Language of document : ECLI:EU:T:2024:145

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

5 mars 2024 (*)

« Référé – Règlement (UE, Euratom) no 1141/2014 – Statut et financement des partis politiques européens et des fondations politiques européennes – Décision infligeant une sanction financière – Demande de sursis à exécution – Défaut d’urgence »

Dans l’affaire T‑1189/23 R,

Identité et Démocratie Parti (ID Parti), établi à Paris (France), représenté par Me F.-P. Vos, avocat,

partie requérante,

contre

Autorité pour les partis politiques européens et les fondations politiques européennes, représentée par MM. P. Schonard, N. Entchev et Mme S. Kaiser, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

1        Par sa demande fondée sur les articles 278 et 279 TFUE, le requérant, Identité et Démocratie Parti (ID Parti), sollicite le sursis à l’exécution de la décision de l’Autorité pour les partis politiques européens et les fondations politiques européennes du 25 octobre 2023 lui infligeant une sanction financière, en application de l’article 27, paragraphe 2, sous a), vi), du règlement (UE, Euratom) no 1141/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2014, relatif au statut et au financement des partis politiques européens et des fondations politiques européennes (JO 2014, L 317, p. 1) (ci‑après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige et conclusions des parties

2        Le requérant, antérieurement dénommé « Mouvement pour une Europe des nations et des libertés », est une association, enregistrée comme parti politique européen par décision de l’Autorité pour les partis politiques européens et les fondations politiques européennes du 14 septembre 2017 portant enregistrement du Mouvement pour une Europe des nations et des libertés (JO 2018, C 84, p. 5).

3        Le 9 mars 2022, le requérant a transmis à l’Autorité pour les partis politiques européens et les fondations politiques européennes (ci‑après l’« Autorité ») une lettre de son président contenant notamment, en annexe, une liste actualisée des membres de son bureau, sur laquelle ne figurait plus, depuis le 16 février 2022, le nom d’un de ses membres.

4        Cette information, portant sur le fait qu’une personne ne fait plus, depuis le 16 février 2022, partie du bureau du requérant, n’a pas immédiatement été prise en compte par le prestataire de services du requérant, de sorte que ce dernier a continué de faire figurer sur son site Internet et les réseaux sociaux le nom de l’ancien membre en cause, en précisant qu’il serait membre du bureau du requérant.

5        Dans ce contexte, le 23 mars 2023, l’Autorité a adressé au requérant une demande d’informations au sujet de cet ancien membre du bureau en raison des incohérences entre la communication du 9 mars 2022, d’une part, et les publications sur le site Internet et les réseaux sociaux, d’autre part.

6        Le 14 juin 2023, à la suite de plusieurs échanges entre l’Autorité et le requérant, l’Autorité a décidé d’ouvrir une enquête à son égard pour informations potentiellement inexactes sur la composition de son bureau et a donné au requérant la possibilité de présenter des observations et de proposer des mesures correctives conformément à l’article 29 du règlement no 1141/2014.

7        Par courrier du 28 septembre 2023, le requérant a indiqué à l’Autorité qu’il avait été décidé de maintenir les publications en cause, même si l’ancien membre y était présenté comme membre du bureau.

8        Le 25 octobre 2023, par la décision attaquée, à la suite de plusieurs nouveaux échanges entre les parties, l’Autorité a, au titre de l’article 27, paragraphe 2, sous a), vi), du règlement n° 1141/2014, infligé une sanction financière au requérant d’un montant de 5 % du budget annuel du requérant, soit 47 020,54 euros, au motif, en particulier, que ce dernier aurait maintenu sur les réseaux sociaux des publications inexactes présentant l’ancien membre du bureau comme membre actuel du bureau, ce qui serait constitutif d’une violation.

9        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 décembre 2023, le requérant a introduit un recours tendant notamment à l’annulation de la décision attaquée.

10      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 9 janvier 2024, le requérant a introduit la présente demande en référé, dans laquelle il conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        ordonner le sursis à l’exécution de la décision attaquée ;

–        condamner l’Autorité à lui payer le montant de 3 000 euros au titre des dépens, sur le fondement des articles 87 et suivants du règlement de procédure du Tribunal.

11      Dans ses observations sur la demande en référé, déposées au greffe du Tribunal le 25 janvier 2024, l’Autorité conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        rejeter la demande en référé ;

–        rejeter la demande de paiement de 3 000 euros ;

–        réserver la décision sur les dépens.

12      Par une mesure d’organisation de la procédure du 9 février 2024, le président du Tribunal a posé à chacune des parties une question pour réponse écrite.

13      Le 14 février 2024, le requérant a répondu à la question posée par le président du Tribunal.

14      Le 23 février 2024, l’Autorité a répondu à la question posée par le président du Tribunal.

 En droit

 Considérations générales

15      Il ressort d’une lecture combinée des articles 278 et 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires, et ce en application de l’article 156 du règlement de procédure. Néanmoins, l’article 278 TFUE pose le principe du caractère non suspensif des recours, les actes adoptés par les institutions de l’Union européenne bénéficiant d’une présomption de légalité. Ce n’est donc qu’à titre exceptionnel que le juge des référés peut ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire des mesures provisoires (ordonnance du 19 juillet 2016, Belgique/Commission, T‑131/16 R, EU:T:2016:427, point 12).

16      L’article 156, paragraphe 4, première phrase, du règlement de procédure dispose que les demandes en référé doivent spécifier « l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent ».

17      Ainsi, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents, en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts de la partie qui les sollicite, qu’ils soient édictés et produisent leurs effets avant la décision dans l’affaire principale. Ces conditions sont cumulatives, de telle sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence (voir ordonnance du 2 mars 2016, Evonik Degussa/Commission, C‑162/15 P‑R, EU:C:2016:142, point 21 et jurisprudence citée).

18      Dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [voir ordonnance du 19 juillet 2012, Akhras/Conseil, C‑110/12 P(R), non publiée, EU:C:2012:507, point 23 et jurisprudence citée].

19      Compte tenu des éléments du dossier, le président du Tribunal estime qu’il dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande en référé, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

20      Dans les circonstances du cas d’espèce, et sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur la recevabilité de la présente demande en référé, il convient d’examiner d’abord si la condition relative à l’urgence est remplie.

 Sur la condition relative à l’urgence

21      Afin de vérifier si les mesures provisoires demandées sont urgentes, il convient de rappeler que la finalité de la procédure de référé est de garantir la pleine efficacité de la future décision définitive, afin d’éviter une lacune dans la protection juridique assurée par le juge de l’Union. Pour atteindre cet objectif, l’urgence doit, de manière générale, s’apprécier au regard de la nécessité qu’il y a de statuer provisoirement afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite la protection provisoire. Il appartient à cette partie d’apporter la preuve qu’elle ne saurait attendre l’issue de la procédure relative au recours au fond sans subir un préjudice grave et irréparable (voir ordonnance du 14 janvier 2016, AGC Glass Europe e.a./Commission, C‑517/15 P‑R, EU:C:2016:21, point 27 et jurisprudence citée).

22      C’est à la lumière de ces critères qu’il convient d’examiner si le requérant parvient à démontrer l’urgence.

23      En l’espèce, pour démontrer le caractère grave et irréparable du préjudice invoqué, en premier lieu, le requérant fait valoir qu’il résulte de la démonstration de la condition relative au fumus boni juris que l’illégalité de la décision attaquée est manifeste et qu’il est nécessaire, pour ce seul motif, d’en suspendre les effets.

24      En deuxième lieu, le requérant allègue que la décision attaquée le prive de 5 % de son budget annuel, soit la somme de 47 020,54 euros. Selon le requérant, cette sanction disproportionnée le prive d’une somme conséquente qui va le contraindre à réduire ses opérations de communication et de militantisme. En outre, cette sanction le priverait de ses moyens pour mener campagne en vue des élections européennes à venir.

25      En troisième lieu, le requérant fait valoir que, dans la mesure où il a été considéré coupable de l’infraction prévue à l’article 27, paragraphe 2, sous a), v) et vi), du règlement no 1141/2014, la sanction infligée par l’Autorité permet à l’ordonnateur du Parlement européen, conformément à l’article 27, paragraphe 3, de ce règlement, de l’exclure de futurs financements de l’Union pendant un délai pouvant aller jusqu’à cinq ans. Sur ce fondement, le Parlement aurait mis un terme à la convention de contribution au financement du requérant et l’aurait privé de son financement pour l’année 2023, à compter du 12 décembre 2023.

26      Selon le requérant, cette circonstance constitue un préjudice grave et imminent dans la mesure où, d’une part, il sera nécessairement contraint à la dissolution si cette décision devait être maintenue pour l’année 2024 et, d’autre part, ses partis nationaux membres verraient les moyens de leur alliance réduits à néant.

27      En outre, le requérant allègue que la résiliation de la convention de contribution le prive de la possibilité de report du solde de l’exercice sur l’année 2024. Or, la partie de la contribution qu’il n’a pas utilisée au cours de l’exercice 2023 s’élèverait à 4 millions d’euros. Cette somme aurait été destinée à couvrir, notamment, les dépenses électorales de l’année 2024.

28      Enfin, le requérant précise que, selon l’article 18, paragraphe 2, du règlement no 1141/2014, un parti politique européen ne peut, à la date de sa demande de financement, faire l’objet d’aucune des sanctions prévues notamment à l’article 27, paragraphe 2, sous a), v) et vi), de ce règlement. Il en déduit que sa demande de financement pour l’exercice 2025, qui sera soumise en 2024, pourrait être refusée par le Parlement à la suite de la décision attaquée.

29      L’Autorité conteste les arguments du requérant.

30      À cet égard, en premier lieu, il y a lieu de rappeler qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour que le caractère plus ou moins sérieux du fumus boni juris n’est pas sans influence sur l’appréciation de l’urgence. L’urgence dont peut se prévaloir une partie requérante doit ainsi d’autant plus être prise en considération par le juge des référés que le fumus boni juris des moyens et des arguments sur lesquels il s’appuie paraît particulièrement sérieux [voir, en ce sens, ordonnances du 7 mars 2013, EDF/Commission, C‑551/12 P(R), EU:C:2013:157, points 23 et 24, et du 12 juin 2014, Commission/Rusal Armenal, C‑21/14 P‑R, EU:C:2014:1749, point 40 et jurisprudence citée].

31      Il n’en reste pas moins que, conformément aux dispositions de l’article 156, paragraphe 4, du règlement de procédure, les conditions relatives au fumus boni juris et à l’urgence sont distinctes et cumulatives, de telle sorte que la partie qui sollicite une protection provisoire demeure tenue de démontrer l’imminence d’un préjudice grave et irréparable [voir, en ce sens, ordonnances du 7 mars 2013, EDF/Commission, C‑551/12 P(R), EU:C:2013:157, point 24, et du 12 juin 2014, Commission/Rusal Armenal, C‑21/14 P‑R, EU:C:2014:1749, point 40 et jurisprudence citée].

32      Néanmoins, lorsqu’une décision apparaît, à la lumière des moyens dirigés contre elle, comme un acte auquel il manque même l’apparence de la légalité, le juge des référés doit en suspendre immédiatement l’exécution, sans qu’il soit nécessaire que la partie qui sollicite une protection provisoire démontre que cette protection doit lui être accordée en vue d’éviter la survenance d’un préjudice grave et irréparable [ordonnance du 2 février 2024, Mylan Ireland/Commission, C‑604/23 P(R), non publiée, EU:C:2024:117, point 58].

33      Il découle de cette jurisprudence que seule une illégalité d’une nature et d’une gravité exceptionnelles peut justifier le prononcé d’un sursis à exécution d’une décision, sans que soit établi un risque de survenance d’un préjudice grave et irréparable, et que la démonstration de l’existence d’un fumus boni juris particulièrement sérieux n’est donc pas suffisante à cet égard [ordonnance du 2 février 2024, Mylan Ireland/Commission, C‑604/23 P(R), non publiée, EU:C:2024:117, point 59].

34      En l’espèce, il convient de relever que, si le requérant a effectivement présenté une série d’arguments destinés à établir l’existence d’un fumus boni juris, il n’a, en revanche, avancé aucun argument démontrant que la décision attaquée est dépourvue même de l’apparence de la légalité et que cette circonstance justifie, en tant que telle, le prononcé d’un sursis à exécution de cette décision.

35      En deuxième lieu, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel la décision attaquée le prive de 5 % de son budget annuel, il convient de relever que le préjudice dont fait état le requérant est d’ordre financier.

36      Or, il est de jurisprudence bien établie qu’un préjudice d’ordre pécuniaire ne saurait, sauf circonstances exceptionnelles, être considéré comme irréparable ou même difficilement réparable, une compensation pécuniaire étant, en règle générale, à même de rétablir la personne lésée dans la situation antérieure à la survenance du préjudice. Contrairement à ce qu’allègue le requérant, un tel préjudice pourrait notamment être réparé dans le cadre d’un recours en indemnité introduit sur la base des articles 268 et 340 TFUE [voir ordonnances du 28 novembre 2013, EMA/InterMune UK e.a., C‑390/13 P(R), EU:C:2013:795, point 48 et jurisprudence citée, et du 28 avril 2009, United Phosphorus/Commission, T‑95/09 R, non publiée, EU:T:2009:124, point 33 et jurisprudence citée].

37      Toutefois, lorsque le préjudice invoqué est d’ordre financier, les mesures provisoires sollicitées se justifient s’il apparaît que, en l’absence de ces mesures, la partie qui les sollicite se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril sa viabilité financière avant l’intervention de la décision mettant fin à la procédure au fond (voir ordonnances du 12 juin 2014, Commission/Rusal Armenal, C‑21/14 P‑R, EU:C:2014:1749, point 46 et jurisprudence citée et du 4 juillet 2017, Institute for Direct Democracy in Europe/Parlement, T‑118/17 R, non publiée, EU:T:2017:465, point 31).

38      En outre, il y a lieu de préciser que, selon une jurisprudence constante, un préjudice d’ordre financier peut notamment être considéré comme irréparable si ce préjudice, même lorsqu’il se produit, ne peut pas être chiffré [voir ordonnance du 28 novembre 2013, EMA/InterMune UK e.a., C‑390/13 P(R), EU:C:2013:795, point 49 et jurisprudence citée].

39      En l’espèce, le requérant se limite, dans sa démonstration du caractère grave et irréparable du préjudice financier qu’il pourrait subir, à invoquer le fait que la décision attaquée le prive de 5 % de son budget annuel, à savoir de la somme de 47 020,54 euros, mais n’apporte aucun autre élément chiffré, comptable ou autre.

40      Ainsi, il n’est pas possible d’apprécier l’importance du préjudice financier allégué.

41      En tout état de cause, le requérant s’est abstenu d’affirmer, et encore moins d’établir, qu’il se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril sa viabilité financière avant l’intervention de la décision mettant fin à la procédure au fond.

42      Au contraire, le requérant se contente d’affirmer, sans étayer ses propos, que la décision attaquée, d’une part, le contraindra à réduire ses opérations de communication et de militantisme et, d’autre part, le privera de ses moyens pour mener campagne en vue des élections européennes à venir.

43      En troisième lieu, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel la sanction infligée par l’Autorité permettrait à l’ordonnateur du Parlement de l’exclure de futurs financements de l’Union pendant un délai pouvant aller jusqu’à cinq ans, force est de constater qu’une prétendue décision d’exclusion serait, si elle était adoptée, une décision de l’ordonnateur du Parlement et non de l’Autorité et que l’ordonnateur du Parlement disposerait à cet égard d’une marge d’appréciation.

44      Contrairement à ce qu’affirme le requérant au sujet d’un risque de dissolution en cas de maintien de la décision de l’ordonnateur du Parlement en 2024, il ressort des annexes B.13 et B.14 aux observations de l’Autorité que le Parlement a approuvé une contribution au financement du requérant par le budget de l’Union pour l’année électorale 2024, alors que le Parlement avait connaissance de la décision attaquée. Par conséquent, le risque financier se limite à la part du financement pour la période allant du 12 décembre, date à laquelle le Parlement aurait privé le requérant de son financement pour l’année 2023, au 31 décembre 2023 et au report du solde de l’exercice 2023 vers 2024.

45      Or, comme l’Autorité l’a démontré dans l’annexe B.15 de ses observations à la demande en référé, l’absence partielle ou temporaire de contribution au financement par le budget de l’Union ne met pas en péril la viabilité financière du requérant. En effet, sur tous les exercices budgétaires déjà clôturés, le requérant n’a utilisé pour des activités éligibles que des pourcentages très inférieurs au préfinancement octroyé par le Parlement en débuts d’exercices, et ce même lors de l’année électorale 2019 où seulement 25 % du montant annuel de préfinancement du budget de l’Union obtenu par le requérant ont été effectivement utilisés pour des activités éligibles.

46      De plus, comme l’Autorité l’a démontré dans l’annexe B.14 de ses observations à la demande en référé, pour l’exercice 2024, le Parlement a accordé au requérant une nouvelle contribution de 4 359 348 euros et en a consenti le préfinancement à 100 %. Par conséquent, l’absence de report d’un solde éventuel, quelle que soit son ampleur, est sans incidence pratique sur la trésorerie et les activités du requérant, dans la mesure où la nouvelle contribution du budget de l’Union pour 2024, faisant l’objet d’un préfinancement, pourra servir aux dépenses éligibles qui seront effectuées par le requérant. À cet égard, le requérant n’a ni allégué ni démontré l’utilisation d’un montant excédant la nouvelle contribution accordée pour 2024 et encore moins a-t-il établi un préjudice grave et irréparable qui découlerait de l’absence de report de solde qui s’ajouterait à cette nouvelle contribution.

47      Il convient d’ajouter à cet égard que le report de solde ne saurait, en tout état de cause, intervenir qu’après la clôture des comptes pour l’année 2023 à la fin de l’année 2024, à savoir à une date postérieure à celle des élections européennes.

48      En outre, dans la mesure où, en alléguant que les partis nationaux membres verraient les « moyens de leur alliance » réduits à néant, le requérant entendrait viser les moyens financiers, cette argumentation se heurte à la lettre de l’article 22, paragraphe 1, du règlement no 1141/2014, qui prévoit que le financement des partis politiques européens par le budget général de l’Union n’est pas utilisé pour financer directement ou indirectement d’autres partis politiques et notamment des partis nationaux.

49      Enfin, il y a lieu de constater que le requérant n’a pas démontré que le préjudice grave et irréparable allégué est probable ou imminent, comme le requiert la jurisprudence (voir, en ce sens, ordonnance du 27 février 2015, Espagne/Commission, T‑826/14 R, EU:T:2015:126, point 33 et jurisprudence citée).

50      En effet, il y a lieu de relever que les allégations du requérant quant aux prétendues conséquences de la décision attaquée sur la contribution de financement par le budget de l’Union ne portent pas sur un besoin actuel, mais sur une avance à l’égard d’un prétendu besoin futur. Or, comme il a été mentionné au point 44 ci‑dessus, le Parlement a déjà approuvé un financement du requérant par le budget de l’Union pour 2024. S’agissant du financement pour l’année budgétaire 2025, ce financement n’est pas encore ouvert à candidatures et n’a fait l’objet d’aucune demande.

51      Il résulte de tout ce qui précède que la demande en référé doit être rejetée, à défaut pour le requérant d’établir que la condition relative à l’urgence est remplie, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur le fumus boni juris ou de procéder à la mise en balance des intérêts.

52      En vertu de l’article 158, paragraphe 5, du règlement de procédure, il convient de réserver les dépens.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 5 mars 2024.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

M. van der Woude


*      Langue de procédure : le français.