Language of document : ECLI:EU:T:2015:901

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

26 novembre 2015 (*)

« Aides d’État – Télévision numérique – Aide au déploiement de la télévision numérique terrestre dans des zones éloignées et moins urbanisées en Espagne – Décision déclarant les aides pour partie compatibles et pour partie incompatibles avec le marché intérieur – Notion d’entreprise – Activité économique – Avantage – Service d’intérêt économique général – Caractère sélectif – Article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE – Obligation de motivation »

Dans les affaires jointes T‑463/13 et T‑464/13,

Comunidad Autónoma de Galicia (Espagne), représentée par Mes M. Lorenzo Outón et P. Egerique Mosquera, avocats,

partie requérante dans l’affaire T‑463/13,

Redes de Telecomunicación Galegas Retegal, SA (Retegal), établie à Saint-Jacques-de-Compostelle (Espagne), représentée par Mes F. García Martínez et B. Pérez Conde, avocats,

partie requérante dans l’affaire T‑464/13,

contre

Commission européenne, représentée par MM. É. Gippini Fournier, B. Stromsky et Mme P. Němečková, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

SES Astra, établie à Betzdorf (Luxembourg), représentée par Mes F. González Díaz et F. Salerno ainsi que, dans l’affaire T-463/13, par Me V. Romero Algarra, avocats,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2014/489/UE de la Commission, du 19 juin 2013, relative à l’aide d’État SA.28599 [(C 23/2010) (ex NN 36/2010, ex CP 163/2009)] accordée par le Royaume d’Espagne en faveur du déploiement de la télévision numérique terrestre dans des zones éloignées et moins urbanisées (excepté en Castille-La-Manche) (JO L 217, p. 52),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich (rapporteur), président, J. Schwarcz et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 mars 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Les présentes affaires concernent des mesures mises en exécution par les autorités espagnoles dans le cadre du passage de la radiodiffusion analogique à la radiodiffusion numérique en Espagne en ce qui concerne l’ensemble du territoire espagnol, à l’exception de la communauté autonome de Castille-La-Manche (Espagne). Cette numérisation, qui peut techniquement être effectuée par le biais des plates-formes terrestre, satellitaire, câblée ou par le biais des accès à haut débit sur Internet, permet une utilisation plus efficace du spectre de fréquences radio. Dans la radiodiffusion numérique, le signal de télévision résiste mieux aux interférences et peut être accompagné d’une série de services complémentaires qui donnent une valeur ajoutée à la programmation. En outre, le processus de numérisation permet d’obtenir le soi-disant « dividende numérique », c’est-à-dire des fréquences libérées, puisque les technologies de la télévision numérique occupent un spectre bien moins large que les technologies analogiques. C’est en raison de ces avantages que la Commission européenne a encouragé, dès 2002, la numérisation dans l’Union européenne.

2        Le Royaume d’Espagne a instauré le cadre réglementaire nécessaire pour promouvoir le processus de transition de la radiodiffusion analogique à la radiodiffusion numérique, en promulguant notamment la Ley 10/2005 de Medidas Urgentes para el Impulso de la Televisión Digital Terrestre, de Liberalización de la Televisión por Cable y de Fomento del Pluralismo (loi 10/2005 établissant des mesures urgentes en vue du développement de la télévision numérique terrestre, de la libéralisation de la télévision par câble et encourageant au pluralisme) du 14 juin 2005 (BOE n° 142, du 15 juin 2005, p. 20562, ci-après la « loi 10/2005 ») et le Real Decreto 944 /2005 por el que se aprueba el Plan técnico nacional de la televisión digital terrestre (décret royal 944/2005 portant approbation du programme technique national en faveur de la télévision numérique terrestre) du 29 juillet 2005 (BOE n° 181, du 30 juillet 2005, p. 27006, ci-après le « décret royal 944/2005 »). Ce décret royal a imposé aux radiodiffuseurs nationaux de couvrir 96 % de la population dans le cas du secteur privé et 98 % de la population dans le cas du secteur public sur leur territoire respectif.

3        Afin de gérer le passage de la télévision analogique à la télévision numérique, les autorités espagnoles ont divisé le territoire espagnol en trois zones distinctes :

–        dans la zone I, qui comprend 96 % de la population espagnole et qui a été considérée comme commercialement rentable, le coût du passage au numérique a été supporté par les radiodiffuseurs publics et privés ;

–        dans la zone II, qui comprend des régions moins urbanisées et éloignées représentant 2,5 % de la population espagnole, les radiodiffuseurs, à défaut d’intérêt commercial, n’ont pas investi dans la numérisation, ce qui a amené les autorités espagnoles à mettre en place un financement public ;

–        dans la zone III, englobant 1,5 % de la population espagnole, la topographie exclut la transmission numérique terrestre, de sorte que le choix s’est porté sur la plate-forme satellitaire.

4        Par décision du 7 septembre 2007, le Conseil des ministres espagnol a adopté le programme national en faveur du passage à la télévision numérique terrestre (ci-après la « TNT ») portant mise en œuvre du programme technique national prévu par le décret royal 944/2005. Ledit programme a divisé le territoire espagnol en 90 projets techniques de passage et a fixé une date limite pour la fin de la radiodiffusion analogique pour chacun de ces projets. L’objectif fixé dans ce programme était d’atteindre une couverture de la population espagnole par le service de TNT analogue à la couverture de ladite population par la télévision analogique en 2007, à savoir plus de 98 % de cette population.

5        Dès lors que les obligations de couverture fixées pour la TNT (voir point 2 ci-dessus) risquaient de conduire à une couverture de la population espagnole moindre que la couverture de ladite population par la radiodiffusion analogique préexistante, il était nécessaire de garantir la couverture télévisuelle dans la zone II. Les présentes affaires ne portent que sur le financement public accordé par les autorités espagnoles pour soutenir le processus de numérisation terrestre dans ladite zone, et plus particulièrement sur le financement de ce processus à l’intérieur des régions de la Galice qui sont situées dans cette zone. En Galice, la zone en question compte une population de plus de 216 000 habitants.

6        Le 29 février 2008, le ministère de l’Industrie, du Tourisme et du Commerce espagnol (ci-après le « MITC ») a adopté une décision destinée à améliorer les infrastructures de télécommunication et à fixer les critères et la répartition du financement des actions menées en faveur du développement de la société de l’information dans le cadre d’un plan intitulé « Plan Avanza ». Le budget approuvé en vertu de cette décision a été alloué en partie à la numérisation de la télévision dans la zone II.

7        Entre juillet et novembre 2008, la numérisation dans la zone II a été conduite au moyen de différents addenda aux conventions-cadres de 2006 en vigueur signés par le MITC et les communautés autonomes du Royaume d’Espagne dans le cadre du Plan Avanza. À la suite de ces addenda, le MITC a transféré des fonds aux communautés autonomes, qui se sont engagées à couvrir les autres dépenses liées à l’opération avec leurs propres ressources budgétaires.

8        Le 17 octobre 2008, le Conseil des ministres espagnol a décidé d’assigner des fonds supplémentaires pour étendre et compléter la couverture de la TNT dans le cadre des projets de passage qui devaient être mis en œuvre au cours du premier semestre de 2009. Les fonds ont été accordés après la signature de nouvelles conventions-cadres entre le MITC et les communautés autonomes en décembre 2008 relatives à la mise en œuvre du programme national en faveur du passage à la TNT. Le 29 mai 2009, ledit Conseil des ministres a approuvé les critères de répartition des fonds alloués au financement des initiatives en faveur du passage à la TNT.

9        Après la signature des addenda aux conventions-cadres de 2008 relatifs à l’extension de couverture de la TNT et la publication de ces conventions-cadres et de ces addenda au Boletín oficial del Estado, les communautés autonomes ont engagé le processus d’extension. À cet effet, elles se sont occupées de l’organisation d’appels d’offres ou ont confié cette organisation à des entreprises privées. Dans certains cas, les communautés autonomes ont demandé aux communes de se charger de l’extension.

10      En règle générale, deux types d’appels d’offres ont été lancés en Espagne. Premièrement, il y a eu les appels d’offres pour l’extension de la couverture qui impliquaient de confier à l’attributaire la mission de fournir un réseau de TNT opérationnel. À cet effet, la conception et l’exploitation du réseau, le transport du signal, le déploiement du réseau et la fourniture de l’équipement nécessaire figuraient parmi les tâches à effectuer. Les autres appels d’offres portaient sur la fourniture d’équipements de télécommunication.

11      Au total, entre 2008 et 2009, près de 163 millions d’euros prélevés sur le budget central, en partie des prêts à des conditions préférentielles accordés par le MITC aux communautés autonomes, et environ 60 millions d’euros prélevés sur les budgets des seize communautés autonomes concernées ont été investis pour l’extension de la couverture dans la zone II. Par ailleurs, les communes ont financé l’extension à hauteur d’environ 3,5 millions d’euros.

12      À partir de 2009, la deuxième étape après l’extension de la TNT dans la zone II consistait, pour certaines communautés autonomes, à organiser d’autres appels d’offres ou à conclure, sans appels d’offres, les contrats d’exploitation et de maintenance de l’équipement numérisé et déployé pendant l’extension. Le montant total des fonds alloués au moyen d’appels d’offres pour l’exploitation et la maintenance pour les années allant de 2009 à 2011 s’élevait à au moins 32,7 millions d’euros.

13      En Galice (Espagne), la requérante dans l’affaire T‑463/13, la communauté autonome de Galice, exerce ses compétences en position d’autonomie législative et financière par rapport à l’État espagnol, conformément aux dispositions de la constitution espagnole et de son statut d’autonomie. Ces compétences portent, notamment, sur des domaines de radiodiffusion ainsi que de services et d’infrastructures publiques dans les termes prévus dans ladite constitution et dans le statut d’autonomie en cause. Afin d’assurer la continuité de la prestation de télévision dans la zone II, la communauté autonome de Galice a confié des missions de gestion à la requérante dans l’affaire T‑464/13, Redes de Telecomunicación Galegas Retegal, SA (Retegal), une entreprise publique appartenant à 100 % à ladite communauté autonome, cette dernière lui ayant octroyé des fonds pour soutenir le processus de numérisation.

14      Le 18 mai 2009, la Commission a reçu une plainte émanant d’un opérateur européen de satellites, à savoir l’intervenante, SES Astra, qui portait sur un régime d’aides présumé des autorités espagnoles en faveur du passage de la télévision analogique à la télévision numérique dans la zone II. Selon ledit opérateur, cette mesure comportait une aide non notifiée qui aurait créé une distorsion de concurrence entre la plate-forme de radiodiffusion terrestre et celle de radiodiffusion satellitaire.

15      Par lettre du 29 septembre 2010, la Commission a informé le Royaume d’Espagne de sa décision d’ouvrir la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE concernant l’aide en question sur l’ensemble du territoire espagnol, à l’exception de la communauté autonome de Castille-La-Manche, région dans laquelle une procédure indépendante a été ouverte (ci-après la « décision d’ouverture »). Par la publication de la décision d’ouverture, le 14 décembre 2010, au Journal officiel de l’Union européenne (JO C 337, p. 17), la Commission a invité les intéressés à présenter leurs observations.

16      Après avoir reçu des observations des autorités espagnoles et d’autres parties intéressées, la Commission a adopté, le 19 juin 2013, la décision 2014/489/UE relative à l’aide d’État SA.28599 [(C 23/2010) (ex NN 36/2010, ex CP 163/2009)] accordée par le Royaume d’Espagne en faveur du déploiement de la télévision numérique terrestre dans des zones éloignées et moins urbanisées (excepté en Castille-La-Manche) (JO L 217, p. 52, ci-après la « décision attaquée »), dont le dispositif prévoit ce qui suit :

« Article premier

L’aide d’État accordée aux opérateurs de la plate-forme de télévision terrestre pour le déploiement, la maintenance et l’exploitation du réseau de télévision numérique terrestre dans la zone II, exécutée illégalement par [le Royaume d’]Espagne, en violation des dispositions de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, est incompatible avec le marché intérieur, à l’exception de l’aide qui aurait été accordée conformément au principe de neutralité technologique.

Article 2

L’aide individuelle octroyée au titre du régime visé à l’article 1er n’est pas constitutive d’une aide d’État si, au moment de son octroi, elle remplit les conditions établies dans le règlement adopté en vertu de l’article 2 du règlement (CE) n° 994/98 du Conseil, applicable au moment où l’aide est octroyée.

Article 3

1. [Le Royaume d’]Espagne devra récupérer, auprès des opérateurs de télévision numérique terrestre, l’aide incompatible accordée en vertu du régime visé à l’article 1er, qu’ils aient reçu l’aide directement ou indirectement.

2. Les sommes à récupérer produiront des intérêts à compter de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition des bénéficiaires, jusqu’à leur récupération effective.

3. Les intérêts seront calculés sur une base composée conformément au chapitre V du règlement (CE) n° 794/2004 de la Commission.

4. [Le Royaume d’]Espagne annulera tous les paiements en suspens de l’aide visée à l’article 1er, à compter de la date de la notification de la présente décision.

Article 4

1. La récupération de l’aide octroyée dans le cadre du régime visé à l’article 1er sera immédiate et effective.

2. [Le Royaume d’]Espagne veillera à ce que la présente décision soit mise en œuvre dans un délai de quatre mois à compter de sa notification.

3. Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, [le Royaume d’]Espagne communiquera les informations suivantes à la Commission :

a)      la liste des bénéficiaires qui ont reçu l’aide en vertu du régime cité à l’article 1er et le montant total de l’aide reçue par chacun d’entre eux, conformément audit régime, ventilé en fonction des catégories qui figurent à la section 6.2 ;

b)      le montant total (principal et intérêts) à recouvrer auprès de chaque bénéficiaire ;

[…]

Article 5

Le Royaume d’Espagne est destinataire de la présente décision. »

17      Aux fins de motiver la décision attaquée, en premier lieu, la Commission a considéré que les différents instruments adoptés au niveau central et les conventions qui avaient été conclues et modifiées entre le MITC et les communautés autonomes constituaient la base du régime d’aides pour l’extension de la TNT dans la zone II. Dans la pratique, les communautés autonomes auraient appliqué les directives du gouvernement espagnol sur l’extension de la TNT (considérant 91 de ladite décision).

18      En deuxième lieu, la Commission a constaté que la mesure en cause devait être considérée comme une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Étant donné que ladite mesure aurait été financée à partir du budget de l’État et des budgets de certaines communautés autonomes et communes, il s’agirait d’une intervention au moyen de ressources d’État. Selon la Commission, l’extension des réseaux d’émission de télévision était une activité économique et ne relevait pas de l’exercice de prérogatives de puissance publique. Les opérateurs de la plate-forme de TNT seraient les bénéficiaires directs de l’aide, tandis que les opérateurs de réseau qui auraient participé aux appels d’offres portant sur l’extension de la couverture seraient les bénéficiaires indirects de l’aide. L’avantage de cette mesure pour ces derniers opérateurs serait sélectif, car une telle mesure ne bénéficierait qu’au secteur de la radiodiffusion et, dans ce secteur, la même mesure ne concernerait que les entreprises qui intervenaient sur le marché de la plate-forme terrestre. Selon la décision attaquée, les autorités espagnoles ont présenté, comme le meilleur et l’unique exemple, le cas de la communauté autonome du Pays basque (Espagne) pour invoquer l’absence d’aide d’État conformément aux critères posés par la Cour dans l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, Rec, EU:C:2003:415). Toutefois, le premier critère de cet arrêt, selon lequel l’entreprise bénéficiaire doit effectivement être chargée de l’exécution d’obligations de service public et selon lequel ces obligations doivent être clairement définies, n’était, selon la Commission, pas satisfait. En outre, en l’absence de garantie du moindre coût dans l’intérêt général de ladite communauté autonome, le quatrième critère dudit arrêt n’aurait pas été satisfait. Selon la Commission, compte tenu du fait que les plates-formes de radiodiffusion satellitaire et terrestre étaient concurrentes, la mesure destinée au déploiement, à l’exploitation et à la maintenance de la TNT dans la zone II faussait le jeu de la concurrence entre les deux plates-formes. La mesure en question aurait également eu une incidence sur les échanges au sein de l’Union (considérants 94 à 141 de ladite décision).

19      En troisième lieu, la Commission a constaté que la mesure en cause ne pouvait être considérée comme une aide d’État compatible avec le marché intérieur, en vertu de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, en dépit du fait que cette mesure était destinée à atteindre un objectif d’intérêt commun bien défini et qu’elle avait reconnu l’existence d’une défaillance du marché. Selon elle, dès lors que ladite mesure ne respectait pas le principe de neutralité technologique, cette mesure n’était pas proportionnée et ne constituait pas un instrument approprié pour garantir la couverture des chaînes en clair aux résidents de la zone II (considérants 148 à 171 de la décision attaquée).

20      En quatrième lieu, la Commission a considéré que, en l’absence de définition avec précision de l’exploitation d’une plate-forme terrestre en tant que service public, la mesure en cause ne pouvait être justifiée au titre de l’article 106, paragraphe 2, TFUE (considérant 172 de la décision attaquée).

21      En cinquième lieu, la Commission a relevé que la mesure en cause n’était pas une aide existante, parce que ladite mesure devait être considérée comme une modification ayant eu une influence sur la substance même du régime initial. Les autorités espagnoles auraient donc dû notifier cette mesure (considérants 173 à 175 de la décision attaquée).

22      En sixième lieu, la Commission a précisé les différents cas dans lesquels les autorités espagnoles devaient récupérer l’aide en cause auprès des bénéficiaires directs et indirects (considérants 179 à 197 de la décision attaquée).

 Procédure et conclusions des parties

23      Par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 30 août 2013, les requérantes ont introduit les présents recours.

24      Par actes déposés au greffe du Tribunal le 24 septembre 2013, l’intervenante a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Il a été fait droit à ces demandes par ordonnances du 10 février 2014, Comunidad Autónoma de Galicia/Commission (T‑463/13, EU:T:2014:82) et Retegal/Commission (T‑464/13, EU:T:2014:83).

25      L’intervenante a déposé ses mémoires en intervention le 24 mars 2014. Par actes déposés au greffe du Tribunal le 24 avril 2014, les requérantes ont présenté leurs observations sur ces mémoires. La Commission n’a pas présenté d’observations sur les mémoires de l’intervenante.

26      Par ordonnance du 9 février 2015, les parties ayant été entendues, les présentes affaires ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt, conformément à l’article 50 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991.

27      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

28      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du 2 mai 1991, le Tribunal a invité la Commission à produire des documents. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti.

29      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 13 mars 2015.

30      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer les moyens soulevés recevables et fondés ;

–        annuler la décision attaquée de telle sorte qu’il soit constaté que les mesures mises en œuvre en Galice ne constituaient pas une aide d’État illégale ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée afin de conclure que Retegal n’a bénéficié ni directement ni indirectement d’une aide d’État illégale ;

–        condamner la Commission aux dépens.

31      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours comme irrecevables ou dépourvus de fondement ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

32      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        faire droit aux conclusions de la Commission ;

–        condamner les requérantes aux dépens découlant de ses interventions.

 En droit

 Sur la recevabilité

33      Dans les mémoires en défense, la Commission a contesté la recevabilité des recours et, plus précisément, la qualité pour agir des requérantes qui ne seraient pas les destinataires de la décision attaquée. Lors de l’audience, elle a indiqué qu’elle ne contestait plus la qualité pour agir de Retegal.

34      Aux termes de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas de cet article, un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.

35      En l’espèce, il est constant que la décision attaquée a pour unique destinataire le Royaume d’Espagne. Dans ces conditions, les recours en annulation ne sont recevables, en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, que si les requérantes sont directement et individuellement concernées par la décision attaquée ou si les requérantes sont directement concernées par la décision attaquée et cette dernière constitue un acte réglementaire qui ne comporte pas de mesures d’exécution (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2013, Telefónica/Commission, C‑274/12 P, Rec, EU:C:2013:852, point 19).

36      En premier lieu, s’agissant du recours dans l’affaire T‑463/13, il convient de relever que celui-ci est recevable, bien que la communauté autonome de Galice ne soit pas destinataire de la décision attaquée. En effet, il est constant que c’est ladite communauté autonome qui a décidé d’accorder une partie des aides litigieuses en Galice. La décision attaquée, qui empêche cette communauté autonome d’exercer, comme elle l’entend, ses compétences propres, dont elle jouit directement en vertu du droit espagnol, affecte donc directement et individuellement sa position juridique (voir, en ce sens, arrêts du 8 mars 1988, Exécutif régional wallon et Glaverbel/Commission, 62/87 et 72/87, Rec, EU:C:1988:132, points 6 et 8 ; du 30 avril 1998, Vlaamse Gewest/Commission, T‑214/95, Rec, EU:T:1998:77, point 29, et du 9 septembre 2009, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑227/01 à T‑229/01, T‑265/01, T‑266/01 et T‑270/01, Rec, EU:T:2009:315, point 76).

37      En second lieu, en ce qui concerne le recours dans l’affaire T‑464/13, selon une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d’une décision ne sauraient prétendre être individuellement concernés que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une décision le serait (voir, en ce sens, arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec, EU:C:1963:17, p. 197, 223, et du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing, C‑525/04 P, Rec, EU:C:2007:698, point 30).

38      En outre, il ressort de la jurisprudence qu’une entreprise ne saurait, en principe, attaquer une décision de la Commission interdisant un régime d’aides sectoriel si elle n’est concernée par cette décision qu’en raison de son appartenance au secteur en question et de sa qualité de bénéficiaire potentiel dudit régime. En effet, une telle décision se présente, à l’égard de l’entreprise requérante, comme une mesure de portée générale qui s’applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l’égard d’une catégorie de personnes envisagées de manière générale et abstraite (voir arrêt du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑298/00 P, Rec, EU:C:2004:240, point 37 et jurisprudence citée). Toutefois, les bénéficiaires effectifs d’aides individuelles octroyées au titre d’un régime d’aides dont la Commission a ordonné la récupération sont, de ce fait, individuellement concernés au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE (voir arrêt du 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, C‑71/09 P, C‑73/09 P et C‑76/09 P, Rec, EU:C:2011:368, point 53 et jurisprudence citée).

39      En l’espèce, il y a lieu de relever que, ainsi que l’affirme Retegal, au considérant 193 de la décision attaquée, la Commission a expressément constaté que, dans le cas des communautés autonomes dans lesquelles l’extension de la couverture du réseau était mise en œuvre par une entreprise publique agissant en qualité d’opérateur de réseau, c’était cette entreprise qui était considérée comme étant le bénéficiaire directe de la mesure en cause et qui était donc concernée par sa récupération. Selon ledit considérant, Retegal était une telle entreprise. En outre, dans le tableau figurant au considérant 194 de ladite décision, la Commission a estimé à 17 millions d’euros le montant approximatif accordé à Retegal par la communauté autonome de Galice pour l’extension de la couverture.

40      Selon ces constatations, Retegal a effectivement reçu un certain montant des autorités espagnoles aux fins de l’extension de la couverture du réseau dans la zone II en Galice. Par conséquent, la décision attaquée concerne Retegal en raison d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une décision le serait. Il s’ensuit que Retegal a qualité pour agir.

41      Par conséquent, les recours sont recevables.

 Sur le fond

42      Au soutien des recours, les requérantes soulèvent quatre moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE en ce que la Commission a erronément constaté l’existence d’une aide d’État. Les autres moyens sont soulevés à titre subsidiaire. Les deuxième et troisième moyens concernent la question de la compatibilité de l’aide présumée en cause avec le marché intérieur. Ils sont tirés d’une méconnaissance des conditions d’autorisation visées à l’article 106, paragraphe 2, et à l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE. Par le quatrième moyen, les requérantes font valoir que la Commission a erronément qualifié Retegal de bénéficiaire d’une aide d’État illégale.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE

43      Ce moyen est composé, en substance, de trois branches. La première branche est tirée du fait que la Commission a erronément constaté l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, parce que l’action exercée par la communauté autonome de Galice n’avait pas impliqué l’exercice d’une activité économique, mais avait consisté dans l’exercice des prérogatives de puissance publique. Par la deuxième branche, les requérantes font valoir que l’action de la communauté autonome de Galice n’a comporté aucun avantage économique. La troisième branche est tirée d’une erreur d’appréciation du caractère sélectif de l’aide présumée.

–       Sur la première branche, tirée de l’absence d’activité économique

44      Les requérantes font valoir que les actions de la communauté autonome de Galice n’impliquaient pas l’exercice d’une activité économique, mais consistaient essentiellement dans la mission confiée à Retegal de lancer des appels d’offres de fournitures et dans la conclusion d’accords avec les communes de Galice en vue d’offrir l’extension du réseau de télévision terrestre aux citoyens de régions rurales reculées, sans aucune compensation financière. Selon elles, le fait qu’un opérateur soit disposé à exploiter économiquement une activité n’implique pas nécessairement que, lorsque c’est une entité publique qui exerce elle-même ladite activité en tant qu’administration remplissant une mission d’intérêt public sans rechercher aucune contrepartie, rémunération ou avantage économique, celle-ci exerce une activité économique. Elles estiment que, en qualifiant l’activité en cause d’activité économique, la Commission a négligé la pertinence de l’absence de rémunération qui constitue un indice de l’absence de caractère économique d’une activité. S’agissant du rôle de l’intervenante, elles soulignent que celle-ci n’a jamais eu l’intention d’être un opérateur de plate-forme en concurrence dans la zone II, mais qu’elle voulait être le cocontractant de l’administration. Selon elles, l’action de la communauté autonome de Galice et desdites communes consistait dans la dotation d’une infrastructure de télécommunication en vue de permettre à la population des zones rurales ou reculées de capter le signal de télévision, sans contrepartie, et de remédier ainsi aux défaillances du marché. Cette activité constituerait la prise en charge d’un service en faveur de la population et une mission d’intérêt public directement assumée par les pouvoirs publics afin de garantir des valeurs essentielles, telles que la cohésion sociale et des droits fondamentaux. Les requérantes affirment que l’intervention publique visait non à créer un service de support de la télévision numérique, mais plutôt à fournir le service public de radiodiffusion.

45      À titre liminaire, il convient de rappeler que la qualification d’aide, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, requiert que toutes les conditions visées par cette disposition soient remplies. Premièrement, il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État. Deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d’affecter les échanges entre États membres. Troisièmement, elle doit accorder un avantage à son bénéficiaire en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence (voir arrêt du 17 décembre 2008, Ryanair/Commission, T‑196/04, Rec, EU:T:2008:585, point 36 et jurisprudence citée).

46      La présente branche concerne plus particulièrement la troisième de ces conditions, aux termes de laquelle sont considérées comme des aides d’État les interventions qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises, ou qui doivent être considérées comme un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (voir arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Deutsche Post, C‑399/08 P, Rec, EU:C:2010:481, point 40 et jurisprudence citée).

47      Il résulte d’une jurisprudence constante que, dans le contexte du droit de la concurrence, la notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement. Constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné (voir arrêt du 10 janvier 2006, Cassa di Risparmio di Firenze e.a., C‑222/04, Rec, EU:C:2006:8, points 107 et 108 et jurisprudence citée). Le caractère économique ou non d’une activité ne dépend pas du statut privé ou public de l’entité qui l’exerce, ni de la rentabilité de cette activité (voir arrêt du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission, C‑288/11 P, Rec, EU:C:2012:821, point 50 et jurisprudence citée).

48      Selon la jurisprudence, ne présentent pas un caractère économique, justifiant l’application des règles de concurrence du traité FUE, les activités qui relèvent de l’exercice des prérogatives de puissance publique (voir, en ce sens, arrêts du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, Rec, EU:C:1994:7, points 30 et 31, et du 16 décembre 2010, Pays-Bas et NOS/Commission, T‑231/06 et T‑237/06, Rec, EU:T:2010:525, point 93).

49      En ce qui concerne l’éventuelle incidence de l’exercice des prérogatives de puissance publique sur la qualification d’une personne morale d’entreprise au sens du droit de la concurrence de l’Union, il convient de relever que la circonstance qu’une entité dispose, pour l’exercice d’une partie de ses activités, de prérogatives de puissance publique n’empêche pas, à elle seule, de la qualifier d’entreprise au sens du droit de la concurrence de l’Union pour le reste de ses activités économiques. La qualification d’activité relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique ou d’activité économique doit être faite à part pour chaque activité exercée par une entité donnée (voir, en ce sens, arrêt du 1er juillet 2008, MOTOE, C‑49/07, Rec, EU:C:2008:376, point 25 et jurisprudence citée).

50      En premier lieu, s’agissant de la définition de l’activité en cause, il convient de constater que, en vertu de l’article 1er de la décision attaquée, l’activité en cause consistait dans le déploiement, la maintenance et l’exploitation du réseau de TNT dans la zone II par les communautés autonomes, les entreprises publiques et les communes.

51      Les requérantes font valoir que la Commission a erronément simplifié les types d’actions réalisés dans chaque communauté autonome, en considérant qu’ils étaient destinés à l’implantation de la TNT. Selon elles, les actions de la communauté autonome de Galice consistaient essentiellement dans la mission confiée à Retegal de lancer des appels d’offres de fournitures et dans la conclusion d’accords avec les communes de Galice en vue d’offrir l’extension du réseau de télévision terrestre aux citoyens dans la zone II. L’action de ladite communauté autonome et celle desdites communes auraient consisté dans la dotation d’une infrastructure de télécommunication en vue de permettre à la population de ladite zone de capter le signal de télévision, sans contrepartie, et de remédier ainsi aux défaillances du marché. L’action réalisée par cette communauté autonome à travers Retegal aurait consisté, d’une part, en l’acquisition d’équipements, de programmes et de systèmes électroniques, informatiques et de télécommunications afin de numériser les centres analogiques préexistants et, d’autre part, en leur installation et mise en fonctionnement initial. Tandis que la même communauté autonome aurait conservé la propriété des équipements, le maintien, l’entretien, l’utilisation et l’exploitation des installations auraient incombé à ces communes.

52      À cet égard, il convient de rappeler que, en matière d’aides d’État, la finalité poursuivie par des interventions étatiques ne suffit pas à les faire échapper à la qualification d’« aides » au sens de l’article 107 TFUE. En effet, cet article ne distingue pas selon les causes ou les objectifs des interventions étatiques, mais les définit en fonction de leurs effets (voir arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, Rec, EU:C:2008:757, points 84 et 85 et jurisprudence citée).

53      En l’espèce, même à supposer que l’activité de la communauté autonome de Galice ait été limitée à la mission confiée à Retegal de lancer des appels d’offres de fournitures et à la conclusion d’accords avec les communes de Galice et que Retegal ait seulement initialement mis en fonctionnement les installations, tandis que l’utilisation et l’exploitation ultérieure incombait auxdites communes, il y a lieu de relever que les activités tant de ladite communauté autonome que de Retegal et de ces communes ont entraîné le déploiement, le maintien et l’exploitation de la TNT sur le territoire de cette communauté autonome. La Commission n’a donc pas commis d’erreur relative à la définition de l’activité en cause, en ce qui concerne la Galice.

54      En second lieu, il convient d’examiner si l’activité en cause telle que définie dans la décision attaquée relevait de l’exercice des prérogatives de puissance publique, ainsi que l’allèguent les requérantes, ou de l’exercice d’une activité économique.

55      Afin de trancher cette question, il y a lieu de vérifier si l’activité en cause, par sa nature, son objet et les règles auxquelles elle est soumise, se rattache à l’exercice des prérogatives de puissance publique ou si elle présente un caractère économique justifiant l’application des règles de concurrence du droit de l’Union (voir arrêts du 18 mars 1997, Diego Calì & Figli, C‑343/95, Rec, EU:C:1997:160, points 16, 18 et 23 et jurisprudence citée, et du 28 février 2013, Ordem dos Técnicos Oficiais de Contas, C‑1/12, Rec, EU:C:2013:127, point 40 et jurisprudence citée).

56      Aux considérants 97 à 99 de la décision attaquée, la Commission a constaté que l’activité en cause constituait une activité économique au même titre que d’autres cas qui impliquaient la gestion d’infrastructures par les autorités régionales. Selon elle, un marché existait si, comme dans le cas d’espèce, d’autres opérateurs étaient disposés à offrir le service en cause ou étaient en mesure de le faire. Elle a considéré que l’exploitation du réseau de radiodiffusion terrestre ne relevait pas des prérogatives de l’État et qu’elle n’était pas une activité que seul l’État pouvait exercer. Les services concernés ne seraient pas ceux généralement exercés par une autorité publique et ils seraient de nature économique, ce qui serait démontré par le fait que plusieurs entreprises intervenaient sur le marché de la zone I. En outre, elle a indiqué que l’intervenante souhaitait proposer ces services dans la zone II dans le cadre d’un appel d’offres et que l’activité en cause ne concernait que la transmission des chaînes nationales et régionales privées.

57      À la lumière des critères dégagés par la jurisprudence relatifs à la notion d’entreprise citée au point 55 ci-dessus, ces considérations démontrent à suffisance de droit que l’activité en cause, par sa nature, son objet et les règles auxquelles elle est soumise, ne se rattache pas à l’exercice des prérogatives de puissance publique mais qu’elle présente un caractère économique. Aucun argument avancé par les requérantes ne permet de démontrer que la Commission a commis une erreur en qualifiant l’activité en cause d’activité économique.

58      En effet, premièrement, dans la mesure où les requérantes soulignent que l’activité de la communauté autonome de Galice a été réalisée à travers une entreprise publique, qui agissait en tant que « moyen instrumental » propre à l’administration, et qu’il s’agissait, en l’espèce, d’une coopération entre administrations publiques fondée sur leurs propres compétences d’organisation en vue de l’accomplissement de leurs tâches d’intérêt public, il y a lieu de relever que, en ce qui concerne l’application éventuelle des règles de concurrence, il convient de distinguer entre l’hypothèse où l’État agit en exerçant l’autorité publique et celle où il exerce des activités économiques de caractère industriel ou commercial consistant à offrir des biens ou des services sur le marché. À cet égard, il n’importe pas que l’État agisse directement par le biais d’un organe faisant partie de l’administration publique ou par le biais d’une entité qu’il a investie de droits spéciaux ou exclusifs (voir arrêts Diego Calì & Figli, point 55 supra, EU:C:1997:160, points 16 et 17 et jurisprudence citée, et du 12 juillet 2012, Compass-Datenbank, C‑138/11, Rec, EU:C:2012:449, point 35 et jurisprudence citée). Le fait que, en l’espèce, le service en cause est fourni suite à une coopération entre une communauté autonome agissant à travers son entreprise publique et des communes ne saurait donc permettre d’exclure l’existence d’une activité économique. Les obligations découlant du droit de l’Union s’appliquent à toutes les autorités des États membres (voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 1989, Costanzo, 103/88, Rec, EU:C:1989:256, points 30 et 31). En outre, il convient de rappeler que le fait qu’une activité puisse être exercée par une entreprise privée constitue un indice permettant de qualifier l’activité en cause d’activité économique (arrêt du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission, C‑82/01 P, Rec, EU:C:2002:617, point 82).

59      Deuxièmement, s’agissant de l’argumentation des requérantes relative à l’absence de marché concernant le service de télévision numérique dans la zone II, il convient de relever, ainsi que l’a constaté la Commission aux considérants 97 et 99 de la décision attaquée, qu’il existait un marché pour le service de déploiement du réseau numérique en Espagne. D’une part, il est constant que l’intervenante souhaitait proposer le service en cause dans ladite zone dans le cadre de l’appel d’offres lancé en 2008 en Cantabrie (Espagne). Aucun élément fourni par les requérantes ne permet de considérer que l’intervenante avait exclu de proposer un tel service dans cette zone dans le cadre d’un appel d’offres en Galice. En outre, force est de constater que, afin d’examiner l’existence d’un marché en l’espèce, il n’y a pas lieu de se limiter au seul territoire de la communauté autonome de Galice. D’autre part, l’existence d’un marché pour le déploiement du réseau numérique en Espagne découle du fait que, dans la zone I, cette activité était effectuée par des entreprises privées.

60      Troisièmement, dans la mesure où les requérantes soulignent que le service en cause a été fourni sans aucune contrepartie économique pour cette activité, ce dont la Commission n’a pas tenu compte, il y a lieu de relever, d’une part, que, au considérant 97 de la décision attaquée, la Commission a estimé, en faisant référence à l’arrêt du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T‑443/08 et T‑455/08, Rec, EU:T:2011:117), dans la note en bas de page n° 45 de cette décision, que le fait que les entreprises publiques et les communes ne percevaient aucune rémunération pour les services fournis n’empêchait pas de qualifier les activités en cause d’activité économique. Contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, la Commission a donc pris en compte l’absence de rémunération.

61      D’autre part, il convient de rappeler que la question de savoir si l’activité en cause avait un caractère économique ne dépend pas du fait qu’un investisseur privé est prêt à l’exercer sous les mêmes conditions ni de la rentabilité de cette activité (voir, en ce sens, arrêt Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission, point 47 supra, EU:C:2012:821, point 50). Le caractère d’activité économique de l’activité en cause n’est donc pas exclu du fait que la Commission a constaté, aux considérants 151 et 152 de la décision attaquée, l’existence d’une défaillance du marché, parce que les radiodiffuseurs n’étaient pas disposés à supporter les coûts additionnels pour une extension de la couverture qui dépasserait leurs obligations légales. En outre, la gratuité des prestations n’empêche pas la qualification d’une activité comme économique (arrêt du 23 avril 1991, Höfner et Elser, C‑41/90, Rec, EU:C:1991:161, points 19 à 23). Le fait que, ainsi que l’affirment les requérantes, le programme d’action en Galice n’entraînait aucun changement dans la propriété des centres d’émission numérisés, lesquels restaient la propriété des communes, ne joue aucun rôle pour la qualification de l’activité en cause.

62      Quatrièmement, s’agissant de l’argument des requérantes selon lequel le fait qu’un opérateur de réseau est inscrit au registre de la commission du marché des télécommunications espagnole ne permet pas de conclure que cet opérateur exerce nécessairement une activité économique, il convient de constater que, au considérant 97 de la décision attaquée, la Commission a seulement estimé que le fait que la plupart des entreprises publiques ou des communes étaient inscrites à ce registre en qualité d’opérateurs de réseau laissait à penser que celles-ci étaient prestataires de certains services qui, selon la pratique bien établie, constituaient une activité économique. Contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, la Commission n’a donc pas considéré que, en raison de ces inscriptions au registre, l’activité en cause avait nécessairement un caractère économique. En revanche, elle a à bon droit affirmé que de telles inscriptions constituaient un indice de l’existence d’une activité économique.

63      Cinquièmement, les requérantes font valoir que l’activité exercée constitue une mission d’intérêt public directement assumée par les pouvoirs publics afin de garantir des valeurs essentielles, telles que la cohésion sociale et des droits fondamentaux. Cette argumentation ne démontre pas que l’activité en cause relève de l’exercice des prérogatives de puissance publique. En effet, s’il est vrai que la Commission a reconnu, dans la décision attaquée, l’importance et les avantages de la transmission numérique pour la société, il n’en demeure pas moins que ces éléments ne permettent pas de conclure que l’activité en cause est rattachée à l’exercice des prérogatives de puissance publique étant donné que les critères pertinents pour qualifier une activité sont sa nature, son objet et les règles auxquelles elle est soumise.

64      La première branche doit donc être rejetée.

–       Sur la deuxième branche, tirée de l’absence d’avantage économique

65      Les requérantes font valoir que la Commission a erronément affirmé, au considérant 97 de la décision attaquée, que la mesure en cause impliquait un transfert de ressources nationales vers certaines entreprises. Selon elles, l’intervention publique en cause consistait, premièrement, en la conclusion entre la communauté autonome de Galice et le gouvernement espagnol de conventions ayant pour objet le financement des actions, deuxièmement, en des missions de gestion confiées à Retegal, chargée d’organiser les marchés de fournitures requis pour l’acquisition des équipements et, troisièmement, en la conclusion d’accords entre ladite communauté autonome et les communes de Galice assumant le coût d’entretien des équipements. Pour ces différentes actions, ni cette communauté autonome ni Retegal ni lesdites communes n’auraient bénéficié d’un avantage économique consistant dans un transfert de ressources d’État. La communauté autonome en cause se serait bornée à acheter des biens pour céder leur utilisation gratuitement à ces communes qui les géreraient sans percevoir aucune rémunération. Retegal n’aurait pas agi en tant qu’opérateur de réseau, mais en tant que moyen instrumental technique chargé de l’acquisition des équipements et elle ne pourrait donc pas non plus utiliser les infrastructures pour fournir d’autres services. Les mêmes communes n’auraient reçu aucun transfert budgétaire de la part de la communauté autonome en question ou dudit gouvernement, mais auraient seulement conclu un accord de coopération avec cette dernière afin de garantir que leur territoire soit desservi par la télévision numérique. Selon les requérantes, les communes en cause ont agi en tant qu’opérateurs de réseau, mais ne percevaient aucune rémunération du fait de cette activité.

66      Il convient de constater que, au considérant 97 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que la mesure en cause impliquait un transfert de ressources nationales vers certaines entreprises. Selon le considérant 100 de cette décision, les opérateurs de la plate-forme TNT ont été les bénéficiaires directs des mesures en cause, étant donné qu’ils avaient reçu les fonds destinés à l’amélioration et à l’extension de leur réseau dans la zone II. Ils bénéficieraient également de l’aide en cours pour l’exploitation et la maintenance de ces réseaux. Les communautés autonomes auraient choisi différentes formules pour mettre en œuvre l’extension de la couverture et, par conséquent, plusieurs types de bénéficiaires directs auraient été recensés.

67      Premièrement, s’agissant de la question de savoir si la Commission a commis une erreur dans la détermination de l’avantage économique concerné, il y a lieu de rappeler que, pour qu’une intervention étatique puisse relever de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, elle doit pouvoir être considérée comme un avantage consenti à l’entreprise bénéficiaire. À cet égard, sont considérées comme des aides les interventions qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises ou qui sont à considérer comme un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (voir arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra, EU:C:2003:415, points 83 et 84 et jurisprudence citée).

68      Selon la jurisprudence, la notion d’aide peut recouvrir non seulement des prestations positives telles que des subventions, des prêts ou des prises de participation au capital d’entreprises, mais également des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui grèvent normalement le budget d’une entreprise et qui, par là, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques. Il a déjà été jugé que, dans le cadre des avantages indirects qui ont les mêmes effets que les subventions, figure la fourniture de biens ou de services dans des conditions préférentielles (voir arrêt du 20 novembre 2003, GEMO, C‑126/01, Rec, EU:C:2003:622, points 28 et 29 et jurisprudence citée).

69      En l’espèce, il ressort du considérant 100 de la décision attaquée que l’avantage a consisté, selon la Commission, dans la réception des fonds destinés à l’amélioration et à l’extension du réseau terrestre dans la zone II.

70      Il ressort du dossier que, en Galice, au moyen de fonds accordés par le gouvernement espagnol et par la communauté autonome de Galice, Retegal a procédé, en tant qu’instrument de cette dernière, à l’acquisition des équipements pour l’extension de la TNT ainsi qu’à leur placement et mise en fonctionnement initiale. Ces équipements ont été mis à la disposition des communes de Galice qui agissaient en tant qu’opérateurs de réseau, qui mettaient en place un ensemble d’infrastructures de support de ces équipements et qui étaient responsables du maintien, de l’entretien et de la mise au point ultérieure. Ladite communauté autonome a conservé la propriété des équipements en cause. L’extension de la couverture en Galice requérait également la restructuration des centres d’émission, ainsi que l’ont confirmé les requérantes lors de l’audience.

71      Au vu de ce qui précède, le constat de la Commission figurant au considérant 100 de la décision attaquée n’est entaché d’aucune erreur. En effet, il a déjà été rappelé que l’article 107 TFUE ne distingue pas selon les causes ou les objectifs des interventions étatiques, mais les définit en fonction de leurs effets (voir point 52 ci-dessus). Ce sont les fonds publics du gouvernement espagnol, de la communauté autonome de Galice ou des communes concernées qui, en Galice, ont servi à financer le déploiement, l’exploitation et la maintenance du réseau de TNT dans la zone II. Contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, la question de savoir si la dépense de ces fonds publics relatifs au déploiement et à l’exploitation du réseau a mené à un transfert de propriété des équipements concernés ou a seulement créé un droit d’utilisation de ces équipements n’est pas pertinente. Dans la mesure où les fonds publics dudit gouvernement, de ladite communauté autonome et desdites communes ont entraîné le déploiement, le maintien et l’exploitation de la TNT dans ladite zone, la Commission pouvait à bon droit considérer que l’avantage économique octroyé correspondait à ces fonds.

72      L’offre de preuve n° 1 des requérantes figurant dans les requêtes, relative à l’argument selon lequel l’intervention de la communauté autonome de Galice a été limitée à l’acquisition et à l’installation des équipements techniques requis pour l’adaptation des infrastructures analogiques existantes dont seraient titulaires les communes de Galice afin de pouvoir recevoir la télévision numérique, en vue de leur cession et utilisation ultérieures par lesdites communes qui seraient responsables de leur maintien et de leur entretien ultérieurs, n’est donc pas pertinente. Dans la mesure où les équipements relatifs à l’extension de la TNT en Galice ont été achetés et mis à disposition en utilisant des fonds publics, il existait bien un avantage économique.

73      Deuxièmement, s’agissant de la question de savoir quels ont été les bénéficiaires d’un tel avantage, il ressort de l’article 1er et du considérant 100 de la décision attaquée que, selon la Commission, ce sont les opérateurs de la plate-forme TNT.

74      Il a déjà été constaté que l’activité en cause, à savoir le déploiement, la maintenance et l’exploitation du réseau de TNT dans la zone II, constituait une activité économique (voir points 44 à 64 ci-dessus). Ce sont donc les opérateurs du réseau de TNT en Galice qui ont dû être favorisés par l’avantage en cause, en vertu de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

75      Il est vrai que, aux considérants 101 à 105 de la décision attaquée, la Commission a décrit les différents cas de figure dans lesquels l’extension de la couverture aurait été mise en œuvre. Certaines communautés autonomes auraient confié l’extension de la couverture à une entreprise publique qui agissait parfois comme une entreprise de télécommunications, tandis que d’autres communautés autonomes auraient lancé des appels d’offres au niveau régional pour l’extension de la TNT. Dans d’autres cas, des communautés autonomes auraient accordé un financement aux communes pour l’extension de la couverture de la TNT. La Commission a également indiqué plusieurs types de bénéficiaires. Il ressort des considérants 101 et 193 ainsi que de la note en bas de page n° 51 de ladite décision que, selon la Commission, Retegal constituait l’opérateur de réseau en Galice et était donc le bénéficiaire de la mesure d’aide en cause en Galice. En revanche, les requérantes affirment que Retegal ne fonctionnait que comme une centrale d’achat pour la communauté autonome de Galice et que les communes de Galice agissaient en tant qu’opérateurs de réseau. Si tel a été le cas, ce sont lesdites communes qui ont obtenu un avantage.

76      Toutefois, afin de décider si, dans le cadre de la procédure administrative menant à l’adoption de la décision attaquée, la Commission a commis une erreur en considérant que les opérateurs de réseau en Galice avaient reçu un avantage économique à travers la mesure d’aide en cause, il n’importe pas que cet opérateur ait été Retegal ou que les communes en cause se soient chargées elles-mêmes de la fonction d’opérateur de réseau. En effet, en vertu de l’article 1er de la décision attaquée, l’aide en cause a été octroyée à l’opérateur de réseau qui a donc reçu les fonds publics en cause en tant qu’avantage économique et qui est donc seul concerné par l’obligation de récupération.

77      L’offre de preuve n° 4 des requérantes figurant dans les requêtes, relative au fait que Retegal n’avait reçu aucun avantage concurrentiel du fait de son intervention n’est donc pas pertinente dans le cadre de la présente procédure.

78      En outre, il ressort du considérant 100 de la décision attaquée que la Commission s’est bornée à examiner, aux considérants 101 à 105 de cette décision, les différents cas de figure dans lesquels l’extension de la couverture aurait été mise en œuvre et plusieurs types de bénéficiaires directs. En revanche, elle n’a pas examiné en détail la situation particulière dans chaque communauté autonome. Ainsi qu’il ressort de l’article 4, paragraphe 3, sous a), de ladite décision, dans le cadre de la procédure de récupération, le Royaume d’Espagne doit communiquer à la Commission la liste des bénéficiaires qui ont reçu l’aide en vertu du régime visé à l’article 1er de cette décision et le montant total de l’aide reçue par chacun d’entre eux, conformément audit régime, ventilé en fonction des catégories de bénéficiaires figurant aux considérants 182 à 197 de la même décision. Les constatations figurant dans les considérants 101 à 105 de la décision en cause n’incluent donc aucunement un examen exhaustif et détaillé du cas de chaque partie concernée en Galice par l’octroi des fonds publics en cause. Selon la jurisprudence, dans le cas d’un régime d’aides, la Commission peut se borner à étudier les caractéristiques du régime en cause pour apprécier, dans les motifs de la décision, si, en raison des modalités que ce régime prévoit, celui-ci assure un avantage sensible aux bénéficiaires par rapport à leurs concurrents et est de nature à profiter essentiellement à des entreprises qui participent aux échanges entre États membres. Ainsi, la Commission, dans une décision qui porte sur un tel régime, n’est pas tenue d’effectuer une analyse de l’aide octroyée dans chaque cas individuel sur le fondement d’un tel régime. Ce n’est qu’au stade de la récupération des aides qu’il sera nécessaire de vérifier la situation individuelle de chaque entreprise concernée (arrêts du 7 mars 2002, Italie/Commission, C‑310/99, Rec, EU:C:2002:143, points 89 et 91 ; Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, point 38 supra, EU:C:2011:368, point 63, et du 13 juin 2013, HGA e.a./Commission, C‑630/11 P à C‑633/11 P, Rec, EU:C:2013:387, point 114).

79      Par ailleurs, en ce qui concerne l’argumentation des requérantes selon laquelle la Commission a erronément estimé, au considérant 102 de la décision attaquée, que les opérateurs de réseau de TNT avaient la possibilité de tirer des revenus des infrastructures financées par des fonds publics, celle-ci ne saurait être accueillie. En effet, la constatation de la Commission selon laquelle les entreprises publiques pouvaient également utiliser les nouvelles infrastructures pour la fourniture d’autres services ne paraît pas erronée, puisque le financement du réseau de TNT constitue un élément susceptible d’assurer le maintien du réseau prévu pour la télévision terrestre après l’abandon de la technologie analogique. Contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, cette possibilité de tirer des revenus ne concernait pas d’éventuels avantages futurs, mais existait au moment de l’adoption de la décision attaquée. S’agissant d’un autre service que celui de support de TNT, les requérantes n’ont pas non plus étayé leur affirmation selon laquelle une telle utilisation irait à l’encontre du décret royal n° 944/2005, puisque, selon elles, ce n’était que le service de support de TNT qui devait être fourni sans contrepartie financière conformément aux règles prévues par l’intervention des administrations régionales et locales.

80      Il s’ensuit que la Commission n’a pas commis d’erreur en considérant que les fonds publics octroyés par le gouvernement espagnol, la communauté autonome de Galice et les communes concernées aux opérateurs de réseau terrestre pour le déploiement, la maintenance et l’exploitation du TNT ont allégé des charges qui auraient dû normalement grever leur budget et qui constituaient donc des avantages économiques au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

81      La deuxième branche doit donc être rejetée.

–       Sur la troisième branche, tirée de l’absence d’avantage sélectif

82      Les requérantes font valoir que la Commission a erronément constaté que la mesure en cause avait un caractère sélectif. En outre, la motivation donnée par la Commission à cet égard serait insuffisante.

83      Premièrement, les requérantes affirment que les exigences du caractère sélectif d’une mesure d’aide n’étaient pas remplies. Selon elles, la mesure d’aide en cause n’a pas de caractère sélectif en raison du fait que la situation factuelle et juridique des entreprises d’autres plates-formes que la plate-forme terrestre et celle des entreprises de la plate-forme terrestre n’étaient pas comparables aux fins de fournir en Galice le service de support de télévision numérique dans la zone II.

84      Cette argumentation doit être rejetée. En effet, il y a lieu de relever que le critère de sélectivité au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE exige que la mesure en cause favorise certaines entreprises ou certaines productions. Ainsi que l’affirme la Commission, tel est le cas en l’espèce. Il convient de constater qu’une mesure telle que celle en cause ne s’applique pas sans distinction à tous les opérateurs économiques. Elle ne peut donc être considérée comme une mesure générale de politique fiscale ou économique qui ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 107 TFUE (voir, en ce sens, arrêts Cassa di Risparmio di Firenze e.a., point 47 supra, EU:C:2006:8, point 135, et du 18 juillet 2013, P, C‑6/12, Rec, EU:C:2013:525, point 18 et jurisprudence citée).

85      Dans la mesure où les requérantes allèguent que le critère de sélectivité n’est pas rempli en raison de l’absence de comparabilité entre la situation des opérateurs de plate-forme terrestre et celle d’autres opérateurs, il suffit de relever que, selon une jurisprudence constante, la notion d’aide d’État ne vise pas les mesures étatiques introduisant une différenciation entre entreprises et, partant, a priori sélectives, lorsque cette différenciation résulte de la nature ou de l’économie du système dans lequel elles s’inscrivent (voir arrêt British Aggregates/Commission, point 52 supra, EU:C:2008:757, points 82 et 83 et jurisprudence citée). En l’espèce, la mesure en cause opérait une différenciation en ce qu’elle subventionnait, afin de déployer la télévision numérique dans la zone II, le secteur de la radiodiffusion et, en particulier, les entreprises utilisant la technologie terrestre, alors que d’autres secteurs et les entreprises utilisant d’autres technologies n’avaient pas été subventionnées.

86      Deuxièmement, s’agissant de l’argument selon lequel la motivation concernant le caractère sélectif de la mesure en cause serait insuffisante, il convient de constater qu’il ressort du considérant 113 de la décision attaquée que, selon la Commission, l’avantage était sélectif, car ladite mesure ne bénéficiait qu’au secteur de la radiodiffusion et que, dans ce secteur, cette mesure ne concernait que les entreprises qui intervenaient sur le marché de la plate-forme terrestre. Une telle motivation est suffisante en l’espèce en vue de la précision de ce critère par la jurisprudence (voir points 84 et 85 ci-dessus).

87      Il s’ensuit que la troisième branche du premier moyen et, par conséquent, ce dernier dans son intégralité doivent être rejetés.

 Sur le deuxième moyen, tiré à titre subsidiaire d’une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE

88      Les requérantes font valoir, à titre subsidiaire, que la Commission a commis une erreur en ce qu’elle a considéré que les mesures en cause n’étaient pas compatibles avec le marché intérieur en vertu de l’article 106, paragraphe 2, TFUE.

89      Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général (ci-après les « SIEG ») ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux règles des traités, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l’application de ces règles ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie.

90      Au considérant 172 de la décision attaquée, la Commission a rejeté la justification de la mesure d’aide en cause au titre de l’article 106, paragraphe 2, TFUE en indiquant que les autorités espagnoles n’avaient pas défini avec précision l’exploitation d’une plate-forme terrestre en tant que service public. Elle a fait référence à cet égard à ses considérations relatives au premier critère de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415) concernant l’absence de définition d’un SIEG.

91      En ce qui concerne le premier critère de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415), selon le considérant 119 de la décision attaquée, la Ley 11/1998, General de Telecomunicaciones (loi générale 11/1998 relative aux télécommunications), du 24 avril 1998 (BOE nº 99, du 25 avril 1998, p. 13909, ci-après la « loi 11/1998 »), établirait que les services de télécommunications, y compris l’exploitation des réseaux de diffusion radio et télévisuelle, sont des SIEG, bien qu’ils n’aient pas le rang de services publics, un rang qui ne serait réservé qu’à quelques rares services de télécommunications, notamment ceux en rapport avec la défense publique et la protection civile ainsi que l’exploitation du réseau téléphonique. La Ley 32/2003, General de Telecomunicaciones (loi générale 32/2003 relative aux télécommunications), du 3 novembre 2003 (BOE n° 264, du 4 novembre 2003, p. 38890, ci-après la « loi 32/2003 »), conserverait la même définition. Les services émetteurs pour la radiodiffusion télévisuelle, c’est-à-dire l’acheminement des signaux à travers les réseaux de télécommunications, seraient considérés comme des services de télécommunications et seraient, en tant que tels, des SIEG qui ne constituent pas un service public.

92      Selon le considérant 120 de la décision attaquée, en tout état de cause, les dispositions de la loi espagnole se caractérisaient par leur neutralité technologique. Ladite loi définirait les télécommunications comme l’exploitation des réseaux et la prestation des services de communications électroniques et les ressources associées. Les télécommunications seraient la transmission de signaux à travers tout réseau de diffusion et non à travers le réseau terrestre en particulier. De plus, cette loi préciserait que l’un de ses objectifs est d’encourager, dans la mesure du possible, la neutralité technologique dans la réglementation.

93      En vertu du considérant 121 de la décision attaquée, même si la norme en vigueur et applicable au moment du transfert de fonds définissait la radiodiffusion publique comme étant un service public, il ne serait pas possible d’étendre cette définition à l’exploitation d’une plate-forme de support déterminée. En outre, lorsqu’il existerait plusieurs plates-formes de transmission, il ne serait pas possible de considérer que l’une d’elles en particulier serait essentielle à la transmission des signaux de radiodiffusion. Par conséquent, selon la Commission, le fait, pour la loi espagnole, d’établir que l’utilisation d’une certaine plate-forme pour la transmission des signaux de radiodiffusion constituait un service public, aurait constitué une erreur manifeste.

94      Il convient de relever que, s’agissant de la notion de service public au sens de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415), les parties ne contestent pas que celle-ci corresponde à celle d’un SIEG au sens de l’article 106, paragraphe 2, TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 12 février 2008, BUPA e.a./Commission, T‑289/03, Rec, EU:T:2008:29, point 162, et du 16 juillet 2014, Zweckverband Tierkörperbeseitigung/Commission, T‑309/12, EU:T:2014:676, point 132).

95      Selon une jurisprudence constante, les États membres disposent d’un large pouvoir d’appréciation quant à la définition de ce qu’ils considèrent comme un SIEG et, par conséquent, la définition de ces services par un État membre ne peut être remise en cause par la Commission qu’en cas d’erreur manifeste (voir arrêts du 15 juin 2005, Olsen/Commission, T‑17/02, Rec, EU:T:2005:218, point 216 ; du 22 octobre 2008, TV2/Danmark e.a./Commission, T‑309/04, T‑317/04, T‑329/04 et T‑336/04, Rec, EU:T:2008:457, point 101, et du 6 octobre 2009, FAB/Commission, T‑8/06, EU:T:2009:386, point 63). En effet, en l’absence d’une réglementation de l’Union harmonisée en la matière, la Commission n’est pas habilitée à se prononcer sur l’étendue des missions de service public incombant à l’exploitant public, à savoir le niveau des coûts liés à ce service, ni sur l’opportunité des choix politiques pris, à cet égard, par les autorités nationales, ni sur l’efficacité économique de l’exploitant public (voir, en ce sens, arrêts du 27 février 1997, FFSA e.a./Commission, T‑106/95, Rec, EU:T:1997:23, point 108, et du 1er juillet 2010, M6/Commission, T‑568/08 et T‑573/08, Rec, EU:T:2010:272, point 139 et jurisprudence citée). Il ressort de l’article 1er, premier tiret, du protocole n° 26 sur les services d’intérêt général complétant les traités UE et FUE que les valeurs communes de l’Union concernant les SIEG au sens de l’article 14 TFUE comprennent notamment le rôle essentiel et le large pouvoir discrétionnaire des autorités nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser les SIEG d’une manière qui réponde autant que possible aux besoins des utilisateurs.

96      Pour autant, le pouvoir de définition des SIEG par l’État membre n’est pas illimité et ne peut être exercé de manière arbitraire aux seules fins de faire échapper un secteur particulier à l’application des règles de concurrence (arrêt BUPA e.a./Commission, point 94 supra, EU:T:2008:29, point 168). Pour pouvoir être qualifié de SIEG, le service en cause doit revêtir un intérêt économique général qui présente des caractères spécifiques par rapport à celui que revêtent d’autres activités de la vie économique (arrêts du 10 décembre 1991, Merci convenzionali porto di Genova, C‑179/90, Rec, EU:C:1991:464, point 27, et du 17 juillet 1997, GT-Link, C‑242/95, Rec, EU:C:1997:376, point 53).

97      L’étendue du contrôle effectué par le Tribunal sur les appréciations de la Commission tient nécessairement compte du fait que la définition d’un service par un État membre en tant que SIEG ne peut être remise en cause par la Commission qu’en cas d’erreur manifeste. Ce contrôle doit néanmoins s’assurer du respect de certains critères minimaux tenant, notamment, à la présence d’un acte de puissance publique investissant les opérateurs en cause d’une mission de SIEG, ainsi qu’au caractère universel et obligatoire de cette mission (voir arrêt du 7 novembre 2012, CBI/Commission, T‑137/10, Rec, EU:T:2012:584, points 100 et 101 et jurisprudence citée). Par ailleurs, en vertu de l’article 4 de la décision 2005/842/CE, du 28 novembre 2005, concernant l’application des dispositions de l’article [106, paragraphe 2, TFUE] aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de SIEG (JO L 312, p. 67), la responsabilité de la gestion du SIEG doit être confiée à l’entreprise concernée au moyen d’un ou de plusieurs actes officiels, dont la forme peut être déterminée par chaque État membre, ces actes devant notamment indiquer la nature et la durée des obligations de service public et les entreprises et le territoire concernés. Le point 12 de l’encadrement communautaire des aides d’État sous forme de compensations de service public (JO 2005, C 297, p. 4) contient les mêmes exigences.

98      En l’espèce, les requérantes font valoir que, en vertu de la législation espagnole, tant la télévision espagnole que le service de support du service public de radiodiffusion télévisuelle sont des services publics. Les mesures de la communauté autonome de Galice consistant dans l’acquisition d’équipements et du matériel nécessaire pour l’adaptation de la technologie analogique antérieure à la technologie numérique relèveraient d’une activité purement instrumentale visant à ce que le service de télécommunications puisse être fourni. Selon les requérantes, lorsque les obligations de couverture prévues par le décret royal 944/2005 n’existaient pas, l’intervention des autorités publiques aux fins de fournir le service porteur du service de TNT était autorisée par la douzième disposition additionnelle de ce décret royal, parce qu’il s’agissait d’un service public. En outre, il résulterait du fait que la circulaire 1/2010 de la Comisión del mercado de la telecomunicaciones (commission du marché des télécommunications espagnole), qui fixerait les conditions d’exploitation des réseaux et de la prestation de services de communications électroniques par les administrations publiques, exclut de son champ d’application les stations terrestres destinées à la diffusion du service de TNT que, dans la zone II, les administrations publiques n’intervenaient pas en qualité d’opérateurs de réseaux mais en tant qu’autorités publiques aux fins de garantir la prestation universelle du service public de télévision numérique.

99      Cette argumentation ne démontre pas que la Commission a considéré à tort que, en l’absence de définition claire du service d’exploitation d’un réseau terrestre en tant que service public, le premier critère de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415) n’était pas satisfait.

100    En effet, premièrement, il convient de constater que les requérantes n’ont pas contesté la considération de la Commission, figurant au considérant 119 de la décision attaquée, selon laquelle l’exploitation des réseaux de diffusion radio et télévisuelle n’avait pas été définie par l’État espagnol en tant que SIEG au sens de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415) dans les lois 11/1998 et 32/2003, produites par la Commission à la suite des mesures d’organisation de la procédure ordonnées par le Tribunal (voir point 28 ci-dessus). Par ailleurs, il convient de relever que la considération selon laquelle le service d’exploitation des réseaux de diffusion radio et télévisuelle a été définie en tant que SIEG au sens du droit de l’Union dans lesdites lois espagnoles pourrait seulement être fondée sur le fait que, en vertu de l’article 2 desdites lois, tous les services de télécommunications, y compris les réseaux de diffusion radio et télévisuelle, sont d’intérêt général. Or, le seul fait qu’un service est désigné comme étant d’intérêt général en droit national n’implique pas que tout opérateur qui l’effectue est chargé de l’exécution d’obligations de service public clairement définies au sens de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415). Si tel était le cas, tous les services de télécommunications en Espagne revêtiraient le caractère de SIEG au sens de cet arrêt, ce qui ne ressort aucunement de ces lois.

101    En outre, il y a lieu de constater que la Commission n’a commis aucune erreur en examinant, aux considérants 119 à 125 de la décision attaquée, si le premier critère de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415) était satisfait en ce qui concerne le service d’exploitation des réseaux terrestres et non en ce qui concerne le service d’exploitation des réseaux de diffusion radio et télévisuelle, comme le soutiennent les requérantes. À cet égard, il ressort du considérant 120 de ladite décision que les dispositions de la loi 32/2003 se caractérisaient par leur neutralité technologique et que les télécommunications étaient la transmission de signaux à travers tout réseau de diffusion et non à travers le réseau terrestre en particulier, ce que les requérantes n’ont pas contesté. À la lumière de ces précisions de la loi espagnole, il ne saurait être conclu que la Commission a erronément estimé aux considérants 119 et 122 de cette décision que, dans ladite loi, l’exploitation d’un réseau terrestre n’était pas définie comme un service public au sens de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415).

102    Deuxièmement, dans la mesure où les requérantes font valoir, en faisant référence au décret royal 944/2005 et à la douzième disposition additionnelle de ce décret, que le service de support du service public de radiodiffusion télévisuelle est un service public, elles s’appuient, en substance, sur la considération selon laquelle la Commission a erronément distingué la prestation du service de radiodiffusion de l’exploitation des réseaux de radiodiffusion. Selon elles, en l’espèce, il s’agissait en réalité de la prestation d’un service public essentiel consistant dans la création de la structure nécessaire afin de pouvoir ultérieurement fournir le service de télévision.

103    À cet égard, il convient de relever que, certes, la transmission est indispensable à la radiodiffusion. En effet, bien que, selon la jurisprudence, la technique de transmission ne soit pas un élément déterminant dans l’appréciation de la notion de radiodiffusion (arrêts du 2 juin 2005, Mediakabel, C‑89/04, Rec, EU:C:2005:348, point 33, et du 22 décembre 2008, Kabel Deutschland Vertrieb und Service, C‑336/07, Rec, EU:C:2008:765, point 64), il n’en demeure pas moins qu’il existe entre les deux services un lien de dépendance.

104    Toutefois, le service de radiodiffusion doit être distingué de celui d’exploitation des réseaux de diffusion. En effet, il s’agit de deux activités distinctes qui sont réalisées par des entreprises différentes opérant sur des marchés différents. Tandis que le service de radiodiffusion est assuré par des radiodiffuseurs, à savoir des opérateurs de télévision, le service d’exploitation des réseaux de diffusion est assuré par des opérateurs de plates-formes d’émission de signaux, à savoir des plates-formes terrestre, satellitaire, câblée ou par le biais des accès à haut débit sur Internet.

105    Ainsi que l’affirme l’intervenante, une telle distinction est également établie dans le secteur de la communication. Il ressort du considérant 5 de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») (JO L 108, p. 33), qu’il est nécessaire de séparer la réglementation de la transmission de celle des contenus.

106    Les requérantes font également référence au fait que le protocole n° 29 sur le système de radiodiffusion publique dans les États membres complétant les traités UE et FUE souligne le pouvoir des États membres concernant la mission de service public de radiodiffusion telle qu’elle a été conférée, définie et organisée par chaque État membre. À cet égard, il convient de constater que ce protocole s’applique au secteur de la radiodiffusion (arrêt du 10 juillet 2012, TF1 e.a./Commission, T‑520/09, EU:T:2012:352, point 94) et, plus précisément, au financement du service public de radiodiffusion accordé aux organismes de radiodiffusion, à savoir en l’espèce les opérateurs de télévision. En revanche, le financement des opérateurs de plates-formes d’émission de signaux n’est pas concerné par ledit protocole.

107    Par ailleurs, lorsque, dans le protocole n° 29 sur le système de radiodiffusion publique dans les États membres complétant les traités UE et FUE, les États membres ont énoncé que la radiodiffusion de service public dans les États membres était directement liée aux besoins démocratiques, sociaux et culturels de chaque société ainsi qu’à la nécessité de préserver le pluralisme dans les médias, ils ont fait directement référence aux systèmes de radiodiffusion de service public institués par eux et chargés de la diffusion, au profit de l’ensemble de la population de ces États, de programmes télévisés généralistes (arrêt du 26 juin 2008, SIC/Commission, T‑442/03, Rec, EU:T:2008:228, point 198). Or, en l’espèce, dès lors que le décret royal 944/2005 a imposé aux radiodiffuseurs nationaux de couvrir 96 % de la population dans le cas du secteur privé et 98 % de la population dans le cas du secteur public sur leur territoire respectif (voir point 2 ci-dessus) et que, pour la quasi-totalité de la zone II, une telle obligation de couverture garantissait l’accès aux chaînes publiques, la topographie de la zone III excluant la transmission numérique terrestre (voir point 3 ci-dessus), la mesure en cause visait en substance à financer l’extension de la couverture de la population par des opérateurs de télévision du secteur privé. En outre, il convient de relever que les objectifs dudit protocole visant à garantir les besoins démocratiques, sociaux et culturels d’une société et à préserver le pluralisme dans les médias ne présentent aucun lien avec le choix de la technologie de diffusion.

108    Par conséquent, il y a également lieu de rejeter l’argument selon lequel la Commission a ignoré les critères énoncés dans sa communication concernant l’application aux services publics de radiodiffusion des règles relatives aux aides d’État (JO 2009, C 257, p. 1).

109    Troisièmement, s’agissant de l’argumentation relative à la circulaire 1/2010 de la commission espagnole du marché des télécommunications, il y a lieu de relever, d’une part, que, faute d’avoir produite cette circulaire devant le Tribunal, l’argumentation relative à ladite circulaire doit être rejetée. Il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de l’adoption d’une décision en matières d’aides d’État, la constatation du droit national est une question de fait (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2011, A2A/Commission, C‑318/09 P, EU:C:2011:856, point 125 et jurisprudence citée). La question de savoir si et dans quelle mesure une règle de droit national s’applique ou non au cas d’espèce relève d’une appréciation factuelle du juge et est soumise aux règles sur l’administration de la preuve et sur la répartition de la charge de la preuve (arrêt du 20 septembre 2012, France/Commission, T‑154/10, Rec, EU:T:2012:452, point 65). D’autre part, même à supposer que cette circulaire exclue de son champ d’application les stations terrestres destinées à la diffusion du service de TNT, cela n’établirait pas que la Commission a erronément constaté que le service d’exploitation d’un réseau terrestre n’avait pas été défini en tant que service public au sens de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415).

110    Par ailleurs, il convient de constater que, à aucun moment, les requérantes n’ont été en mesure de déterminer quelles obligations de service public auraient été mises à la charge des exploitants de réseaux de TNT, soit par la loi espagnole, soit par les conventions d’exploitation, et encore moins d’en avoir apporté la preuve.

111    Quatrièmement, dans la mesure où les requérantes font valoir que les conditions prévues par la décision 2005/842 étaient remplies, il suffit de relever qu’elles n’ont pas démontré que la Commission avait erronément constaté l’absence de définition claire du service d’exploitation d’un réseau terrestre comme service public au sens de l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415). Cette décision ne s’appliquait donc pas.

112    De plus, il ressort du considérant 121 de la décision attaquée que, selon la Commission, la définition en tant que service public de l’exploitation d’une plate-forme de support déterminée, en l’occurrence celle de la plate-forme terrestre, aurait constitué une erreur manifeste des autorités espagnoles, parce que, lorsqu’il existe plusieurs plates-formes de transmission, il ne serait pas possible de considérer que l’une d’elles en particulier est essentielle à la transmission des signaux de radiodiffusion (voir point 93 ci-dessus), ce que les requérantes n’ont pas contesté.

113    Cinquièmement, s’agissant de l’argument selon lequel la Commission ne s’était pas prononcée sur la réunion, dans le cas de la Galice, des critères posés par l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415), il convient de constater, d’une part, que la Commission a pris en compte, aux considérants 119 et 120 de la décision attaquée, les lois 11/1998 et 32/2003 qui étaient également valables en Galice. D’autre part, il ressort du considérant 114 de ladite décision que, selon les autorités espagnoles, il incombait aux communautés autonomes d’invoquer l’absence d’aide d’État conformément à l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, point 18 supra (EU:C:2003:415) et que, comme le meilleur et l’unique exemple, lesdites autorités ont présenté le cas de la communauté autonome du Pays basque. Selon ce considérant, aucune autre communauté autonome n’a présenté une argumentation qui démontrerait que l’exploitation du réseau terrestre était un service public. Les requérantes ne sauraient donc reprocher à la Commission d’avoir focalisé son examen sur ledit cas. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que la légalité d’une décision en matière d’aides d’État doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir arrêt du 15 avril 2008, Nuova Agricast, C‑390/06, Rec, EU:C:2008:224, point 54 et jurisprudence citée).

114    Enfin, il y a lieu de rejeter l’affirmation selon laquelle la motivation de la décision attaquée ne précisait pas suffisamment les raisons pour lesquelles la Commission a conclu que la mesure en cause n’était pas justifiée au titre de l’article 106, paragraphe 2, TFUE. En effet, il ressort à suffisance de droit du considérant 172 de la décision attaquée, qui fait référence aux considérants 119 à 122 de cette décision, que la Commission a considéré que la mesure en cause n’était pas compatible avec le marché intérieur en vertu de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, au motif que les autorités espagnoles n’avaient pas défini avec précision l’exploitation d’une plate-forme terrestre en tant que service public.

115    Le deuxième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré à titre subsidiaire d’une violation de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE

116    Les requérantes font valoir, à titre subsidiaire, que la Commission a violé l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE en ce qu’elle n’a pas considéré que la mesure en cause était compatible avec le marché intérieur au titre de cette disposition. Selon les requérantes, en Galice, le coût des mesures envisagées et leurs bénéfices pour la population ont été évalués au préalable. La TNT serait la solution adéquate pour garantir la prestation du service de télévision dans la zone II. La Commission aurait erronément considéré le choix de cette technologie comme étant le fait d’une décision unique et centralisée. La mesure en cause serait appropriée et proportionnelle.

117    Il ressort des considérants 153 à 167 de la décision attaquée que la Commission a estimé que l’aide en cause ne pouvait être considérée comme compatible avec le marché intérieur au titre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, parce que, selon elle, la mesure en cause ne respectait pas le principe de neutralité technologique, n’était pas proportionnée et ne constituait pas un instrument approprié pour garantir la couverture des chaînes en clair aux résidents de la zone II. À cet égard, la Commission a constaté, au considérant 155 de ladite décision, que la plupart des appels d’offres ne se caractérisaient pas par leur neutralité technologique, étant donné qu’ils faisaient référence à la technologie terrestre et à la TNT. Selon les considérants 156 à 157 de cette décision, aucune étude n’apportait une preuve suffisante de la supériorité de la plate-forme terrestre par rapport à la plate-forme satellitaire. Pour ce qui est de la proportionnalité de la mesure en cause, la Commission a estimé, au considérant 166 de la même décision, que le gouvernement espagnol aurait au moins pu inciter les communautés autonomes à lancer des appels d’offres en tenant compte des éventuelles économies susceptibles d’être réalisées avec certaines plates-formes.

118    Il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, les dérogations au principe général d’incompatibilité des aides d’État avec le marché intérieur, énoncé à l’article 107, paragraphe 1, TFUE, doivent faire l’objet d’une interprétation stricte (voir arrêts du 29 avril 2004, Allemagne/Commission, C‑277/00, Rec, EU:C:2004:238, point 20 et jurisprudence citée, et du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission, C‑67/09 P, Rec, EU:C:2010:607, point 74 et jurisprudence citée).

119    En outre, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la Commission jouit, pour l’application de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice implique des évaluations complexes d’ordre économique et social. Le contrôle juridictionnel appliqué à l’exercice de ce pouvoir d’appréciation se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation ainsi qu’au contrôle de l’exactitude matérielle des faits retenus et de l’absence d’erreur de droit, d’erreur manifeste dans l’appréciation des faits ou de détournement de pouvoir (arrêts du 26 septembre 2002, Espagne/Commission, C‑351/98, Rec, EU:C:2002:530, point 74, et du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑372/97, Rec, EU:C:2004:234, point 83).

120    Il convient de rappeler que, afin d’établir que la Commission a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des faits de nature à justifier l’annulation de la décision attaquée, les éléments de preuve apportés par le requérant doivent être suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits retenus dans la décision (arrêts du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T‑380/94, Rec, EU:T:1996:195, point 59, et FAB/Commission, point 95 supra, EU:T:2009:386, point 78).

121    Selon la jurisprudence, si la Commission dispose d’une marge d’appréciation en matière économique, cela n’implique pas que le juge de l’Union doit s’abstenir de contrôler l’interprétation, par la Commission, de données de nature économique. En effet, le juge de l’Union doit non seulement vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées. Toutefois, dans le cadre de ce contrôle, il ne lui appartient pas de substituer son appréciation économique à celle de la Commission. En outre, il y a lieu de relever que, dans les cas où une institution dispose d’un large pouvoir d’appréciation, le contrôle du respect de certaines garanties procédurales revêt une importance fondamentale. Selon la jurisprudence, parmi ces garanties figurent l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce et de motiver sa décision de façon suffisante (voir arrêt Espagne/Lenzing, point 37 supra, EU:C:2007:698, points 56 à 58 et jurisprudence citée).

122    En premier lieu, les requérantes affirment que la Commission a erronément considéré que la mesure en cause n’était pas appropriée. Selon elles, le choix de la technologie pour déployer en Galice la télévision numérique dans la zone II a été évalué tant au niveau national qu’au niveau de la Galice et différentes études ont démontré que la TNT était la solution la plus adéquate.

123    Cette argumentation ne saurait être accueillie.

124    En effet, premièrement, s’agissant du rapport relatif aux coûts de référence du processus d’universalisation de la TNT en Espagne datant de juillet 2007 élaboré par les autorités espagnoles, il y a lieu de constater que, selon le considérant 156 de la décision attaquée, ce rapport n’a pas apporté une preuve suffisante de la supériorité de la plate-forme terrestre par rapport à la plate-forme satellitaire. Il conclurait que le choix d’une solution technologique donnée pour l’extension de la couverture devait être analysé région par région, en tenant compte des particularités topographiques et démographiques de chacune d’elles. Il mettrait donc davantage en avant la nécessité d’organiser un appel d’offres technologiquement neutre pour déterminer quelle serait la plate-forme la plus appropriée.

125    Contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, les considérations en cause précisent à suffisance de droit la raison pour laquelle, selon la Commission, le rapport visé au point 124 ci-dessus n’a pas apporté une preuve suffisante de la supériorité de la plate-forme terrestre par rapport à la plate-forme satellitaire. En outre, lesdites considérations ne sont pas entachées d’une erreur manifeste. En effet, il ressort du point 6 de ce rapport que les autorités espagnoles analysaient deux scénarios possibles, à savoir l’extension de couverture de la population de 98 à 100 % et l’extension de couverture de la population de 96 à 100 %. Aucun de ces deux scénarios ne correspond à l’extension de couverture de la population de 96 à 98,5 %. En outre, selon les conclusions dudit rapport relatives à ces deux scénarios, il était probable que la solution finale la plus appropriée soit celle résultant de la prise en considération des deux alternatives, à savoir les plates-formes terrestre et satellitaire, l’une ou l’autre solution étant retenue selon le cas en fonction des conditions et des circonstances de la localisation physique de la population à laquelle la couverture serait étendue. Il serait impossible de prévoir la proportion dans laquelle chaque alternative contribuerait à la solution finale, sans réaliser auparavant une étude circonstanciée par communauté autonome tenant compte de l’orographie du terrain, de la répartition territoriale de la population, et de la situation du réseau de diffusion de la télévision existante. Il résulte de ce qui précède que l’analyse faite dans ce rapport n’a pas justifié le non-respect du principe de neutralité technologique. Par ailleurs, s’il est vrai que, selon le même rapport, au-dessus d’une couverture d’environ 90 logements, la diffusion terrestre serait la solution la plus économique, il n’en demeure pas moins que cette conclusion a expressément été ajoutée à titre indicatif sans pour autant remettre en cause les autres conclusions du rapport concerné.

126    Deuxièmement, en ce qui concerne l’analyse de la communauté autonome de Galice, il ressort du considérant 157 de la décision attaquée que, pendant l’enquête administrative, certaines communautés autonomes auraient présenté des calculs internes où auraient été comparés les coûts d’utilisation des deux technologies pour l’extension de la couverture. Toutefois, en plus de l’incertitude en ce qui concerne la date de ces calculs, aucun d’eux n’aurait présenté le niveau de détail et de solidité suffisants pour justifier le choix de la technologie terrestre pour l’extension de la couverture. Selon la Commission, qui plus est, aucun de ces calculs n’a été réalisé par un expert indépendant.

127    L’analyse de la communauté autonome de Galice étant concernée par le raisonnement figurant au considérant 157 de la décision attaquée, ainsi que l’a confirmé la Commission lors de l’audience, le rejet de cette analyse par la Commission n’est pas entachée d’une erreur manifeste. En effet, il ressort du dossier que ladite analyse contient, en réalité, seulement les observations de la communauté autonome de Galice à la Commission datant du 2 février 2012, ce qui est largement postérieur aux mesures en cause. La date des calculs contenus dans l’analyse en cause étant incertaine, ainsi que l’a constaté la Commission audit considérant, l’analyse en question ne saurait justifier le non-respect du principe de neutralité technologique par le choix de la plate-forme terrestre. En effet, selon la jurisprudence, la question de savoir si une mesure constitue une aide d’État doit être résolue à la lumière de la situation existant au moment où cette mesure a été prise (voir arrêt du 12 mai 2011, Région Nord-Pas-de-Calais et Communauté d’Agglomération du Douaisis/Commission, T‑267/08 et T‑279/08, Rec, EU:T:2011:209, point 143 et jurisprudence citée).

128    Troisièmement, les requérantes font référence à un rapport comparatif des coûts de réception, pour les utilisateurs, des solutions TNT et satellitaire, effectué par une société de consultants et datant du 20 septembre 2012, selon lequel la solution terrestre serait plus favorable en raison de son moindre coût.

129    Cette argumentation doit être rejetée. En effet, d’une part, le rapport visé au point 128 ci-dessus, produit par la Commission à la suite des mesures d’organisation de la procédure ordonnées par le Tribunal (voir point 28 ci-dessus), qui avait été remis à la Commission dans le cadre d’un autre dossier traité par cette dernière, compare les coûts liés à l’adaptation de l’équipement de réception de télévision dans chaque logement pour l’ensemble de la population espagnole, et pas seulement pour la zone II, par suite de la libération du dividende numérique. D’autre part, il compare les coûts en partant de la situation existant en 2012. Or, les requérantes ne fournissent aucun élément permettant de considérer que des calculs relatifs à ladite situation étaient pertinents pour l’appréciation du caractère approprié des mesures en cause à compter de 2008. Il a déjà été rappelé que la question de savoir si une mesure constitue une aide d’État doit être résolue à la lumière de la situation existant au moment où cette mesure a été prise (voir point 127 ci-dessus).

130    Quatrièmement, dans la mesure où les requérantes font valoir que la Commission a erronément relevé, au considérant 158 de la décision attaquée, que les estimations des coûts présentés par l’intervenante démontraient que la technologie satellitaire était plus rentable, il y a lieu de constater que la Commission a apprécié, à ce considérant, les études relatives aux coûts présentées par un exploitant d’infrastructures de télécommunications et fournisseur d’équipements de réseaux. À cet égard, elle a estimé que, indépendamment du fait que ces études puissent être considérées comme suffisamment indépendantes et fiables, le fait qu’elles soient postérieures aux mesures en cause faisait obstacle à ce qu’elles soient utilisées pour justifier le fait que le gouvernement espagnol n’ait pas jugé opportun d’organiser un appel d’offres technologiquement neutre. Elle a ajouté que les estimations de coûts présentées par l’intervenante, qui démontreraient que la technologie satellitaire était plus rentable, contredisaient les résultats desdites études.

131    Il ressort du considérant 158 de la décision attaquée que la Commission a rejeté les études présentées par un exploitant d’infrastructures de télécommunications et fournisseur d’équipements de réseaux, sans se prononcer sur l’indépendance et la fiabilité de ces études, du fait que celles-ci étaient postérieures aux mesures en cause et contredites par les estimations de coûts présentées par l’intervenante. La Commission n’a pas favorisé l’étude présentée par l’intervenante par rapport à celles présentées par ledit exploitant. Elle s’est plutôt bornée à présenter le contenu de l’étude de l’intervenante selon laquelle la technologie satellitaire était plus rentable ce qui contredisait les résultats des études présentées par cet exploitant. Cette conclusion est confirmée par le fait qu’il ressort du considérant 154 de ladite décision que, selon la Commission, le choix d’une technologie donnée aurait pu être accepté s’il avait été justifié par les conclusions d’une étude préliminaire établissant que, en termes de qualité et de coût, il n’était possible d’opter que pour une seule solution technologique.

132    Aucun élément fourni par les requérantes ne démontre que les considérations figurant au considérant 158 de la décision attaquée sont manifestement erronées. En effet, il y a lieu de constater que les études présentées par un exploitant d’infrastructures de télécommunications et fournisseur d’équipements de réseaux, produites par la Commission à la suite des mesures d’organisation de la procédure ordonnées par le Tribunal (voir point 28 ci-dessus), qui datent de 2010 et ont comme point de référence l’année 2009, sont postérieures aux mesures en cause et que les estimations de coûts présentées par l’intervenante, également produites par la Commission à la suite des mesures d’organisation de la procédure ordonnées par le Tribunal (voir point 28 ci-dessus), contredisaient les résultats desdites études.

133    À cet égard, il convient également de rejeter la demande d’audition d’un expert présentée par les requérantes, conformément à l’article 70 du règlement de procédure du 2 mai 1991, relative au fait que la solution satellitaire proposée par l’intervenante afin de recevoir le signal de télévision numérique serait, dans le cas de la Galice, moins rationnelle en termes de coûts que la solution terrestre choisie par la communauté autonome de Galice. En effet, la Commission n’a pas considéré que l’offre de l’intervenante en Galice démontrait la supériorité de la solution satellitaire. Son objectif était d’examiner si, en raison du non-respect du principe de neutralité technologique, les mesures en cause pouvaient être justifiées par une étude préliminaire optant pour une seule solution technologique.

134    Cinquièmement, s’agissant de l’argumentation selon laquelle la Commission a erronément considéré le choix de la technologie comme le fait d’une décision unique et centralisée, il y a lieu de relever que la Commission a, aux considérants 90 à 93 de la décision attaquée, qui font référence aux considérants 23 à 31 de cette décision, décrit la base juridique de l’aide en cause. Elle a constaté que le cadre légal pour le passage au numérique en Espagne était un ensemble complexe formé de plusieurs instruments promulgués aussi bien par le gouvernement espagnol et les communautés autonomes que par les autorités locales pendant une période de quatre ans. Selon elle, bien que le programme technique national en faveur de la TNT de 2005 et le programme national en faveur du passage à la TNT de 2007 régissent en grande partie le passage à la TNT dans la zone I, ils avaient également posé les bases des mesures d’extension additionnelles dans la zone II. Le programme technique national en faveur de la TNT aurait également autorisé les autorités locales à établir, en partenariat avec les communautés autonomes, des centres émetteurs supplémentaires, nécessaires pour garantir la réception de la TNT dans cette dernière zone. Ces mesures d’extension auraient été mises en œuvre par les autorités régionales après la conclusion de plusieurs conventions-cadres avec ledit gouvernement et d’addenda à ces conventions-cadres. Selon la Commission, dans la pratique, les communautés autonomes avaient appliqué les directives de ce gouvernement sur l’extension de la TNT. Le déblocage de l’aide d’État pour le déploiement de la TNT dans la zone II aurait été marqué par le transfert de fonds des autorités nationales et régionales aux bénéficiaires. Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, la Commission n’a pas considéré que le processus de numérisation avait été mis en place par une décision unique et centralisée de l’État espagnol.

135    Sixièmement, en ce qui concerne l’argumentation selon laquelle tous les appels d’offres en Galice étaient technologiquement neutres, il ressort du considérant 34 et de la note en bas de page n° 29 de la décision attaquée que, pour arriver à la conclusion selon laquelle la mesure en cause n’était pas appropriée et ne pouvait donc être considérée comme compatible avec le marché intérieur au titre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE en raison du fait que la plupart des appels d’offres ne respectait pas le principe de neutralité technologique, la Commission a analysé 82 appels d’offres sur les 516 lancés par toutes les régions à l’exception de la communauté autonome de Castille-La-Manche, dont 17 étaient liés à l’extension du réseau et 65 étaient liés à la fourniture. Elle a constaté que seulement trois appels d’offres concernant l’extension en Castille-Léon (Espagne) et six appels d’offres concernant la fourniture, à savoir cinq aux Îles Canaries (Espagne) et un en Cantabrie (Espagne), étaient technologiquement neutres.

136    En concluant au non-respect du principe de neutralité technologique par la mesure en cause sur la base de l’échantillon de 82 appels d’offres sur les 516 lancés par toutes les régions à l’exception de la communauté autonome de Castille-La-Manche, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste ni renversé la charge de la preuve relative au respect de ce principe. Elle n’était pas tenue de fournir plus de détails à cet égard. En effet, dans le cas d’un régime d’aides, elle peut se borner à étudier les caractéristiques du régime en cause pour apprécier, dans les motifs de la décision, si ce régime revêt un caractère approprié pour la réalisation de l’un des objectifs visés par l’article 107, paragraphe 3, TFUE. Ainsi, dans une décision qui porte sur un tel régime, elle n’est pas tenue d’effectuer une analyse de l’aide octroyée dans chaque cas individuel sur le fondement d’un tel régime. Ce n’est qu’au stade de la récupération des aides qu’il sera nécessaire de vérifier la situation individuelle de chaque entreprise concernée (voir la jurisprudence citée au point 78 ci-dessus).

137    En deuxième lieu, les requérantes font valoir que l’appréciation de la Commission, selon laquelle la mesure en cause n’était pas proportionnée, est erronée. Selon elles, l’exigence de lancer un appel d’offres en Espagne viole la répartition des compétences et implique que, dans toutes les communautés autonomes, les besoins seraient homogènes.

138    À cet égard, il convient de relever que la Commission a estimé, au considérant 166 de la décision attaquée, que, pour ce qui était de la proportionnalité, lors de la conception de l’intervention pour la zone II, il aurait été judicieux que le gouvernement espagnol procède à une comparaison des coûts ou lance un appel d’offres au niveau national. Selon elle, si un appel d’offres avait été lancé au niveau national, il en aurait résulté davantage de réductions sur les prix. Elle a précisé que, bien qu’il incombait aux autorités espagnoles de décider de leur organisation administrative en accordant un financement provenant dudit gouvernement, au lieu d’insister sur l’utilisation de la TNT, ce gouvernement aurait au moins pu inciter les communautés autonomes à lancer des appels d’offres en tenant compte des éventuelles économies susceptibles d’être réalisées avec certaines plates-formes.

139    Ces considérations ne sont entachées d’aucune erreur manifeste. En effet, loin de ne pas tenir compte de la répartition des compétences entre les administrations publiques espagnoles, la Commission s’est bornée à mettre en exergue le fait que le gouvernement espagnol aurait pu inciter les communautés autonomes à prendre en considération les éventuelles réductions sur les prix qui pourraient résulter d’une action coordonnée. Contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, la Commission n’a pas exigé qu’un seul appel d’offres public pour l’ensemble du territoire espagnol soit lancé. Le passage à la TNT ayant fait l’objet de différentes mesures législatives et administratives des autorités espagnoles au niveau national et ce passage ayant été partiellement financé par le budget dudit gouvernement (voir points 2 à 8 ci-dessus), il ne saurait être conclu que l’incitation des communautés autonomes à lancer des appels d’offres en tenant compte des éventuelles économies susceptibles d’être réalisées avec certaines plates-formes viole la répartition des compétences entre les administrations publiques espagnoles.

140    En troisième lieu, les requérantes affirment que la décision attaquée est entachée de contradictions. Selon elles, il était contradictoire, d’une part, d’admettre l’existence d’une défaillance du marché et, d’autre part, de considérer que la mesure en cause était inadéquate en raison d’une concurrence théorique qui n’existerait pourtant pas. Cette argumentation ne saurait être accueillie. En effet, aux considérants 151 et 152 de la décision attaquée, la Commission a constaté une défaillance du marché relative au déploiement de la télévision numérique dans la zone II, parce que les radiodiffuseurs n’auraient pas été disposés à supporter des coûts additionnels pour une extension de la couverture qui dépassait leurs obligations légales. Cette constatation n’est cependant pas en contradiction avec la considération selon laquelle, afin de déployer la télévision numérique dans ladite zone, il existait une concurrence entre les différentes technologies permettant d’atteindre cet objectif.

141    En quatrième lieu, les requérantes font valoir que la mise en balance, dans la décision attaquée, de la neutralité technologique et de la proportionnalité de la mesure en cause n’était pas conforme aux critères définis par la Commission dans sa communication au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, du 17 septembre 2003, concernant la transition de la radiodiffusion analogique à la radiodiffusion numérique (du passage au numérique à l’abandon de l’analogique) [COM (2003) 541 final]. Dans cette communication, le critère de neutralité technologique céderait face à des objectifs d’intérêt général. En revanche, dans la décision attaquée, la Commission aurait sacrifié ces objectifs en faveur de la neutralité technologique.

142    Cette argumentation doit également être rejetée. En effet, l’importance du principe de neutralité technologique en la matière a été soulignée par la Commission au point 2.1.3 de la communication visée au point 141 ci-dessus, ainsi qu’il ressort du considérant 144 de la décision attaquée. La condition de neutralité technologique au sens de cette communication prévoit, en particulier, que l’abandon de la diffusion analogique sur un territoire donné ne peut avoir lieu que si la quasi-totalité des ménages reçoivent les services numériques et que, pour atteindre cet objectif, tous les modes de transmission soient pris en compte (arrêt du 6 octobre 2009, Allemagne/Commission, T‑21/06, EU:T:2009:387, point 69). Lorsque la Commission adopte de tels actes destinés à préciser, dans le respect du traité, les critères qu’elle compte appliquer dans le cadre de l’exercice de son pouvoir d’appréciation, il en résulte une autolimitation de ce pouvoir en ce qu’il lui incombe de se conformer aux règles indicatives qu’elle s’est elle-même imposées (arrêt du 28 novembre 2008, Hotel Cipriani e.a./Commission, T‑254/00, T‑270/00 et T‑277/00, Rec, EU:T:2008:537, point 292).

143    En cinquième lieu, les requérantes contestent la considération, figurant au considérant 170 de la décision attaquée, selon laquelle, bien que l’intervention publique puisse être justifiée en raison de l’existence de certaines défaillances du marché et d’éventuels problèmes de cohésion, la manière dont la mesure a été conçue crée des distorsions inutiles de la concurrence. Dans la mesure où la Commission aurait constaté, audit considérant, l’existence de distorsions inutiles de la concurrence, elle aurait également violé l’obligation de motivation.

144    À cet égard, il y a lieu de relever, d’une part, qu’il ressort à suffisance de droit des considérants 153 à 169 de la décision attaquée que, selon la Commission, les distorsions inutiles de la concurrence résultaient du non-respect du principe de neutralité technologique. La Commission n’a donc pas violé son obligation de motivation. D’autre part, l’argumentation des requérantes visant à démontrer des erreurs d’appréciation de la Commission relatives au non-respect du principe de neutralité technologique a déjà été rejetée (voir points 122 à 142 ci-dessus).

145    En sixième lieu, les requérantes invoquent trois décisions précédentes de la Commission, à savoir la décision concernant l’aide d’État SA.28685 relative à la réception de la télévision numérique en Cantabrie, la décision concernant l’aide d’État N° 103/2007 relative à l’acquisition de décodeurs numériques et à l’adaptation des antennes collectives de télévision déjà existantes dans la province de Soria (Espagne) et la décision concernant l’aide d’État SA.32619 relative au dédommagement lié au dividende numérique. Dans la mesure où les requérantes affirment que la Commission a commis une erreur en raison du fait que, dans ces trois cas précédents, elle avait autorisé des aides qui ne respectaient pas le principe de neutralité technologique, leur argumentation doit également être rejetée.

146    En effet, il convient de relever que les requérantes invoquent une pratique décisionnelle antérieure de la Commission, sans pour autant donner aucune précision relative aux éléments de fait régissant ces cas d’espèce. Les requérantes ne démontrent donc pas l’existence d’une pratique décisionnelle antérieure de la Commission. En outre, selon la Commission, dans sa décision SA.28685, elle a autorisé une aide compatible avec le marché intérieur, en vertu de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, dans la mesure où cette aide satisfaisait notamment aux garanties de neutralité technologique. En ce qui concerne la décision N° 103/2007, il a déjà été jugé que la Commission avait expressément constaté que la mesure visée dans cette décision permettait aux consommateurs d’acquérir n’importe quel type de décodeur grâce à une subvention indépendante de la plate-forme technologique que le consommateur décidera d’utiliser et qu’elle a expressément conclu que ladite mesure respectait le principe de neutralité technologique (arrêt du 15 juin 2010, Mediaset/Commission, T‑177/07, Rec, EU:T:2010:233, point 103). Dans ces conditions, l’existence d’une pratique décisionnelle ne saurait être considérée comme établie. En tout état de cause, c’est dans le seul cadre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE que doit être appréciée la légalité d’une décision de la Commission constatant qu’une aide ne répond pas aux conditions d’application de cette dérogation, et non à l’aune d’une prétendue pratique antérieure (voir arrêt du 21 juillet 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission, C‑459/10 P, EU:C:2011:515, point 38 et jurisprudence citée).

147    Enfin, les requérantes contestent l’appréciation de la Commission, figurant aux considérants 173 à 175 de la décision attaquée, selon laquelle la mesure en cause constituait une aide nouvelle et non une aide existante, sans pour autant étayer leur affirmation par aucune argumentation à cet égard. Ce grief doit donc être rejeté comme irrecevable. En effet, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991, la requête introductive d’instance doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autre information à l’appui. Le requérant doit, de ce fait, expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé, de sorte que sa seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences dudit règlement. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen (voir arrêt du 12 septembre 2013, Besselink/Conseil, T‑331/11, EU:T:2013:419, points 37 et 38 et jurisprudence citée).

148    Le troisième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré à titre subsidiaire d’une erreur d’appréciation commise en qualifiant Retegal de bénéficiaire d’une aide d’État illégale

149    Les requérantes font valoir, à titre subsidiaire, que la Commission a commis une erreur d’appréciation en ce qu’elle a constaté, aux considérants 193 et 194 de la décision attaquée, que la Galice tombait sous le coup de la catégorie du régime d’aides selon laquelle une entreprise publique agissant en qualité d’opérateur de réseau aurait réalisé l’extension de couverture. La Commission aurait erronément constaté que Retegal constituait un tel opérateur de réseau et que le montant approximatif de la prétendue aide reçue illégalement était de 17 millions d’euros. Selon les requérantes, les appels d’offres réalisés par Retegal en exécution des missions confiées, qui avaient été technologiquement neutres, avaient uniquement pour objet la fourniture de biens d’équipements de télécommunications, leur installation et la mise en fonctionnement ainsi que la désinstallation des infrastructures analogiques. Conformément au considérant 185 de ladite décision, il n’y aurait donc pas lieu de procéder à la récupération des investissements effectués. En outre, le montant de 17 millions d’euros serait trop élevé. Selon les requérantes, Retegal n’était pas bénéficiaire de la prétendue aide, parce que cette entreprise n’exploitait pas de réseau. Lorsque les nouveaux biens d’équipement seraient installés, leur utilisation serait cédée, sans aucune contrepartie, aux communes qui, en tant qu’opérateurs, fourniraient le service de télévision numérique dans la zone II. La valeur économique du droit d’utilisation cessé aux communes serait faible de sorte que la mesure en cause serait, en tout état de cause, une aide de minimis exclue du champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Selon les requérantes, en l’absence d’un régime d’aides unique et en raison du fait que la Commission n’ignorait pas les circonstances relatives à l’action de Retegal, la Commission était tenue d’effectuer une analyse de l’aide prétendument octroyée pour chaque communauté autonome.

150    Il y a lieu de relever que les requérantes font valoir, en substance, que les constatations de la Commission selon lesquelles, d’une part, la situation en Galice tombait sous le coup de la catégorie du régime d’aides selon laquelle une entreprise publique agissant en qualité d’opérateur de réseau aurait réalisé l’extension de couverture et, d’autre part, Retegal constituait le bénéficiaire de la mesure en cause, sont erronées.

151    Cette argumentation doit être rejetée comme inopérante.

152    En effet, il y a lieu de constater que, en vertu des articles 1er et 3, paragraphe 1, de la décision attaquée, l’aide d’État en cause a été accordée aux opérateurs de la plate-forme de télévision terrestre et doit être récupérée auprès de ces derniers. En outre, il ressort de l’article 4, paragraphe 3, sous a), de ladite décision que, dans le cadre de la procédure de récupération, le Royaume d’Espagne doit communiquer à la Commission la liste des bénéficiaires qui ont reçu l’aide en vertu du régime visé à l’article 1er de cette décision et le montant total de l’aide reçue par chacun d’entre eux, conformément audit régime, ventilé en fonction des catégories de bénéficiaires figurant au point 6.2 de la même décision.

153    Aux considérants 189 à 195 de la décision attaquée, qui se trouvent au point 6.2 de cette décision, la Commission s’est bornée à donner des informations au Royaume d’Espagne relatives aux bénéficiaires de la mesure en cause afin que cet État membre soit en mesure d’accomplir ses obligations de récupération et d’information, prévues aux articles 3 et 4 de ladite décision. En effet, il ressort du considérant 189 de cette décision que, dans les considérants suivants de la même décision, sont mentionnées les différentes catégories de bénéficiaires de l’aide et que, sur la base des informations transmises par les autorités espagnoles, sont énumérées dans des tableaux les communautés autonomes et les catégories d’aides approximatives. À cet égard, la Commission a expressément précisé qu’il incombait au Royaume d’Espagne de classer lesdits bénéficiaires selon ces catégories et de fournir à la Commission les justificatifs pertinents, étant donné que cet État membre n’avait pas fourni d’information exhaustive concernant ces bénéficiaires. Il s’ensuit que, dans la mesure où la Commission a estimé, au considérant 193 de la décision en cause, d’une part, que la situation en Galice faisait partie de la catégorie du régime d’aides selon laquelle une entreprise publique agissant en qualité d’opérateur de réseau aurait réalisé l’extension de couverture et, d’autre part, que Retegal constituait le bénéficiaire de la mesure en cause en Galice, ces considérations constituaient une évaluation préliminaire au stade de l’adoption de la décision en question concernant l’appréciation de la légalité du régime d’aides en cause. En revanche, celles-ci étant expressément mises à la disposition de l’évaluation du Royaume d’Espagne, ainsi qu’il ressort du considérant 189 de la décision concernée, elles ne constituaient une prise de position juridiquement contraignante ni concernant la situation en Galice ni concernant la qualification de Retegal de bénéficiaire d’aide. Cette appréciation est confirmée par le fait que, au considérant 194 de la décision susmentionnée, la Commission n’a indiqué aucun montant précis d’aide reçue, selon elle, par l’entreprise publique pour l’extension de la couverture, mais qu’elle s’est bornée à indiquer un montant approximatif.

154    En tout état de cause, même si, contrairement à ce qui est indiqué au considérant 193 de la décision attaquée, ni la situation en Galice ne tombait sous la catégorie du régime d’aides indiquée par la Commission ni Retegal ne constituait le bénéficiaire de la mesure en cause, cela ne remettrait pas en cause le dispositif de ladite décision. En effet, ainsi qu’il a déjà été constaté (voir point 152 ci-dessus), selon ce dispositif, le Royaume d’Espagne doit, en substance, évaluer conformément aux catégories mentionnées au point 6.2 de cette décision attaquée, d’une part, l’opérateur de la plate-forme de télévision terrestre en Espagne qui a reçu l’aide en cause pour le déploiement, la maintenance et l’exploitation du réseau de TNT dans la zone II et, d’autre part, le montant total de l’aide reçue par chacun d’entre eux. Selon le considérant 189 de la même décision, c’est le régime en tant que tel qui est discriminatoire et dont les caractéristiques ont été indiquées dans la décision en cause.

155    Il a déjà été constaté (voir point 78 ci-dessus) que, aux considérants 101 à 105 de la décision attaquée, la Commission s’était bornée à examiner les différents cas de figure dans lesquels l’extension de la couverture aurait été mise en œuvre et plusieurs types de bénéficiaires directs, mais n’avait pas examiné en détail la situation particulière dans chaque communauté autonome et que les constatations figurant dans ces considérants n’incluaient aucunement un examen exhaustif et détaillé du cas de chaque partie concernée en Galice par l’octroi des fonds publics en cause.

156    Contrairement à ce qu’allèguent les requérantes, la Commission pouvait se borner, en l’espèce, à étudier les caractéristiques du régime d’aides pour apprécier, dans les motifs de la décision, si ce régime revêtait un caractère approprié pour la réalisation de l’un des objectifs visés par l’article 107, paragraphe 3, TFUE.

157    En effet, il résulte de différents actes législatifs et administratifs des autorités espagnoles que le plan de transition vers la télévision numérique dans l’ensemble du territoire du Royaume d’Espagne par un recours prédominant à la technologie terrestre obéissait à une initiative lancée et coordonnée par l’administration centrale. Il est constant, ainsi qu’il ressort du considérant 24 de la décision attaquée, que la loi 10/2005, qui marquait le début de la réglementation du passage à la TNT, a précisé la nécessité d’encourager un passage de la technologie analogique vers la TNT. Ainsi qu’il ressort du considérant 26 de ladite décision, les autorités espagnoles prévoyaient, dans une disposition additionnelle du programme technique national en faveur de la TNT, la possibilité d’une extension de couverture au moyen de la technologie terrestre dans les zones à faible densité de population à la condition que l’installation locale devait être conforme à ce programme. Les considérants 28 à 32 de cette décision, dont le contenu n’est pas contesté par les requérantes, décrivent la collaboration entre le MITC et les communautés autonomes au moyen de conventions-cadres et d’addenda à des conventions-cadres afin de procéder à la numérisation dans la zone II. Ces actes avaient notamment trait au cofinancement par le gouvernement espagnol de l’extension de la couverture de la TNT dans ladite zone. En ce qui concerne en particulier la Galice, la convention-cadre entre le MITC et la communauté autonome de Galice signée le 18 décembre 2008 et l’addendum à cette convention-cadre signée le 31 juillet 2009 se réfèrent expressément au développement du programme national en faveur du passage à la TNT. Selon la première clause de cette convention-cadre, son objet est de fixer les conditions de collaboration entre l’administration centrale et la communauté autonome de Galice pour entreprendre les actions nécessaires pour se conformer au programme national en faveur du passage à la TNT.

158    Au vu des éléments qui précèdent, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir analysé les mesures espagnoles en faveur du déploiement de la TNT dans la zone II dans un seul et même contexte. En effet, les différentes interventions étatiques aux niveaux national, régional et communal devant être analysées en fonction de leurs effets, elles présentaient, en l’espèce, des liens tellement étroits entre elles qu’elles pouvaient être considérées par la Commission comme un seul régime d’aides accordé par les autorités publiques en Espagne. Tel est le cas notamment parce que les interventions consécutives en Espagne présentaient, au regard notamment de leur chronologie, de leur finalité et de la situation dans ladite zone, des liens tellement étroits entre elles qu’il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas les avoir dissociées (voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 2013, Bouygues e.a./Commission e.a., C‑399/10 P et C‑401/10 P, Rec, EU:C:2013:175, points 103 et 104).

159    En outre, ainsi qu’il a déjà été constaté (voir point 136 ci-dessus), selon la jurisprudence, la Commission, dans une décision qui porte sur un tel régime, n’est pas tenue d’effectuer une analyse de l’aide octroyée dans chaque cas individuel sur le fondement d’un tel régime. Ce n’est qu’au stade de la récupération des aides qu’il sera nécessaire de vérifier la situation individuelle de chaque entreprise concernée.

160    Dans la mesure où les requérantes font valoir, dans ce contexte, que, selon elles, conformément au considérant 185 de la décision attaquée, il n’y a pas lieu de procéder à la récupération des investissements effectués en raison du fait que les appels d’offres réalisés par Retegal en exécution des missions confiées, d’une part, avaient été technologiquement neutres et, d’autre part, avaient uniquement eu pour objet la fourniture de biens d’équipements de télécommunications, leur installation et la mise en fonctionnement ainsi que la désinstallation des infrastructures analogiques, leur argumentation doit également être rejetée comme étant inopérante dans le cadre des présents recours. En effet, il est vrai que, conformément aux articles 1er et 3 de la décision attaquée lus à la lumière des considérants 185 et 186 de cette décision, la récupération de l’aide n’est pas exigée dans le cas d’appels d’offres destinés à la fourniture d’équipement ni dans la mesure où l’aide a été accordée conformément au principe de neutralité technologique. Cependant, il incombe au Royaume d’Espagne, dans la phase de récupération de l’aide en cause, visée à l’article 4 de ladite décision, d’apprécier si l’aide en cause en Galice tombe sous le coup de ces exceptions à la récupération. À cet égard, il n’est, d’ailleurs, pas exclu qu’un montant de l’aide à récupérer égal à zéro soit fixé (voir, en ce sens, arrêt du 13 février 2014, Mediaset, C‑69/13, Rec, EU:C:2014:71, point 39).

161    L’offre de preuve n° 2 des requérantes figurant dans les requêtes, relative au fait que les procédures suivies par la communauté autonome de Galice par l’intermédiaire de Retegal, en vue de l’acquisition des équipements techniques nécessaires pour l’adaptation des infrastructures communales existantes à la réception de la télévision numérique, dont l’utilisation aurait été cédée aux communes, se seraient déroulées conformément aux règles applicables aux marchés publics et, notamment sur la base de procédures d’appels d’offres ouvertes, transparentes, non discriminatoires et technologiquement neutres, n’est donc pas pertinente dans le cadre de la présente procédure. Ainsi qu’il ressort de la lettre de la Commission aux autorités espagnoles du 15 avril 2014, ces questions font notamment l’objet de la phase de récupération de l’aide en cause.

162    En outre, dans la phase de récupération de l’aide en cause, il y a également lieu de déterminer les cas dans lesquels, le cas échéant, la récupération n’a pas lieu, en vertu de l’article 2 de la décision attaquée, parce que les conditions d’une aide de minimis sont remplies, conformément au règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l’application des articles 107 TFUE et 108 TFUE aux aides de minimis (JO L 379, p. 5).

163    Il s’ensuit que le quatrième moyen et, par conséquent, les recours dans leur intégralité doivent être rejetés.

 Sur les dépens

164    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter, outre leurs propres dépens, ceux exposés par la Commission et par l’intervenante, conformément aux conclusions de ces dernières.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Les recours sont rejetés.

2)      La Comunidad Autónoma de Galicia \/ et Redes de Telecomunicación Galegas Retegal, SA (Retegal) supporteront, outre leurs propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne et par SES Astra.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 novembre 2015.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur la recevabilité

Sur le fond

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE

– Sur la première branche, tirée de l’absence d’activité économique

– Sur la deuxième branche, tirée de l’absence d’avantage économique

– Sur la troisième branche, tirée de l’absence d’avantage sélectif

Sur le deuxième moyen, tiré à titre subsidiaire d’une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE

Sur le troisième moyen, tiré à titre subsidiaire d’une violation de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE

Sur le quatrième moyen, tiré à titre subsidiaire d’une erreur d’appréciation commise en qualifiant Retegal de bénéficiaire d’une aide d’État illégale

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’espagnol.