprudence (voir point 36 ci-dessus) qu’elle ne peut pas être remise en cause du simple fait que la chambre de recours n’aurait pas suivi en l’espèce la pratique décisionnelle de l’OHMI.

39      S’agissant, en second lieu, des arguments concernant la motivation de la décision attaquée, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 75 du règlement nº 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Ainsi, lorsque l’OHMI refuse l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire, il doit, pour motiver sa décision, indiquer le motif de refus, absolu ou relatif, qui s’oppose à cet enregistrement ainsi que la disposition dont ce motif est tiré et exposer les circonstances factuelles qu’il a retenues comme étant prouvées et qui, selon lui, justifient l’application de la disposition invoquée [arrêt du Tribunal du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec. p. II-1927, point 46].

40      Toutefois, il ne saurait être exigé des chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir arrêt Mozart, précité, point 55).

41      À cet égard, il y a lieu de relever que la chambre de recours a indiqué dans sa décision que l’enregistrement du signe demandé devait être refusé en raison de son caractère descriptif, conformément à la disposition de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, et a exposé les circonstances factuelles justifiant l’application de ladite disposition. Ainsi, par sa motivation, la décision attaquée a permis, d’une part, à la requérante de connaître les raisons de la conclusion adoptée et, d’autre part, au Tribunal de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle. En outre, la chambre de recours n’était pas tenue de répondre spécifiquement aux arguments de la requérante, tirés des solutions adoptées dans le cadre des décisions portant sur des marques similaires, ces décisions n’ayant aucune influence sur l’adoption de la décision attaquée.

42      Il s’ensuit que la décision attaquée contient une motivation suffisante et conforme aux exigences posées par la jurisprudence de l’Union énoncées aux points 39 et 40 ci-dessus.

43      Eu égard à ce qui précède, il convient de rejeter le deuxième moyen dans son intégralité.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une application erronée de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

44      La requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours a constaté sur la base d’une appréciation erronée que le signe demandé était dépourvu de caractère distinctif. Elle relève que, contrairement aux allégations de la chambre de recours, le signe demandé n’est pas descriptif, que son utilisation par des tiers en relation avec des produits similaires ne constitue pas un usage descriptif et qu’un effet de surprise n’est pas requis pour lui attribuer un caractère distinctif. La chambre de recours ayant conclu à l’absence de caractère distinctif sur la base de ces arguments sans invoquer d’autres motifs, elle aurait conclu à tort à l’existence d’un motif de refus conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

45      L’OHMI conteste ces arguments.

46      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, il suffit qu’un des motifs absolus de refus qui y sont énumérés s’applique pour qu’un signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [voir arrêts de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I-7561, point 29, et du Tribunal du 26 octobre 2000, Community Concepts/OHMI (Investorworld), T‑360/99, Rec. p. II-3545, point 26, et la jurisprudence citée].

47      Or, il découle de l’examen du premier moyen que c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que le signe demandé était descriptif des produits concernés et qu’il ne pouvait, dès lors, être enregistré en tant que marque communautaire, se heurtant au motif absolu de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

48      Il s’ensuit que le présent moyen est inopérant.

49      Au vu de tout ce qui précède, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

50      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Paul Hartmann AG est condamnée aux dépens.

Papasavvas

Jürimäe

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 novembre 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.