Language of document : ECLI:EU:T:2022:721

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

23 novembre 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque verbale GENERAL PIPE CLEANERS – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑151/22,

General Wire Spring Co., établie à McKees Rocks, Pennsylvanie (États-Unis), représentée par Me E. Carrillo, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. R. Raponi, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur) et W. Valasidis, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, General Wire Spring Co., demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 11 janvier 2022 (affaire R 1452/2021-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 21 août 2020, la requérante a désigné l’Union européenne pour l’enregistrement international n° 1577530 du signe verbal GENERAL PIPE CLEANERS.

3        Les produits pour lesquels la protection de l’enregistrement international a été demandée relevaient notamment des classes 7 et 9 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante (ci-après les « produits en cause ») :

–        classe 7 : « Dispositifs pour le nettoyage de tuyaux d’évacuation et le lavage sous pression, à savoir machines pour le nettoyage de tuyaux d’évacuation et le lavage sous pression ; dispositifs pour le nettoyage de tuyaux d’évacuation, à savoir machines de nettoyage pour tuyaux d’évacuation ; parties de machines-outils, à savoir furets en tant que parties de tarières à fonctionnement mécanique ; dispositifs pour le nettoyage de tuyaux d’évacuation engorgés, à savoir machines pour le nettoyage de tuyaux d’évacuation engorgés ; parties de machines, à savoir connecteurs pour furets et câbles de machines de nettoyage de tuyaux d’évacuation ; parties de machines, à savoir connecteurs pour furets et câbles de machines pour le nettoyage de tuyaux de drainage à fonctionnement mécanique ; machines pour la décongélation de tuyaux congelés » ;

–        classe 9 : « Systèmes d’inspection vidéo à utiliser dans des tuyaux et conduites, comprenant une caméra, un câble, un écran vidéo et un localisateur de position ».

4        Par décision du 23 juin 2021, l’examinatrice a rejeté, en tant qu’elle visait notamment les produits en cause, la demande de protection de l’enregistrement international dans l’Union européenne, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

5        Le 23 août 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de l’examinatrice.

6        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours.

7        Premièrement, la chambre de recours a considéré que le signe demandé était descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, étant donné qu’il existait, pour le public anglophone pertinent, un lien direct et concret entre l’expression « general pipe cleaners » et l’espèce, le type et la destination des produits en cause.

8        Deuxièmement, la chambre de recours a également conclu que le signe demandé n’était pas distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, dès lors qu’il ne permettait pas d’identifier l’origine des produits en cause.

9        Troisièmement, la chambre de recours a rejeté les arguments de la requérante relatifs, d’une part, à l’enregistrement par l’EUIPO de marques prétendument comparables pour les produits en cause et, d’autre part, à l’enregistrement du signe demandé, lié à ces produits aux États-Unis.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      La requérante invoque en substance trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 et, le troisième, de l’absence de prise en compte de l’enregistrement du signe demandé, lié aux mêmes produits aux États-Unis.

 Sur la recevabilité de certains documents annexés à la requête

13      À titre liminaire, l’EUIPO conclut au rejet, comme irrecevables, de plusieurs documents, figurant aux annexes 5 à 9 de la requête, qui ont été produits pour la première fois devant le Tribunal et qui ne figuraient pas dans le dossier de la procédure administrative ouverte devant lui.

14      Ces documents concernent respectivement le résultat d’une recherche effectuée sur un moteur de recherche en ligne concernant le terme « cleaners », le résultat d’une recherche effectuée sur une encyclopédie libre et participative en ligne concernant le terme « cleaner » et trois impressions de pages extraites de sites Internet qui utilisent le terme « cleaner » pour désigner des personnes auxquelles sont confiées certaines tâches.

15      Ces documents, produits pour la première fois devant le Tribunal, ne peuvent être pris en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO, au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les documents susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 19 et jurisprudence citée].

16      L’irrecevabilité de tels documents ne saurait toutefois empêcher la requérante de se prévaloir de l’argument, précédemment évoqué lors de la procédure administrative devant l’EUIPO, selon lequel le terme « cleaner » est plutôt compris comme un terme désignant une personne effectuant une tâche de nettoyage que comme un terme désignant un dispositif.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001

17      La requérante critique plusieurs appréciations effectuées par la chambre de recours dans la partie de la décision attaquée consacrée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.  En particulier, elle soutient que l’expression « general pipe cleaners » ne fournit pas directement de renseignements sur les produits en cause et que les consommateurs n’établiront pas immédiatement un lien direct avec ces produits ou leurs caractéristiques.

18      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

19      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

20      Ces signes ou indications sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir identifier l’origine commerciale du produit ou du service [voir, en ce sens, arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 30, et du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, EU:T:2002:41, point 37].

21      Pour qu’un signe relève du champ d’application de l’interdiction énoncée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêts du 12 janvier 2005, Deutsche Post EURO EXPRESS/OHMI (EUROPREMIUM), T‑334/03, EU:T:2005:4, point 25 et jurisprudence citée, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, point 25 et jurisprudence citée].

22      L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [voir arrêt du 25 octobre 2005, Peek & Cloppenburg/OHMI (Cloppenburg), T‑379/03, EU:T:2005:373, point 37 et jurisprudence citée].

 Sur le niveau d’attention du public pertinent

23      La chambre de recours a indiqué que les produits en cause étaient destinés à un public faisant preuve d’un niveau d’attention supérieur à la moyenne. À cet égard, elle a considéré que l’appréciation de l’examinatrice, selon laquelle le public pertinent était composé de professionnels de la plomberie, n’était pas remise en cause par la requérante qui avait fait valoir qu’une partie desdits produits s’adressait aussi au grand public qui était amateur de bricolage. En effet, pour la chambre de recours, étant donné que les bricoleurs étaient conscients, comme les professionnels de la plomberie, des spécificités des produits en cause, de leur application, de leur utilisation, leur niveau d’attention serait également supérieur à la moyenne lors de l’achat de ces produits.

24      La requérante critique cette analyse au motif que, à compter du moment où la chambre de recours reconnaît qu’une partie du public pertinent n’est pas constituée par des professionnels de la plomberie, mais par le grand public, il y aurait lieu de tenir compte du niveau d’attention « ordinaire » de cette partie du public pertinent. Ce niveau d’attention, moins élevé que celui pris en compte par la chambre de recours, aurait probablement eu un impact sur la compréhension et l’interprétation du signe demandé.

25      Une telle critique ne saurait être retenue. En effet, il convient de rappeler que le niveau d’attention du consommateur moyen, y compris du grand public, est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services visés [voir arrêt du 3 mai 2018, Raise Conseil/EUIPO – Raizers (RAISE), T‑463/17, non publié, EU:T:2018:249, point 37 et jurisprudence citée]. La requérante ne pouvait donc se limiter à soutenir que le grand public composant le public pertinent ferait preuve d’un niveau d’attention « ordinaire » sans autre explication. Au demeurant, le fait que le public pertinent est spécialisé ne saurait avoir une influence déterminante sur les critères juridiques utilisés pour l’appréciation du caractère descriptif ou distinctif d’un signe [voir arrêt du 7 mai 2019, Fissler/EUIPO (vita), T‑423/18, EU:T:2019:291, point 14 et jurisprudence citée]. Or, la requérante ne démontre pas que le fait qu’une partie du public pertinent ferait prétendument preuve d’un niveau d’attention « ordinaire » aurait une influence déterminante en l’espèce sur l’appréciation du caractère descriptif du signe demandé.

26      C’est donc à bon droit que la chambre de recours a conclu dans la présente affaire qu’il n’y avait pas lieu pour elle de considérer que le niveau d’attention plus élevé du public pertinent, qu’il s’agisse des professionnels de la plomberie ou des amateurs de bricolage, constituait un facteur déterminant pour son appréciation.

 Sur le public anglophone concerné

27      La chambre de recours a considéré que, dans la mesure où le signe demandé comportait des mots qui étaient couramment utilisés en anglais, l’appréciation du caractère enregistrable de la marque demandée devait être fondée sur la partie anglophone du public de l’Union, qui comprend à tout le moins le public des États membres dans lesquels l’anglais est une langue officielle, à savoir l’Irlande et Malte.

28      Cette appréciation n’est pas contestée par la requérante et il n’y a pas lieu pour le Tribunal de la remettre en cause.

 Sur la signification du signe demandé

29      La chambre de recours a relevé que le signe demandé combinait les termes « general », « pipe » et « cleaners » et que chacun de ces termes avait une signification. Selon les extraits du Collins English Dictionary cités par la chambre de recours dans la décision attaquée, le mot « general » était un mot usuel de l’anglais qui désignait le sentiment d’appartenance à une classe entière de choses ou quelque chose qui se prévalait de cette classe ; le mot « pipe » faisait référence à « un long tube en métal, en plastique, etc., utilisé pour transporter de l’eau, du pétrole, du gaz, etc. », un tel mot étant banal dans le domaine de la plomberie, et le mot « cleaner » pouvait désigner, au sens large, tout dispositif de nettoyage.

30      En conséquence, la chambre de recours a considéré que la combinaison des termes précités, qui était grammaticalement correcte et conforme à la syntaxe anglaise, était parfaitement compréhensible en anglais et que les informations contenues par cette combinaison seraient immédiatement saisies par le public anglophone. La chambre de recours a conclu que l’expression « general pipe cleaners » serait comprise par le public pertinent comme signifiant « dispositif utilisé pour le nettoyage des tuyaux » en ce qui concernait les produits en cause.

31      La requérante critique cette conclusion en faisant valoir que l’expression « general pipe cleaners » est une combinaison inhabituelle, qui ne décrit aucun des produits en cause, ni leurs caractéristiques, mais transmet seulement un message évocateur ou suggestif de ces produits. Cette expression ne pourrait pas être comprise par le public pertinent comme faisant référence à un dispositif, étant donné qu’un « cleaner » est une personne qui exerce un emploi spécifique. Une telle expression signifierait littéralement et peu clairement que des employés de maison ou des travailleurs industriels nettoient des tuyaux « généraux ».

32      Il convient toutefois de rappeler, comme le fait valoir l’EUIPO, qu’un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 32, et du 15 septembre 2021, Beelow/EUIPO (made of wood), T-702/20, non publié, EU:T:2021:589, point 38].

33      En conséquence, même si, comme le soutient la requérante, le mot « cleaner » pouvait avoir une autre signification, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré dans la décision attaquée que l’une des significations potentielles de la combinaison des termes « general pipe cleaners », à savoir « dispositif utilisé pour le nettoyage des tuyaux » (voir point 30 ci-dessus), était grammaticalement correcte et conforme à la syntaxe anglaise, n’était pas inhabituelle et véhiculait un message clair et non équivoque immédiatement perceptible pour la partie anglophone du public de l’Union.

 Sur le rapport entre le signe demandé et les produits en cause

34      La chambre de recours a considéré ce qui suit afin d’établir un rapport suffisamment direct et concret entre le signe demandé et les produits en cause.

35      Premièrement, en ce qui concerne les produits compris dans la classe 7, la chambre de recours a relevé que, pour nombre d’entre eux, il était expressément indiqué que ces produits étaient destinés au nettoyage de tuyaux d’évacuation. Dès lors, la chambre de recours a considéré que le public pertinent comprendrait aisément que le signe demandé l’informait d’une caractéristique ou d’un élément essentiel de ces produits, destinés au nettoyage de tuyaux d’évacuation. Les mêmes considérations s’appliqueraient aux connecteurs (câbles et furets) utilisés pour les dispositifs destinés au nettoyage des tuyaux d’évacuation.

36      Deuxièmement, en ce qui concerne les autres produits en cause relevant de la classe 7, qui visent les furets en tant que parties de tarières d’égout à fonctionnement mécanique (dans sa version anglaise « snakes as part of power-operated sewer augers ») et les machines pour la décongélation de tuyaux congelés, la chambre de recours a relevé que ces produits comportaient une référence implicite au nettoyage de tuyaux. En effet, qu’il s’agisse des tarières d’égout, également appelées tarières de drainage, ou des machines utilisées pour éliminer les engorgements des tuyaux causés par l’eau gelée, le lien serait suffisamment étroit entre le signe demandé et ces produits pour que le signe relève du champ d’application de l’interdiction prévue par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

37      Troisièmement, en ce qui concerne les produits en cause relevant de la classe 9, la chambre de recours a indiqué que, même si ceux-ci ne faisaient pas référence au nettoyage, leur définition laissait entendre qu’ils pouvaient être utilisés à des fins de nettoyage général de tuyaux. Il est précisé que le « système d’inspection vidéo » est destiné « à être utilisé dans des tuyaux et conduites », ce qui permet de considérer que l’utilisation d’un tel produit est de déterminer si une obstruction s’est produite et nécessite le fonctionnement d’un nettoyeur de tuyaux général. Le signe demandé indiquerait alors que ces produits sont largement adaptés à une utilisation pour le nettoyage général de tuyaux.

38      Selon la requérante, dès lors que le mot « cleaner » est couramment utilisé pour désigner une personne à laquelle sont confiées des tâches de nettoyage, et non pour désigner des produits ou dispositifs, il n’existe pas de lien suffisant entre le signe demandé et les produits en cause. Elle fait également valoir ce qui suit s’agissant des différentes catégories examinées par la chambre de recours. Premièrement, en ce qui concerne les produits compris dans la classe 7 qui sont soit expressément indiqués comme étant destinés au nettoyage, soit des connecteurs pour des dispositifs de nettoyage des tuyaux d’évacuation, la requérante allègue que le signe demandé ne décrit pas, mais évoque simplement un usage potentiel pour le nettoyage. Ledit signe véhiculerait simplement un message indirect qui peut évoquer le nettoyage. Deuxièmement, en ce qui concerne les autres produits compris dans la classe 7, avec une référence implicite au « nettoyage de tuyaux », la requérante affirme que la chambre de recours a procédé à une interprétation complexe qui ne correspond pas à la perception immédiate et réelle du public pertinent. Troisièmement, elle allègue qu’il en irait de même en ce qui concerne les produits compris dans la classe 9. Un trop grand nombre d’opérations mentales seraient nécessaires pour établir un lien entre les significations conceptuelles, les destinations et les caractéristiques des produits en cause et le signe demandé.

39      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le choix, par le législateur de l’Union, du terme « caractéristique » met en exergue le fait que les signes visés par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, ne sont que ceux qui servent à désigner une propriété, facilement reconnaissable par les milieux intéressés, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de cette disposition que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par les milieux intéressés comme une description de l’une desdites caractéristiques [voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 50, et du 3 juillet 2013, Airbus/OHMI (NEO), T‑236/12, EU:T:2013:343, point 32].

40      Dès lors, pour les raisons exposées dans la décision attaquée et comme le fait valoir l’EUIPO, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que le signe demandé présentait avec les produits en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public anglophone pertinent de percevoir immédiatement, sans autre réflexion, une description d’une des caractéristiques essentielles desdits produits, qui constituent des dispositifs ou des parties de dispositifs utilisés pour le nettoyage des tuyaux d’évacuation.

41      En effet, la description de la caractéristique précitée par le signe demandé est raisonnablement envisageable pour le public pertinent, aussi bien pour les produits visés de la classe 7 qui font expressément état de leur utilisation pour le nettoyage de tuyaux d’évacuation que pour ceux relevant de la classe 7 et ceux relevant de la classe 9 qui se réfèrent précisément à une tarière de drainage, un tuyau congelé ou plus largement à des tuyaux et conduites, ce qui présente bien un rapport suffisamment direct et concret avec le nettoyage général de tuyaux.

42      De même, pour les raisons déjà exposées à l’occasion de l’examen de la signification du signe demandé, il n’y a pas lieu de considérer que le fait que le terme « cleaner » puisse avoir plus d’une définition ou que l’expression « general pipe cleaners » puisse être comprise comme renvoyant à des personnes et non à des dispositifs empêche la chambre de recours de tenir compte de la signification évoquée à juste titre dans la décision attaquée.

 Sur le résultat de l’appréciation de la chambre de recours

43      En conséquence, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le signe demandé était descriptif des produits en cause au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. En effet, la signification du signe demandé n’avait rien d’allusif, ni de suggestif étant donné qu’il existait un lien direct et concret entre l’expression « general pipe cleaners » et l’espèce, le type et la destination des produits en cause ; lesquels étaient des dispositifs de nettoyage de tuyaux d’évacuation, des parties de ces dispositifs ou des produits dont la destination principale était leur utilisation dans ce contexte.

44      Cette appréciation n’est pas remise en cause par l’argumentation finale de la requérante selon laquelle la relation communément faite dans le domaine de l’artisanat entre les termes « pipe cleaners » et un type de brosse destiné à l’origine à éliminer l’humidité et les résidus des pipes aurait dû conduire la chambre de recours à établir les usages possibles des « general pipe cleaners » en ce qui concerne le nettoyage des tuyaux.

45      En effet, afin de garantir la pleine réalisation de l’objectif de libre utilisation, il n’est pas nécessaire, pour qu’un signe soit refusé à l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, que ce signe soit effectivement utilisé, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives. Il suffit que ledit signe puisse être utilisé à de telles fins (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 38). La chambre de recours n’était donc pas tenue de présenter des éléments de preuve pour démontrer que le signe demandé était habituellement utilisé dans le commerce d’une manière qui soit descriptive des produits pour lesquels l’enregistrement était demandé.

46      Il ressort de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

47      La requérante soutient que la chambre de recours a conclu à tort que la marque demandée avait un caractère non distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Ainsi, il serait erroné de considérer que l’expression « general pipe cleaners » n’est pas apte à distinguer les produits en cause. Une telle appréciation ne tiendrait pas compte des différentes caractéristiques et de la nature de ces différents produits.

48      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

49      Il convient de rappeler que chacun des motifs de refus d’enregistrement énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 est indépendant des autres et exige un examen séparé (voir arrêt du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 45 et jurisprudence citée).

50      Dès lors qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 qu’il suffit qu’un des motifs absolus de refus qui y sont énumérés s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque de l’Union européenne, il n’est pas nécessaire d’examiner le bien-fondé du deuxième moyen invoqué par la requérante, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

51      Il ressort de ce qui précède que, le premier moyen étant rejeté, il n’y a pas lieu d’examiner le deuxième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré de l’absence de prise en compte de l’enregistrement du signe demandé, lié aux mêmes produits aux États-Unis

52      La requérante allègue que la chambre de recours n’a pas dûment pris en considération l’octroi de l’enregistrement du signe demandé pour les mêmes produits aux États-Unis. Un tel enregistrement serait pourtant pertinent pour établir que ce signe n’est pas descriptif des produits en cause pour un public entièrement anglophone.

53      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

54      En l’espèce, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a bien pris en considération l’argument tiré de l’enregistrement du signe demandé aux États-Unis au titre de son appréciation. Elle a, ainsi, rappelé que, dans la mesure où un tel enregistrement est pertinent pour apprécier le caractère enregistrable du signe demandé dans des pays où l’on parle la même langue que celle sur laquelle l’EUIPO a fondé ses objections, il suffit de relever qu’un tel enregistrement, conformément aux règles applicables dans ces pays, ne permettra pas d’établir que, en l’espèce, l’examinatrice a commis une erreur dans son application de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001 [voir, en ce sens, arrêt du 17 janvier 2019, Ecolab USA/EUIPO (SOLIDPOWER), T-40/18, non publié, EU:T:2019:18, point 46].

55      Dans ce cadre, il ne peut lui être reproché d’avoir commis une erreur dans son application de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001. En effet, comme cela est rappelé dans la décision attaquée, d’une part, les dispositions figurant sous le chapitre XIII du règlement 2017/1001 n’instituent aucune obligation pour l’EUIPO de reconnaître des décisions relatives à l’enregistrement d’une marque internationale prises dans des pays tiers. D’autre part, le régime des marques de l’Union européenne est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Ainsi, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque de l’Union européenne ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation de l’Union pertinente. L’EUIPO et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont pas liés par une décision intervenue dans un État membre ou dans un pays tiers admettant le caractère enregistrable de ce même signe en tant que marque nationale. Tel est le cas même si une telle décision a été prise dans un pays appartenant à la zone linguistique dans laquelle le signe en cause trouve son origine (voir arrêt du 17 janvier 2019, SOLIDPOWER, T‑40/18, non publié, EU:T:2019:18, point 47 et jurisprudence citée).

56      Il ressort de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté comme, par voie de conséquence, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

57      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

58      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      General Wire Spring Co. est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Valasidis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 novembre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.