Language of document : ECLI:EU:T:2022:105

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

2 mars 2022  *

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale META – Marque nationale verbale antérieure METALGIAL – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T-192/21,

Laboratorios Ern, SA, établie à Barcelone (Espagne), représentée par Me T. González Martínez, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Beta Sports LLC, établie à Coconut Creek, Floride (États-Unis),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 22 janvier 2021 (affaire R 1152/2020-2), relative à une procédure d’opposition entre Laboratorios Ern et Beta Sports,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović (rapporteure), présidente, MM. F. Schalin et I. Nõmm, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 12 avril 2021,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 1er juillet 2021,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

Le 25 octobre 2018, Beta sports LLC, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal META.

Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Compléments alimentaires ; compléments nutritionnels et alimentaires ».

La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2018/232, du 6 décembre 2018.

Le 6 mars 2019, la requérante, Laboratorios Ern, SA, a formé opposition, au titre de l’article 46 du règlement 2017/1001, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits mentionnés au point 3 ci-dessus.

L’opposition était fondée sur la marque espagnole verbale antérieure METALGIAL déposée le 2 décembre 2010 et enregistrée le 14 avril 2011 sous le numéro 2 958 678, désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires ; produits hygiéniques pour la médecine ; substances diététiques à usage médical, aliments pour bébés ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières pour plomber les dents et pour empreintes dentaires ; désinfectants ; produits pour la destruction d’animaux nuisibles ; fongicides, herbicides ».

Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui prévu par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

Par décision du 29 avril 2020, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité en retenant, en substance, qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les signes en conflit pour l’ensemble des produits visés par la marque demandée.

Le 8 juin 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

Par décision du 22 janvier 2021 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.

Premièrement, la chambre de recours a constaté que le public pertinent se composait du grand public et du public spécialisé, dont le niveau d’attention est élevé et que le territoire pertinent était celui de l’Espagne. Deuxièmement, s’agissant de la comparaison des produits en cause, elle a relevé que les produits relevant de la classe 5 et visés par la marque demandée étaient identiques aux substances diététiques à usage médical relevant de la même classe et désignés par la marque antérieure. Troisièmement, en ce qui concerne la comparaison des signes verbaux en conflit, la chambre de recours a conclu à un degré faible de similitude des signes sur les plans visuel et phonétique et à l’absence de similitude sur le plan conceptuel. Quatrièmement, la chambre de recours a reconnu, en substance, à l’instar de la division d’opposition, que les différences entre les signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel étaient suffisantes pour empêcher que les similitudes entre lesdits signes entraînent un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent en ce qui concerne des produits identiques. Par conséquent, elle a conclu à l’absence de risque de confusion.

Conclusions des parties

La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

rejeter la demande de l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits relevant de la classe 5 ;

condamner l’EUIPO aux dépens.

L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.

En droit

Sur la recevabilité des pièces présentées pour la première fois devant le Tribunal

L’EUIPO invoque l’irrecevabilité de l’annexe A 7 de la requête. Il fait valoir que cette annexe contient des documents qui sont présentés pour la première fois devant le Tribunal et qui ne relèvent pas des exceptions au principe de l’irrecevabilité des documents présentés pour la première fois devant celui-ci, en ce qu’ils ne prouvent pas une dénaturation évidente des faits, n’étayent pas ou ne contestent pas l’exactitude d’un fait notoire relatif à la décision attaquée et ne constituent pas des décisions juridictionnelles ou de l’EUIPO présentées à titre purement illustratif.

Il doit être constaté, ainsi que le soutient l’EUIPO, que l’annexe A 7 est produite pour la première fois devant le Tribunal. Elle est constituée d’impressions et d’extraits de sites Internet provenant de diverses boutiques en ligne, notamment, \r; \r, \r et \rt illustrant le fait que la requérante est spécialisée dans la commercialisation de compléments alimentaires.

Cette pièce, produite pour la première fois devant le Tribunal, ne peut être prise en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO, au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T-346/04, EU:T:2005:420, point 19 et jurisprudence citée]. Il convient donc d’écarter le document susvisé sans qu’il soit nécessaire d’examiner sa force probante.

Sur le fond

La requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b, du règlement 2017/1001. Dans le cadre de ce moyen, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir constaté, à tort, l’absence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

Plus particulièrement, d’une part, la requérante fait valoir que, dès lors que les produits en cause sont destinés au public spécialisé et au grand public dont le niveau d’attention est élevé, le risque de confusion devrait être apprécié par rapport à la perception qu’en avait la partie du public qui manifestait le niveau d’attention le moins élevé étant donné qu’elle serait plus encline à la confusion. D’autre part, la requérante fait valoir que la chambre de recours a commis des erreurs dans l’examen des faits et des arguments relatifs à l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, en particulier en ce qui concerne la faible similitude sur les plans visuel et phonétique entre les marques en conflit ainsi que l’absence de similitude conceptuelle, ce qui a conduit la chambre de recours à une appréciation globale erronée du risque de confusion.

L’EUIPO conteste ces arguments.

Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T-162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T-316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il n’existait pas, en l’espèce, de risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

Sur le public pertinent

S’agissant de la définition du public pertinent, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T-256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

En l’espèce, la chambre de recours a estimé, aux points 18 et 19 de la décision attaquée, que les produits relevant de la classe 5 visés par la marque demandée étaient des produits de consommation générale, destinés au public spécialisé et au grand public dont le niveau d’attention pouvait être considéré comme élevé. À cet égard, ce degré d’attention élevé, même à l’égard du grand public, tiendrait au fait que les produits désignés par la marque demandée pourraient avoir des conséquences importantes sur l’état de santé des consommateurs.

C’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, au vu de la nature des produits couverts par la marque demandée, à savoir les compléments alimentaires et les compléments nutritionnels et alimentaires, que le niveau d’attention du grand public et du public spécialisé serait plutôt élevé. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, ces produits sont en effet susceptibles d’avoir une incidence sur la santé du consommateur. En outre, les consommateurs s’intéressant à ce type de produits prennent un soin particulier de leur santé, de sorte qu’ils sont moins susceptibles de confondre les diverses versions desdits produits [voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 2020, SBS Bilimsel Bio Çözümler/EUIPO – Laboratorios Ern (apiheal), T-53/19, non publié, EU:T:2020:469, points 37 et 38 et jurisprudence citée, et du 8 juillet 2009, Laboratorios Del Dr. Esteve/OHMI – Ester C (ESTER-E), T-230/07, non publié, EU:T:2009:252, point 36 et jurisprudence citée].

Par ailleurs, la jurisprudence invoquée par la requérante, issue de l’arrêt du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO) (T-220/09, non publié, EU:T:2011:392), n’est pas applicable au cas d’espèce dans la mesure où le niveau d’attention du public pertinent a, à bon droit, été considéré comme étant élevé. Par conséquent, l’argument de la requérante selon lequel le risque de confusion devait être apprécié par rapport à la perception qu’en avait la partie du public qui manifeste le niveau d’attention le moins élevé doit être rejeté comme non fondé.

Il y a lieu également d’approuver la conclusion de la chambre de recours, au demeurant non contestée par la requérante, selon laquelle le territoire pertinent, en l’espèce, était celui de l’Espagne. En effet, dès lors qu’il suffit qu’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, existe dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée, la chambre de recours a correctement tenu compte de la perception du public pertinent espagnol [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T-81/03, T-82/03 et T-103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

Sur la comparaison des produits

Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T-443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

En l’espèce, au point 25 de la décision attaquée la chambre de recours a entériné la conclusion de la division d’opposition, selon laquelle les « compléments alimentaires » et les « compléments nutritionnels et alimentaires » relevant de la classe 5 et désignés par la marque demandée étaient identiques aux « substances diététiques à usage médical » relevant de la même classe et désignés par la marque antérieure.

Ces considérations, au demeurant non contestées par les parties, apparaissent correctes au regard des éléments du dossier de l’affaire.

Sur la comparaison des signes

À titre liminaire, il convient de rappeler que deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, sont pertinents les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir, par analogie, arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T-6/01, EU:T:2002:261, point 30 et jurisprudence citée].

L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C-334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier l’existence d’éléments distinctifs et dominants au sein desdits signes, avant de procéder à l’examen de la similitude des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

Sur les éléments distinctifs et dominants des marques en conflit et leur caractère distinctif intrinsèque

L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C-334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée).

En l’espèce, il convient de rappeler, à titre liminaire, que les marques en conflit sont, d’une part, la marque antérieure METALGIAL et, d’autre part, la marque demandée META. Selon la chambre de recours, en substance, aucun élément des marques en conflit n’est plus dominant ou distinctif que l’autre.

En ce qui concerne les éléments distinctifs des signes en conflit, il convient de rappeler que, si le consommateur perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en demeure pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci en des éléments verbaux, qui, pour lui, ont une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [voir arrêt du 6 septembre 2013, Eurocool Logistik/OHMI – Lenger (EUROCOOL), T-599/10, non publié, EU:T:2013:399, point 104 et jurisprudence citée].

Dans la décision attaquée, s’agissant de la signification de l’élément « meta » formant la marque demandée, la chambre de recours a constaté, aux points 35 et 36 de la décision attaquée, que le terme « meta », désignant la ligne d’arrivée d’une course ou l’objectif vers lequel tendent les actions et les désirs d’une personne, n’était ni descriptif ni allusif des caractéristiques représentatives des produits en cause et possédait donc un caractère distinctif moyen, ce qui n’est pas contesté par les parties.

Quant à la signification du terme « metalgial » qui compose la marque antérieure, la chambre de recours a considéré, au point 31 de la décision attaquée, qu’il s’agissait d’un mot fantaisiste, ce qui n’est pas contesté par les parties.

Toutefois, compte tenu de la jurisprudence citée au point 37 ci-dessus, il y a lieu de relever que la chambre de recours a correctement considéré, en substance, qu’une partie du public espagnol, en décomposant le signe antérieur en syllabes « me », « tal » et « gial », pourrait isoler l’élément « metal », du début, comme portant sur le concept d’un élément chimique transmettant la chaleur et l’électricité, et l’autre élément « gial », comme n’ayant pas d’autonomie ou de signification particulière. Selon la chambre de recours, ces deux éléments distincts, n’étant pas moins distinctifs ou dominants l’un que l’autre et ne présentant aucun lien avec les produits désignés par la marque antérieure, n’altéraient pas le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure.

Ces appréciations ne sont pas remises en cause par l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait procédé à une décomposition artificielle de la dénomination qui forme la marque antérieure. En effet, la requérante n’a pas suffisamment démontré que le public pertinent aurait tendance à percevoir immédiatement l’élément « lgial » dans le signe antérieur et à l’associer à des caractéristiques liées aux produits désignés par la marque demandée. En effet, le grand public, dont la connaissance des termes du milieu médical est limitée, ne repérerait pas directement et immédiatement l’élément « lgial », comme l’a correctement constaté, en substance, la chambre de recours au point 32 de la décision attaquée.

Partant, la chambre de recours a conclu, à juste titre, aux points 34 et 36 de la décision attaquée, que tant la marque antérieure que la marque demandée possédaient un caractère distinctif normal.

Sur la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle

S’agissant de la comparaison des signes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il y a lieu de rappeler que la chambre de recours a conclu, aux points 37 à 52 de la décision attaquée, qu’il existait un faible degré de similitude entre les signes META et METALGIAL sur les plans visuel et phonétique. Sur le plan conceptuel, elle a considéré qu’il n’existait pas de similitude conceptuelle entre ces signes, et ce tant pour la partie du public pertinent qui percevait l’élément « metalgial », au sein de la marque antérieure, comme étant un mot inventé et unique, dépourvu de signification, que pour la partie dudit public qui percevait le concept transmis par le terme « metal » comme un élément distinctif.

La requérante conteste les appréciations de la chambre de recours en relevant, tout d’abord, qu’elle a procédé à une décomposition artificielle de la dénomination qui forme la marque antérieure et a omis d’examiner l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit. Ensuite, elle fait valoir que, sur le plan visuel, les marques verbales coïncident par l’élément « meta », qui est contenu au début de la marque antérieure, et cette partie est généralement celle qui attire le plus l’attention du public. Elle soutient que la marque demandée pourrait être considérée comme étant une simple contraction de la marque antérieure. Selon la requérante, sur le plan phonétique, la prononciation de l’élément initial « meta » serait très similaire alors que l’élément final est perçu dans une moindre mesure par les consommateurs. Sur le plan conceptuel, la requérante confirme que l’élément « meta » renvoie à la notion d’objectif final et que, en revanche, l’élément « metalgial » est un terme entièrement fantaisiste. Enfin, la requérante fait valoir que ces similitudes conduiraient à conclure à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

Sur la comparaison visuelle

S’agissant de la comparaison visuelle, il convient de relever que les signes META et METALGIAL se composent respectivement de quatre et de neuf lettres et coïncident par leurs quatre premières lettres, « m », « e », « t » et « a », placées dans le même ordre au début des signes. Les différences entre les signes tiennent, en revanche, aux cinq lettres supplémentaires « l », « g », « i », « a » et « l » de la marque antérieure. Ainsi, d’une part, il existe un élément de différenciation significatif dans l’impression d’ensemble de la marque antérieure et, d’autre part, la longueur des marques en conflit est différente.

La requérante n’a pas réussi à remettre en cause ces appréciations de la chambre de recours par ses arguments selon lesquels les signes seraient perçus comme étant similaires au niveau visuel.

En effet, premièrement, si le simple fait que la marque demandée soit entièrement comprise dans la marque antérieure constitue, en principe, une indication de la similitude entre les marques, cette circonstance ne permet pas de conclure, à elle seule, à leur similitude visuelle [voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2019, MAN Truck & Bus/EUIPO – Halla Holdings (MANDO), T-792/17, non publié, EU:T:2019:533, point 62]. Ainsi, le Tribunal a déjà jugé qu’une suite de lettres communes à deux marques ne les rendait pas nécessairement similaires [voir arrêt du 11 février 2020, Dalasa/EUIPO – Charité – Universitätsmedizin Berlin (charantea), T-733/18, non publié, EU:T:2020:42, point 51 et jurisprudence citée].

Deuxièmement, la requérante n’a pas étayé son argument selon lequel la marque demandée pourrait être perçue comme une abréviation de la marque antérieure. À cet égard, il y a lieu de relever que les exemples d’abréviations telles que « coca », « pepsi » ou « cosmo », invoqués par la requérante, renvoient à des marques connues composées de deux éléments clairement dissociables, en raison de leur représentation (« pepsi-cola » et « coca-cola ») ou de leur signification (cosmopolitan), comme le soutient correctement l’EUIPO.

Troisièmement, le fait que l’élément « meta » soit placé au début de la marque antérieure ne permet pas, à lui seul, de conclure que le public pertinent la désignerait au moyen de ce seul élément. La considération selon laquelle le consommateur attache normalement plus d’importance au début d’une marque qu’à sa fin, tant sur le plan visuel que sur le plan phonétique, ne saurait valoir dans tous les cas [voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, Yongkang Kugooo Technology/EUIPO – Ford Motor Company (kugoo), T-324/20, non publié, EU:T:2021:280, point 51 et jurisprudence citée]. À cet égard, il convient de relever que l’attention visuelle du consommateur pourrait également se focaliser sur les lettres finales des signes (voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2019, MANDO, T-792/17, non publié, EU:T:2019:533, point 64).

Par ailleurs, cette considération ne saurait infirmer le principe selon lequel l’examen de la similitude des marques doit prendre en compte l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit (voir arrêt du 15 juillet 2011, ERGO, T-220/09, non publié, EU:T:2011:392, point 31). La chambre de recours a donc, à bon droit, considéré, au point 39 de la décision attaquée, que le signe antérieur ne serait pas perçu comme une combinaison de deux éléments indépendants, mais plutôt comme un seul terme fantaisiste.

Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a, au point 42 de la décision attaquée, conclu à un faible degré de similitude visuelle entre les marques en cause.

Sur la comparaison phonétique

S’agissant de la comparaison phonétique, il y a lieu de relever, à l’instar de la chambre de recours aux points 43 à 45 de la décision attaquée que, même si la prononciation des signes coïncide par la prononciation de leur partie initiale « meta », cette identité phonétique concerne uniquement la première syllabe dès lors que la marque antérieure inclut, dans la deuxième syllabe, la lettre supplémentaire « l ». En outre, contrairement à ce que soutient la requérante, les signes diffèrent par leur accent tonique, lequel se trouve sur la première syllabe de la marque demandée « me » et, par opposition, sur la dernière syllabe de la marque antérieure « gial », ce qui engendre une différence significative sur le plan du rythme et de l’intonation dans la prononciation des marques en conflit. Au surplus, comme l’a constaté à bon droit, en substance, la chambre de recours, une répétition de l’élément verbal « al » dans la marque antérieure ainsi que la présence de la consonne « g » renforcent encore cette différence.

Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel la prononciation des marques en conflit est très similaire, puisque la partie finale sera perçue par le consommateur dans une moindre mesure. En effet, compte tenu de la jurisprudence citée aux points 50 et 51 ci-dessus, cet argument doit être rejeté comme non fondé.

Des lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 46 de la décision attaquée, que les marques en conflit présentaient un degré faible de similitude sur le plan phonétique.

Sur la comparaison conceptuelle

S’agissant de la comparaison conceptuelle, il y a lieu d’entériner l’appréciation de la chambre de recours, au point 49 de la décision attaquée, selon laquelle les signes en cause sont différents sur le plan conceptuel.

En effet, d’une part, le public espagnol percevra le terme « meta » de la marque demandée comme un « objectif vers lequel tendent les actions et les désirs d’une personne », tandis que le signe METALGIAL ne revêt pas une signification claire pour ledit public pertinent, ce qui n’a pas été contesté par les parties.

À cet égard, il convient de rappeler la jurisprudence selon laquelle, si une marque a un sens et qu’une autre est dénuée de toute signification, les marques comparées sont jugées différentes sur le plan conceptuel [voir, en ce sens, arrêt du 16 novembre 2006, Jabones Pardo/OHMI – Quimi Romar (YUKI), T-278/04, non publié, EU:T:2006:351, point 64].

D’autre part, il y a lieu de considérer que, à la lumière de la jurisprudence citée au point 37 ci-dessus et eu égard à l’agencement des syllabes dans la marque antérieure constatée au point 53 ci-dessus, le public espagnol aura tendance à décomposer celle-ci en des éléments verbaux qui suggèrent une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît, à savoir les éléments « metal » et « gial ». Il s’ensuit que, à l’instar de ce qu’a considéré la chambre de recours, une partie du public espagnol pourrait percevoir le concept transmis par le terme « metal » qui est contenu dans la marque antérieure.

À cet égard, compte tenu de la signification du terme « meta » mentionnée au point 57 ci-dessus et celle du terme « metal » désignant un « élément chimique transmettant la chaleur », il convient de relever, comme l’a constaté la chambre de recours, qu’une différence substantielle existe entre ces concepts tant pour le grand public que pour le public spécialisé [voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 2009, ESTER-E, T-230/07, non publié, EU:T:2009:252, points 50 à 56, et du 9 septembre 2010, adp Gauselmann/OHMI – Maclean (Archer Maclean’s Mercury), T-106/09, non publié, EU:T:2010:380, point 35].

En conséquence, il convient de confirmer la conclusion de la chambre de recours, au point 52 de la décision attaquée, selon laquelle, tant pour le public percevant le signe METALGIAL comme un mot fantaisiste, dépourvu de signification que pour le public percevant le concept de « metal » comme un élément distinctif, il n’existe aucune similitude conceptuelle avec le signe demandé META.

Sur l’appréciation globale du risque de confusion

L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C-39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T-81/03, T-82/03 et T-103/03, EU:T:2006:397, point 74).

En l’espèce, après avoir notamment relevé, en substance, que le caractère distinctif de la marque antérieure devait être considéré comme normal, au point 56 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, au point 66 de la décision attaquée, en prenant en compte l’identité des produits en cause, que les différences entre les signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel étaient suffisantes pour conclure qu’il n’existait pas un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, dont le niveau d’attention devait être considéré comme élevé pour les produits relevant de la classe 5.

La requérante fait valoir que, vu l’identité des produits en cause et la similitude visuelle, phonétique et même conceptuelle entre les signes en conflit, la chambre de recours a conclu, à tort, à l’absence d’un risque de confusion.

L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

À cet égard, il convient de rappeler que tous les produits visés par la marque antérieure et ceux visés par la marque demandée sont des produits de consommation générale. Toutefois, compte tenu du fait qu’il s’agit de produits pouvant affecter la santé, il y a lieu de retenir, à l’instar de la chambre de recours, que, lors de leur achat, le public pertinent fera preuve d’un niveau d’attention élevé.

Compte tenu des considérations qui précèdent, la chambre de recours a pu, à bon droit, conclure qu’il n’existait pas de risque de confusion, en l’espèce, au regard de tous les produits visés par la marque demandée, en dépit de leur identité avec les « substances diététiques à usage médical » visés par la marque antérieure et d’une faible similitude entre les signes en conflit.

En particulier, il y a lieu de relever que la chambre de recours n’a pas commis d’erreurs dans l’évaluation des critères sur lesquels elle s’est fondée pour procéder à l’appréciation globale du risque de confusion. Ainsi, elle a correctement retenu que le public pertinent n’établirait pas de lien entre les marques en conflit, même si elles désignent des produits identiques, dans la mesure où, premièrement, les signes sont considérés comme étant faiblement similaires sur les plans visuel et phonétique, et différents sur le plan conceptuel, deuxièmement, le public pertinent fera preuve d’un degré d’attention élevé lors de l’achat des produits en cause, et, troisièmement, la marque antérieure dispose d’un caractère distinctif intrinsèque normal.

À cet égard, il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours, que, même si les produits en cause sont identiques, l’existence d’un risque de confusion ne saurait être constatée, dès lors que, en premier lieu, le signe constituant la marque antérieure contient deux fois plus de caractères que le signe constituant la marque demandée, en deuxième lieu, les signes en conflit présentent des différences en termes de rythme et d’intonation, en troisième lieu, les signes sont différents sur le plan conceptuel et, en quatrième lieu, la marque antérieure a un caractère distinctif intrinsèque moyen (voir, en ce sens, arrêt du 11 février 2020, charantea, T-733/18, non publié, EU:T:2020:42, points 83 et 84).

En tout état de cause, il résulte de la jurisprudence que l’appréciation globale du risque de confusion implique que les différences conceptuelles entre deux signes peuvent neutraliser des similitudes phonétiques et visuelles entre eux, pour autant qu’au moins l’un de ces signes ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir directement [arrêts du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C-16/06 P, EU:C:2008:739, point 98, et du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T-292/01, EU:T:2003:264, point 54]. En l’espèce, il n’est pas contesté que l’élément « meta » est doté d’une signification claire et déterminée que le public pertinent serait susceptible de saisir immédiatement. Dès lors, les différences conceptuelles qui caractérisent les signes en conflit suffisent à neutraliser leurs faibles similitudes visuelles et phonétiques [voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2016, Laboratorios Ern/OHMI – michelle menard (Lenah.C), T-802/14, non publié, EU:T:2016:25, point 48].

Partant, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a conclu, en l’espèce, à l’absence de risque de confusion entre les marques en conflit.

Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le moyen unique et, partant, le recours dans son ensemble, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante.

Sur les dépens

Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

Le recours est rejeté.

Laboratorios Ern, SA, est condamnée aux dépens.

Tomljenović    Schalin    Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 mars 2022 .

Signatures

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*    Langue de procédure : l’espagnol.