Language of document : ECLI:EU:T:2022:693

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

9 novembre 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative by L.e.n.o beauty – Marque nationale verbale antérieure LAINO – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑779/21,

Financiere Batteur, établie à Hérouville-Saint-Clair (France), représentée par Mes P. Greffe et F. Donaud, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. V. Ruzek, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Leno Beauty Sas, établie à Vintimille (Italie),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé, lors des délibérations, de MM. D. Spielmann, président, R. Mastroianni et I. Gâlea (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Financiere Batteur, demande l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 13 octobre 2021 (affaire R 514/2021-2) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 19 juin 2019, Leno Beauty Sas, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits et services relevant des classes 3 et 44 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Huiles essentielles et extraits aromatiques » ;

–        classe 44 : « Hygiène et soins de beauté pour êtres humains ».

4        Le 11 octobre 2019, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était notamment fondée sur la marque française verbale antérieure LAINO, enregistrée le 30 octobre 1991 sous le numéro 1 703 684, désignant les produits relevant de la classe 3 et correspondant à la description suivante : « Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver, préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser, savons, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux, dentifrices ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 22 janvier 2021, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité, en concluant que les différences entre les marques en conflit étaient clairement perceptibles et suffisantes pour exclure tout risque de confusion et ce, même pour les produits de la classe 3 qui avaient été jugés identiques.

8        Le 22 mars 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Premièrement, elle a estimé, en substance, que le public pertinent se composait du grand public, faisant preuve d’un niveau d’attention moyen, sur le territoire français.

10      Deuxièmement, la chambre de recours a considéré que les « huiles essentielles et extraits aromatiques » visés par la marque demandée étaient identiques aux « huiles essentielles, cosmétiques, parfumerie » couverts par la marque antérieure. S’agissant des services d’« hygiène et soins de beauté pour êtres humains » visés par la marque demandée, elle les a considérés comme étant similaires à un degré inférieur à la moyenne aux « huiles essentielles, cosmétiques, parfums » couverts par la marque antérieure, en raison de leur nature et leur méthode d’usage différentes.

11      Troisièmement, en ce qui concerne la comparaison des signes en conflit, la chambre de recours a constaté que ceux-ci étaient visuellement faiblement similaires, phonétiquement similaires et n’étaient pas conceptuellement similaires. Considérant par ailleurs que la marque antérieure présentait un caractère distinctif normal, elle a conclu que les différences entre lesdits signes étaient suffisantes pour écarter tout risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée

–        accueillir l’opposition, de sorte que la marque demandée soit refusée à l’enregistrement ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      À l’appui du recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

15      La requérante soutient, en substance, qu’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. Selon elle, la chambre de recours a, à tort, comparé les signes en conflit en prenant en compte des éléments secondaires et non distinctifs de ces signes. En outre, elle n’aurait pas procédé, de manière effective, à une appréciation globale fondée sur l’impression d’ensemble produite par ces signes, en prenant en compte le caractère distinctif élevé de la marque antérieure et la similitude des produits et des services en cause.

16      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

17      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

18      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

19      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

20      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’absence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

21      En l’espèce, il convient de relever que la requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le public pertinent se compose du grand public, faisant preuve d’un niveau d’attention moyen, sur le territoire français.

22      En outre, la requérante ne conteste pas les appréciations de la chambre de recours selon lesquelles, d’une part, les « huiles essentielles et extraits aromatiques » relevant de la classe 3 visés par la marque demandée étaient identiques aux « huiles essentielles, cosmétiques, parfumerie » relevant de la même classe et couverts par la marque antérieure, et, d’autre part, les services d’« hygiène et soins de beauté pour êtres humains » relevant de la classe 44 et visés par la marque demandée, étaient similaires à un degré inférieur à la moyenne aux « huiles essentielles, cosmétiques, parfumerie » couverts par la marque antérieure.

23      La requérante ne conteste pas davantage la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit sont similaires sur le plan phonétique.

 Sur la comparaison des signes

24      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

25      En l’espèce, les signes à comparer sont, d’une part, la marque antérieure, constituée de l’élément verbal « laino », et, d’une part, la marque demandée, composée par les éléments verbaux écrits en police de caractère stylisée « by », « l.e.n.o », dont les lettres sont séparées par trois points, et « beauty », accompagnés par la représentation d’un cœur rouge.

 Sur les éléments dominants et distinctifs

26      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

27      La chambre de recours a rappelé que, lorsque les signes en conflit étaient constitués d’éléments à la fois verbaux et figuratifs, l’élément verbal avait, en principe, davantage d’impact que l’élément figuratif. Elle a toutefois estimé que, en l’espèce, compte tenu de leur taille et de leur position, les éléments figuratifs de la marque demandée ne pouvaient pas être négligés.

28      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir, dans sa comparaison des signes en conflit, accordé une trop grande importance aux éléments figuratifs de la marque demandée qu’elle considère comme étant secondaires et non distinctifs. Selon elle, seuls les éléments verbaux « laino » et « l.e.n.o » desdits signes auraient dû être pris en considération.

29      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

30      Tout d’abord, les parties s’accordent sur le fait que, en raison de sa place centrale dans la marque demandée et de son écriture en caractères gras et de grande taille, l’élément verbal « l.e.n.o » constitue l’élément le plus distinctif de ladite marque.

31      Toutefois, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus, l’appréciation de la similitude entre deux marques doit prendre en compte chaque élément qui les compose et ce n’est que si tous les autres composants de la marque demandée sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant dudit signe.

32      S’agissant des éléments verbaux et figuratifs composant la marque demandée autres que l’élément verbal « l.e.n.o », il y a lieu d’observer, à l’instar de l’EUIPO, que les éléments verbaux « by » et « beauty », ainsi que la représentation du cœur rouge ont tout au plus un caractère distinctif faible.

33      Il est également constant que les éléments verbaux « by » et « beauty » de la marque demandée présentent une police de caractère stylisée noire plus fine et d’une taille plus petite que celle utilisée pour l’élément verbal « l.e.n.o » de ladite marque. En outre, la représentation du cœur est d’une taille moyenne, centrée et rouge, contrastant ainsi avec la couleur noire des éléments verbaux de la marque demandée.

34      Ainsi, compte tenu de leur taille, de leur position et de leur couleur, il ne saurait être exclu que ces éléments verbaux et figuratifs de la marque demandée, bien que pas ou peu distinctifs, puissent être gardés en mémoire par le public pertinent, de sorte qu’ils ne peuvent pas être considérés comme étant négligeables, comme le prétend la requérante. Partant, c’est à tort que cette dernière soutient que seuls les éléments verbaux « laino » et « l.e.n.o » des signes en conflit auraient dû être pris en considération.

35      Cette conclusion ne saurait être remise en question par l’exemple, invoqué par la requérante, tiré de l’arrêt du 23 septembre 2020, Brillux/EUIPO – Synthesa Chemie (Freude an Farbe) (T‑402/19, non publié, EU:T:2020:429). En effet, l’interprétation de la requérante dudit arrêt ne saurait, en tout état de cause, constituer un critère s’imposant dans tous les cas, car l’appréciation de la similitude des signes dépend d’un ensemble de facteurs qui doivent être analysés en fonction des circonstances de chaque cas d’espèce [voir, en ce sens, arrêts du 12 décembre 2017, For Tune/EUIPO – Simplicity trade (opus AETERNATUM), T‑815/16, non publié, EU:T:2017:888, point 56, et du 16 octobre 2018, M & K/EUIPO – Genfoot (KIMIKA), T‑171/17, non publié, EU:T:2018:683, point 106].

36      Partant, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en prenant en considération tous les éléments composant la marque demandée et en considérant que les éléments verbaux et figuratifs pas ou peu distinctifs de ladite marque n’étaient pas négligeables pour les besoins de la comparaison des signes en conflit.

 Sur la similitude visuelle

37      La chambre de recours a constaté que les signes en conflit coïncidaient en leurs lettres « l », « n » et « o », mais différaient par les éléments supplémentaires de la marque demandée, à savoir les trois points séparant les lettres « l », « e », « n » et « o », les termes « by » et « beauty », la représentation d’un cœur rouge et la stylisation typographique des éléments verbaux. À cet égard, elle a estimé que, en raison de leur position et de leur taille, les éléments figuratifs de la marque demandée ne pouvaient être négligés. Compte tenu de ces différences marquantes, elle a conclu que les signes en conflit étaient visuellement faiblement similaires.

38      La requérante considère que les différences entre les signes en conflit ne concernent que des détails de ces signes. Selon elle, il existe une grande similitude visuelle entre les éléments verbaux « laino » et « l.e.n.o », dès lors que trois des quatre lettres composant lesdits éléments sont identiques. En outre, même à comparer la marque antérieure avec la marque demandée dans son ensemble, les mots « by » et « beauty » ainsi que l’élément figuratif en forme de cœur ne seraient que secondaires et négligeables.

39      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

40      Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que tant la chambre de recours que la requérante ont considéré que les éléments verbaux « laino » et « l.e.n.o » des signes en conflit présentaient une grande similitude dans la mesure où trois des quatre lettres les composant étaient identiques.

41      Ensuite, à l’instar de l’EUIPO, force est de constater que les signes en conflit, pris dans leur ensemble, diffèrent par leur début respectif, à savoir « lai » pour la marque antérieure et « by le » pour la marque demandée.

42      Par ailleurs, il n’est pas non plus contesté que la marque demandée diffère de la marque antérieure par certains de ses éléments verbaux et figuratifs, à savoir, les éléments verbaux « by » et « beauty », les trois points séparant les lettres au sein de l’élément verbal « l.e.n.o », ainsi que la représentation d’un cœur rouge, présentant une stylisation typographique.

43      En outre, même dans des circonstances où deux signes en conflit comprennent des éléments verbaux revêtant un degré important de similitude, ce fait ne permet pas, à lui seul, de conclure à l’existence d’une similitude visuelle entre les signes en conflit. La présence, dans l’un des signes, d’éléments figuratifs ayant une configuration particulière et originale est susceptible d’aboutir à ce que l’impression globale fournie par chaque signe soit différente [voir arrêts du 24 novembre 2005, Simonds Farsons Cisk/OHMI – Spa Monopole (KINJI by SPA), T‑3/04, EU:T:2005:418, point 48 et jurisprudence citée, et du 27 juin 2019, Aldi/EUIPO – Crone (CRONE), T‑385/18, non publié, EU:T:2019:449, point 74 et jurisprudence citée].

44      Il s’ensuit que, par rapport à la marque antérieure constituée de l’élément verbal « laino », les éléments verbaux et figuratifs de la marque demandée, qui sont cités au point 42 ci-dessus et qui ne sont pas négligeables, sont susceptibles d’attirer l’attention du public pertinent et d’être gardés en mémoire.

45      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les signes en conflit étaient visuellement similaires à un faible degré.

 Sur la similitude conceptuelle

46      La chambre de recours a considéré que les signes en conflit n’étaient pas similaires sur le plan conceptuel, car, d’une part, les éléments verbaux « l.e.n.o » et « laino » n’avaient aucune signification en langue française et, d’autre part, le terme anglais « beauty » était compris par le consommateur français comme signifiant « beauté » en raison de la proximité orthographique de ces deux mots.

47      La requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les éléments verbaux « l.e.n.o » et « laino » n’ont aucune signification en français, mais reproche à celle-ci d’avoir retenu une différence conceptuelle entre les signes en conflit en se fondant sur l’élément verbal descriptif « beauty ». Selon elle, l’absence de signification des éléments verbaux « l.e.n.o » et « laino » rendrait la comparaison conceptuelle impossible, étant donné que l’élément « beauty » ne ferait que renvoyer à la catégorie des produits et services pour lesquels la marque contestée a été demandée. Ainsi, l’ajout du terme « beauty » ne créerait pas de différence conceptuelle entre lesdits signes.

48      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

49      En l’espèce, il y a lieu de constater, en ce qui concerne la marque demandée, que l’élément verbal « l.e.n.o » est dépourvu de signification en langue française.

50      En outre, contrairement à ce que prétend la requérante, bien que les éléments verbaux « by » et « beauty » de la marque demandée constituent des termes auxquels le public pertinent n’accordera que peu d’importance, ceux-ci ont un impact sur l’appréciation de la comparaison conceptuelle des signes en conflit et doivent donc être pris en considération.

51      À ce titre, l’élément verbal « by » de la marque demandée est un terme qui fait partie du vocabulaire élémentaire de la langue anglaise, facilement compris par un public non anglophone comme signifiant « de » ou « par » [voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, Amigüitos pets & life/EUIPO – Société des produits Nestlé (THE ONLY ONE by alphaspirit wild and perfect), T‑40/19, non publié, EU:T:2019:890, point 78]. L’élément verbal « beauty » de la même marque est un terme courant dans le domaine de l’esthétique et sera a fortiori facilement perçu par le public pertinent comme signifiant « beauté », en raison de la proximité orthographique entre les deux termes. Ainsi, prise dans son ensemble, cette marque sera comprise par ledit public comme signifiant « par leno beauté ».

52      En ce qui concerne la marque antérieure, il est constant que l’élément verbal « laino », qui la constitue, n’a aucune signification en français.

53      Dans la mesure où la marque demandée présente une certaine signification sémantique grâce à ses éléments verbaux compréhensibles, et que la marque antérieure est dépourvue de toute signification aux yeux dudit public, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a estimé que les signes en conflit n’étaient pas conceptuellement similaires.

 Sur le risque de confusion

54      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

55      La chambre de recours a considéré que, compte tenu du caractère distinctif normal de la marque antérieure et des différences relevées entre les signes en cause, ces dernières étaient clairement perceptibles et suffisantes pour écarter tout risque de confusion, malgré l’identité et la similitude des produits et des services.

56      La requérante reproche à la chambre de recours de s’être focalisée sur des différences relatives aux éléments figuratifs qui sont secondaires, sans prendre en compte l’importante ressemblance visuelle et phonétique des éléments verbaux « laino » et « l.e.n.o » des signes en conflit.

57      En outre, la requérante estime que c’est à tort que la chambre de recours a reconnu un caractère distinctif normal à la marque antérieure. Celle-ci posséderait plutôt un caractère distinctif élevé en raison de l’absence de signification du terme « laino » dans le contexte des produits en cause.

58      Enfin, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas pris en compte dans l’appréciation globale du risque de confusion le fait que les produits et services étaient identiques ou similaires.

59      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

60      Premièrement, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours s’est focalisée sur les différences entre les signes en conflit affectant des éléments faiblement distinctifs de ces signes, sans rechercher si les prétendues différences visuelles ne seraient pas compensées par la similitude phonétique, force est de constater que la requérante n’avance aucun argument permettant d’expliquer les raisons pour lesquelles la similitude phonétique compenserait les différences visuelles et ainsi d’établir que les appréciations de ladite chambre à cet égard sont entachées d’erreur.

61      Deuxièmement, s’agissant du caractère distinctif de la marque antérieure, il convient de constater, à l’instar de l’EUIPO, que la requérante ne revendique pas un caractère distinctif élevé en raison de l’usage accru ou de la renommée de la marque antérieure, mais se fonde uniquement sur l’absence de signification du terme « laino » dans le contexte des produits en cause. Or, une telle circonstance n’est pas de nature, à elle seule, à conférer à la marque antérieure un caractère distinctif intrinsèque élevé de nature à la protéger de façon étendue [voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2019, Marriott Worldwide/EUIPO – AC Milan (AC MILAN), T‑28/18, non publié, EU:T:2019:436, point 107 et jurisprudence citée].

62      Dès lors, la requérante n’a pas établi que la chambre de recours avait commis une erreur en estimant que le caractère distinctif de la marque antérieure était normal.

63      Troisièmement, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours n’a pas tenu compte de l’identité des produits et de la similitude des services en cause, il ressort du point 28 de la décision attaquée, que ladite chambre a conclu à l’absence de risque de confusion « malgré l’identité et la similarité des produits et [des] services ». Ladite allégation procède donc d’une lecture erronée de la décision attaquée et doit, partant, être écartée.

64      Par ailleurs, pour les motifs rappelés au point 35 ci-dessus, la requérante ne saurait utilement invoquer, afin d’établir une erreur commise par la chambre de recours, l’arrêt du 27 février 2014, Pêra-Grave/OHMI – Fundação Eugénio de Almeida (QTA S. JOSÉ DE PERAMANCA) (T‑602/11, non publié, EU:T:2014:97).

65      Partant, les différences visuelles importantes, combinées à l’absence de similitude conceptuelle, étant clairement perceptibles et ne pouvant être compensées par l’identité ou la similitude des produits et des services en cause, c’est à bon droit que la chambre de recours a écarté l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

66      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen unique ne devant pas être accueilli, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

67      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

68      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Financiere Batteur est condamnée aux dépens.

Spielmann

Mastroianni

Gâlea

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 novembre 2022.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

M. van der Woude


*      Langue de procédure : le français.