Language of document : ECLI:EU:T:2014:807

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

24 septembre 2014 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant la Communauté européenne – Marque verbale GEPRAL – Marque internationale verbale antérieure DELPRAL – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑493/12,

Sanofi SA, établie à Paris (France), représentée par Me C. Hertz-Eichenrode, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Geroulakos, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

GP Pharm SA, établie à Sant Quinti de Mediona (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 5 septembre 2012 (affaire R 201/2012‑2), relative à une procédure d’opposition entre Sanofi SA et GP Pharm SA,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek, président, Mme I. Labucka et M. V. Kreuschitz (rapporteur), juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 novembre 2012,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 15 février 2013,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

à la suite de l’audience du 10 juin 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 24 septembre 2009, GP Pharm SA a présenté une demande d’enregistrement international désignant la Communauté européenne à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement international a été demandé est le signe verbal GEPRAL.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement international a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié. Ces produits correspondaient, initialement, à la description « produits pharmaceutiques à usage humain » et, finalement, après deux limitations successives par GP Pharm de la portée de la demande d’enregistrement, intervenues les 11 août 2011 et 10 avril 2012, à la description « préparations oncologiques et préparations pour le traitement de maladies cardiovasculaires ».

4        La demande d’enregistrement international a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 38/2009, du 5 octobre 2009.

5        Le 6 avril 2010, la requérante, Sanofi SA, a formé opposition au titre de l’article 156, lu conjointement avec l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement international de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur l’enregistrement international antérieur n° 418607, valable en Autriche, du 28 octobre 1975, du signe verbal DELPRAL désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description « produits pharmaceutiques, vétérinaires, hygiéniques, produits diététiques à but médical, emplâtres, matériel pour pansements, désinfectants ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        À la suite d’une demande de GP Pharm, au titre de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, la requérante a présenté plusieurs preuves de l’usage de la marque antérieure.

9        Le 9 décembre 2011, la division d’opposition a fait droit à l’opposition dans son intégralité. Au soutien de sa décision, elle a jugé que, premièrement, la requérante avait uniquement rapporté la preuve de l’usage des « préparations à usage pharmaceutique pour le traitement du système nerveux central », qui seraient une sous-catégorie objective des « préparations pharmaceutiques », que, deuxièmement, ces produits étaient pour partie semblable et pour partie identique aux produits visés par la marque demandée, que, troisièmement, les signes en conflit étaient similaires et, que, quatrièmement et partant, il existait un risque de confusion entre les marques en conflit.

10      Le 25 janvier 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 5 septembre 2012 (ci-après « la décision attaquée »), la deuxième chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition au motif qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en conflit, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

12      À l’appui de cette décision, la chambre de recours a essentiellement considéré que, premièrement, le public pertinent se composait en l’espèce tant de professionnels du secteur médical que de patients en Autriche (point 23 de la décision attaquée), que, deuxièmement, les produits visés respectivement par les marques en conflit présentaient un faible degré de similitude (points 24 à 29 de la décision attaquée), que, troisièmement, les signes en conflit présentaient certaines similitudes (points 30 à 33 de la décision attaquée) et que, quatrièmement et enfin, compte tenu du faible degré de similitude entre les produits en cause et du degré relativement faible de similitude entre les signes en conflit ainsi que du degré d’attention relativement élevé du public pertinent, il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en conflit (points 34 à 38 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Observations liminaires

15      La requérante invoque deux moyens, à savoir, d’une part, une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et, d’autre part, un défaut de motivation au sens de l’article 75 du même règlement s’agissant de l’appréciation de la similitude des signes en conflit. Le Tribunal estime opportun d’apprécier ces deux moyens conjointement.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, applicable en l’espèce en vertu de l’article 156, paragraphe 1, du même règlement, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Ce risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Ainsi qu’il a été reconnu par une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion au sens de la disposition susmentionnée le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, point 30 et jurisprudence citée].

17      Au soutien du premier moyen, la requérante invoque une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en ce que la chambre de recours a rejeté l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, notamment, sur le fondement d’une appréciation prétendument erronée de la similitude des produits qu’elles désignent respectivement ainsi que de leurs similitudes tant visuelle que phonétique.

 Sur le public pertinent

18      À titre liminaire, il y a lieu de constater que la requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours concernant le public pertinent en Autriche, à savoir, d’une part, les professionnels de la médecine, dont les médecins et les pharmaciens, et, d’autre part, les patients en tant que consommateurs finaux des produits en cause, qui sont tous dotés d’un niveau d’attention élevé et supérieur à la moyenne (point 23 de la décision attaquée). Compte tenu de la jurisprudence constante en ce même sens dans le domaine des produits pharmaceutiques [arrêts du 21 octobre 2008, Aventis Pharma/OHMI – Nycomed (PRAZOL), T‑95/07, EU:T:2008:455, points 27 à 30 ; du 15 décembre 2010, Novartis/OHMI – Sanochemia Pharmazeutika (TOLPOSAN), T‑331/09, Rec, EU:T:2010:520, points 21 à 27, et du 14 juillet 2011, ratiopharm/OHMI – Nycomed (ZUFAL), T‑222/10, EU:T:2011:383, points 19 et 20], cette appréciation n’est pas entachée d’erreur, de sorte qu’il convient de l’entériner.

 Sur la comparaison des produits

19      S’agissant de la comparaison des produits, la requérante avance, en substance, que la chambre de recours a surestimé l’existence d’une différence dans les indications thérapeutiques des produits en cause et a accordé une trop grande importance à ce facteur, ce qui l’aurait amené à méconnaître le degré de similitude entre lesdits produits. L’OHMI rétorque que la chambre de recours s’est limitée à considérer que ces produits présentaient un faible degré de similitude dans la mesure où ils visaient à traiter des maladies très spécifiques et différentes. L’indication thérapeutique étant un facteur important devant être pris en considération lors de l’appréciation du degré de similitude des produits en cause, la chambre de recours aurait ainsi conclu à bon droit que, en l’espèce, les indications thérapeutiques différentes étaient un facteur important pouvant réduire le degré de similitude desdits produits.

20      Il ressort d’une jurisprudence constante qu’il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents caractérisant le rapport entre les produits en cause. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée]. À cet égard, il y a lieu de préciser que les produits complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits incombe à la même entreprise [voir arrêts PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, EU:T:2007:219, précité, point 50, et du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec, EU:T:2009:14, point 57]. S’agissant plus précisément des produits pharmaceutiques, la jurisprudence a reconnu que leur finalité ou leur destination est un critère primordial dans la définition d’une sous-catégorie de ces produits. La finalité et la destination d’un tel produit étant exprimées par son indication thérapeutique, il en découle nécessairement que le critère essentiel permettant d’identifier les produits pharmaceutiques visés par la demande de marque et, par voie de conséquence, l’étendue de la protection de la marque, est constitué par leur indication thérapeutique (voir, en ce sens, arrêt ZUFAL, point 18 supra, EU:T:2011:383, points 25 et 26).

21      En l’espèce, s’opposent la marque antérieure visant les produits correspondant à la description « préparations à usage pharmaceutique pour le traitement du système nerveux central », pour lesquels la requérante avait fourni la preuve de l’usage devant l’OHMI (voir point 9 ci-dessus), d’une part, et la marque demandée visant les produits correspondant à la description « préparations oncologiques et préparations pour traitement de maladies cardiovasculaires » (voir point 3 ci-dessus).

22      Force est de relever que ces deux sous-catégories de produits sont non seulement englobées dans la catégorie « produits pharmaceutiques » ou « préparations à usage pharmaceutique », mais sont également commercialisées, du fait de leur caractère de médicaments soumis à prescription médicale, par les mêmes canaux de distribution, à savoir les pharmacies, ce qui indique en soi un certain degré de similitude entre lesdits produits. En effet, à cet égard, la jurisprudence a déjà précisé que les médicaments sont des produits de même nature, à savoir des produits pharmaceutiques, ont la même finalité ou destination, à savoir le traitement de problèmes de santé humaine, s’adressent aux mêmes consommateurs, à savoir les professionnels du secteur médical et les patients, et empruntent les mêmes canaux de distribution, en règle générale les pharmacies, ce qui résulte de l’appartenance des produits en cause à la même catégorie générale de produits, les médicaments. Or, dès lors qu’il s’agit d’une catégorie très vaste comprenant des produits de nature et d’utilisation très variables et compte tenu du degré d’attention supérieur du public pertinent quant à leur finalité et à leur destination, exprimées par leur indication thérapeutique, ainsi qu’à leurs potentiels effets collatéraux sur la santé humaine, la seule appartenance de médicaments à la même catégorie générale de produits ne permet de constater qu’un faible degré de similitude entre les médicaments en cause (voir, en ce sens, arrêt TOLPOSAN, point 18 supra, EU:T:2010:520, points 35 à 37).

23      En l’espèce, les produits visés respectivement par les marques en conflit (voir point 21 ci-dessus) ont une indication thérapeutique très différente, à savoir celle du traitement du système nerveux central, d’une part, et celle du traitement du cancer et de maladies cardiovasculaires, d’autre part. Par conséquent, ainsi que l’a constaté la chambre de recours aux points 27 et 28 de la décision attaquée, ces finalités respectives des produits en cause, en tant qu’elles visent le traitement de maladies spécifiques et différentes, ne peuvent être considérées comme étant concurrentes ou interchangeables. En outre, s’agissant de leur caractère au moins complémentaire au sens de la jurisprudence citée au point 22 ci-dessus, il convient d’entériner le constat de la chambre de recours, non contesté en tant que tel par la requérante, selon lequel, en substance, un tel caractère complémentaire des produits en cause ne peut en principe être retenu, sauf dans le cas exceptionnel de l’existence simultanée de plusieurs maladies nécessitant plusieurs traitements distincts, comme par exemple le traitement d’une tumeur cancéreuse au cerveau par des médicaments oncologiques qui pourrait s’accompagner d’un traitement de troubles du système nerveux central par des médicaments antipsychotiques (point 28 de la décision attaquée).

24      À cet égard, la requérante ne saurait faire valoir valablement que l’indication thérapeutique n’a pas d’importance décisive pour le public pertinent, au motif que, notamment, l’emballage des produits en cause ne mentionne pas ladite indication, mais uniquement leur principe actif et leur mode d’administration. Au contraire, compte tenu du degré d’attention élevé du public pertinent, composé du personnel médical et des patients souffrant des maladies soumises au traitement par les médicaments en cause, l’indication thérapeutique, qui se trouve à l’origine de la prescription médicale nécessaire, revêt une importance décisive (voir, en ce sens, arrêt TOLPOSAN, point 18 supra, EU:T:2010:520, point 36) et est généralement connu par ledit public avant l’achat ou l’administration du médicament concerné, indépendamment de son indication ou non sur l’emballage dudit médicament.

25      Il ressort des considérations qui précèdent que, eu égard aux éléments de similitude entre les produits en cause constatés aux points 22 et 23 ci-dessus et à la différence liée à leurs indications thérapeutiques respectives, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant que lesdits produits ne présentaient qu’un faible degré de similitude.

 Sur la comparaison des signes

26      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit ainsi qu’une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives (arrêts du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec, EU:C:2007:514, point 48, et easyHotel, point 20 supra, EU:T:2009:14, point 42).

27      La requérante conteste, notamment, le bien-fondé des comparaisons visuelle et phonétique des signes en conflit et, partant, de l’appréciation globale du risque de confusion, telles qu’effectuées dans la décision attaquée. L’OHMI rétorque, en substance, que le public attache normalement plus d’attention et d’importance à la partie initiale d’un mot. Ainsi, le fait que les premières lettres respectives des signes en conflit soient différentes ferait obstacle à la reconnaissance d’un degré élevé de similitude entre eux. S’agissant de la similitude phonétique, l’OHMI précise que si, certes, la seconde syllabe « pral » des signes en conflit se prononce de manière identique, la première syllabe « del » du signe antérieur serait très différente de la première syllabe « ge » du signe demandé. Compte tenu du fait que la syllabe commune « pral » est située à la fin des deux signes et que leur début est complètement différent, la chambre de recours n’aurait pas commis d’erreur en jugeant qu’il existait un faible degré de similitude phonétique entre les signes en conflit.

28      Il convient de rappeler que, en l’espèce, la chambre de recours a reconnu « un [certain] degré de similitude » entre les signes en conflit (points 30 et 33 de la décision attaquée).

29      Sur le plan visuel, il y a lieu de relever une concordance entre cinq des caractères, à savoir « e », « p », « r », « a » et « l », dont les signes en conflit sont composés. De même, ainsi que la chambre de recours l’a constaté au point 30 de la décision attaquée, la lettre « e » figure en deuxième position et les quatre autres lettres se présentent dans le même ordre pour créer la terminaison identique « pral » dans les deux signes. Par ailleurs, les longueurs desdits signes avec, respectivement, sept et six caractères sont presque les mêmes. Il s’ensuit que les différences visuelles se réduisent à la lettre « g » de la marque demandée, d’une part, et aux lettres « d » et « l » de la marque antérieure, d’autre part.

30      Toutefois, contrairement à ce que fait valoir l’OHMI, ces différences visuelles ne sont pas de nature à rendre les signes en conflit seulement faiblement similaires dans leur impression visuelle d’ensemble. En effet, ainsi que l’allègue la requérante, d’une part, la différence entre les premières lettres majuscules respectives « D » et « G », dont le contour et la forme se ressemblent visuellement, n’est pas significative. D’autre part, la lettre supplémentaire « l » dans la marque antérieure, surtout lorsqu’elle apparaît en minuscule, est susceptible de s’estomper devant les impressions visuelles d’ensemble similaires des signes en conflit, ce qui est indirectement confirmé par la triple mention erronée par la chambre de recours elle-même du mot « depral » au point 24 de la décision attaquée. À cet égard, l’OHMI ne saurait non plus alléguer que le public pertinent porte une attention particulière au début desdits signes. En l’espèce, compte tenu de l’identité de la suite de lettres finale « pral », de la faible dissemblance visuelle des éléments « Ge » et « Del » et de l’impression visuelle de ressemblance produite par les signes en conflit dans leur ensemble, ledit public n’est pas susceptible de repérer ces différences de manière isolée et de leur prêter une attention particulière. Enfin, l’OHMI ne saurait tirer argument de l’arrêt du 23 septembre 2009, GlaxoSmithkline e.a./OHMI – Serono Genetics Institute (FAMOXIN) (T‑493/07, T‑26/08 et T‑27/08, EU:T:2009:355, point 68), invoqué à l’audience, la terminaison « pral » étant moins usuelle dans le domaine pharmaceutique que la terminaison « oxin » des signes Famoxin et Lanoxin et les différences entre les éléments « fam » et « lan » étant plus significatives et plus perceptibles que celles entre les éléments « Ge » et « Del » des signes en conflit.

31      Dès lors, la chambre de recours n’était pas en droit de conclure à l’existence seulement d’un « certain degré de similitude » visuelle des signes en conflit, mais aurait dû constater un degré élevé de similitude entre eux sur le plan visuel.

32      Sur le plan phonétique, il convient de rappeler que, même dans le cadre de l’appréciation de l’aspect phonétique d’une marque, il convient de tenir compte de l’interdépendance de ses aspects visuels et phonétiques [voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2011, Aldi Einkauf/OHMI – Illinois Tools Works (TOP CRAFT), T‑374/08, EU:T:2011:346, point 56]. En l’espèce, les signes verbaux en conflit comportent, chacun, deux syllabes comprenant les mêmes voyelles « e » et « a ». Les syllabes finales des deux signes, constituées de la terminaison « pral », premièrement, déjà en raison de leurs impressions visuelles identiques, sont les plus importantes, deuxièmement, sont reconnues en tant que telles par le consommateur autrichien et, troisièmement, sont prononcées par lui de manière identique. En outre, contrairement à ce qu’a indiqué la chambre de recours au point 31 de la décision attaquée, en raison de la position identique de la lettre « e » dans les deux signes en conflit, nonobstant la perception phonétique par le public pertinent des consonnes l’entourant, les premières syllabes « del » et « ge » ne sont pas très différentes phonétiquement et sont, en tout état de cause, prononcées par ce public de manière plus rapide que les secondes syllabes « pral ». Dans ces conditions, contrairement à ce qu’avance l’OHMI, les différences entre les syllabes « del » et « ge » ne sont pas de nature à influer de manière significative sur la comparaison phonétique. Par ailleurs, lorsque ces syllabes sont combinées avec la consonne « p » pour donner les suites de lettres « delp » et « gep », ces dernières apparaissent comme seulement faiblement différentes, eu égard au fait que la lettre « l » est susceptible de s’estomper également sur le plan phonétique (voir point 29 ci-dessus). Ainsi, en ce qui concerne l’impression phonétique d’ensemble, la similitude des éléments verbaux « delpral » et « gepral » repose surtout sur la prononciation desdites suites de lettres en combinaison avec la terminaison « pral », ce qui impose un rythme de prononciation et une intonation rapprochés dans les deux cas.

33      Il en résulte que les prononciations des signes verbaux en conflit par le consommateur autrichien se ressemblent notamment du fait de l’identité de leur dernière syllabe. Dans ces circonstances, la chambre de recours n’était pas en droit de conclure, au point 31 de la décision attaquée, que les syllabes « del » et « gep » présentaient des différences perceptibles. En effet, la comparaison phonétique aurait dû être effectuée entre les syllabes « del » et « ge », d’une part, et les syllabes « pral », d’autre part, ce qui aurait requis de conclure à une similitude phonétique à tout le moins d’un degré moyen entre les éléments verbaux en conflit.

34      Sur le plan conceptuel, il est constant que les signes en conflit n’ont aucune signification en allemand, de sorte que, comme l’a constaté la chambre de recours au point 32 de la décision attaquée, une comparaison conceptuelle ne saurait être effectuée.

35      Eu égard aux considérations qui précèdent, qui démontrent l’existence d’un degré élevé de similitude visuelle et d’un degré à tout le moins moyen de similitude phonétique entre les signes en conflit, il y a lieu de conclure que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que lesdits signes ne présentaient qu’un « [certain] degré de similitude » (points 30 et 33 de la décision attaquée).

36      Or, dans ces conditions, s’agissant du second moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation au titre de l’article 75 du règlement n° 207/2009, il suffit de relever que la requérante était en mesure de contester le bien-fondé de l’appréciation de la chambre de recours et que le Tribunal a pu effectuer son contrôle à cet égard. Dès lors, ce moyen ne saurait prospérer et doit être rejeté.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

37      L’appréciation du risque de confusion dans l’esprit du public pertinent dépend de nombreux facteurs et doit se faire globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants (voir arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec, EU:C:2007:333, points 34 et 35 et jurisprudence citée, et du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, Rec, EU:C:2009:503, points 59 et 60 et jurisprudence citée).

38      Selon l’OHMI, la conclusion finale de la chambre de recours n’est pas seulement fondée sur le faible degré de similitude des produits et des signes en conflit, mais également sur le fait que le degré d’attention du public pertinent, dont les professionnels, tels que les médecins et les pharmaciens, et les consommateurs finaux, à savoir les patients, est relativement élevé. Ce degré d’attention plus élevé lors de l’achat des produits en cause, qui n’est pas contesté en tant que tel par la requérante, aurait été un élément décisif dans l’appréciation du risque de confusion entre les marques en conflit.

39      À cet égard, il convient de rappeler que la chambre de recours a, notamment, constaté que le degré de similitude entre les produits en cause n’était pas élevé, de sorte que, conformément au « principe d’interdépendance », pour conclure à l’existence d’un risque de confusion, le degré de similitude des signes en conflit devait être important « pour faire contrepoids », ce qui ne serait pas le cas (point 36 de la décision attaquée). En outre, la chambre de recours a essentiellement considéré que, compte tenu du degré d’attention élevé du public pertinent, celui-ci ne manquerait pas de remarquer les débuts différents des marques en conflit et les différences en ce qui concerne les indications thérapeutiques des produits en cause (point 37 de la décision attaquée). Elle a donc conclu, eu égard au degré relativement faible de similitude entre les signes en conflit et à la faible similitude des produits en cause, ainsi qu’au degré d’attention relativement élevé du public pertinent, à l’absence de risque de confusion entre les marques en conflit (point 38 de la décision attaquée).

40      Contrairement à ce que défend l’OHMI, eu égard aux considérations exposées aux points 26 à 35 ci-dessus et au fait que les marques en conflit présentent un degré élevé de similitude visuelle ainsi qu’un degré à tout le moins moyen de similitude phonétique, force est de relever que cette appréciation globale du risque de confusion est entachée d’erreur. En effet, ce degré, globalement élevé, de similitude entre lesdites marques étant important du point de vue du public pertinent doté d’un degré d’attention élevé, il s’ajoute au faible degré de similitude entre les produits en cause appartenant à la même catégorie, à savoir celle des « produits pharmaceutiques » (voir points 22 à 25 ci-dessus). À cet égard, il y a lieu de préciser que ce faible degré de similitude entre les produits en cause, à savoir généralement des médicaments soumis à prescription médicale, constitue un facteur pertinent et non négligeable dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, en ce qu’il pourrait, en combinaison avec le degré élevé de similitude des marques en conflit, surtout lorsque celles-ci sont apposées sur l’emballage desdits médicaments, amener ledit public, même s’il est doté d’un degré d’attention supérieur à la moyenne, à croire que ces médicaments proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement commercialisant une même « famille de produits », désignée par la terminaison commune « pral ». Ainsi, eu égard aux produits en cause, l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit aurait dû conduire la chambre de recours à conclure à l’existence d’un risque de confusion entre lesdites marques dans l’esprit du public pertinent.

41      Par conséquent, il y a lieu d’accueillir le moyen tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

42      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

43      L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 5 septembre 2012 (affaire R 201/2012‑2), relative à une procédure d’opposition entre Sanofi SA et GP Pharm SA, est annulée.

2)      L’OHMI est condamné aux dépens.

Prek

Labucka

Kreuschitz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 septembre 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.