Language of document : ECLI:EU:F:2011:20

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

10 mars 2011 (*)

« Fonction publique — Agents contractuels — Indemnité pour travailleurs régulièrement soumis à des astreintes — Article 55 et article 56 ter du statut — Règlement (CEE, Euratom, CECA) no 495/77 »

Dans l’affaire F‑27/10,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

Christian Begue, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Marcy (France), et les 17 autres requérants dont les noms figurent en annexe, représentés par Me A. Woimant, avocat,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par M. D. Martin et Mme B. Eggers, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),

composé de MM. H. Tagaras, président, H. Kreppel et S. Van Raepenbusch (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Tomac, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 octobre 2010,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 5 mai 2010 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 11 mai suivant), les requérants demandent l’annulation de la décision de l’autorité habilitée à conclure les contrats de la Commission européenne (ci-après l’« AHCC »), du 2 février 2010, par laquelle celle-ci a rejeté leurs réclamations contre la décision du 3 septembre 2009 refusant de faire droit à leurs demandes de versement, et ce, avec effet rétroactif, d’une indemnité pour astreinte visée à l’article 56 ter du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »).

 Cadre juridique

2        L’article 91 du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »), lu en combinaison avec l’article 16 dudit régime, rend les articles 55 et 56 ter du statut applicables aux agents contractuels engagés au titre de l’article 3 bis du RAA.

3        L’article 55 du statut dispose :

« Les fonctionnaires en activité sont à tout moment à la disposition de leur institution.

Toutefois, la durée normale du travail ne peut excéder 42 heures par semaine, accomplies conformément à un horaire général établi par l’autorité investie du pouvoir de nomination. Dans la même limite, cette autorité peut, après consultation du comité du personnel, établir des horaires appropriés pour certains groupes de fonctionnaires accomplissant des tâches particulières.

En outre, en raison des nécessités de service ou des exigences des normes en matière de sécurité du travail, le fonctionnaire peut, en dehors de la durée normale de travail, être astreint à se tenir à la disposition de l’institution sur le lieu de travail ou à son domicile. L’institution fixe les modalités d’application du présent alinéa après consultation de son [c]omité du personnel. »

4        L’article 56 ter du statut énonce :

« Le fonctionnaire qui, par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination prise en raison des nécessités de service ou des exigences des normes en matière de sécurité du travail, est régulièrement astreint à se tenir à la disposition de l’institution sur le lieu de travail ou à son domicile en dehors de la durée normale de travail peut bénéficier d’indemnités.

Le Conseil [de l’Union européenne], statuant sur proposition de la Commission faite après avis du comité du statut, détermine les catégories de bénéficiaires, les conditions d’attribution et les taux de ces indemnités. »

5        L’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CEE, Euratom, CECA) no 495/77 du Conseil, du 8 mars 1977, déterminant les catégories de bénéficiaires, les conditions d’attribution et les taux des indemnités qui peuvent être accordées aux fonctionnaires régulièrement soumis à des astreintes (JO L 66, p. 1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE, Euratom) no 1945/2006 du Conseil, du 11 décembre 2006 (JO L 367, p. 25), prévoit :

« Le fonctionnaire

–        rémunéré sur les crédits de recherches et d’investissement et affecté à un établissement du Centre commun de recherche ou aux actions indirectes, ou

–        rémunéré sur les crédits de fonctionnement et exerçant des fonctions de conduite ou de surveillance des installations techniques, ou affecté auprès d’un service de sécurité et prévention, un autre service effectuant des tâches de sécurité et prévention, à un service de technologies de l’information et de la communication (TIC), à un service fournissant un soutien à des opérations de Politique extérieure et de sécurité commune (PESC) ou de Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) ou à la coordination en cas d’urgence ou de crise, ou à des services dans lesquels existe la nécessité avérée de service sous astreinte aux fins de l’exécution de tâches dans le cadre d’un mécanisme destiné à fournir assistance aux États membres [24] heures par jour,

a droit à une indemnité lorsqu’il est régulièrement soumis à des astreintes conformément à l’article 56 ter du [statut]. »

6        Selon l’article 2 du règlement no 495/77, tel que modifié, celui-ci est applicable par analogie aux agents contractuels.

 Faits à l’origine du litige

7        Les requérants ont été engagés par l’AHCC comme agents contractuels au titre de l’article 3 bis du RAA et ont été classés dans les groupes de fonctions III ou IV. Ils ont été affectés à la direction générale (DG) « Relations extérieures » en tant que responsables régionaux de la sécurité (Regional Security Officers, ci-après « RSO »).

8        Selon la description du poste de RSO, « le RSO apporte son expertise à la [DG ‘Relations extérieures’] pour assurer dans les [d]élégations de la Commission [...] placées sous sa responsabilité, des tâches dans les domaines suivants :

1. la sécurité des personnes et des biens ;

2. la sécurité des informations ;

3. la sécurité informatique ».

9        Les RSO assument ainsi une responsabilité quant à la mise en œuvre des mesures de sécurité des personnes et des biens des délégations de la Commission dans des pays tiers sous la responsabilité de l’unité « Prévention et gestion des crises — Protection » de la direction « Service extérieur » au sein de la DG « Relations extérieures » (ci-après l’« unité K 8 »). Chaque RSO se voit désigner à cette fin une ou plusieurs délégations.

10      Par lettres adressées à la Commission entre le 14 avril et le 21 juillet 2009, les requérants ont introduit des demandes sur la base de l’article 90, paragraphe 1, du statut, tendant à se voir octroyer une indemnité au titre de l’article 56 ter du statut (ci-après l’« indemnité d’astreinte ») avec effet rétroactif. En substance, les requérants prétendaient être affectés à un service effectuant des tâches de sécurité et de prévention au sens du règlement no 495/77, tel que modifié, et tiraient argument du fait qu’ils devaient être disponibles 24 heures sur 24.

11      Le 3 septembre 2009, la DG « Relations extérieures » a rejeté ces demandes au motif que les éléments fournis ne démontraient pas que les RSO étaient régulièrement astreints à se tenir à la disposition de la Commission en dehors de la durée normale de travail.

12      Les requérants ont introduit chacun une réclamation sur la base de l’article 90, paragraphe 2, du statut entre le 7 octobre et le 3 décembre 2009. Dans ces réclamations, les requérants maintenaient être affectés à des tâches de sécurité et de prévention au sens du règlement no 495/77 dans leur mission d’assistance et de protection aux personnes. Ils soutenaient, en outre, être victimes d’une discrimination par rapport à certains fonctionnaires affectés à l’unité K 8.

13      Le 30 novembre 2009, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a qualifié la cellule de crise de l’unité K 8 de « service sous astreinte » et a contraint les fonctionnaires et autres agents concernés à se tenir à la disposition de l’institution à leur domicile, en contrepartie de quoi ils se sont vu octroyer le bénéfice de l’indemnité d’astreinte (ci-après la « décision du 30 novembre 2009 »).

14      Par décision du 2 février 2010, l’AHCC a rejeté les réclamations des requérants.

 Conclusions des parties et procédure

15      Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de l’AHCC du 2 février 2010 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

16      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérants aux dépens.

17      Les requérants ont été spécialement invités, dans le rapport préparatoire d’audience, à s’expliquer lors de celle-ci sur la manière selon laquelle ils conciliaient la présentation de leur régime de travail avec la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (JO L 299, p. 9). À l’audience les requérants ont exposé leur point de vue et la Commission a contesté l’applicabilité de ladite directive.

 En droit

 Quant à l’objet du recours

18      Les requérants demandent l’annulation de la décision de l’AHCC, du 2 février 2010, rejetant leurs réclamations. À cet égard, il convient de rappeler que les conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont, dans le cas où cette décision est dépourvue de contenu autonome, pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée (voir arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, point 8 ; arrêt du Tribunal de première instance du 6 avril 2006, Camόs Grau/Commission, T‑309/03, point 43 ; arrêt du Tribunal de la fonction publique du 1er juillet 2010, Mandt/Parlement, F‑45/07, point 43).

19      En l’espèce, les réclamations, rejetées par l’AHCC, étaient dirigées contre la décision initiale du 3 septembre 2009 refusant de faire droit aux demandes des requérants tendant à se voir octroyer, avec effet rétroactif, l’indemnité d’astreinte. La décision de l’AHCC du 2 février 2010 rejetant les réclamations étant dépourvue de contenu autonome, dans la mesure où elle se borne à confirmer cette première décision au terme seulement d’une motivation plus étoffée, il y a lieu de considérer que le recours est dirigé contre la seule décision, susmentionnée, du 3 septembre 2009.

 Quant à la recevabilité

20      La Commission fait valoir que les requérants soutiennent que leur droit à l’indemnité d’astreinte découlerait automatiquement des fonctions qu’ils exercent et qu’elle devrait leur être octroyée avec effet rétroactif à la date de l’entrée en vigueur du règlement no 1945/2006 ou de la conclusion de leur contrat si celui-ci a été conclu après cette entrée en vigueur. Elle en déduit que les requérants sont forclos, parce qu’ils auraient dû attaquer leur première fiche de salaire établie, selon le cas, après l’entrée en vigueur dudit règlement ou après leur engagement.

21      À titre subsidiaire, la Commission prétend que, même s’il était possible de demander, par une demande individuelle fondée sur l’article 90, paragraphe 1, du statut, une décision instaurant un service astreignant son personnel à se tenir régulièrement à la disposition de l’institution en dehors de la durée normale de travail, le paiement de l’indemnité d’astreinte ne pourrait couvrir rétroactivement la période antérieure à la date de mise en œuvre de cette décision. Par conséquent, ceux des requérants qui ont cessé leurs fonctions avant l’introduction du recours n’auraient pas d’intérêt à agir.

22      Toutefois, selon une jurisprudence constante, le juge est en droit d’apprécier, suivant les circonstances de chaque espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter au fond le recours sans statuer préalablement sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la partie défenderesse (arrêts de la Cour du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, points 51 et 52, et du 22 novembre 2007, Cofradía de pescadores « San Pedro » de Bermeo e.a./Conseil, C‑6/06 P, point 21 ; arrêt du Tribunal de première instance du 30 mars 2006, Yedaş Tarim ve Otomotiv Sanayi ve Ticaret/Conseil et Commission, T‑367/03, point 30 ; arrêt du Tribunal de la fonction publique du 29 septembre 2009, Aparicio e.a./Commission, F‑20/08, F‑34/08 et F‑75/08, point 32). Dans les circonstances de la cause, le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu d’examiner la recevabilité du recours dans son ensemble, dès lors que celui-ci doit en tout état de cause être rejeté sur le fond pour les motifs qui suivent.

 Quant au fond

23      Les requérants soulèvent trois moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 56 ter du statut, le deuxième, de la violation du principe d’égalité et de non-discrimination et, le troisième, de la méconnaissance du principe de proportionnalité.

 Sur le premier moyen, pris de la violation de l’article 56 ter du statut

—       Arguments des parties

24      Les requérants font valoir, en premier lieu, que les RSO sont affectés auprès d’un service de sécurité et de protection au sens de l’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 495/77, tel que modifié.

25      Il ressortirait, en effet, de la description de poste des RSO que ceux-ci assument une responsabilité quant à la mise en œuvre des mesures de sécurité des personnes et des biens des délégations sous la responsabilité de l’unité K 8. D’un point de vue opérationnel, les RSO participeraient notamment à la réalisation des objectifs de cette unité qui assurerait, de surcroît, leur coordination générale.

26      Les requérants déduisent de ce qui précède que les RSO appartiendraient à l’unité K 8. Ils seraient d’ailleurs subordonnés à celle-ci dans la mesure où elle leur adresse des ordres de mission et des instructions et où elle fixe les modalités de leur travail ainsi que leur zone de compétence. D’ailleurs, il ressortirait de l’organigramme de l’unité K 8 diffusé sur l’intranet de la Commission que celle-ci comprendrait notamment l’ensemble des RSO.

27      Pour toutes ces raisons, les RSO seraient membres à part entière de l’unité K 8, laquelle est en charge de la sécurité et de la protection des personnes et des biens des délégations. L’AHCC aurait, dès lors, considéré à tort dans sa décision rejetant les réclamations que les intéressés ne feraient pas partie d’un service de sécurité, mais qu’ils seraient affectés à une délégation.

28      Les requérants soutiennent, en deuxième lieu, que les RSO sont affectés à la coordination des urgences et des crises au sens de l’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 495/77, tel que modifié.

29      La description du poste de RSO préciserait, en effet, que ceux-ci exercent une mission d’assistance et de protection aux personnes, notamment par la gestion des crises, en prenant, en accord avec le chef de délégation, toutes les mesures immédiates.

30      Les requérants prétendent, en troisième lieu, que l’article 56 ter du statut a pour objet d’accorder une indemnité en compensation de la disponibilité exigée des agents qui en bénéficient.

31      Or, les RSO devraient être disponibles 24 heures sur 24. La description du poste de RSO préciserait, en effet, que ceux-ci exercent une mission d’assistance et de protection aux personnes des délégations, notamment par des déplacements réguliers dans les délégations selon un calendrier modifiable en cas d’urgence. De plus, la même description de poste mentionnerait que les RSO doivent prendre les mesures nécessaires pour l’exécution immédiate des recommandations liées à un contexte de crise. Comme une urgence peut survenir à tout moment, les intéressés devraient être disponibles en permanence et seraient donc régulièrement astreints à se tenir à la disposition de l’institution en dehors de la durée normale de travail, au sens de l’article 56 ter du statut.

32      Il importerait peu, à cet égard, que les tâches susmentionnées représentent, comme l’observe l’AHCC dans sa décision de rejet des réclamations, une des fonctions des RSO parmi d’autres. Par ailleurs, alors que chaque RSO est seul compétent pour une ou plusieurs délégations, dans la même décision, l’AHCC subordonnerait, sans aucun fondement, la qualification de service sous astreinte à la nécessité qu’il soit assuré par la présence d’au moins deux personnes.

33      Le refus de reconnaître que les RSO travaillent dans un service sous astreinte résulterait, au demeurant, d’une méconnaissance totale de leur activité.

34      Ainsi, l’AHCC estimerait que l’astreinte envisagée à l’article 56 ter du statut implique que l’agent concerné soit à tout moment disponible et joignable en cas de besoin, et ce tout au long de l’année. Selon l’AHCC, ceci impliquerait que l’agent se trouve en permanence dans un lieu où il serait effectivement joignable et à une distance suffisamment rapprochée du lieu d’intervention pour lui permettre d’être en mesure d’agir aussi rapidement que possible. Or, relèvent les requérants, les RSO seraient précisément équipés pour être joignables en permanence. En cas de nécessité, ils interviendraient le week-end ou la nuit et écourteraient fréquemment leurs congés pour assurer la gestion d’une crise. En outre, dans les délégations de Kaboul (Afghanistan), Islamabad (Pakistan), Bagdad (Irak) et Khartoum (Soudan), un RSO devrait être présent en permanence. Par ailleurs, l’argument de l’AHCC selon lequel un agent bénéficiaire d’une indemnité d’astreinte ne peut s’éloigner de son service méconnaîtrait le fait qu’un RSO a une compétence territoriale couvrant plusieurs pays.

35      La Commission répond que l’article 56 ter du statut subordonne l’octroi de l’indemnité d’astreinte à deux conditions. En premier lieu, le fonctionnaire devrait faire partie des catégories de bénéficiaires déterminées par le Conseil de l’Union européenne comme relevant d’un service sous astreinte. Il ressortirait, à cet égard, de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 495/77, tel que modifié, qu’un tel service devrait comprendre « un mécanisme destiné à fournir assistance [à l’institution 24] heures par jour ». En second lieu, le fonctionnaire devrait être régulièrement astreint à se tenir à la disposition de l’institution par décision de l’AIPN. Cette disponibilité impliquerait, plus précisément, que le fonctionnaire soumis à une astreinte soit joignable à tout moment et qu’il se trouve constamment à une distance de son lieu d’intervention qui lui permette d’être sur place aussi vite que possible.

36      La cellule chargée de la gestion des crises au sein de l’unité K 8 serait un service sous astreinte, car elle doit être opérationnelle en permanence. En revanche, les requérants n’apporteraient pas la preuve qu’ils se trouvent dans les conditions fixées par l’article 56 ter du statut.

37      Tout d’abord, l’indemnité d’astreinte ne compenserait pas le fait de pouvoir être appelé à tout moment, mais celui d’être réellement soumis à une contrainte en ce sens que le fonctionnaire ou agent concerné aurait, par exemple, l’interdiction de se rendre là où il ne serait pas joignable, ou, autre exemple, celle de boire de l’alcool. Or, le fait qu’en cas de crise un RSO puisse être appelé à tout moment soit pour donner des instructions par téléphone soit pour se rendre sur place serait seulement l’expression de la règle normale, prévue par l’article 55, paragraphe 1, du statut, selon laquelle les fonctionnaires en activité peuvent, à tout moment, être contactés par leur institution.

38      Ensuite, la compétence territoriale des RSO couvrant plusieurs pays, il leur serait impossible de se trouver en permanence à une distance du lieu d’une crise qui leur permette d’être en mesure d’intervenir sur place aussi rapidement que possible.

39      Enfin, les requérants ne fourniraient aucune preuve tendant à accréditer le fait que leurs interventions n’auraient pas un caractère occasionnel et aléatoire. Il serait à cet égard sans pertinence que certains d’entre eux serviraient dans des pays classés par les services de la Commission en fonction d’un ensemble de critères comme étant à niveau de risque « fort » et donc du groupe III ou que les RSO disposent d’une voiture, d’un téléphone portable et d’un ordinateur de service pour pouvoir agir immédiatement en cas de besoin. En effet, le niveau de risque varierait constamment et ne modifierait pas les éléments essentiels de la fonction des RSO. De plus, la mise à disposition des RSO de véhicules et de téléphones portables de service ne changerait rien au fait que leurs fonctions échapperaient au champ d’application de l’article 56 ter du statut.

—       Appréciation du Tribunal

40      Il convient de rappeler, à titre liminaire, que, selon une jurisprudence constante, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci et de son contexte, mais aussi des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (arrêt de la Cour du 17 novembre 1983, Merck, 292/82, point 12 ; arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 8 juillet 2010, Commission/Putterie-De-Beukelaer, T‑160/08 P, point 70 ; arrêt du Tribunal de la fonction publique du 14 décembre 2006, André/Commission, F‑10/06, point 35).

41      En outre, selon une jurisprudence également constante, les dispositions ouvrant droit à des prestations financières doivent être interprétées strictement (arrêts du Tribunal de première instance du 18 septembre 2003, Lebedef e.a./Commission, T‑221/02, point 38, et du 15 juillet 2004, Valenzuela Marzo/Commission, T‑384/02, point 104 ; arrêt du Tribunal de la fonction publique du 7 octobre 2009, Pappas/Commission, F‑101/08, point 65).

42      En l’occurrence, il ressort de l’article 55 du statut que, si tous les fonctionnaires doivent être à tout moment à la disposition de leur institution, de sorte que celle-ci peut les appeler même en dehors des heures de service, en vertu de l’article 56 ter dudit statut, certains d’entre eux sont « régulièrement astreint[s] à se tenir à la disposition de l’institution sur le lieu de travail ou à [leur] domicile » en dehors du temps de travail, en raison notamment des nécessités du service, et peuvent dans ce cas bénéficier d’une indemnité. En vertu du second alinéa du même article, le Conseil est chargé de déterminer, entre autre, les catégories de bénéficiaires de cette indemnité.

43      En application de l’article 56 ter, second alinéa, du statut, le Conseil a désigné les fonctionnaires bénéficiaires d’une indemnité d’astreinte comme étant ceux qui sont affectés auprès de services présentant l’une des caractéristiques énumérées à l’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 495/77, tel que modifié.

44      Il découle de ce qui précède qu’un fonctionnaire ne peut revendiquer une indemnité d’astreinte que si deux conditions sont remplies. En premier lieu, et conformément à l’article 56 ter, premier alinéa, du statut, le fonctionnaire doit être « régulièrement astreint à se tenir à la disposition de l’institution sur le lieu de travail ou à son domicile en dehors de la durée normale de travail ». En second lieu, le fonctionnaire doit appartenir à un service présentant l’une des caractéristiques énumérées par l’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 495/77, tel que modifié, comme par exemple celles d’« effectu[er] des tâches de sécurité et prévention » ou de « fourni[r] un soutien [...] à la coordination en cas d’urgence ou de crise ».

45      La Commission ne conteste pas que les RSO appartiennent à un service effectuant des tâches de sécurité et de prévention. Il y a donc lieu de considérer que la seconde condition énoncée ci-dessus est remplie.

46      S’agissant, en revanche, de la première condition, les parties s’opposent tant sur la portée de l’obligation d’être « régulièrement astreint à se tenir à la disposition de l’institution » au sens de l’article 56 ter du statut que sur l’importance des contraintes pesant concrètement sur les RSO.

47      Il convient, dès lors, de circonscrire, en premier lieu, la portée de l’obligation, pour un fonctionnaire qui revendique le paiement d’une indemnité d’astreinte, d’être « régulièrement astreint à se tenir à la disposition de l’institution » qui l’emploie.

48      Force est, à cet égard, de constater que l’obligation d’être à la disposition de l’institution figure tant à l’article 55, premier alinéa, qu’à l’article 56 ter, premier alinéa, du statut. De plus, si l’article 56 ter, premier alinéa, précise que la disponibilité qu’il vise excède « la durée normale de travail », l’article 55, premier alinéa, mentionne aussi que la disponibilité exigée de chaque fonctionnaire vaut « à tout moment ».

49      La coexistence de l’article 55 et de l’article 56 ter du statut n’aurait cependant pas de sens si la disponibilité attendue des fonctionnaires au titre de chacun de ces articles ne correspondait pas à des degrés d’exigence différents. Il convient, à cet égard, de relever que le législateur a caractérisé la situation envisagée à l’article 56 ter en précisant que la notion d’astreinte doit être régulière. Il convient donc, pour les besoins d’application de l’article 56 ter du statut, de dégager les éléments constitutifs de la notion d’astreinte régulière, laquelle va nécessairement au-delà de la disponibilité au sens de l’article 55 du statut.

50      La Commission, se fondant sur l’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 495/77, tel que modifié, considère que l’astreinte visée à l’article 56 ter du statut requiert l’appartenance du fonctionnaire concerné à un service organisé de façon à être en mesure de fournir une assistance à l’institution 24 heures sur 24 et la contribution dudit fonctionnaire à la permanence du service.

51      À cet égard, il convient, certes, de constater que l’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 495/77, tel que modifié, ne mentionne expressément l’aptitude à fournir une assistance 24 heures par jour qu’en ce qui concerne les services destinés à aider les États membres et non les institutions.

52      Toutefois, il ne saurait être inféré de cette restriction que l’exigence d’appartenance à un service organisé de façon à pouvoir fournir une assistance 24 heures sur 24 ne soit pas intrinsèque à la notion d’astreinte au sens de l’article 56 ter du statut.

53      Un premier indice en ce sens a été apporté par la Commission qui, lors de l’audience, a exposé que l’article 56 ter avait, à l’origine, été inséré dans le statut afin de rencontrer la situation exceptionnelle de fonctionnaires devant veiller en permanence à la sécurité dans le domaine de la recherche nucléaire, ce que corrobore la première version de cette disposition, introduite dans le statut par le règlement (Euratom, CECA, CEE) no 1369/72 du Conseil, du 27 juin 1972, modifiant le statut ainsi que le RAA (JO L 149, p. 1). Cette première version visait, en effet, les fonctionnaires rémunérés sur les crédits de recherches et d’investissement et affectés à un établissement du Centre commun de recherche.

54      De plus, il ne se comprendrait pas que le Conseil ait précisé, dans le règlement no 495/77, tel que modifié, que l’assistance doit pouvoir être fournie 24 heures sur 24 en ce qui concerne les seuls services d’assistance aux États membres, sans considérer que cette même particularité vaut également pour les autres services énumérés à l’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, dudit règlement, en ce compris pour les services effectuant des tâches de sécurité et de prévention.

55      Plus fondamentalement, un service d’assistance 24 heures sur 24 requiert une organisation des conditions de travail qui soit conforme aux prescriptions minimales en matière de protection de la santé et de la sécurité des fonctionnaires. Il convient de rappeler, à cet égard, que l’article 31, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne prévoit que tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu’à une période annuelle de congés payés. Selon les explications établies sous la responsabilité du præsidium de la Convention ayant élaboré la charte des droits fondamentaux (JO 2007, C 303, p. 17), cette disposition trouve notamment son origine dans la directive 93/104/CE du Conseil, du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (JO L 307, p. 18), directive depuis abrogée et remplacée par la directive 2003/88. De surcroît, aux termes de l’article 1er sexies du statut, « [l]es fonctionnaires en activité bénéficient de conditions de travail qui respectent les normes de santé et de sécurité appropriées, au moins équivalentes aux prescriptions minimales applicables en vertu des mesures arrêtées dans ces domaines en application des traités », au rang desquelles figurent notamment celles contenues dans cette dernière directive, laquelle concerne la santé au travail.

56      Or, l’article 3 de la directive 2003/88 impose, par principe, d’alterner temps de travail et période minimale de repos journalier de onze heures consécutives par vingt-quatre heures. Si, en vertu de l’article 17, paragraphe 3, de la directive il peut, certes, être dérogé à cette règle en ce qui concerne les activités de garde caractérisées par la nécessité d’assurer la sécurité des biens et des personnes, le même article 17 prévoit, en son paragraphe 2, que les travailleurs concernés doivent néanmoins bénéficier de périodes équivalentes de repos compensateur ou, dans des cas exceptionnels, d’une autre protection appropriée.

57      De plus, il résulte de la jurisprudence de la Cour que les « périodes équivalentes de repos compensateur » au sens de l’article 17, paragraphe 2, de la directive 2003/88 doivent, afin de répondre tant à ces qualificatifs qu’à l’objectif de cette directive, se caractériser par le fait que, pendant ces périodes, le travailleur n’est soumis, à l’égard de son employeur, à aucune obligation susceptible de l’empêcher de se consacrer, librement et de manière ininterrompue, à ses propres intérêts, aux fins de neutraliser les effets du travail sur la sécurité et la santé de l’intéressé (arrêts de la Cour du 9 septembre 2003, Jaeger, C‑151/02, point 94, et du 14 octobre 2010, Union syndicale « Solidaires Isère », C‑428/09, point 50). L’article 17, paragraphe 2, permet certes, dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, qu’une « autre protection appropriée » soit accordée aux travailleurs concernés, mais il n’en demeure pas moins que celle-ci tend aussi à préserver la sécurité et la santé de ces travailleurs et vise également à leur permettre de se détendre et d’effacer la fatigue inhérente à l’exercice de leurs fonctions. Aussi la Cour a-t-elle jugé qu’un régime de travail ne permettant pas aux travailleurs de bénéficier du droit au repos journalier, même s’il s’agit d’un contrat d’une durée maximale de 80 jours par an, non seulement vide de sa substance un droit individuel expressément accordé par la directive 2003/88, mais est également en contradiction avec l’objectif de cette dernière (arrêt Union syndicale « Solidaires Isère », précité, points 59 et 60).

58      Il s’ensuit que, comme le plaide la Commission, seul un service, ou une partie d’un service, comprenant plusieurs fonctionnaires ou agents peut être astreint, en tant que collectivité, à rester effectivement disponible 24 heures sur 24, tout au long de l’année et, par conséquent, justifier l’octroi d’une indemnité d’astreinte à ses fonctionnaires et agents.

59      Il convient donc de considérer que l’indemnité d’astreinte prévue à l’article 56 ter du statut ne compense pas le simple fait de pouvoir être contacté à tout moment par l’institution, ainsi que le prescrit l’article 55, premier alinéa, du statut, mais celui d’être effectivement soumis à une contrainte spécifique, celle de devoir assumer une garde permettant au service d’appartenance d’être continuellement opérationnel. Cette interprétation est, au demeurant, confirmée par la version anglaise des articles susmentionnés qui retiennent respectivement les termes « at the disposal » et « on stand by ».

60      La portée de l’article 56 ter, premier alinéa, du statut étant ainsi précisée, il convient, en second lieu, d’examiner si les RSO remplissent les conditions dégagées au point précédent.

61      À cet égard, les requérants mettent, tout d’abord, en exergue les liens qui les rattachent à l’unité K 8, tandis que la Commission souligne le fait qu’ils sont affectés dans des délégations.

62      Le Tribunal constate, à ce sujet, que, selon la description de poste des RSO, ceux-ci sont affectés à une délégation et sont administrativement rattachés au chef de délégation. Certes, la description de poste ajoute que, « opérationnellement, [ils] participe[nt] à la réalisation des objectifs » de l’unité K 8, mais cette précision ne signifie pas pour autant qu’ils appartiendraient à cette unité. De plus, les RSO participent également à la réalisation des objectifs de deux autres unités sans que les requérants prétendent y être affectés. Au demeurant, il ressort des explications, non contestées, fournies par la Commission que seuls trois fonctionnaires de l’unité K 8 sont soumis à une astreinte et bénéficient d’une indemnité à ce titre.

63      Les requérants prétendent surtout qu’ils doivent être disponibles 24 heures sur 24 en fondant essentiellement leur argumentation sur leur implication dans la gestion des crises et des urgences, lesquelles pourraient survenir à tout moment et justifier qu’ils soient disponibles en permanence. Ils précisent, à cet égard, que cette tâche les amène à bouleverser le calendrier de leurs déplacements dans les différentes délégations relevant de leur compétence, qu’elle les conduit à intervenir le week-end ou la nuit et à écourter fréquemment leurs congés et qu’elle justifie qu’ils disposent d’un téléphone portable, d’un ordinateur portable et d’une voiture de fonction.

64      Toutefois, même si une crise est imprévisible, les requérants n’établissent pas, avec les éléments ci-dessus, qu’ils sont réellement et régulièrement contraints d’effectuer une garde « sur le lieu de travail ou [au] domicile en dehors de la durée normale de travail ». La situation qu’ils décrivent, sans d’ailleurs l’étayer de preuves concrètes, relève plutôt de la règle normale, prévue par l’article 55, premier alinéa, du statut, selon laquelle les fonctionnaires en activité sont, à tout moment, à la disposition de leur institution. Il en va d’autant plus ainsi que la Commission a exposé à l’audience, sans être réellement contredite, qu’un fonctionnaire, fût-il un RSO, qui ne répondrait pas à un appel en dehors de ses heures de service ne commettrait pas une faute susceptible d’être sanctionnée disciplinairement pour méconnaissance de cette disposition. En revanche, la Commission a institué une cellule de crise au sein de l’unité K 8 et a, précisément, astreint les fonctionnaires et les agents qui la composent à assurer une garde en permanence par sa décision du 30 novembre 2009. En outre, la Commission a exposé lors de l’audience, sans que les requérants ne la contestent dans ses affirmations, que la protection de certaines délégations situées dans les pays présentant un niveau de risque les classant dans le groupe III était assurée au premier chef par des forces de sécurité et non par les RSO en personne. Enfin, la Commission a donné en exemple le cas du RSO compétent pour la délégation d’Haïti, lequel se trouvait en mission à Bruxelles lors du tremblement de terre du 12 janvier 2010.

65      Par ailleurs, l’organisation même du travail des RSO, dont la compétence couvre des délégations distantes parfois de plusieurs milliers de kilomètres, tend à démontrer qu’il n’est pas exigé de ceux-ci qu’ils puissent être rapidement à pied d’œuvre à l’instar d’un service de garde. De plus, les RSO sont fréquemment seuls dans leur zone de compétence et ne sauraient ainsi être considérés comme faisant partie d’un service astreint à rester effectivement disponible 24 heures sur 24 et 365 jours par an. S’il avait été établi que les RSO étaient réellement et régulièrement contraints d’effectuer une garde sur leur lieu de travail ou à leur domicile en dehors de la durée normale de travail, il aurait alors incombé à la Commission d’organiser leur travail de manière à satisfaire les exigences tant de l’article 31, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux que de la directive 2003/08.

66      Il s’ensuit que les éléments dont dispose le Tribunal ne lui permettent pas de considérer que les RSO assurent concrètement un service les astreignant régulièrement à se tenir à la disposition de la Commission en dehors des heures normales de travail au sens de l’article 56 ter du statut.

67      Le premier moyen doit, par conséquent, être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, pris de la violation du principe d’égalité et de non-discrimination

—       Arguments des parties

68      Les requérants font valoir que les fonctionnaires de l’unité K 8 en fonction à Bruxelles bénéficient d’une indemnité d’astreinte et que le refus de la leur octroyer constitue une violation du principe d’égalité et de non-discrimination, dès lors qu’ils se trouvent dans une situation comparable et que cette différence de traitement n’est pas objectivement justifiée.

69      Il ressortirait, en effet, de la description du poste de RSO que ceux-ci participent à la réalisation des objectifs de l’unité K 8 dont ils seraient les organes déconcentrés. Chaque RSO serait seul dans sa zone de compétence pour informer les fonctionnaires de ladite unité et pour mettre en œuvre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour résoudre les crises. Les fonctionnaires de l’unité K 8 ne sauraient donc gérer les crises sans la présence sur place des RSO et la disponibilité des RSO serait ainsi au moins équivalente à celle des fonctionnaires de l’unité K 8.

70      La Commission rétorque que la situation des fonctionnaires de l’unité K 8 affectés à Bruxelles (Belgique) visés dans le recours est différente de celle des RSO affectés dans les délégations. Ces fonctionnaires seraient chargés de la supervision et de la gestion de la sécurité de 136 délégations réparties dans les 5 continents et couvrant les 24 fuseaux horaires. Ils seraient donc, ensemble, astreints à se tenir en permanence à la disposition de l’institution. En plus leur tâche ne pourrait être assurée, comme prévu par le règlement no 495/77, tel que modifié, que par un service et non à titre individuel. Par conséquent, ils se partageraient à juste titre l’indemnité d’astreinte. En revanche, les requérants se limiteraient à invoquer leur disponibilité générale et le fait qu’ils reçoivent des instructions de l’unité K 8. Leur situation, ainsi décrite, ne serait pas comparable à celle des fonctionnaires en question.

—       Appréciation du Tribunal

71      Il ressort de la décision du 30 novembre 2009 que seuls les fonctionnaires et agents affectés à la cellule de crise de l’unité K 8, au nombre de trois selon les explications fournies par la Commission, sont astreints à se tenir à la disposition de la Commission à leur domicile en dehors de la durée normale du travail. Or, il résulte, en revanche, de l’examen du premier moyen que tel n’est pas le cas des RSO.

72      Il s’ensuit que les fonctionnaires et agents de la cellule de crise de l’unité K 8 basée à Bruxelles ne se trouvent pas dans la même situation de fait que les RSO. En conséquence, une différence de traitement entre les uns et les autres n’est pas constitutive d’une violation du principe d’égalité et de non-discrimination.

73      Le deuxième moyen n’est donc pas fondé.

 Sur le troisième moyen, pris de la méconnaissance du principe de proportionnalité

—       Arguments des parties

74      Les requérants soutiennent qu’il existerait une inadéquation manifeste entre, d’une part, les compétences et les obligations des RSO et, d’autre part, le refus de leur verser l’indemnité d’astreinte.

75      La Commission répond que le moyen est irrecevable parce qu’il ne figurait pas dans les réclamations et parce qu’il serait obscur et insuffisamment étayé. La Commission ajoute qu’en tout état de cause il ressort des réponses aux deux premiers moyens que le refus d’accorder l’indemnité d’astreinte aux requérants est conforme aux dispositions en la matière et que le principe de proportionnalité ne peut servir de base à l’octroi d’une indemnité en dehors des cas prévus par le statut.

—       Appréciation du Tribunal

76      Il ressort de l’examen du premier moyen que les requérants n’ont pas établi remplir les conditions requises par les dispositions de l’article 56 ter, lesquelles sont d’interprétation stricte (voir point 41 ci-dessus), pour bénéficier de l’indemnité d’astreinte. La compétence de l’autorité étant à cet égard liée, elle ne saurait, dès lors, se voir reprocher une violation du principe de proportionnalité.

77      Sans qu’il soit besoin d’examiner sa recevabilité, le troisième moyen doit donc être rejeté en tout état de cause.

78      À défaut de moyen fondé, le recours doit donc être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

79      Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

80      Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que les requérants ont succombé en leur recours. En outre, la Commission a, dans ses conclusions, expressément demandé qu’ils soient condamnés aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner les requérants aux dépens exposés par la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Les requérants supportent leurs propres dépens et sont condamnés à supporter les dépens de la Commission.

Tagaras

Kreppel

Van Raepenbusch

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 mars 2011.

Le greffier

 

      Le président

W. Hakenberg

 

      H. Tagaras

ANNEXE

Hervé Bouge, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Saint-Nicolas-la-Chapelle (France),

Alain Gillis, ancien agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Vilvoorde (Belgique),

Éric Giraud, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Le Revest-les-Eaux (France),

Jean-Michel Girard, ancien agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à La Garde-en-Oisans (France),

Jean-Philippe Goudet, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Cheraga Alger (Algérie),

Vincente Ibanez Puig, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Montevideo (Uruguay),

Jacques Mauve, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Pretoria (Afrique du Sud),

Michel Mercier, ancien agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Saint-Domingue (République dominicaine),

Éric Mingant, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Tel Aviv (Israël),

Diego Sanchez, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Addis Abeba (Éthiopie),

Sergio Paulo Alves Dos Santos, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Aguas de Moura (Portugal),

Thierry Rouffaud, ancien agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Mortagne-sur-Gironde (France),

Ralf Schumacher, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Paris (France),

Theodore Vallegeas, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique),

Santiago Vera-Fajardo, agent contractuel de la Commission européenne, ayant élu domicile chez Me A. Woimant,

Sergio Zecchini, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Trieste (Italie),

Jean-Pierre Zinzen, agent contractuel de la Commission européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique).


* Langue de procédure : le français.