Language of document : ECLI:EU:T:2011:688

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

23 novembre 2011(*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Documents relatifs à l’affiliation de certains membres du Parlement européen au régime de pension complémentaire – Refus d’accès – Exception relative à la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu – Article 8, sous b), du règlement (CE) n° 45/2001 – Transfert de données à caractère personnel »

Dans l’affaire T‑82/09,

Gert-Jan Dennekamp, demeurant à Giethoorn (Pays-Bas), représenté par Mes O. Brouwer, A. Stoffer et T. Oeyen, avocats,

partie requérante,

soutenu par

Royaume de Danemark, représenté par Mme B. Weis Fogh et MM. J. Bering Liisberg et S. Juul Jørgensen, en qualité d’agents,

par

République de Finlande, représentée par M. J. Heliskoski et Mme H. Leppo, en qualité d’agents,

et par

Contrôleur européen de la protection des données (CEPD), représenté initialement par MM. H. Hijmans et H. Kranenborg, puis par M. Kranenborg et Mme I. Chatelier, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

contre

Parlement européen, représenté initialement par MM. N. Lorenz, H. Krück et D. Moore, puis par MM. Lorenz et Moore, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision A (2008) 22050 du Parlement européen, du 17 décembre 2008, refusant d’accorder au requérant l’accès à certains documents relatifs à l’affiliation de certains membres du Parlement européen au régime de pension complémentaire,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, J. Schwarcz (rapporteur) et A. Popescu, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 juin 2011,

rend le présent

Arrêt

 Faits à l’origine du litige

1        Le 25 novembre 2005, le requérant, M. Gert-Jan Dennekamp, a saisi, sur le fondement du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), le Parlement européen d’une demande d’accès à « tous les documents » relatifs au régime de pension complémentaire des membres du Parlement (ci-après le « régime »). L’accès a été accordé à une note du secrétaire général au Bureau du Parlement, aux « Comptes et rapports annuels » portant sur plusieurs années et au procès-verbal d’une réunion du Bureau.

2        Le requérant a déposé une plainte auprès du Médiateur européen, en raison du refus de lui accorder l’accès à la liste des membres du Parlement participant au régime. Ayant constaté que le Parlement, en tant qu’organe politique, avait pris la décision de ne pas donner accès au document sollicité, le Médiateur a clôturé l’affaire, après avoir toutefois relevé que le refus d’accès semblait ne pas être correctement fondé.

3        Par une lettre du 20 octobre 2008 adressée au président du Parlement, le requérant a introduit une demande d’accès à tous les documents indiquant quels membres du Parlement participent au régime, à la liste des membres du Parlement qui participaient au régime à la date du 1er septembre 2005 et à la liste des participants actuels en faveur desquels le Parlement verse une cotisation mensuelle (ci-après la « demande initiale »).

4        Par lettre du 12 novembre 2008, le Parlement a refusé l’accès aux documents demandés, considérant que leur communication ne serait pas compatible avec le règlement (CE) n° 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2000, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2001, L 8, p. 1).

5        Le 25 novembre 2008, le requérant a présenté une demande confirmative d’accès aux mêmes documents (ci-après la « demande confirmative »).

6        Le Parlement a rejeté la demande confirmative par la décision A (2008) 22050, du 17 décembre 2008, refusant d’accorder au requérant l’accès à certains documents relatifs à l’affiliation de certains de ses membres au régime de pension complémentaire (ci-après la « décision attaquée »).

7        Dans la décision attaquée, le Parlement a estimé que les documents demandés par le requérant comportaient des données portant sur la vie privée des membres du Parlement qui participent au régime, que la divulgation de telles données risquait de porter atteinte à la protection de leur vie privée et à leur intégrité et serait ainsi contraire à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001 ainsi qu’aux dispositions du règlement n° 45/2001, applicable en l’espèce, notamment son article 8, sous b), qui impose au destinataire du traitement de démontrer la nécessité du transfert des données à caractère personnel, et que la communication des documents demandés serait disproportionnée au regard des buts poursuivis par le requérant.

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 février 2009, le requérant a introduit le présent recours.

9        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a, en vertu de l’article 76 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, demandé au Tribunal de statuer selon une procédure accélérée. Le Tribunal n’a pas fait droit à cette demande.

10      Par actes déposés respectivement les 19 mai, 28 mai et 17 juin 2009, le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD), le Royaume de Danemark et la République de Finlande ont demandé à intervenir au soutien des conclusions du requérant.

11      Par ordonnances du président de la septième chambre du Tribunal du 4 septembre 2009, le CEPD, d’une part, et le Royaume de Danemark et la République de Finlande, d’autre part, ont été admis à intervenir.

12      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la deuxième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

13      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 26 octobre 2010, le CEPD a demandé, sur le fondement de l’article 64 du règlement de procédure, l’adoption de mesures d’organisation de la procédure pour inviter les parties à présenter des observations écrites sur les conclusions à tirer de l’arrêt de la Cour du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager (C‑28/08 P, non encore publié au Recueil).

14      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner le Parlement aux dépens, y compris à ceux exposés par toute partie intervenante et à ceux exposés dans le cadre de la demande de procédure accélérée.

15      Le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le CEPD concluent à ce qu’il plaise au Tribunal de faire droit aux conclusions du requérant et, ainsi, d’annuler la décision attaquée.

16      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

17      À l’appui de son recours, le requérant soulève quatre moyens, tirés, premièrement, de la violation de l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001 et de l’application incorrecte de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du même règlement, deuxièmement, de l’application incorrecte du règlement n° 45/2001, troisièmement, d’une erreur manifeste d’appréciation et, quatrièmement, de la violation de l’obligation de motivation.

18      Il convient d’examiner, en premier lieu, le deuxième moyen du recours.

 Sur le deuxième moyen, tiré de l’application incorrecte du règlement n° 45/2001

19      Par le deuxième moyen de son recours, le requérant soutient que le règlement n° 45/2001 ne pouvait être appliqué à sa demande d’accès aux documents, laquelle serait uniquement régie par le règlement n° 1049/2001. À l’appui de son moyen, le requérant relève que le droit d’accès aux documents, prévu par le règlement n° 1049/2001, constitue une obligation légale au sens de l’article 5, sous b), du règlement n° 45/2001, à laquelle le Parlement était tenu de déférer. Par suite, l’article 6, paragraphe 1, l’article 8, sous b), et l’article 18, sous a), du règlement n° 45/2001 ne pourraient être opposés à sa demande d’accès.

20      À l’audience, le requérant a soutenu, pour la première fois, qu’il aurait, dans les demandes initiale et confirmative, démontré la nécessité d’obtenir le transfert des données à caractère personnel, conformément à l’article 8, sous b), du règlement n° 45/2001, en invoquant les intérêts publics de la responsabilité, de la transparence et du contrôle des dépenses publiques.

21      En premier lieu, il convient de rappeler que le règlement n° 1049/2001 vise, comme l’indiquent son quatrième considérant et son article 1er, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible (arrêt de la Cour du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, Rec. p. I‑4723, point 33).

22      Lorsque la divulgation d’un document est demandée à une institution, celle-ci est tenue d’apprécier, dans chaque cas d’espèce, si ce document relève des exceptions au droit d’accès du public aux documents des institutions énumérées à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêt Suède et Turco/Conseil, point 21 supra, point 35). Compte tenu des objectifs poursuivis par ce règlement, ces exceptions doivent être interprétées et appliquées strictement (arrêt Suède et Turco/Conseil, point 21 supra, point 36).

23      En deuxième lieu, il résulte de la jurisprudence que, lors de l’examen de la relation existant entre les règlements n° 1049/2001 et n° 45/2001 en vue de l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001, à savoir la protection de la vie privée et de l’intégrité de l’individu, il faut garder à l’esprit que lesdits règlements ont des objectifs différents. Le premier vise à assurer la plus grande transparence possible du processus décisionnel des autorités publiques ainsi que des informations qui fondent leurs décisions. Il vise donc à faciliter au maximum l’exercice du droit d’accès aux documents ainsi qu’à promouvoir de bonnes pratiques administratives. Le second vise à assurer la protection des libertés et des droits fondamentaux des personnes physiques, notamment de leur vie privée, lors du traitement de données à caractère personnel (arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 49).

24      Les règlements n° 45/2001 et n° 1049/2001 ne comportant pas de dispositions prévoyant expressément la primauté de l’un sur l’autre, il convient, en principe, d’assurer leur pleine application (arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 56).

25      Or, l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001 établit un régime spécifique et renforcé de protection d’une personne dont les données à caractère personnel pourraient, le cas échéant, être communiquées au public (arrêt Commission/Bavarian Lager, point 23 supra, point 60).

26      Lorsqu’une demande fondée sur le règlement n° 1049/2001 vise à obtenir l’accès à des documents comprenant des données à caractère personnel, les dispositions du règlement n° 45/2001 deviennent intégralement applicables, y compris l’article 8 de celui-ci (arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 63).

27      En troisième lieu, il convient de constater que, en l’espèce, la demande d’accès présentée par le requérant visait à obtenir les noms des membres du Parlement qui participaient, à la date de la demande initiale, ou avaient participé, au 1er septembre 2005, au régime ainsi que les noms des participants à la date de la demande initiale pour lesquels le Parlement versait une cotisation mensuelle au régime. Les noms des membres du Parlement constituent des données à caractère personnel au sens de l’article 2, sous a), du règlement n° 45/2001 (voir, en ce sens, arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 68).

28      Par ailleurs, ainsi que le Parlement l’a correctement constaté dans la décision attaquée, la communication de données à caractère personnel entre dans la définition du traitement de telles données (voir, en ce sens, arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 69).

29      Dès lors, les dispositions de l’article 8, sous b), du règlement n° 45/2001 étaient applicables à la demande d’accès du requérant, qui portait sur des documents comportant des données à caractère personnel, sans que puisse s’y opposer la circonstance que le traitement sollicité par le requérant fût licite sur le fondement de l’article 5, sous b), dudit règlement, l’article 8, sous b), s’appliquant sans préjudice de l’article 5.

30      Afin d’obtenir la divulgation des données à caractère personnel comprises dans les documents qu’il sollicitait, le requérant devait démontrer, en fournissant des justifications expresses et légitimes, la nécessité du transfert des données à caractère personnel sollicitées, afin que le Parlement puisse, ensuite, mettre en balance les différents intérêts des parties en cause et vérifie s’il n’existait aucune raison de penser que ce transfert pouvait porter atteinte aux intérêts légitimes de ses membres, comme le prescrit l’article 8, sous b), du règlement n° 45/2001 (voir, en ce sens, arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 78).

31      En l’espèce, il convient de constater que le requérant ne s’est acquitté de l’obligation de démontrer la nécessité du transfert des données à caractère personnel sollicitées, fixée par l’article 8, sous b), du règlement n° 45/2001, ni dans la demande initiale ni dans la demande confirmative.

32      Pour justifier l’accès aux documents sollicités, le requérant a fait référence, dans la demande initiale, au fait que les membres du Parlement « devaient être conscients que leurs données à caractère personnel étaient d’intérêt public », que ces documents « se rapportaient à leur mandat de membre du Parlement, puisque le régime […] était une conséquence du fait d’être membre du Parlement », que le régime « avait été établi par le Parlement et était, dans une large mesure, financé par des fonds publics », que les « membres du Parlement pouvaient utiliser leur mandat pour influencer le futur et le financement du régime » et que, « dans le passé, le Parlement avait plusieurs fois voté pour renflouer le régime ». Le requérant en tirait la conséquence « qu’il était pertinent de savoir qui avait un intérêt personnel dans le régime » au nom des principes de transparence et de responsabilité, qui conduiraient le public à montrer un intérêt plus important pour les données à caractère personnel des employés des administrations publiques que pour celles des personnes travaillant dans le secteur privé.

33      Dans la demande confirmative, il convient de relever que le requérant a expressément affirmé qu’il n’y avait aucune obligation, en l’espèce, de démontrer la nécessité du transfert des données à caractère personnel sollicitées, comme il est prévu à l’article 8, sous b), du règlement n° 45/2001. Par ailleurs, le requérant mentionnait, à nouveau, le fait que les données à caractère personnel en question concernaient un sujet d’intérêt public, le Parlement participant financièrement au régime. Il rappelait également les intérêts publics de la transparence et de la responsabilité, dont le respect serait assuré par le droit d’accès aux documents. En réponse à un argument du Parlement quant au caractère disproportionné du transfert des données à caractère personnel sollicitées, le requérant affirmait que le droit d’accès des citoyens aux documents ne pouvait être écarté du fait de l’existence d’autres moyens de contrôle, comme ceux exercés par la commission du contrôle budgétaire du Parlement ou la Cour des comptes de l’Union européenne. Enfin, il insistait sur le droit pour le public de connaître les noms des membres du Parlement qui participent au régime, afin de pouvoir déterminer lesquels ont un intérêt personnel dans celui-ci et quels sont les risques potentiels de conflits d’intérêt.

34      Par les considérations d’ordre général qu’il a fait valoir dans la demande initiale et dans la demande confirmative, le requérant n’a pas démontré la nécessité d’obtenir le transfert des noms des membres du Parlement participant à la date de la demande initiale, ou ayant participé à la date du 1er septembre 2005, au régime, et celui des noms des participants à la date de la demande initiale pour lesquels le Parlement versait une cotisation mensuelle au régime, afin d’atteindre les objectifs en vue desquels il sollicitait la divulgation de ces données à caractère personnel. Sur ce point, il convient de constater que le requérant s’est borné à fournir les motifs pour lesquels il estimait que ces données à caractère personnel seraient d’un intérêt pour le public. Toutefois, il n’a pas établi, par ces arguments, en apportant au Parlement une argumentation et des justifications expresses, ainsi que l’exige la jurisprudence (voir point 30 ci-dessus), en quoi le traitement des données à caractère personnel que constitue le transfert de celles-ci par le Parlement aurait été nécessaire pour que l’intérêt public qu’il invoquait fût satisfait. Plus particulièrement, si le requérant a critiqué, dans la demande confirmative, l’opinion du Parlement sur le caractère disproportionné du transfert des noms des membres du Parlement, telle qu’exposée dans la décision du 12 novembre 2008 lui refusant l’accès aux documents, il n’a pas démontré qu’un tel transfert aurait été plus approprié que les mesures dont le Parlement faisait état ni justifié que ce transfert aurait été proportionné pour atteindre les buts qu’il poursuivait.

35      Au surplus, l’interprétation selon laquelle les considérations du requérant mentionnées au point 33 ci-dessus devraient conduire le Parlement à admettre que, dans la demande confirmative, la nécessité du transfert des données personnelles était démontrée ne saurait être retenue, dès lors qu’elle obligerait, par principe, l’institution à déduire de considérations générales tenant à l’intérêt du public à la divulgation des données personnelles la démonstration implicite de la nécessité du transfert de ces données.

36      Il résulte des points 29 à 35 ci-dessus que le règlement n° 45/2001 était applicable en l’espèce et que, par suite, le deuxième moyen du recours doit être rejeté, sans qu’il soit besoin de se prononcer ni sur la recevabilité du grief présenté pour la première fois à l’audience (voir point 20 ci-dessus), ni sur les arguments du requérant relatifs à l’application de l’article 6, paragraphe 1, et de l’article 18, sous a), dudit règlement, le requérant n’ayant en tout état de cause pas satisfait à l’obligation posée par l’article 8, sous b), dudit règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001 et de l’application incorrecte de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du même règlement

37      Le requérant soutient que le Parlement a violé les dispositions de l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001, en donnant une large interprétation à l’exception au droit d’accès prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du même règlement et tirée du risque d’atteinte à la vie privée, et en assimilant la notion de vie privée à celle de protection des données à caractère personnel. Or, la divulgation de telles données contenues dans les documents demandés ne serait pas susceptible de porter atteinte à la vie privée des membres du Parlement. Par ailleurs, les documents demandés concerneraient une question d’intérêt public et, dans l’hypothèse où leur divulgation porterait atteinte à la vie privée, une telle ingérence serait justifiée et proportionnée.

38      Il convient de rappeler que, si l’article 2 du règlement n° 1049/2001 vise à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible, l’institution saisie d’une demande d’accès est tenue d’apprécier, dans chaque cas d’espèce, si le document sollicité relève des exceptions au droit d’accès du public aux documents des institutions énumérées à l’article 4 dudit règlement (arrêt Suède et Turco/Conseil, point 21 supra, points 33 et 35).

39      La Cour a également jugé que l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001, qui est une disposition indivisible, exige que l’atteinte éventuelle à la vie privée et à l’intégrité de l’individu soit toujours examinée et appréciée en conformité avec la législation de l’Union relative à la protection des données à caractère personnel, notamment avec le règlement n° 45/2001 (arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 59).

40      Dans la décision attaquée, le Parlement a considéré que l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001 exigeait des institutions qu’elles refusent l’accès à un document lorsque sa divulgation risquait de porter atteinte à la vie privée et à l’intégrité d’un individu, au regard, en particulier, de la législation de l’Union relative à la protection des données à caractère personnel, dont le règlement n° 45/2001 fait partie. La demande d’accès du requérant portant sur des données à caractère personnel, ainsi qu’il a été relevé au point 27 ci-dessus, le Parlement a considéré qu’aucune disposition de ce règlement ne devait être laissée inappliquée, au motif qu’elle aurait été incompatible avec les dispositions du règlement n° 1049/2001. Ainsi, le Parlement a fait une correcte application de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001, conforme à l’arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra (point 59), sans avoir donné une large interprétation de l’exception que cette disposition prévoit, ni avoir assimilé la notion de vie privée à celle de protection des données. La demande d’accès ayant été examinée conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1049/2001, il en résulte que le Parlement n’a commis aucune violation de l’article 2, paragraphe 1, dudit règlement (voir point 38 ci-dessus).

41      Par conséquent, le premier moyen du recours doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

42      Le requérant soutient que la décision attaquée serait entachée d’une erreur manifeste d’appréciation. Le Parlement n’aurait pas établi, d’une part, un juste équilibre entre les intérêts publics, servis par la divulgation des documents demandés, et les intérêts privés prétendument affectés et, d’autre part, dans quelle mesure la communication des documents demandés porterait effectivement atteinte à la vie privée des membres du Parlement. Enfin, le Parlement n’aurait pas livré une appréciation séparée des conséquences de la divulgation des trois catégories de documents auxquels l’accès était sollicité.

43      Il convient, tout d’abord, de rappeler que, afin que le Parlement puisse mettre en balance les différents intérêts des parties en cause et vérifie s’il n’existait aucune raison de penser que ce transfert pouvait porter atteinte aux intérêts légitimes des membres du Parlement, il appartenait au requérant de démontrer, en fournissant des justifications expresses et légitimes, la nécessité du transfert des données à caractère personnel sollicitées, conformément à l’article 8, sous b), du règlement n° 45/2001 (voir, en ce sens, arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 78).

44      Or, il a été constaté au point 34 ci-dessus que le requérant n’avait pas satisfait à l’obligation posée par l’article 8, sous b), du règlement n° 45/2001, n’ayant pas démontré la nécessité du transfert des données à caractère personnel qu’il sollicitait. Dès lors, le Parlement n’avait pas à mettre en balance les intérêts invoqués par le requérant et ceux des membres du Parlement, ni à vérifier s’il existait une raison de penser que ce transfert pouvait porter atteinte aux intérêts légitimes de ces derniers. Par suite, l’erreur manifeste qu’aurait pu commettre le Parlement dans la mise en balance des intérêts des parties en cause est sans incidence, en l’espèce, sur la légalité de la décision attaquée.

45      S’agissant, ensuite, de la prétendue erreur dans l’appréciation du caractère effectif de l’atteinte à la vie privée des membres du Parlement, il convient de constater que, ainsi qu’il ressort du point 40 ci-dessus, le Parlement a apprécié l’existence d’une atteinte effective à la vie privée et à l’intégrité de l’individu en conformité avec la législation de l’Union relative à la protection des données à caractère personnel, notamment avec le règlement n° 45/2001, et a considéré, à juste titre, que le risque d’une telle atteinte existait en raison de la divulgation des noms des membres du Parlement participant ou ayant participé au régime qu’impliquait, en l’espèce, la demande d’accès (voir, en ce sens, arrêt Commission/Bavarian Lager, point 13 supra, point 59).

46      Enfin, quant à l’absence d’appréciation séparée des conséquences de la divulgation des trois catégories de documents demandés sur la vie privée des membres du Parlement, il y a lieu de rappeler que le requérant demande, en substance, l’accès aux noms des membres du Parlement qui participaient au régime à la date de la demande initiale, aux noms de ceux qui y participaient au 1er septembre 2005 et aux noms de ceux participant à la date de la demande initiale pour lesquels le Parlement verse une cotisation mensuelle au régime. S’il est fait état dans la demande initiale et dans la demande confirmative que ces noms figureraient dans trois catégories de documents, il n’en demeure pas moins que, comme le soutient le Parlement, il s’agit de données de même nature. Or, l’argumentation du requérant ne permet pas de distinguer les raisons pour lesquelles le Parlement aurait dû, nonobstant cette circonstance, apprécier le risque d’atteinte à la vie privée des membres du Parlement en opérant une distinction selon la catégorie de documents demandés. Par suite, l’argument du requérant ne peut être qu’écarté.

47      Par conséquent, il convient de rejeter le troisième moyen.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

48      Le requérant soutient que la décision attaquée est insuffisamment motivée, en ce que, premièrement, le Parlement n’aurait pas donné de raisons valables pour justifier que la communication des documents demandés porterait concrètement et effectivement atteinte au respect de la vie privée des membres du Parlement et, deuxièmement, il ne ressort pas de ladite décision qu’une telle appréciation aurait été faite au regard de chacun des documents demandés.

49      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, toute décision d’une institution au titre des exceptions énumérées à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 doit être motivée. Si une institution décide de refuser l’accès à un document dont la divulgation lui a été demandée, il lui incombe de fournir des explications quant à la question de savoir comment l’accès à ce document pouvait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 que cette institution invoque (voir arrêt du Tribunal du 11 mars 2009, Borax Europe/Commission, T‑121/05, non publié au Recueil, point 37, et la jurisprudence citée).

50      Par son premier grief, le requérant n’invoque pas la violation de l’obligation de motivation à proprement parler, mais plutôt l’existence d’une erreur manifeste dans l’appréciation de l’atteinte à la vie privée des membres du Parlement. Un tel argument vise donc à remettre en cause les motifs de la décision attaquée et se rattache au troisième moyen du recours, qui a été écarté (voir points 44 à 47 ci-dessus). Il ne saurait dès lors prospérer.

51      Quant au second grief du requérant, tenant à la circonstance que l’appréciation des caractères effectif et concret de l’atteinte à la vie privée des membres du Parlement n’aurait pas été effectuée au regard de chacun des documents demandés, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il a été dit au point 46 ci-dessus, que le requérant demande, en substance, l’accès aux noms de membres du Parlement, qui figureraient dans trois catégories de documents, et que ces noms constituent des données de même nature. Il a également été jugé au même point que le requérant n’avait pas démontré en quoi le Parlement aurait dû, nonobstant cette dernière circonstance, apprécier le risque d’atteinte à la vie privée des membres du Parlement par catégorie de documents demandés. Une telle conclusion vaut également pour chacun des documents demandés. Par suite, le Parlement n’était pas tenu, dans les circonstances de l’espèce, d’apporter une motivation sur ce point au regard de chacun des documents demandés.

52      Par conséquent, le quatrième moyen doit être rejeté et, partant, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner à l’ensemble des dépens, conformément aux conclusions du Parlement.

54      Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les institutions et les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. En l’espèce, il y a lieu de condamner le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le CEPD à supporter leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Gert-Jan Dennekamp supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Parlement européen.

3)      Le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD) supporteront leurs propres dépens.

Forwood

Schwarcz

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 novembre 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.