Language of document : ECLI:EU:T:2018:835

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

23 novembre 2018 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative Papouis Halloumi – Marque de certification du Royaume-Uni verbale antérieure HALLOUMI – Motif relatif de refus – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑703/17,

République de Chypre, représentée par M. S. Malynicz, QC, et Mme V. Marsland, solicitor,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Gája et Mme D. Walicka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Papouis Dairies Ltd, établie à Nicosie (Chypre), représentée par Me N. Korogiannakis, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 3 août 2017 (affaire R 2924/2014‑4), relative à une procédure d’opposition entre la République de Chypre et Papouis Dairies,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. M. Prek, président, F. Schalin (rapporteur) et Mme M. J. Costeira, juges,

greffier : Mme X. Lopez Bancalari, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 12 octobre 2017,

vu la décision du 30 novembre 2017 portant jonction des affaires T‑417/17 et T‑703/17 aux fins de la phase orale de la procédure

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 22 décembre 2017,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 20 janvier 2018,

à la suite de l’audience du 10 juillet 2018,

rend le présent

Arrêt

1        Le 10 septembre 2012, l’intervenante, Papouis Dairies Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif en couleur suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’EUIPO, de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Fromages ; fromage à base de lait de vache et/ou lait de brebis et/ou lait de chèvre (dans des proportions et des combinaisons de laits quelconques), présure ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 9/2013, du 14 janvier 2013.

5        Le 3 avril 2013, la République de Chypre a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était notamment fondée sur la marque de certification du Royaume-Uni verbale antérieure HALLOUMI, enregistrée le 22 février 2002 et renouvelée jusqu’en 2017 sous le numéro 1451888, désignant les produits relevant de la classe 29 et correspondant à la description suivante : « Fromage fabriqué à base de lait de brebis et/ou de lait de chèvre ; fromage fabriqué à base de mélanges de lait de vache ; tous ces produits étant compris dans la classe 29 ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement 2017/1001].

8        Le 8 octobre 2014, la division d’opposition a rejeté l’opposition et condamné la République de Chypre aux dépens.

9        Le 17 novembre 2014, la République de Chypre a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 3 août 2017 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours et condamné la République de Chypre à supporter les frais des procédures d’opposition et de recours.

11      Tout d’abord, la chambre de recours a rappelé que, selon la jurisprudence, il existerait à l’égard des marques en conflit un seuil absolu de similitude en dessous duquel, dès lors que ces marques seraient dissemblables, il serait possible d’écarter l’existence d’un risque de confusion sans égard aux autres facteurs.

12      Ensuite, après avoir analysé les éléments composant les marques en conflit afin de déterminer quels étaient les éléments distinctifs et dominants qui les composaient, la chambre de recours a procédé à la comparaison de ces marques pour conclure à l’absence de similitude sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

13      S’agissant de la référence par la République de Chypre à la nature de la protection conférée par la marque antérieure en ce qu’il s’agit d’une marque de certification du Royaume-Uni, la chambre de recours a indiqué qu’elle ne pouvait être prise en considération qu’au stade de l’appréciation globale du risque de confusion et que, en tout état de cause, elle était sans incidence en ce qui concernait cette appréciation au regard des dispositions de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

14      La chambre de recours a également considéré que, s’agissant de l’opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, elle devait être rejetée, puisque la condition tenant au fait que les marques en conflit soient identiques ou similaires n’était pas remplie.

 Conclusions des parties

15      La République de Chypre conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

16      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner la République de Chypre aux dépens.

 En droit

 Sur le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

17      Au soutien du recours, la République de Chypre invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, qui est divisé en deux branches. Premièrement, elle reproche à la chambre de recours d’avoir erronément apprécié la similitude des marques en conflit. Deuxièmement, la chambre aurait mal apprécié le degré de distinctivité de la marque antérieure et ne l’aurait pas suffisamment pris en compte.

18      À titre d’observations préalables, la République de Chypre expose sa conception de la nature et de l’objectif des marques de certification nationales en vertu du droit d’États membres comme le Royaume-Uni. Elle fait valoir que, en application de l’article 1er de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25), les marques nationales de certification sont autorisées en droit de l’Union et doivent donc se voir conférer un plein effet. En application de cette directive, la législation du Royaume-Uni sur les marques, telle qu’elle résulte du Trade Marks Act 1994 (loi du Royaume-Uni sur les marques), intègre l’enregistrement de ces marques. En vertu de cette législation, une marque de certification serait définie comme indiquant que les produits ou les services qu’elle désigne sont certifiés par le titulaire de la marque et peuvent présenter certaines caractéristiques, en particulier, désigné une provenance géographique. En substance, la fonction distinctive des marques de certification devrait être entendue en ce qu’elle permettrait au public pertinent de distinguer les produits et les services respectant les normes de certification et présentant certaines caractéristiques d’autres produits et services. Il ne serait en outre pas nécessaire pour le public de savoir que la marque en question est une marque de certification, ni qu’il connaisse l’identité de l’organisme certificateur. Il n’y aurait également pas lieu d’apporter d’éléments de preuve directs de la perception de cette marque par ce public s’il est raisonnable de déduire qu’il la perçoit comme permettant de distinguer une classe de produits ou de services d’une autre classe.

19      La République de Chypre invoque deux décisions rendues au Royaume-Uni par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery] qui viendraient conforter son interprétation du caractère distinctif d’une marque de certification du Royaume-Uni. Les éléments de preuve qu’elle a produits souligneraient également le caractère distinctif de la marque antérieure et la perception par le public du Royaume-Uni du terme « halloumi » comme distinguant une classe de produits relevant d’une autre classe, dont le public comprendrait les caractéristiques, en particulier les ingrédients, ainsi que la provenance.

20      Selon la République de Chypre, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), les marques de certification nationale étant des marques enregistrées dans un État membre, elles peuvent être le fondement d’une procédure d’opposition à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne postérieure.

21      Dans son mémoire en réponse, l’intervenante développe également certaines observations préalables relatives à la notion de marque de certification en droit de l’Union et à la jurisprudence pertinente du Royaume-Uni. En substance, elle fait observer que les deux références jurisprudentielles invoquées par la République de Chypre sont très anciennes et seraient devenues caduques à la suite de la mise en œuvre de la législation de l’Union en la matière. En particulier, la définition des marques de certification dans l’Union, telle qu’elle figure à l’article 27 de la directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2015, L 336, p. 1), ne correspondrait pas à l’interprétation invoquée par la République de Chypre, dans la mesure où la définition imposerait aux titulaires de marques de certification de certifier les produits ou les services qui sont désignés par de telles marques. En outre, l’EUIPO aurait rejeté les demandes de la République de Chypre tendant à l’enregistrement de marques de certification du Royaume-Uni en tant que marques de l’Union européenne, dans la mesure où elles auraient été dénuées de tout caractère distinctif. Une demande de même nature aurait également été rejetée par les autorités canadiennes pour des motifs similaires. Contrairement à ce que soutient la République de Chypre, une marque de certification ne disposerait pas en soi d’un caractère distinctif selon la jurisprudence du Royaume-Uni. Enfin, le règlement no 207/2009 ne prévoirait pas de protection des marques de certification au niveau de l’Union lorsqu’elles ne peuvent pas être enregistrées en tant que marques individuelles ou collectives.

 Sur la première branche, tirée d’une appréciation erronée de la similitude des signes en conflit

–       Arguments des parties

22      S’agissant de la comparaison des signes en conflit, la République de Chypre fait valoir que, pour conclure à une absence de similitude, la chambre de recours a dû procéder à une comparaison sur la base d’un élément dominant de la marque demandée, ce qui n’aurait été possible que si tous les autres éléments étaient négligeables, notamment le terme « halloumi » qui aurait été écarté de la comparaison. Or, si la chambre de recours a pu estimer à bon droit que les éléments « papouis dairies ltd » et « since 1967 » étaient négligeables eu égard à leur taille et à leur place dans la marque demandée, cette conclusion serait absurde en ce qui concerne le terme « halloumi ».

23      Sur le plan visuel, la chambre de recours aurait négligé de prendre en considération la proéminence et le caractère distinctif du mot « halloumi », écrit dans une police de caractères de grande taille et situé juste sous les éléments « pap » et « papouis ». Or, l’élément figuratif « pap » et le terme « papouis », en l’occurrence un patronyme grec ou chypriote, seraient simplement utilisés en tant que marque descriptive de l’origine commerciale du produit, située à côté de la marque de l’Union européenne collective HALLOUMI. Le terme « halloumi », en tant qu’élément proéminent de la marque demandée, aurait cependant dû être pris en compte par la chambre de recours dans son analyse de la similitude visuelle.

24      Sur le plan phonétique, la chambre de recours, en se fondant sur la différence du nombre de syllabes dont les signes en conflit sont composés, aurait procédé à une dénaturation majeure des faits en estimant qu’il n’y avait aucune similitude entre ces signes, alors qu’ils avaient en commun l’élément « halloumi », composé de trois syllabes.

25      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours aurait négligé de prendre en considération la signification de la marque antérieure aux yeux des consommateurs du Royaume-Uni ainsi que leur compréhension de la marque demandée. Or, dès lors que la marque antérieure serait comprise par les consommateurs du Royaume-Uni comme permettant de distinguer une classe de produits, dotés de caractéristiques particulières, des produits relevant d’autres classes, la marque devrait être considérée comme une combinaison de la marque commerciale du producteur des produits en cause et du terme que ces mêmes consommateurs considéreraient comme étant utilisé pour indiquer la classe de produits couverte par la marque antérieure.

26      L’EUIPO réplique qu’il ne partage pas l’avis de la République de Chypre selon lequel la conclusion d’absence de similitude des signes en conflit telle qu’elle figure dans la décision attaquée ne pourrait résulter que d’une comparaison fondée sur un élément dominant dans la marque demandée, avec pour conséquence que tous les autres éléments auraient été considérés comme négligeables. La comparaison serait au contraire intervenue en tenant compte de l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit, ainsi que de la présence du mot « halloumi » dans chacune des marques, conformément à la jurisprudence du Tribunal. Toutefois, certaines caractéristiques de la marque demandée, notamment la présence dans celle-ci des éléments « pap » et « papouis », ainsi que sa stylisation figurative auraient exclu que les signes en conflit, considérés dans leur ensemble, soient jugés similaires.

27      L’EUIPO, qui cite à cet égard la jurisprudence issue de trois affaires, ajoute que la présence d’une suite de lettres commune aux marques en conflit ne signifierait pas automatiquement une similitude de celles-ci, dans la mesure où la conclusion finale sur la similitude dépendrait notamment de l’impression d’ensemble produite par ces marques.

28      S’agissant de la comparaison sur le plan phonétique, la chambre de recours aurait écarté à bon droit l’existence d’une similitude des signes en conflit, car les syllabes communes, qui correspondent au mot « halloumi », seraient précédées dans la marque demandée de trois syllabes n’ayant pas d’équivalent dans la marque antérieure et qui figurent en outre au début de celle-ci, de sorte qu’elles seraient susceptibles de recevoir une plus grande attention de la part du public. Ainsi, les signes en conflit comporteraient suffisamment de caractéristiques excluant que le public ne les perçût comme similaires.

29      S’agissant de la comparaison sur le plan conceptuel, l’EUIPO indique qu’il soutient le raisonnement de la chambre de recours selon lequel, si le terme « halloumi » désigne un type de fromage chypriote, aucun argument ne pourrait être tiré de la présence de ce terme dans une marque dans le contexte de mise en œuvre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, ce qui serait conforme au principe d’une comparaison des signes fondée sur l’impression d’ensemble produite par ces derniers en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants. En outre, le Tribunal aurait déjà jugé qu’un terme faisant partie d’une marque complexe pouvait être perçu différemment selon qu’il était utilisé seul ou en combinaison avec d’autres éléments.

30      S’agissant du caractère distinctif de la marque antérieure, s’il est exact qu’il n’entre pas dans l’analyse de la similitude des marques en conflit et si, en tout état de cause, son appréciation ne peut conduire à dénier son existence, cela n’empêcherait pas la chambre de recours de constater que le terme « halloumi » décrit dans chacune des marques en cause les produits désignés par celles-ci et que, dès lors, les marques sont dissemblables non seulement sur le plan conceptuel, mais également sur les plans visuel et phonétique, au regard du principe selon lequel la comparaison des marques repose sur l’impression d’ensemble qu’elles produisent.

31      L’intervenante expose que, conformément à la jurisprudence du Tribunal, le terme « halloumi » devrait se voir reconnaître un faible caractère distinctif, puisqu’il correspondrait au nom d’un fromage spécifique provenant de Chypre et qu’il aurait une signification descriptive.

32      Les marques en conflit seraient totalement différentes compte tenu de la présence du terme « papouis » dans la marque demandée, inclus au sein de cette dernière dans l’expression « pap papouis ». Ce terme n’aurait aucune signification descriptive et permettrait d’identifier les produits désignés par ladite marque, à la différence du terme « halloumi » qui permettrait simplement au consommateur de comprendre en quoi consistent les produits en question. L’expression « pap papouis » devrait se voir reconnaître la qualité d’élément dominant dans la marque demandée, dont la singularité serait renforcée par son dessin ainsi que par les informations supplémentaires sur le fabricant et sa présence de longue date sur le marché telles qu’elles résultent des éléments verbaux « papouis dairies ltd » et « since 1967 ». En outre, le terme « halloumi », y compris en tant que marque de l’Union européenne collective, ne disposerait pas d’un caractère distinctif prononcé et ne permettrait pas de distinguer les utilisateurs autorisés de ceux qui ne le sont pas.

33      Selon l’intervenante, la chambre de recours aurait valablement considéré au point 26 de la décision attaquée que le terme « halloumi » était descriptif et que le public ne le percevrait pas comme une marque collective, ni comme une marque permettant de distinguer les utilisateurs autorisés de ceux qui ne le sont pas. Or, la République de Chypre, en tentant de centrer la comparaison sur le seul élément « halloumi », ignorerait délibérément la jurisprudence selon laquelle la comparaison entre deux marques devrait en principe s’effectuer en tenant compte de l’impression d’ensemble produite par celles-ci.

34      L’intervenante fait valoir qu’il n’y aurait aucune similitude des signes en conflit et, partant, aucun risque de confusion, ce que viendrait confirmer une comparaison séparée de ces derniers permettant de conclure à une absence de similitude sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. La présence du terme « halloumi » dans la marque demandée n’influencerait pas son aspect visuel, alors que l’élément « pap papouis » serait visuellement prédominant tant par sa taille que par l’élément graphique qui en accroîtrait la prédominance. Sur le plan phonétique, la différence résulterait du nombre différent de syllabes dans chacun des signes en conflit. Enfin, sur le plan conceptuel, les arguments de la République de Chypre, outre qu’ils ne seraient pas étayés et ne permettraient pas de conclure à une similitude entre ces signes, devraient être écartés en ce qu’ils reviendraient à interdire à l’EUIPO de procéder à toute vérification substantielle de la similitude conceptuelle d’une nouvelle marque demandée et d’une marque de certification d’ores et déjà enregistrée.

–       Appréciation du Tribunal

35      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale de ce risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

1)      Sur le public pertinent

36      En ce qui concerne la définition du public pertinent à l’égard duquel l’examen de la perception de la marque demandée doit être effectué, il y a lieu de rappeler à titre préalable que, selon la jurisprudence, le risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, entre deux marques en conflit, ne doit pas être apprécié sur la base d’une comparaison, dans l’abstrait, des signes en conflit et des produits ou des services qu’ils désignent, l’appréciation de ce risque devant, plutôt, être fondée sur la perception que le public pertinent aura desdits signes, produits et services [arrêt du 24 mai 2011, ancotel./OHMI – Acotel (ancotel.), T‑408/09, non publié, EU:T:2011:241, point 29].

37      En outre, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

38      Il convient en l’espèce de confirmer, en ce qu’elles apparaissent bien fondées au regard des éléments du dossier, les conclusions de la chambre de recours, telles qu’elles figurent au point 13 de la décision attaquée, en ce qui concerne le public pertinent au regard des produits en cause. La marque antérieure étant une marque du Royaume-Uni, il apparaît que le public pertinent à prendre en considération est le grand public du Royaume-Uni. Les marques en présence sont en substance enregistrées pour des produits identiques, en l’occurrence du « fromage ». S’agissant de produits de consommation courante, il y a lieu de considérer qu’ils s’adressent au consommateur moyen, qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2006, Castell del Remei/OHMI – Bodegas Roda (ODA), T‑13/05, non publié, EU:T:2006:335, point 46]. Dans le cadre de l’analyse qui figure dans sa décision du 8 octobre 2014, la division d’opposition a estimé que, au regard de la catégorie de produits en cause et de leur prix peu élevé, le niveau d’attention de ce public variait de faible à moyen, cette décision ainsi que sa motivation faisant partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée, de sorte que ce contexte était connu de la République de Chypre et permettait au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité quant au bien-fondé de l’appréciation du risque de confusion [voir, en ce sens, arrêt du 21 novembre 2007, Wesergold Getränkeindustrie/OHMI – Lidl Stiftung (VITAL FIT), T‑111/06, non publié, EU:T:2007:352, point 64]. Au regard des produits en cause, ces conclusions, au demeurant non contestées par les parties, apparaissent bien fondées.

2)      Sur les éléments distinctifs et dominants

39      Aux fins d’apprécier le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits pour lesquels la marque a été enregistrée [arrêts du 13 juin 2006, Inex/OHMI – Wiseman (Représentation d’une peau de vache), T‑153/03, EU:T:2006:157, point 35, et du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 51].

40      S’agissant de l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre, et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35, et du 8 février 2007, Quelle/OHMI – Nars Cosmetics (NARS), T‑88/05, non publié, EU:T:2007:45, point 58].

41      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée).

42      Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci. En outre, le fait qu’un élément ne soit pas négligeable ne signifie pas qu’il soit dominant, de même que le fait qu’un élément ne soit pas dominant n’implique nullement qu’il soit négligeable (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, points 43 et 44).

43      Il y a lieu également de rappeler que, lorsque certains éléments d’une marque revêtent un caractère descriptif des produits et des services pour lesquels la marque est protégée ou des produits et des services désignés par la demande d’enregistrement, ces éléments ne se voient reconnaître qu’un caractère distinctif faible [voir, en ce sens, arrêts du 12 septembre 2007, Koipe/OHMI – Aceites del Sur (La Española), T‑363/04, EU:T:2007:264, point 92, et du 13 décembre 2007, el charcutero artesano, T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 52 et jurisprudence citée]. Ce caractère distinctif ne pourra, le plus souvent, leur être reconnu qu’en raison de la combinaison qu’ils forment avec les autres éléments de la marque. Du fait de leur faible caractère distinctif, les éléments descriptifs d’une marque ne seront généralement pas considérés par le public comme étant dominants dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, sauf lorsque, en raison notamment de leur position ou de leur dimension, ils apparaissent comme susceptibles de s’imposer à la perception du public et d’être gardés en mémoire par celui-ci (voir arrêt du 13 décembre 2007, el charcutero artesano, T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 53 et jurisprudence citée). Cela ne signifie toutefois pas que les éléments descriptifs d’une marque soient nécessairement négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci. À cet égard, il convient, en particulier, de rechercher si d’autres éléments de la marque sont susceptibles de dominer, à eux seuls, l’image de celle-ci que le public pertinent garde en mémoire [arrêt du 20 septembre 2016, Excalibur City/EUIPO – Ferrero (MERLIN’S KINDERWELT), T‑566/15, non publié, EU:T:2016:517, point 28].

44      En l’espèce, la chambre de recours a procédé, au point 18 de la décision attaquée, à l’analyse de la marque demandée. Elle a relevé qu’il s’agissait d’un signe complexe en couleur qui comprenait les mots « papouis » et « halloumi », représentés sur deux lignes, en lettres évidées de taille sensiblement égale, et que, au-dessus de ces mots, figurait une combinaison de ce qui pouvait être interprété comme étant la suite de lettres « p » « a » et « p », la dernière de ces lettres étant représentée selon un effet miroir, sur un fond bleu foncé doté d’une bordure composée d’un liséré doré ou jaune. Les expressions « papouis dairies ltd » et « since 1967 » apparaitraient intégrées dans cette combinaison, dans une taille beaucoup plus petite les rendant à peine perceptibles.

45      La chambre de recours a relevé que, sur le plan visuel, les éléments verbaux « pap », « papouis » et « halloumi » étaient tout aussi dominants, dans le sens d’« accrocheurs », les uns que les autres, alors que les autres éléments verbaux, en l’occurrence, « papouis dairies ltd » et « since 1967 », pourraient passer inaperçus. [DA, point 19] Le mot « papouis » posséderait un caractère distinctif intrinsèque, indépendamment du fait qu’il s’agirait d’un nom de personne d’origine chypriote ou grecque. Quant à l’élément « pap », il serait également distinctif, indépendamment du fait qu’il renverrait au trois premières lettres de l’élément « papouis ».

46      Selon la chambre de recours, les marques en conflit ne présenteraient donc pas de similitude, dans la mesure où la majorité des éléments distinctifs de la marque demandée ne présenteraient aucune ressemblance avec la marque antérieure et qu’il n’y aurait pas lieu, au regard de la jurisprudence, d’isoler un seul élément de la marque demandée pour le comparer à l’unique élément composant la marque antérieure, alors que tous les autres éléments composant la marque demandée seraient tout aussi, voire plus importants et dominants.

47      En premier lieu, s’agissant de la détermination du ou des élément(s) distinctif(s) composant la marque demandée, il y a lieu de relever que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, l’élément verbal de la marque est, en principe, plus distinctif que l’élément figuratif, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif [voir arrêt du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, EU:T:2008:319, point 30 et jurisprudence citée].

48      En l’espèce, il apparaît que les éléments figuratifs composant la marque demandée sont peu originaux, en particulier le fond bleu foncé assorti d’une bordure composée d’un liséré doré ou jaune sur lequel figure l’élément « pap », et qu’ils contribuent surtout à la mise en valeur des éléments verbaux qui composent la marque et présentent davantage de caractère distinctif. Parmi les éléments verbaux, la chambre de recours a pu estimer sans commettre d’erreur, au point 20 de la décision attaquée, que le terme « papouis » était intrinsèquement totalement distinctif, indépendamment du fait qu’il serait perçu comme un nom de famille dans certaines parties de l’Union, telles que Chypre ou la Grèce, les noms de famille étant par principe dotés d’un caractère distinctif intrinsèque. L’élément « pap » doit également être considéré comme distinctif, et ce même s’il est susceptible d’être identifié comme composé des trois premières lettres du terme « papouis ». À cet égard, le fait que la dernière des lettres qui le composent soit représentée selon un effet miroir constitue un élément susceptible d’en renforcer la distinctivité. Le caractère distinctif de ces deux éléments verbaux n’apparaît toutefois pas d’une originalité particulière et il peut être considéré comme étant d’un degré moyen.

49      Les autres éléments verbaux composant la marque demandée, en l’occurrence « papouis dairies ltd », « since 1967 » et « halloumi », apparaissent en revanche faiblement distinctifs dans la mesure où ils présentent un caractère descriptif à l’égard des produits en cause, voire, en ce qui concerne le deuxième, à l’égard de la forme juridique de l’entité « papouis » qui commercialise ces produits.

50      En second lieu, s’agissant de la détermination du ou des élément(s) dominant(s) composant la marque demandée, il apparaît que les éléments « pap », « papouis » et « halloumi », compte tenu notamment de leur stylisation et de leur taille, constituent les éléments dominants de la marque demandée, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué au point 19 de la décision attaquée. L’élément « pap », en ce qu’il est placé dans la partie supérieure de cette marque et qu’il est écrit intégralement en lettres majuscules, est d’ailleurs susceptible de bénéficier d’un caractère dominant légèrement supérieur.

51      Au regard des principes jurisprudentiels rappelés au point 43 ci-dessus, selon lesquels les éléments descriptifs d’une marque peuvent jouer un certain rôle dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, notamment si un autre élément de cette marque n’est pas susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque, il ne saurait toutefois être exclu qu’il y ait lieu de prendre en compte la présence du terme « halloumi » dans l’impression d’ensemble produite par la marque demandée. À cet égard, il y a lieu de relever que la chambre de recours n’a pas établi que cette impression d’ensemble était dominée par le seul élément « pap », ni par ce dernier associé au terme « papouis », mais elle a, au contraire, considéré que le terme « halloumi » faisait partie des trois éléments verbaux dominants de la marque demandée.

52      Afin d’expliquer la démarche de la chambre de recours qui a consisté à considérer que la présence commune dans les marques en conflit du mot « halloumi » n’était pas susceptible d’entraîner de similitude, l’EUIPO se réfère à la solution retenue dans les arrêts du 14 octobre 2009, Ferrero/OHMI – Tirol Milch (TiMi KiNDERJOGHURT) (T‑140/08, EU:T:2009:400), du 4 mars 2015, Three-N-Products/OHMI – Munindra (PRANAYUR) (T‑543/13, non publié, EU:T:2015:134), et du 20 septembre 2016, MERLIN’S KINDERWELT (T‑566/15, non publié, EU:T:2016:517).

53      Or, dans ces trois arrêts, l’élément verbal commun aux marques antérieures et aux marques demandées, à savoir « kinder » dans les deux premières affaires et « ayur » dans la troisième, était intégré dans un élément verbal plus grand, à savoir respectivement « kinderwelt », « kinderjoghurt » et « pranayur », qui a pu être considéré comme constituant une unité indissociable (arrêt du 20 septembre 2016, MERLIN’S KINDERWELT, T‑566/15, non publié, EU:T:2016:517, point 42).

54      En l’espèce, la configuration de la marque antérieure est cependant différente, le mot « halloumi » n’est intégré ni dans un élément verbal plus grand, ni même dans une suite de mots, de sorte qu’il conserve son autonomie et, par conséquent, sa visibilité à l’égard du public. Contrairement à ce que soutient l’EUIPO, la solution issue des trois arrêts qu’il mentionne ne peut pas être transposée au cas d’espèce et il ne saurait être exclu que, dans l’impression d’ensemble produite par la marque demandée, le mot « halloumi » puisse être pris en considération.

3)      Sur la similitude visuelle

55      La chambre de recours a estimé aux points 22 et 23 de la décision attaquée que les signes en conflit étaient différents sur le plan visuel dans la mesure où, à supposer que tous les éléments du signe contesté se voient accorder un poids identique, ils ne coïncideraient que par l’élément verbal « halloumi », situé en troisième position dans le signe, et où la présentation figurative de ce signe, bien que n’étant pas franchement distinctive en soi, renforcerait les différences avec le signe antérieur. À l’issue de ce raisonnement, la chambre a conclu, au point 28 de la décision attaquée, à une absence de similitude des signes en conflit sur le plan visuel.

56      Cette conclusion de la chambre de recours ne saurait être suivie, notamment au regard de sa constatation, telle qu’elle figure au point 19 de la décision attaquée, selon laquelle les éléments « pap », « papouis » et « halloumi » ressortent tout autant les uns que les autres, et qu’ils seraient également tout autant aussi dominants les uns que les autres, dans le sens « d’accrocheurs ». En effet, l’élément verbal « halloumi », situé en troisième position dans la marque demandée, est également dans une position centrale, écrit en caractères stylisés blancs entourés de bleu et d’or, lui permettant d’être facilement et immédiatement perçu. Les éléments figuratifs de la marque demandée ne viennent pas modifier cette impression, car ils sont peu originaux et n’altèrent pas la visibilité de l’élément verbal « halloumi ».

57      Dans ces conditions, il y a lieu de conclure qu’il existe une similitude des signes en conflit tenant à la présence de l’élément verbal « halloumi » dans la marque demandée, alors qu’il est l’unique élément composant la marque antérieure, cette similitude devant être considérée comme faible.

4)      Sur la similitude phonétique

58      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a conclu que les signes en conflit étaient également différents. Elle a relevé aux points 24 et 25 de la décision attaquée que, dans le signe demandé, les expressions « papouis dairies ltd » et « since 1967 » ne seraient pas prononcées, contrairement à l’expression « pap papouis halloumi » qui ne présenterait cependant aucune ressemblance avec le mot « halloumi » qui composait la marque antérieure, car elle serait nettement plus longue, comprendrait des éléments distinctifs qui n’auraient pas d’équivalent dans la marque antérieure et coïnciderait avec cette dernière uniquement au niveau de sa partie finale, à laquelle on prêterait généralement une moindre attention. Cette conclusion demeurerait selon elle inchangée s’il devait être considéré que la troisième lettre de l’élément « pap » ne devait pas être prononcée.

59      Cette conclusion de la chambre de recours ne saurait davantage être suivie. En effet, il ne saurait être exclu que le public pertinent procède à la lecture complète des trois éléments dominants qui composent la marque demandée. Dans cette hypothèse, en dépit de la longueur de l’expression « pap papouis halloumi », dont les deux premiers termes n’ont pas d’équivalents dans la marque antérieure, et de la position finale occupée par le mot « halloumi », il y a néanmoins lieu de considérer que le fait que la marque antérieure est contenue dans la marque demandée entraînera nécessairement une similitude sur le plan phonétique lorsque les trois éléments composant l’expression « pap papouis halloumi » seront prononcés. Le degré de cette similitude, compte tenu par ailleurs de la différence du nombre de syllabes dans chacun des signes, doit être considéré comme faible.

5)      Sur la similitude conceptuelle

60      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a également conclu, au point 26 de la décision attaquée, à l’absence de similitude des signes en conflit. La seule présence du terme « halloumi » dans le signe demandé ne serait en effet pas de nature à entraîner une telle similitude. La chambre de recours insiste sur la contradiction que comporterait l’affirmation de la République de Chypre selon laquelle le terme « halloumi » ne serait ni utilisé ni perçu dans un contexte générique comme désignant un type de fromage, alors que le Tribunal a jugé l’inverse dans l’arrêt du 7 octobre 2015, XAΛΛOYMI et HALLOUMI (T‑292/14 et T‑293/14, EU:T:2015:752).

61      Cette analyse de la chambre de recours n’apparaît pas exacte. En effet, s’il est indéniable que la marque antérieure véhicule le concept d’un type de fromage chypriote, en l’occurrence le fromage halloumi, ainsi que le Tribunal l’a déjà retenu au regard des termes de l’arrêt du 7 octobre 2015, XAΛΛOYMI et HALLOUMI (T‑292/14 et T‑293/14, EU:T:2015:752, point 24), il ne saurait être exclu que, dans une certaine mesure, la marque demandée véhicule un concept similaire. En effet, si, parmi les trois mots qui figurent dans la marque, « pap », « papouis » et « halloumi », le dernier n’est que faiblement distinctif, cela vient précisément du fait qu’il présente un lien avec les produits désignés par la marque demandée, mais cela ne saurait pour autant signifier qu’il ne puisse être considéré individuellement par le public pertinent. Il ne saurait dès lors être retenu une absence de similitude sur le plan conceptuel. Les éléments « pap » et « papouis » constituent certes dans la marque demandée ceux qui présentent à la fois un caractère nettement distinctif et dominant, mais le concept véhiculé par la marque antérieure en ce qu’elle comporte le mot « halloumi », dont il n’est pas totalement exclu qu’il soit considéré individuellement, doit conduire à estimer qu’il existe un faible degré de similitude sur le plan conceptuel.

62      Ainsi, contrairement à la conclusion qui figure dans la décision attaquée, il y a lieu de considérer que les signes en conflit présentent un faible degré de similitude sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

63      La chambre de recours a donc erronément conclu à une absence de similitude des signes en conflit, de sorte qu’elle n’a pas mené à son terme la comparaison globale de ces signes en tenant compte de l’interdépendance de l’ensemble des facteurs pertinents.

64      À cet égard, il convient de relever, ainsi que l’admet d’ailleurs l’EUIPO (voir point 30 ci-dessus), que les développements que comporte la décision attaquée et qui concernent l’évaluation du caractère distinctif de la marque antérieure en tant que marque de certification du Royaume-Uni sont dénués de pertinence au regard de l’appréciation de la légalité de la décision attaquée, dans la mesure où ils sont sans incidence sur la conclusion de la chambre de recours en ce qui concerne l’absence de similitude des marques en conflit.

65      Dans ces conditions, la décision attaquée doit être annulée sans qu’il y ait lieu de procéder à l’examen de la deuxième branche.

 Sur les dépens

66      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

67      L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la République de Chypre.

68      En application de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, l’intervenante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 3 août 2017 (affaire R 2924/20144), relative à une procédure d’opposition entre la République de Chypre et Papouis Dairies Ltd est annulée.

2)      L’EUIPO est condamné à supporter, outre ses propres dépens, les dépens de la République de Chypre.

3)      Papouis Dairies supportera ses propres dépens.

Prek

Schalin

Costeira

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 novembre 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.