Language of document : ECLI:EU:T:2023:784

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

6 décembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne verbale cyberscan – Motifs absolus de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 – Rapport suffisamment direct et concret avec les produits et services visés par la demande de marque – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑85/23,

DGC Switzerland AG, établie à Zurich (Suisse), représentée par Me N. Medler, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Eberl, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. Kornezov (rapporteur), président, K. Kecsmár et Mme S. Kingston, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, DGC Switzerland AG, demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 19 décembre 2022 (affaire R 1587/2022-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 23 novembre 2021, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal cyberscan.

3        La marque demandée désignait les produits et services relevant des classes 9, 42 et 45 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Fichiers multimédia téléchargeables ; rapports électroniques téléchargeables ; rapports statistiques téléchargeables ; logiciels ; logiciels pour la gestion des systèmes informatiques » ;

–        classe 42 : « Services informatiques ; services liés aux réseaux informatiques ; établissement de rapports électroniques relatifs aux systèmes informatiques ; établissement de rapports techniques relatifs aux statistiques dans le domaine des systèmes informatiques ; fourniture de rapports électroniques relatifs aux systèmes informatiques ; fourniture de rapports statistiques relatifs aux systèmes informatiques ; services techniques de téléchargement de données numériques ; conseil en technologies de l’information ; recherche ; soutien technique et conseil en systèmes informatiques ; services d’assistance aux utilisateurs de systèmes informatiques ; programmation dans le domaine des technologies de l’information ; conception, développement et mise en œuvre de logiciels ; maintenance et mise à jour de logiciels ; adaptation de logiciels ; conception, développement, réalisation, maintenance, mise à jour et adaptation de logiciels pour la gestion de systèmes informatiques ; logiciels en tant que service [SaaS] et location de logiciels ; fourniture en ligne de logiciels non téléchargeables ; fourniture en ligne de logiciels non téléchargeables pour la gestion de systèmes informatiques ; logiciels en tant que service [SaaS] avec logiciels de gestion de systèmes informatiques » ;

–        classe 45 : « Fourniture d’informations sur les exigences en matière de conformité ».

4        Par décision du 28 juin 2022, l’examinateur a rejeté, pour l’ensemble des produits et services visés au point 3 ci-dessus, la demande d’enregistrement de ladite marque, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), le signe en cause étant considéré comme descriptif et non distinctif pour les produits et les services visés par la demande de marque.

5        Le 22 août 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de l’examinateur.

6        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que la marque demandée était descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et qu’elle était dépourvue de caractère distinctif au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        « renvoyer l’affaire devant l’examinateur » ;

–        « autoriser la publication de la demande [d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal cyberscan] pour l’ensemble des produits et services revendiqués, conformément à l’article 44 du règlement 2017/1001 ».

8        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal : 

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens si une audience est organisée.

 En droit

9        La requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001

10      La requérante fait valoir que, contrairement à ce qu’il a été considéré dans la décision attaquée, la marque demandée ne se heurtait pas au motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 pour l’ensemble des produits et services visés au point 3 ci-dessus.

11      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

12      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, à désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, l’article 7, paragraphe 1, est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union européenne.

13      Pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêt du 2 décembre 2020, BSH Hausgeräte/EUIPO (Home Connect), T‑152/20, non publié, EU:T:2020:584, point 15 et jurisprudence citée].

14      L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [voir arrêt du 25 octobre 2005, Peek & Cloppenburg/OHMI (Cloppenburg), T‑379/03, EU:T:2005:373, point 37 et jurisprudence citée].

15      L’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 ne dépend pas de l’existence d’un impératif de disponibilité concret, actuel et sérieux au profit des tiers [voir arrêt du 26 janvier 2022, Meta Cluster/EUIPO (Clustermedizin), T‑233/21, non publié, EU:T:2022:27, point 42 et jurisprudence citée].

16      En l’espèce, la requérante ne conteste pas la définition du public pertinent retenue par la chambre de recours, selon laquelle, en substance, l’ensemble des produits et services en cause s’adresse tant au grand public qu’au public spécialisé dans le domaine des technologies de l’information, le niveau d’attention de ceux-ci variant respectivement de moyen à élevé. En outre, selon la chambre de recours, étant donné que les éléments verbaux de la marque demandée, « cyber » et « scan », sont issus de la langue anglaise, il convient de fonder l’appréciation de l’aptitude à la protection de la marque demandée sur le public anglophone de l’Union.

17      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner l’argumentation de la requérante.

 Sur la signification de la marque demandée

18      La requérante conteste la signification de la marque demandée retenue dans la décision attaquée. Elle fait valoir essentiellement que cyberscan est une combinaison atypique des deux mots la composant, à savoir « cyber » et « scan ». Ces mots seraient utilisés habituellement avec d’autres mots et n’auraient pas de sens clair et dépourvu d’ambiguïté. En outre, le terme « cyberscan » ne relèverait pas du langage courant, ce qui rendrait ce signe fantaisiste et original ainsi qu’ambigu.

19      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

20      Tout d’abord, la chambre de recours a relevé, aux points 18 à 22 et 24 de la décision attaquée, que la marque demandée était composée des éléments verbaux juxtaposés « cyber » et « scan ».

21      Ensuite, elle a constaté que le mot « cyber » signifiait, selon la définition donnée par l’Oxford English Dictionary, « découlant de, en rapport avec ou impliquant des ordinateurs, la réalité virtuelle ou l’[I]nternet (ou la culture liée aux ordinateurs, à la réalité virtuelle ou à l’[I]nternet) ; futuriste » [of, relating to, or involving (the culture of) computers, virtual reality, or the internet ; futuristic].

22      Elle a indiqué, en outre, que le mot « scan » signifiait « scanner, balayer à l’aide d’un scanner, rechercher ».

23      Enfin, la chambre de recours a considéré que le terme « cyberscan » n’avait pas de signification au-delà de la signification issue de l’association des deux mots le composant, à savoir « cyber » et « scan », d’autant plus que l’élément verbal « cyber » venait en l’occurrence concrétiser le second élément « scan ». Ainsi, la marque demandée serait comprise par le public pertinent comme signifiant que « l’on recherche quelque chose sur l’[I]nternet ou dans le monde de l’[I]nternet, par exemple en ce qui concerne d’éventuelles altérations non souhaitées, grâce à l’utilisation de matériel informatique et/ou de logiciels, bref que l’on effectue une sorte de recherche d’erreurs ».

24      À cet égard, premièrement, il convient de relever que, contrairement à ce que suggère la requérante, les mots « cyber » et « scan » comportent chacun une signification claire et dépourvue d’ambiguïté.

25      Le fait que ces mots puissent avoir également d’autres significations, comme l’allègue la requérante, n’est pas pertinent pour autant qu’un signe doit se voir opposer un refus d’enregistrement si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés (arrêt du 2 décembre 2020, Home Connect, T‑152/20, non publié, EU:T:2020:584, point 22).

26      Deuxièmement, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la chambre de recours a considéré à juste titre que la signification de la marque demandée prise dans son ensemble dérivait clairement et directement de la simple juxtaposition des éléments verbaux la composant.

27      Par ailleurs, les éléments verbaux « cyber » et « scan » sont des mots couramment employés en anglais qui, pris ensemble, ont exactement le même sens que l’expression composée des mêmes mots non accolés. Ces combinaisons sont construites de façon cohérente et immédiatement perceptible par le public pertinent. Contrairement à ce que prétend la requérante, cette combinaison n’est ni inhabituelle ni particulièrement surprenante [voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2009, Euro-Information/OHMI (CYBERCREDIT e.a.), T‑211/06, T‑213/06, T‑245/06, T‑155/07 et T‑178/07, non publié, EU:T:2009:160, point 35].

28      Troisièmement, à supposer même que, comme l’allègue la requérante, la désignation des produits et services en cause suppose l’utilisation de la forme grammaticale « scanning » et non pas « scan », il convient de rappeler que le fait que le signe en cause soit doté d’une structure grammaticalement incorrecte n’est pas suffisant, en lui‑même, pour conclure à l’absence de caractère descriptif [voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 2017, Mühlbauer Technology/EUIPO (Magicrown), T‑218/16, non publié, EU:T:2017:334, point 31 et jurisprudence citée].

29      Enfin, le fait, avancé par la requérante, que le terme « cyberscan » ne fasse pas partie du langage courant ou qu’il ne soit pas « lexicalement attesté » demeure sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. En effet, d’une part, pour que l’EUIPO oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il n’est pas nécessaire que le signe en cause soit effectivement utilisé, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives ; il suffit qu’il puisse être utilisé à de telles fins (voir arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 38 et jurisprudence citée).

30      D’autre part, il ressort d’une jurisprudence constante que, pour refuser l’enregistrement d’un signe sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, l’EUIPO n’a pas l’obligation de prouver que le signe dont l’enregistrement en tant que marque de l’Union européenne est demandé figure dans les dictionnaires [voir, en ce sens, arrêt du 17 mars 2021, Steinel/EUIPO (MobileHeat), T‑226/20, non publié, EU:T:2021:148, point 32 et jurisprudence citée].

31      Il s’ensuit que la chambre de recours a considéré à juste titre que la marque demandée sera comprise par le public pertinent comme signifiant, en substance, que l’on recherche quelque chose sur l’Internet ou dans le monde de l’Internet, par exemple en ce qui concerne d’éventuelles altérations non souhaitées, grâce à l’utilisation de matériel informatique ou de logiciels.

32      Partant, les arguments de la requérante visant à contester la signification du signe cyberscan, retenue par la chambre de recours, doivent être rejetés.

 Sur l’existence d’un rapport suffisamment direct et concret entre la marque demandée et les produits et les services en cause

33      La requérante soutient que la chambre de recours a considéré, à tort, que la marque demandée possédait un caractère descriptif au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 par rapport aux produits et services en cause.

34      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

35      En premier lieu, s’agissant des produits en cause, relevant de la classe 9, la chambre de recours a constaté, au point 32 de la décision attaquée, que la marque demandée désignait, en substance, leur nature et leur destination. Ainsi, ces produits seraient des composants logiciels utilisés dans le cadre d’une recherche par balayage sur l’Internet afin d’éviter la présence d’éventuelles altérations non souhaitées affectant des systèmes informatiques. Le terme « cyberscan » informerait le public pertinent, en outre, que ces composants logiciels téléchargeables pourraient être trouvés sur l’Internet et serviraient à la gestion de systèmes informatiques généralement connectés à l’Internet.

36      Premièrement, la requérante reproche à la chambre de recours de s’être référée dans la décision attaquée uniquement aux « logiciels », omettant ainsi de prendre en considération les autres produits relevant de la classe 9.

37      Cet argument de la requérante procède d’une lecture partielle de la décision attaquée. En effet, d’une part, la chambre de recours a rappelé, au point 31 de la décision attaquée, la jurisprudence selon laquelle elle pouvait se limiter à une motivation globale lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services présentant entre eux un rapport suffisamment direct et concret au point qu’ils forment une catégorie ou un groupe de produits ou de services suffisamment homogène [voir arrêt du 9 mars 2022, Telefónica Germany/EUIPO (LOOP), T‑132/21, non publié, EU:T:2022:124, point 88 et jurisprudence citée].

38      D’autre part, la chambre de recours a relevé que l’ensemble des produits en cause, relevant de la classe 9, consistaient, en substance, en différents composants logiciels qui pouvaient être téléchargés sur l’Internet ou utilisés pour des systèmes informatiques.

39      Sur cette base, elle a considéré que l’ensemble des produits en cause, compris dans la classe 9, relevaient d’un même groupe de produits, ce qui lui permettait de fournir une motivation globale à leur égard.

40      Or, la requérante ne conteste ni que l’ensemble de ces produits appartenait au même groupe de produits à l’égard desquels, conformément à la jurisprudence, la chambre de recours pouvait fournir une motivation globale, ni que lesdits produits s’apparentaient, en substance, à différents composants logiciels qui pouvaient être téléchargés sur l’Internet ou utilisés pour des systèmes informatiques.

41      Deuxièmement, il y a lieu d’écarter l’argument de la requérante selon lequel les « [f]ichiers multimédias téléchargeables ; rapports électroniques téléchargeables ; rapports statistiques téléchargeables » n’auraient pas de lien direct avec l’Internet et selon lequel aucun processus de « recherche active » ne serait revendiqué par ces produits.

42      Conformément à la jurisprudence citée au point 14 ci-dessus, l’appréciation du caractère descriptif d’un signe est opérée par rapport aux produits ou aux services concernés. Ce caractère descriptif est avéré lorsque le signe en cause sert, dans le commerce, à désigner notamment la destination du produit en cause. Ainsi, eu égard à la signification de la marque demandée retenue au point 31 ci-dessus, la chambre de recours a conclu à juste titre que cette marque informerait le public pertinent immédiatement, et sans autre réflexion, que les « [f]ichiers multimédias téléchargeables ; rapports électroniques téléchargeables ; rapports statistiques téléchargeables » sont destinés à être utilisés dans le cadre d’une recherche, par exemple d’éventuelles altérations non souhaitées d’un système informatique donné, grâce à l’utilisation de matériel informatique ou de logiciels, et ce dans un milieu connecté, à travers l’Internet.

43      Par ailleurs, l’indication « téléchargeables » dans la description des produits en cause indique, contrairement à ce que maintient la requérante, que ces produits sont accessibles précisément en ligne, à distance, moyennant une connexion à Internet.

44      Le fait que les produits en cause puissent avoir d’autres destinations est dénué de pertinence. En effet, selon la jurisprudence, le fait qu’un signe soit descriptif quant à une partie seulement des produits ou des services relevant d’une catégorie mentionnée en tant que telle dans la demande d’enregistrement n’empêche pas que ce signe soit refusé à l’enregistrement. En effet, si, dans un tel cas, le signe en question était enregistré en tant que marque de l’Union européenne pour la catégorie visée, rien n’empêcherait son titulaire de l’utiliser également pour les produits ou les services de cette catégorie pour lesquels il est descriptif (arrêt du 17 mars 2021, MobileHeat, T‑226/20, non publié, EU:T:2021:148, point 39).

45      Troisièmement, en ce qui concerne les « logiciels, logiciels pour la gestion des systèmes informatiques », relevant de la classe 9, la requérante fait valoir que la demande d’enregistrement ne vise pas un « logiciel destiné à effectuer une recherche d’erreurs sur l’Internet », mais plutôt un logiciel devant être utilisé dans le cadre de la gestion de systèmes informatiques internes à une entreprise  et ne présentant donc pas de lien impératif avec le « cyberespace » et le « monde de l’Internet ».

46      Cet argument doit être rejeté aux mêmes motifs que ceux invoqués aux points 42 et 44 ci-dessus. En effet, à supposer même que certains logiciels soient utilisés exclusivement dans le cadre de la gestion de systèmes informatiques internes à une entreprise et de manière déconnectée à un réseau quelconque, il n’en demeure pas moins que les logiciels en général et les logiciels pour la gestion des systèmes informatiques en particulier sont habituellement utilisés à l’aide d’une connexion à l’Internet.

47      En deuxième lieu, s’agissant des services en cause, relevant de la classe 42, la chambre de recours a considéré, en substance, au point 34 de la décision attaquée, qu’ils consistaient dans la création des conditions techniques et technologiques nécessaires au développement, à la conception, à la mise à jour et à la maintenance des systèmes informatiques et que, dès lors, il existait un lien suffisamment direct et concret entre la signification de la marque demandée et cette destination possible de l’ensemble de ces services.

48      Premièrement, la requérante soutient qu’aucun lien concret et direct ne serait établi entre les services d’« établissement de rapports électroniques relatifs aux systèmes informatiques ; [d’]établissement de rapports techniques relatifs aux statistiques dans le domaine des systèmes informatiques ; [de] fourniture de rapports électroniques relatifs aux systèmes informatiques ; [de] fourniture de rapports statistiques relatifs aux systèmes informatiques ; [de] recherche », relevant de la classe 42, et la signification de la marque demandée. Ainsi, cette dernière ne serait pas descriptive de la qualité ou de l’usage desdits services.

49      À cet égard, le Tribunal considère que la chambre de recours a considéré à juste titre que les services en cause consistaient dans la création des conditions techniques et technologiques nécessaires au développement, à la conception, à la mise à jour et à la maintenance des systèmes informatiques. Ainsi, la chambre de recours pouvait conclure, sans commettre d’erreur d’appréciation, que le public pertinent comprendrait, immédiatement et sans réflexion, que le terme « cyberscan » décrivait que ces services consistaient essentiellement dans la recherche, par balayage sur Internet, d’éventuelles altérations non souhaitées d’un système informatique donné et la production de différents types de rapports résultant de cette recherche électronique. Or, la requérante n’avance aucun argument concret susceptible de remettre en cause cette conclusion.

50      Deuxièmement, s’agissant des services de « soutien technique et [de] conseil en systèmes informatiques ; [des] services d’assistance aux utilisateurs de systèmes informatiques ; [de] conception, [de] développement, [de] réalisation, [de] maintenance, [de] mise à jour et [d’]adaptation de logiciels pour la gestion de systèmes informatiques ; [de] fourniture en ligne de logiciels non téléchargeables pour la gestion de systèmes informatiques ; [de] logiciels en tant que service [SaaS] avec logiciels de gestion de systèmes informatiques », relevant de la classe 42, la requérante fait valoir qu’ils ne présentent pas de lien « impératif » avec le « cyberespace » et le « monde de l’Internet ».

51      Cet argument doit être rejeté pour les mêmes motifs, mutatis mutandis, que ceux relevés aux points 42 et 44 ci-dessus, étant précisé que le terme « cyberscan » serait compris par le public pertinent, comme l’a considéré en substance la chambre de recours, en tant qu’indication des caractéristiques inhérentes et objectives de ces services, à savoir des solutions informatiques relatives à la recherche, par balayage sur Internet, d’erreurs dans le cadre d’un système informatique donné, ou bien de solutions à cet égard qui sont accessibles notamment à distance, à travers l’Internet. Par ailleurs, ces services sont habituellement utilisés grâce à une connexion à l’Internet.

52      Troisièmement, force est de constater que la requérante se borne à affirmer que la marque demandée ne serait pas descriptive des autres services en cause, relevant de la classe 42, à savoir les « services techniques de téléchargement de données numériques ; [de] conseil en technologies de l’information ; [de] programmation dans le domaine des technologies de l’information ; [de] conception, [de] développement et [de] mise en œuvre de logiciels ; [de] maintenance et [de] mise à jour de logiciels ; [d’]adaptation de logiciels ; [de] logiciels en tant que service [SaaS)]et [de] location de logiciels ; [de] fourniture en ligne de logiciels non téléchargeables », sans pour autant avancer d’arguments concrets à cet égard. Dans ces circonstances, cet argument est voué au rejet.

53      En troisième lieu, s’agissant des services relevant de la classe 45, invoqués dans la demande d’enregistrement, à savoir la « [f]ourniture d’informations sur les exigences en matière de conformité », la chambre de recours a relevé que ceux-ci comprenaient la mise à disposition d’informations sur les prescriptions et le respect des dispositions légales dans les entreprises. À cet égard, elle a considéré qu’il existait un lien suffisamment concret et direct entre la marque demandée et ces services dans la mesure où la recherche de dispositions légales et réglementaires sur l’Internet constituait une pratique courante.

54      La requérante conteste cette conclusion en faisant valoir que lesdits services ne seraient pas dénommés « cyberscan » par le public pertinent et que ceux-ci ne consisteraient pas dans des recherches par balayage sur l’Internet ou dans des recherches d’erreurs sur l’Internet.

55      À cet égard, ainsi qu’il découle, en substance, de la décision attaquée (voir point 3, septième tiret, de celle-ci), le terme « cyberscan » est à même d’indiquer directement et concrètement que les services de fourniture d’informations sur les exigences en matière de conformité peuvent consister dans la fourniture d’informations résultant d’une recherche de failles de sécurité ou de vulnérabilités d’un système informatique en ligne, ou par l’Internet, relatives, par exemple, aux exigences légales en termes de conformité concernant la collecte ou la protection d’informations à caractère personnel, des normes de sécurité applicables dans le milieu d’Internet ou autres.

56      De surcroît, dans la mesure où la requérante fait valoir que le public pertinent ne désignerait pas ces services par le terme « cyberscan », il suffit de rappeler que, conformément à la jurisprudence citée au point 29 ci-dessus, il n’est pas nécessaire que le signe en cause soit effectivement utilisé, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives ; il suffit qu’il puisse être utilisé à de telles fins.

57      Partant, les arguments de la requérante visant à contester les conclusions de la chambre de recours en ce qui concerne le caractère descriptif du signe en cause par rapport aux produits et services en cause, relevant des classes 9, 42 et 45, doivent être rejetés comme non fondés. 

 Sur les enregistrements antérieurs

58      Il convient de relever, dans la mesure où la requérante allègue que la chambre de recours se serait écartée d’une pratique antérieure, que les décisions que l’EUIPO est conduit à prendre en vertu du règlement 2017/1001 relèvent de l’exercice d’une compétence liée, et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base dudit règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (voir arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65 et jurisprudence citée).

59      Certes, l’EUIPO est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union, y compris les principes d’égalité de traitement et de bonne administration. Eu égard à ces deux principes, l’EUIPO doit prendre en considération, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, les décisions qu’il a déjà adoptées sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes devant toutefois être conciliée avec le respect de la légalité (voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 73 à 75 et jurisprudence citée).

60      En outre, ni les chambres de recours ni le Tribunal ne sauraient être liés par les décisions d’organes de première instance. Il serait, en effet, contraire à la mission de contrôle de la chambre de recours, telle que définie aux articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, de voir sa compétence réduite au respect de décisions émanant d’organes de première instance de l’EUIPO [arrêt du 9 novembre 2016, Smarter Travel Media/EUIPO (SMARTER TRAVEL), T‑290/15, non publié, EU:T:2016:651, point 73].

61      Or, en l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 18 à 57 ci-dessus, la chambre de recours a conclu, à juste titre, que la marque demandée se heurtait au motif de refus tiré de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, de telle sorte que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’EUIPO, d’autant plus que, en l’occurrence, aucun des enregistrements des marques de l’Union européenne ne correspond à celle en cause dans la présente affaire et que la quasi-totalité des enregistrements mentionnés dans la requête émanent d’organes de première instance de l’EUIPO qui ne sauraient lier la chambre de recours, conformément à la jurisprudence rappelée au point 60 ci-dessus.

62      Enfin, quant à l’invocation par la requérante d’un enregistrement du signe cyberscan par l’Institut fédéral suisse de la propriété intellectuelle, il convient de rappeler que l’EUIPO et, le cas échéant, le juge de l’Union, ne sont pas liés par une décision intervenue au niveau d’un État membre, voire dans un pays tiers, admettant le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque nationale [voir, en ce sens, arrêt du 27 septembre 2018, Carbon System Verwaltungs/EUIPO (LIGHTBOUNCE), T‑825/17, non publié, EU:T:2018:615, point 43 et jurisprudence citée].

63      Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le premier moyen du recours comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

64      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a considéré, à tort, que le signe en cause était dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

65      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, il suffit qu’un des motifs absolus de refus s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne (voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, EU:C:2002:506, point 29).

66      Par conséquent, dès lors que, ainsi que cela ressort de l’examen du premier moyen, le signe en cause revêt un caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et que ce motif justifie à lui seul le refus d’enregistrement, il n’est pas nécessaire, en l’espèce, d’examiner le bien-fondé du moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement [voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2018, Addiko Bank/EUIPO (STRAIGHTFORWARD BANKING), T‑9/18, non publié, EU:T:2018:827, point 38 et jurisprudence citée].

67      Il s’ensuit qu’il y a lieu, sans qu’il soit besoin d’examiner la recevabilité des deuxième et troisième chefs de conclusions de la requérante, de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

68      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

69      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas d’une phase orale de la procédure. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Kornezov

Kecsmár

Kingston

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 décembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.