Language of document : ECLI:EU:T:2002:159

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

13 juin 2002 (1)

«Fonctionnaires - Pensions - Transfert de l'équivalent actuariel des droits à pension d'ancienneté acquis au titre d'activités professionnelles antérieures à l'entrée au service des Communautés»

Dans l'affaire T-106/01,

Noé Youssouroum, fonctionnaire du Conseil de l'Union européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes J.-N. Louis et V. Peere, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Conseil de l'Union européenne, représenté par MM. F. Anton et A. Pilette, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision du Conseil du 8 juin 2000 portant calcul de la bonification d'annuités résultant du transfert vers le régime communautaire des droits à pension du requérant acquis au titre du régime grec,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. M. Jaeger, président, K. Lenaerts et J. Azizi, juges,

greffier: M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 21 mars 2002,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    En vertu de l'article 77 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut»), le fonctionnaire qui a accompli au moins dix années de service a droit à une pension d'ancienneté. Les modalités du régime de pensions sont régies par les dispositions de l'annexe VIII du statut.

2.
    L'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut dispose:

«Le fonctionnaire qui entre au service des Communautés après avoir:

-    cessé ses activités auprès d'une administration, d'une organisation nationale ou internationale

    ou

-    exercé une activité salariée ou non salariée,

a la faculté, au moment de sa titularisation, de faire verser aux Communautés soit l'équivalent actuariel, soit le forfait de rachat des droits à pension d'ancienneté qu'il a acquis au titre des activités visées ci-dessus.

En pareil cas, l'institution où le fonctionnaire est en service détermine, compte tenu du grade de titularisation, le nombre des annuités qu'elle prend en compte d'après son propre régime au titre de la période de service antérieur sur la base du montant de l'équivalent actuariel ou du forfait de rachat.»

3.
    En vertu de l'article 39, paragraphe 2, du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après le «RAA»), les agents temporaires visés à l'article 2, sous a), c) ou d), du RAA ont également «droit à la pension d'ancienneté [...] dans les conditions prévues [aux articles 77 à 84] du statut et de l'annexe VIII du statut». Les agents temporaires visés àl'article 2, sous b), du RAA ne bénéficient pas d'un tel droit. En vertu de l'article 8, deuxième alinéa, du RAA, l'engagement de ces derniers agents «ne peut excéder deux ans et ne peut être renouvelé qu'une fois pour une durée d'un an au plus».

4.
    Par décision du 13 juillet 1992, le Conseil a fixé les dispositions générales d'exécution relatives à l'application de l'article 11, paragraphes 1 et 2, de l'annexe VIII du statut (ci-après les «DGE»), modifiées ultérieurement par décision du Conseil du 19 décembre 1994.

5.
    L'article 10 des DGE dispose:

«1.    La prise en compte d'annuités est accordée au titre de la période qui précédait l'entrée au service des Communautés:

    -    du fonctionnaire titularisé ou intégré en vertu des statuts applicables aux fonctionnaires à partir du 1er janvier 1962, ou

    -    de l'agent temporaire engagé en vertu du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes.

2.    Le nombre d'annuités à prendre en compte est calculé sur la base de la totalité du montant transféré, déduction faite d'un intérêt simple de 3,5 % l'an pour la période allant:

    -    de la date de titularisation à la date du transfert effectif du montant précité au compte de la Communauté en ce qui concerne le fonctionnaire ou

    -    de la date de la fin de stage ou, à défaut, de l'entrée en service, à la date du transfert effectif du montant précité au compte de la Communauté en ce qui concerne l'agent temporaire.

    L'intérêt visé au premier alinéa n'est pas déduit pour les périodes durant lesquelles le montant transférable n'a pas été revalorisé ou majoré d'intérêts par la caisse de pensions dont relevait l'intéressé avant l'entrée au service des Communautés.

3.    Le nombre d'annuités à prendre en compte est calculé:

    -    par conversion du montant transféré (M) en rente théorique (R) en fonction des valeurs actuarielles (V) prévues à l'article 39 de l'annexe VIII des statuts applicables aux fonctionnaires à partir du 1er janvier 1962 selon la formule R = M/V,

    -    par conversion de cette rente (R) en annuité (N) de pension statutaire en fonction du traitement de base annuel (T) correspondant au grade de titularisation du fonctionnaire ou au grade à la date de la fin du stage ou, à défaut de stage, à la date d'entrée en service aux Communautés de l'agent temporaire, selon la formule:

        N = Rx100/Tx2.»

Faits à l'origine du recours

6.
    Du 1er novembre 1983 au 30 avril 1984, le requérant a été au service du Comité économique et social (CES) en tant qu'agent auxiliaire.

7.
    Le requérant a été au service du CES en tant qu'agent temporaire de grade LA 8 du 1er mai 1984 au 31 août 1984 (par trois contrats successifs, respectivement, d'un mois, de deux mois et d'un mois) et du 1er octobre 1984 au 31 mars 1985 (par un contrat de deux mois et quatre contrats successifs d'un mois).

8.
    Par décision du 17 avril 1985, le requérant a été nommé fonctionnaire stagiaire de grade A 7 au Conseil avec effet au 1er avril 1985. Il a été titularisé par décision du 20 décembre 1985, avec effet au 1er janvier 1986.

9.
    Par note du 25 juin 1990, le requérant a été informé du fait que, conformément à l'article 4 de l'annexe VIII du statut, la durée totale de ses services en qualité d'agent temporaire a été prise en compte pour le calcul de ses droits à pension. En outre, par note du 4 juillet 1997, le Conseil a accepté d'assimiler, en vue de l'acquisition de droits à pension, sa période de service en qualité d'agent auxiliaire au CES à une période de service en qualité d'agent temporaire.

10.
    Par communication au personnel du 24 novembre 1998 (CP n° 154/98), le personnel du Conseil a été informé du fait que le transfert des droits à pension à partir des régimes de pensions grecs était devenu possible.

11.
    En réponse à la demande du requérant tendant à ce que ses droits à pension acquis au titre du régime grec soient transférés vers le régime communautaire, le service «Pensions» du secrétariat général du Conseil a, par note du 8 juin 2000, communiqué au requérant le calcul d'annuités de pension statutaire à prendre en compte selon l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut (ci-après la «décision attaquée).

12.
    Dans la décision attaquée, le Conseil a calculé la bonification d'annuités résultant du transfert des droits à pension nationaux du requérant vers le régime communautaire, sur la base de la date et du grade de titularisation du requérant.

13.
    Le 20 juillet 2000, le requérant a adressé une note au service «Pensions» du secrétariat général du Conseil dans les termes suivants:

«[J]e vous prie de bien vouloir réexaminer mon dossier concernant la date pour la détermination du taux moyen pour le montant transféré.

Je me permets de vous signaler que la Commission assimile la date de prise de fonctions en tant qu'agent temporaire à la date de titularisation.»

14.
    Par note du 24 août 2000, le Conseil a informé le requérant de la décision de rejet de sa demande.

15.
    Le 5 octobre 2000, le requérant a introduit une réclamation contre la note du 24 août 2000.

16.
    Par note du 2 février 2001, le Conseil a pris une décision explicite de rejet de la réclamation.

Procédure et conclusions des parties

17.
    C'est dans ce contexte que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 mai 2001, le requérant a introduit le présent recours.

18.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale. Au titre des mesures d'organisation de la procédure prévues à l'article 64 du règlement de procédure du Tribunal, des questions écrites ont été posées aux parties et une demande de renseignements a été adressée à la Commission.

19.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience qui s'est déroulée le 21 mars 2002.

20.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la décision attaquée;

-    condamner le Conseil aux dépens.

21.
    Le Conseil conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme non fondé;

-    juger que chacune des parties supportera ses propres dépens.

En droit

22.
    Le requérant invoque un moyen unique à l'appui de son recours, tiré de la violation de l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut et des DGE.

Arguments des parties

23.
    Le requérant rappelle d'abord que l'arrêt de la Cour du 20 mars 1986, Bevere/Commission (8/85, Rec. p. 1187), auquel se réfère le Conseil dans sa décision de rejet de la réclamation le concernant a été rendu avant l'adoption des DGE, le 13 juillet 1992. Le Conseil aurait commis une erreur de droit en procédant au calcul de la bonification d'annuités pour la pension d'ancienneté du requérant sur la base de dispositions législatives et réglementaires entre-temps abrogées.

24.
    L'avocat général M. Darmon, dans ses conclusions sous l'arrêt Bevere/Commission, cité au point 23 ci-dessus (p. 1188), aurait souligné la liberté de chaque institution de déterminer les modalités de calcul de la bonification d'annuités. Faisant application de cette liberté, le Conseil aurait adopté les DGE dans le but de «traiter les agents temporaires sur le même pied que les fonctionnaires en ce qui concerne les modalités de calcul en matière de transfert de droits à pension» (communication du 23 février 1995au personnel du Conseil relative à la modification des DGE). Selon le requérant, conformément à l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut, la bonification d'annuités devait donc être calculée en fonction de sa date d'entrée au service des Communautés.

25.
    Se référant ensuite aux articles 10, paragraphe 2, deuxième alinéa, et 13 des DGE, le requérant soutient que le Conseil a commis une double erreur de droit en ne procédant pas, d'une part, au calcul de la bonification d'annuités après avoir déduit un intérêt simple de 3,5 % l'an pour la période allant de la date d'entrée en service du requérant au CES, le 1er novembre 1983 (dès lors que sa période de service en tant qu'agent auxiliaire a été assimilée à une période de service effectué en tant qu'agent temporaire), à la date du transfert effectif du montant des droits à pension du régime grec au compte de la Communauté et, d'autre part, en refusant de prendre en compte le grade et l'échelon du requérant à la date de son entrée en service, le 1er novembre 1983.

26.
    Le requérant signale encore que, en 1992, le législateur communautaire a consacré le principe de la continuité de carrière entre les agents temporaires et les fonctionnaires pour autant que le recrutement soit intervenu au même grade. Il se réfère à cet égard au règlement (CEE, Euratom, CECA) n° 3947/92 du Conseil, du 21 décembre 1992, modifiant le statut et le RAA (JO L 404, p. 1) en ce qu'il a ajouté un troisième alinéa à l'article 32 du statut.

27.
    Enfin, le requérant fait observer que, avant d'avoir été titularisé, il a été au service du CES en tant qu'agent temporaire relevant de l'article 2, sous a), du RAA. En effet, l'article 8, deuxième alinéa, du RAA interdirait à l'administration, pour les contrats relevant de l'article 2, sous b), du RAA, non seulement d'octroyer une durée de service totale supérieure à trois ans, mais également de renouveler plus d'une fois lesdits contrats. Même si les contrats d'agent temporaire, qui ont successivement lié le requérant au CES, ne précisent pas la base juridique en vertu de laquelle ils ont été conclus, les sept renouvellements des contrats s'opposeraient à ce que ces derniers relèvent de l'article 2, sous b), du RAA.

28.
    En tout état de cause, quel qu'ait été son statut, le requérant estime, se référant à l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut et à l'article 40 du RAA, que tous les agents temporaires, nommés fonctionnaires des Communautés par la suite, doivent pouvoir bénéficier des mêmes droits pour ce qui concerne le transfert des droits à pension. En outre, l'article 10 des DGE ne ferait aucune distinction entre les différentes catégories d'agents temporaires.

29.
    Le Conseil rétorque que la situation du requérant, à la date de sa demande de transfert de l'équivalent actuariel de ses droits à pension d'ancienneté était celle d'un fonctionnaire titularisé. Il se serait ainsi trouvé dans l'hypothèse prévue à l'article 10, paragraphe 1, premier tiret, des DGE. Cette disposition s'appliquerait quelle que soit l'activité exercée par le fonctionnaire antérieurement à son entrée au service des Communautés en tant que fonctionnaire. La question de savoir si le requérant a été engagé en tant qu'agent temporaire au titre de l'article 2, sous a) ou b), du RAA serait donc sans pertinence. En tout état de cause, le Conseil soutient que, en 1984 et en 1985, le requérant a été engagé au CES en tant qu'agent temporaire surla base de contrats qui entrent dans le champ d'application de l'article 2, sous b), du RAA.

Appréciation du Tribunal

30.
    Il ressort du dossier que le requérant a exercé des activités professionnelles en Grèce avant d'être engagé comme agent auxiliaire, puis agent temporaire auprès du CES. Par la suite, il est devenu fonctionnaire du Conseil et a demandé à ce que ses droits à pension acquis au titre du régime grec soient transférés vers le régime communautaire.

31.
    Lorsqu'un tel transfert est effectué, l'institution concernée doit calculer, conformément à l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut, le nombre des annuités qu'elle prend en compte d'après le régime communautaire de pensions au titre de la période de service antérieur, notamment national. Ce calcul est fondé sur la base du montant de l'équivalent actuariel ou du forfait de rachat des droits à pension d'ancienneté que le nouveau fonctionnaire a acquis au titre de ses activités antérieures.

32.
    Il ressort de la décision attaquée que le Conseil a pris en considération, pour effectuer ce calcul, la date et le grade de titularisation du requérant. Le requérant estime toutefois que le Conseil, en procédant ainsi, a commis une erreur de droit. Aux fins du calcul de la bonification d'annuités, il est allégué que le Conseil aurait dû se fonder sur la date et le grade du requérant au moment de son entrée en service au CES en tant qu'agent temporaire.

33.
    À cet égard, il convient de rappeler que le requérant était fonctionnaire au moment où il a demandé le transfert de ses droits à pension du régime grec vers le régime communautaire.

34.
    Or, s'agissant du transfert des droits à pension nationaux en faveur des fonctionnaires, l'article 11, paragraphe 2, deuxième alinéa, de l'annexe VIII du statut dispose que «l'institution où le fonctionnaire est en service détermine, compte tenu du grade de titularisation, le nombre des annuités qu'elle prend en compte d'après son propre régime au titre de la période de service antérieur sur la base du montant de l'équivalent actuariel ou du forfait de rachat». C'est ainsi que la Cour a jugé, dans son arrêt Bevere/Commission, cité au point 23 ci-dessus (point 11), que, pour un fonctionnaire qui demande le transfert de ses droits à pension nationaux vers le régime communautaire, c'est le grade de titularisation, à savoir le grade attribué à la date de la titularisation, qui doit être pris en compte pour le calcul de la bonification d'annuités.

35.
    Même si, comme le relève le requérant, les DGE ont été adoptées postérieurement à l'arrêt Bevere/Commission, cité au point 23 ci-dessus, il doit être constaté que l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut n'a pas subi de modifications depuis la date du prononcé de cet arrêt.

36.
    En tout état de cause, il doit être constaté que les DGE confirment, à l'instar de l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut, que, pour un fonctionnaire, le calcul de la bonification d'annuités doit être effectué en fonction de la date et du grade de titularisation.

37.
    En effet, pour ce qui concerne le transfert des droits à pension, les DGE font une distinction entre, d'une part, les fonctionnaires (article 7 des DGE) et, d'autre part, les agents temporaires visés à l'article 2, sous a), c) et d), du RAA, qui ont, en vertu de l'article 39, paragraphe 2, du RAA, droit à une pension d'ancienneté (article 8 des DGE). L'article 10 des DGE distingue aussi clairement ces deux catégories d'ayants droit à un transfert des droits à pension nationaux.

38.
    Conformément aux DGE, un agent temporaire, qui demande le transfert de ses droits à pension nationaux vers le régime communautaire, recevra une bonification d'annuités, qui sera calculée, en application de l'article 10, paragraphes 2 et 3, des DGE, en fonction de la date et du grade de l'agent à la fin du stage ou, à défaut de stage, de l'entrée au service des Communautés. En revanche, pour le fonctionnaire qui demande le transfert de ses droits à pension, l'article 10, paragraphes 2 et 3, des DGE indique que le calcul de la bonification d'annuités se fait en fonction de la date et du grade de titularisation.

39.
    Or, il n'est pas contesté que le requérant était fonctionnaire au moment où il a demandé son transfert des droits à pension. Conformément à l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut et à l'article 10, paragraphes 2 et 3, des DGE, le calcul de la bonification d'annuités devait donc s'effectuer en fonction de la date et du grade de titularisation du requérant.

40.
    À l'audience, le requérant a souligné que la disposition de l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut s'applique au «fonctionnaire qui entre au service des Communautés». Or, le requérant était déjà au service des Communautés au moment où il est devenu fonctionnaire. Il allègue que, dans ces conditions, les dispositions pertinentes relatives aux agents temporaires devaient s'appliquer pour ce qui concerne le transfert de ses droits à pension du régime grec vers le régime communautaire.

41.
    Force est de constater que ni le statut, ni le RAA, ni les DGE ne contiennent des dispositions régissant spécifiquement, pour ce qui concerne le transfert des droits à pension, la situation d'un agent temporaire devenu fonctionnaire par la suite. En l'absence de telles dispositions spécifiques, le transfert des droits à pension du requérant, qui était fonctionnaire au moment où il a formulé une demande à cet effet, est régi par les dispositions de l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut et de l'article 10, paragraphes 2 et 3, des DGE, selon lesquelles la bonification d'annuités est calculée en fonction de la date et du grade de titularisation du fonctionnaire.

42.
    Il doit encore être souligné que dans l'affaire qui a donné lieu à l'arrêt Bevere/Commission, cité au point 23 ci-dessus, le requérant avait, à l'instar du requérant dans la présente affaire, d'abord été engagé comme agent temporaire avant de devenir fonctionnaire. Or, la Cour a jugé qu'une telle situation ne justifiait pas que la date et le grade de la première entrée en service soient pris en compte pour le calcul de la bonification d'annuités (arrêt Bevere/Commission, cité au point 23 ci-dessus, points 11 et 12). La Cour souligne à cet égard que la prise en considération de la date de titularisation ne désavantage pas nécessairement le fonctionnaire qui est entré au service de la Communauté en tant qu'agent temporaire. En effet, la disposition de l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut aboutit à des résultats plus favorables que la solution soutenue par le requérant,dans tous les cas où le traitement de base octroyé au moment du recrutement en tant qu'agent temporaire était plus élevé que celui défini lors de la titularisation ultérieure (arrêt Bevere/Commission, cité au point 23 ci-dessus, point 12).

43.
    Le requérant tire encore un argument de l'insertion d'un troisième alinéa à l'article 32 du statut par le règlement n° 3947/92. En vertu de cette disposition: «L'agent temporaire dont le classement a été fixé conformément aux critères de classement arrêtés par l'institution garde l'ancienneté d'échelon qu'il a acquise en qualité d'agent temporaire lorsqu'il a été nommé fonctionnaire dans le même grade à la suite immédiate de cette période.» Selon le requérant, cette disposition aurait consacré le principe de la continuité de carrière entre les agents temporaires et les fonctionnaires.

44.
    Cet argument doit être rejeté. Il doit en effet être constaté que l'article 32 du statut ne modifie en rien l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut. Or, dès lors que le requérant était fonctionnaire au moment où il a demandé le transfert de ses droits à pension du régime grec, c'est à juste titre que le Conseil a calculé, conformément à l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut et des DGE, la bonification d'annuités en fonction de la date et du grade de titularisation du requérant.

45.
    Au cours de la procédure précontentieuse, le requérant s'est référé à une pratique de la Commission qui vise à éviter qu'un agent temporaire qui se trouve dans l'impossibilité de demander le transfert des droits à pension nationaux uniquement en raison du retard, imputable aux autorités de l'État membre concerné, dans l'adoption des mesures visant à permettre ce transfert subisse un préjudice par l'inaction de l'État membre en question. Selon cette pratique, si un tel agent temporaire devient fonctionnaire par la suite, le calcul de la bonification d'annuités pour la pension d'ancienneté sera effectué, une fois les mesures nationales permettant ledit transfert adoptées, sur la base du traitement de l'intéressé au moment de son entrée en service en qualité d'agent temporaire. À la suite d'une question écrite, le Conseil a reconnu que la pratique de la Commission est également la sienne.

46.
    Il est constant entre les parties et pour la Commission qui l'a confirmé, à la suite d'une demande de renseignements, que la pratique en question ne s'applique pas aux agents temporaires relevant de l'article 2, sous b), du RAA. En effet, dès lors que, en vertu de l'article 39, paragraphe 2, du RAA, ces agents temporaires n'ont pas droit à une pension d'ancienneté communautaire, l'éventuel retard pris par les autorités d'un État membre pour permettre le transfert des droits de pension nationaux vers le régime communautaire n'est pas de nature à leur faire grief.

47.
    C'est dans ce contexte que doit être compris l'argument du requérant selon lequel les contrats d'agent temporaire qui l'ont lié au CES en 1984 et 1985 relevaient de l'article 2, sous a), du RAA.

48.
    À cet égard, le Tribunal rappelle que le nombre d'agents temporaires engagés sur la base de l'article 2, sous a), du RAA figure au tableau des effectifs annexé à la section du budget afférente à l'institution en cause dans la colonne «emplois temporaires». En revanche, les agents temporaires engagés sur la base de l'article 2, sous b), du RAA ne sont pas identifiables dans le tableau des effectifs dès lors qu'ils occupent des emplois figurant dans lacolonne «emplois permanents» dudit tableau (arrêt de la Cour du 9 août 1994, Rasmussen/Commission, C-398/93 P, Rec. p. I-4043, points 23 et 27; arrêt du Tribunal du 6 juillet 1993, Rasmussen/Commission, T-32/92, Rec. p. II-765, point 34).

49.
    Les huit contrats d'agent temporaire qui ont lié le requérant au CES au cours de la période comprise entre le 1er mai 1984 et le 31 mars 1985 n'indiquent pas la base juridique précise sur laquelle ils ont été conclus.

50.
    Toutefois, en ce qui concerne le CES, les tableaux des effectifs pour les années 1984 et 1985 n'ont prévu aucun emploi temporaire (JO 1984, L 12, p. 69, et JO 1985, L 206, p. 75).

51.
    Dans ces conditions, il doit être considéré que le requérant a nécessairement été engagé en vue d'occuper, à titre temporaire, un emploi permanent compris dans le tableau des effectifs du CES. Par voie de conséquence, les contrats qui ont lié le requérant au CES au cours des années 1984 et 1985, relevaient de l'article 2, sous b), du RAA.

52.
    Le requérant prétend toutefois que les sept renouvellements de son contrat initial s'opposent à ce que ses contrats d'agent temporaire relèvent de cette disposition.

53.
    À cet égard, il doit être rappelé que l'article 8, deuxième alinéa, du RAA dispose:

«L'engagement d'un agent visé à l'article 2 point b) ne peut excéder deux ans et ne peut être renouvelé qu'une fois pour une durée d'un an au plus.»

54.
    En l'espèce, la durée totale des différents contrats d'agent temporaire conclus entre le requérant et le CES était comprise entre le 1er mai 1984 et le 31 mars 1985. Les contrats en question respectent donc l'exigence de l'article 8, deuxième alinéa, du RAA concernant la durée maximale des contrats relevant de l'article 2, sous b), du RAA.

55.
    Même si les sept renouvellements du contrat initial d'agent temporaire ne respectent pas la lettre de l'article 8, deuxième alinéa, du RAA, cette constatation ne permet pas de requalifier les relations entre le requérant et le CES comme relevant de l'article 2, sous a), du RAA, à défaut d'emplois temporaires prévus dans les tableaux des effectifs du CES pour la période litigieuse. En effet, si les relations contractuelles devaient être requalifiées, il y aurait lieu de constater que, à partir du deuxième renouvellement, le requérant occupait un poste d'agent auxiliaire au sens de l'article 3 du RAA, qui, à l'instar d'un agent temporaire relevant de l'article 2, sous b), du RAA, n'a pas non plus droit à une pension d'ancienneté communautaire.

56.
    Il résulte de tout ce qui précède que, même si les autorités helléniques avaient déjà adopté les dispositions nécessaires pour permettre le transfert des droits à pension nationaux au moment où le requérant a conclu ses contrats d'agent temporaire, celui-ci n'aurait pas pu, en tout état de cause, demander le transfert en question à cette époque dès lors que sa qualité d'agent temporaire relevant de l'article 2, sous b), du RAA ou, le cas échéant, d'agent auxiliaire ne l'aurait pas permis.

57.
    Enfin, le requérant se base sur l'article 40 du RAA pour affirmer que tous les agents temporaires, y compris les agents temporaires au sens de l'article 2, sous b), du RAA, nommés fonctionnaires des Communautés par la suite, devraient bénéficier des mêmes droits en ce qui concerne le calcul de la bonification d'annuités à l'occasion d'un transfert de droits à pension. Il avance que l'article 10 des DGE ne ferait en outre aucune distinction entre les différentes catégories d'agents temporaires.

58.
    Le Tribunal rappelle que l'article 10 des DGE porte sur le calcul de la bonification d'annuités résultant du transfert des droits à pension d'un régime national vers le régime communautaire. Si, certes, cette disposition se réfère aux agents temporaires en général, il résulte toutefois clairement de l'article 8 des DGE que le transfert en question est réservé aux fonctionnaires, d'une part, et aux agents temporaires relevant de l'article 2, sous a), c), et d), du RAA, d'autre part (voir ci-dessus point 37). L'argument tiré de l'article 10 des DGE doit donc être rejeté.

59.
    Ensuite, il doit être rappelé que, lorsqu'un agent temporaire est nommé fonctionnaire, la période de service effectué en qualité d'agent temporaire est prise en compte pour le calcul des annuités de la pension d'ancienneté conformément à l'article 40 du RAA et à l'article 4 de l'annexe VIII du statut. Le requérant a bénéficié de l'application de ces dispositions (voir ci-dessus point 9).

60.
    Toutefois, comme l'a souligné la Cour dans son arrêt Bevere/Commission, cité au point 23 ci-dessus (point 13), l'article 40 du RAA n'affecte pas le calcul à effectuer en vertu de l'article 11, paragraphe 2, de l'annexe VIII du statut. En effet, la circonstance que l'article 40 du RAA et l'article 4 de l'annexe VIII du statut s'appliquent également en faveur des fonctionnaires qui ont été agents temporaires au sens de l'article 2, sous b), du RAA n'implique pas pour autant que de tels agents temporaires auraient droit à une pension d'ancienneté ou pourraient, pendant leur période d'engagement en tant qu'agent temporaire, bénéficier d'un transfert des droits à pension nationaux vers le régime communautaire. Une telle interprétation ne serait, en effet, pas compatible avec l'article 39, paragraphe 2, du RAA, qui accorde un droit à pension uniquement en faveur des agents relevant de l'article 2, sous a), c) et d), du RAA.

61.
    Il ressort de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté.

Sur les dépens

62.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, aux termes de l'article 88 du règlement de procédure, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé, chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté.

2)    Chaque partie supportera ses propres dépens.

Jaeger

Lenaerts
Azizi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juin 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

M. Jaeger


1: Langue de procédure: le français.