Language of document : ECLI:EU:T:2021:231

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

28 avril 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative PRIMART Marek Łukasiewicz – Marques nationales verbales antérieures PRIMA – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Renvoi »

Dans l’affaire T‑584/17 RENV,

Przedsiębiorstwo Produkcyjno-Handlowe „Primart” Marek Łukasiewicz, établie à Wołomin (Pologne), représentée par M. J. Skołuda, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Palmero Cabezas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Bolton Cile España, SA, établie à Madrid (Espagne), représentée par Mes F. Celluprica, F. Fischetti et F. De Bono, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 22 juin 2017 (affaire R 1933/2016-4), relative à une procédure d’opposition entre Bolton Cile España et Przedsiębiorstwo Produkcyjno-Handlowe „Primart” Marek Łukasiewicz,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, E. Buttigieg et G. Hesse (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 24 août 2017,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 17 novembre 2017,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 12 novembre 2017,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

vu l’arrêt du Tribunal du 12 septembre 2018,

vu l’arrêt de la Cour du 18 juin 2020,

vu les observations de l’EUIPO et de l’intervenante déposées au greffe du Tribunal, respectivement, le 19 et le 13 août 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 27 janvier 2015, la requérante, Przedsiębiorstwo Produkcyjno-Handlowe „Primart” Marek Łukasiewicz, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21), abrogé et remplacé, avec effet au 1er octobre 2017, par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif reproduit ci-après :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci-après l’« arrangement de Nice »), et correspondent à la description suivante : « Sucres, édulcorants naturels, enrobages et fourrages sucrés, produits apicoles ; café, thés, cacao et leurs succédanés ; glace, crèmes glacées, yaourts glacés et sorbets ; sels, assaisonnements, arômes et condiments ; produits de boulangerie, confiserie, chocolat et desserts ; grains transformés, amidons et dérivés, préparations pour boulangerie et levures ; crackers ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2015/022, du 3 février 2015.

5        Le 29 avril 2015, l’intervenante, Bolton Cile España, SA, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

6        Le motif invoqué à l’appui de cette opposition était la présence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001] entre, d’une part, la marque demandée et, d’autre part, la marque espagnole portant sur les produits relevant de la classe 30 de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « Sauces et condiments ; café ; thé ; cacao ; sucre ; riz ; tapioca ; sagou, succédanés du café ; farines et préparations faites de céréales ; pain ; biscuits ; gâteaux ; pâtisserie et confiserie ; glaces comestibles ; miel ; sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; sel ; moutarde ; poivre ; vinaigre ; glace à rafraîchir », enregistrée le 22 septembre 1973 sous le numéro 2578815 et renouvelée le 9 avril 2013 auprès de l’Oficina Española de Patentes y Marcas (Office des brevets et des marques espagnol), dénommée :

« PRIMA »

7        Par décision du 2 septembre 2016, la division d’opposition de l’EUIPO a rejeté l’opposition dans son intégralité au motif qu’il n’existait aucun risque de confusion entre la marque demandée et la marque espagnole antérieure PRIMA sur le marché espagnol.

8        Le 24 octobre 2016, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.

9        Par décision du 22 juin 2017 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition, a accueilli l’opposition, a rejeté la demande de marque et a condamné la requérante à supporter les frais exposés aux fins des procédures d’opposition et de recours. Elle a dans la décision attaquée, pour l’essentiel, conclu qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent (point 28 de la décision attaquée).

  Procédure devant le Tribunal et la Cour

10      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 août 2017, la requérante a formé un recours tendant à l’annulation de la décision attaquée.

11      À l’appui de son recours, elle a invoqué un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

12      Par arrêt du 12 septembre 2018, Primart/EUIPO – Bolton Cile España (PRIMART Marek Łukasiewicz) (T‑584/17, non publié, ci-après l’« arrêt initial », EU:T:2018:530), le Tribunal a rejeté le recours dans son intégralité et confirmé les conclusions de la chambre de recours en ce qui concerne l’existence d’un risque de confusion. Il a notamment jugé, aux points 87 à 90 de l’arrêt initial, que l’argumentation de la requérante relative au caractère distinctif faible de la marque antérieure était irrecevable, compte tenu de l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, dès lors qu’elle avait été avancée pour la première fois devant lui.

13      Par requête déposée au greffe de la Cour le 9 novembre 2018, la requérante a formé un pourvoi contre l’arrêt initial et demandé à la Cour d’annuler celui-ci. À l’appui du pourvoi, elle a soulevé un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

14      Par arrêt du 18 juin 2020, Primart/EUIPO (C‑702/18 P, ci-après l’« arrêt sur pourvoi », EU:C:2020:489), la Cour a annulé l’arrêt initial.

15      Dans l’arrêt sur pourvoi, la Cour a notamment relevé ce qui suit :

« 41            À cet égard, il est vrai que, aux termes mêmes de l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, l’examen de l’EUIPO est, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties, de sorte que la chambre de recours ne saurait fonder sa décision que sur les motifs relatifs de refus que la partie concernée a invoqués ainsi que sur les faits et les preuves s’y rapportant présentés par les parties. Il n’en demeure pas moins que, ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général aux points 49 à 51 et 58 de ses conclusions, la chambre de recours est tenue de trancher toutes les questions qui, au regard des moyens et des demandes présentés par les parties, sont nécessaires pour assurer une application correcte de ce règlement et à l’égard desquelles elle dispose de tous les éléments nécessaires pour pouvoir statuer, même si aucun élément de droit se rapportant à ces questions n’a été invoqué par les parties devant elle.

42            Compte tenu de cette obligation qui incombe à la chambre de recours, l’article 76 du règlement no 207/2009 et l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal ne sauraient être interprétés en ce sens que des arguments visant à remettre en cause des considérations de la chambre de recours portant sur des questions sur lesquelles elle doit nécessairement se prononcer ne font pas partie de l’objet du litige devant le Tribunal s’ils n’ont pas été avancés au cours de la procédure devant la chambre de recours.

43            Or, dans le cadre d’une procédure d’opposition fondée sur l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, l’appréciation du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure constitue une question de droit nécessaire pour assurer l’application correcte de ce règlement, de telle sorte que les instances de l’EUIPO sont tenues d’examiner cette question, au besoin d’office. Cette appréciation ne supposant aucun élément de fait qu’il appartiendrait aux parties de fournir et n’étant pas subordonnée à la présentation par les parties de moyens ou d’arguments visant à établir ce caractère, l’EUIPO est à même, seul, de détecter et d’apprécier son existence au vu de la marque antérieure sur laquelle est fondée l’opposition. Partant, cette question fait partie de l’objet du litige devant la chambre de recours, au sens de l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal.

44            Partant, le raisonnement du Tribunal figurant aux points 87 à 90 de l’arrêt attaqué méconnaît la portée de l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009. » 

16      Sur la base de cette appréciation, la Cour a annulé l’arrêt initial, renvoyé la présente affaire devant le Tribunal et a réservé les dépens.

 Procédure et conclusions des parties après renvoi

17      Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement les 19 et 13 août 2020, l’EUIPO et l’intervenante ont fait valoir leurs observations sur les conclusions à tirer de la décision de la Cour de justice pour la solution du litige, conformément à l’article 217, paragraphe 1, du règlement de procédure.

18      Dans leurs observations, l’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

19      La requérante n’a pas déposé d’observations dans le délai imparti.

 En droit

20      Il y a lieu de rappeler, d’emblée, que le règlement no 207/2009 a été modifié par le règlement 2015/2424 lequel est entré en vigueur le 23 mars 2016. Le règlement no 207/2009, tel que modifié par le règlement 2015/2424, a été abrogé et remplacé, avec effet au 1er octobre 2017, par le règlement 2017/1001. Néanmoins, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 27 janvier 2015, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009, dans sa version initiale (voir, en ce sens, arrêt du 4 juillet 2019, FTI Touristik/EUIPO, C‑99/18 P, EU:C:2019:565, point 2).

21      La requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

22      Il y a lieu de rappeler, d’emblée, que, en cas d’opposition fondée sur une marque antérieure individuelle, le risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, s’entend comme étant le risque que le public puisse croire que les produits ou les services visés par cette marque et ceux visés par la marque demandée proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement (voir arrêt du 11 juin 2020, China Construction Bank/EUIPO, C‑115/19 P, EU:C:2020:469, point 54 et jurisprudence citée).

23      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42].

 Sur la comparaison des produits en cause

24      S’agissant de la comparaison des produits, la chambre de recours a conclu, au point 16 de la décision attaquée, que les produits en cause, relevant de la classe 30 de l’arrangement de Nice, étaient tous identiques, hautement similaires ou similaires à un degré moyen aux produits antérieurs. Cette conclusion n’est pas contestée par les parties.

 Sur le public pertinent et le niveau d’attention

25      Il convient d’indiquer, d’emblée, que la chambre de recours a considéré, au point 12 de la décision attaquée, que le public pertinent était constitué du grand public en Espagne. Cette considération n’est pas contestée par les parties.

26      Ensuite, la chambre de recours a considéré, au point 26 de la décision attaquée, que le niveau d’attention du public pertinent pour les produits en cause était moyen, voire inférieur à la moyenne, compte tenu de la nature desdits produits.

27      Selon la requérante, c’est à tort que la chambre de recours a considéré que le niveau d’attention du public pertinent était inférieur à la moyenne. Elle fait valoir que, même si le niveau d’attention était inférieur à la moyenne pour certains produits, en particulier pour les denrées alimentaires qui sont achetées sur une base quotidienne, la chambre de recours aurait dû faire une distinction entre les produits en cause et indiquer quels étaient les produits à l’égard desquels le consommateur moyen était censé avoir un niveau d’attention plus faible.

28      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

29      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 11 novembre 2020, Deutsche Post/EUIPO – Pošta Slovenije (Représentation d’un cor stylisé), T‑25/20, non publié, sous pourvoi, EU:T:2020:537, point 19 et jurisprudence citée].

30      Force est de constater, d’abord, que l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours aurait considéré que le niveau d’attention du public pertinent était inférieur à la moyenne procède d’une lecture partiellement erronée de la décision attaquée, dont le point 26 précise que « le niveau d’attention du public pertinent pour les produits […] concernés est moyen, voire inférieur à la moyenne, compte tenu de la nature des produits ».

31      Ensuite, s’agissant de la catégorie de produits en cause, il importe de relever que ceux-ci sont tous des produits alimentaires de consommation courante, voire quotidienne, à bas coût et achetés fréquemment.

32      Il résulte d’une jurisprudence constante que le niveau d’attention du public pertinent, s’agissant de produits de ladite catégorie, peut être qualifié de relativement faible et tout au plus de moyen [voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2017, Freddo/EUIPO – Freddo Freddo (freggo), T‑243/16, non publié, EU:T:2017:522, points 26 et 28, et du 13 mai 2020, Rot Front/EUIPO – Kondyterska korporatsiia « Roshen » (РОШЕН), T‑63/19, non publié, EU:T:2020:195, point 22].

33      En outre, cette jurisprudence apprécie l’attention du public pertinent en considérant les produits relevant de la classe 30 de l’arrangement de Nice sans établir de distinction entre ceux-ci. En l’espèce, les produits en cause sont tous des produits alimentaires de consommation courante, voire quotidienne, peu onéreux et achetés fréquemment. La requérante ne justifie aucunement son allégation suivant laquelle il y aurait lieu, en l’espèce, de s’écarter de cette jurisprudence et de suivre un raisonnement différent selon les produits en cause.

34      Il s’ensuit que l’argumentation de la requérante ne saurait prospérer et il y a lieu, partant, de constater que la chambre de recours était fondée à considérer que le niveau d’attention du public pertinent pour les produits en cause était moyen, voire inférieur à la moyenne, compte tenu de la nature desdits produits.

 Sur la comparaison des marques en conflit

35      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 4 mars 2020, EUIPO/Equivalenza Manufactory, C‑328/18 P, EU:C:2020:156, point 58 et jurisprudence citée).

36      En particulier, la Cour a jugé que, dans le cadre de l’examen de l’existence d’un risque de confusion, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne pouvait se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base d’un élément dominant (voir arrêt du 28 février 2019, Groupe Léa Nature/EUIPO, C‑505/17 P, non publié, EU:C:2019:157, points 37 et 38 et jurisprudence citée).

 Sur les éléments distinctifs et dominants de la marque demandée

37      Selon la chambre de recours, au point 19 de la décision attaquée, le mot « primart » constituait l’élément le plus distinctif et dominant de la marque demandée. Elle a relevé, à cet égard, que la marque demandée comportait le mot « primart », écrit en lettres capitales blanches et en caractères gras, avec un bord bleu. Le mot apparaît sur un fond constitué d’un carré rouge bordé de bleu. Sous celui-ci se trouve une bande rouge dans laquelle figurent les noms propres Marek Łukasiewicz, écrits en caractères manuscrits blancs très petits. En raison de leur taille et de leur présentation, ces mots sont à peine lisibles, selon la chambre de recours, et revêtent donc peu d’importance dans l’impression d’ensemble produite par la marque contestée. Ils pourraient même passer complètement inaperçus. La chambre de recours a relevé, enfin, que, étant donné que le consommateur était habitué à se concentrer sur les éléments textuels d’une marque et que les éléments figuratifs de la marque en cause étaient purement décoratifs, ceux-ci jouaient également un rôle secondaire.

38      La requérante conteste cette appréciation. Selon elle, la conclusion de la chambre de recours suivant laquelle le mot « primart » avait un caractère dominant, est erronée. Elle fait valoir, à cet égard, que, premièrement, les marques doivent être perçues comme un tout et aucun élément ne peut être omis par celle-ci, deuxièmement, le consommateur moyen est supposé être raisonnablement attentif et percevra donc tous les éléments de la marque en cause, troisièmement, les mots « marek łukasiewicz » correspondent au nom de la requérante et indiquent clairement l’origine des produits et, enfin, quatrièmement, la taille de ces mots est seulement inférieure de 50 % à celle du mot « primart », ils sont écrits en caractères blancs sur fond rouge et ils seront dès lors clairement visibles sur les emballages.

39      Partant, selon la requérante, c’était à tort que la chambre de recours n’a pas tenu compte des mots « marek łukasiewicz » lors de l’appréciation visuelle, phonétique et conceptuelle de la similitude des marques en cause et la décision attaquée est dès lors entachée d’erreur.

40      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

41      S’agissant, tout d’abord, du caractère distinctif et dominant du mot « primart » dans la marque demandée, il convient de constater que celle-ci se compose, d’une part, du mot « primart » écrit en caractères larges et de couleur blanche entourés d’un liseré bleu et, d’autre part, des mots « marek łukasiewicz » écrits en caractères italiques fins et blancs sur fond rouge, ces mots étant placés sous le mot « primart » et rédigés dans une police de caractères nettement plus petite que celle utilisée pour le mot « primart ». En arrière-plan des lettres « i », « m », « a » du mot « primart » figure un losange de couleur rouge entouré d’un liseré bleu.

42      Dans ces conditions, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que les éléments figuratifs de la marque demandée étaient purement décoratifs et ne jouaient dès lors qu’un rôle secondaire. En outre, c’est sans commettre d’erreur qu’elle a constaté que les mots « marek łukasiewicz » étaient, en raison de leur taille et de leur présentation, à peine lisibles et revêtaient donc peu d’importance dans l’impression d’ensemble produite par la marque demandée, voire pouvaient passer complètement inaperçus.

43      La conclusion de la chambre de recours suivant laquelle le mot « primart », compte tenu de la taille et du lettrage de ses caractères et de sa place prédominante dans la marque demandée, constituait l’élément le plus distinctif et dominant de celle-ci est donc justifiée.

44      Contrairement à ce que fait valoir la requérante, le fait que la chambre de recours a conclu que les éléments figuratifs de la marque demandée ainsi que les mots « marek łukasiewicz » n’étaient pas susceptibles de détourner l’attention du public pertinent de l’élément verbal « primart » ne signifie aucunement que ces éléments aient été négligés dans la comparaison visuelle globale des marques en conflit. Au contraire, ainsi qu’il résulte du point 37 ci-dessus, la chambre de recours a pris en considération tant les éléments figuratifs de la marque demandée que ses éléments verbaux « primart » et « marek łukasiewicz ». Partant, l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas examiné la marque demandée dans son ensemble manque en fait.

45      Les autres arguments avancés par la requérante ne sauraient infirmer ce qui précède. En effet, l’argumentation suivant laquelle les mots « marek łukasiewicz » correspondent au nom de la requérante et figurent dans le nom de la société de la requérante et indiqueraient clairement l’origine des produits est dénuée de toute pertinence quant à savoir si le mot « primart » a un caractère plus distinctif et dominant dans la marque demandée que les autres éléments verbaux et figuratifs qui y figurent. Il y a dès lors lieu de la rejeter également.

 Sur la comparaison visuelle

46      Sur le plan visuel, la chambre de recours a considéré, au point 20 de la décision attaquée, que les marques étaient similaires à un degré moyen, dans la mesure où la marque antérieure PRIMA était hautement similaire à l’élément distinctif et dominant « primart » de la marque demandée, les cinq premières lettres étant identiques et reproduites dans le même ordre et le mot « primart » de la marque demandée ne différant du mot « prima » que par les deux lettres « r » et « t ».

47      La requérante conteste ces appréciations et fait valoir en substance que, dans la mesure où c’est à tort que la chambre de recours a considéré que le mot « primart » était dominant dans la marque demandée et a négligé de prendre en considération les autres éléments de la marque demandée, l’appréciation de la similitude visuelle des marques en cause était entachée d’erreur.

48      L’EUIPO et l’intervenante objectent que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les marques en conflit étaient visuellement similaires à un degré moyen.

49      Pour les motifs déjà évoqués aux points 41 à 45 ci-dessus, il y a lieu de rejeter l’argumentation avancée par la requérante relative au caractère dominant du mot « primart » et de l’absence de prise en considération par la chambre de recours des autres éléments verbaux et figuratifs de la marque demandée. Cette appréciation est d’ailleurs confirmée par la teneur du point 20 de la décision attaquée dans lequel la chambre de recours précise que « la marque contestée diffère également par ses éléments figuratifs et par les caractères manuscrits ajoutés sous le mot “primart” qui n’ont pas d’équivalents dans la marque antérieure mais que ces éléments ne jouent qu’un rôle secondaire ».

50      En outre, ainsi que la chambre de recours l’a relevé à juste titre, la marque antérieure PRIMA est entièrement reproduite dans l’élément verbal dominant de la marque demandée « primart », les cinq premières lettres des deux signes sont identiques et reproduites dans le même ordre, les marques en conflit ne se distinguent que par les deux dernières lettres de l’élément « primart » et les éléments figuratifs ainsi que l’élément verbal « marek łukasiewicz » ne jouent qu’un rôle secondaire.

51      Partant, il y a lieu d’approuver l’appréciation de la chambre de recours suivant laquelle les marques en cause sont visuellement similaires à un degré moyen.

 Sur la comparaison phonétique

52      S’agissant de la comparaison phonétique des marques en cause, la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée, que les marques présentaient un degré de similitude supérieur à la moyenne dans la mesure où les caractères manuscrits indistincts et tout petits apparaissant sous le mot « primart », à savoir les mots « marek łukasiewicz », ne seraient pas prononcés. La marque demandée serait ainsi prononcée « pri-mart » et la marque antérieure « pri-ma ».

53      La requérante conteste cette appréciation. Elle a réitéré son argument selon lequel la chambre de recours a commis une erreur en considérant que le mot « primart » avait un caractère dominant et qu’il n’y avait pas lieu de prendre en considération l’autre élément verbal « marek łukasiewicz ». La prise en considération de ces mots conduirait à constater une similitude plus faible entre les marques en cause, les mots « marek łukasiewicz » ayant une incidence sur la longueur, le rythme et les intonations de celles-ci les rendant différentes, eu égard au fait que la marque antérieure est composée de deux syllabes et la marque demandée de huit syllabes. Enfin, même sans tenir compte des mots « marek łukasiewicz », les seuls mots « prima » et « primart » ne sauraient être considérés comme présentant une similitude phonétique élevée. En effet, selon la requérante, pour le consommateur hispanophone, l’accent tonique serait placé sur la première syllabe du mot « prima », car il se termine par une voyelle et sur la seconde syllabe du mot « primart », car il se termine par la lettre « t ». Or, le consommateur retiendrait la syllabe accentuée, distinguant ainsi les marques en cause.

54      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

55      Il convient d’écarter l’argumentation de la requérante suivant laquelle la chambre de recours aurait considéré que le mot « primart » avait un caractère dominant et qu’il n’y avait pas lieu de prendre en considération l’autre élément verbal « marek łukasiewicz » pour les motifs retenus aux points 41 à 45 ci-dessus.

56      Au contraire, force est de constater que la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée que, « sur le plan phonétique, les caractères manuscrits indistincts et très petits qui apparaissent sous le mot “primart” ne seront pas prononcés », ce qui implique qu’elle les a bien pris en considération.

57      En outre, il convient de relever que la requérante n’a avancé aucun autre argument visant à remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours suivant laquelle les mots « marek łukasiewicz », compte tenu de leur positionnement en lettres italiques de couleur blanche de petite taille sous le mot « primart » figurant en caractères nettement plus grands et plus lisibles, ne seraient pas prononcés

58      Ainsi qu’il résulte des points 41 à 45 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le mot « primart » était le plus distinctif et dominant de la marque demandée. C’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que les mots « marek łukasiewicz », compte tenu de leur positionnement en lettres italiques de couleur blanche de petite taille sous l’élément distinctif « primart », ne seraient pas prononcés par les consommateurs espagnols.

59      Quant à la comparaison phonétique des mots « prima » et « primart », il y a lieu de rappeler que, suivant une jurisprudence constante, le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots [arrêt du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, EU:T:2004:79, points 81 et 83 ; voir, également, arrêt du 23 septembre 2020, UE/Commission, T‑338/19, EU:T:2020:430, point 53 et jurisprudence citée].

60      En l’occurrence, il y a lieu de relever que la première syllabe de la marque antérieure et de l’élément dominant de la marque contestée, à savoir « pri », est identique, tandis que leur seconde syllabe, respectivement « ma » et « mart » est très similaire, car leur début et la voyelle « a » sont les mêmes. Eu égard à la jurisprudence citée au point 59 ci-dessus, le consommateur attachera donc une importance plus grande à la similitude entre les marques en conflit créée par le son initial « prima ». Cette similitude n’est pas infirmée par les lettres « r » et « t » constituant la terminaison de la marque demandée quand bien même ces consonnes seraient prononcées. De même, l’argumentation de la requérante relative au fait qu’en espagnol l’accent est mis sur la première syllabe du mot « prima » mais sur la seconde syllabe du mot « primart » n’est pas de nature à remettre en cause le degré de similitude supérieur à la moyenne des marques en conflit sur le plan phonétique.

61      L’appréciation de la chambre de recours à cet égard doit par conséquent être approuvée.

 Sur la comparaison conceptuelle

62      Il convient de rappeler que, au point 22 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, s’agissant de la comparaison conceptuelle, que les marques n’étaient pas similaires sur ce plan. Cette conclusion n’a pas été contestée de manière explicite par la requérante.

63      Dans la mesure où la requérante réitère son argumentation suivant laquelle la chambre de recours avait considéré à tort que le mot « primart » avait un caractère dominant et qu’il n’y avait pas lieu de prendre en considération l’autre élément verbal « marek łukasiewicz », force est de relever que cette argumentation doit être écartée pour les motifs retenus aux points 41 à 45 ci-dessus.

64      Partant, les griefs soulevés par la requérante en ce qui concerne la comparaison des marques sur les plans visuel, phonétique et conceptuel doivent être écartés comme étant non fondés.

 Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

65      La chambre de recours considère que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure par rapport aux produits en cause est moyen. Il résulte à cet égard d’une lecture combinée des points 22 et 27 de la décision attaquée que, selon la chambre de recours, le mot « prima » signifie « cousine » ou « prime » pour le consommateur espagnol pertinent, et que ledit consommateur ne comprendra pas ce mot comme un mot marquant l’excellence d’un produit, comme c’est le cas dans d’autres langues de l’Union européenne.

66      La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours et fait valoir devant le Tribunal, en substance, que la marque antérieure ne possédait qu’un caractère distinctif faible.

67      L’EUIPO soutient d’emblée que la requérante avance pour la première fois devant le Tribunal le faible caractère distinctif du mot « prima ». Elle souligne, en outre, qu’aucune des références aux sites Internet produites en tant que documents justificatifs annexés à la requête (annexes A.5 à A.9) n’a été déposée devant lui et que la requérante s’est cantonnée à affirmer, devant la division d’opposition, que, « en espagnol, le terme “prima” signifi[ait] “prime” ou “cousine” » (voir page 1819, deuxième paragraphe, du dossier de la chambre de recours), ce qui correspond aux significations reconnues par la chambre de recours au point 22 de la décision attaquée.

68      En outre, dans ses observations sur la poursuite de la procédure, l’EUIPO fait valoir que les arguments de la requérante portant sur le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure sont irrecevables, dans la mesure où elles peuvent être comprises comme demandant au Tribunal d’apprécier, dans l’hypothèse où il considérerait que l’argumentation de la requérante visée au point 66 ci-dessus est fondée, également le caractère distinctif acquis par l’usage de la marque antérieure, invoqué par l’intervenante devant la chambre de recours. L’EUIPO rappelle que la chambre de recours avait estimé, à cet égard, au point 30 de la décision attaquée, qu’il n’était pas nécessaire d’apprécier les éléments de preuve produits par l’intervenante pour démontrer que la marque antérieure présentait un caractère distinctif accru en raison de la connaissance de celle-ci sur le marché.

69      Il y a lieu de relever, premièrement, que, pour les motifs cités au point 15 ci-dessus, les arguments en cause et les preuves produites à l’appui de ceux-ci ne sauraient être considérés comme irrecevables du fait qu’ils n’avaient pas été portés auparavant devant la chambre de recours. En effet, la Cour a statué dans l’arrêt sur pourvoi qu’il incombait au Tribunal de tenir compte de ces arguments en vertu de l’article 76 du règlement no 207/2009 et de l’article 188 du règlement de procédure, au motif que l’appréciation du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure faisait partie de l’objet du litige devant la chambre de recours, indépendamment de la question de savoir si les parties ont porté des faits et des preuves s’y rapportant devant cette chambre.

70      Ensuite, il est vrai que les arguments de l’intervenante relatifs au prétendu caractère distinctif accru de la marque antérieure, soulevés devant la chambre de recours, n’ont pas été pris en compte par cette chambre, l’existence d’un risque de confusion ayant déjà été établie selon celle-ci. Dans l’hypothèse où le Tribunal considérerait que la chambre de recours aurait fait une erreur en considérant que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure était moyen, ces arguments relatifs au caractère distinctif accru par l’usage devraient être pris en compte. Toutefois, le Tribunal est tenu, en l’occurrence, dans le cadre de l’examen de la légalité de la décision attaquée, d’établir si la chambre de recours, dans le cadre de son appréciation du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, a fait une erreur en ne retenant que deux significations du mot « prima », à savoir « cousine » et « prime ». L’argument avancé par l’EUIPO ne saurait donc prospérer et l’argumentation de la requérante est recevable.

71      Selon la requérante, la chambre de recours a méconnu que le consommateur espagnol pertinent percevait le mot « prima » comme une référence à la qualité des produits en cause ou à des caractéristiques constituant un avantage, de sorte que ce mot aurait un caractère distinctif faible. Elle rappelle à cet égard l’origine latine du mot « prima » lequel signifierait « premier, [le] plus important/meilleur, principal » et considère qu’il s’agit d’un terme bien connu des personnes parlant une langue romane, ce qui inclut la langue espagnole.

72      Se référant à certains sites Internet, elle allègue que ce mot est utilisé en espagnol, notamment sous la forme d’expressions idiomatiques telles que « venta con prima », « de prima calidad » et « materia prima »,  et en déduit que les consommateurs espagnols percevront le mot « prima » comme une référence à une qualité supérieure ou comme indiquant que les produits revêtus de ce signe constituent une prime liée à la vente d’un autre produit.

73      Elle conclut cette argumentation en se référant aux directives d’examen de l’EUIPO qui mentionnent qu’une coïncidence dans un élément faiblement distinctif ne conduira généralement pas à reconnaître un risque de confusion.

74      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

75      Il convient de rappeler, d’emblée, que, selon la jurisprudence, aux fins d’apprécier le caractère distinctif d’une marque ou d’un élément composant une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cette marque ou de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de la marque ou de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [voir arrêt du 14 septembre 2017, Aldi Einkauf/EUIPO – Weetabix (Alpenschmaus), T‑103/16, non publié, EU:T:2017:605, point 48 et jurisprudence citée].

76      Ainsi, le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important. Par conséquent, comme la protection d’une marque enregistrée dépend, selon l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, de l’existence d’un risque de confusion, les marques qui ont un caractère distinctif élevé soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18).

77      Force est de constater, tout d’abord, qu’il n’est pas contesté entre les parties que le mot « prima » signifie « cousine » ou « prime » en espagnol, ainsi qu’il ressort également du point 22 de la décision attaquée.

78      Toutefois, selon la requérante, pour le consommateur espagnol moyen, le mot « prima » revêt également un caractère élogieux pour les produits en cause. En outre, ce mot serait de nature à transmettre l’idée d’un bonus, eu égard notamment à l’expression espagnole « venta con prima ».

79      Or, s’agissant, premièrement, de ce dernier usage du mot « prima » (prime ou bonus), l’EUIPO fait valoir à juste titre que cet usage correspond à l’une des significations (bonus) que la chambre de recours a déjà considérée comme étant dépourvue de tout lien avec les produits en cause et la requérante n’a pas fourni de raisons convaincantes permettant d’aboutir à une conclusion différente. Ainsi, la requérante affirme que les consommateurs considéreront ce mot comme étant une indication que les produits portant ce signe constituent un bonus, un cadeau gratuit, lié à la vente d’un autre produit, ce qui est contradictoire avec le fait que ces produits sont censés être commercialisés sur le marché, ainsi que l’a souligné à juste titre l’EUIPO.

80      S’agissant, deuxièmement, de la prétendue connotation laudative du mot « prima » en espagnol, il doit être relevé que, certes, comme l’a constaté la chambre de recours, le mot « prima » est compris comme marquant l’excellence dans certaines langues de l’Union européenne.

81      Tel est, par exemple, le cas en allemand et en néerlandais, langues dans lesquelles l’expression « prima », invariable, revêt clairement un caractère élogieux [voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2015, Primagaz/OHMI – Reeh (PRIMA KLIMA), T‑195/14, non publié, EU:T:2015:681, point 60].

82      En outre, ainsi que l’a relevé la requérante, l’élément verbal « prima » pouvait être associé à l’adjectif latin « primus » (premier) ainsi qu’à des mots existants dans ces langues et qui trouvent leurs racines dans ledit adjectif latin, tels que les mots « prima » en espagnol (voir, par analogie, arrêt du 24 septembre 2015, PRIMA KLIMA, T‑195/14, non publié, EU:T:2015:681, point 61).

83      Quand bien même il ne saurait donc être exclu qu’une partie du public pertinent comprenne le mot « prima » comme « premier », il y a lieu de rappeler que le mot latin « primus » (prima au féminin) est, avant tout, un adjectif numéral ordinal, qui ne véhicule pas immédiatement une idée d’excellence [voir, en ce sens, arrêts du 24 septembre 2015, PRIMA KLIMA, T‑195/14, non publié, EU:T:2015:681, point 62, et du 9 septembre 2020, Novomatic/EUIPO – Brouwerij Haacht (PRIMUS), T‑669/19, non publié, EU:T:2020:408, point 41].

84      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que le grand public espagnol, lorsqu’il est confronté au mot « prima », y retrouve certainement le mot de sa langue signifiant « cousine » ou « prime », mais ne considère pas ce mot comme adjectif ayant une simple connotation élogieuse.

85      Les captures d’écran d’un nombre de sites Internet, produites par la requérante en tant qu’annexes A.5 à A.9, ne sauraient infirmer ce qui précède. Ainsi, la page du « Latin dictionary » (annexe A.5) n’est pas pertinente, étant donné qu’elle concerne la traduction du mot latin « primus » vers l’anglais et non vers l’espagnol. Les captures d’écran des sites Internet relatives à l’expression « venta con prima » (annexe A.6) ne sont pas non plus susceptibles de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours, pour les raisons déjà exposées au point 79 ci-dessus. Ensuite, les copies des sites Internet figurant à l’annexe A.7 portent sur l’expression espagnole « materias primas » (matières premières) et celles produites en tant qu’annexe A.9 comportent l’expression latine « prima facie ». Or, le mot « prima » y est utilisé comme l’élément d’une expression indivisible qui a une signification dans sa globalité, sans que cette signification ait un lien avec la nature des produits en cause. En outre, l’adjectif « prima », employé en tant qu’élément desdites expressions idiomatiques, ne revêt pas de connotation laudative. S’agissant, enfin, de l’expression « de prima calidad », qui figure sur cinq captures d’écran (annexe A.8), la chambre de recours a relevé à bon droit qu’elle était grammaticalement incorrecte en espagnol, l’expression correcte étant « de primera calidad ».

86      Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré, au point 27 de la décision attaquée, que, faute de signification de la marque antérieure par rapport aux produits en cause, le caractère distinctif intrinsèque de celle-ci était moyen.

 Sur l’absence de position distinctive autonome de l’élément commun « prima » dans la marque demandée

87      La requérante considère qu’il résulte de l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594), que l’appréciation du risque de confusion, lorsque la marque antérieure est intégralement reprise dans la marque demandée, devrait tenir compte du fait que cette marque antérieure revêt un rôle distinctif autonome dans la marque demandée. Inversement, en l’occurrence, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte du fait que l’élément commun aux marques en cause, à savoir l’élément « prima », ne possédait pas de position distincte autonome dans la marque demandée.

88      À cet égard, la requérante fait valoir qu’il est peu probable que le consommateur moyen décompose le mot « primart » en un élément « prima » et les lettres « r » et « t ». Au contraire, il appréhendera le mot « primart » comme un tout indivisible ou bien le décomposera en un élément « pri » et un élément « mart » ou encore un élément « prim » et un élément « art ».

89      Ainsi, selon la requérante, une simple coïncidence dans une séquence de lettres n’est pas suffisante pour établir une similitude et les décisions de l’EUIPO ne devraient pas être fondées sur le simple fait qu’un signe est contenu dans l’autre, ce que confirmeraient au demeurant certaines décisions de celui-ci.

90      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

91      Certes, il ressort de la jurisprudence invoquée par la requérante qu’il n’est pas exclu qu’une marque antérieure, utilisée par un tiers dans un signe composé comprenant la dénomination de l’entreprise de ce tiers, conserve une position distinctive autonome dans le signe composé et qu’il suffit, dès lors, aux fins de la constatation d’un risque de confusion, que, en raison de la position distinctive autonome conservée par la marque antérieure, le public attribue également au titulaire de cette marque l’origine des produits ou des services couverts par le signe composé (voir arrêt du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 24 et jurisprudence citée).

92      La requérante considère en substance, a contrario, que, en l’espèce, la marque antérieure ne conserverait pas une position distinctive autonome dans la marque demandée et que, par conséquent, une simple coïncidence dans la suite de lettres « p », « r », « i », « m » et « a » dans la marque demandée ne serait pas suffisante pour établir un risque de confusion.

93      Selon une jurisprudence constante, il est indispensable dans chaque cas individuel de déterminer, au moyen, notamment, d’une analyse des composants d’un signe et de leur poids relatif dans la perception du public visé, l’impression d’ensemble produite par le signe dont l’enregistrement est demandé dans la mémoire dudit public et de procéder ensuite, à la lumière de cette impression d’ensemble et de tous les facteurs pertinents de l’espèce, à l’appréciation du risque de confusion [voir arrêt du 26 juillet 2017, Meica/EUIPO, C‑182/16 P, non publié, EU:C:2017:600, point 58 et jurisprudence citée ; arrêt du 16 novembre 2017, Galletas Gullón/EUIPO – Hug (GULLON DARVIDA), T‑456/16, non publié, EU:T:2017:811, point 82].

94      Dès lors, l’appréciation individuelle de chaque signe, telle que requise par la jurisprudence de la Cour, doit être effectuée en fonction des circonstances particulières de l’espèce et ne saurait, par conséquent, être considérée comme soumise à des présomptions générales (arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 36, et du 26 juillet 2017, Meica/EUIPO, C‑182/16 P, non publié, EU:C:2017:600, point 59).

95      L’argumentation selon laquelle il suffirait, pour constater un risque de confusion sur la base de la position distinctive autonome d’un élément de la marque demandée, que certains facteurs soient présents doit être rejetée comme étant non fondée (arrêt du 26 juillet 2017, Meica/EUIPO, C‑182/16 P, non publié, EU:C:2017:600, point 60).

96      Partant, l’argumentation selon laquelle il suffirait, pour écarter un risque de confusion, de se prévaloir de l’absence de position distinctive autonome d’une marque antérieure dans la marque demandée, ne saurait être suivie.

97      L’appréciation individuelle de chaque marque doit, en revanche, être effectuée en fonction des circonstances particulières de l’espèce.

98      En l’occurrence, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que, bien que le groupe de lettres « prima », qui compose intégralement la marque antérieure, n’occupe pas une position distinctive autonome au sein de l’élément dominant « primart » de la marque demandée, il contribue de manière significative à l’impression d’ensemble produite par celle-ci dans la mesure où il constitue les cinq septièmes de ce signe et ne s’en distingue que par deux consonnes placées à la fin de cet élément [voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2015, Vimeo/OHMI – PT Comunicações (VIMEO), T‑96/14, non publié, EU:T:2015:799, point 68].

99      Quant à la prétendue absence de cohérence, au demeurant seulement évoquée et non explicitée, entre la décision attaquée et certaines décisions antérieures de l’EUIPO invoquées par la requérante dans lesquelles une importance accrue aurait, selon elle, été accordée à la position distinctive autonome d’un élément de la marque demandée, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, les décisions que les chambres de recours sont conduites à prendre en vertu du règlement no 207/2009 concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO doit être appréciée uniquement sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (voir ordonnance du 14 avril 2016, KS Sports/EUIPO, C‑480/15 P, non publiée, EU:C:2016:266, point 36 et jurisprudence citée).

100    En outre, si l’EUIPO doit prendre en considération les décisions déjà adoptées et s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, le respect du principe de légalité impose que l’examen de toute demande d’enregistrement soit strict et complet et ait lieu dans chaque cas concret, l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne dépendant de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles de chaque cas d’espèce (voir ordonnance du 14 avril 2016, KS Sports/EUIPO, C‑480/15 P, non publiée, EU:C:2016:266, point 37 et jurisprudence citée).

101    Il y a donc lieu de rejeter l’argumentation de la requérante.

 Sur le risque de confusion

102    Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42].

103    Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir arrêt du 15 octobre 2020, Rothenberger/EUIPO – Paper Point (ROBOX), T‑49/20, non publié, EU:T:2020:492, point 57 et jurisprudence citée].

104    Or, dans l’appréciation globale du risque de confusion, les aspects visuel, auditif ou conceptuel des signes en conflit n’ont pas toujours le même poids. Il importe d’analyser les conditions objectives dans lesquelles les marques peuvent se présenter sur le marché. L’importance des éléments de similitude ou de différence des signes peut dépendre, notamment, des caractéristiques intrinsèques de ceux‑ci ou des conditions de commercialisation des produits ou des services que les marques en conflit désignent. Si les produits désignés par les marques en cause sont normalement vendus dans des magasins en libre-service où le consommateur choisit lui-même le produit et doit, dès lors, se fier principalement à l’image de la marque appliquée sur ce produit, une similitude visuelle des signes sera, en règle générale, d’une plus grande importance. Si, en revanche, le produit visé est surtout vendu oralement, il sera normalement attribué plus de poids à une similitude auditive des signes [arrêt du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, EU:T:2004:293, point 49].

105    Il est également de jurisprudence constante que l’existence d’un risque de confusion doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir arrêt du 5 mars 2020, Foundation for the Protection of the Traditional Cheese of Cyprus named Halloumi/EUIPO, C‑766/18 P, EU:C:2020:170, points 63 et 67 et jurisprudence citée).

106    Figure au nombre des facteurs pertinents du cas d’espèce notamment le degré du caractère distinctif de la marque antérieure, qui détermine l’étendue de la protection conférée par celle-ci. Lorsque le caractère distinctif de la marque antérieure est important, une telle circonstance est de nature à augmenter le risque de confusion. Cela étant, l’existence d’un risque de confusion n’est pas pour autant exclue lorsque le caractère distinctif de la marque antérieure est faible (voir, en ce sens, arrêts du 8 novembre 2016, BSH/EUIPO, C‑43/15 P, EU:C:2016:837, points 61 et 62, et du 12 juin 2019, Hansson, C‑705/17, EU:C:2019:481, points 42 et 44).

107    En l’espèce, il a été conclu que c’était sans violer l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 que la chambre de recours a retenu l’identité et la similitude des produits en conflit, la similitude visuelle moyenne et la similitude phonétique supérieure à la moyenne des marques en conflit ainsi qu’un niveau d’attention tout au plus moyen du public pertinent et le caractère distinctif intrinsèque moyen de la marque antérieure.

108    En particulier, il convient de souligner, d’une part, en application, notamment, de la jurisprudence citée au point 104, que, compte tenu du fait que la plupart des produits en cause sont des produits de consommation courante qui s’achètent en général au supermarché, la comparaison visuelle revêt une importance particulière. D’autre part, vu le niveau d’attention tout au plus moyen du public pertinent, il est vraisemblable qu’il ne prêtera pas particulièrement attention aux éléments qui distinguent les marques en conflit, notamment les éléments secondaires de la marque demandée.

109    Compte tenu de ces éléments et eu égard à la jurisprudence citée aux points 102 à 106 ci-dessus, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré, au point 28 de la décision attaquée, qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

110    Partant, il convient de rejeter le moyen unique soulevé par la requérante et, par conséquent, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

111    Conformément à l’article 219 du règlement de procédure, dans les décisions du Tribunal rendues après annulation et renvoi, celui-ci statue sur les dépens relatifs, d’une part, aux procédures engagées devant lui et, d’autre part, à la procédure de pourvoi devant la Cour.

112    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’EUIPO et par l’intervenante, conformément aux conclusions de ces derniers.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Przedsiębiorstwo Produkcyjno-Handlowe „Primart” Marek Łukasiewicz est condamnée aux dépens.

Kornezov

Buttigieg

Hesse

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 avril 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.