Language of document : ECLI:EU:T:2019:44

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

31 janvier 2019 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la Syrie – Gel des fonds – Erreur d’appréciation – Modulation dans le temps des effets d’une annulation »

Dans l’affaire T‑559/17,

Mouhamad Wael Abdulkarim, demeurant à Dubaï (Émirats arabes unis), représenté par Mes J.-P. Buyle et L. Cloquet, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté initialement par Mmes M. Veiga et I. Pouli, puis par Mme Pouli et M. V. Piessevaux, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision (PESC) 2017/917 du Conseil, du 29 mai 2017, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2017, L 139, p. 62), du règlement d’exécution (UE) 2017/907 du Conseil, du 29 mai 2017, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2017, L 139, p. 15), de la décision (PESC) 2018/778 du Conseil, du 28 mai 2018, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2018, L 131, p. 16), et du règlement d’exécution (UE) 2018/774 du Conseil, du 28 mai 2018, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2018, L 131, p. 1), pour autant que ces actes concernent le requérant,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Gratsias, président, Mme I. Labucka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : Mme M. Marescaux, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 20 septembre 2018,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, M. Mouhamad Wael Adbulkarim, est un homme d’affaires demeurant à Dubaï (Émirats arabes unis).

2        Condamnant fermement la répression violente des manifestations pacifiques en divers endroits dans toute la Syrie et lançant un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la force, le Conseil de l’Union européenne a adopté, le 9 mai 2011, la décision 2011/273/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2011, L 121, p. 11). Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil a institué un embargo sur les armes, une interdiction des exportations de matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne, des restrictions à l’admission dans l’Union européenne ainsi que le gel des fonds et des ressources économiques de certaines personnes et entités responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne.

3        Les noms des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie ainsi que ceux des personnes physiques ou morales et des entités qui leur sont liées sont mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de cette décision, le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et de la politique de sécurité, peut modifier cette annexe.

4        Étant donné que certaines des mesures restrictives prises à l’encontre de la République arabe syrienne entrent dans le champ d’application du traité FUE, le Conseil a adopté, le 9 mai 2011, le règlement (UE) no 442/2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2011, L 121, p. 1). Ce règlement est, pour l’essentiel, identique à la décision 2011/273, mais il prévoit des possibilités de déblocage des fonds gelés. La liste des personnes, des entités et des organismes reconnus comme étant soit responsables de la répression en cause, soit associés à ces responsables, figurant dans l’annexe II de ce règlement, est identique à celle figurant dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 14, paragraphes 1 et 4, du règlement no 442/2011, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il modifie l’annexe II en conséquence et, par ailleurs examine la liste qui y figure à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois.

5        Par sa décision 2011/782/PESC, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO 2011, L 319, p. 56), le Conseil a estimé, compte tenu de la gravité de la situation en Syrie, qu’il était nécessaire d’instituer des mesures restrictives supplémentaires. Par souci de clarté, les mesures imposées par la décision 2011/273 et les mesures supplémentaires ont été regroupées dans un instrument juridique unique. La décision 2011/782 prévoit, à son article 18, des restrictions en matière d’admission sur le territoire de l’Union et, à son article 19, le gel des fonds et des ressources économiques des personnes et entités dont le nom figure à son annexe I.

6        Le règlement no 442/2011 a été remplacé par le règlement (UE) no 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement no 442/2011 (JO 2012, L 16, p. 1).

7        Par la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO 2012, L 330, p. 21), les mesures restrictives en cause ont été regroupées dans un instrument juridique unique.

8        La décision 2012/739 a été remplacée par la décision 2013/255/PESC du Conseil, du 31 mai 2013, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2013, L 147, p. 14). La décision 2013/255 a été prorogée jusqu’au 1er juin 2015 par la décision 2014/309/PESC du Conseil, du 28 mai 2014, modifiant la décision 2013/255 (JO 2014, L 160, p. 37).

 Procédure antérieure concernant l’inscription initiale du requérant

9        Par sa décision d’exécution 2015/383/PESC, du 6 mars 2015, mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO 2015, L 64, p. 41), le Conseil a modifié cette décision en vue notamment d’appliquer les mesures restrictives en cause à d’autres personnes et entités. Le nom du requérant figurait à la ligne 201, section A, annexe I, de cette décision concernant les personnes visées par ces mesures restrictives, de même que la date de l’inscription de son nom sur la liste en cause, en l’occurrence le 7 mars 2015, et les motifs suivants :

« Directeur exécutif de Pangates International Corp. Ltd, entité désignée, qui agit en tant qu’intermédiaire dans l’approvisionnement du régime syrien en pétrole.

En tant que directeur exécutif de Pangates, Wael Abdulkarim soutient le régime syrien et en tire avantage. Il occupe également un poste important au sein d’Al Karim Group, entité désignée, société mère de Pangates.

En raison des postes importants qu’il occupe au sein de Pangates et d’Al Karim Group, il est également associé à ces entités désignées. »

10      Le même jour, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) 2015/375, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 64, p. 10). Le nom du requérant a été inséré dans la liste figurant à l’annexe de ce règlement avec les mêmes mentions et motifs que ceux retenus dans la décision d’exécution 2015/383.

11      Le 1er juin 2015, le requérant a introduit devant le Tribunal un recours visant à obtenir l’annulation de la décision d’exécution 2015/383 et du règlement d’exécution 2015/375, tels que mis en œuvre ou modifiés jusqu’à la date de présentation du recours, pour autant que ces actes le concernaient. Ce recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous le numéro T‑304/15.

12      Par arrêt du 11 mai 2017, Abdulkarim/Conseil (T‑304/15, non publié, EU:T:2017:327), le Tribunal a fait droit au recours en annulation formé par le requérant et a annulé la décision d’exécution 2015/383 et le règlement d’exécution 2015/375, pour autant qu’ils concernaient le requérant.

 Procédure de réinscription et de maintien du nom du requérant

13      Le 12 octobre 2015, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2015/1836, modifiant la décision 2013/255 (JO 2015, L 266, p. 75). Le même jour, il a adopté le règlement (UE) 2015/1828, modifiant le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 266, p. 1).

14      Aux termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, « [l]e Conseil a estimé que, en raison du contrôle étroit exercé sur l’économie par le régime syrien, un cercle restreint de femmes et d’hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie n’[était] en mesure de maintenir son statut que grâce à des liens étroits avec le régime et au soutien de celui-ci, ainsi qu’à l’influence exercée en son sein » et « [l]e Conseil estime qu’il devrait prévoir des mesures restrictives pour imposer des restrictions à l’admission des femmes et des hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie, identifiés par le Conseil et dont la liste figure à l’annexe I, ainsi que pour geler tous les fonds et ressources économiques qui leur appartiennent, qui sont en leur possession, ou qui sont détenus ou contrôlés par eux, afin de [les] empêcher de fournir un soutien matériel ou financier au régime et, par l’influence qu’ils exercent, d’accroître la pression sur le régime lui-même afin qu’il modifie sa politique de répression ».

15      La rédaction des articles 27 et 28 de la décision 2013/255 a été modifiée par la décision 2015/1836. Ces articles prévoient désormais également des restrictions à l’entrée ou au passage en transit sur le territoire des États membres ainsi que le gel des fonds des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » sauf « informations suffisantes indiquant [que ces personnes] ne sont pas, ou ne sont plus, liées au régime ou qu’elles n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’elles ne sont pas associées à un risque réel de contournement ».

16      Par lettre du 29 avril 2016, adressée aux représentants du requérant, le Conseil a informé le requérant de son intention de modifier les motifs de l’inscription du nom de celui-ci sur les listes en cause après avoir procédé au réexamen de cette inscription. Il a fixé un délai au requérant pour formuler d’éventuelles observations.

17      Par lettre du 13 mai 2016, les représentants du requérant se sont opposés à la réinscription du nom du requérant sur les listes en cause.

18      Le 27 mai 2016, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2016/850, modifiant la décision 2013/255 (JO 2016, L 141, p. 125). Le nom du requérant a été réinscrit à la ligne 201, section A, annexe I, de cette dernière décision concernant les personnes visées par des mesures restrictives, pour les motifs suivants :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie dans les secteurs du pétrole et de la chimie et dans l’industrie de transformation. Il représente en particulier Abdulkarim Group, alias Al Karim Group/Alkarim for Trade and Industry/Al Karim Trading and Industry/Al Karim for Trade and Industry. Abdulkarim Group est un important fabricant de lubrifiants, de graisses et de produits chimiques industriels en Syrie. »

19      Le même jour, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) 2016/840, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2016, L 141, p. 30). Le nom du requérant a été inséré dans la liste figurant à l’annexe de ce règlement avec les mêmes mentions et motifs que ceux retenus dans la décision d’exécution 2016/850.

20      Par lettre du 30 mai 2016, adressée aux représentants du requérant, le Conseil a répondu à leur lettre du 13 mai 2016. Par lettre du 1er juin 2016, adressée au requérant, il a notifié au requérant une copie de la décision 2016/850 et du règlement d’exécution 2016/840.

21      Le 29 septembre 2016, le Conseil a adopté la décision d’exécution (PESC) 2016/1746, du 29 septembre 2016, mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO 2016, L 264, p. 30). Le nom du requérant y figure avec les mêmes motifs que ceux retenus dans l’annexe de la décision d’exécution 2016/850.

22      Le 29 mai 2017, par sa décision (PESC) 2017/917, modifiant la décision 2013/255 (JO 2017, L 139, p. 62), le Conseil a prorogé cette dernière décision jusqu’au 1er juin 2018. Le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2017/907, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2017, L 139, p. 15).

23      Par lettre du 30 mai 2017, envoyée aux représentants du requérant, le Conseil a notifié au requérant une copie de la décision 2017/917 et du règlement d’exécution 2017/907.

24      Le 28 mai 2018, par sa décision (PESC) 2018/778, modifiant la décision 2013/255 (JO 2018, L 131, p. 16), le Conseil a prorogé cette dernière décision jusqu’au 1er juin 2019. Le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2018/774 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2018, L 131, p. 1).

 Procédure et conclusions des parties

25      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 août 2017, le requérant a introduit le présent recours à l’encontre de la décision 2017/917 et du règlement d’exécution 2017/907.

26      Le 23 novembre 2017, le Conseil a déposé au greffe du Tribunal le mémoire en défense.

27      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 26 juillet 2018, le requérant a adapté ses conclusions afin d’obtenir également l’annulation de la décision 2018/778 ainsi que du règlement d’exécution 2018/774. Le Conseil a présenté ses observations sur le mémoire en adaptation.

28      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision 2017/917, le règlement d’exécution 2017/907, la décision 2018/778 et le règlement 2018/774 en ce qu’ils le concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

29      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

30      Par le présent recours, le requérant demande, en substance, l’annulation des décisions 2017/917 et 2018/778 et du règlement no 36/2012, tel que modifié, en dernier lieu, par les règlements d’exécution 2017/907 et 2018/774, pour autant que ces actes le concernent (ci-après les « actes attaqués »).

31      Au soutien du recours, le requérant invoque cinq moyens. Le premier moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation, le deuxième, d’une violation du principe de proportionnalité, le troisième, d’une violation du droit de propriété et d’exercer une activité professionnelle, le quatrième, d’un détournement de pouvoir et le cinquième, d’une violation de l’obligation de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

32      Le requérant soutient que l’inscription de son nom sur les listes en cause doit reposer sur une base suffisamment solide et que la charge de la preuve des motifs retenus à son égard pèse sur le Conseil.

33      Premièrement, le requérant conteste être un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, conformément à l’article 27, paragraphe 2, sous a), et à l’article 28, paragraphe 2, sous a), de la décision 2013/255 et soutient que, même s’il pouvait être considéré comme un homme d’affaires influent, le Conseil n’a pas apporté la preuve qu’il soit lié au régime, qu’il exerce une influence sur celui-ci ou qu’il pose un risque réel de contournement des mesures restrictives prises en raison de la situation en Syrie, alors que cette preuve lui incombe.

34      Deuxièmement, le requérant conteste la véracité des motifs contenus dans les actes attaqués et soutient qu’ils n’ont pas été étayés à suffisance de droit. À ce titre, en premier lieu, il dément jouer un rôle important dans Alkarim for Trade and Industry LLC. Notamment, il fait valoir qu’il n’occupe pas un poste de direction ou de représentation dans cette société et qu’il n’occupait pas non plus de tels postes au moment où son nom a été réinscrit sur les listes en cause. À cet égard, il soutient, d’abord, qu’il a quitté toute fonction exécutive il y a plus de quatre ans, lorsqu’il a définitivement quitté la Syrie pour s’installer à Dubaï. Ensuite, il fait valoir qu’il ne détient qu’une participation de 10 % dans le capital de cette société et que le Tribunal a jugé au point 49 de l’arrêt du 6 avril 2017, Alkarim for Trade and Industry/Conseil (T‑35/15, non publié, EU:T:2017:262), que sa participation dans la société en question ne saurait être suffisamment élevée pour lui octroyer un tel pouvoir de décision. Enfin, il fait valoir que, ainsi qu’il ressort du certificat d’enregistrement de la société concernée, l’administrateur délégué de la même société est M. Mohammed Jamal Abdulkarim.

35      En deuxième lieu, le requérant soutient que Abdulkarim Group ne peut, en aucun cas, être qualifié de « conglomérat syrien reconnu à l’échelle internationale ». À cet égard, il fait valoir, d’abord, qu’Abdulkarim Group n’est pas une personne morale disposant de personnalité juridique, ni un groupe de sociétés ou un conglomérat au sens du droit des sociétés, mais uniquement un nom commercial utilisé à des fins commerciales et de marketing par Alkarim for Trade and Industry, Alkarim for Chemicals LLC, Alkarim for Lubricants LLC et Jameel Sharour & Partners Co (ci-après « Jameel Sharour »), disposant elles de la personnalité juridique. En outre, il estime qu’Alkarim for Chemicals ne constitue en aucun cas une filiale d’Alkarim for Trade and Industry, ou une « filiale » de ce nom commercial Ensuite, il indique que le Conseil, en dépit des explications régulières fournies, confond Alkarim for Trade and Industry et Abdulkarim Group, prétendant à tort que ce dernier serait une variation de la dénomination sociale d’Alkarim for Trade and Industry. Il fait observer à cet égard qu’il faut clairement dissocier les dénominations sociales des quatre sociétés susvisées, ayant une personnalité juridique propre et le nom commercial Abdulkarim Group, et qu’Alkarim for Trade and Industry est uniquement la société plus importante faisant usage de ce nom commercial. Enfin, il affirme qu’il ne détient que des parts minoritaires dans Alkarim for Chemicals, Alkarim for Lubricants et Jameel Sharour et qu’il n’est pas habilité à les représenter à l’égard des tiers ou à valablement les engager.

36      En troisième lieu, le requérant fait valoir qu’Alkarim for Trade and Industry doit être bien distinguée en termes d’importance de Fuchs Petrolub AG (ci-après « Fuchs »), qui a d’ailleurs révoqué la licence de production octroyée à Alkarim for Trade and Industry. Par ailleurs, il considère que cette dernière société ne peut être qualifiée que de petite ou moyenne entreprise étant donné que, en 2016, elle n’employait que quarante-neuf travailleurs et qu’Alkarim for Chemicals, Alkarim for Lubricants et Jameel Sharour ne totalisent, à elles trois, qu’une trentaine d’employés.

37      En quatrième lieu, le requérant fait valoir que les documents qui tentent d’établir un lien entre lui-même et Pangates International Corp. Ltd (ci-après « Pangates ») ne sont pas pertinents étant donné que cette société a été dissoute et liquidée le 29 juillet 2015. En outre, il soutient qu’il y a lieu de considérer comme non pertinents tous les documents tendant à établir un lien entre lui-même et des sociétés qui ne sont pas actives en Syrie.

38      En cinquième lieu, le requérant soutient que le Conseil s’est fondé sur des documents comportant des inexactitudes matérielles, obsolètes, non à jour ou non datées qui constituent des sources d’information non fiables ou manquant manifestement de précision et sont, par conséquent, dépourvus de force probante.

39      En sixième et dernier lieu, le requérant fait valoir qu’il ne réside pas en Syrie, mais à Dubaï, où il est installé depuis plus de quatre ans et que, dès lors, il ne peut pas exercer d’activités en Syrie.

40      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

41      Il y a lieu de rappeler que l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne exige que, au titre du contrôle de la légalité des motifs sur lesquels est fondée la décision d’inscrire le nom d’une personne ou d’une entité sur les listes en cause, le juge de l’Union s’assure que l’acte en question repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend cet acte, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un deux considéré comme suffisant en soi pour soutenir ce même acte, sont étayés (voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Fulmen et Mahmoudian, C‑280/12 P, EU:C:2013:775, point 64 et jurisprudence citée).

42      C’est, en effet, à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne concernée, et non à cette dernière d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé de ces motifs. Il n’est pas requis que cette autorité produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués dans les actes dont il est demandé l’annulation. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étayent les motifs retenus à l’encontre de la personne concernée (voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Fulmen et Mahmoudian, C‑280/12 P, EU:C:2013:775, points 66 et 67 et jurisprudence citée).

43      En outre, dans le cadre de l’appréciation de la gravité de l’enjeu, qui fait partie du contrôle de la proportionnalité des mesures restrictives en cause, il peut être tenu compte du contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures, ayant pour objet de faire pression sur le régime syrien afin qu’il arrête la répression violente dirigée contre la population, et de la difficulté d’obtenir des preuves plus précises dans un État en situation de guerre civile doté d’un régime de nature autoritaire (arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 47).

44      Il convient de relever que les critères généraux d’inscription énoncés à l’article 27, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, et à l’article 28, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, de la décision 2013/255 et repris, en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1 bis, sous a), et paragraphe 1 ter, du règlement no 36/2012 prévoient que la catégorie des femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie fait l’objet de mesures restrictives, sauf s’il existe des informations suffisantes indiquant qu’ils ne sont pas, ou ne sont plus, liés au régime ou qu’ils n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’ils ne sont pas associés à un risque réel de contournement.

45      Par ailleurs, il convient de souligner que le Conseil a réinscrit et maintenu le nom du requérant sur les listes annexées aux actes attaqués pour les motifs suivants :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie dans les secteurs du pétrole et de la chimie et dans l’industrie de transformation. Il représente en particulier, Abdulkarim Group, alias Al Karim Group/Alkarim for Trade and Industry/Al Karim Trading and Industry/Al Karim for Trade and Industry. Abdulkarim Group est un important fabricant de lubrifiants, de graisses et de produits chimiques industriels en Syrie ».

46      Le requérant conteste les allégations du Conseil relatives aux motifs de la réinscription de son nom sur les listes en cause. Il considère que le Conseil n’a pas apporté d’éléments de preuve de nature à démontrer le bien-fondé de ces motifs.

47      Il y a lieu de constater que le requérant ne conteste pas être un homme d’affaires exerçant ses activités dans le secteur des carburants, des huiles, des graisses et des lubrifiants. Il conteste cependant être un homme d’affaires influent. À cet égard, d’une part, il dément représenter Alkarim for Trade and Industry et Abdulkarim Group et, d’autre part, il conteste qu’Abdulkarim Group puisse être qualifié de conglomérat syrien reconnu à l’échelle internationale.

48      Le Conseil conteste l’argumentation factuelle du requérant et maintient qu’il n’a commis aucune erreur d’appréciation à cet égard.

49      En l’espèce, il importe d’observer que le Conseil a fourni, pour justifier la réinscription du nom du requérant sur les listes en cause, le document COREU, du 25 mai 2016, portant la référence CFSP/0125/16 ‑ ST 9471/16 et les documents portant les références 577/16 à 601/16 RELEX. Il s’agit de plusieurs documents comportant des éléments d’information publiquement accessibles, destinés à préciser, selon le Conseil, le contexte général et personnel qui concerne le requérant ainsi que des éléments d’information fournis à l’appui de la motivation.

50      En premier lieu, il convient de relever que le requérant ne conteste pas avoir une participation de 10 % dans le capital social d’Alkarim for Trade and Industry. Toutefois, il fait valoir que cette participation ne lui confère aucun pouvoir de représentation ou de décision dans cette société.

51      À cet égard, premièrement il convient de signaler que le seul fait de posséder une participation de 10 % dans le capital d’Alkarim for Trade and Industry ne saurait être considéré comme suffisant pour constater que le requérant a un pouvoir de décision dans cette société (voir, en ce sens, arrêt du 6 avril 2017, Alkarim for Trade and Industry/Conseil, T‑35/15, non publié, EU:T:2017:262, point 49). Deuxièmement, force est de constater que les statuts et le certificat d’enregistrement d’Alkarim for Trade and Industry signalent que le directeur exécutif est M. Mohamad Jamal Abdulkarim, qui détient 70 % du capital social de cette société. Cette affirmation est corroborée par l’extrait du site Internet « bizshark.com » (document portant la référence 589/16 RELEX) et l’extrait du site Internet de Fuchs (document portant la référence 596/16 RELEX), qui identifient M. Mohamad Jamal Abdulkarim comme étant le président ou le directeur général d’Alkarim for Trade and Industry. En outre, il convient d’observer que les articles 18 et 19 des statuts d’Alkarim for Trade and Industry déterminent que le directeur général représente et dirige la société. Enfin, il convient de signaler que, même si le document portant la référence 590/16 RELEX identifie le requérant comme étant le directeur d’Alkarim for Trade and Industry, ce document, non daté, ne saurait être considéré comme suffisant étant donné que cette affirmation n’est pas corroborée par d’autres éléments de preuves et est contradictoire avec d’autres éléments de preuve plus objectifs, tels que les statuts et le certificat d’enregistrement de cette société, qui identifient M. Mohamad Jamal Abdulkarim comme étant le directeur exécutif de cette société. Troisièmement, il convient de relever que la seule justification apportée par le Conseil aux fins de démontrer que le requérant représente Alkarim for Trade and Industry consiste en un extrait du site Internet « Syria Business Database » (document portant la référence 586/16 RELEX) et un extrait du site Internet « made-in-china.com » (document portant la référence 593/16 RELEX) qui montreraient que le requérant serait la personne de contact d’Alkarim for Trade and Industry. Or, force est de constater que le fait que le requérant apparaisse comme la personne de contact ne prouve pas de manière suffisamment étayée qu’il représente Alkarim for Trade and Industry ou qu’il a une influence décisive sur celle-ci. Ces extraits démontrent à tout le plus qu’il est un contact de la société en question, mais ne sont pas suffisants pour prouver que le requérant exerce un contrôle opérationnel sur ladite société.

52      En second lieu, en ce qui concerne Abdulkarim Group, il convient de relever que, d’une part, le requérant conteste qu’il s’agisse d’un conglomérat syrien reconnu à l’échelle internationale, comme le soutient le Conseil et, d’autre part, il dément représenter Abdulkarim Group.

53      Concernant l’importance d’Abdulkarim Group, il y a lieu de relever que les extraits fournis comme éléments de preuve par le Conseil ne contiennent pas de données concrètes et utiles aux fins de décrire Abdulkarim Group comme étant un conglomérat syrien reconnu à l’échelle internationale. À cet égard, premièrement, il convient de relever qu’Abdulkarim Group, ainsi que le Conseil l’a reconnu lors de l’audience, n’apparaît que dans un nom de domaine utilisé par quatre sociétés, à savoir Alkarim for Trade and Industry, Alkarim for Chemicals, Alkarim for Lubricants et Jameel Sharour disposant elles de la personnalité juridique et n’employant, pour la première d’entre elles, pas plus de quarante-neuf employés. Deuxièmement, il convient d’observer que le Conseil se fonde sur l’importance internationale et le poids économique d’autres sociétés (Fuchs, Pangates et Morgan Additives), auxquelles Abdulkarim Group serait lié ou associé. Or, il convient de constater, d’une part, que Fuchs n’a pas renouvelé la licence de production qu’elle avait octroyée à Alkarim for Trade and Industry en 2008 et qui a expiré le 29 juillet 2013 et, d’autre part, que Pangates a été mise en dissolution le 29 juillet 2015. Dès lors, il y a lieu de considérer comme non pertinents les documents faisant référence à Pangates et à Fuchs. En outre, le Conseil fait également référence à Morgan Additives, dont le requérant serait président, associée à Abdulkarim Group, qui a été désignée par l’US Department of the Treasury (département du Trésor des États-Unis) conformément au document portant la référence 599/16 RELEX en raison des avantages économiques qu’elle procurerait au régime. Toutefois, il convient de relever, d’une part, que cette société exerce ses activités hors de la Syrie et n’est pas inscrite sur les listes des mesures restrictives adoptées par l’Union et, d’autre part, que le requérant a transféré ses parts dans cette société.

54      Troisièmement, le Conseil se fonde également sur les documents portant les références 579/16 RELEX et 587/16 RELEX pour démontrer l’importance et le poids économique d’Abdulkarim Group. Cependant, il convient de noter que, si l’extrait du journal en ligne The Syria Report (document portant la référence 579/16 RELEX) indique qu’Abdulkarim Group utilise des installations dans les zones d’Adra et de Tartous (Syrie), des zones de libre-échange pour le stockage et l’entreposage de produits pétroliers, cet indice, daté du 8 octobre 2012, n’est pas corroboré par d’autres éléments de preuve permettant de conclure à une telle utilisation. En outre, s’agissant de l’extrait du journal en ligne World Bulletin (document portant la référence 587/16 RELEX), daté du 5 août 2015, qui établit que le requérant aurait facilité le versement de près de cinq millions de dollars pour une livraison d’essence en Syrie, en recourant à des sociétés associées à Abdulkarim Group, telles que Milenyum Energie et The Eagles, il convient de relever que ce document n’a pas de force probante étant donné qu’il s’exprime au conditionnel et n’est pas corroboré par d’autres éléments de preuve. En tout état de cause, il convient de relever que ne figure pas dans les motifs d’inscription le fait que le requérant aurait agi en tant qu’intermédiaire dans l’approvisionnement du régime syrien en pétrole ou qu’il serait associé à des sociétés telles que Milenyum Energie ou The Eagles.

55      Dès lors, il y a lieu de relever qu’aucun élément de preuve ainsi qu’un indice sérieux et crédible n’a été apporté par le Conseil aux fins de corroborer le fait qu’Abdulkarim Group serait un conglomérat syrien reconnu à l’échelle internationale.

56      Concernant la représentation d’Abdulkarim Group, d’une part, force est de constater que, même si le document portant la référence 580/16 RELEX mentionne le requérant comme étant la personne de contact d’Abdulkarim Group lors du comité de jeunes industriels de la Fédération arabe de l’industrie mécanique, ou l’extrait du site Internet « who.is » (document portant la référence 581/16 RELEX) indique que le requérant a enregistré le nom de domaine d’Abdulkarim Group, cela ne saurait être suffisant pour considérer que le requérant représente légalement Abdulkarim Group. En outre, il convient de noter que les documents présentés par le Conseil relèvent être contradictoires entre eux, étant donné que l’extrait du site Internet « tradeboss » (document portant la référence 582/16 RELEX) indique que le requérant est le directeur d’Abdulkarim Group, en revanche l’extrait du journal en ligne The Syria Report (document portant la référence 579/16 RELEX) indique que le directeur général d’Abdulkarim Group est M. Tarek Assaf et l’extrait du site Internet de la Fédération arabe de l’industrie mécanique (document portant la référence 577/16 RELEX) indique que le directeur général d’Abdulkarim Group est M. Jamal Abdulkarim. Enfin, s’agissant du document daté du 17 décembre 2014, portant la référence 584/16 RELEX, et extrait de l’US Department of the Treasury (département du Trésor des États-Unis) qui mentionne le requérant comme étant le directeur d’Abdulkarim Group et signale ce groupe comme faisant partie des listes américaines, il convient de constater que ce document ne saurait être considéré comme suffisant étant donné, d’une part, qu’aucun autre élément de preuve ainsi qu’un indice sérieux et crédible n’a été apporté par le Conseil aux fins de corroborer les faits mentionnés dans le communiqué de presse des autorités américaines et, d’autre part, que les déclarations de la part des autorités d’un État tiers annonçant l’adoption de ses propres mesures restrictives, dans un système de sanctions autonome tel que celui mis en œuvre à l’encontre de la Syrie, ne sauraient donc suffire, elles-mêmes et sans une autre documentation à l’appui de prouver que le requérant dirige Abdulkarim Group.

57      D’autre part, il y a lieu de relever qu’il ne saurait être considéré que le requérant représente et dirige Abdulkarim Group du seul fait de ses participations minoritaires dans Alkarim for Trade and Industry, Alkarim for Lubricants et Jameel Sharour. À cet égard, il ressort de l’annexe 14 de la requête que le requérant détient 10 % du capital social d’Alkarim for Trade and Industry, 20 % du capital social d’Alkarim for Lubricants et 20 % de celui de Jameel Sharour. En outre, il ressort du certificat de commerce de Jameel Sharour et du certificat d’enregistrement d’Alkarim for Trade and Industry que le directeur exécutif de ces sociétés est M. Mohammad Jamal Abdulkarim.

58      Par conséquent, au vu des éléments de preuve apportés par le Conseil, il n’est pas établi que le requérant représente Abdulkarim Group.

59      Il résulte de ce qui précède que le Conseil n’a pas démontré l’ampleur économique d’Abdulkarim Group, ni l’influence du requérant dans les sociétés utilisant le nom commercial Abdulkarim Group et par conséquent, son statut d’homme d’affaires influent.

60      Partant, ainsi qu’il ressort aux points 50 à 59 ci-dessus, force est de constater que, analysés dans leur ensemble, les éléments présentés en l’espèce par le Conseil ne constituent pas un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants, au sens de la jurisprudence rappelée au point 44 ci-dessus, permettant d’établir à suffisance de droit le bien-fondé des motifs retenus contre le requérant.

61      Par conséquent, l’inscription du nom du requérant sur les listes figurant dans les annexes des actes attaqués doit être considérée comme entachée d’une erreur d’appréciation.

62      Au vu de ce qui précède, il y a lieu d’annuler les actes attaqués, pour autant qu’ils concernent le requérant, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens d’annulation soulevés par le requérant à l’appui du recours.

 Sur les effets dans le temps de l’annulation des actes attaqués

63      S’agissant du règlement no 36/2012, d’une part, dans sa version en vigueur à compter du 29 mai 2017 et, d’autre part, dans sa version en vigueur à compter du 28 mai 2018, pour autant qu’il concerne le requérant, il suffit de rappeler que, en vertu de l’article 60, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, les décisions du Tribunal annulant un règlement ne prennent effet qu’à compter de la date d’expiration du délai du pourvoi, visé à l’article 56, premier alinéa, de ce statut ou, si un pourvoi a été introduit dans ce délai, à compter du rejet de celui-ci. L’annulation de cet acte ne saurait donc, en tout état de cause, avoir un effet immédiat.

64      En revanche, s’agissant des décisions 2017/917 et 2018/778, pour autant qu’elles concernent le requérant, il convient de préciser que les effets de leur annulation sont, en principe, immédiats.

65      Néanmoins, en vertu de l’article 264, second alinéa, TFUE, le Tribunal peut, s’il l’estime nécessaire, indiquer ceux des effets d’un acte annulé qui doivent être considérés comme définitifs. Il résulte de la jurisprudence que cette disposition permet au juge de l’Union de décider de la date de prise d’effet de ses arrêts en annulation (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2013, Nabipour e.a./Conseil, T‑58/12, non publié, EU:T:2013:640, points 249 à 251 et jurisprudence citée).

66      En l’espèce, le Tribunal considère qu’il est nécessaire de maintenir les effets des décisions 2017/917 et 2018/778 dans le temps jusqu’à la date d’expiration du délai de pourvoi visé à l’article 56, premier alinéa, du statut de la Cour ou, si un pourvoi a été introduit dans ce délai, jusqu’au rejet du pourvoi.

67      En effet, l’annulation avec effet immédiat des décisions 2017/917 et 2018/778 en ce qu’elles concernent le requérant permettrait à ce dernier de transférer tout ou partie de ses actifs hors de l’Union.

68      Par ailleurs, une différence entre la date d’effet de l’annulation du règlement no 36/2012, tel que modifié, en dernier lieu, par les règlements d’exécution 2017/907 et 2018/774, et celle des décisions 2017/917 et 2018/778 serait susceptible d’entraîner une atteinte sérieuse à la sécurité juridique (voir, en ce sens, arrêt du 28 mai 2013, Al Matri/Conseil, T‑200/11, non publié, EU:T:2013:275, point 89 et jurisprudence citée).

69      Dès lors, les effets des décisions 2017/917 et 2018/778 doivent être maintenus en ce qui concerne le requérant jusqu’à la date d’expiration du délai de pourvoi ou, si un pourvoi est introduit dans ce délai, jusqu’au rejet éventuel du pourvoi.

 Sur les dépens

70      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux du requérant, conformément aux conclusions de ce dernier.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision (PESC) 2017/917 du Conseil, du 29 mai 2017, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie, la décision (PESC) 2018/778 du Conseil, du 28 mai 2018, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement (UE) no 442/2011, tel que modifié, en dernier lieu, par le règlement d’exécution (UE) 2017/907 du Conseil, du 29 mai 2017, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et par le règlement d’exécution (UE) 2018/774 du Conseil, du 28 mai 2018, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie, sont annulés pour autant que ces actes concernent M. Mouhamad Wael Abdulkarim.

2)      Les effets des décisions 2017/917 et 2018/778 sont maintenus à l’égard de M. Abdulkarim jusqu’à la date d’expiration du délai de pourvoi ou, si un pourvoi est introduit dans ce délai, jusqu’au rejet éventuel du pourvoi.

3)      Le Conseil de l’Union européenne supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par M. Abdulkarim.

Gratsias

Labucka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 31 janvier 2019.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

      D. Gratsias


*      Langue de procédure : le français.