Language of document : ECLI:EU:T:2022:45

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

2 février 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative CCLABELLE VIENNA – Marque de l’Union européenne verbale antérieure LABELLO – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑694/20,

Maria Alexandra Canisius, demeurant à Vienne (Autriche), représentée par Me H. Asenbauer, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. T. Frydendahl et D. Hanf, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Beiersdorf AG, établie à Hambourg (Allemagne), représentée par Mes J. Fuhrmann et V. von Bomhard, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 16 septembre 2020 (affaire R 2233/2019-4), relative à une procédure d’opposition entre Beiersdorf et Mme Canisius,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, T. Perišin et M. P. Zilgalvis (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 18 novembre 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 25 février 2021,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 5 mars 2021,

vu la réattribution de l’affaire à la neuvième chambre et à un nouveau juge rapporteur,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 décembre 2017, la requérante, Mme Maria Alexandra Canisius, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 3, 16 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 3 : « Préparations de toilette ; préparations nettoyantes et parfumantes ; vernis à ongles ; cosmétiques ; produits de maquillage » ;

–        classe 16 : « Mouchoirs en papier à usage cosmétique » ;

–        classe 25 : « Vêtements ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 9/2018, du 15 janvier 2018.

5        Le 13 avril 2018, l’intervenante, Beiersdorf AG, a formé opposition, au titre de l’article 46 du règlement 2017/1001, à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était notamment fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure LABELLO, enregistrée le 3 août 1998 sous le numéro 15 750 pour les produits relevant de la classe 3 et correspondant à la description suivante : « Produits cosmétiques ». L’intervenante a, en outre, revendiqué la renommée de la marque antérieure notamment en Allemagne, en Italie et aux Pays-Bas.

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 et à l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

8        Par décision du 2 août 2019, la division d’opposition a accueilli l’opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 et a rejeté la demande de marque de l’Union européenne dans son intégralité.

9        Le 1er octobre 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 16 septembre 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a partiellement fait droit au recours et annulé la décision de la division d’opposition en ce qui concerne les produits relevant de la classe 25. D’une part, elle a conclu à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en ce qui concerne les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16. D’autre part, s’agissant des vêtements visés par ladite marque et relevant dans la classe 25, elle a considéré que le risque de confusion au sens de ladite disposition n’existait pas en l’espèce et que les conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement n’étaient pas non plus réunies.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée en ce qu’elle a accueilli l’opposition à l’égard des produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16 et rejeté le recours ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens ;

–        rejeter l’opposition formée par l’intervenante contre la demande d’enregistrement, condamner l’EUIPO à faire droit à ladite demande pour les produits relevant des classes 3, 16 et 25, et condamner l’intervenante aux dépens et aux frais exposés au cours de la procédure d’opposition devant l’EUIPO.

12      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui du recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 et, le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement. Il convient de commencer par l’examen du second moyen.

 Sur le second moyen,tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001

14      Dans le cadre du second moyen, la requérante avance des arguments relatifs à l’inapplicabilité de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. À cet égard, il convient de déduire du libellé de ses premier et troisième chefs de conclusions que lesdits arguments visent les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16.

15      Or, il ressort des points 43 à 56 de la décision attaquée, que la chambre de recours a examiné l’applicabilité de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 uniquement en ce qui concerne les vêtements relevant de la classe 25, pour lesquels elle a rejeté l’opposition fondée sur cette disposition, ainsi que sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

16      En revanche, pour les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16, la chambre de recours a rejeté le recours et a accueilli l’opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. S’agissant de ces produits, elle n’a pas examiné les conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

17      À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il n’appartient pas au Tribunal de statuer sur une question qui n’a pas été examinée par la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2012, You-Q/OHMI – Apple Corps (BEATLE), T‑369/10, non publié, EU:T:2012:177, point 80 et jurisprudence citée].

18      Il s’ensuit que le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 ne saurait prospérer.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

19      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir commis des erreurs dans la comparaison des produits en cause, dans l’appréciation de la similitude des signes en cause et dans l’appréciation globale du risque de confusion.

20      L’EUIPO soutient que la chambre de recours a conclu, à juste titre, à l’existence d’un risque de confusion en l’espèce. L’intervenante fait valoir, quant à elle, que la décision attaquée n’est entachée d’aucune erreur de droit dans l’appréciation du risque de confusion.

21      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

22      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

23      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

24      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il convient d’examiner le bien-fondé du présent moyen.

25      À titre liminaire, il y a lieu de relever que la chambre de recours a estimé, au point 39 de la décision attaquée, que l’intervenante avait démontré le caractère distinctif accru de la marque antérieure pour les produits de soins des lèvres en raison de sa renommée. Les parties n’ont pas remis en cause cette appréciation.

 Sur le public pertinent et son niveau d’attention

26      Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

27      En l’espèce, la chambre de recours a relevé, au point 22 de la décision attaquée, que les produits en cause s’adressaient au grand public de l’Union européenne faisant preuve d’un niveau d’attention moyen. À cet égard, elle a ajouté que ces produits n’étaient normalement pas particulièrement onéreux et étaient achetés assez régulièrement.

28      Ces appréciations de la chambre de recours, au demeurant non contestées par les parties, sont conformes à la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus et, partant, doivent être approuvées.

 Sur la comparaison des produits

29      Pour apprécier la similitude entre les produits en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

30      Selon la jurisprudence, les produits complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits incombe à la même entreprise (voir arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, point 57 et jurisprudence citée).

31      De même, lorsque les produits visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits sont considérés comme identiques [voir arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34 et jurisprudence citée].

32      En l’espèce, au point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a, dans un premier temps, comparé les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16 avec ceux couverts par la marque antérieure. Elle a conclu que les préparations de toilette, les préparations nettoyantes et parfumantes, les vernis à ongles, les cosmétiques et les produits de maquillage de la marque demandée relevant de classe 3 étaient inclus dans les produits cosmétiques couverts par la marque antérieure, de sorte qu’ils étaient identiques. Quant aux produits visés par la marque demandée et relevant de la classe 16, à savoir les mouchoirs en papier à usage cosmétique, elle a considéré qu’ils présentaient un degré élevé de similitude avec les produits couverts par la marque antérieure en raison de leur nature complémentaire en ce qui concerne l’application et le retrait des préparations cosmétiques.

33      Dans un second temps, au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a effectué une comparaison entre les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16 et les produits couverts par la marque antérieure pour lesquels une renommée de cette dernière avait été démontrée, à savoir les produits de soins des lèvres. Elle en a conclu que ces derniers et les cosmétiques, visées par la marque demandée, étaient identiques dans la mesure où les produits de soins des lèvres relevaient du terme général « cosmétiques ». Quant aux autres produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16, elle a considéré qu’ils étaient soit des cosmétiques, soit des produits apparentés aux cosmétiques et qu’ils présentaient la même nature, partageaient les mêmes canaux de distribution et s’adressaient au même public que les produits de soins des lèvres. Partant, ils ont été considérés comme étant très similaires.

34      La requérante fait valoir que la chambre de recours a appliqué à tort seulement deux facteurs pertinents pour la comparaison des préparations de toilette, des préparations nettoyantes et parfumantes, des vernis à ongles et des produits de maquillage avec les produits cosmétiques, négligeant ainsi des facteurs décisifs. Selon elle, ces derniers auraient illustré, de manière frappante, l’absence de similitude entre les produits en cause. De plus, les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16 seraient des produits de mode, alors que tel ne serait pas le cas des produits de soins des lèvres qui auraient certes pour objet la toilette personnelle, mais pour lesquels l’amélioration de l’impression visuelle d’une personne ne serait qu’un effet secondaire. La requérante en déduit que la nature, la destination et l’utilisation des produits en cause sont différentes. Elle ajoute que les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16 ne sont pas en concurrence avec ceux visés par la marque antérieure dans la mesure où il ne serait pas possible de substituer l’achat des vernis à ongles ou des produits de maquillage par l’achat des produits de soins des lèvres. Partant, elle estime que les préparations de toilette, les préparations nettoyantes et parfumantes, les vernis à ongles et les produits de maquillage ne sont pas similaires aux produits de soins des lèvres.

35      L’EUIPO et l’intervenante contestent les affirmations de la requérante.

36      Premièrement, il convient de relever que la requérante ne conteste pas les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles les cosmétiques et les mouchoirs en papier à usage cosmétique visés par la marque demandée et relevant, les uns, de la classe 3 et, les autres, de la classe 16 étaient respectivement identiques et très similaires tant aux produits couverts par la marque antérieure qu’à ceux pour lesquels cette dernière marque jouissait d’une renommée. Ces considérations doivent être approuvées.

37      Deuxièmement, force est de relever que la requérante n’avance aucun argument concret visant à remettre en cause l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle les préparations de toilette, les préparations nettoyantes et parfumantes, les vernis à ongles et les produits de maquillage visés par la marque demandée sont tous des cosmétiques et de ce fait sont identiques aux produits cosmétiques couverts par la marque antérieure.

38      À cet égard, il convient de rappeler, à l’instar de l’EUIPO, qu’il y a lieu de procéder à la comparaison des produits tels qu’enregistrés, ou tels qu’ils sont couverts par la demande d’enregistrement, et non tels qu’ils résultent de l’usage de la marque en cause [voir arrêt du 25 novembre 2014, Brouwerij Van Honsebrouck/OHMI – Beverage Trademark (KASTEEL), T‑374/12, non publié, EU:T:2014:990, point 78 et jurisprudence citée]. Il y a lieu également d’ajouter, à l’instar de l’EUIPO et de l’intervenante, que la requérante n’a pas demandé la preuve de l’usage de la marque antérieure, conformément à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001.

39      Troisièmement, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel les produits de soins des lèvres et les produits visés par la marque demandée, tels que les vernis à ongles ou les produits de maquillage, ne sont pas concurrents, il suffit de relever que la chambre de recours n’a pas opéré une telle considération.

40      En revanche, la chambre de recours a considéré, à juste titre, que les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16 ainsi que les produits de soins des lèvres avaient tous la même nature de produits cosmétiques et de soins corporels, et avaient des destinations analogues, à savoir la toilette personnelle ou l’amélioration de l’impression d’une personne. De même, elle était fondée à considérer que ces produits partageaient les mêmes canaux de distribution dans la mesure où ils sont effectivement vendus en pharmacie ou dans les mêmes rayons des grands magasins.

41      Certes, il pourrait être considéré que certains produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16, tels que les vernis à ongles ou les produits de maquillage, sont davantage destinés à améliorer l’apparence d’une personne que les produits de soins des lèvres. Il n’en demeure pas moins que la nature de ces produits est très proche et, ainsi que l’a indiqué la chambre de recours, ils partagent les mêmes canaux de distribution, de sorte que l’existence d’un degré élevé de similitude entre ces produits ne saurait être écartée.

42      C’est donc sans commettre d’erreur que la chambre de recours a conclu que les produits visés par la marque demandée et relevant des classes 3 et 16 étaient identiques ou très similaires, d’une part, aux produits couverts par la marque antérieure et, d’autre part, aux produits pour lesquels la renommée de ladite marque avait été démontrée.

 Sur la comparaison des signes

43      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

44      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (voir arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43 et jurisprudence citée).

45      En l’espèce, il y a lieu de comparer la marque verbale antérieure LABELLO et la marque figurative demandée reproduite ci-après :

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–       Sur la perception de la marque demandée et ses éléments dominants et distinctifs

46      La chambre de recours a considéré, au point 33 de la décision attaquée, que la marque demandée contenait un « motif de chérubins » décoratif, consistant en deux chérubins représentés symétriquement, accoudés sur les fioritures ornementales horizontales et entre lesquels se trouvaient deux grandes roses sur un fond de lignes noires horizontales. De même, ladite marque comportait, en son centre, l’élément verbal « labelle », écrit en caractères majuscules noirs dans une police de caractères stylisée et à gauche duquel figurait le symbole d’un cœur, précédé de l’élément suivant :

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47      Par ailleurs, sous l’élément verbal « labelle » figurerait l’élément verbal « vienna », écrit en lettres majuscules blanches beaucoup plus petites sur un fond rectangulaire noir.

48      D’après la chambre de recours, le « motif de chérubins » de la marque demandée n’est pas uniquement décoratif, mais distinctif. De même, ensemble avec l’élément verbal « labelle », il serait dominant dans ladite marque. Ce dernier, qui ne correspondrait à aucun mot du dictionnaire dans aucune des langues de l’Union, n’aurait pas de signification claire et directe, même s’il peut être perçu par certains consommateurs comme faisant référence à l’expression « la belle » en français. Quant à l’élément verbal « vienna » de cette marque, ladite chambre a considéré que celui-ci serait perçu comme une indication que la même marque était établie à Vienne, cette référence le rendant, dès lors, non distinctif.

49      S’agissant de l’élément précédant le symbole du cœur de la marque demandée, repris au point 46 ci-dessus, la chambre de recours a considéré qu’il serait perçu non comme une partie de l’élément verbal « labelle » de ladite marque, mais plutôt comme un ornement figuratif faisant écho à la courbe gauche du symbole du cœur placé immédiatement derrière lui. Toutefois, elle a admis l’hypothèse selon laquelle ce dernier pourrait être perçu comme la double lettre « c ».

50      La requérante soutient que, dès lors que les éléments figuratifs de la marque demandée occupent une position significative et de premier plan dans celle-ci et que leur taille est prédominante, il s’agit des éléments dominants de ladite marque. Elle ajoute que les chérubins et les roses créent l’image distinctive et particulière de cette marque. En revanche, les éléments verbaux « cclabelle » et « vienna », de dimension inférieure, seraient secondaires. De même, la requérante fait valoir que l’élément précédant le symbole du cœur, reproduit au point 46 ci-dessus, n’est ni un élément figuratif, ni un élément très stylisé, mais consiste en deux lettres latines « c » comme celles utilisées dans l’élément « labelle ». Elle ajoute que lesdites lettres latines et cet élément sont reliés par un élément décoratif en forme de cœur et ne pourraient pas être dissociés et forment l’élément fantaisiste « cclabelle ». Ainsi, en interprétant ces lettres latines exclusivement comme des symboles, la chambre de recours réduirait la marque en question au seul élément « labelle ». Quand bien même pareilles lettres latines devaient être qualifiées d’ornements figuratifs, elles n’en deviendraient pas invisibles et conserveraient leur caractère distinctif sur le plan visuel.

51      Quant à l’élément verbal « vienna » de la marque demandée, la requérante admet qu’il renvoie à la ville de Vienne (Autriche), mais soutient que celle-ci n’est pas renommée pour la catégorie des produits en cause.

52      L’EUIPO, contrairement à la requérante, estime que l’élément précédant le symbole du cœur de la marque demandée reproduit au point 46 ci-dessus ne présente pas la courbure uniforme ni d’autres caractéristiques descriptives de la lettre « c ». Le fait que ces symboles sont placés juste avant celui d’un cœur serait susceptible d’amener les consommateurs à les percevoir comme faisant écho à la forme de ce cœur.

53      Quant à l’intervenante, elle soutient que, contrairement aux appréciations de la chambre de recours et à la position de la requérante, les éléments figuratifs de la marque demandée sont purement décoratifs et non distinctifs. Elle réfute également l’argument de la requérante selon lequel l’élément verbal de ladite marque sera perçu comme étant « cclabelle ».

54      S’agissant, tout d’abord, de la perception de la marque demandée et, en particulier, celle de l’élément précédant le symbole du cœur, reproduit au point 46 ci-dessus, il convient de relever que cet élément est composé de deux lettres « c », écrites dans la même police de caractères stylisée que l’élément « labelle ». Partant, la requérante est fondée à soutenir que ladite marque comprend lesdites lettres et ledit élément entre lesquels se trouve le symbole de cœur. Toutefois, ce symbole peut tant les relier que les séparer, de sorte que le public pertinent pourrait ne pas les percevoir comme un ensemble.

55      De même, en raison de la stylisation particulière de la police de caractères utilisée, dans laquelle la lettre « c » est courbée de manière à rappeler la courbe gauche du symbole du cœur, et du fait que ledit symbole, de taille quasi identique aux deux lettres « c » et à l’élément « labelle », est placé entre ces derniers, il n’est pas exclu qu’une partie du public pertinent considère, comme l’a estimé la chambre de recours, que lesdites lettres constituent plutôt des ornements figuratifs.

56      S’agissant, ensuite, des éléments dominants de la marque demandée, il y a lieu de considérer que l’image globale produite par ladite marque sera dominée, d’une part, par l’élément figuratif représentant le motif des chérubins et, d’autre part, par l’élément verbal « cclabelle » ou « labelle », en fonction de sa perception par le public pertinent. En revanche, il ne saurait être soutenu, comme le fait valoir la requérante, que l’élément figuratif, à lui seul, dominera l’image produite par cette marque. L’élément verbal « vienna », quant à lui, en raison de sa taille et sa position ne joue qu’un rôle secondaire dans la marque en question.

57      S’agissant, enfin, des éléments distinctifs de la marque demandée, il convient d’observer, à l’instar de la chambre de recours, que l’élément figuratif représentant le motif des chérubins n’est pas uniquement décoratif en l’espèce. En effet, il s’agit d’un ensemble bien perceptible par le public pertinent comportant de nombreuses composantes, agencées de manière bien particulière. Dans la mesure où les différentes composantes de cet élément figuratif n’ont pas de rapport direct avec les produits visés par ladite marque, le caractère distinctif dudit élément figuratif est moyen.

58      À cet égard, il convient d’ajouter que l’argument de l’intervenante selon lequel les éléments figuratifs sont purement figuratifs et non distinctifs, pour autant qu’il doit être compris comme un moyen autonome fondé sur l’article 173, paragraphe 3, du règlement de procédure, est incompatible avec ses propres conclusions et doit être rejeté dès lors que l’intervenante n’a pas conclu à l’annulation ou à la réformation de la décision attaquée en vertu de ladite disposition [voir arrêt du 29 janvier 2013, Fon Wireless/OHMI – nfon (nfon), T‑283/11, non publié, EU:T:2013:41, point 33 et jurisprudence citée].

59      Toutefois, il convient de rappeler que lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, considérés comme plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit ou au service en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du 29 avril 2020, Abarca/EUIPO – Abanca Corporación Bancaria (ABARCA SEGUROS), T‑106/19, non publié, EU:T:2020:158, point 51 et jurisprudence citée].

60      Ainsi, en ce qui concerne, l’élément verbal « cclabelle » ou « labelle » de la marque demandée, il présente également un caractère distinctif moyen. Le symbole du cœur et les deux lettres « c », lorsqu’elles sont perçues comme rappelant le symbole du cœur, sont décoratifs et présentent, dès lors, un caractère distinctif faible. Il en va de même en ce qui concerne l’élément verbal « vienna » qui, ainsi que l’avait estimé la chambre de recours, sera perçu comme une indication descriptive du lieu d’établissement de ladite marque. À cet égard, il est sans pertinence que la ville de Vienne soit ou non renommée pour les produits en cause. Il suffit, dans le cas d’espèce, que de telles références soient courantes dans le secteur en question.

61      Il s’ensuit que l’élément figuratif représentant le motif des chérubins et l’élément verbal « cclabelle » ou « labelle », en fonction de sa perception par le public pertinent, possèdent un caractère distinctif moyen et dominent l’impression d’ensemble produite par la marque demandée.

–       Sur la similitude visuelle

62      La chambre de recours a estimé, au point 34 de la décision attaquée, que les signes en cause présentaient globalement un faible degré de similitude visuelle. Elle a relevé que l’élément « labelle » de la marque demandée avait la même longueur que la marque antérieure et qu’ils partageaient les six premières lettres. En revanche, lesdits signes différaient par la dernière lettre de cet élément et de la marque antérieure, par la présence du « motif de chérubins », codominant dans la marque demandée, ainsi que par la présence des termes secondaires dans cette dernière, à savoir le symbole créé par les deux lettres « c » et l’élément verbal « vienna ».

63      La requérante soutient que les signes en cause ne sont pas similaires sur le plan visuel notamment en raison de l’importance des éléments figuratifs. S’agissant des éléments verbaux, elle estime que ceux de la marque demandée, à savoir « cclabelle » et « vienna », que la chambre de recours a réduits à l’élément « labelle » comportent quinze lettres et un cœur, tandis que la marque antérieure n’en comporte que sept. En somme, ces éléments et cette dernière marque ne partageraient que six lettres.

64      L’EUIPO et l’intervenante contestent les allégations de la requérante.

65      En outre, l’intervenante estime que les signes en cause sont visuellement similaires, mais soutient que le degré de cette similitude est élevé, ou à tout le moins moyen, en raison du caractère distinctif faible des éléments figuratifs de la marque demandée.

66      En l’espèce, force est de relever que les signes en cause comportent, les éléments verbaux « labelle » ou « labello », qui ne diffèrent que par leur dernière lettre. Certes, cette similitude est atténuée par la présence, dans la marque demandée, d’autres éléments, comme notamment l’élément figuratif représentant le motif des chérubins qui est codominant dans cette marque. L’importance de l’élément verbal « vienna » quant à lui est réduite, en raison de sa position secondaire, sa taille et son caractère descriptif.

67      Dans ces conditions, et indépendamment de la perception des deux lettres « c » dans la marque demandée, il y a lieu de considérer que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pu considérer qu’il existait un faible degré de similitude visuelle entre les signes en cause. En effet, les éléments différents de la marque demandée ne sauraient entièrement contrebalancer la similitude résultant de la présence de l’élément « labelle », même lorsque celui-ci sera perçu comme formant un ensemble avec les deux lettres « c » et le symbole du cœur.

68      S’agissant de l’argument de l’intervenante selon lequel le degré de similitude est élevé en l’espèce, il doit être rejeté comme étant irrecevable pour les mêmes raisons que celles exposées au point 58 ci-dessus.

69      Au vu des considérations qui précèdent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les signes en cause étaient faiblement similaires sur le plan visuel.

–       Sur la similitude phonétique

70      La chambre de recours a considéré, au point 35 de la décision attaquée, que les signes en cause présentaient un degré élevé de similitude phonétique. En particulier, elle a estimé que la marque demandée serait prononcée par le public pertinent en deux ou trois syllabes et que la marque antérieure serait prononcée en trois syllabes. Elle a noté qu’il n’y avait pas, dans la marque demandée, un équivalent à la lettre finale « o » de la marque antérieure, mais que, en tout état de cause, la prononciation de chaque marque commencerait par les mêmes syllabes « la » et « bel ». Quant au symbole créé par les deux lettres « c », présent dans la marque demandée et à l’élément « vienna », de l’avis de la chambre de recours, ils n’étaient pas prononcés.

71      La requérante soutient que les signes en cause ne présentent aucune similitude phonétique en raison du nombre différent de syllabes et de lettres. Elle fait valoir, en substance, que les deux lettres « c » de la marque demandée seront prononcées. En outre, elle affirme que lesdits signes ont un rythme usuel sensiblement différent et que la prononciation desdites lettres ajoute un caractère distinctif important à l’aspect phonétique de la marque demandée. En contestant la considération selon laquelle l’élément « vienna » est descriptif, elle soutient qu’il sera prononcé dans cette dernière marque. De même, selon elle, les éléments figuratifs ont une incidence sur la perception phonétique du signe.

72      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

73      Tout d’abord, il y a lieu de rappeler qu’un élément figuratif ne peut pas être prononcé en tant que tel. Tout au plus, son contenu visuel ou conceptuel peut être décrit oralement. Or, une telle description coïncide nécessairement soit avec la perception visuelle soit avec la perception conceptuelle de l’élément concernée [voir, en ce sens, arrêts du 14 février 2008, Orsay/OHMI – Jiménez Arellano (O orsay), T‑39/04, non publié, EU:T:2008:36, point 49, et du 3 mai 2017, Environmental Manufacturing/EUIPO – Société Elmar Wolf (Représentation d’une tête de loup), T‑681/15, non publié, EU:T:2017:296, point 52 et jurisprudence citée]. De même, si une marque figurative comporte également un élément verbal, ce sera en principe par l’emploi de celui-ci que le public pertinent se référera à cette dernière marque [voir arrêt du 30 janvier 2020, Julius Sämann/EUIPO – Maharishi Vedic University (Représentation d’un arbre), T‑559/19, non publié, EU:T:2020:19, point 33 et jurisprudence citée]. Par conséquent, les arguments que la requérante entend tirer de la prononciation de l’élément figuratif de la marque demandée doivent être écartés.

74      Ensuite, il y a lieu de relever, à l’instar de la chambre de recours, qu’il existe un degré de similitude élevé dans la prononciation de l’élément « labelle », codominant dans la marque demandée, et de la marque antérieure. À cet égard, il convient de considérer qu’il n’est pas exclu, contrairement à ce qu’affirme la requérante, que les deux lettres « c » ne soient pas prononcées, étant donné que le symbole du cœur les sépare dudit élément et que cette circonstance est susceptible d’influencer leur perception (voir points 54 et 55 ci-dessus).

75      En tout état de cause, même si la marque demandée était perçue comme étant « cclabelle » par une partie du public pertinent, le degré de similitude phonétique de cette marque avec la marque antérieure serait à tout le moins moyen, en raison de la coïncidence des lettres « l », « a », « b », « e », « l » et « l ».

76      Enfin, l’élément verbal « vienna », ainsi qu’il est constaté aux points 56 et 60 ci-dessus, occupe une position secondaire et est descriptif. Par conséquent et compte tenu notamment de la tendance naturelle des consommateurs à abréger les signes longs et à ne pas prononcer l’ensemble des éléments verbaux les composant [voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2019, M. I. Industries/EUIPO – Natural Instinct (Nature’s Variety Instinct), T‑287/18, non publié, EU:T:2019:641, point 71 et jurisprudence citée], il est peu probable qu’il soit prononcé.

77      Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que les signes en cause étaient similaires à un degré élevé sur le plan phonétique, à tout le moins en ce qui concerne une partie du public pertinent.

–       Sur la similitude conceptuelle

78      La chambre de recours a considéré, au point 36 de la décision attaquée, qu’il n’était pas possible de procéder, en l’espèce, à une comparaison conceptuelle dans la mesure où la marque antérieure n’avait aucune signification sur le territoire pertinent.

79      Les parties, certes, ne contestent pas directement cette appréciation, la requérante considérant notamment que la marque antérieure est un signe fantaisiste dépourvu de signification. Toutefois, la requérante avance que l’élément verbal « cclabelle » de la marque demandée signifie « copie la belle » et que, partant, les signes en cause ne présentent aucune similitude conceptuelle, remettant ainsi, en réalité, en cause la conclusion de la chambre de recours visée au point 78 ci-dessus.

80      À cet égard, il y a lieu de relever, à l’instar de la chambre de recours, que la marque antérieure ne véhicule aucun message conceptuel susceptible d’être perçu par le public pertinent. Tel n’est toutefois pas le cas en ce qui concerne la marque demandée dont l’élément figuratif comporte, ainsi que l’avait relevé la chambre de recours au point 33 de la décision attaquée, deux chérubins et deux grandes roses. Le message conceptuel véhiculé par ces composantes de l’élément figuratif de la marque demandée sera aisément perçu par le public pertinent.

81      Or, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, lorsque l’une des marques en conflit présente une signification aux yeux du public pertinent et que l’autre marque en est dépourvue, il doit être constaté que les marques en cause présentent des différences sur le plan conceptuel [voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2017, RP Technik/EUIPO – Tecnomarmi (RP ROYAL PALLADIUM), T‑768/15, non publié, EU:T:2017:630, points 88 et 89].

82      Partant, contrairement à la conclusion de la chambre de recours, il était possible de procéder à la comparaison conceptuelle des signes en cause. Il n’en demeure pas moins qu’aucune similitude conceptuelle ne saurait être constatée en l’espèce.

 Sur le risque de confusion

83      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

84      En l’espèce, la chambre de recours a, au point 40 de la décision attaquée, considéré que, étant donné que les produits en cause étaient en partie identiques et en partie présentaient un degré élevé de similitude, compte tenu du degré d’attention moyen du public pertinent et indépendamment du fait de savoir si la marque antérieure jouissait d’un caractère distinctif accru pour les produits de soins des lèvres, le faible degré de similitude visuelle et le degré moyen de similitude phonétique étaient suffisants pour conclure à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement 2017/1001.

85      D’emblée, il y a lieu de constater que l’affirmation, figurant au point 40 de la décision attaquée, selon laquelle le degré de similitude phonétique est moyen est une erreur matérielle manifeste. En effet, l’appréciation de la similitude des signes en cause sur le plan phonétique, figurant au point 35 de la décision attaquée, contient les motifs selon lesquels les marques en conflit seront prononcées respectivement « la-bel-e » ou « la-bel » et « la-bel-o », ne laissant aucun doute que, selon la chambre de recours, le degré de similitude phonétique était élevé, ainsi qu’il ressort de la dernière phrase dudit point (voir également point 70 ci-dessus).

86      La requérante conteste ces conclusions en affirmant qu’il n’existe aucun risque de confusion en l’espèce et que, même en présence d’un faible degré de similitude phonétique des signes en cause et d’une identité des produits en cause, c’est l’aspect visuel qui revêtait une importance accrue en raison du mode de vente desdits produits. En faisant valoir, en substance, que l’importance du critère relatif à la renommée de la marque antérieure pour les produits de soins des lèvres ne devait pas être exagérée, elle réitère son argument selon lequel l’intervenante n’opérait pas dans le marché des produits cosmétiques colorés ou de mode sur lequel elle opère. En somme, selon elle, même si ladite marque jouit d’un caractère distinctif accru, les différences entre ces signes découlant en particulier de l’unité conceptuelle créée par la combinaison de l’élément verbal et de l’élément figuratif de la marque demandée seraient suffisamment importantes pour exclure tout risque de confusion.

87      L’EUIPO et l’intervenante contestent les affirmations de la requérante.

88      Force est de constater que les produits en cause sont en partie identiques et en partie très similaires (voir point 42 ci-dessus), que les signes en cause présentent un degré faible de similitude visuelle (voir point 69 ci-dessus) et, pour au moins une partie du public pertinent, un degré élevé de similitude phonétique (voir point 77 ci-dessus). En revanche, lesdits signes ne sont pas similaires sur le plan conceptuel (voir point 80 ci-dessus).

89      En outre, il n’est pas contesté que la marque antérieure jouit d’une renommée s’agissant des produits de soins des lèvres qui sont en partie identiques et en partie très similaires aux produits visés par la marque demandée (voir points 25, 36, 40 et 41 ci-dessus).

90      À cet égard, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il découle du considérant 11 du règlement 2017/1001, que l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

91      S’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle l’aspect visuel jouerait un rôle déterminant dans l’appréciation du risque de confusion en ce qui concerne les produits en cause, il est de jurisprudence constante que dans l’appréciation globale du risque de confusion, les aspects visuel, phonétique ou conceptuel des signes en cause n’ont pas toujours le même poids. Il importe d’analyser les conditions objectives dans lesquelles les marques peuvent se présenter sur le marché. L’importance des éléments de similitude ou de différence des signes peut dépendre, notamment, des caractéristiques intrinsèques de ceux‑ci ou des conditions de commercialisation des produits que les marques en conflit désignent. Si les produits désignés par les marques en cause sont normalement vendus dans des magasins en libre-service où le consommateur choisit lui-même le produit et doit, dès lors, se fier principalement à l’image de la marque appliquée sur ce produit, une similitude visuelle des signes sera, en règle générale, d’une plus grande importance. Si, en revanche, le produit visé est surtout vendu oralement, il sera normalement attribué plus de poids à une similitude phonétique des signes [voir arrêts du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, EU:T:2004:293, point 49 et jurisprudence citée, et du 11 décembre 2014, Coca-Cola/OHMI – Mitico (Master), T‑480/12, EU:T:2014:1062, point 68 et jurisprudence citée].

92      Certes, ainsi que le relève l’EUIPO, l’arrêt du 15 avril 2010, Cabel Hall Citrus/OHMI – Casur (EGLÉFRUIT) (T‑488/07, non publié, EU:T:2010:145, point 48), invoqué par la requérante, porte sur des produits alimentaires et des boissons, relevant des classes 29 à 32 et non sur les produits en cause, de sorte que l’argument de la requérante qu’elle tire de cet arrêt est inopérant en l’espèce.

93      En revanche, et contrairement à ce que soutient l’EUIPO, il a déjà été jugé que, s’agissant de produits relevant de la classe 3, analogues aux produits en cause, l’aspect visuel de la marque revêtait, en principe, plus d’importance dans l’appréciation globale du risque de confusion [voir, en ce sens, arrêts du 26 mars 2015, Emsibeth/OHMI – Peek & Cloppenburg (Nael), T‑596/13, non publié, EU:T:2015:193, point 53, et du 21 mai 2015, Evyap/OHMI – Megusta Trading (nuru), T‑56/14, non publié, EU:T:2015:304, point 46 ; voir, également, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2021, Apologistics/EUIPO – Peikert (discount-apotheke.de), T‑844/19, non publié, EU:T:2021:25, point 111 et jurisprudence citée].

94      Cela ne signifie toutefois pas pour autant que l’aspect phonétique de la comparaison des signes doit toujours être négligé. En effet, si les produits en cause sont effectivement vendus dans des magasins en libre-service, ils sont également susceptibles d’être recommandés ou achetés oralement. Le consommateur pourrait, en effet, avoir recours à l’assistance d’un vendeur ou être amené à choisir des produits issus des catégories en question parce qu’il en aurait entendu parler, auquel cas il se peut qu’il mémorise, outre l’aspect visuel, mais également l’impression phonétique de la marque en cause [voir arrêt du 2 décembre 2020, inMusic Brands/EUIPO – Equipson (Marq), T‑687/19, non publié, EU:T:2020:582, point 98 et jurisprudence citée]. Tel est notamment le cas en l’espèce. Partant, il convient également de tenir compte du degré élevé de similitude phonétique des signes en cause dans l’appréciation globale du risque de confusion des marques en conflit.

95      En outre, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les produits visés par la marque demandée sont des produits de cosmétiques colorés ou de mode, il y a lieu de rappeler, d’une part, que les modalités de commercialisation particulières des produits désignés par les marques pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques [voir arrêt du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, EU:T:2008:319, point 63 et jurisprudence citée]. Ainsi, est sans pertinence dans ce contexte l’utilisation qu’entend faire la requérante de ladite marque.

96      D’autre part, dans le cadre de la procédure d’opposition, l’EUIPO peut seulement prendre en compte la liste de produits et de services demandés telle qu’elle découle de la demande de marque concernée, sous réserve des modifications éventuelles de cette dernière [voir arrêt du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI – Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, EU:T:2007:96, point 89 et jurisprudence citée]. Il s’ensuit que l’argument de la requérante visé au point 95 ci-dessus ne saurait prospérer.

97      Dans ces conditions, et compte tenu du principe d’interdépendance rappelé au point 83 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion en l’espèce, à tout le moins lorsqu’il est tenu compte de la renommée de la marque antérieure pour les produits de soins des lèvres.

98      Au vu de l’ensemble de considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le présent moyen ainsi que, partant, le recours dans son intégralité sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du troisième chef de conclusions de la requérante.

 Sur les dépens

99      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

100    La requérante ayant succombé, il convient de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Mme Maria Alexandra Canisius est condamnée aux dépens.

Costeira

Perišin

Zilgalvis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 février 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.