Language of document : ECLI:EU:T:2013:214

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

25 avril 2013(*)

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant un boîtier de montre-bracelet – Dessin ou modèle antérieur – Motif de nullité – Absence de caractère individuel – Absence d’impression globale différente – Utilisateur averti – Degré de liberté du créateur – Articles 4, 6 et article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 6/2002 – Connexité avec une demande reconventionnelle en nullité – Tribunal des dessins ou modèles communautaires – Article 91 du règlement n° 6/2002 »

Dans l’affaire T‑80/10,

Bell & Ross BV, établie à Zoetermeer (Pays-Bas), représentée par Me S. Guerlain, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

KIN AB, établie à Upplands Väsby (Suède), représentée par Mes M. Nielsen et C. Galichet, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’OHMI du 9 décembre 2009 (affaire R 1285/2008‑3), relative à une procédure de nullité entre Klockgrossisten i Norden AB et Bell & Ross BV,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot (rapporteur), président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. A. Popescu, juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 février 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 22 juillet 2010,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 14 juillet 2010,

à la suite de l’audience du 9 novembre 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 mai 2005, la requérante, Bell & Ross BV, a déposé une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins et modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

2        Le dessin ou modèle dont l’enregistrement a été demandé (ci-après le « dessin ou modèle contesté ») est représenté comme suit :

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3        Le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué à une « montre », relevant de la classe 10-02 au sens de l’arrangement de Locarno instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, du 8 octobre 1968, tel que modifié.

4        Le dessin ou modèle contesté a été enregistré le 1er juillet 2005 sous le numéro 342951-0002 et publié au Bulletin des dessins et modèles communautaires n° 2005/63, du 12 juillet 2005.

5        Le 27 juin 2007, la requérante a introduit une action en contrefaçon du dessin ou modèle contesté à l’encontre de Klockgrossisten I Norden AB, devenue KIN AB, l’intervenante, devant le tribunal de commerce de Paris (France).

6        Le 12 septembre 2007, l’intervenante a présenté auprès de l’OHMI, en vertu de l’article 52 du règlement n° 6/2002, une demande en nullité du dessin ou modèle contesté.

7        Le motif invoqué au soutien de la demande était celui visé à l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, qui prévoit qu’un dessin ou modèle communautaire doit être déclaré nul s’il ne remplit pas les conditions fixées aux articles 4 à 9 dudit règlement. Dans la demande en nullité, l’intervenante a fait valoir que le dessin ou modèle contesté n’était pas nouveau et qu’il était dépourvu de caractère individuel au sens de l’article 4 du règlement n° 6/2002, lu en combinaison avec les articles 5 et 6 du même règlement.

8        À l’appui de sa demande en nullité, l’intervenante a invoqué plusieurs dessins ou modèles qu’elle prétendait antérieurs au dessin ou modèle contesté.

9        Le 13 septembre 2007, l’intervenante a présenté une demande reconventionnelle en nullité du dessin ou modèle contesté devant le tribunal de commerce de Paris. Le même jour, elle a demandé à ce tribunal, en vertu de l’article 91, paragraphe 1, du règlement n° 6/2002, de surseoir à statuer jusqu’à ce que l’OHMI ait rendu sa décision sur la demande en nullité dont il était saisi.

10      Par courrier du 16 octobre 2007, l’OHMI a informé l’intervenante que la demande en nullité qu’elle avait présentée le 12 septembre 2007 n’était pas conforme à l’article 98, paragraphe 4, du règlement n° 6/2002, dès lors qu’elle n’avait pas été introduite en langue française.

11      Le 2 novembre 2007, l’intervenante a déposé auprès de l’OHMI une demande en nullité du dessin ou modèle contesté en langue française.

12      Le 13 novembre 2007, l’OHMI a déclaré cette demande recevable et a invité la requérante à présenter ses observations au plus tard le 18 janvier 2008.

13      Le 8 janvier 2008, la requérante a, d’une part, présenté ses observations sur la demande de sursis à statuer adressée par l’intervenante au tribunal de commerce de Paris et, d’autre part, demandé à l’OHMI de surseoir à statuer jusqu’à ce que ledit tribunal ait statué sur l’action en contrefaçon pendante devant lui.

14      Par jugement du 31 janvier 2008, le tribunal de commerce de Paris :

–        a rejeté la demande de l’intervenante de surseoir à statuer en attendant la décision de l’OHMI sur l’action en nullité pendante devant lui ;

–        s’est déclaré incompétent pour statuer sur la demande reconventionnelle de l’intervenante en nullité du dessin ou modèle contesté ;

–        a débouté la requérante, titulaire du dessin ou modèle contesté, de son action en contrefaçon, aux motifs que ledit modèle ne possédait ni la nouveauté ni le caractère individuel requis.

15      Le 7 mars 2008, l’OHMI a communiqué à l’intervenante les observations de la requérante, ainsi que la demande de sursis à statuer présentée par celle-ci le 8 janvier 2008, et l’a invitée à présenter ses observations au plus tard le 13 mai 2008.

16      Le 25 mars 2008, la requérante a interjeté appel du jugement du tribunal de commerce de Paris du 31 janvier 2008.

17      Le 13 mai 2008, l’intervenante a présenté ses observations sur la demande de sursis à statuer de la requérante et a demandé à l’OHMI de rejeter cette demande, au motif que, le tribunal de commerce de Paris s’étant déclaré incompétent pour prononcer la nullité du dessin ou modèle contesté, l’OHMI pouvait statuer sur la demande en nullité dudit dessin ou modèle pendante devant lui.

18      Au soutien de ses observations, l’intervenante a présenté des documents illustrant, selon elle, le défaut de nouveauté et de caractère individuel du dessin ou modèle contesté. Parmi ces documents figurait un extrait d’un magazine japonais datant de 1996 et présentant un modèle d’horloge de bord d’avion, revendiqué comme antérieur au dessin ou modèle contesté (ci-après le « dessin ou modèle antérieur ») et représenté comme suit :

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19      Le 20 mai 2008, l’OHMI a informé les parties de la clôture de la phase écrite de la procédure de nullité. Il a indiqué qu’il statuerait sur la demande en nullité en fonction des preuves dont il disposait.

20      Par courrier du 23 juin 2008, la requérante a contesté la clôture de la phase écrite de la procédure et le rejet de sa demande de sursis à statuer.

21      Le 12 août 2008, la division d’annulation de l’OHMI a fait droit à la demande en nullité sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002, au motif que le dessin ou modèle contesté était dépourvu de caractère individuel au sens de cette disposition.

22      Le 3 septembre 2008, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 55 à 60 du règlement n° 6/2002, contre la décision de la division d’annulation.

23      Le 6 mai 2009, la cour d’appel de Paris (France) a rendu un arrêt par lequel elle a décidé de surseoir à statuer sur l’appel interjeté devant elle dans l’attente de la décision de la chambre de recours.

24      Par décision du 9 décembre 2009 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Après avoir constaté que le recours était recevable, la chambre de recours a, notamment, considéré que la division d’annulation n’était pas tenue de surseoir à statuer sur la demande en nullité du dessin ou modèle contesté, dès lors que le tribunal de commerce de Paris s’était déclaré incompétent pour connaître d’une telle demande. Elle a ajouté qu’elle n’était elle-même pas tenue de surseoir à statuer sur le recours formé devant elle par la requérante, dès lors que la cour d’appel de Paris avait décidé de surseoir à statuer. S’agissant des éléments de preuve apportés pour la première fois devant elle par la requérante, la chambre de recours a estimé qu’ils l’avaient été de façon tardive et que ceux-ci, au demeurant, n’étaient pas susceptibles d’influer sur le sens de la décision de la division d’annulation. Sur le fond de la demande en nullité, la chambre de recours, après avoir décrit le dessin ou modèle contesté, a examiné la nouveauté et le caractère individuel dudit dessin ou modèle. Elle a ainsi défini l’utilisateur averti dudit dessin ou modèle comme étant le consommateur final des produits visés par ce dessin ou modèle, à savoir des montres, et a considéré que les dessins ou modèles en conflit produisaient, en raison de leurs faibles différences, une impression globale identique sur l’utilisateur averti. De plus, elle a affirmé que, en dehors de quelques éléments nécessaires pour qu’une montre remplisse sa fonction, qui est de donner l’heure, la liberté du créateur en matière de montres était totale. La chambre de recours a déduit de ces considérations que le dessin ou modèle contesté était dépourvu de caractère individuel, au sens de l’article 6 du règlement n° 6/2002 et qu’il devait, dès lors, être déclaré nul.

 Conclusions des parties

25      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

26      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

27      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        à titre subsidiaire, si la nullité de l’intégralité du dessin ou modèle contesté n’était pas justifiée, confirmer la nullité dudit modèle en tant qu’il consiste dans la représentation du cadran d’une montre ;

–        condamner la requérante aux dépens, y compris ceux exposés par elle devant l’OHMI.

 En droit

28      À l’appui de son recours, la requérante a soulevé trois moyens.

29      Le premier moyen est pris de la violation de l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002. Le deuxième moyen est pris de la violation des articles 57 et 63 du règlement n° 6/2002 et de l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci‑après la « CEDH »), et de la non-communication de la représentation du dessin ou modèle antérieur dans le cadre de la procédure devant la division d’annulation. Le troisième moyen est pris de la violation de l’article 6 du règlement n° 6/2002.

 Sur le premier moyen, pris de la violation de l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002

30      La requérante reproche à la division d’annulation et à la chambre de recours d’avoir commis plusieurs violations de l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002.

31      Il convient de rappeler que l’article 91 du règlement n° 6/2002 établit des règles spécifiques en matière de connexité, notamment lorsque la validité d’un dessin ou modèle communautaire enregistré est contestée à la fois devant l’OHMI et devant un tribunal des dessins ou modèles communautaires, c’est-à-dire, aux termes de l’article 80, paragraphe 1, du même règlement, une juridiction d’un État membre chargée de remplir les fonctions qui lui sont attribuées par ledit règlement.

32      L’article 91, paragraphe 2, première phrase, du règlement n° 6/2002 prévoit que, sauf s’il existe des raisons particulières de poursuivre la procédure, l’OHMI, saisi d’une demande en nullité d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, sursoit à statuer de sa propre initiative après audition des parties ou à la demande de l’une des parties et après audition des autres parties, lorsque la validité du dessin ou modèle communautaire enregistré est déjà contestée par une demande reconventionnelle devant un tribunal des dessins ou modèles communautaires. L’article 91, paragraphe 2, deuxième phrase, du même règlement prévoit également que, si l’une des parties à la procédure devant le tribunal des dessins ou modèles communautaires le demande, ledit tribunal peut, après audition des autres parties à cette procédure, surseoir à statuer et que, dans ce cas, l’OHMI poursuit la procédure pendante devant lui.

33      À titre liminaire, il convient de rejeter le grief pris de ce que la chambre de recours aurait omis de statuer sur le moyen, soulevé devant elle par la requérante, tiré de la violation de l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002 par la division d’annulation.

34      En effet, au point 30 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que la requérante « [avait] soulevé l’argument de la violation de l’article 91, paragraphe 2, du [règlement n° 6/2002] en matière de connexité des litiges en cours » et a affirmé que « étant donné que le tribunal de commerce de Paris s’[était] déclaré incompétent pour statuer sur la nullité des dessins communautaires, la division d’annulation a[vait] correctement statué sur la demande en nullité », ce dont il résulte qu’elle a considéré que la division d’annulation avait à bon droit refusé de surseoir à statuer sur la demande en nullité dont elle était saisie et, partant, a rejeté le moyen.

35      Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a statué sur ce moyen. Dès lors, ce grief, qui manque en fait, doit être rejeté.

36      La requérante a également précisé, lors de l’audience, qu’il n’était pas possible de déterminer, à la lecture du point 30 de la décision attaquée, si la chambre de recours avait approuvé le refus de la division d’annulation de surseoir à statuer au motif que le jugement du tribunal de commerce de Paris du 31 janvier 2008 et l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 6 mai 2009 constituaient des « raisons particulières de poursuivre la procédure » au sens de l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002 ou au motif que, par ces décisions de justice, le tribunal des dessins ou modèles communautaires avait décidé de surseoir à statuer. Selon la requérante, cette incertitude quant au motif retenu par la chambre de recours constitue une violation de l’obligation de motivation.

37      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 62 du règlement n° 6/2002, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Cette obligation a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union européenne d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [arrêt du Tribunal du 14 juin 2011, Sphere Time/OHMI – Punch (Montre attachée à une lanière), T‑68/10, non encore publié au Recueil, point 91 ; voir également, par analogie, arrêt du Tribunal du 12 juillet 2012, Guccio Gucci/OHMI – Chang Qing Qing (GUDDY), T‑389/11, non publié au Recueil, point 16, et la jurisprudence citée]. Toutefois, il ne saurait être exigé des chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [arrêt GUDDY, précité, point 16].

38      En outre, il convient de rappeler que l’obligation de motiver des décisions constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’une décision consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cette décision. Si ces motifs comportent des erreurs, celles-ci affectent la légalité au fond de la décision, mais non la motivation de celle-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt de la Cour du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, Rec. p. I‑4951, point 181, et la jurisprudence citée, et arrêt GUDDY, point 37 supra, point 17).

39      En l’espèce, la chambre de recours a affirmé, au point 30 de la décision attaquée, que « étant donné que le tribunal de commerce de Paris s’[était] déclaré incompétent pour statuer sur la nullité des dessins communautaires, la division d’annulation a correctement statué sur la demande en nullité » et a ajouté que « […] la cour d’appel de Paris, lors de l’audience de plaidoirie tenue le 7 avril 2009, a[vait] décidé de surseoir à statuer dans l’attente de la décision de l’OHMI en ce qui concerne la validité des modèles contestés [… ; p]ar conséquent, la [chambre de recours] ne se voit pas obligée à son tour de surseoir à statuer ». Il résulte de ces constatations que, bien qu’elle n’ait pas recouru de manière explicite à la notion de « raisons particulières de poursuivre la procédure » figurant à l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002, la chambre de recours a considéré que les motifs énoncés par le jugement du tribunal de commerce de Paris du 31 janvier 2008 et par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 6 mai 2009 constituaient des raisons particulières de poursuivre la procédure, au sens de cette disposition.

40      Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’a précisé la requérante au cours de l’audience, la chambre de recours a exposé de façon suffisamment claire et non équivoque le raisonnement par lequel elle a répondu au moyen, invoqué devant elle, pris de la violation de l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002. Le grief pris de la violation de l’obligation de motivation doit, dès lors, être rejeté.

41      La requérante soutient par ailleurs que la division d’annulation était tenue, d’une part, d’entendre les parties lors d’une audience avant d’adopter une décision relative à un éventuel sursis à statuer sur la demande en nullité et, d’autre part, de motiver le courrier du 20 mai 2008 dans lequel elle exprime son refus de surseoir à statuer sur ladite demande. Or, celle-ci n’aurait ni entendu les parties lors d’une audience ni motivé son refus de surseoir à statuer. Ce serait également à tort qu’elle aurait pris en considération le jugement du 31 janvier 2008 par lequel le tribunal de commerce de Paris s’était déclaré incompétent pour statuer sur la demande en nullité du dessin ou modèle contesté pour refuser de surseoir à statuer, dès lors qu’un appel avait été interjeté contre ce jugement qui, selon la requérante, était entaché d’une erreur de droit.

42      La requérante ajoute que, dès lors qu’elle a confirmé la décision de la division d’annulation et pris à tort en considération le fait que la cour d’appel de Paris avait décidé de surseoir à statuer en attendant sa décision concernant la validité du dessin ou modèle contesté, la chambre de recours a elle-même violé l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002.

43      Il y a lieu de rappeler que l’article 60, paragraphe 1, du règlement n° 6/2002 dispose que la chambre de recours peut, soit exercer les compétences de l’instance qui a pris la décision attaquée, soit renvoyer l’affaire à ladite instance pour suite à donner. Il découle de cette disposition ainsi que de l’économie du règlement n° 6/2002 que la chambre de recours dispose pour statuer sur un recours des mêmes compétences que l’instance qui a pris la décision attaquée et que son examen porte sur l’entier litige tel qu’il se présente au jour où elle statue [voir, par analogie, arrêts du Tribunal du 23 septembre 2003, Henkel/OHMI – LHS (UK) (KLEENCARE), T‑308/01, Rec. p. II‑3253, point 24, et du 10 juillet 2006, La Baronia de Turis/OHMI – Baron Philippe de Rothschild (LA BARONNIE), T‑323/03, Rec. p. II‑2085, point 56].

44      Il ressort également de cette disposition, ainsi que d’une jurisprudence établie, qu’il existe une continuité fonctionnelle entre les différentes unités de l’OHMI, à savoir l’examinateur, la division d’opposition, la division d’administration des marques et des questions juridiques et les divisions d’annulation, d’une part, et les chambres de recours, d’autre part (voir, par analogie, arrêts KLEENCARE, point 43 supra, point 25, et LA BARONNIE, point 43 supra, point 57).

45      Il découle de cette continuité fonctionnelle entre les différentes instances de l’OHMI que, dans le cadre du réexamen que les chambres de recours doivent faire des décisions prises par les unités de l’OHMI statuant en premier ressort, elles sont tenues de fonder leur décision sur tous les éléments de fait et de droit que les parties ont fait valoir soit dans la procédure devant l’unité ayant statué en première instance, soit dans la procédure de recours (voir arrêts KLEENCARE, point 43 supra, point 32, et LA BARONNIE, point 43 supra, point 58, et la jurisprudence citée).

46      Il s’ensuit que, de par l’effet du recours dont elle est saisie, la chambre de recours est appelée à procéder à un nouvel examen complet du fond de la demande en nullité, tant en droit qu’en fait (arrêt Montre attachée à une lanière, point 37 supra, point 13 ; voir également, par analogie, arrêt de la Cour du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, Rec. p. I‑2213, point 57).

47      Le contrôle exercé par les chambres de recours ne se limite donc pas au contrôle de la légalité de la décision contestée devant elle, mais, de par l’effet dévolutif de la procédure de recours, il implique une nouvelle appréciation du litige dans son ensemble, les chambres de recours devant intégralement réexaminer la requête initiale et tenir compte des preuves produites en temps utile [voir arrêts du Tribunal LA BARONNIE, point 43 supra, point 59, et du 6 novembre 2007, SAEME/OHMI – Racke (REVIAN’s), T‑407/05, Rec. p. II‑4385, point 51, et la jurisprudence citée].

48      En l’espèce, il ressort du point 30 de la décision attaquée, qui n’est pas contestée sur ce point, que la requérante a affirmé, dans son mémoire en réplique devant la chambre de recours, que la cour d’appel de Paris avait décidé de surseoir à statuer sur l’appel interjeté par la requérante contre le jugement du tribunal de commerce de Paris du 31 janvier 2008, dans l’attente de la décision de la chambre de recours devant mettre fin à la procédure de nullité du dessin ou modèle contesté pendante devant elle. Il ressort du même point de la décision attaquée, également non contesté, que l’intervenante a confirmé l’existence de cette décision de sursis à statuer.

49      Contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours était, dès lors, tenue, en vertu de la jurisprudence rappelée aux points 43 à 47 ci-dessus, de prendre en considération, dans le cadre de la nouvelle appréciation de l’ensemble du litige qui lui incombait, la décision de la cour d’appel de Paris.

50      Par ailleurs, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort du point 32 ci-dessus, l’article 91, paragraphe 2 du règlement n° 6/2002 prévoit deux exceptions à la règle qu’il énonce, selon laquelle l’OHMI, saisi d’une demande en nullité d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, sursoit à statuer de sa propre initiative après audition des parties ou à la demande de l’une des parties et après audition des autres parties, lorsque la validité du dessin ou modèle communautaire enregistré est déjà contestée par une demande reconventionnelle devant un tribunal des dessins ou modèles communautaires.

51      La première exception, prévue à l’article 91, paragraphe 2, première phrase, du règlement n° 6/2002, est l’existence de raisons particulières de poursuivre la procédure devant l’OHMI. La seconde exception, prévue à l’article 91, paragraphe 2, deuxième phrase, du même règlement, se réfère à l’exercice, par le tribunal des dessins ou modèles communautaires saisi le premier, de la faculté dont il dispose si l’une des parties à la procédure devant lui le demande, de surseoir à statuer dans l’attente de la décision de l’OHMI.

52      En l’espèce, il convient de rappeler que la cour d’appel de Paris avait décidé de surseoir à statuer sur l’appel, interjeté devant elle, concernant la demande reconventionnelle en nullité du dessin ou modèle contesté introduite par l’intervenante devant le tribunal de commerce de Paris.

53      Il s’ensuit que la chambre de recours était en tout état de cause, en vertu de l’exception prévue à l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002, visée au point 51 ci-dessus, tenue, comme elle l’a fait, de statuer sur le recours dont elle était saisie.

54      C’est, dès lors, à tort que la requérante lui reproche d’avoir violé cette disposition.

55      S’agissant des griefs de la requérante selon lesquels la division d’annulation aurait omis, d’une part, d’entendre les parties lors d’une audience avant de prendre une décision relative à un éventuel sursis à statuer sur la demande en nullité et, d’autre part, de motiver le rejet de la demande de surseoir à statuer introduite par la requérante le 8 janvier 2008, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 61 du règlement n° 6/2002, le recours devant le Tribunal n’est ouvert qu’à l’encontre des seules décisions des chambres de recours, de sorte que, dans le cadre d’un tel recours, ne sont recevables que des moyens dirigés contre la décision de la chambre de recours même [voir, par analogie, arrêts du Tribunal du 7 juin 2005, Lidl Stiftung/OHMI – REWE-Zentral (Salvita), T‑303/03, Rec. p. II‑1917, point 59, et du 24 novembre 2010, Nike International/OHMI – Muñoz Molina (R10), T‑137/09, Rec. p. II‑5433, point 13].

56      Lesdits griefs doivent dès lors être rejetés comme irrecevables.

57      Au demeurant, même à les supposer dirigés contre la décision attaquée, en tant que celle-ci a confirmé la décision de la division d’annulation, ces griefs doivent, en tout état de cause, être rejetés.

58      S’agissant, premièrement, de la violation alléguée de l’article 91, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002, qui résulterait du fait que la requérante aurait dû être entendue au cours d’une audience avant que l’OHMI décide ou non de surseoir à statuer sur la demande en nullité du dessin ou modèle contesté, il convient de relever que cette disposition prévoit que l’OHMI doit, le cas échéant, surseoir à statuer « de sa propre initiative après audition des parties ou à la demande de l’une des parties et après audition des autres parties ».

59      L’OHMI ayant, en l’espèce, statué sur une demande de sursis à statuer présentée par la requérante, il était, dès lors, tenu d’entendre les autres parties à la procédure de nullité, mais non la requérante, contrairement à ce que celle-ci soutient. Le grief doit, partant, être rejeté comme étant non fondé.

60      S’agissant, deuxièmement, du prétendu défaut de motivation du courrier de l’OHMI du 20 mai 2008, il convient de relever que, par ce courrier, l’OHMI a informé la requérante de la clôture de la phase écrite de la procédure de nullité et qu’il allait statuer sur la demande en nullité sur le fondement des éléments de preuve dont il disposait.

61      Or, il convient de rappeler que l’article 60, paragraphe 1, du règlement n° 6/2002 prévoit que la chambre de recours peut exercer les compétences de l’instance qui a pris la décision contestée devant elle, de sorte que le contrôle effectué par la chambre de recours ne se limite pas au contrôle de la légalité de ladite décision, mais que, de par l’effet dévolutif de la procédure de recours, il implique une nouvelle appréciation du litige dans son ensemble.

62      Or, ainsi qu’il a été jugé aux points 40 et 53 ci-dessus, c’est à bon droit et sans violer son obligation de motivation que la chambre de recours a décidé, au terme d’une nouvelle appréciation du litige dans son ensemble, de ne pas surseoir à statuer sur le recours dont elle était saisie.

63      Il s’ensuit que le grief pris d’un défaut de motivation du courrier de l’OHMI du 20 mai 2008 doit être rejeté comme étant inopérant.

64      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, pris de la violation des articles 57 et 63 du règlement n° 6/2002, ainsi que de l’article 6 de la CEDH, et de la non-communication de la représentation du dessin ou modèle antérieur dans le cadre de la procédure devant la division d’annulation

65      La requérante soutient que la décision attaquée est imprécise quant au point de savoir si les faits et preuves qu’elle a invoqués à l’appui de son mémoire en réplique devant la chambre de recours déposé le 24 juin 2009 ont été ou non examinés par ladite chambre.

66      En effet, selon elle, la chambre de recours paraît, au point 34 de la décision attaquée, examiner ces faits et ces preuves, mais, pourtant, conclut ce point en indiquant qu’elle n’en tient pas compte aux fins de l’examen du recours.

67      Elle soutient que, si la chambre de recours n’a pas examiné lesdits faits et preuves au motif que, tardivement produits, ils seraient irrecevables, alors la décision attaquée violerait les dispositions des articles 57 et 63 du règlement n° 6/2002, ainsi que l’article 6 de la CEDH, en tant qu’il dispose que toute personne a droit à un procès équitable.

68      Aux termes de l’article 57 du règlement n° 6/2002, « [l]e recours [contre une décision de la division d’annulation] doit être formé par écrit auprès de l’OHMI dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification de la décision [ ; l]e recours n’est considéré comme formé qu’après paiement de la taxe de recours [ ; u]n mémoire exposant les motifs du recours doit être déposé dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification de la décision ».

69      Aux termes de l’article 63 du même règlement, « [a]u cours de la procédure, l’[OHMI] procède à l’examen d’office des faits, [ ; t]outefois, dans une action en nullité, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties [ ; l]’ [OHMI] peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile ».

70      Aux termes de l’article 6 de la CEDH, « [t]oute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ».

71      Il ressort du point 34 de la décision attaquée que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la chambre de recours a examiné la pertinence et la valeur probante des faits et des preuves contenus dans les onze annexes produites par la requérante au soutien de son mémoire en réplique devant ladite chambre.

72      En effet, après avoir relevé que la requérante avait eu l’occasion de présenter des moyens de fond et de fournir des éléments de preuve devant la division d’annulation, mais qu’elle avait choisi de se limiter à aborder la question du sursis à statuer, la chambre de recours a considéré que « les nouvelles preuves apportées par la requérante n’[avaient] aucun effet sur le sens de la décision qui fait l’objet du recours », ce dont il résulte qu’elle a apprécié si lesdites preuves étaient ou non de nature à modifier le contenu de la décision rendue par la division d’annulation.

73      Ensuite, procédant à une brève description de l’objet des preuves contenues dans les annexes 2 à 9 du mémoire en réplique présenté devant elle par la requérante, elle a indiqué que les annexes 3 à 6 dudit mémoire constituaient des « preuves […] tendant à démontrer que le dessin est l’aboutissement d’un long et coûteux processus de création » et qu’elles « ne constitu[aient] pas la preuve d’absence de divulgation antérieure d’un dessin ou modèle identique et, par conséquent, n[‘étaient] pas pertinentes pour prouver le caractère nouveau et individuel du dessin contesté ». Il en résulte que la chambre de recours a décrit l’objet desdites annexes et apprécié leur pertinence aux fins d’établir la nouveauté et le caractère individuel du dessin ou modèle contesté, ainsi que leur valeur probante.

74      S’agissant des preuves fournies à l’annexe 7 du même mémoire, elle a constaté qu’il s’agissait de « copies des dessins sur lesquels s’appuie la demanderesse, certes présentés sous d’autres coupes, mais [qui] ne change[nt] rien au fait qu’ils ne sont pas en cause en l’occurrence puisque la [d]ivision d’annulation a basé sa décision sur le modèle [antérieur] », procédant ainsi à une description de ces éléments de preuve ainsi qu’à une appréciation de leur pertinence aux fins de contester la décision de la division d’annulation.

75      La chambre de recours a ensuite considéré que « [l]es documents en annexe 8 prétend[ai]ent réfuter la date de divulgation du modèle indiqué comme D6 devant la division d’annulation [ ; o]r, l’enregistrement comme dessin en Suisse ne constitue pas une preuve absolue de la date de la première divulgation », identifiant puis rejetant ainsi l’argument étayé par ces documents, dont elle a évalué la valeur probante.

76      Il résulte, en outre, de la constatation de la chambre de recours selon laquelle « [l]’annexe 9 (magazines de mode où est porté le dessin ou modèle contesté) n’est pas non plus en mesure de prouver les critères requis » qu’elle a porté une appréciation sur la valeur probante de ladite annexe aux fins d’établir la nouveauté et le caractère individuel du dessin ou modèle contesté.

77      Enfin, il ressort de l’affirmation selon laquelle « l’annexe 2 (législation française sur la compétence du Tribunal de Commerce) n’est pas non plus pertinente pour la raison exposée préliminairement », que la chambre de recours a examiné sa pertinence dans le cadre du recours dont elle était saisie.

78      Il convient de relever que, de ces circonstances, la chambre de recours a déduit que, « aucune des nouvelles preuves présentées devant [elle] ne permet[tait] de mettre en doute la publication du modèle [antérieur] au Japon, ni que celui-ci soit connu des milieux spécialisés dans la Communauté au sens de l’article 7, paragraphe 1, du [règlement n° 6/2002] » et a, dès lors, constaté qu’il ne serait pas tenu compte des preuves en question, eu égard au fait que, « dans tous les cas, [elles n’étaient] pas en mesure de réfuter le défaut de nouveauté et de caractère individuel du dessin ou modèle contesté ».

79      Il résulte de ces motifs que la chambre de recours a, comme le reconnaît la requérante au point 35 du mémoire en réplique, examiné si les éléments de preuve contenus dans les annexes 2 à 9 du mémoire en réplique produit devant elle par la requérante étaient susceptibles d’avoir une influence sur le contenu de la décision de la division d’annulation.

80      Quant aux annexes 1, 10 et 11 dudit mémoire, d’une part, il ne ressort pas de la décision attaquée qu’elles aient été rejetées comme irrecevables par la chambre de recours et, d’autre part, ainsi qu’il a été rappelé au point 72 ci-dessus, il résulte du point 34 de la décision attaquée que la chambre de recours a apprécié si les preuves produites par la requérante pour la première fois devant elle étaient ou non de nature à modifier le contenu de la décision rendue par la division d’annulation. Il convient d’en déduire que la chambre de recours a considéré ces annexes comme recevables et qu’elle a apprécié leur pertinence et leur valeur probante.

81      Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a examiné les faits et preuves produits par celle-ci au soutien du mémoire en réplique devant la chambre de recours.

82      Dans ces conditions, le grief doit être rejeté comme manquant en fait.

83      La requérante soutient également que la représentation graphique du dessin ou modèle antérieur ne lui avait pas été communiquée dans le cadre de la procédure devant la division d’annulation, de sorte que celle-ci aurait fondé sa décision sur une pièce dont la requérante ne disposait pas dans le cadre de la procédure devant ladite division.

84      Il convient de rappeler que, ainsi qu’il résulte de la jurisprudence rappelée au point 55 ci-dessus, le recours devant le Tribunal n’est ouvert qu’à l’encontre des décisions des chambres de recours, de sorte que, dans le cadre d’un tel recours, ne sont recevables que des moyens dirigés contre la décision de la chambre de recours même.

85      En l’espèce, il résulte des arguments de la requérante rappelés au point 83 ci‑dessus qu’elle reproche à la division d’annulation d’avoir statué sur la demande de nullité formée par l’intervenante sans que la représentation graphique du dessin ou modèle antérieur lui ait été communiquée.

86      Il convient, dès lors, de considérer que le grief est dirigé contre la décision de la division d’annulation du 12 août 2008 et non contre la décision attaquée. En conséquence, il doit, conformément à la jurisprudence rappelée au point 55 ci‑dessus, être déclaré irrecevable.

87      Au demeurant, même à le supposer dirigé contre la décision attaquée, en tant que celle-ci a confirmé la décision de la division d’annulation du 12 août 2008 sur ce point, ce grief doit, en tout état de cause, être rejeté.

88      En effet, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence rappelée aux points 46 et 47 ci-dessus, la chambre de recours est appelée, dans le cadre de la procédure de recours, à procéder à un nouvel examen complet du fond de la demande en nullité, tant en droit qu’en fait, de sorte que son contrôle ne se limite pas au contrôle de la légalité de la décision contestée devant elle, mais que, de par l’effet dévolutif de la procédure de recours, il implique une nouvelle appréciation du litige dans son ensemble.

89      En l’espèce, il n’est pas contesté que, dans le cadre de la procédure de recours, la requérante disposait de la représentation graphique du dessin ou modèle antérieur et a pu développer ses arguments concernant le bien-fondé de la demande en nullité, en particulier sur la comparaison des impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit et, partant, le caractère individuel du dessin ou modèle contesté.

90      Dès lors, le fait que la requérante ne disposait pas de la représentation graphique du dessin ou modèle antérieur dans le cadre de la procédure devant la division d’annulation n’est pas de nature à affecter la légalité de la décision attaquée.

91      Au demeurant, il convient de relever que la requérante admet que la représentation graphique du dessin ou modèle antérieur lui avait été communiquée dans le cadre de la procédure engagée devant les juridictions françaises.

92      Il résulte de ce qui précède que le grief pris de la non-communication à la requérante, dans le cadre de la procédure devant la division d’annulation, de la représentation graphique du dessin ou modèle antérieur doit, en tout état de cause, être rejeté comme inopérant.

93      Partant, le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, pris de la violation de l’article 6 du règlement n° 6/2002

94      La requérante soutient que la chambre de recours a considéré à tort que le dessin ou modèle contesté était dépourvu du caractère individuel requis pour être protégé en tant que dessin ou modèle communautaire au titre du règlement n° 6/2002, au motif qu’il ne produisait pas une impression globale différente de celle produite par le dessin ou modèle antérieur. Dans le cadre de ce moyen, la requérante fait valoir que les différences entre le dessin ou modèle contesté et le dessin ou modèle antérieur sont telles que ceux-ci produisent sur l’utilisateur averti une impression globale différente.

95      L’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002 dispose qu’un dessin ou modèle communautaire ne peut être déclaré nul que s’il ne remplit pas les conditions visées aux articles 4 à 9 du même règlement.

96      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 4 du règlement n° 6/2002, « [l]a protection d’un dessin ou modèle comme dessin ou modèle communautaire n’est assurée que dans la mesure où il est nouveau et présente un caractère individuel ».

97      L’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 6/2002 dispose que le caractère individuel doit s’apprécier au regard de l’impression globale produite sur l’utilisateur averti, qui doit être différente de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué au public, soit, s’il s’agit d’un dessin ou modèle enregistré, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité, soit, s’il s’agit d’un dessin ou modèle non enregistré, avant la date à laquelle le dessin ou modèle pour lequel la protection est revendiquée a été divulgué au public pour la première fois.

98      L’article 6, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002 précise que, pour apprécier le caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle [arrêt du Tribunal du 9 septembre 2011, Kwang Yang Motor/OHMI – Honda Giken Kogyo (Moteur à combustion interne), T‑11/08, non publié au Recueil, point 17], mais non de considérations esthétiques et commerciales [arrêt du Tribunal du 22 juin 2010, Shenzen Taiden/OHMI ‑ Bosch Security Systems (Équipement de communication), T‑153/08, Rec. p. II‑2517, points 46 et 47].

99      Aux fins d’examiner le caractère individuel du dessin ou modèle contesté, il convient de déterminer si la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en se prononçant successivement sur l’utilisateur averti dudit dessin ou modèle et sur la liberté du créateur dans l’élaboration dudit dessin ou modèle et en procédant à la comparaison des impressions globales produites sur l’utilisateur averti par les dessins ou modèles en conflit.

 Sur l’utilisateur averti

100    Il résulte de la jurisprudence que la notion d’utilisateur averti doit être comprise comme une notion intermédiaire entre celle de consommateur moyen, applicable en matière de marques, auquel il n’est demandé aucune connaissance spécifique et qui, en général, n’effectue pas de rapprochement direct entre les marques en conflit, et celle d’homme de l’art, expert doté de compétences techniques approfondies (arrêt de la Cour du 20 octobre 2011, PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, C‑281/10 P, non encore publié au Recueil, point 53).

101    Ainsi, si l’utilisateur averti n’est pas le consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé qui perçoit habituellement un dessin ou un modèle comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’est pas non plus l’expert ou l’homme de l’art capable d’observer dans le détail les différences minimes susceptibles d’exister entre les dessins ou modèles en conflit (arrêt PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, point 100 supra, point 59).

102    La qualité d’« utilisateur » implique que la personne concernée utilise le produit dans lequel est incorporé le dessin ou modèle en conformité avec la finalité à laquelle ce même produit est destiné. Le qualificatif « averti » suggère en outre que, sans être un concepteur ou un expert technique, l’utilisateur connaît les différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, dispose d’un certain degré de connaissances quant aux éléments que ces dessins ou modèles comportent normalement, et, du fait de son intérêt pour les produits concernés, fait preuve d’un degré d’attention relativement élevé lorsqu’il les utilise (arrêt Équipement de communication, point 98 supra, points 46 et 47).

103    Ainsi, la notion d’utilisateur averti peut s’entendre comme désignant un utilisateur doté non d’une attention moyenne, mais d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré (arrêt PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, point 100 supra, point 53).

104    Toutefois, cette circonstance n’implique pas que l’utilisateur averti soit en mesure de distinguer, au-delà de l’expérience qu’il a accumulée du fait de l’utilisation du produit concerné, les aspects de l’apparence du produit qui sont dictés par la fonction technique de ce dernier de ceux qui sont arbitraires. Il s’agit donc d’une personne ayant une certaine connaissance des dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, sans pour autant savoir quels aspects de ce produit sont dictés par une fonction technique (arrêt Moteur à combustion interne, point 98 supra, point 27, et arrêt Équipement de communication, point 98 supra, point 48).

105    Au point 44 de la décision attaquée, la chambre de recours a défini l’utilisateur averti du dessin ou modèle contesté de la manière suivante : « […] l’utilisateur averti s’identifie au consommateur final des produits, c’est-à-dire des bracelets-montres ; [i]l ne s’agit donc pas du designer ou de l’ingénieur qui a passé du temps à concevoir le cadran venant s’ajuster au bracelet, mais d’une personne qui va acheter ledit modèle, qui connaît le marché des montres et les différentes marques commerciales [ ; v]u le coût dudit produit sur le marché, il s’agit certainement d’un véritable amateur de montres qui s’est informé sur les différentes formes et types de montres par le biais, par exemple, de magazines spécialisés ou de recherches sur Internet ou s’est renseigné dans des magasins, tels que des bijouteries, qui proposent ces produits à la vente [ ; c]ontrairement à ce que soutient la [requérante], l’utilisateur averti ne saurait se limiter à l’examen des modèles de montre inspirés de l’aéronautique, mais il s’agit d’une personne qui s’intéresse au marché des montres en général et se tient régulièrement informée ».

106    Cette définition de l’utilisateur averti n’a été contestée ni par la requérante, qui, au contraire, l’a approuvée dans la requête et lors de l’audience, ni par l’intervenante. En revanche, sans conclure à l’annulation de la décision attaquée, l’OHMI a contesté un aspect de cette définition lors de l’audience. Selon lui, la chambre de recours aurait, à tort, tenu compte du prix des montres dans lesquelles le dessin ou modèle contesté est incorporé pour définir l’utilisateur averti et, partant, aurait retenu un degré d’attention excessif de la part de l’utilisateur averti. En effet, selon l’OHMI, le prix des produits visés dans la demande d’enregistrement dépendrait uniquement de la volonté de l’entreprise qui commercialise ces montres, alors que l’utilisateur averti doit être défini uniquement au regard des produits pour lesquels l’enregistrement est demandé et de la représentation graphique du dessin ou modèle en cause.

107    Il convient de rappeler que l’examen du caractère individuel d’un dessin ou modèle consiste à vérifier si l’impression globale produite par ce dernier se différencie des impressions globales produites par les dessins ou modèles divulgués antérieurement, indépendamment de considérations esthétiques ou commerciales (voir, en ce sens, arrêt Équipement de communication, point 98 supra, point 58).

108    Or, comme le fait valoir à juste titre l’OHMI, la détermination du prix des produits visés dans la demande d’enregistrement, à savoir, en l’espèce, des montres-bracelets, relève des intentions commerciales de l’entreprise qui les commercialise.

109    En l’espèce, il ressort du point 44 de la décision attaquée que la chambre de recours a tenu compte du prix des montres auxquelles le dessin ou modèle contesté est appliqué aux fins de définir l’utilisateur averti du dessin ou modèle contesté. Toutefois, il ne ressort pas de ladite définition, selon laquelle l’utilisateur averti est un « véritable amateur de montres qui s’est informé sur les différentes formes et types de montres par le biais, par exemple, de magazines spécialisés ou de recherches sur Internet ou s’est renseigné dans des magasins, tels que des bijouteries, qui proposent ces produits à la vente » et une « personne qui s’intéresse au marché des montres en général et se tient régulièrement informée », que la chambre de recours a considéré que ledit utilisateur manifesterait un degré d’attention particulièrement élevé.

110    Au contraire, la définition de l’utilisateur averti faite par la chambre de recours est conforme à la jurisprudence rappelée aux points 100 à 104 ci-dessus, dès lors que, selon cette jurisprudence, l’utilisateur averti connaît les différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, dispose d’un certain degré de connaissances quant aux éléments que ces dessins ou modèles comportent normalement, et, du fait de son intérêt pour les produits concernés, fait preuve d’un degré d’attention relativement élevé lorsqu’il les utilise, de sorte que la notion d’utilisateur averti peut s’entendre comme désignant un utilisateur doté d’une vigilance particulière en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré.

 Sur le degré de liberté du créateur

111    Il convient de rappeler que, dans le cadre de l’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle et de ses caractéristiques visibles, et donc de l’impression globale produite sur l’utilisateur averti par ledit dessin ou modèle, il doit être tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle litigieux (voir arrêt Moteur à combustion interne, point 98 supra, point 31, et la jurisprudence citée).

112    Il ressort de la jurisprudence que le degré de liberté du créateur d’un dessin ou modèle est défini à partir, notamment, des contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique du produit ou d’un élément du produit, ou encore des prescriptions légales applicables au produit. Ces contraintes conduisent à une normalisation de certaines caractéristiques, devenant alors communes à plusieurs dessins ou modèles appliqués au produit concerné (voir arrêt Moteur à combustion interne, point 98 supra, point 32, et la jurisprudence citée).

113    Partant, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est grande, moins des différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. À l’inverse, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est restreinte, plus les différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. Ainsi, un degré élevé de liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle renforce la conclusion selon laquelle les dessins ou modèles ne présentant pas de différences significatives produisent une même impression globale sur l’utilisateur averti (voir arrêt Moteur à combustion interne, point 98 supra, point 33, et la jurisprudence citée).

114    En l’espèce, au point 51 de la décision attaquée, la chambre de recours a affirmé que les créateurs de montres étaient limités quant à quelques éléments permettant de remplir la fonction d’une montre, comme la délimitation des heures et des minutes sur le cadran et la présence de deux aiguilles au minimum, mais que, mis à part ces éléments, leur liberté était totale, de sorte que le cadran pouvait être carré, rond ou de forme fantaisiste et qu’il pouvait comporter des chiffres ou des bâtonnets pour indiquer les quarts d’heures, les minutes de cinq en cinq, voire toutes les minutes. Elle a ajouté que, en l’espèce, il importait peu que le processus de création ait varié avant de déposer le dessin ou modèle contesté, dès lors que le résultat final aurait pu être différent du dessin ou modèle antérieur.

115    La requérante soutient que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que la liberté du créateur était, s’agissant d’une montre, limitée uniquement par la nécessité de lire l’heure.

116    En se déterminant ainsi, la chambre de recours aurait omis de prendre en considération le fait qu’une montre n’est pas un simple objet utilitaire, mais également un bijou ou un accessoire de mode. Or, s’agissant en l’espèce de montres dont le prix est supérieur à 2000 euros, leur achat ne serait pas dicté par la nécessité de lire l’heure, ce que permettrait n’importe quel téléphone, agenda électronique, ordinateur ou appareil ménager, mais par des considérations essentiellement esthétiques, la montre se voulant alors être le reflet de la personnalité de celui qui la porte ou de l’image que celui-ci veut donner de lui-même.

117    Elle ajoute que la chambre de recours a également omis de prendre en considération le fait qu’il existe plusieurs familles de montres, telles que les montres habillées ou les montres de sport, chacune d’entre elles obéissant depuis des décennies à des codes particuliers qui limitent le degré de liberté du créateur. Or, en raison du grand nombre de modèles de montres qui existent, et, en particulier, du grand nombre de modèles qui, comme le dessin ou modèle contesté, évoquent l’univers aéronautique ou s’en inspirent, la liberté du créateur n’était, selon la requérante, pas illimitée.

118    Il convient de relever que, ainsi que l’a affirmé à juste titre la chambre de recours, une montre doit contenir certains éléments afin de remplir sa fonction, tels que, s’agissant, comme en l’espèce, d’une montre à affichage analogique, un cadran, des aiguilles et un bouton de mise à l’heure. Toutefois, ces contraintes concernent la présence de certains éléments dans une montre, mais n’influent pas, dans une mesure significative, sur sa forme et son aspect général. Ainsi, en particulier, le cadran et le boîtier de la montre peuvent revêtir diverses formes et les éléments qui les composent peuvent être aménagés de diverses manières [arrêt Montre attachée à une lanière point 37 supra, points 68 et 69].

119    De plus, la requérante n’établit ni l’existence de codes esthétiques spécifiques aux montres inspirées de l’aéronautique ni, comme le soutient à juste titre l’OHMI, l’appartenance de telles montres à une catégorie spécifique de montres dont les dimensions et les caractéristiques visuelles du boîtier et du cadran seraient soumises à des contraintes particulières différentes de celles qui s’appliquent à d’autres montres et qui auraient pour effet de restreindre l’étendue de la liberté du créateur.

120    Cette conclusion est notamment confirmée par la pièce n° 22 de l’annexe 9 de la requête, qui contient des extraits des catalogues d’autres marques pour l’année 2006, ainsi que d’un numéro du magazine « La revue des montres », daté de septembre 2007. En effet, dans ces documents sont présentés des modèles de montres qui sont désignés comme étant des « montres d’aviateur », ou sont associés à l’aéronautique ou revendiquent une proximité avec ce domaine, et qui présentent des différences aisément identifiables tant entre ces modèles qu’avec le dessin ou modèle contesté, notamment s’agissant de la forme du boîtier, de la manière dont les différents éléments qui composent le cadran sont disposés, ainsi que des informations qui peuvent y être lues, du nombre d’aiguilles et de la présence ou non d’une lunette graduée et/ou tournante.

121    S’agissant des arguments de la requérante relatifs au prix des montres auxquelles le dessin ou modèle contesté est appliqué, et au fait que l’achat de telles montres ne serait que rarement motivé par le besoin de lire l’heure, mais plutôt par des considérations esthétiques, de mode ou relatives au mouvement qui fait fonctionner la montre, il convient de rappeler que, d’une part, l’examen du caractère individuel d’un dessin ou modèle consiste à vérifier si l’impression globale produite par ce dernier se différencie des impressions globales produites par les dessins ou modèles divulgués antérieurement, indépendamment de considérations esthétiques ou commerciales (voir, en ce sens, arrêt Équipement de communication, point 98 supra, point 58) et, d’autre part, la détermination du prix des montres auxquelles le dessin ou modèle contesté est appliqué relève des intentions commerciales de l’entreprise qui les commercialise.

122    Il s’ensuit que ces arguments ont trait à des considérations qui sont sans influence sur la liberté dont jouit le créateur dans l’élaboration dudit dessin ou modèle.

123    De plus, conformément à l’article 6 du règlement n° 6/2002, l’impression globale produite par un dessin ou modèle doit être prise en compte aux fins de l’examen du caractère individuel concerné. Or, en l’espèce, les motifs de l’achat des montres en cause par les consommateurs et le fait que celles-ci soient considérées comme des objets à vocation simplement utilitaire ou comme des bijoux ou des accessoires de mode, relèvent de la perception qu’ont les consommateurs des produits auxquels le dessin ou modèle contesté est appliqué, c’est-à-dire, en l’espèce, desdites montres, ainsi que de la marque sous laquelle elles sont commercialisées, mais non du dessin ou modèle contesté en tant que tel.

124    Ces considérations sont dès lors sans pertinence aux fins de l’examen du caractère individuel dudit dessin ou modèle.

125    Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que, à l’exception de la présence de certains éléments nécessaires pour qu’une montre puisse remplir sa fonction de donner l’heure, le créateur jouissait d’une liberté totale dans l’élaboration d’un modèle de montre.

 Sur la comparaison des impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit

126    La requérante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les dessins ou modèles en conflit produisent sur l’utilisateur averti la même impression globale.

127    La chambre de recours a, au point 42 de la décision attaquée, décrit en ces termes le dessin ou modèle contesté :

« En l’espèce, le dessin contesté consiste en un boîtier de forme carrée aux angles arrondis, comportant auxdits angles quatre vis de taille importante. À l’intérieur dudit carré est placé un cadran rond encerclé par un pan biseauté, placé en surépaisseur sur la base carrée. Le cadran contient des chiffres arabes : 12, 3, 6 et 9, de taille importante, permettant de marquer chaque quart d’heure, entre lesquels s’intercalent des petits bâtonnets marquant toutes les minutes et des grands bâtonnets marquant chaque tranche de cinq minutes au sein des quarts d’heure. Le modèle contesté comporte également trois compteurs de forme circulaire, situés au centre du cadran à 3, 6 et 9 heures. Sur le côté latéral droit, il y a un petit bouton permettant d’ajuster l’heure ainsi que deux poussoirs rectangulaires permettant d’actionner les compteurs circulaires. Deux aiguilles dans le cadran sont de forme large et comportent une extrémité en forme de cône ; la trotteuse consiste en une aiguille fine et longue. »

128    Au point 46 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les dessins ou modèles en conflit produisaient la même impression globale sur l’utilisateur averti, à savoir « un modèle de montre s’inspirant des instruments de bord des cockpits, visant à donner ainsi une apparence moderne de pilote d’avion à celui qui la porte ». Au point 49 de la décision attaquée, elle a estimé que cette impression globale était produite par le fait que les dessins ou modèles en conflit représentaient des boîtiers carrés, avec au centre un cadran rond bombé présentant quatre chiffres arabes de taille importante et qu’aux quatre angles du boîtier étaient présents quatre vis ou emplacements destinés à recevoir des vis.

129    La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir omis de relever que des vues, à la même échelle, de face, de profil, de coupe et de dos du dessin ou modèle contesté avaient été fournies à l’OHMI en vue de l’enregistrement dudit dessin ou modèle en toutes ses faces, afin d’en faire ressortir les proportions. Ce faisant, la chambre de recours se serait limitée à examiner le cadran en faisant totalement abstraction de la forme et de l’épaisseur du boîtier, ainsi que du positionnement du remontoir, alors que le boîtier serait indissociable du cadran et contribuerait, notamment par son épaisseur, à donner à la montre sa physionomie globale. Dès lors, la chambre de recours n’aurait pas apprécié l’impression globale produite par le modèle contesté sur l’utilisateur averti.

130    L’OHMI estime que la chambre de recours n’a pas tiré toutes les conséquences de la vue de profil du dessin ou modèle antérieur, laquelle mettrait en évidence la plus grande épaisseur du boîtier représenté par ce dessin ou modèle par rapport à celle du dessin ou modèle contesté, ce dont il résulterait des différences entre les proportions des dessins ou modèles en conflit. Il ajoute que cette circonstance n’est, toutefois, pas de nature à remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les dessins ou modèles en conflit produisent une impression globale identique sur l’utilisateur averti.

131    Il y a lieu de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas de la décision attaquée que la chambre de recours ait omis de prendre en compte les différences de proportions existant entre les dessins ou modèles en conflit. Au contraire, celle-ci a affirmé, au point 47 de la décision attaquée, que « la différence de proportion entre les dessins en cause n’influ[ait] pas sur la façon dont le dessin [allait] être perçu par l’utilisateur averti, qui y verra[it] une horloge de bord à l’échelle du poignet », ce dont il résulte qu’elle a apprécié l’influence que les proportions respectives des dessins ou modèles en conflit étaient susceptibles d’exercer sur l’impression globale produites par lesdits dessins ou modèles.

132    S’agissant plus particulièrement de l’épaisseur du boîtier de l’horloge de bord représentée par le dessin ou modèle antérieur, il est constant qu’une telle horloge est destinée à être encastrée dans un espace prévu à cet effet sur le tableau de bord d’un avion.

133    Or, d’une part, il convient de rappeler que le caractère individuel d’un dessin ou modèle doit s’apprécier au regard de l’impression globale produite par ledit dessin ou modèle sur l’utilisateur averti et que, ainsi qu’il a été rappelé au point 102 ci-dessus, l’utilisateur averti utilise le produit dans lequel est incorporé un dessin ou modèle en conformité avec la finalité à laquelle ce même produit est destiné, et, d’autre part, une partie du produit représenté par un dessin ou modèle qui est en dehors du champ de vision de l’utilisateur exerce une influence faible sur la perception qu’a celui-ci du dessin ou modèle en cause (voir, en ce sens, arrêt Équipement de communication, point 98 supra, points 65 et 66)

134    En l’espèce, dès lors que, lorsqu’elle est utilisée conformément à sa finalité, une horloge de bord est encastrée dans le tableau de bord d’un avion, il convient de considérer, aux fins de l’appréciation globale produite par le dessin ou modèle antérieur, que l’utilisateur averti verra toujours une horloge de bord encastrée dans le tableau de bord d’un avion. Or, dans une telle hypothèse, l’épaisseur du boîtier de ladite horloge échappera à la vue de cet utilisateur, en raison de l’encastrement de celle-ci dans le tableau de bord de l’avion.

135    Il s’ensuit que l’épaisseur du boîtier exerce une influence faible sur l’impression globale produite par le dessin ou modèle antérieur.

136    Par ailleurs, il y a lieu de considérer que l’épaisseur du boîtier d’une montre-bracelet, si elle reste visible lorsque la montre est portée, n’influence l’impression globale produite par un dessin ou modèle représentant une telle montre que de façon marginale. En effet, l’épaisseur du boîtier ne fait, le plus souvent, que résulter de la contrainte imposant au créateur, pour des raisons esthétiques, de confort et afin d’éviter que la montre ne soit exposée à un risque de chocs susceptibles de l’abîmer, de créer un modèle de montre-bracelet dont le boîtier devra être suffisamment mince pour pouvoir passer sous la manche du vêtement de la personne qui la porte.

137    Aux fins de déterminer les éléments d’un dessin ou modèle représentant une montre-bracelet qui participent dans la plus large mesure à l’impression globale produite par ledit dessin ou modèle sur l’utilisateur averti, il convient, ainsi qu’il a été rappelé au point 102 ci-dessus, de prendre en compte ceux que l’utilisateur averti perçoit lorsqu’il utilise la montre-bracelet reproduisant le dessin ou modèle contesté conformément à la finalité à laquelle elle est destinée, c’est-à-dire lorsqu’il la porte au poignet. Dans ces conditions, il convient de considérer que ces éléments sont tous ceux qui figurent sur la vue du dessin ou modèle contesté qui représente le cadran de cette montre, c’est-à-dire la forme et les caractéristiques du boîtier et du cadran, les détails qui composent ce dernier, à savoir, le cas échéant, des chiffres, des graduations et des aiguilles, ainsi que la manière dont ces éléments sont disposés.

138    En outre, dès lors que l’impression globale produite par un dessin ou un modèle représentant une horloge de bord d’avion doit être appréciée en tenant compte du fait que, lorsqu’elle est utilisée, elle est encastrée dans le tableau de bord d’un avion, il convient de considérer que les éléments visés au point 137 ci-dessus sont également ceux qui participent dans la plus large mesure à l’impression globale produite par un dessin ou modèle qui, comme le dessin ou modèle antérieur, représente une horloge de bord d’avion.

139    C’est dès lors à bon droit que, en l’espèce, la chambre de recours, au point 49 de la décision attaquée, s’est fondée sur ces éléments pour comparer les impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit sur l’utilisateur averti.

140    La requérante soutient également que la chambre de recours aurait à tort affirmé que la partie inférieure des dessins ou modèles en conflit, de forme rectangulaire pour le dessin ou modèle contesté et circulaire pour le dessin ou modèle antérieur, était sans influence sur l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit. Selon elle, d’une part, lorsqu’une montre est présentée dans une bijouterie ou chez un horloger, l’utilisateur prendrait soin d’examiner tous les aspects de ladite montre afin d’apprécier l’esthétique qui s’en dégage, et d’autre part, il serait faux de prétendre, comme l’a fait la chambre de recours, que le boîtier d’une montre ne serait plus visible une fois celle-ci portée au poignet.

141    Au point 46 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que « la partie inférieure des modèles en cause, c’est-à-dire rectangulaire, d’une part, et circulaire, d’autre part, n’est pas la partie visible une fois la montre portée par l’utilisateur et, à ce titre, n’a pas d’importance pour celui-ci en ce qui concerne l’impression globale produite par les modèles ».

142    Il résulte, d’une part, de l’emploi de l’adjectif « inférieure » et, d’autre part, de cette description de la « partie inférieure » des dessins ou modèles en conflit, qui serait rectangulaire s’agissant du dessin ou modèle contesté et circulaire s’agissant du dessin ou modèle antérieur, et qui serait invisible une fois la montre portée, que les mots « partie inférieure » désignent, ainsi que la requérante l’a elle-même admis lors de l’audience, le fond des boîtiers représentés par les dessins ou modèles en conflit, c’est-à-dire la face opposée au cadran, et non le côté ou l’épaisseur desdits boîtiers. Le motif du point 46 de la décision attaquée, rappelé au point 141 ci-dessus, ne concerne donc pas, contrairement à ce que soutient la requérante, les boîtiers de la montre et de l’horloge de bord représentés par les dessins ou modèles en conflit dans leur ensemble, mais une seule de leurs faces.

143    C’est dès lors à tort que la requérante soutient que la chambre de recours a affirmé que le boîtier d’une montre ne serait plus visible une fois celle-ci portée.

144    Au demeurant, il convient de relever que, lorsque les produits représentés par les dessins ou modèles en conflit, à savoir une montre-bracelet et une horloge de bord, sont utilisés conformément à leur finalité, leur partie inférieure est, pour la première, posée sur le poignet et, pour la seconde, encastrée dans le tableau de bord d’un avion, de sorte qu’elles ne sont pas visibles par l’utilisateur averti. Or, ainsi qu’il a été rappelé au point 133 ci-dessus, dès lors que l’impression globale produite par un dessin ou modèle doit être déterminée au regard de la manière dont est utilisé le produit représenté par ledit dessin ou modèle, un élément dudit produit qui est en dehors du champ de vision de l’utilisateur exerce une influence faible sur la perception qu’a celui-ci du dessin ou modèle en cause (voir, en ce sens, arrêt Équipement de communication, point 98 supra, points 65 et 66).

145    Par ailleurs, il convient de considérer que c’est à bon droit que la chambre de recours a relevé, au point 34 de la décision attaquée et contrairement à ce que soutient la requérante, que le processus de création du dessin ou modèle contesté n’était pas pertinent pour prouver le caractère individuel de celui-ci.

146    En effet, il convient de rappeler que, conformément à l’article 6 du règlement n° 6/2002, le caractère individuel d’un dessin ou modèle s’apprécie en comparant les impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit sur l’utilisateur averti et en tenant compte de la liberté du créateur. Dès lors, les critères invoqués par la requérante, relatifs au processus de création du dessin ou modèle contesté, au succès commercial des montres représentées par ce dessin ou modèle, à la reconnaissance qu’elles auraient acquises parmi les amateurs d’horlogerie ainsi qu’à l’apport du dessin ou modèle contesté au monde de l’horlogerie ne figurent pas au nombre de ceux pris en compte aux fins d’apprécier le caractère individuel d’un dessin ou modèle.

147    La requérante relève dix différences entre le dessin ou modèle contesté et le dessin ou modèle antérieur et soutient qu’elles sont de nature à établir que ces dessins ou modèles produisent sur l’utilisateur averti des impressions globales différentes.

148    Ces différences sont :

–        la partie inférieure du boîtier représenté par le dessin ou modèle antérieur, qui est circulaire et non rectangulaire ;

–        la présence, sur le dessin ou modèle antérieur, d’une couronne crantée tournante graduée de taille très importante et dont les parois adoptent une forme de cône renversé, ce qui confèrerait audit dessin ou modèle une impression de profondeur absente du dessin ou modèle contesté ;

–        la présence, sur ce dessin ou modèle, d’un bouton de réglage placé à 6 heures, ainsi que, à gauche de ce dernier, d’un bouton poussoir ;

–        les proportions massives du dessin ou modèle antérieur par rapport au dessin ou modèle contesté ;

–        les angles du boîtier représenté par le dessin ou modèle antérieur, qui sont biseautés et non arrondis ;

–        l’extrême épaisseur dudit boîtier par rapport à celui représenté par le dessin ou modèle contesté ;

–        le fait que les angles du dessin ou modèle contesté comportent des vis à tête plate tandis que ceux du dessin ou modèle antérieur présentent des trous, qui peuvent accueillir des vis semblables à celles que présente le dessin ou modèle contesté ou d’autres systèmes de fixation, ce qui peut influer sur l’impression globale produite par le dessin ou modèle antérieur ;

–        la présence, sur le pourtour du cadran visible sur le dessin ou modèle antérieur, d’un rappel des minutes en chiffres arabes, de 5 à 55 ;

–        l’absence de couronne de remontoir et de boutons poussoirs sur le côté du boîtier représenté par le dessin ou modèle antérieur ;

–        l’absence, sur le cadran visible sur ledit dessin ou modèle, des trois compteurs circulaires placés à 3, 6 et 9 heures sur le dessin ou modèle contesté, le dernier empiétant légèrement sur le chiffre 9 ;

–        un nombre différent d’aiguilles sur les dessins ou modèles en conflit ;

–        l’absence, sur le cadran visible sur le dessin ou modèle contesté, de chiffre 6 de grande taille, contrairement au cadran visible sur le dessin ou modèle antérieur.

149    S’agissant des différences concernant les proportions des dessins ou modèles en conflit, il ressort des arguments de la requérante qu’elles concernent en particulier l’épaisseur des boîtiers représentés par les dessins ou modèles en conflit.

150    Or, en ce qui concerne les différences d’épaisseur des boîtiers représentés par les dessins ou modèles en conflit, ainsi que les différences affectant la partie inférieure de ceux-ci, il convient de rappeler que, pour les motifs exposés respectivement aux points 135, 136 et 144 ci-dessus, ces différences n’exercent qu’une faible influence sur l’impression globale produite sur l’utilisateur averti par les dessins ou modèles en conflit.

151    S’agissant des différences relatives à la position des boutons de réglage, au nombre d’aiguilles, à la présence, sur le dessin ou modèle antérieur, d’un bouton poussoir, aux graduations et au nombre de chiffres figurant sur le cadran, ainsi qu’à la forme de ceux-ci, la chambre de recours a considéré, au point 46 de la décision attaquée, que ces éléments ne contribuaient pas à l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit, dès lors qu’il s’agissait de caractéristiques fonctionnelles qui ne relevaient pas d’un choix esthétique arbitraire. Elle en a déduit que l’utilisateur averti ne prêterait pas attention à chacun de ces détails fonctionnels, mais plutôt à l’impression d’ensemble qui s’en dégageait.

152    La requérante soutient que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que ces éléments étaient sans influence sur l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit.

153    Il convient de considérer que c’est à juste titre que la requérante fait valoir que la disposition, sur le cadran de la montre représentée par le dessin ou modèle contesté, de boutons de réglage et de boutons poussoirs et d’aiguilles, même s’il peut correspondre à certaines fonctionnalités, modifie l’apparence de cette montre. C’est également à juste titre qu’elle soutient que, contrairement aux constatations faites par la chambre de recours, la taille et la forme des chiffres et des autres graduations figurant sur le cadran d’une montre influent également sur l’aspect esthétique de cette montre et, dès lors, participent à l’impression globale que celle-ci dégage.

154    Toutefois, il convient de relever que c’est, en tout état de cause, à bon droit que la chambre de recours a, au point 49 de la décision attaquée, considéré que les dessins ou modèles en conflit produisaient sur l’utilisateur averti une impression globale identique, qui résultait du fait que l’un et l’autre représentaient des boîtiers de forme carrée présentant, au centre, un cadran rond bombé dans lequel figurent des chiffres arabes de taille importante et, à chacun des angles du boîtier, quatre vis ou emplacements destinés à recevoir des vis.

155    Les différences, invoquées par la requérante, relatives au nombre d’aiguilles, aux compteurs circulaires et aux boutons poussoirs résultant de la fonction de chronographe, qui ne figurent pas sur le dessin ou modèle antérieur, ne sont pas de nature à créer une impression globale différente entre les dessins ou modèles contestés. En effet, il convient de relever, d’une part, que la fonction de chronographe est répandue sur le marché et équipe de nombreuses montres, de sorte que l’utilisateur averti est habitué à voir des montres pouvant remplir cette fonction. D’autre part, s’il est exact que le dessin ou modèle contesté présente, contrairement au dessin ou modèle antérieur, des boutons poussoirs et une couronne de remontoir, la petite dimension de ces éléments par rapport à l’ensemble du boîtier n’est pas de nature à influer sur l’impression globale produite par le dessin ou modèle contesté sur l’utilisateur averti.

156    En outre, s’agissant des différences relatives aux graduations et au nombre de chiffres figurant sur le cadran, ainsi qu’à la forme de ceux-ci, il convient de relever que le cadran visible sur le dessin ou modèle contesté présente des chiffres et des graduations qui, par leur nombre, leur taille et leur forme, notamment la police de caractère employée, sont quasiment identiques à ceux qui figurent sur le cadran visible sur le dessin ou modèle antérieur. Il en va de même des aiguilles indiquant les heures, les minutes et les secondes, dont la forme et les proportions sont quasiment identiques à celles représentées sur le dessin ou modèle antérieur.

157    S’agissant de la différence relative à la présence de graduations et des chiffres 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45, 50 et 55, autour du cadran qui est visible sur le dessin ou modèle antérieur, il convient de considérer que ces éléments ne permettent pas, du fait de leur petite taille, d’influer de façon significative sur l’impression globale produite sur l’utilisateur averti par les dessins ou modèles en conflit.

158    Par ailleurs, ne sont pas davantage de nature à exercer une telle influence, eu égard à l’importante similitude des faces des dessins ou modèles en conflit sur lesquelles le cadran est visible, l’absence, relevée à juste titre par la requérante lors de l’audience, de chiffre 6 de grande taille sur le dessin ou modèle contesté, contrairement au dessin ou modèle antérieur, la présence d’un bouton de réglage et d’un bouton poussoir en bas du cadran visible sur le dessin ou modèle antérieur, la présence de trous aux angles de la face du boîtier qui contient le cadran, la présence sur le dessin ou modèle antérieur d’une couronne crantée tournante graduée de taille très importante et dont les parois adopteraient une forme de cône renversé ni, enfin, le fait que les angles du boîtier représenté par le dessin ou modèle antérieur soient biseautés et non arrondis comme sur le dessin ou modèle contesté.

159    Il s’ensuit que c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que les similitudes entre les dessins ou modèles en conflit l’emportaient sur les éléments qui les différencient, de sorte qu’ils produisaient la même impression globale sur l’utilisateur averti.

160    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le troisième moyen et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

161    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

162    La requérante ayant succombé il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

163    Cette dernière a, en outre, conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’elle a exposés dans le cadre de la procédure devant l’OHMI.

164    À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 136, paragraphe 2, du règlement de procédure, « [l]es frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours […] sont considérés comme dépens récupérables ». Il en résulte que les frais encourus au titre de la procédure de nullité devant la division d’annulation ne peuvent être considérés comme des dépens récupérables [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 12 janvier 2006, Devinlec/OHMI – TIME ART (QUANTUM), T‑147/03, Rec. p. II‑11, point 115 ; et du 16 janvier 2008, Inter-IKEA/OHMI – Waibel (idea), T‑112/06, non publié au Recueil, point 88].

165    Dès lors, les conclusions de l’intervenante tendant à la condamnation de la requérante aux dépens exposés devant la division d’annulation doivent être rejetées.

166    Dans ces circonstances, il y a lieu de condamner la requérante à supporter, outre ses propres dépens et les dépens de l’OHMI, ceux de l’intervenante, à l’exclusion des dépens que cette dernière a exposés au cours de la procédure devant la division d’annulation.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Bell & Ross BV est condamnée aux dépens, y compris ceux que KIN AB a exposés au cours de la procédure devant la chambre de recours.

Truchot

Martins Ribeiro

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 avril 2013.

Signatures


* Langue de procédure : le français.