Language of document : ECLI:EU:T:2017:725

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

12 octobre 2017 (*)

« Pourvoi – Procédure – Taxation des dépens – Honoraires d’avocat – Représentation d’une institution par un avocat – Dépens récupérables »

Dans l’affaire T‑447/13 P‑DEP,

Luigi Marcuccio, demeurant à Tricase (Italie), représenté par Me G. Cipressa, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. G. Gattinara et Mme C. Berardis-Kayser, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à la suite de l’ordonnance du Tribunal du 2 octobre 2014, Marcuccio/Commission (T‑447/13 P, EU:T:2014:869),

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

composé de MM. M. Jaeger, président, M. van der Woude et H. Kanninen (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 22 août 2013, M. Marcuccio a introduit, au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, un pourvoi visant à l’annulation de l’ordonnance du 18 juin 2013, Marcuccio/Commission (F‑143/11, EU:F:2013:81). Par cette ordonnance, le Tribunal de la fonction publique a rejeté, comme étant manifestement irrecevable, le recours de M. Marcuccio visant, notamment, à, d’une part, l’annulation de la décision de la Commission des Communautés européennes portant rejet partiel de sa demande de lui payer des intérêts moratoires sur les arriérés d’allocation d’invalidité que ladite institution lui a versés et, d’autre part, la condamnation de la Commission à lui payer une somme égale à la différence entre le montant d’intérêts moratoires calculé suivant les critères devant, selon lui, être appliqués et celui effectivement payé, somme elle-même majorée d’intérêts de retard.

2        Par ordonnance du 2 octobre 2014, Marcuccio/Commission (T‑447/13 P, EU:T:2014:869), le Tribunal a rejeté le pourvoi dans son ensemble comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé. En outre, il a condamné M. Marcuccio à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission dans le cadre de cette instance.

3        Le 8 mai 2015, la Commission a adressé à M. Marcuccio ainsi qu’à son conseil, par lettre recommandée avec accusé de réception, une liste de treize décisions judiciaires, dont l’ordonnance rendue dans l’affaire T‑447/13 P, dans lesquelles il avait été condamné aux dépens par le Tribunal ou le Tribunal de la fonction publique, ainsi que les sommes qu’elle réclamait pour chaque affaire. La somme réclamée pour l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance Marcuccio/Commission (T‑447/13 P, EU:T:2014:869) s’élevait à 1 700 euros, correspondant aux prestations effectuées par Me Dal Ferro, représentant de la Commission dans cette affaire.

4        Tandis que M. Marcuccio et son avocat ont signé l’accusé de réception de la lettre du 8 mai 2015, respectivement en date du 17 juin et du 27 mai 2015, aucun d’eux n’a réagi à cette lettre, bien qu’ils aient été invités à le faire dans un délai de 90 jours à compter de sa réception.

5        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 24 avril 2017, la Commission a introduit, conformément à l’article 170, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la présente demande de taxation de dépens, laquelle a été enregistrée sous la référence T‑447/13 P‑DEP.

6        La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        fixer le montant des dépens récupérables au titre de l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance Marcuccio/Commission (T‑447/13 P, EU:T:2014:869) à 1 700 euros ;

–        appliquer à ce montant les intérêts moratoires, à partir de la date de notification de l’ordonnance sur la présente demande jusqu’à la date de paiement effectif, à calculer sur la base du taux fixé par la Banque centrale européenne pour les opérations principales de refinancement et en vigueur le premier jour du mois d’échéance du paiement, majoré de trois points et demi de pourcentage.

7        La demande de taxation des dépens a été régulièrement signifiée à M. Marcuccio par courrier du 27 avril 2017. Par le même courrier, le greffe du Tribunal a informé M. Marcuccio que le délai pour le dépôt de ses observations sur la demande de taxation des dépens était fixé au 7 juin 2017. M. Marcuccio n’a pas déposé d’observations.

 En droit

 Sur le bien-fondé de la demande de taxation des dépens

 Sur le caractère récupérable des dépens

8        Il convient, en premier lieu, de rappeler que, selon l’article 140, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme des dépens récupérables les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, d’un conseil ou d’un avocat.

9        Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins (ordonnance du 28 janvier 2014, Marcuccio/Commission, T‑366/10 P‑DEP, EU:T:2014:63, point 32).

10      En second lieu, il ressort de l’article 19, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, dudit statut, que, dans le cadre d’un contentieux qui les concerne, les institutions de l’Union sont libres de recourir à l’assistance d’un avocat. La rémunération de ce dernier entre donc dans la notion de frais indispensables exposés aux fins de la procédure, sans que l’institution soit tenue de démontrer qu’une telle assistance était objectivement justifiée (voir ordonnance du 28 janvier 2014, Marcuccio/Commission, T‑366/10 P‑DEP, EU:T:2014:63, point 33 et jurisprudence citée).

11      En l’espèce, la Commission réclame une somme de 1 700 euros correspondant à la somme forfaitaire négociée avec son avocat pour couvrir l’ensemble de ses honoraires, dépens, charges et frais exposés, lesquels présentent le caractère de dépens récupérables.

 Sur le montant des dépens récupérables

12      Selon la jurisprudence, à défaut de dispositions du droit de l’Union en matière tarifaire, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de l’affaire, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représenté pour les parties (ordonnance du 28 janvier 2014, Marcuccio/Commission, T‑366/10 P‑DEP, EU:T:2014:63, point 36).

13      En fixant le montant des dépens récupérables, le Tribunal tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de la signature de l’ordonnance de taxation des dépens, y compris des frais indispensables afférents à la procédure de taxation des dépens (ordonnances du 27 avril 2016, T‑385/13 P‑DEP, non publiée, EU:T:2016:275, point 10, et du 11 janvier 2017, Wahlström/Frontex, T‑653/13 P‑DEP, non publiée, EU:T:2017:12, point 12).

14      Par ailleurs, afin d’apprécier, sur la base des critères rappelés au point 12 ci-dessus, le caractère indispensable des frais effectivement exposés aux fins de la procédure, il appartient au demandeur de fournir des indications précises (voir ordonnance du 16 septembre 2013, Marcuccio/Commission, T‑9/09 P‑DEP, EU:T:2013:506, point 32). À cet égard, le caractère forfaitaire de la rémunération n’a pas d’incidence sur l’appréciation par le Tribunal du montant récupérable au titre des dépens, le juge pouvant se fonder sur des critères prétoriens bien établis ainsi que sur les indications précises que les parties doivent lui fournir. Si l’absence de telles informations ne fait pas obstacle à la fixation par le Tribunal, sur la base d’une appréciation équitable, du montant des dépens récupérables, elle le place cependant dans une situation d’appréciation nécessairement stricte en ce qui concerne la récupération des dépens sollicitée par le demandeur (voir ordonnance du 16 septembre 2013, Marcuccio/Commission, T‑9/09 P‑DEP, EU:T:2013:269, point 39).

15      En l’espèce, s’agissant en premier lieu de la nature du litige, il convient de rappeler que la présente demande concerne les dépens exposés dans le cadre d’un pourvoi devant le Tribunal, une procédure qui, en raison de sa nature même, est limitée aux questions de droit et n’a pas pour objet la constatation de faits (voir ordonnance du 27 avril 2016, T‑385/13 P‑DEP, non publiée, EU:T:2016:275, point 15 et jurisprudence citée), à l’exception des situations dans lesquelles un moyen relatif à la dénaturation d’éléments factuels est soulevé. À cet égard, si M. Marcuccio a effectivement avancé un tel moyen dans le cadre de son pourvoi, il suffit de rappeler que, au point 35 de l’ordonnance Marcuccio/Commission (T‑447/13 P, EU:T:2014:869), le Tribunal a relevé qu’aucune précision n’avait été apportée quant aux constatations de fait qui auraient été entachées de prétendus dénaturation ou détournement. Partant, ce grief n’avait pas à être examiné plus avant et ne nécessitait pas un investissement important pour y répondre (voir, en ce sens, ordonnance du 16 septembre 2013, Marcuccio/Commission, T‑239/09 P‑DEP, non publiée, EU:T:2013:667, point 33).

16      En deuxième lieu, concernant l’objet du litige et les difficultés de la cause, il y a lieu de relever que, à l’appui de son pourvoi, M. Marcuccio avait invoqué trois moyens. Le premier moyen était constitué de deux branches. Dans le cadre de la première branche, il avait invoqué un « défaut absolu de motivation, y compris […] dénaturation et détournement des faits, des affirmations et des chefs de conclusions formulés par [lui] en première instance, défaut de pertinence, pétition de principe, arbitraire, défaut de logique, irrationalité et caractère déraisonnable ». Dans le cadre de la seconde branche du premier moyen, M. Marcuccio avait invoqué, en substance, une « interprétation et [une] application erronées, fausses et irrationnelles », premièrement, de la notion de demande au sens de l’article 90 du statut, deuxièmement, de l’article 91 du statut, troisièmement, de la notion d’obligation pesant sur une institution de l’Union européenne de mettre en œuvre les mesures d’exécution d’une décision prononcée par le juge de l’Union. Le deuxième moyen était tiré, en substance, de l’omission de statuer, du défaut d’instruction et de motivation relatifs à une demande formulée par M. Marcuccio dans le cadre de la procédure en première instance. Le troisième moyen était tiré, en substance, de l’interprétation et de l’application « fausses, erronées et fallacieuses » de l’article 14 du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique et, en conséquence, de la violation « grave et manifeste » du principe du juge naturel.

17      Aucun de ces moyens ne posait de problème juridique complexe ou ne soulevait de question juridique inédite. L’affaire ne présentait donc pas un degré de difficulté élevé, ce qui ressort également du fait que le Tribunal a réglé ce litige par voie d’ordonnance motivée sur la base de l’article 145 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, rejetant le pourvoi en partie comme manifestement irrecevable et en partie comme manifestement non fondé.

18      En troisième lieu, s’agissant de l’intérêt économique du litige et de son importance sous l’angle du droit de l’Union, il ressort d’une analyse des moyens invoqués au soutien du pourvoi que si leur portée pouvait être interprétée comme dépassant la situation particulière de M. Marcuccio, leur répercussion pour le droit de l’Union dans son ensemble était minime. Il y a donc lieu de considérer que le litige revêtait une importance limitée sous l’angle du droit de l’Union et ne présentait pas une importance économique particulière.

19      En quatrième lieu, s’agissant de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer à la Commission, cette dernière réclame en l’espèce un montant de 1 700 euros correspondant à la somme forfaitaire négociée avec son avocat externe pour l’assister dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance Marcuccio/Commission (T‑447/13 P, EU:T:2014:869). La Commission précise que son avocat externe a évalué ex post le nombre total de ses heures de travail à 6 h 45, facturées à 250 euros l’heure. Selon cette évaluation, l’examen de la requête, de compréhension difficile, aurait nécessité 1 h 30, la rédaction de la défense 5 heures, et la négociation du contrat d’assistance avec la Commission 15 minutes. Le montant des frais de bureau, comprenant des frais de photocopies, de téléphone et de courrier électronique, a été estimé par l’avocat externe de la Commission à 65 euros.

20      Au vu de l’analyse des critères pertinents pour la détermination du montant des dépens (voir points 15 à 19 ci-dessus), il n’apparaît pas que le nombre d’heures prestées par l’avocat externe de la Commission, son taux horaire et le montant des frais de bureau exposés soient inappropriés.

21      Dès lors, il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables en fixant leur montant total à 1 700 euros.

 Sur la demande de la Commission relative aux intérêts moratoires

22      La Commission demande au Tribunal de condamner M. Marcuccio à lui verser des intérêts moratoires sur le montant des dépens à rembourser, et ce, à compter de la date de la notification de la présente ordonnance.

23      À cet égard, il y a lieu de relever que la constatation d’une éventuelle obligation de payer les intérêts moratoires et la fixation du taux applicable relèvent de la compétence du Tribunal en vertu de l’article 170, paragraphes 1 à 3, du règlement de procédure (voir ordonnance du 11 janvier 2016, Marcuccio/Commission, T‑238/11 P‑DEP, non publiée, EU:T:2016:13, point 30 et jurisprudence citée).

24      Selon une jurisprudence bien établie, une demande de majorer la somme due dans le cadre d’une procédure de taxation de dépens d’intérêts moratoires doit être accueillie pour la période entre la date de la signification de l’ordonnance de taxation des dépens et la date du remboursement effectif des dépens (voir ordonnance du 11 janvier 2016, Marcuccio/Commission, T‑238/11 P‑DEP, non publiée, EU:T:2016:13, point 31 et jurisprudence citée).

25      Compte tenu des dispositions de l’article 83, paragraphe 2, sous b), du règlement délégué (UE) n° 1268/2012 de la Commission, du 29 octobre 2012, relatif aux règles d’application du règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union (JO 2012 L 362, p. 1), le taux d’intérêt applicable est calculé sur la base du taux fixé par la Banque centrale européenne pour les opérations principales de refinancement et en vigueur le premier jour calendrier du mois de l’échéance du paiement, majoré de trois points et demi de pourcentage (ordonnance du 28 janvier 2014, Marcuccio/Commission, T‑366/10 P‑DEP, EU:T:2014:63, point 69).

26      Il résulte de tout ce qui précède que le montant total des dépens récupérables par la Commission auprès de M. Marcuccio au titre de l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance Marcuccio/Commission (T‑447/13 P, EU:T:2014:869) s’élève à 1 700 euros, augmenté des intérêts moratoires à compter de la date de la signification de la présente ordonnance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

ordonne :

1)      Le montant total des dépens à rembourser par M. Luigi Marcuccio à la Commission européenne au titre des dépens récupérables dans l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance du 2 octobre 2014, Marcuccio/Commission (T‑447/13 P, EU:T:2014:869) est fixé à 1 700 euros.

2)      Ladite somme portera intérêts de retard de la date de la signification de la présente ordonnance à la date du paiement.

Fait à Luxembourg, le 12 octobre 2017.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

M. Jaeger


*      Langue de procédure : l’italien.