Language of document : ECLI:EU:T:2023:97

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

1er mars 2023 (*) 

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative The Crush Series – Marque de l’Union européenne figurative antérieure CRUSH – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑295/22,

Crush Series Publishing s.r.o., établie à Prague (République tchèque), représentée par Me D.-M. Belciu, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme L. Lapinskaitė et M. J. Ivanauskas, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Mediaproduccion SLU, établie à Barcelone (Espagne),

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur) et J. Schwarcz, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Crush Series Publishing s.r.o., demande l’annulation et la réformation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 15 mars 2022 (affaire R 1303/2021-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 3 septembre 2019, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits et les services relevant des classes 16, 28 et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 16 : « livres ; livres illustrés ; livres éducatifs ; livres pour enfants ; livres de coloriage ; livres d’histoires ; livres de contes pour enfants ; cartes à jouer avec questions ; cartes ; cartes de Noël ; cartes d’anniversaire ; cartes d’encouragement ; cartes d’anniversaire ; éléments décoratifs pour crayons [papeterie] ; décorations de table en papier ; décorations de fête en papier ; décorations murales en papier ; décorations de fête en papier métallisé ; crayons ; crayons de couleur ; crayons Carioca ; crayons pour le dessin ; pochette à crayons ; crayons de couleur » ;

–        classe 28 : « jouets ; jouets gonflables ; jouets qui vrombissent ; jouets parlants ; jouets flexibles ; jouets rembourrés ; jouets intelligents ; jouets modulaires ; jouets électroniques ; jouets musicaux ; jouets en caoutchouc ; peluches ; jouets mécaniques ; jouets en bois ; jouets pour le bain ; coussins rembourrés (jouets) ; jouets éducatifs ; jouets en peluche intelligents ; jouets d’eau ; jouets en plastique ; livres [jeux] ; cartes à jouer ; cartes à jouer ; ours en peluche ; poupées en peluche ; casse-tête [jeux] ; casse-tête [jeux] » ;

–        classe 41 : « publication de livres éducatifs ; publication de livres audio ; édition de livres et de magazines ; publication et édition de livres ».

4        Le 30 décembre 2019, Mediaproduccion SLU a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur la marque figurative antérieure désignant les produits relevant des classes 16 et 28 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante : « Produits de l’imprimerie ; papeterie ; journaux et publications périodiques » et « Jeux, à l’exception des jeux de hasard, jouets », reproduite ci-après  :

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6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 28 mai 2021, la division d’opposition a fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 au motif qu’il existait un risque de confusion.

8        Le 26 juillet 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 pour la partie anglophone du public pertinent.

10      En particulier, la chambre de recours a considéré, tout d’abord, que les produits et les services en cause étaient identiques ou similaires. Ensuite, elle a constaté que, pour la partie anglophone du public pertinent, les signes en conflit présentaient au moins un degré de similitude inférieur à la moyenne sur le plan visuel, un degré moyen de similitude sur le plan phonétique et un degré faible de similitude sur le plan conceptuel. Compte tenu de ces considérations, mais également du fait que ni les termes supplémentaires ni les éléments figuratifs des signes en conflit n’étaient susceptibles de détourner pleinement l’attention du public pertinent de la similitude globale créée par leur élément distinctif et, à tout le moins codominant, « crush », la chambre de recours a conclu qu’il pouvait exister un risque de confusion pour la partie anglophone du public pertinent.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter l’opposition et autoriser l’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens exposés dans la présente procédure ainsi que ceux exposés devant la chambre de recours.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

14      Dans le cadre de son recours, la requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir, premièrement, procédé à une comparaison erronée des produits et des services en cause en les considérant soit identiques, soit similaires, deuxièmement, de ne pas avoir apprécié les signes en conflit dans leur intégralité et de s’être limitée au seul élément verbal « crush », et donc d’avoir considéré que les signes en conflit étaient identiques ou similaires et, troisièmement, d’avoir commis une erreur en concluant à l’existence d’un risque de confusion.

15      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Observations liminaires

19      Il convient de constater, premièrement, que ni la requérante, ni l’EUIPO ne remettent en cause la définition du public pertinent donnée par la chambre de recours. La chambre de recours a en effet considéré que le public pertinent était le public dans l’ensemble de l’Union européenne constitué, en partie, du grand public et, en partie, de consommateurs professionnels possédant une expertise et des connaissances professionnelles spécifiques. La chambre de recours a également indiqué que leur niveau d’attention varierait de moyen, pour le grand public, à élevé, pour le public professionnel.

20      Deuxièmement, la chambre de recours a considéré que la marque antérieure, considérée dans son ensemble, était dépourvue de signification à l’égard de tous les produits en cause. La chambre de recours en a donc conclu qu’elle possédait un caractère distinctif normal.

21      En l’espèce, aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause ces conclusions qui, au demeurant, ne sont pas contestées par les parties.

 Sur la comparaison des produits et des services

22      Il convient de rappeler que, pour apprécier la similitude entre les produits et les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

23      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, tout d’abord, que, en ce qui concerne les produits couverts par la marque demandée compris dans la classe 16, les « livres ; livres illustrés ; livres éducatifs ; livres pour enfants ; livres de coloriage ; livres d’histoires ; livres de contes pour enfants ; cartes à jouer avec questions ; cartes ; cartes de Noël ; cartes d’anniversaire ; cartes d’encouragement ; cartes d’anniversaire ; éléments décoratifs pour crayons [papeterie] ; décorations de table en papier ; décorations de fête en papier ; décorations murales en papier ; décorations de fête en papier métallisé » étaient inclus ou se chevauchaient avec les « produits de l’imprimerie » couverts par la marque antérieure. Ces produits seraient donc identiques. La chambre de recours a relevé que les « crayons ; crayons de couleur ; crayons Carioca ; crayons pour le dessin ; pochette à crayons ; crayons de couleur » pouvaient se retrouver dans les mêmes rayons de magasins, ciblaient les mêmes consommateurs et pouvaient être vendus dans les mêmes coffrets que les « produits de l’imprimerie » couverts par la marque antérieure. Ces produits présenteraient donc un faible degré de similitude.

24      Ensuite, en ce qui concerne les produits couverts par la marque demandée compris dans la classe 28, la chambre de recours a considéré que ces produits étaient soit inclus dans la catégorie générale des « jouets », soit inclus dans la catégorie des « jeux, à l’exception des jeux de hasard » couvertes par la marque antérieure. Ces produits seraient donc identiques.

25      Enfin, en ce qui concerne les services couverts par la marque demandée compris dans la classe 41, la chambre de recours a considéré que ceux-ci avaient la même destination, étaient complémentaires et étaient généralement proposés par les mêmes entreprises que les « produits de l’imprimerie ; journaux et publications périodiques » couverts par la marque antérieure. Ces services seraient donc similaires, à tout le moins à un faible degré, aux produits couverts par la marque antérieure.

26      La requérante critique l’appréciation, par la chambre de recours, de la similitude des produits et des services en cause, et fait valoir, en substance, que celle-ci est erronée dans la mesure où la chambre de recours a considéré que ces produits et ces services étaient identiques ou similaires.

27      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

28      À titre liminaire, premièrement, il convient de relever que la requérante fait valoir que les produits couverts par la marque antérieure sont définis de manière large. Selon elle, à défaut de toute indication précise au sujet des produits en cause, il ne serait pas possible d’établir une similitude ou une complémentarité entre les produits visés par la marque antérieure et les produits et les services visés par la marque demandée. La requérante cite, au soutien de cet argument, l’arrêt du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (Burlington) (T‑120/16, EU:T:2017:873).

29      L’arrêt du 6 décembre 2017, Tulliallan Burlington/EUIPO – Burlington Fashion (Burlington) (T‑120/16, EU:T:2017:873), cité par la requérante, n’est toutefois pas pertinent en l’espèce. En effet, tout d’abord, la partie citée par la requérante ne concerne que les services de vente au détail compris dans la classe 35 de la classification de Nice, et non les produits couverts par la marque antérieure dans la présente affaire. De plus, la Cour a annulé ledit arrêt du Tribunal cité par la requérante, car le Tribunal avait commis une erreur de droit en considérant, au point 71 dudit arrêt, point d’ailleurs cité par la requérante, que l’absence de toute indication précise au sujet des produits pouvant être vendus dans les différents magasins composant une galerie commerciale telle que celle visée par les marques antérieures empêchait toute association entre ces derniers et les produits visés par les marques demandées (arrêt du 4 mars 2020, Tulliallan Burlington/EUIPO, C‑155/18 P à C‑158/18 P, EU:C:2020:151, point 137).

30      Quoi qu’il en soit, il ne saurait être déduit de l’arrêt du 19 juin 2012, Chartered Institute of Patent Attorneys (C‑307/10, EU:C:2012:361), que, lorsqu’une marque est invoquée à l’appui du motif d’opposition visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, ce motif d’opposition peut d’emblée être écarté par la simple invocation de l’absence de toute indication précise au sujet des produits couverts par la marque antérieure (voit arrêt du 24 février 2021, Bezos Family Foundation/EUIPO – SNCF Mobilités (VROOM), T‑56/20, non publié, EU:T:2021:103, point 30 et jurisprudence citée).

31      Dans ces conditions, la circonstance, alléguée par la requérante, que l’enregistrement de la marque antérieure pour les « produits de l’imprimerie », la « papeterie » et les « journaux et publications périodiques » relevant de la classe 16 serait contraire à l’exigence de clarté et de précision identifiée dans l’arrêt du 19 juin 2012, Chartered Institute of Patent Attorneys (C‑307/10, EU:C:2012:361), même à la supposer avérée, ne serait pas de nature à empêcher, dans une procédure d’opposition, qu’il soit procédé à la comparaison de ces produits et des produits désignés par la marque demandée aux fins de l’appréciation du risque de confusion.

32      Deuxièmement, il convient de constater que l’argumentation de la requérante repose, en partie, sur la destination spécifique des produits en cause, en particulier s’agissant des produits couverts par la marque demandée compris dans la classe 16 et dans la classe 28. Elle fait notamment valoir que les produits couverts par la marque demandée sont « en lien avec l’idée de contes de fées, d’histoires pour s’endormir, qui renforcent la perception de douceur, de calme, de tranquillité [et] de relaxation ».

33      À cet égard, il y a lieu de relever que, dans le cadre de la procédure d’opposition, l’EUIPO ne peut prendre en compte que la liste des produits telle qu’elle figure dans la demande de marque concernée, sous la seule réserve des éventuelles modifications de cette dernière, et non les intentions du demandeur, quant à l’utilisation qu’il entend faire de la marque si elle est enregistrée [arrêts du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI – Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, EU:T:2007:96, point 89, et du 24 mai 2011, ancotel/OHMI – Acotel (ancotel.), T‑408/09, non publié, EU:T:2011:241, point 47]. Par conséquent, les affirmations de la requérante relatives aux produits tels qu’ils sont commercialisés, s’agissant des produits compris dans la classe 16 et dans la classe 28, ne sont d’aucune pertinence pour l’appréciation de la similitude des produits et des services en cause.

34      C’est donc à bon droit que la chambre de recours a apprécié la similitude des produits visés au regard des listes de produits telles qu’elles figurent dans la demande d’enregistrement de la marque demandée.

35      Troisièmement, il convient de relever que la requérante reproche à la chambre de recours de s’être fondée sur de vagues hypothèses « allant au-delà de tout fait, élément de preuve et argument », en violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001. En effet, la chambre de recours aurait « forgé, de son propre chef, une identité ou une similitude entre les produits et les services en cause », en ne se contentant pas « d’une interprétation juridique » des produits couverts par la marque antérieure.

36      Il convient de préciser que l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 prévoit, en substance, que, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen de l’EUIPO est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.

37      À cet égard, il y a lieu de relever que la requérante se contente d’avancer, sans étayer son affirmation, que la chambre de recours serait allée « au-delà de tout fait, élément de preuve et argument ». À supposer que la requérante entende faire valoir par cet argument que la chambre de recours a été au-delà du sens littéral des termes employés pour désigner les produits couverts par la marque antérieure, il convient de rappeler que l’article 33, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 prévoit que l’utilisation de termes généraux, y compris les indications générales figurant dans les intitulés des classes de la classification de Nice, est interprétée comme incluant tous les produits ou les services relevant clairement du sens littéral de l’indication ou du terme. Or, en l’espèce, la chambre de recours s’est contentée d’interpréter les termes des produits et des services en cause au regard de leur sens littéral, et n’est pas allée au-delà de ce sens comme le prétend la requérante. Comme il sera relevé ci-après, la chambre de recours a, à juste titre, inclus certains produits couverts par la marque demandée dans les classes de produits couverts par la marque antérieure, en prenant en compte le sens littéral de ces derniers.

38      Par conséquent, l’argument de la requérante tiré d’une violation, par la chambre de recours, de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 doit être rejeté.

39      Il convient donc de déterminer si c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que les produits et les services couverts par la marque demandée étaient similaires ou identiques aux produits couverts par la marque antérieure.

 S’agissant des produits compris dans la classe 16

40      Premièrement, en ce qui concerne les « livres ; livres illustrés ; livres éducatifs ; livres pour enfants ; livres de coloriage ; livres d’histoires ; livres de contes pour enfants ; cartes à jouer avec questions ; cartes ; cartes de Noël ; cartes d’anniversaire ; cartes d’encouragement ; cartes d’anniversaire ; éléments décoratifs pour crayons [papeterie] ; décorations de table en papier ; décorations de fête en papier ; décorations murales en papier ; décorations de fête en papier métallisé » compris dans la classe 16, visés par la marque demandée, la requérante fait valoir que la chambre de recours a considéré à tort qu’ils étaient inclus dans, ou se recoupaient avec, les « produits de l’imprimerie », relevant de la même classe, couverts par la marque antérieure. La chambre de recours aurait donc commis une erreur en concluant que ces produits étaient identiques.

41      À cet égard, la jurisprudence précise que, lorsque les produits ou les services visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits ou ces services sont considérés comme identiques [voir arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34 et jurisprudence citée].

42      En l’espèce, comme la chambre de recours l’a constaté, les produits couverts par la marque demandée, repris au point 40 ci-dessus, sont compris dans, ou se recoupent avec, les « produits de l’imprimerie ». Ainsi, eu égard à la jurisprudence énoncée au point 41 ci-dessus, la chambre de recours en a conclu à bon droit, sur la base de faits notoires, que ces produits couverts par la marque demandée étaient identiques aux « produits de l’imprimerie » couverts par la marque antérieure.

43      Deuxièmement, en ce qui concerne les autres produits compris dans la classe 16 couverts par la marque demandée, à savoir les « crayons ; crayons de couleur ; crayons Carioca ; crayons pour le dessin ; pochette à crayons ; crayons de couleur », la requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle ceux-ci sont faiblement similaires aux « produits de l’imprimerie » couverts par la marque antérieure.

44      À cet égard, outre le fait que l’argument de la requérante n’est nullement étayé, il convient de rappeler que la circonstance que des produits sont fréquemment vendus dans les mêmes points de vente spécialisés est de nature à faciliter la perception par le consommateur concerné des liens étroits existant entre eux et à renforcer l’impression que la responsabilité de leur fabrication incombe à la même entreprise (arrêt du 11 juillet 2007, PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, T‑443/05, EU:T:2007:219, point 50). En l’espèce, et comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre, les produits en cause peuvent être présentés dans les mêmes rayons, ciblent les mêmes consommateurs et peuvent même être vendus ensemble, sous forme de coffrets.

45      Il n’y a donc pas lieu de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les « crayons ; crayons de couleur ; crayons Carioca ; crayons pour le dessin ; pochette à crayons ; crayons de couleur » couverts par la marque demandée sont faiblement similaires aux « produits de l’imprimerie » couverts par la marque antérieure.

 S’agissant des produits compris dans la classe 28

46      En ce qui concerne les produits couverts par la marque demandée compris dans la classe 28, la requérante, tout en reconnaissant que certains de ces produits peuvent être, dans une certaine mesure, identiques ou similaires aux produits couverts par la marque antérieure, fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a considéré qu’ils étaient identiques aux « jeux, à l’exception des jeux de hasard », en particulier en raison de leurs destinations, canaux de distribution et origines habituelles différents.

47      Eu égard à la jurisprudence citée au point 41 ci-dessus, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que ces produits étaient similaires dans la mesure où les « jouets ; jouets gonflables ; jouets qui vrombissent ; jouets parlants ; jouets flexibles ; jouets rembourrés ; jouets intelligents ; jouets modulaires ; jouets électroniques ; jouets musicaux ; jouets en caoutchouc ; peluches ; jouets mécaniques ; jouets en bois ; jouets pour le bain ; coussins rembourrés (jouets) ; jouets éducatifs ; jouets en peluche intelligents ; jouets d’eau ; jouets en plastique ; livres [jeux] ; cartes à jouer ; cartes à jouer ; ours en peluche ; poupées en peluche ; casse-tête [jeux] ; casse-tête [jeux] » couverts par la marque demandée sont compris dans les « jeux, à l’exception des jeux de hasard » couverts par la marque antérieure, ce qui est notoire.

48      Ainsi, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que les produits couverts par la marque demandée compris dans la classe 28 étaient identiques aux produits couverts par la marque antérieure compris dans cette classe.

 S’agissant des services compris dans la classe 41

49      En ce qui concerne les services compris dans la classe 41 couverts par la marque demandée, la requérante fait valoir que les produits couverts par la marque antérieure repris au point 5 ci-dessus sont différents des services compris dans la classe 41 couverts par la marque demandée. En effet, ces produits ne seraient pas automatiquement fournis ou indispensables dans le cadre des services de « publication de livres éducatifs ; publication de livres audio ; édition de livres et de magazines ; publication et édition de livres » couverts par la marque demandée. Ainsi, en substance, ce serait à tort que la chambre de recours aurait conclu que les services couverts par la marque demandée étaient similaires aux produits couverts par la marque antérieure, en étendant, sans aucun motif, la protection de cette marque aux services relevant de la classe 41. La requérante fait également valoir que Mediaproduccion n’aurait fourni aucun élément de preuve à l’appui de la similitude ou de l’identité entre les produits couverts par la marque antérieure et les produits et services visés par la marque demandée.

50      À cet égard, selon la jurisprudence, les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise (voir arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, point 57 et jurisprudence citée).

51      Ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, force est de constater, contrairement à ce que prétend la requérante, que les produits et les services en cause ont la même destination, à savoir exposer le public à du contenu écrit. De plus, ils sont complémentaires, car les services compris dans la classe 41 ont pour but de publier les différents supports écrits ou oraux compris dans la classe 16 couverts par les marques demandée et antérieure. La chambre de recours a donc, à juste titre, sans avoir étendu indûment la protection de la marque antérieure aux services compris dans la classe 41, conclu que ces services étaient similaires, à tout le moins à un faible degré, aux produits couverts par la marque antérieure compris dans la classe 16. La requérante ne saurait reprocher à la chambre de recours d’avoir conclu à la similitude des services compris dans la classe 41, visés par la marque demandée, avec les produits de la marque antérieure compris dans la classe 16 alors que Mediaproduccion n’aurait prétendument apporté aucun élément de preuve en ce sens. En effet, d’une part, l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1) prévoit que l’acte d’opposition comporte une indication des produits ou des services sur lesquels chacun des motifs de l’opposition se fonde. Selon l’article 2, paragraphe 4, de ce même règlement, l’acte d’opposition peut également comporter une description précise exposant les motifs, les faits et arguments sur lesquels l’opposition se fonde, ainsi que les preuves à l’appui. Ainsi, lors de la procédure d’opposition, l’opposant dispose de la possibilité d’apporter des éléments de preuve concernant la similitude des produits et des services en cause, mais n’en a pas l’obligation. D’autre part, lors de la phase contradictoire devant l’EUIPO, il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625 que l’opposant possède également la possibilité de présenter des éléments de preuve à l’appui de l’opposition ou de compléter ceux déjà présentés en vertu de l’article 2, paragraphe 4, du même règlement. Il ne saurait ressortir de cette disposition que l’opposant a l’obligation d’apporter de tels éléments de preuve à un stade ultérieur au dépôt de l’acte d’opposition [voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2019, Mahr/EUIPO – Especialidades Vira (Xocolat), T‑58/18, non publié, EU:T:2019:759, point 20].

52      De plus, l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait supposé, à tort, que Mediaproduccion fournissait les services compris dans la classe 41 procède d’une lecture erronée de la décision attaquée et ne saurait remettre en cause la conclusion énoncée ci-dessus. En effet, la chambre de recours s’est limitée à ajouter, dans le cadre de son raisonnement, que, généralement, les produits de la marque antérieure et les services de la marque demandée pouvaient être proposés par les mêmes entreprises, sans pour autant indiquer que ces services étaient fournis, en l’espèce, par Mediaproduccion.

53      Il ressort de ce qui précède que c’est à tort que la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir procédé à une comparaison erronée des produits et des services en cause en considérant qu’ils étaient identiques ou similaires. Son argumentation doit donc être rejetée.

 Sur la comparaison des signes en conflit

54      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

55      À titre liminaire, il convient de rappeler, premièrement, que la marque antérieure est un signe figuratif représentant une illustration d’un coffre-fort en métal comprenant, sur le côté gauche, l’élément verbal « crush » rédigé à la verticale et en lettres majuscules, et, sur le côté droit, un verrou. Cette marque est représentée en bronze, en argent, en or, en gris foncé et en blanc. Deuxièmement, la marque demandée est un signe figuratif représentant les éléments verbaux « the crush series » sur trois lignes entouré de cinq étoiles. L’élément verbal « crush » occupe la ligne du milieu et figure dans une police plus grande que les autres éléments verbaux.

 Sur l’appréciation des éléments distinctifs et dominants des signes en conflit

56      La chambre de recours a, tout d’abord, indiqué que, pour les deux marques en conflit, l’élément verbal commun « crush » possédait un caractère distinctif moyen pour le public pertinent non anglophone et anglophone, dans la mesure où il ne décrivait pas clairement les caractéristiques des produits et des services en cause et n’y faisait pas allusion. Ensuite, au regard de la marque demandée, la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « the » possédait un caractère distinctif faible, et l’élément verbal « series », un caractère distinctif faible, voire inexistant, ce qui n’est pas, en soi, remis en cause par les parties. S’agissant des cinq étoiles entourant les éléments verbaux, la chambre de recours les a considérées comme un élément purement décoratif. Au regard de la marque antérieure, elle a relevé que le coffre-fort métallique possédait un caractère distinctif moyen dans la mesure où il n’avait pas trait aux produits couverts par la marque antérieure. L’élément verbal « crush » étant clairement lisible et visible, il se verrait attribuer la même importance que l’élément figuratif. Ainsi, la chambre de recours en a conclu que l’élément verbal commun « crush » serait perçu, dans les signes en conflit, comme un élément autonome, distinctif, et, à tout le moins, codominant.

57      À cet égard, premièrement, la requérante fait valoir que les éléments figuratifs de la marque antérieure et de la marque demandée ont une incidence plus forte sur le plan visuel que les éléments verbaux, et que l’élément verbal « crush » ne constitue pas l’élément le plus distinctif de sa marque. Ainsi, en substance, la chambre de recours aurait conclu à tort que l’élément verbal « crush » était, à tout le moins, codominant dans les deux signes en conflit.

58      Pour apprécier le caractère dominant d’un ou plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35].

59      Lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [arrêt du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37].

60      Tout d’abord, comme cela a été rappelé au point 55 ci-dessus, la marque antérieure est constituée d’une illustration de coffre-fort et de l’élément verbal « crush ». Comme le fait valoir à juste titre l’EUIPO dans son mémoire en réponse, la chambre de recours n’a pas ignoré l’importance du coffre-fort métallique, mais a considéré que l’élément verbal « crush » devait se voir accorder le même poids que l’élément figuratif représentant un coffre-fort. En effet, bien que le coffre-fort soit imposant et possède un caractère distinctif moyen, l’élément verbal figure en lettres majuscules, sur le côté, et est parfaitement lisible et visible. Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les éléments verbal et figuratif de la marque antérieure étaient de même importance.

61      Ensuite, s’agissant de la marque demandée, comme cela a été rappelé au point 55 ci-dessus, celle-ci est constituée des éléments verbaux « the crush series » et de cinq étoiles les entourant. À cet égard, la chambre de recours a considéré, ce qui n’est pas remis en cause par les parties, que l’élément verbal « crush » possédait un caractère distinctif moyen. De plus, l’élément verbal « the », en anglais, n’est qu’un simple article défini précisant le nom qui le suit, il possède donc un caractère distinctif faible. Par ailleurs, l’élément verbal « series » ne présente qu’un caractère distinctif faible dans la mesure où les produits couverts par la marque demandée peuvent être vendus en série. En ce qui concerne les cinq étoiles entourant les éléments verbaux « the crush series », elles ne sont que purement décoratives, comme il ressort également des points 43 et 44 de la décision attaquée. En effet, comme cela a été rappelé au point 59 ci-dessus, en principe, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, le consommateur aura tendance à se référer à l’élément verbal. La présence des cinq étoiles, de petite taille, ne saurait être suffisante pour déroger à ce principe et elles ne se verront accorder qu’une importance limitée dans la comparaison des signes en conflit.

62      Ainsi, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « crush » serait perçu, dans les deux signes en conflit, comme un élément distinctif, dominant, ou, à tout le moins, codominant.

63      Deuxièmement, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas apprécié les signes en conflit dans leur globalité et les a décomposés artificiellement.

64      À cet égard, la Cour a indiqué que l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

65      En l’espèce, il a été relevé au point 62 ci-dessus que l’élément verbal « crush » était soit dominant, soit codominant, par rapport aux autres éléments des marques en conflit. Ainsi, dans ces circonstances, la chambre de recours a analysé les signes en conflit dans leur globalité, mais a, à juste titre, déduit de son analyse que, par rapport aux autres éléments, l’impression d’ensemble de ces signes était dominée par l’élément verbal commun « crush » ou, à tout le moins, que cet élément était de même importance que les autres éléments.

66      Les arguments de la requérante relatifs à l’appréciation du caractère distinctif et dominant des éléments composant les signes en conflit doivent donc être rejetés.

 Sur le plan visuel

67      Dans la décision attaquée, à l’instar de la division d’opposition, la chambre de recours a considéré que, sur le plan visuel, les signes en conflit, considérés dans leur ensemble, possédaient à tout le moins un degré de similitude inférieur à la moyenne. En effet, elle a indiqué que, bien que les signes en conflit ne devaient pas être décomposés artificiellement, le fait que l’élément distinctif « crush », qui est, à tout le moins, codominant, leur soit commun avait pour conséquence qu’ils présentaient à tout le moins un degré de similitude visuelle inférieur à la moyenne.

68      La requérante fait valoir que les deux signes en conflit ne sont ni identiques ni similaires. À cet égard, elle reproche à la chambre de recours d’avoir décomposé artificiellement les signes en conflit et surtout d’avoir négligé les éléments figuratifs dans sa comparaison des signes en conflit.

69      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

70      À cet égard, bien que, comme le font remarquer la chambre de recours et la requérante, les signes en conflit diffèrent visuellement par leurs éléments figuratifs respectifs et par les éléments verbaux supplémentaires de la marque demandée, ces différences ne sauraient remettre en cause la conclusion de la chambre de recours. En effet, comme il a été conclu au point 62 ci-dessus, l’élément verbal « crush » commun aux signes en conflit est dominant ou, à tout le moins, codominant, de sorte qu’il est susceptible de créer une impression globale de similitude sur le plan visuel. Ainsi, compte tenu de l’élément « crush » commun aux signes en conflit, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que lesdits signes présentaient à tout le moins un degré de similitude visuelle inférieur à la moyenne, sans minimiser l’importance de l’élément figuratif présent dans la marque antérieure.

 Sur le plan phonétique

71      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, sur le plan phonétique, malgré les différences entre les signes en conflit, ceux-ci présentaient un degré moyen de similitude phonétique résultant de l’élément commun « crush ». En effet, « crush » serait l’unique élément verbal de la marque antérieure, et l’élément autonome et central de la marque demandée.

72      La requérante fait valoir que, sur le plan phonétique, les éléments verbaux « the crush series » ne sauraient être décomposés artificiellement, contrairement à ce que la chambre de recours aurait effectué, de sorte que la similitude phonétique des signes en conflit ne saurait se limiter à un seul élément, à savoir « crush ». Ainsi, les signes en conflit se différencieraient par leur longueur et ne seraient ni identiques, ni similaires.

73      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

74      Les signes en conflit partagent phonétiquement l’élément verbal « crush ». Bien que la marque demandée soit également composée des éléments verbaux « the » et « series », ceux-ci n’auront qu’un faible impact sur la prononciation du signe demandé, en raison de leur faible caractère distinctif (voir point 61 ci-dessus). De plus, comme la chambre de recours l’a relevé à juste titre, l’élément verbal commun « crush » est l’unique élément verbal de la marque antérieure et possède une position autonome et centrale dans la marque demandée.

75      Quant à l’argument de la requérante selon lequel l’enregistrement de la marque antérieure n’a, en aucun cas, conféré un droit exclusif à Mediaproduccion sur l’élément verbal « crush », il y a lieu de constater que la chambre de recours n’a pas considéré que Mediaproduccion disposait d’un tel droit, mais a évalué concrètement l’existence d’une similitude phonétique entre les signes en conflit. En effet, son appréciation repose sur l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants, en l’espèce l’élément verbal « crush », conformément à la jurisprudence citée au point 54 ci-dessus.

76      Ainsi, la chambre de recours en a déduit à bon droit que les signes en conflit présentaient un degré moyen de similitude sur le plan phonétique.

 Sur le plan conceptuel

77      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, sur le plan conceptuel, les signes en conflit présentaient une faible similitude pour le public anglophone, pertinent pour l’appréciation de la similitude sur le plan conceptuel. En effet, le public anglophone comprendrait l’élément verbal « crush », mais les idées véhiculées par les autres éléments verbaux et figuratifs des marques en conflit rendraient cette similitude faible.

78      La requérante fait valoir que, sur le plan conceptuel, les signes en conflit ne présentent aucune similitude, la marque demandée, en tant qu’expression unitaire, évoquant une sensation « de douceur, de calme, de tranquillité, de relaxation, de conte de fées et d’histoires pour s’endormir ».

79      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

80      Il convient de relever, tout d’abord, que la chambre de recours, au point 51 de la décision attaquée, n’a constaté qu’une faible similitude conceptuelle entre les signes en conflit, et ce seulement pour le public anglophone. En effet, l’élément verbal commun, à tout le moins codominant, « crush » signifie, en anglais, « presser quelque chose très fort de sorte qu’il se brise ou que sa forme soit détruite ». Le public anglophone comprendra ainsi la signification de l’élément verbal commun « crush ». Toutefois, et comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours, cette similitude sera atténuée par les significations distinctes véhiculées par les éléments figuratifs des signes en conflit ainsi que par les éléments verbaux « the » et « series » de la marque demandée. Dès lors, quand bien même la marque demandée pourrait évoquer une sensation de « douceur, de calme, de tranquillité, de relaxation, de conte de fées et d’histoires pour s’endormir » comme le fait valoir la requérante, cela ne serait pas de nature à modifier le fait que le public anglophone comprendra en premier lieu l’élément commun « crush » comme signifiant « presser quelque chose très fort de sorte qu’il se brise ou que sa forme soit détruite ». Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’il existait une faible similitude conceptuelle entre les signes en conflit pour la partie anglophone du public pertinent.

81      En conclusion, il y a lieu de considérer que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient un degré de similitude au moins inférieur à la moyenne sur le plan visuel, moyen sur le plan phonétique et faible, pour le public anglophone, sur le plan conceptuel.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

82      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

83      La chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion pour la partie anglophone du public pertinent au regard des produits et des services jugés identiques ou similaires à des degrés différents. En effet, elle a estimé que ni les termes supplémentaires ni les éléments figuratifs des signes en conflit n’étaient en mesure de détourner pleinement l’attention du public pertinent de la similitude globale créée par leur élément distinctif et à tout le moins codominant « crush ».

84      La requérante soutient que ni le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, ni le professionnel ne confondra les produits et les services couverts par la marque demandée avec les produits couverts par la marque antérieure, compte tenu de l’absence d’identité ou de similitude entre les signes en conflit et les produits et les services en cause. Ainsi, la chambre de recours aurait conclu à tort qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit.

85      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

86      Il convient de rappeler, ainsi qu’il résulte des points 53 et 81 ci-dessus, que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré, d’une part, que les produits et les services en cause étaient identiques ou similaires et, d’autre part, que les signes en conflit présentaient un degré de similitude au moins inférieur à la moyenne sur le plan visuel, moyen sur le plan phonétique et, pour le public anglophone, faible sur le plan conceptuel. En outre, la chambre de recours a considéré, à juste titre, que le public pertinent se composait, en partie, du grand public, qui fera preuve d’un niveau d’attention moyen et, en partie, de consommateurs professionnels, qui feront preuve d’un niveau d’attention élevé. De plus, comme il a été relevé au point 20 ci-dessus, la chambre de recours a considéré que la marque antérieure possédait un caractère distinctif moyen, ce qui n’a pas été remis en cause par les parties.

87      À cet égard, au vu de l’ensemble de ce qui précède, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion pour la partie anglophone du public pertinent.

88      En effet, bien que le public pertinent soit composé du grand public faisant preuve d’un niveau d’attention moyen et de consommateurs professionnels faisant preuve d’un niveau d’attention élevé, le fait que le public en cause soit plus attentif ne signifie pas qu’il examinera dans les moindres détails la marque à laquelle il sera confronté, ou qu’il la comparera minutieusement à une autre marque. En effet, même pour un public faisant preuve d’un niveau d’attention élevé, il n’en demeure pas moins que les membres du public pertinent n’ont que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doivent se fier à l’image imparfaite qu’ils en ont gardée en mémoire [voir arrêt du 13 mars 2018, Kiosked/EUIPO – VRT (K), T‑824/16, EU:T:2018:133, point 73 et jurisprudence citée]. En outre, lorsque le public pertinent est composé de deux catégories de consommateurs, c’est le public ayant le niveau d’attention le moins élevé qui doit être pris en considération [voir arrêt du 24 mars 2021, Creaton South-East Europe/EUIPO – Henkel (CREATHERM), T‑168/20, non publié, EU:T:2021:160, point 24 et jurisprudence citée]. Ainsi, en l’espèce, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, le niveau d’attention du public pertinent ne constitue qu’un des différents éléments à prendre en considération, et la seule circonstance qu’il soit élevé pour une partie du public pertinent ne saurait remettre en cause la conclusion de la chambre de recours.

89      L’argument de la requérante selon lequel ses produits peuvent également être mis en vente sur des sites Internet et dans des magasins en libre-service, sans aide spécialisée, ce qui accroîtrait l’importance de l’impression visuelle par rapport à l’impression phonétique ne saurait, non plus, remettre en cause cette conclusion. En effet, comme l’a relevé à bon droit l’EUIPO, il ne ressort pas de la jurisprudence que la circonstance selon laquelle les produits peuvent être commercialisés en ligne ou dans des magasins en libre-service sans aide spécialisée suffirait à écarter tout risque de confusion en cas de similitude visuelle inférieure à la moyenne. De plus, il n’est pas exclu que, dans certains cas, les produits et les services puissent faire l’objet d’une publicité orale, à la radio ou par le biais d’autres consommateurs [voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2018, TeamBank/EUIPO – Fio Systems (FYYO), T‑826/17, non publié, EU:T:2018:819, point 43]. Partant, la similitude moyenne sur le plan phonétique des marques en conflit a, en l’espèce, dans l’appréciation du risque de confusion, un poids au moins aussi important que la similitude visuelle [voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2016, Future Enterprises/EUIPO – McDonald’s International Property (MACCOFFEE), T‑518/13, EU:T:2016:389, point 33 et jurisprudence citée].

90      C’est donc à bon droit que la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion entre les deux marques en conflit.

91      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen unique invoqué par la requérante au soutien de ses conclusions doit être rejeté comme étant non fondé et, partant, le recours dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante.

 Sur les dépens

92      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

93      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Crush Series Publishing s.r.o. est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er mars 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.