Language of document : ECLI:EU:T:2011:598

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

18 octobre 2011 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative LINE – Marques nationales verbale et figurative antérieures Line – Refus partiel d’enregistrement – Motifs relatifs de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑449/08,

SLV Elektronik GmbH, établie à Übach-Palenberg (Allemagne), représentée par MC. König, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme R. Manea, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Angel Jiménez Muñoz, demeurant à Gelida (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 18 juillet 2008 (affaire R 759/2007‑4), relative à une procédure d’opposition entre Angel Jiménez Muñoz et SLV Elektronik GmbH,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood (rapporteur), président, F. Dehousse et J. Schwarcz, juges,

greffier: M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 2 octobre 2008,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 22 janvier 2009,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 18 août 2003, la requérante, SLV Elektronik GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 11 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Lampes fonctionnant sur secteur, appareils et installations d’éclairage, appareils pour effets de scène utilisant la technique des lumières ; lampes électriques ; pièces détachées des articles précités ; machines à produire de la fumée ».

4        La demande d’enregistrement a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 29/2004, du 19 juillet 2004.

5        Le 18 octobre 2004, M. Angel Jiménez Muñoz (ci‑après l’« opposant ») a formé opposition contre l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits, en raison d’un prétendu risque de confusion, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009], en invoquant les marques suivantes :

–        la marque espagnole verbale n° 1074785 LINE, enregistrée le 21 octobre 1985 pour des produits relevant de la classe 9 ;

–        la marque espagnole figurative n° 2284949, enregistrée le 5 février 2001 pour des services relevant de la classe 38, telle que reproduite ci‑après :

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–        la marque espagnole n° 2482951 pour la même marque figurative, enregistrée le 5 novembre 2002 pour des services relevant de la classe 35 ;

–        la marque espagnole n° 2482952 pour la même marque figurative, enregistrée le 5 novembre 2002 pour les services « assemblage, installation, réparation, entretien et nettoyage de panneaux lumineux » relevant de la classe 37.

6        L’opposition était basée sur les produits et les services susmentionnés couverts par les marques antérieures et était dirigée contre tous les produits visés par la demande d’enregistrement.

7        Le 29 mars 2007, la division d’opposition a adopté une décision aux termes de laquelle elle a accueilli l’opposition, rejeté la demande de marque communautaire dans son intégralité et condamné la requérante aux dépens. Cette décision repose, selon l’explication même de la division d’opposition, sur la comparaison entre la marque demandée et la marque figurative antérieure n° 2482952 pour des services compris dans la classe 37.

8        La requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition le 16 mai 2007. Dans son mémoire du 25 juillet 2007 exposant les motifs du recours devant la chambre de recours de l’OHMI, la requérante a restreint la liste des produits de la manière suivante :

« Lampes fonctionnant sur secteur, appareils et installations d’éclairage, appareils pour effets de scène utilisant la technique des lumières ; lampes électriques ; pièces détachées des articles précités ; machines à produire de la fumée ; tous les articles précités à l’exclusion de panneaux lumineux ».

9        La quatrième chambre de recours de l’OHMI a, par décision du 18 juillet 2008 (ci-après la « décision attaquée »), annulé la décision de la division d’opposition dans la mesure où il a été fait droit à l’opposition également pour ce qui concerne le produit « machines à produire de la fumée » de la classe 11. Pour le reste, la décision de la division d’opposition a été maintenue.

10      En particulier, la chambre de recours a confirmé le raisonnement ainsi que les conclusions de la division d’opposition à l’égard de la similitude entre les signes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, qui fait naître un risque de confusion. Elle s’est fondée sur l’élément verbal « line » que les deux marques ont en commun et qu’elle considère comme l’élément dominant.

11      Également, la chambre de recours a considéré les « lampes fonctionnant sur secteur, appareils et installations d’éclairage, appareils pour effets de scène utilisant la technique des lumières ; lampes électriques ; pièces détachées des articles précités ; tous les produits susmentionnés à l’exception des panneaux lumineux » de la marque communautaire demandée comme similaires aux services de l’opposant relatifs à des panneaux lumineux, les deux étant basés sur l’émission de lumière, tout en reconnaissant que les produits de la requérante et les services de l’opposant ne sont pas de même nature.

12      En revanche, elle a jugé que, pour les « machines à produire de la fumée », en dépit de la similitude entre les marques, il n’existe aucune similitude entre les produits et les services qui justifierait une constatation générale d’un risque de confusion.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, dans la mesure où elle refuse l’enregistrement de la marque demandée n° 003316908 pour des « lampes fonctionnant sur secteur, appareils et installations d’éclairage, appareils pour effets de scène utilisant la technique des lumières ; lampes électriques ; pièces détachées des articles précités » ;

–        condamner l’OHMI aux dépens de la procédure devant le Tribunal.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      À titre liminaire, il convient de rappeler que les panneaux lumineux ont été exclus par la requérante des produits pour lesquels l’enregistrement de la marque communautaire est demandé et que le rejet de l’opposition en ce qui concerne les « machines à produire de la fumée » comprises dans la classe 11 n’est plus contesté devant le Tribunal.

16      Au soutien de son moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, la requérante avance deux griefs. En premier lieu, la requérante s’oppose à une similitude, constatée par la chambre de recours, entre les produits de la marque demandée et les produits auxquels se rapportent les services de la marque enregistrée sous le numéro 2482952. Elle conteste, en second lieu, les avis de la chambre de recours et de l’OHMI, selon lesquels il existe une similitude visuelle, phonétique et conceptuelle entre la marque figurative antérieure enregistrée sous le numéro 2482952 et la marque demandée.

17      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

18      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée [voir arrêt du Tribunal du 17 février 2011, Formula One Licensing/OHMI – Global Sports Media (F1‑LIVE), T‑10/09, non encore publié au Recueil, point 26, et la jurisprudence citée].

19      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

20      Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêts du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 41, et la jurisprudence citée, et F1‑LIVE, précité, point 25].

21      Pour refuser l’enregistrement d’une marque communautaire, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 existe, comme en l’espèce, dans une partie de la Communauté [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 76, et la jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

22      Selon l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, c’est au regard de l’esprit du public pertinent du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée que le risque de confusion doit être apprécié. Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a apprécié ce risque par rapport au public pertinent espagnol, la marque antérieure prise en compte par la chambre de recours étant une marque espagnole.

23      S’agissant du public pertinent et de son niveau d’attention, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits ou de services concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêts du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée, et du 8 février 2011, Lan Airlines/OHMI – Air Nostrum (LINEAS AEREAS DEL MEDITERRANEO LAM), T‑194/09, non encore publié au Recueil, point 20].

24      Au point 13 des motifs de la décision attaquée, la chambre de recours considère, dans la mesure où la plupart des produits et des services en question sont destinés au consommateur moyen, comme public pertinent le consommateur espagnol moyen, par rapport auquel l’existence d’un risque de confusion et, en particulier, la perception des signes doivent être appréciées.

25      Toutefois, cette appréciation est remise en cause par la requérante. Dans son mémoire du 25 juillet 2007 par lequel elle a motivé son recours contre la décision du 29 mars 2007 de la division d’opposition et, à nouveau, dans sa requête, elle fait valoir qu’il y a des différences considérables en ce qui concerne la clientèle. Alors que les produits de la marque demandée s’adressent principalement à des particuliers, les panneaux lumineux constituent des produits qui ne visent précisément pas les particuliers, mais exclusivement des professionnels qui veulent faire de la publicité ou des établissements publics.

26      Dans son mémoire en réponse, l’OHMI indique pour sa part que, eu égard aux produits et services concernés, il y a lieu de considérer que le public pertinent est constitué, d’une part, des consommateurs moyens espagnols et, d’autre part, d’un public spécialisé qui utilise les appareils et installations d’éclairage ou panneaux lumineux ou éclairants ainsi que les services connexes.

27      En tenant compte de la spécification relativement large des produits en cause en l’espèce couverts par la marque demandée, il convient de constater que, en ce qui concerne la grande majorité des produits relevant de la classe 11, les acheteurs et les utilisateurs sont composés des consommateurs espagnols moyens. Cela vaut notamment pour les « lampes fonctionnant sur secteur, appareils et installations d’éclairage, appareils pour effets de scène utilisant la technique des lumières ; lampes électriques ; pièces détachées des articles précités ; tous les produits susmentionnés à l’exception des panneaux lumineux ». En revanche, la marque antérieure espagnole enregistrée sous le numéro 2482952 en cause vise des services d’« assemblage, installation, réparation, maintenance et nettoyage de panneaux lumineux ». En règle générale, le consommateur moyen n’achète pas de panneaux lumineux et, par voie de conséquence, n’a pas besoin des services destinés aux acheteurs et utilisateurs de ces produits. Ces services sont dès lors réservés à un public spécialisé qui constitue donc le public pertinent pour les besoins de l’analyse au regard de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

28      Il s’ensuit qu’il y a lieu d’apprécier, contrairement à l’avis de la chambre de recours, le risque de confusion en prenant en compte un niveau d’attention plus élevé que la moyenne, puisque ce public spécialisé est susceptible de manifester un degré d’attention plus élevé que la moyenne lors du choix des produits et des services en cause [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 avril 2005, Faber Chimica/OHMI – Nabersa (Faber), T‑211/03, Rec. p. II‑1297, point 24, et la jurisprudence citée].

29      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu de considérer la comparaison des produits et des services, et le risque de confusion.

 Sur la comparaison des produits et des services

30      La requérante conteste la similitude des produits et des services en cause. Selon elle, en s’appuyant sur la caractéristique que tous les produits en cause ont en commun d’émettre de la lumière, la chambre de recours néglige complètement le fait que les produits en question aient des destinations et des fonctions totalement différentes. En outre, il n’y aurait aucune concordance en matière de commercialisation, la clientèle serait différente et ce ne seraient pas les mêmes entreprises qui proposent la vente des panneaux lumineux et celle des produits de la marque demandée.

31      La requérante ajoute que, même dans l’hypothèse où l’on admettrait une similitude entre les panneaux lumineux et les produits de la marque demandée, les services relatifs aux panneaux lumineux n’entrent effectivement pas en ligne de compte pour les produits de la marque demandée, la prestation de tels services étant tellement peu usuelle que le public concerné ne les connaît pas dans le contexte des produits de la marque demandée.

32      L’OHMI conteste les arguments de la requérante. En soulignant qu’il faut tenir compte de tous les facteurs pertinents pour le rapport entre les produits et les services, l’OHMI souligne la complémentarité des produits de la marque demandée et des services de la marque antérieure. En effet, la similitude dépendrait, compte tenu du rapport de complémentarité, de la question de savoir, d’une part, si les services sont effectivement en rapport avec des produits relevant de la même catégorie que celle visée par la marque demandée et, d’autre part, s’il est courant, dans le secteur du marché pertinent, que ces services soient fournis par le fabricant.

33      L’OHMI fait valoir que la classe 11 couvre, par le terme générique « installations d’éclairage », les panneaux lumineux, que ceux-ci et les produits de la marque demandée sont hautement similaires dans la mesure où tous ces produits émettent de la lumière et que le public pertinent a l’habitude que les services de la marque antérieure soient fournis par les mêmes entreprises que celles qui fournissent les produits concernés.

34      L’appréciation erronée de la requérante résulterait d’une conception trop étroite des produits en limitant ceux-ci à des objets d’aménagement domestique et en concevant les panneaux lumineux/éclairants comme étant uniquement des panneaux routiers et publicitaires.

35      À propos de cette argumentation, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits et les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt easyHotel, précité, point 45, et la jurisprudence citée].

36      À la lumière de cette jurisprudence, il n’est pas contesté, en l’occurrence, que la nature des produits est différente de celle des services en cause, ainsi que l’a déjà relevé la chambre de recours au point 20 de la décision attaquée. L’OHMI renvoie dans ce contexte au caractère fongible des produits visés par la marque demandée et au caractère non fongible des services offerts par l’opposant [arrêts du Tribunal du 24 septembre 2008, Oakley/OHMI – Venticinque (O STORE), T‑116/06, Rec. p. II‑2455, point 47, et du 15 février 2011, Yorma’s/OHMI – Norma Lebensmittelfilialbetrieb (YORMA’S), T‑213/09, non encore publié au Recueil, point 34].

37      En ce qui concerne les facteurs avancés par la requérante, tels que la fonction des produits respectifs, leur commercialisation et la clientèle, ceux-ci font, à première vue, obstacle à la constatation de la chambre de recours selon laquelle les produits de la marque demandée et les services visés par la marque espagnole antérieure sont similaires.

38      Quant à la fonction des produits visés par la marque demandée et des panneaux lumineux, l’OHMI met tout d’abord en exergue l’ambiguïté de la requête en ce que celle-ci utilise des expressions allemandes telles que « leuchtende Schilder » (panneaux lumineux/éclairants) et « beleuchtete Schilder » (panneaux éclairés) sans en faire la différence ni même en donner une définition. Toutefois, l’OHMI retient, à la fin de son examen, à juste titre, que les services de la marque antérieure visent des panneaux ou inscriptions qui émettent de la lumière. En effet, d’une part, cela ressort des documents présentés par l’opposant devant la division d’opposition. D’autre part, dans le cas d’un panneau éclairé, il ne s’agit en principe que d’un dispositif par lequel le panneau est éclairé par une lampe externe qui dirige sa lumière sur la surface de celui-ci, mais pas d’un panneau qui émet lui-même de la lumière. Or, pour un tel dispositif, la nécessité des services particuliers tels que ceux visés par la marque espagnole antérieure ne paraît pas vraiment évidente.

39      Dans ce contexte, la requérante a relevé, à juste titre, qu’il ne peut pas être méconnu que les produits de la marque demandée ont une fonction différente des panneaux lumineux, les premiers étant destinés à éclairer leur environnement, les deuxièmes à mettre en lumière une signalisation, une enseigne ou un message publicitaire. Ainsi, en raison de leur fonction, les produits de la marque demandée et les panneaux lumineux relèvent, en principe, de marchés différents.

40      Par ailleurs, en critiquant une conception trop étroite des produits, l’OHMI a, d’une certaine manière, contesté que les produits de la marque demandée sont commercialisés de manière différente, habituellement dans des magasins de meubles ou dans des magasins spécialisés dans ce type de produits, en tout état de cause, spécialisés dans les équipements pour les logements ou dans les équipements pour les zones extérieures des propriétés. À tout le moins, d’une part, les appareils pour effets de scène utilisant la lumière ne s’achèteraient pas dans des magasins de meubles ou de lampes classiques et il existerait, d’autre part, des panneaux lumineux/éclairants de petit format pour usage domestique, par exemple, sous la forme d’imitation de néons publicitaires ou de veilleuses sur secteur.

41      À ce propos, il convient de constater une absence dans le dossier d’éléments qui pourraient établir que ces deux derniers produits, à savoir les appareils pour effets de scène et les panneaux lumineux de petit format pour usage domestique, sont typiques soit pour la masse des produits pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé, soit pour les sortes de panneaux lumineux pour lesquels l’opposant offre ses services protégés par la marque espagnole antérieure. Dès lors, ces deux exemples, même s’ils sont établis, ne peuvent pas remettre en cause l’allégation de la requérante portant sur les voies différentes de commercialisation, en général, des produits concernés.

42      Il convient de rappeler également qu’il n’est pas contesté que les produits de la marque demandée et les services visés par la marque antérieure s’adressent à des publics différents, dans la mesure où les produits en cause s’adressent aux consommateurs espagnols moyens tandis que les services en cause sont offerts à un public spécialisé. Ce fait est de nature à faire obstacle à une éventuelle similitude des produits et des services en cause puisque, formant des marchés différents, les produits et les services ne se trouvent ainsi pas dans une situation de concurrence (arrêt easyHotel, précité, points 48 et 56), pas même pour le public pertinent qui est constitué de consommateurs spécialisés, destinataires tant des produits de la marque demandée que des services offerts pour les panneaux lumineux et qui est censé manifester un degré d’attention plus élevé que le consommateur moyen.

43      À cet égard, le simple fait que les membres d’un public spécialisé peuvent aussi avoir, dans leur vie privée, la qualité de consommateurs moyens ne suffit pas, en soi, pour créer une telle situation de concurrence, d’autant plus qu’ils sont susceptibles de manifester un degré d’attention plus élevé leur permettant de faire la différence entre l’origine des produits en cause et celle des services en cause.

44      En revanche, en vue de défendre la similitude des produits de la marque demandée et des services offerts par l’opposant, l’OHMI fait valoir un rapport de complémentarité entre les produits et les services en cause.

45      Selon une jurisprudence constante, les produits et les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise (arrêt easyHotel, précité, point 57), notamment en ce que les produits et les services complémentaires sont susceptibles d’être utilisés ensemble (arrêt easyHotel, précité, point 58).

46      Dans ce contexte, il y a lieu de souligner que, en l’occurrence, les produits couverts par la marque demandée ne sont pas identiques à ceux sur lesquels portent les services visés par la marque espagnole antérieure, notamment, ainsi que l’OHMI l’admet dans son mémoire en réponse, en raison de la limitation de la liste des produits couverts par la marque demandée. En effet, les services couverts par la marque espagnole antérieure se rapportent à des panneaux lumineux expressément exclus des produits de la marque demandée.

47      Par voie de conséquence, les services couverts par la marque espagnole antérieure ne forment pas un lien si étroit, dans le sens de la jurisprudence susmentionnée, avec les produits de la marque demandée qu’ils puissent être considérés comme indispensables ou importants pour l’usage des produits de la marque demandée et, ainsi, comme complémentaires au sens de la jurisprudence citée. Les services offerts par l’opposant ne peuvent pas non plus être utilisés ensemble avec les produits en cause.

48      Toutefois, en l’absence d’identité entre les produits pour lesquels lesdits services sont prévus et ceux de la marque demandée, l’OHMI défend la thèse selon laquelle la complémentarité entre les produits et les services en cause dépend de la question de savoir, d’une part, si les services de l’opposant sont effectivement en rapport avec des produits qui relèvent de la même catégorie que celle visée par la demande de la marque communautaire et, d’autre part, s’il est courant, dans le secteur du marché pertinent, que ces services soient fournis par le fabricant.

49      Or, bien que l’OHMI ait constaté à juste titre que les produits visés par la marque demandée et les objets visés par les services de la marque antérieure font partie de la même catégorie, voire de la même classe, de produits dans la mesure où ils émettent de la lumière, une telle circonstance ne suffit pas pour que l’on puisse admettre une complémentarité au sens de la jurisprudence.

50      Une telle appartenance à la même catégorie de produits ne saurait créer un lien étroit entre les services visés par la marque antérieure et les produits visés par la marque demandée. À ce propos, la requérante a, à bon droit, observé que si les consommateurs spécialisés sont habitués à des services après-vente, tels que ceux fournis par l’entreprise fournisseur pour les panneaux lumineux, les consommateurs espagnols moyens ne le sont pas, un tel service n’étant pas usuel pour les produits de la marque demandée, qui sont des produits de masse. Dès lors, il est exclu que les produits et les services complémentaires soient susceptibles d’être utilisés ensemble.

51      Dans ce contexte, il ne faut pas perdre de vue, ainsi que l’observe l’OHMI lui‑même, que le public pertinent est un public spécialisé, susceptible de manifester un degré d’attention plus élevé que la moyenne lors du choix des produits et des services en cause. Or, même si l’OHMI ne tire aucune conclusion de cette circonstance, l’on ne peut qu’en déduire que ces consommateurs spécialisés, qui sont en même temps, en leur qualité de consommateurs espagnols moyens, destinataires des produits couverts par la marque demandée, ne peuvent pas penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits pour lesquels la marque communautaire est sollicitée, et celle de la fourniture de ces services incombent à la même entreprise.

52      Dès lors, l’argument de l’OHMI selon lequel les produits et les services en cause sont complémentaires, et, par voie de conséquence, similaires, ne saurait être accueilli.

53      Il ressort de tout ce qui précède que le moyen unique doit être accueilli en ce que la chambre de recours a commis des erreurs de droit, d’une part, en considérant que le public pertinent est constitué uniquement des consommateurs espagnols moyens au lieu du public spécialisé, destinataire des services pour lesquels la marque espagnole antérieure est enregistrée, et, d’autre part, en méconnaissant l’absence de similitude entre les produits de la marque demandée et les services de la marque espagnole antérieure.

54      Par voie de conséquence, la décision attaquée est entachée d’illégalité et doit être annulée sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur le grief de l’absence de similitude entre les signes figuratifs en cause.

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens exposés par la requérante, conformément aux conclusions de celle-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 18 juillet 2008 (affaire R 759/2007-4) est annulée en ce qui concerne les produits « lampes fonctionnant sur secteur, appareils et installations d’éclairage, appareils pour effets de scène utilisant la technique des lumières ; lampes électriques ; pièces détachées des articles précités » relevant de la classe 11.

2)      L’OHMI est condamné aux dépens.

Forwood

Dehousse

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 octobre 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.