Language of document : ECLI:EU:T:2013:285

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

30 mai 2013 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale Roca – Marque nationale figurative antérieure ROCA et marque internationale figurative antérieure Roca – Motif relatif de refus – Similitude des produits – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑115/12,

Buzil-Werk Wagner GmbH & Co. KG, établie à Memmingen (Allemagne), représentée par Me D. Waldhauser, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. M. Lenz et G. Schneider, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Roca Sanitario, SA, établie à Barcelone (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 9 janvier 2012 (affaire R 1907/2010‑4), relative à une procédure d’opposition entre Roca Sanitario, SA et Buzil-Werk Wagner GmbH & Co. KG,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, S. Soldevila Fragoso, et G. Berardis (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 7 mars 2012,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 3 juillet 2012,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 2 avril 2008, la requérante, Buzil-Werk Wagner GmbH & Co. KG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Roca.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 3 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pour laver, polir, nettoyer et entretenir, produits chimiques pour nettoyer et entretenir les véhicules, les machines, les métaux, le bois, la pierre, le verre, la porcelaine, le cuir et les matières plastiques ; produits pour lisser ; cirage pour chaussures ; huiles parfumées, sprays désodorisants ; produits pour entretenir et nettoyer la pierre ; compositions hydrofuges, produits de nettoyage et d’entretien de pierres naturelles et artificielles telles que granite, marbre, pierres lithographiques, terre cuite, grès de porcelaine, terrazzo, etc. ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 30/2008, du 28 juillet 2008.

5        Le 28 octobre 2008, Roca Sanitario, SA a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était notamment fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque figurative espagnole, enregistrée le 22 mars 2004 sous le numéro 2543451, reproduite ci-après, et désignant les produits relevant de la classe 21 correspondant à la description suivante : « Peignes, brosses, éponges, porte-savons, porte-éponges, bassines, seaux, cuvettes, supports de brosses, dessous de verres, boîtes à savon, distributeurs de savon, brosses de toilettes, porte-papier de toilette, porte-serviettes (en métaux non précieux) ; vaporisateurs de parfums et d’eau de Cologne ; baignoires pour bébés ; récipients calorifuges ; produits céramiques pour le ménage ; pots en verre et en porcelaine ; verrerie ; bouteilles, bouteilles isolantes, cruches, pichets, vases, mortiers, salières, batteries de cuisine, pots à fleurs, coupes à fruits, cruchons, cafetières non électriques, théières, huiliers et vinaigriers ; séchoirs à linge, étendoirs à linge et planches à repasser le linge ; objets d’art en porcelaine, terre cuite ou cristal ; ustensiles de cuisine et récipients à usage domestique ou pour la cuisine (en métaux non précieux) ; instruments d’arrosage » :

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–        la marque figurative internationale, produisant ses effets dans l’Union européenne, enregistrée le 2 août 2006 sous le numéro 905212, reproduite ci-après, et désignant, notamment, des produits compris dans la classe 21 :

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7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 207/2009].

8        Par décision du 2 août 2010, la division d’opposition, en se fondant sur la marque internationale antérieure, a partiellement fait droit à l’opposition sur la base de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Elle a, en effet, considéré qu’il existait un risque de confusion en ce qui concerne les « huiles parfumées » et les « sprays désodorisants » qui présentaient, selon son appréciation, une similitude avec les « vaporisateurs de parfums et d’eau de Cologne » visés par la marque internationale antérieure. Elle a, par conséquent, accueilli l’opposition pour ces produits et l’a rejetée pour le surplus.

9        Le 30 septembre 2010, Roca Sanitario a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition, tendant au rejet de la demande de marque communautaire en cause dans son intégralité.

10      Par décision du 9 janvier 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a annulé la décision de la division d’opposition et, dans le dispositif de la décision attaquée, a fait droit à l’opposition pour « tous les produits demandés ». En particulier, la chambre de recours, au point 29 de la décision attaquée, en se fondant sur la marque nationale antérieure, a conclu à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, à l’égard de « tous les produits faisant l’objet du recours ».

11      En premier lieu, la chambre de recours a considéré que le public pertinent était composé de « consommateurs moyens ». En deuxième lieu, s’agissant de la comparaison des produits, elle a conclu à l’existence d’un degré de similitude moyen entre les produits visés par la marque demandée et les « brosses et éponges » visées par la marque nationale antérieure. En troisième lieu, eu égard à la comparaison des signes, elle a considéré, tout d’abord, que ceux-ci présentaient un fort degré de similitude sur le plan visuel, puisque les marques en question comprenaient toutes deux le mot « roca », celui-ci étant l’élément unique de la marque demandée et représentant l’élément dominant, selon la chambre de recours, de la marque nationale figurative antérieure. Par ailleurs, elle a conclu à une identité des signes, d’une part, sur le plan phonétique, considérant que les signes en cause se composaient du même élément verbal, et, d’autre part, sur le plan conceptuel, partant du fait que, pour le public hispanophone, lesdits signes faisaient référence au même concept, celui d’un roc. Enfin, elle a considéré que le caractère distinctif de la marque nationale antérieure était normal pour ce qui concerne les produits pertinents qu’étaient les « brosses et éponges ».

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter l’opposition à sa demande d’enregistrement de marque communautaire.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Observations liminaires

15      Il convient de relever que la division d’opposition et la chambre de recours ne se sont pas fondées sur les mêmes droits antérieurs aux fins de la comparaison avec la marque demandée. En effet, à la différence de la division d’opposition, qui avait effectué son analyse sur la base de la marque antérieure faisant l’objet de l’enregistrement international n° 905212, la chambre de recours a, quant à elle, procédé à la comparaison de la marque demandée avec la marque antérieure faisant l’objet de l’enregistrement espagnol n° 2543451.

16      Cependant, il doit être constaté que l’examen de ces deux instances a porté, en substance, sur les mêmes éléments, aussi bien au regard des produits visés par ces marques, qui correspondent à ceux relevant de la classe 21, que s’agissant des signes faisant l’objet de la comparaison, les signes figuratifs antérieurs partageant tous deux l’élément verbal unique « roca ».

 Sur la recevabilité du recours eu égard à la délimitation de son objet

17      L’OHMI oppose une fin de non-recevoir partielle au recours introduit par la requérante en ce qu’il vise l’ensemble des produits relevant de la classe 3, y compris les produits pour lesquels l’opposition, formée par l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, avait été accueillie devant la division d’opposition. Selon l’OHMI, la demande de la requérante, ne peut, conformément à l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, couvrir un objet du litige plus étendu que celui dont a été saisie la chambre de recours.

18      En effet, selon l’OHMI, l’objet du litige devant la chambre de recours ne comprenait que les produits pour lesquels l’opposition avait été rejetée, excluant ainsi « les huiles parfumées et sprays désodorisants » relevant de la classe 3 pour lesquels l’opposition avait été accueillie devant la division d’opposition. La requérante n’aurait d’ailleurs elle-même pas contesté, devant la chambre de recours, la partie de la décision concernant ces produits et qui ne lui était pas favorable.

19      L’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure dispose que les mémoires des parties ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours.

20      Il convient de vérifier si tel est le cas en l’espèce s’agissant des produits concernés par le présent recours. Aux fins de la détermination de l’objet du litige, il y a lieu de se référer à l’acte de recours et aux chefs de conclusions de la requérante. Il ressort de cette analyse que ledit acte désigne les produits visés par la marque demandée dans une liste faisant apparaître les « huiles parfumées et sprays désodorisants ».

21      Or, il doit être relevé que lesdits produits n’étaient pas compris dans l’objet du litige devant la chambre de recours.

22      En effet, bien que le recours formé devant ladite chambre par Roca Sanitario à l’encontre de la décision de la division d’opposition soit imprécis sur ce point, il est constant que celle-ci ne pouvait, en tout état de cause, exercer un recours contre la partie de cette décision qui faisait droit à son opposition. En effet, il résulte de l’article 59, première phrase, du règlement n° 207/2009, aux termes duquel « toute partie à une procédure ayant conduit à une décision peut recourir contre cette décision pour autant que cette dernière n’a pas fait droit à ses prétentions », que, pour autant que la décision de l’instance inférieure de l’OHMI a fait droit aux prétentions d’une partie, celle-ci n’est pas recevable à former un recours devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 décembre 2011, Völkl/OHMI – Marker Völkl (VÖLKL), T‑504/09, non encore publié au Recueil, point 55, et la jurisprudence citée].

23      La requérante n’a, en outre, jamais objecté au refus d’enregistrement de la marque demandée, décidé par la division d’opposition, pour les produits en question.

24      De plus, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante qu’un recours porté devant le Tribunal en vertu de l’article 65 du règlement n° 207/2009 vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours. En application de l’article 76 dudit règlement, ce contrôle doit se faire au regard du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours [voir arrêt du Tribunal du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Backer (HOOLIGAN), T‑57/03, Rec. p. II‑287, point 17, et la jurisprudence citée].

25      Or, il résulte de ce qui précède que les produits en question n’ont pas fait partie du contexte factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours, d’une part, parce que l’opposition avait été accueillie les concernant et, d’autre part, car la requérante n’a jamais contesté cette partie de la décision de la division d’opposition devant la chambre de recours.

26      Par ailleurs, si le dispositif de la décision attaquée retient le rejet de la marque pour tous les produits, sans exclure spécifiquement ceux pour lesquels l’opposition avait été accueillie devant la division d’opposition, il convient de rappeler que le dispositif d’une décision d’une chambre de recours doit être interprété à la lumière des motifs de fait et de droit qui en constituent le soutien nécessaire [arrêt du Tribunal du 2 juillet 2002, SAT.1/OHMI (SAT.2), T‑323/00, Rec. p. II‑2839, point 15]. Or, il ressort notamment des points 6 et 14 de la décision attaquée que la chambre de recours avait pris acte du fait que l’opposition avait déjà été accueillie à l’égard des produits « huiles parfumées et sprays désodorisants ».

27      Il s’ensuit que la demande de la requérante devant le Tribunal, en ce qu’elle inclut les produits pour lesquels l’opposition avait été accueillie devant la division d’opposition, est de nature à modifier l’objet du litige devant le Tribunal et va à l’encontre de l’article 135, paragraphe 4, de son règlement de procédure.

28      Le grief tiré de l’irrecevabilité partielle de la demande, formé par l’OHMI, doit donc être accueilli.

29      Il en résulte que le contrôle de légalité de la décision attaquée, auquel il convient de procéder en l’espèce, portera sur les produits relevant de la classe 3 visés par la demande de marque communautaire à l’exception des « huiles parfumées et sprays désodorisants ».

 Sur le fond

30      La requérante soutient, tout d’abord, que la définition du public pertinent retenue par l’OHMI est erronée. Elle conteste, ensuite, l’appréciation de la chambre de recours relative à la similitude des produits et fait valoir que cette dernière a conclu à tort à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

31      L’OHMI réfute les arguments de la requérante.

32      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii) et iv), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre et les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans la Communauté européenne, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

33      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI ‑ Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

34      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

35      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il y a lieu d’examiner le moyen unique invoqué par la requérante.

36      En l’espèce, il y a lieu de constater qu’il existe une forte similitude des signes sur le plan visuel, une identité des signes en conflit d’un point de vue conceptuel et phonétique, ainsi qu’un caractère distinctif normal de la marque nationale antérieure pour les produits pertinents que sont les « brosses et éponges ». Ces affirmations, contenues dans la décision attaquée, n’ont, d’ailleurs, pas été remises en cause par les parties.

37      La requérante conteste, en revanche, la définition du public pertinent retenue par la chambre de recours, ainsi que l’appréciation portée par cette dernière sur la similitude des produits et la conclusion qu’elle en a tirée concernant le risque de confusion.

 Sur le public pertinent

38      À titre liminaire, il convient de considérer, à l’instar de ce qu’a relevé la chambre de recours au point 21 de la décision attaquée, et sans que cela soit contesté par les parties, que, la marque sur laquelle est fondée l’opposition étant une marque espagnole, le territoire pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est celui de l’Espagne.

39      Ensuite, au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé que le public pertinent était constitué de « consommateurs moyens ». La requérante réfute ce constat au regard du degré d’attention du public pertinent et affirme que celui-ci se compose exclusivement de l’utilisateur professionnel de produits de nettoyage, qui est dès lors capable de distinguer les produits désignés par la marque demandée des « brosses et éponges » visées par la marque nationale antérieure.

40      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

41      En l’espèce, il convient de relever que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que le public pertinent correspondait, en substance, au grand public, à savoir les consommateurs moyens, qui sont présumés être normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés.

42      En effet, concernant les produits pertinents relevant de la classe 21, et visés par la marque nationale antérieure, que sont les « brosses et éponges », il y a lieu de considérer que, de par leur usage fréquent dans la vie quotidienne, ces produits ne sont pas réservés à des utilisateurs professionnels.

43      S’agissant, ensuite, des produits relevant de la classe 3 visés par la demande de marque communautaire, à savoir les « produits pour laver, polir, nettoyer et entretenir, produits chimiques pour nettoyer et entretenir les véhicules, les machines, les métaux, le bois, la pierre, le verre, la porcelaine, le cuir et les matières plastiques ; produits pour lisser ; cirage pour chaussures ; produits pour entretenir et nettoyer la pierre ; compositions hydrofuges, produits de nettoyage et d’entretien de pierres naturelles et artificielles telles que granite, marbre, pierres lithographiques, terre cuite, grès de porcelaine, terrazzo, etc. », il doit être relevé que certains d’entre eux désignent des produits communs pour le grand public tandis que d’autres peuvent, ainsi que le fait valoir la requérante, présenter des spécificités nécessitant une application particulière à l’aide d’appareils conçus spécialement à cet effet.

44      Néanmoins, il convient de constater que ces spécificités n’impliquent pas que ces produits soient réservés à un public spécialisé. En effet, ceux-ci restent disponibles à la vente en grande surface et à des prix modérés, et peuvent ainsi également être considérés comme des produits de consommation courante.

45      Le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, sera capable de sélectionner son produit en fonction du nettoyage souhaité et de l’appliquer, le choix et l’usage de ces produits n’exigeant pas de compétences professionnelles particulières au regard des différents matériaux visés [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 24 novembre 2004, Henkel/OHMI (Forme d’un flacon blanc et transparent), T‑393/02, Rec. p. II‑4115, point 33 ; du 15 décembre 2005, RB Square Holdings Spain/OHMI – Unelko (clean.x), T‑384/04, non publié au Recueil, point 27 , et du 7 novembre 2007, Marly/OHMI – Erdal (Top iX), T‑57/06, non publié au Recueil, point 47].

46      Enfin, à supposer même que, ainsi que le soutient la requérante, les produits en cause puissent s’adresser aussi bien aux professionnels du secteur du nettoyage qu’au grand public, la chambre de recours n’en aurait pas moins dû apprécier le risque de confusion sur la base du niveau d’attention du grand public. En effet, selon la jurisprudence, ledit risque doit être apprécié à l’égard du public ayant le niveau d’attention le moins élevé [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO Group), T‑221/09, non publié au Recueil, point 21].

 Sur la comparaison des produits

47      À titre liminaire, en premier lieu, il convient de rappeler que la comparaison des produits s’effectue au regard de ceux relevant de la classe 3 que la requérante désigne dans sa demande d’enregistrement de marque communautaire, à l’exclusion des « huiles parfumées et sprays désodorisants », conformément à ce qui a été exposé aux points 19 à 29 ci-dessus. En second lieu, il convient de prendre en compte, aux fins de la comparaison en question, les produits visés par la marque nationale antérieure qui ont été considérés, par la chambre de recours, comme étant pertinents aux fins de cette comparaison, à savoir les « brosses et éponges » relevant de la classe 21, étant entendu que les parties n’ont pas contesté ce constat de la chambre de recours.

48      Selon la jurisprudence, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 37, et la jurisprudence citée].

49      En l’espèce, la requérante fait valoir que les produits visés par sa demande de marque communautaire ne présentent aucune similitude avec les « brosses et éponges » visés par la marque nationale antérieure.

50      D’une part, elle estime que les produits de nettoyage visés par sa demande de marque communautaire ne s’appliquent pas nécessairement à l’aide de brosses ou d’éponges, puisque ce sont pour la plupart des produits de nettoyage spécifiques, nécessitant une application par le biais de machines et d’appareils mécaniques spécialement conçus à cet effet. D’autre part, la requérante conteste les affirmations de la chambre de recours selon lesquelles les produits en cause seraient vendus dans les mêmes types de points de vente, et souvent de façon combinée avec des brosses et des éponges, sauf en ce qu’elle concède cette possibilité s’agissant du cirage pour chaussures. Enfin, elle affirme que les produits diffèrent de par leurs modes de production, ainsi que de par leurs compositions.

51      Selon la requérante, il résulterait de l’absence de similitude entre les produits l’exclusion d’un quelconque risque de confusion entre les marques en question.

52      L’OHMI rejette les arguments de la requérante.

53      Il y a lieu de relever que, s’agissant de la nature des produits en cause, la requérante fait remarquer à juste titre que ceux-ci sont différents dans leurs compositions et dans leurs modes de production. Il est constant que les produits couverts par la marque demandée constituent des substances de nettoyage tandis que les « brosses et éponges » visées par la marque antérieure en sont des outils, traduisant ainsi une différence de nature entre ces produits.

54      Cependant, il importe de constater, comme l’a fait valoir à bon droit l’OHMI, que les produits en question présentent un lien étroit, d’une part, en raison de leur fonction qui est identique et, d’autre part, eu égard au rapport de complémentarité qui les caractérisent.

55      En effet, il convient d’observer que les « brosses et éponges » sont destinées à la même finalité que les produits faisant l’objet de la demande de marque communautaire, correspondant à une activité générale d’entretien.

56      De plus, il doit être constaté que lesdits produits présentent un lien d’interdépendance fonctionnelle évident, puisqu’ils sont généralement utilisés conjointement. Les outils de nettoyage que sont les « brosses et éponges » permettent, en effet, d’appliquer les substances de nettoyage visées par la demande de marque communautaire de la requérante.

57      Cette analyse de la chambre de recours, selon laquelle les produits présentent un caractère complémentaire relativement fort, est conforme à la jurisprudence. En effet, les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels il existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise (voir arrêt easyHotel, point 34 supra, point 57, et la jurisprudence citée).

58      Par ailleurs, la chambre de recours a également considéré, dans la décision attaquée, que le rapport étroit entre les produits du fait de leur finalité analogue et de leur caractère complémentaire était renforcé par le fait que ceux-ci empruntent généralement les mêmes canaux de distribution. Ils sont ainsi, comme le fait valoir à juste titre l’OHMI, susceptibles d’être vendus dans les mêmes points de vente, et également sous forme d’ensemble de produits associant la vente de la substance de nettoyage à une brosse ou à une éponge destinée à son application.

59      Il résulte de ce qui précède que c’est à juste titre que la chambre de recours a pris en compte un degré moyen de similitude entre les produits en cause, qui sont, certes, de nature différente, mais qui présentent une proximité évidente.

60      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les autres arguments avancés par la requérante.

61      En effet, premièrement, la requérante fait valoir que certains produits de nettoyage faisant l’objet de sa demande de marque communautaire, à savoir les substances de nettoyage de pierres naturelles et artificielles, et les produits destinés à entretenir des véhicules, des machines ou encore des métaux, sont le plus souvent appliqués à l’aide d’appareils mécaniques spécialement conçus à cette fin, et non avec des brosses et des éponges.

62      Cependant, il convient de constater que la requérante n’a aucunement étayé par des preuves son argument relatif à la nécessité de l’application des produits de nettoyage en cause à l’aide d’appareils mécaniques spécifiques. Par ailleurs, elle n’a, à aucun moment, soulevé cette question devant l’OHMI. Dès lors, cet argument doit être écarté.

63      Deuxièmement, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir fourni de preuves à l’appui de sa constatation selon laquelle les brosses et les éponges visées par la marque antérieure et les produits couverts par la marque demandée peuvent être vendus dans les mêmes points de vente, voire sous forme d’ensemble de produits.

64      Néanmoins, il convient de rappeler, comme le souligne à juste titre l’OHMI, que les chambres de recours, pour fonder leurs décisions, peuvent s’appuyer, outre sur les faits et preuves présentés par les parties, sur des faits notoires [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 janvier 2013, Gigabyte Technology/OHMI – Haskins (Gigabyte), T‑451/11, non publié au Recueil, point 64]. Selon la jurisprudence, ces faits notoires sont ceux qui sont susceptibles d’être connus par toute personne ou, du moins, peuvent être connus au moyen de sources généralement accessibles [voir arrêt du Tribunal du 20 avril 2005, Atomic Austria/OHMI – Fabricas Agrupadas de Muñecas de Onil (ATOMIC BLITZ), T‑318/03, Rec. p. II‑1319, point 35, et la jurisprudence citée].

65      Ainsi, la chambre de recours a pu raisonnablement considéré qu’il était habituel de constater l’existence d’ensembles de produits de nettoyage disponibles à la vente. La requérante, en se contentant d’affirmer qu’elle ne connaissait pas l’existence de telles ventes combinant les produits en question, n’apporte aucun élément de preuve propre à remettre en cause l’appréciation susmentionnée de la chambre de recours.

66      Sur la base de ce qui précède, il convient de conclure que les produits en question présentent un degré moyen de similitude.

 Sur le risque de confusion

67      Il y a lieu de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p.  II‑5409, point 74].

68      En l’occurrence, compte tenu, d’une part, du constat d’une similitude élevée des signes en cause, et, d’autre part, de l’existence d’éléments de similitude entre les produits en question et eu égard, enfin, au fait que le public pertinent ne présente pas un niveau d’attention particulièrement accru, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion entre les marques en cause dans l’esprit du public pertinent au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

69      Il convient donc de rejeter le moyen unique et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

70      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

71      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Buzil-Werk Wagner GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens.

Kanninen

Soldevila Fragoso

Berardis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 mai 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.