Language of document : ECLI:EU:T:2014:1103

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

9 décembre 2014 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑394/10 DEP,

Elena Grebenshikova, demeurant à Saint-Pétersbourg (Russie), représentée par MM. Björkenfeldt, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Volvo Trademark Holding AB, établie à Göteborg (Suède),

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à rembourser par l’OHMI à la partie requérante à la suite de l’arrêt du Tribunal du 5 décembre 2013, Grebenshikova/OHMI – Volvo Trademark (SOLVO) (T‑394/10, EU:T:2013:627),

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, O. Czúcz (rapporteur) et A. Popescu, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 septembre 2010, la requérante, Mme Elena Grebenshikova, a introduit un recours en annulation contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 9 juin 2010 (affaire R 861/2010‑1), relative à une procédure d’opposition entre Volvo Trademark Holding AB et la requérante.

2        L’intervenante, Volvo Trademark Holding AB, est intervenue dans le litige au soutien des conclusions de l’OHMI.

3        Par arrêt du 5 décembre 2013, Grebenshikova/OHMI – Volvo Trademark (SOLVO) (T‑394/10, EU:T:2013:627), le Tribunal a accueilli le recours et annulé la décision de la première chambre de recours. Il a condamné l’OHMI à supporter, outre ses dépens, deux tiers des dépens de la requérante et l’intervenante à supporter, outre ses dépens, un tiers des dépens de la requérante.

4        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 juin 2014, la requérante a formé, au titre de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, une demande de taxation des dépens par laquelle elle a invité le Tribunal à fixer le montant des dépens récupérables à 49 178 euros, dont 47 355 euros au titre des honoraires d’avocats et 1 823 euros au titre des débours et autres frais, ayant précisé qu’il incomberait à l’OHMI de lui verser deux tiers de la somme totale, c’est-à-dire 32 785 euros.

5        Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 19 août 2014, l’OHMI a présenté ses observations sur cette demande. Il a conclu au rejet de la demande introduite par la requérante et à la fixation de la partie des dépens récupérables à verser par lui à un montant de 8 000 euros.

 En droit

6        Selon l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme des dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins [ordonnances du Tribunal du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, Rec, EU:T:2004:192, point 13, et du 7 janvier 2008, Rodrigues Carvalhais/OHMI – Profilpas (PERFIX), T‑206/04 DEP, EU:T:2008:2, point 7].

7        Selon une jurisprudence constante, le Tribunal n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces émoluments peuvent être récupérés auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (ordonnances Airtours/Commission, point 6 supra, EU:T:2004:192, point 17, et PERFIX, point 6 supra, EU:T:2008:2, point 8).

8        Il est également de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions de nature tarifaire de l’Union, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représentés pour les parties (ordonnances Airtours/Commission, point 6 supra, EU:T:2004:192, point 18, et PERFIX, point 6 supra, EU:T:2008:2, point 9).

9        C’est en fonction de ces éléments qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce.

10      En premier lieu, le Tribunal relève que l’affaire au principal ne présentait, quant à son objet et à sa nature, aucune complexité particulière.

11      Cette affaire concernait une opposition formée par l’intervenante à l’encontre de l’enregistrement de la marque communautaire demandée par la requérante, le motif principal invoqué à l’appui de l’opposition étant le risque de confusion visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [devenu article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)]. À cet égard, l’arrêt rendu dans l’affaire au principal fait apparaître que ladite affaire, qui ne concernait ni une question de droit nouvelle ni une question de fait complexe et qui n’impliquait pas une analyse complexe, ne saurait être considérée comme particulièrement difficile.

12      La requérante fait néanmoins valoir que la continuité du litige a augmenté sa complexité.

13      À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’arrêt rendu dans l’affaire au principal a été prononcé à la suite d’un autre arrêt concernant le conflit entre les même marques, à savoir l’arrêt du 2 décembre 2009, Volvo Trademark/OHMI – Grebenshikova (SOLVO) (T‑434/07, Rec, EU:T:2009:480). Dans la décision annulée par ce dernier arrêt, la deuxième chambre de recours a conclu à l’absence de similitude entre les signes en conflit, et, dès lors, à l’absence de risque de confusion. En revanche, dans la décision annulée par l’arrêt rendu dans l’affaire au principal, la première chambre a constaté un certain degré de similitude entre les signes en cause, et a conclu à la présence d’un risque de confusion.

14      L’OHMI a ainsi adopté deux décisions de seconde instance concernant la même procédure d’opposition, qui contiennent des approches et des résultats différents. Cette circonstance était susceptible de rendre plus difficile pour la requérante la définition de sa position dans l’affaire au principal et de développer son argumentation, ce qui est pertinent du point de vue de l’appréciation de la complexité du litige.

15      Enfin, il y a lieu néanmoins de considérer que l’affaire au principal ne revêtait pas une importance particulière au regard du droit de l’Union, la solution retenue pouvant être directement déduite d’une jurisprudence bien établie.

16      En deuxième lieu, il convient de relever que, si l’affaire présentait, certes, un intérêt économique pour la requérante, en l’absence totale d’éléments concrets apportés par cette dernière, cet intérêt ne saurait être considéré comme inhabituel ou significativement différent de celui qui sous-tend toute contestation d’une opposition formée à l’encontre d’une demande d’enregistrement d’une marque communautaire [voir, en ce sens, ordonnance du 25 octobre 2010, Bastos Viegas/OHMI (OPDREX), T‑33/08 DEP, EU:T:2010:447, point 12].

17      En troisième lieu, en ce qui concerne l’ampleur du travail que la procédure a pu engendrer pour le conseil de la requérante, il appartient au juge de l’Union de prendre en considération le travail objectivement indispensable à l’ensemble de la procédure judiciaire. Par ailleurs, il importe de rappeler que la possibilité pour le juge de l’Union d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies (voir ordonnance Airtours/Commission, point 6 supra, EU:T:2004:192, point 30, et la jurisprudence citée).

18      Par ailleurs, lorsque les avocats de la requérante ont déjà assisté celle-ci au cours de procédures ou de démarches qui ont précédé le litige s’y rapportant, comme en l’espèce, il convient également de tenir compte du fait que ces avocats disposent d’une connaissance d’éléments pertinents pour le litige qui est de nature à avoir facilité leur travail et réduit le temps de préparation nécessaire pour la procédure contentieuse (ordonnance du 13 janvier 2006, IPK-München/Commission, T‑331/94 DEP, Rec, EU:T:2006:11, point 59).

19      En l’espèce, la requérante a produit, à l’appui de sa demande de taxation des dépens, un décompte des frais et honoraires qui ont été exposés au cours de la procédure et dont elle demande le paiement.

20      En premier lieu, la requérante soumet des documents faisant état de 213 heures de travail par son avocat et par un agent de marques, facturés à un taux horaire de respectivement 275 euros et 165 euros, portant sur la période allant du 1er septembre 2010 au 3 mars 2014.

21      Il convient de relever que si les taux horaires facturés par les conseils de la requérante paraissent plutôt raisonnables, le nombre d’heures consacré aux tâches relatives au litige au principal semble disproportionné.

22      En effet, la requête déposée par la requérante ne compte que douze pages et la procédure menée devant le Tribunal était limitée à un seul échange de pièces.

23      En outre, les heures facturées au titre de la régularisation de la requête ne sont pas récupérables. En effet, c’est de la responsabilité du conseil de requérante de déposer les pièces de procédure en bonne et due forme. Dès lors, les dépens supplémentaires engendrés par la régularisation, qui sont les conséquences de l’inobservation de certains critères de forme lors du dépôt initial des pièces, ne sauraient être mis à la charge de l’autre partie. .

24      Enfin, il convient également de refuser la récupération auprès de l’OHMI des dépens se rapportant à la période postérieure à la procédure orale. Il y a lieu de souligner qu’aucun acte de procédure n’a été adopté après le 22 avril 2013, date de l’audience, l’affaire ayant été prise en délibéré. Dans ces conditions, les dépens exposés par la requérante postérieurement à cette date n’apparaissent pas être directement liés à la procédure devant le Tribunal et ne sauraient, par conséquent, être considérés comme des frais indispensables aux fins de la procédure, au sens de l’article 91 du règlement de procédure [voir, en ce sens, ordonnance Lego Juris/OHMI (Brique de Lego rouge) T‑270/06 DEP, EU:T:2010:494, point 57].

25      Eu égard à l’ensemble des considérations susmentionnées, il est approprié de fixer la partie des dépens exposés au titre des honoraires des conseils de la requérante, à verser par l’OHMI à cette dernière, à un montant forfaitaire de 17 000 euros.

26      En deuxième lieu, la requérante avance que les frais de déplacement et de séjour exposés par ses conseils s’élèvent à 1 823 euros. Ce mondant inclut les frais de déplacement et de séjour à Luxembourg exposés par l’avocat la représentant devant le Tribunal et son agent de marques (1 201 euros), ainsi que les frais de déplacement et de séjour de l’agent de marques à Saint-Pétersbourg exposés aux fins d’une rencontre personnelle avec la requérante en novembre 2011 (622 euros).

27      Il y a lieu de considérer que, en l’espèce, seuls les débours de déplacement et de séjour occasionnés par la participation de l’avocat de la requérante à l’audience devant le Tribunal constituent des frais indispensables exposés aux fins de la procédure, au sens de l’article 91 du règlement de procédure. À cet égard, il y a lieu de rappeler que les frais de déplacement et de séjour exposés par des personnes autres que l’avocat de la requérante ne sont récupérables que si la présence de ces personnes était indispensable aux fins de la procédure [ordonnance du 17 juillet 2012, Budějovický Budvar/OHMI – Anheuser-Busch (BUDWEISER), T‑57/04 DEP, EU:T:2012:389, point 15]. Or, en l’espèce, la requérante n’a apporté aucun élément qui permettrait de considérer que la présence de son agent de marques était indispensable lors de l’audience. De même, il n’existe aucune indication dans le dossier quant à la nécessité de la présence de l’agent de marques de la requérante à Saint-Pétersbourg en novembre 2011.

28      Dès lors, les frais à rembourser à ce titre par l’OHMI à la requérante sont fixés à 400 euros.

29      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les frais exposés aux fins de la présente procédure (ordonnance Brique de Lego rouge, point 24 supra, EU:T:2010:494, point 62), le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par la requérante auprès de l’OHMI au titre de la procédure devant le Tribunal en fixant leur montant à 17 400 euros, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire, jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

ordonne :

Le montant total à rembourser par l’OHMI à Mme Elena Grebenshikova est fixé à 17 400 euros.

Fait à Luxembourg, le 9 décembre 2014.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      G. Berardis


* Langue de procédure : l’anglais.