Language of document : ECLI:EU:T:2020:320

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

8 juillet 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne verbale GNC LIVE WELL – Obligation de motivation – Article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement (UE) 2017/1001 – Usage sérieux de la marque – Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑686/19,

Euroapotheca UAB, établie à Vilnius (Lituanie), représentée par Mes R. Žabolienė et E. Saukalas, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Lukošiūtė, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

General Nutrition Investment Company, établie à Wilmington, Delaware (États-Unis), représentée par Me M. Rijsdijk, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 30 juillet 2019 (affaire R 2189/2018-5), relative à une procédure de déchéance entre Euroapotheca et General Nutrition Investment Company,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, U. Öberg et Mme O. Spineanu-Matei (rapporteure), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 7 octobre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 18 décembre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 9 décembre 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 24 septembre 1998, l’intervenante, General Nutrition Investment Company, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal GNC LIVE WELL.

3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 5, 35 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 5 : « Produits pharmaceutiques ; substances diététiques à usage médical ; y compris compléments alimentaires pharmaceutiques et diététiques, en particulier compléments nutritionnels contenant des vitamines, minéraux et herbes sous forme de gélules, comprimés, poudres et liquides » ;

–        classe 35 : « Consultation en gestion commerciale, y compris assistance et conseils pour l’établissement et la gestion de magasins de détail spécialisés dans la vente d’aliments diététiques, compléments, vitamines, cosmétiques, produits pour les cheveux et la peau, produits pour la bouche et le corps, équipements de diagnostic et d’exercice, produits de contrôle des calories et produits pour la détente et la relaxation » ;

–        classe 42 : « Consultation et conseils techniques pour l’établissement de magasins de détail spécialisés dans la vente d’aliments diététiques, compléments, vitamines, cosmétiques, produits pour les cheveux et la peau, produits pour la bouche et le corps, équipements de diagnostic et d’exercice, produits de contrôle des calories et produits pour la détente et la relaxation ».

4        Le 16 août 1999, la demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 1999/64. Le 4 février 2000, le signe, mentionné au point 2 ci-dessus, a été enregistré en tant que marque de l’Union européenne sous le numéro 940981.

5        Le 23 août 2016, la requérante, Euroapotheca UAB, a déposé une demande en déchéance de la marque enregistrée, sur le fondement de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], auprès de l’EUIPO, au motif que ladite marque n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pendant une période ininterrompue de cinq ans pour l’ensemble des produits et des services pour lesquels elle avait été enregistrée.

6        Le 10 février 2017, l’intervenante a présenté devant l’EUIPO divers documents en vue d’établir l’usage de la marque enregistrée.

7        Par décision du 12 septembre 2018, la division d’annulation a partiellement accueilli la demande en déchéance, en déclarant la marque déchue, à compter du 23 août 2016, pour tous les produits et services mentionnés au point 3 ci-dessus, sauf pour une partie des produits compris dans la classe 5, à savoir les « substances diététiques à usage médical ; y compris [les] compléments alimentaires diététiques, en particulier [les] compléments nutritionnels contenant des vitamines, minéraux et herbes sous forme de gélules, comprimés, poudres et liquides » (ci-après les « produits contestés »).

8        Le 9 novembre 2018, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation, complété par un mémoire exposant les motifs de recours déposé le 14 janvier 2019, en ce que la déchéance de la marque enregistrée n’avait pas été prononcée pour l’ensemble des produits et services mentionnés au point 3 ci-dessus.

9        Par décision du 30 juillet 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours, en entérinant la décision de la division d’annulation dans son intégralité. En substance, tout d’abord, d’une part, elle a considéré que l’intervenante était tenue de prouver l’usage sérieux de la marque enregistrée pendant la période allant du 23 août 2011 au 22 août 2016 et, d’autre part, elle a établi le lieu et la durée de l’usage de la marque enregistrée. Ensuite, elle a pris en considération le faisceau d’éléments de preuve apportés par l’intervenante. D’une part, elle a apprécié la nature de l’usage de la marque enregistrée dans une police stylisée, des couleurs différentes ou mettant en évidence le groupe de lettres « gnc » par rapport aux mots « live well » et elle a constaté qu’un tel usage n’altérait pas le caractère distinctif de la marque enregistrée. D’autre part, elle a constaté qu’il existait suffisamment d’éléments de preuve qui permettaient de démontrer l’usage sérieux de la marque enregistrée au cours de la période pertinente. Enfin, elle a confirmé qu’un tel usage avait été prouvé pour les produits contestés.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        en conséquence, rejeter l’annulation pour l’ensemble des produits visés par le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens, y compris ceux engagés lors de la procédure de déchéance et de recours devant l’EUIPO.

 En droit

13      À titre liminaire, étant donné que « rejeter l’annulation pour l’ensemble des produits visés par le recours » équivaut à confirmer la décision attaquée et, dès lors, à rejeter le recours, il y a lieu de comprendre le deuxième chef de conclusions de l’intervenante comme visant, en substance, au rejet du recours [voir, en ce sens, arrêt du 24 septembre 2019, Roxtec/EUIPO – Wallmax (Représentation d’un carré noir contenant sept cercles bleus concentriques), T‑261/18, EU:T:2019:674, point 16 et jurisprudence citée]. Il se confond, ainsi, avec son premier chef de conclusions.

14      En ce qui concerne les règles de fond applicables en l’espèce, il convient de relever que, compte tenu de la date d’introduction de la demande en déchéance en cause, à savoir le 23 août 2016, et à l’instar de ce que, d’une part, la chambre de recours a relevé aux points 14 à 16 de la décision attaquée et, d’autre part, la requérante et l’EUIPO ont confirmé dans leurs écritures, les versions pertinentes des dispositions matérielles applicables à la présente procédure de déchéance et, par conséquent, à l’examen des preuves de l’usage de la marque enregistrée, sont le règlement no 207/2009 et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant sur les modalités d’application du règlement no 40/94 (JO 1995, L 303, p. 1) [remplacé par le règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001 et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1)].

15      Toutefois, dans la mesure où les dispositions matérielles pertinentes applicables en l’espèce sont identiques dans leur version résultant, respectivement, du règlement no 207/2009 et du règlement 2017/1001, le fait que les parties se soient référées aux dispositions de ce dernier règlement demeure sans incidence aux fins de la présente procédure.

16      À l’appui du recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lequel est composé, en substance, de deux branches, tirées, la première, du caractère déficitaire de la motivation de la décision attaquée en violation de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, et, la seconde, de l’appréciation erronée par la chambre de recours des preuves, apportées par l’intervenante, de l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés.

 Sur la motivation de la décision attaquée

17      Dans le cadre de la première branche de son moyen unique, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas indiqué les éléments de preuve qui lui auraient permis d’entériner les conclusions de la division d’annulation, en ce qui concerne, tout d’abord, la date et le lieu de l’usage de la marque enregistrée, ensuite, la nature de l’usage de celle-ci et, enfin, son usage en relation avec les produits contestés. Ainsi, la décision attaquée devrait être annulée pour cause de violation de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001.

18      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

19      En premier lieu, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation, découlant aussi de l’article 296 TFUE, a fait l’objet d’une jurisprudence constante selon laquelle la motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, de manière à permettre, d’une part, aux intéressés un exercice effectif de leur droit à demander un contrôle juridictionnel de la décision attaquée et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 2017, Cipriani/EUIPO – Hotel Cipriani (CIPRIANI), T‑343/14, EU:T:2017:458, point 34 et jurisprudence citée]. La question de savoir si la motivation d’une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte, ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [voir, en ce sens, arrêt du 18 mars 2015, Naazneen Investments/OHMI – Energy Brands (SMART WATER), T‑250/13, non publié, EU:T:2015:160, point 15 et jurisprudence citée].

20      En deuxième lieu, lorsque la chambre de recours entérine la décision de la division d’annulation dans son intégralité, et compte tenu de la continuité fonctionnelle entre divisions d’annulation et chambres de recours, dont atteste l’article 71, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, cette décision ainsi que sa motivation font partie du contexte dans lequel la décision de la chambre de recours a été adoptée, contexte qui est connu de la requérante et qui permet au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité [voir, en ce sens, arrêts du 21 novembre 2007, Wesergold Getränkeindustrie/OHMI – Lidl Stiftung (VITAL FIT), T‑111/06, non publié, EU:T:2007:352, point 64 et jurisprudence citée, et du 16 janvier 2019, Windspiel Manufaktur/EUIPO (Représentation de la position d’une fermeture de bouteille), T‑489/17, non publié, EU:T:2019:9, point 31 et jurisprudence citée].

21      En troisième lieu, l’obligation de motivation n’impose pas aux chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés des parties devant elles. Il suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision. Par ailleurs, la motivation peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 2020, Maternus/EUIPO – adp Gauselmann (Jokers WILD Casino), T‑321/19, non publié, EU:T:2020:101, points 16 et 17 et jurisprudence citée].

22      En quatrième lieu, il y a lieu de rappeler que le défaut ou l’insuffisance de motivation constitue un moyen tiré de la violation des formes substantielles, distinct, en tant que tel, du moyen pris de l’inexactitude des motifs de la décision, dont le contrôle relève de l’examen du bien-fondé de cette décision [arrêt du 23 septembre 2015, Mechadyne International/OHMI (FlexValve), T‑588/14, non publié, EU:T:2015:676, point 59].

23      En l’espèce, tout d’abord, aux points 38 et 39 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué qu’il ressortait des factures et du matériel publicitaire apportés par l’intervenante que le lieu de l’usage de la marque enregistrée était l’Union et qu’il existait suffisamment d’éléments de preuve datés pour prouver l’usage de celle-ci au cours de la période pertinente. Ensuite, aux points 44 et 46 de ladite décision, elle a conclu que la forme dans laquelle la marque enregistrée était utilisée n’altérait pas son caractère distinctif et que l’intégralité du faisceau d’éléments de preuve établissait une importance suffisamment sérieuse de l’usage de celle-ci. Enfin, aux points 48 et 49 de la même décision, elle a constaté que les éléments de preuve apportés par l’intervenante démontraient l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés.

24      À cet égard, certes, la motivation que la chambre de recours a donnée, aux points 38, 39, 44, 46, 48 et 49 de la décision attaquée, ne détaille pas les éléments de preuve qu’elle a pris en considération pour parvenir aux conclusions qui y figurent. Toutefois, au vu de la jurisprudence rappelée au point 20 ci-dessus, étant donné que la chambre de recours a confirmé la décision de la division d’annulation dans son intégralité, il convient de tenir compte de la motivation relative auxdits éléments de preuve figurant dans la décision de la division d’annulation. Il ressort de cette dernière que la division d’annulation a analysé l’ensemble des éléments de preuve apportés par l’intervenante. La chambre de recours reprend l’analyse faite par la division d’annulation au point 9 de la décision attaquée et recense lesdits éléments de preuve au point 6 de cette dernière, mentionnant ceux qui corroborent le lieu et la durée de l’usage de la marque enregistrée, la nature et l’étendue d’un tel usage et l’usage de la marque enregistrée en relation avec les produits contestés.

25      Ainsi, sans préjudice de la question de savoir si les éléments de preuve apportés par l’intervenante permettent de valider les conclusions auxquelles la chambre de recours est parvenue, question qui ne relève pas de la motivation de la décision attaquée, mais du bien-fondé de celle-ci, lequel est apprécié dans le cadre de la seconde branche du moyen unique invoqué par la requérante, rien n’indique que cette dernière n’était pas en mesure de comprendre les motifs de la décision attaquée et de les contester devant le Tribunal.

26      Dès lors, la première branche du moyen unique de la requérante ne saurait prospérer.

 Sur l’appréciation par la chambre de recours des preuves de l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés

27      Dans le cadre de la seconde branche de son moyen unique, la requérante fait valoir que la chambre de recours a considéré à tort que l’intervenante avait apporté la preuve de l’usage sérieux de la marque enregistrée dans l’Union pendant la période pertinente pour les produits contestés.

28      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

29      Il convient de rappeler qu’il résulte du considérant 10 du règlement no 207/2009 (devenu considérant 24 du règlement 2017/1001) que le législateur a considéré que la protection d’une marque enregistrée n’était justifiée que dans la mesure où cette marque est effectivement utilisée. En conformité avec ce considérant, l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 dispose que le titulaire d’une marque de l’Union est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qu’il n’existe pas de juste motif pour son non-usage.

30      La règle 22, paragraphe 2, du règlement no 2868/95 (devenue article 10, paragraphe 3, du règlement délégué 2018/625), applicable aux demandes en déchéance conformément à la règle 40, paragraphe 5, dudit règlement (devenue article 19, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625), dispose que les indications et les preuves à produire afin de prouver l’usage de la marque comprennent des indications sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque pour les produits et services pour lesquels elle est enregistrée.

31      Selon la jurisprudence, une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle, qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du 23 mars 2017, Cryo-Save/EUIPO – MedSkin Solutions Dr. Suwelack (Cryo-Save), T‑239/15, non publié, EU:T:2017:202, point 29 et jurisprudence citée].

32      Bien que la notion d’usage sérieux s’oppose à tout usage minimal et insuffisant pour considérer qu’une marque est réellement et effectivement utilisée sur un marché déterminé, il n’en reste pas moins que l’exigence d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêt du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM), T‑427/09, EU:T:2011:480, point 26 et jurisprudence citée].

33      Plus précisément, l’appréciation, dans un cas d’espèce, du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque [voir arrêt du 13 février 2015, Husky CZ/OHMI – Husky of Tostock (HUSKY), T‑287/13, EU:T:2015:99, point 63 et jurisprudence citée].

34      Quant à l’importance de l’usage qui a été fait d’une marque, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part [arrêt du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 35].

35      En outre, l’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné. Dès lors, il convient de procéder à une appréciation globale qui tient compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et qui implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte [voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2017, Galletas Gullón/EUIPO – O2 Holdings (Forme d’un paquet de biscuits), T‑404/16, non publié, EU:T:2017:745, point 40 et jurisprudence citée].

36      En ce qui concerne la période pertinente pour l’appréciation de l’usage de la marque enregistrée, au point 33 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que l’intervenante était tenue de prouver l’usage sérieux de la marque enregistrée pendant la période allant du 23 août 2011 au 22 août 2016. Cette constatation n’est pas remise en cause par la requérante.

37      En ce qui concerne les preuves de l’usage de la marque enregistrée, il convient de relever qu’il ressort du dossier administratif et du point 6 de la décision attaquée que l’intervenante a produit, dans le cadre de la procédure administrative, et ce en vue de prouver l’usage sérieux de la marque enregistrée, notamment pour les produits contestés, plusieurs documents, parmi lesquels, regroupés par catégorie, figurent les éléments de preuve suivants :

–        une déclaration sous serment du 9 février 2017 signée par le vice-président de General Nutrition Centers, Inc., société mère de l’intervenante, contenant, notamment, un tableau reprenant les recettes mondiales annuelles réalisées entre 2008 et 2016 en relation avec la marque enregistrée ainsi qu’un tableau présentant les recettes générées par les ventes européennes (hormis celles du Royaume-Uni) entre 2008 et 2013 ;

–        un catalogue de produits portant sur la marque enregistrée en espagnol, destiné au marché espagnol ; des publicités, des photographies et une brochure relatives au marché roumain ou destinées à celui-ci ; des photos, un dépliant, deux catalogues de produits portant la marque enregistrée concernant le marché bulgare ;

–        des extraits imprimés des réseaux sociaux et des versions roumaine, bulgare, espagnole, du Royaume-Uni et irlandaise du site Internet de l’intervenante ;

–        des exemples de l’emballage de produits portant la marque enregistrée ;

–        des captures d’écran des sites Internet proposant des produits sous la marque enregistrée, notamment en Espagne, en Bulgarie, en Lettonie, au Royaume-Uni, en Irlande et en Roumanie ; des exemples de l’usage de la marque enregistrée à des fins promotionnelles, publicitaires et commerciales, y compris par l’intermédiaire des médias sociaux ;

–        des exemples d’étiquettes de produits portant la marque enregistrée au sein de l’Union ;

–        des factures de vente contenant des photos de produits portant la marque enregistrée.

38      C’est à l’aune de ces considérations qu’il convient d’examiner si c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, dans la décision attaquée, que les éléments de preuve apportés par l’intervenante dans le cadre de la procédure en déchéance étaient aptes à prouver un usage sérieux de la marque enregistrée pour les produits contestés pendant la période pertinente propre à assurer le maintien des droits qui s’y rapportent.

 Sur le lieu et la durée de l’usage de la marque enregistrée

39      La requérante fait valoir que la chambre de recours a erronément considéré que les factures et le matériel publicitaire apportés par l’intervenante prouvaient l’usage de la marque enregistrée en Bulgarie, Roumanie, Irlande et Espagne, de sorte que le lieu de l’usage était l’Union. Selon la requérante, tout d’abord, seul un nombre réduit des factures produites peut être considéré comme relevant du territoire pertinent, sans pour autant suffire à prouver l’usage sérieux de la marque enregistrée. Au sujet du matériel publicitaire, ensuite, les catalogues, les publicités et les extraits du site Internet de l’intervenante ne prouveraient pas l’usage de la marque enregistrée dans l’Union. Si certaines preuves mentionnent le territoire concret, elles ne démontreraient en revanche pas l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés. Enfin, les étiquettes de produits apportées ne prouveraient ni que les produits contestés ont été effectivement vendus sous la marque enregistrée ni que lesdites étiquettes ont été effectivement utilisées sur le marché.

40      La requérante soutient également que la chambre de recours a erronément considéré que les factures, les publications sur les réseaux sociaux et les photos apportées par l’intervenante constituaient une indication de la durée de l’usage. Selon la requérante, certaines pièces ne sont pas datées, d’autres ne relèvent pas de la période pertinente et d’autres encore se limitent à faire apparaître la date de péremption des produits. Par ailleurs, la simple confirmation fournie par l’intervenante à travers une déclaration sous serment, selon laquelle tous les usages identifiés relèvent de la période pertinente, pourrait ne pas être reconnue comme une preuve objective.

41      En ce qui concerne le lieu de l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés, le Tribunal estime qu’il convient de faire référence, d’une part, au matériel publicitaire produit par l’intervenante, disponible en différentes langues et diffusé sur support papier dans les catalogues et les brochures, ainsi que sur support numérique sur les sites Internet et les réseaux sociaux, tel que figurant dans les extraits imprimés et les captures d’écran. Ledit matériel démontre que la marque enregistrée s’adresse à une large audience, distribuée à tout le moins en Roumanie, en Bulgarie, au Royaume-Uni, en Irlande et en Espagne.

42      D’autre part, les factures apportées par l’intervenante constituent des preuves de ventes réelles des produits portant la marque enregistrée sur le territoire de l’Union, et ce même en se limitant aux quatre factures mises en évidence par la requérante, en ce qu’elles sont émises pour des destinataires en Bulgarie, en Lettonie et en Espagne.

43      En outre, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, plusieurs factures exclues par la requérante en ce qu’elles n’indiqueraient pas clairement le lieu de l’usage peuvent en réalité être reliées à l’Irlande grâce au numéro de TVA, à l’adresse et à l’indicatif téléphonique irlandais qui y figurent. Même les factures qui se rapportent à des territoires situés hors de l’Union demeurent pertinentes, puisque, conformément à l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous b), du règlement 2017/1001], l’apposition de la marque de l’Union sur les produits ou sur leur conditionnement dans l’Union dans le seul but de l’exportation constitue également un usage de la marque enregistrée.

44      En ce qui concerne la durée de l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés, les factures datées de 2014 à 2016, les publications sur les réseaux sociaux de 2011 à 2016, les extraits imprimés des sites Internet reflétant l’état de ceux-ci entre 2009 et 2016, les étiquettes à apposer sur les produits contestés et leurs emballages datés de 2014 à 2016 démontrent que les produits contestés ont été proposés à la vente tout au long de la période pertinente.

45      En outre, quant à l’argument par lequel la requérante soutient que les documents non datés ne peuvent être pris en considération afin d’établir l’usage sérieux de la marque enregistrée pendant la période pertinente, il importe de rappeler que, comme indiqué au point 35 ci-dessus, c’est la prise en considération de l’ensemble des éléments soumis à l’appréciation de la chambre de recours qui doit permettre d’établir la preuve de l’usage sérieux de la marque enregistrée. Or, en l’espèce, les étiquettes, les photographies des vitrines de magasins et les autres publications sur les réseaux sociaux que la requérante a citées comme exemples de documents non datés, peuvent avoir pour but de montrer la gamme de produits pour laquelle la marque enregistrée est utilisée et comment celle-ci apparaît sur les produits contestés, ce qui ne nécessite pas qu’elles soient datées (voir, en ce sens, arrêt du 13 février 2015, HUSKY, T‑287/13, EU:T:2015:99, point 68). Partant, il y a lieu d’écarter cet argument.

46      De même, ne peut être retenu l’argument de la requérante tendant à écarter les factures soumises par l’intervenante qui ne correspondraient pas à la période pertinente. En effet, ainsi que l’EUIPO le fait valoir, les factures, datées de septembre et novembre 2016 et de janvier et février 2017, sont postérieures à la période pertinente seulement de quelques semaines ou de quelques mois. Or, la prise en considération de circonstances de très près postérieures à la période définie comme étant pertinente par la réglementation applicable est possible, en ce qu’elle permet de confirmer ou de mieux apprécier la portée de l’utilisation de la marque enregistrée ainsi que les intentions réelles du titulaire au cours de cette dernière période. Pourvu qu’il existe des preuves d’usage qui se rattachent à la période pertinente, comme en l’espèce, les pièces ne relevant que très peu de celle-ci, loin d’être dépourvues d’intérêt, peuvent être prises en compte et évaluées en combinaison avec les autres éléments, car elles peuvent apporter la preuve d’une exploitation commerciale réelle et sérieuse de la marque [voir, en ce sens, arrêt du 8 avril 2016, Frinsa del Noroeste/EUIPO – Frisa Frigorífico Rio Doce (FRISA), T‑638/14, non publié, EU:T:2016:199, points 38 à 40 et jurisprudence citée].

47      Il convient également d’écarter l’argument de la requérante, tiré de l’absence d’objectivité de la déclaration sous serment du vice-président de la société mère de l’intervenante. Il est vrai que ladite déclaration a été établie dans l’intérêt de l’intervenante et que, selon une jurisprudence constante, les déclarations sous serment qui émanent d’une personne qui a des liens étroits avec la partie concernée sont d’une valeur probante de moindre importance que celles des tiers et ne peuvent dès lors, à elles seules, constituer une preuve suffisante de l’usage de la marque (voir, en ce sens, arrêt du 18 mars 2015, SMART WATER, T‑250/13, non publié, EU:T:2015:160, point 30 et jurisprudence citée). Toutefois, la déclaration en question est corroborée par d’autres éléments pertinents (voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 2020, Jokers WILD Casino, T‑321/19, non publié, EU:T:2020:101, point 46 et jurisprudence citée).

48      En effet, force est de constater que la déclaration sous serment contient des informations détaillées et sensées quant au lieu et à la durée de l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés qui sont corroborées par les données ressortant des autres éléments de preuve présentés par l’intervenante. En particulier, tout d’abord, l’affirmation qui y est contenue, selon laquelle la marque enregistrée est utilisée pour des produits alimentaires nutritionnels, diététiques, énergétiques et sportifs, y compris vitamines, minéraux, herbes et autres compléments spécialisés, est corroborée, notamment, par les catalogues, le matériel publicitaire et les images des produits portant la marque enregistrée. Ensuite, celle selon laquelle la marque enregistrée peut être repérée dans des points de vente au détail et dans des messages publicitaires est confirmée, notamment, par les photos d’enseignes de magasins, de présentoirs et d’étalages dans des pharmacies et des commerces, ainsi que par le matériel publicitaire produit par l’intervenante. Enfin, la vente effective des produits portant la marque enregistrée peut être corroborée par les factures apportées par l’intervenante.

49      Dans cette mesure, la déclaration sous serment et les éléments qui corroborent les allégations qui y sont contenues constituent des moyens de preuve crédibles, permettant de situer dans un contexte précis les multiples éléments de preuve présentés par l’intervenante attestant de l’usage de la marque enregistrée pendant la période pertinente sur le territoire de l’Union.

50      Ainsi, la chambre de recours, prenant en compte la déclaration sous serment et l’ensemble des preuves apportées par l’intervenante, a conclu à bon droit que la marque enregistrée était objectivement présente sur le marché pendant la période pertinente et sur le territoire de l’Union.

 Sur la nature de l’usage de la marque enregistrée

51      La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours concernant la nature de l’usage de la marque enregistrée. Elle fait valoir que la marque enregistrée a été utilisée sous une forme qui altère son caractère distinctif, en raison, premièrement, de la modification de la police de caractère, de la couleur et du style du groupe de lettres « gnc » par rapport aux mots « live well », deuxièmement, de l’ajout d’éléments figuratifs et, troisièmement, de l’omission des mots « live well » et de l’ajout d’autres mots. Selon la requérante, ces variations importantes excluent un usage de la marque enregistrée propre à assurer le maintien des droits de l’intervenante.

52      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001], la preuve de l’usage sérieux d’une marque comprend également la preuve de l’utilisation de celle-ci sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de cette marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée, et ce notamment en raison de leur position accessoire dans le signe ou de leur faible caractère distinctif [voir arrêt du 13 septembre 2016, hyphen/EUIPO – Skylotec (Représentation d’un polygone), T‑146/15, EU:T:2016:469, point 31 et jurisprudence citée].

53      L’objet de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement no 207/2009, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les modifications qui, sans en altérer le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être limité aux situations dans lesquelles le signe concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner des produits ou des services pour lesquels celle-ci a été enregistrée constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [voir arrêt du 3 octobre 2019, 6Minutes Media/EUIPO – ad pepper media International (ADPepper), T‑668/18, non publié, EU:T:2019:719, point 34 et jurisprudence citée].

54      En l’espèce, à titre liminaire, il convient de constater que la marque enregistrée est une marque verbale. Selon la jurisprudence, une marque verbale est une marque constituée exclusivement de lettres, de mots ou d’associations de mots, écrits en caractères d’imprimerie dans une police normale, sans élément graphique spécifique. Par conséquent, la protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale porte sur le mot indiqué dans la demande d’enregistrement et non pas sur les aspects graphiques ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir [voir arrêt du 16 septembre 2013, Müller Boré & Partner/OHMI – Popp e.a. (MBP), T‑338/09, non publié, EU:T:2013:447, point 54 et jurisprudence citée]. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que la présentation précise d’une telle marque n’a aucune importance. En effet, la représentation concrète d’une marque verbale n’est généralement pas de nature à modifier le caractère distinctif de ladite marque telle qu’enregistrée [voir arrêt du 23 septembre 2015, L’Oréal/OHMI – Cosmética Cabinas (AINHOA), T‑426/13, non publié, EU:T:2015:669, point 28 et jurisprudence citée].

55      Au point 42 de la décision attaquée, la chambre de recours a reproduit trois représentations graphiques utilisées pour la marque enregistrée. La première image comporte le groupe de lettres « gnc », écrites en majuscule et en gras et, à la ligne et à droite, les mots « live well », écrits en majuscule et dans des caractères plus petits. La deuxième comporte le groupe de lettres « gnc », écrites en majuscule et en gras et, à la ligne, centrés, les mots « live well », écrits en majuscule et dans des caractères plus petits. La couleur des trois lettres et des mots est rouge, sur un fond rectangulaire gris. La troisième image comporte le groupe de lettres « gnc », écrites en majuscule et en gras, en noir, suivies, sur la même ligne par les mots « live well » en gris, les lettres « l » et « w » étant en majuscule, les autres en minuscule, sur un fond rectangulaire rouge.

56      En premier lieu, il convient de constater que, la marque enregistrée étant une marque verbale, il revenait à l’intervenante de choisir sa présentation précise et de prouver l’usage de cette dernière par le biais de ses représentations concrètes. Ainsi, les représentations graphiques utilisées pour la marque enregistrée peuvent être prises en considération aux fins de la preuve de son usage, pourvu qu’elles ne modifient pas le caractère distinctif de ladite marque telle qu’enregistrée. Cela vaut aussi bien pour la représentation de ses composants en lettres majuscules ou minuscules.

57      Partant, la chambre de recours a pris en considération, à bon droit, les représentations graphiques utilisées pour la marque enregistrée reproduites au point 42 de la décision attaquée, en ce que le public pertinent reste susceptible d’y appréhender la marque enregistrée GNC LIVE WELL, étant donné que l’élément verbal composé de trois lettres et deux mots est nettement lisible et figure dans le même ordre et que leur association, qu’ils soient écrits sur une ligne ou deux, n’altère pas le caractère distinctif de la marque verbale telle qu’enregistrée.

58      En deuxième lieu, en ce qui concerne l’éventuelle altération du caractère distinctif de la marque enregistrée par l’ajout d’éléments figuratifs, premièrement, il convient de relever que les représentations graphiques utilisées pour la marque enregistrée reproduites au point 42 de la décision attaquée comprennent, systématiquement, l’élément verbal composé de trois lettres et deux mots « gnc live well », au même titre que la marque enregistrée.

59      Deuxièmement, quant aux éléments figuratifs des représentations graphiques utilisées pour la marque enregistrée reproduites au point 42 de la décision attaquée, il convient de considérer que, d’une part, les éléments figuratifs en cause se limitent à l’usage de couleurs distinctes, d’une police de caractère différente, d’un fond en couleurs qui encadre l’élément verbal composé de trois lettres et deux mots « gnc live well » et du positionnement des trois lettres et de deux mots sur une ou deux lignes. Ainsi, lesdits éléments figuratifs ne sont pas particulièrement imposants, ils ont une fonction décorative, ils ne jouent pas un rôle important dans l’impression d’ensemble du signe et ils n’ont pas de contenu sémantique intrinsèque qui donnerait à la marque un caractère distinctif ou désignerait les produits contestés.

60      D’autre part, la présence desdits éléments figuratifs dans les représentations graphiques utilisées pour la marque enregistrée n’a pas pour effet de changer l’ordre de lecture, le contenu sémantique et la prononciation de l’élément verbal, composé de trois lettres et deux mots « gnc live well », qui constitue la marque enregistrée, laquelle demeure clairement identifiable.

61      Dès lors, l’ajout d’éléments figuratifs n’est, ni par sa nature, ni par sa signification, ni par sa taille, susceptible de modifier l’impression d’ensemble produite par les représentations utilisées par l’intervenante, dont l’élément le plus distinctif demeure l’élément verbal composé de trois lettres et deux mots « gnc live well », qui constitue la marque enregistrée et qui conserve sa fonction d’indication de l’origine commerciale des produits contestés. Ainsi que l’EUIPO le fait valoir, les éléments figuratifs en cause ne jouent donc qu’un rôle accessoire.

62      En troisième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante, tiré du fait que certains éléments de preuve font référence à un signe GNC sans les mots « live well » ou accompagné d’autres mots, il convient d’observer que la chambre de recours a seulement pris en considération les éléments de preuve qui renvoyaient à l’usage de l’élément verbal composé de trois lettres et deux mots « gnc live well », en considérant que ceux-ci suffisaient à prouver l’usage de la marque enregistrée. En conséquence, et alors qu’il existe suffisamment d’éléments de preuve qui renvoient à l’usage de l’élément verbal composé de trois lettres et deux mots « gnc live well », tels que les photographies, les extraits imprimés des sites Internet et des réseaux sociaux, le matériel publicitaire et les images des produits réellement vendus portant la marque enregistrée, le Tribunal ne saurait non plus procéder à l’appréciation de tels autres éléments de preuve.

63      Au regard de l’ensemble des éléments qui précèdent, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré, au point 44 de la décision attaquée, que, en dépit des ajouts d’éléments figuratifs et des modifications apportés à la marque enregistrée, la forme dans laquelle cette dernière était utilisée n’altérait pas son caractère distinctif, si bien que les preuves de l’usage correspondantes constituaient des preuves de l’usage de ladite marque.

 Sur l’étendue de l’usage

64      La requérante fait valoir que la chambre de recours a erronément affirmé que les éléments de preuve apportés par l’intervenante établissaient une importance suffisamment sérieuse de l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés. En premier lieu, elle prétend que la déclaration sous serment n’est pas corroborée par des éléments de preuve et que d’autres documents ne confirment pas la distribution des produits contestés à des consommateurs potentiels. En deuxième lieu, elle soutient, d’une part, que les factures sont limitées dans le temps et prouvent des ventes symboliques, compte tenu de la taille du marché, et, d’autre part, qu’elles ne peuvent pas être rattachées aux produits contestés. Plus particulièrement, les quatre factures qui relèvent du territoire pertinent attesteraient d’un montant total relativement faible de revenus. En troisième lieu, elle fait valoir que la présence de la marque enregistrée sur des sites Internet n’est pas, en soi, suffisante pour prouver l’usage sérieux de la marque enregistrée. En quatrième lieu, d’une part, les photographies produites ne permettraient pas de démontrer que la marque enregistrée a été utilisée publiquement et vers l’extérieur pour les produits contestés, et, d’autre part, l’utilisation de signes autres que la marque enregistrée ne pourrait pas être prise en considération.

65      À cet égard, il convient de rappeler la jurisprudence mentionnée au point 35 ci-dessus, dont il ressort que, dans le cadre de l’appréciation des preuves de l’usage sérieux d’une marque, il ne s’agit pas d’analyser chacune des preuves de façon isolée, mais conjointement, afin d’en identifier le sens le plus probable et cohérent.

66      En premier lieu, en ce qui concerne la déclaration sous serment, il convient de rappeler qu’elle constitue un moyen de preuve crédible, ainsi que cela a été constaté aux points 47 à 49 ci-dessus.

67      Par ailleurs, contrairement à ce que la requérante prétend, l’absence d’éléments de preuve corroborant la part de marché détenue par la marque enregistrée et le chiffre d’affaires réalisé tels qu’ils résultent de ladite déclaration n’est pas susceptible de démontrer, en soi, que l’usage de la marque enregistrée, dans le secteur économique concerné, n’a pas permis de maintenir ou de créer des parts de marché pour les produits ou services protégés par cette marque [voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2017, Keturi kambariai/EUIPO – Coffee In (coffee inn), T‑202/16, non publié, EU:T:2017:750, point 62].

68      En deuxième lieu, selon la jurisprudence, le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque enregistrée ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être en rapport avec d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale de l’entreprise exploitant la marque, ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné. De ce fait, il n’est pas nécessaire que l’usage de la marque contestée soit toujours quantitativement important pour être qualifié de sérieux (voir arrêt du 18 mars 2015, SMART WATER, T‑250/13, non publié, EU:T:2015:160, point 49 et jurisprudence citée), dans la mesure où, conformément à la jurisprudence rappelée au point 32 ci-dessus, l’exigence d’un usage sérieux ne vise pas à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes.

69      Ainsi, l’appréciation de l’importance de l’usage ne doit pas reposer exclusivement sur le montant des revenus expressément mentionnés sur les factures, dans la mesure où même le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque enregistrée doivent être appréciés en rapport avec d’autres facteurs pertinents.

70      À cet égard, il convient de relever, premièrement, en ce qui concerne la condition de l’utilisation publique et vers l’extérieur de la marque enregistrée, que les factures produites par l’intervenante ont été adressées à des destinataires différents, ce qui démontre que l’usage de ladite marque s’est fait publiquement et vers l’extérieur [voir, en ce sens, arrêt du 27 septembre 2007, La Mer Technology/OHMI – Laboratoires Goëmar (LA MER), T‑418/03, non publié, EU:T:2007:299, point 87].

71      Deuxièmement, même en se limitant aux factures mises en évidence par la requérante, en ce qu’elles seraient les seules à viser le territoire pertinent, le volume global de revenus qu’elles attesteraient, à savoir 34 733,82 dollars des États-Unis (USD), ne peut pas être considéré comme symbolique, en considération du prix unitaire, compris entre 2,57 et 34,37 USD, auquel les produits contestés sont vendus et qui résulte desdites factures.

72      Troisièmement, il convient de constater que les factures fournies par l’intervenante ne portent pas de numéros consécutifs et sont datées d’années et de mois différents. Il s’agit, par conséquent, d’exemples qui ne représentent pas le montant global des ventes réelles des produits revêtus de la marque enregistrée. Elles couvrent par ailleurs une partie importante de la période pertinente, à savoir les années 2014 à 2016, ainsi que le début de l’année 2017.

73      Quatrièmement, les produits mentionnés sur les factures peuvent être retrouvés dans les images qui y sont reproduites et certains des produits facturés peuvent être appariés à leur représentation dans les catalogues et les brochures portant le nom de la marque enregistrée. Il peut dès lors raisonnablement être considéré comme établi que la marque enregistrée était effectivement apposée sur les produits contestés ayant fait l’objet d’une facture.

74      En troisième lieu, les autres éléments de preuve produits par l’intervenante au titre de la période pertinente, à savoir les nombreux extraits imprimés de sites Internet sur lesquels les produits contestés étaient mis en vente, les brochures et le matériel publicitaire, les photographies de points de vente au détail et les pages des réseaux sociaux sont également pertinents pour établir que les produits contestés portant la marque enregistrée étaient effectivement proposés à la vente.

75      En quatrième lieu, l’usage de la dénomination sociale, du nom commercial ou d’une enseigne peut également être considéré comme un usage sérieux de la marque enregistrée lorsque le signe est apposé sur les produits commercialisés ou, même en l’absence d’apposition, il y a usage pour des produits ou des services lorsque ce signe est utilisé de telle façon qu’il s’établit un lien entre le signe constituant la dénomination sociale, le nom commercial ou l’enseigne et les produits commercialisés ou les services fournis (voir, par analogie, arrêt du 11 septembre 2007, Céline, C‑17/06, EU:C:2007:497, points 22 et 23).

76      Tel est le cas en l’espèce, dans la mesure où les photographies d’enseignes dans des points de vente ou l’usage de la marque enregistrée dans des boutiques en ligne servent à désigner les ventes des produits contestés sous la marque enregistrée. En effet, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, l’intervenante n’offre pas de services de vente au détail ou de publicité, quel que soit le produit, à des clients externes, mais elle vend ses propres produits et en fait la publicité afin de créer et de conserver une part de marché pour les produits contestés.

77      Au vu de tout ce qui précède, il convient de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours est parvenue à la conclusion que l’intervenante avait apporté la preuve d’un usage sérieux de la marque enregistrée, et ce sans examiner l’utilisation de signes ou enregistrements autres que la marque enregistrée.

78      À cet égard, contrairement à ce que semble soutenir la requérante, la chambre de recours a effectué, à bon droit, une évaluation de l’intégralité des preuves présentées dans le cadre d’une appréciation globale, plutôt qu’un examen de chaque preuve de manière isolée. Toutes les circonstances du cas d’espèce ont été prises en compte et toutes les pièces présentées qui pouvaient être liées spécifiquement à la marque enregistrée et aux produits contestés ont été examinées conjointement, à la lumière de la jurisprudence mentionnée au point 35 ci-dessus.

 Sur l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés

79      La requérante fait valoir que les produits désignés dans les factures ne sont pas liés à la marque enregistrée et que la plupart des éléments de preuve ne concernent pas les produits contestés. Selon la requérante, seul un faible nombre des éléments de preuve produits peuvent être reliés à l’usage de la marque enregistrée, sans qu’ils indiquent pour autant précisément pour quels produits celle-ci a été utilisée.

80      Ainsi qu’il a été rappelé au point 35 ci-dessus, les éléments de preuve doivent faire l’objet d’une appréciation globale. Force est de constater que les documents relatifs aux ventes en ligne et au détail concernent les produits contestés. En effet, les boutiques en ligne proposent clairement divers compléments alimentaires et diététiques, lesquels apparaissent également dans les brochures et sont répertoriés dans les factures, ainsi que cela a été constaté au point 73 ci-dessus. Par ailleurs, tous ces éléments de preuve sont liés entre eux et démontrent l’usage de la marque enregistrée pour les produits contestés.

81      Il en résulte que, pris dans leur ensemble, les éléments de preuve apportés par l’intervenante sont suffisants pour démontrer l’usage sérieux de la marque enregistrée pour les produits contestés.

82      Au vu de ce qui précède, il convient également de rejeter comme non fondée la seconde branche du moyen unique de la requérante.

83      L’argument de la requérante, tiré de l’irrecevabilité des éléments de preuve qui ne sont pas traduits dans la langue de procédure et d’une violation du principe du contradictoire, en ce qu’elle n’aurait pas été en mesure de présenter sa position à l’égard desdits éléments de preuve, ne saurait non plus prospérer.

84      En effet, force est de constater qu’il ressort de plusieurs des allégations de la requérante qu’elle avait compris le contenu des éléments de preuve, même lorsqu’ils étaient présentés dans une autre langue que la langue de procédure. Il en fut ainsi, à titre d’exemple, lorsqu’elle a soutenu que certains documents liés aux boutiques en ligne, en espagnol ou en bulgare, ne concernaient pas l’utilisation de la marque enregistrée pour les produits contestés. Par ailleurs, il convient de relever que la plupart des éléments de preuve présentés ont été rédigés en anglais, c’est-à-dire dans la langue de la procédure en déchéance.

85      Dans ces circonstances, le principe du contradictoire et l’égalité des armes entre les parties dans une procédure inter partes ont été respectés. Il ne saurait pas non plus être considéré que l’absence de traduction de certains des éléments de preuve en cause ait affecté l’exercice des droits de la défense de la requérante, dans la mesure où elle a été en mesure de contester devant le Tribunal les documents en cause [voir, en ce sens, arrêt du 8 mai 2017, Les Éclaires/EUIPO – L’éclaireur International (L’ECLAIREUR), T‑680/15, non publié, EU:T:2017:320, point 23].

86      Dès lors, le moyen unique soulevé par la requérante doit être écarté et, partant, le recours rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

87      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

88      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

89      L’intervenante a conclu, en outre, à ce que la requérante soit condamnée à lui rembourser les dépens qu’elle a exposés aux fins de la procédure devant la division d’annulation et devant la cinquième chambre de recours de l’EUIPO. À cet égard, d’une part, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, seuls les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Il en résulte que les frais exposés aux fins de la procédure devant la division d’annulation ne peuvent pas être considérés comme des dépens récupérables. Dès lors, les conclusions de l’intervenante doivent être rejetées en ce qu’elles tendent à la condamnation de la requérante aux dépens exposés devant la division d’annulation. D’autre part, en ce que la demande de l’intervenante concerne les dépens de la procédure devant la chambre de recours, il suffit de relever que, étant donné que le présent arrêt rejette le recours dirigé contre la décision attaquée, c’est le dispositif de celle-ci qui continue à régler les dépens en cause [voir, en ce sens, arrêt du 28 février 2019, Lotte/EUIPO – Générale Biscuit-Glico France (PEPERO original), T‑459/18, non publié, EU:T:2019:119, points 193 et 194 et jurisprudence citée].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.


2)      Euroapotheca UAB est condamnée aux dépens.

Spielmann

Öberg

Spineanu-Matei

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 juillet 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.