Language of document : ECLI:EU:T:2006:330

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

19 octobre 2006.(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale BUD – Demandes de marques communautaires figuratives American Bud et Anheuser Busch Bud – Marques nationales verbales et figuratives antérieures incluant le terme ‘bit’ – Article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 40/94 »

Dans les affaires jointes T‑350/04 à T‑352/04,

Bitburger Brauerei Th. Simon GmbH, établie à Bitburg (Allemagne), représentée par Me M. Huth-Dierig, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Anheuser-Busch, Inc., établie à Saint Louis, Missouri (États-Unis), représentée par Mes A. Renck, V. von Bomhard, A. Pohlmann, D. Ohlgart et B. Goebel, avocats,

ayant pour objet trois recours formés contre les décisions de la deuxième chambre de recours de l’OHMI, du 22 juin 2004, rendues dans les affaires R 447/2002‑2, R 451/2002‑2 et R 453/2002‑2, relatives à des procédures d’opposition entre Bitburger Brauerei Th. Simon GmbH et Anheuser-Busch, Inc.,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS
EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. M. Vilaras, président, F. Dehousse et D. Šváby, juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu les requêtes déposées au greffe du Tribunal le 24 août 2004,

vu les mémoires en réponse de l’OHMI déposés au greffe du Tribunal le 9 février 2005,

vu les mémoires en réponse de l’intervenante déposés au greffe du Tribunal le 17 février 2005,

vu l’ordonnance du président de la cinquième chambre du Tribunal du 26 octobre 2005 portant jonction des présentes affaires aux fins de la procédure orale et de l’arrêt,

à la suite de l’audience du 17 janvier 2006,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

I –  Demandes de marques communautaires déposées par Anheuser‑Busch

1        Anheuser-Busch, Inc. a déposé trois demandes de marques communautaires (ci-après les « marques demandées ») auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié :

–        une demande de marque verbale BUD, déposée le 1er avril 1996 pour des produits relevant de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci-après l’« arrangement de Nice »), et correspondant à la description suivante : « Bière, ale, porter, boissons maltées alcooliques et non alcooliques » ;

–        une demande de marque figurative (ci-après la « marque figurative demandée n° 1 ») :

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–        une demande de marque figurative (ci-après la « marque figurative demandée n° 2 ») :

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2        Ces deux dernières demandes de marques ont été déposées le 16 octobre 1996 pour des produits relevant des classes 16, 25 et 32 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 16 : « Papier, carton et produits en ces matières (compris dans la classe 16) ; produits de l’imprimerie ; articles pour reliures ; papeterie ; adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) ; matières plastiques pour l’emballage (comprises dans la classe 16) ; cartes à jouer » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 32 : « Bière, ale, porter, boissons maltées alcooliques et non alcooliques ».

3        Les demandes de marques figuratives nos 1 et 2 ont été publiées le 23 mars 1998 au Bulletin des marques communautaires n° 20/98 et n° 21/98.

4        La demande de marque verbale a été publiée le 7 décembre 1998 au Bulletin des marques communautaires n° 93/98.

II –  Oppositions formées par Bitburger Brauerei à l’encontre des demandes de marques communautaires

5        Le 10 juin 1998, Bitburger Brauerei Th. Simon GmbH (ci‑après « Bitburger Brauerei ») a formé deux oppositions (nos 48 274 et 49 173), au titre de l’article 42 du règlement nº 40/94, à l’encontre de l’enregistrement des marques figuratives nos 1 et 2, et ce pour l’ensemble des produits spécifiés dans la demande d’enregistrement.

6        Le 3 mars 1999, Bitburger Brauerei a formé une opposition (n° 138 281), au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94, à l’encontre de l’enregistrement de la marque verbale demandée BUD, et ce pour l’ensemble des produits visés dans la demande d’enregistrement.

7        Premièrement, ces trois oppositions étaient fondées sur l’existence des marques antérieures suivantes :

–        la marque verbale nationale BIT, enregistrée en Allemagne le 17 septembre 1996 (n° 39 615 324), pour des « bières ; eaux minérales et eaux gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons à base de fruits et jus de fruits ; sirops et autres produits destinés à la préparation de boissons » relevant de la classe 32 ;

–        la marque verbale et figurative Bit, enregistrée en Allemagne le 12 décembre 1938 (n° 505 912), pour de la « bière » relevant de la classe 32, reproduite ci-après :

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–        la marque verbale et figurative Bitte ein Bit !, enregistrée en Allemagne le 5 juillet 1957 (n° 704 211), pour les produits suivants : « bière et boissons non alcooliques » relevant de la classe 32, reproduite ci-après :

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–        la marque verbale et figurative Bitte ein Bit !, enregistrée en Allemagne le 3 novembre 1987 (n° 1 113 784), pour différents produits relevant des classes 16, 18, 20, 21, 24, 25, 28, 32, 34 et 42, reproduite ci-après :

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8        Les trois oppositions étaient fondées sur tous les produits couverts par les marques n° 505 912, n° 39 615 324 (BIT) et n° 704 211 (Bitte ein Bit !).

9        L’opposition (n° 138 281) à l’encontre de la marque verbale demandée BUD était également fondée sur les produits et services suivants couverts par la marque verbale et figurative n° 1 113 784 (Bitte ein Bit !) et compris dans différentes classes : bière et boissons non alcooliques ; restauration d’hôtes, en particulier fourniture de boissons dans les lieux de restauration de toutes sortes ; location d’installations de débit de boissons, de bars ambulants, de mobilier de jardin et de fête. Les deux oppositions (nos 48 274 et 49 173) à l’encontre des deux marques figuratives demandées étaient également fondées sur les produits suivants couverts par la marque verbale et figurative n° 1 113 784 (Bitte ein Bit !) et compris dans différentes classes : bière et boissons non alcooliques ; brochures, sous verres à bière, affiches publicitaires, posters, stylos à bille, tablier de serveur, t-shirts, cravates, serviettes, sweat-shirts et blousons.

10      Deuxièmement, et s’agissant spécifiquement des marques figuratives demandées, Bitburger Brauerei a invoqué, en plus des marques reprises au point 7 ci-dessus, la marque BIT « notoirement connue » en Allemagne pour les produits suivants : « bières et boissons non alcooliques ; brochures, sous verres à bière, affiches publicitaires, posters, stylos à bille, tablier de tireur de bière, t‑shirts, cravates, serviettes, sweat-shirts et blousons ».

11      Troisièmement, et s’agissant spécifiquement de la marque verbale demandée BUD, Bitburger Brauerei a invoqué, en plus des marques reprises au point 7 ci-dessus, les demandes de marques communautaires suivantes :

–        une demande de marque communautaire figurative déposée le 1er avril 1996 (n° 121 608) pour des produits relevant de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « bière, boissons ressemblant à la bière, ales, porters (ainsi que ces produits sans alcool, légèrement alcoolisés ou à la teneur en alcool réduite) ; boissons non alcooliques ; sirops de fruits et autres préparations pour faire des boissons sans alcool et des boissons alcoolisées ; jus de fruits, eaux de table », reproduite ci-après :

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–        une demande de marque communautaire figurative déposée le 1er avril 1996 (n° 139 634) pour des produits relevant de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « bière, boissons ressemblant à la bière, ales, porters (ainsi que ces produits sans alcool, légèrement alcoolisés ou à la teneur en alcool réduite) ; boissons non alcooliques ; sirops de fruits et autres préparations pour faire des boissons sans alcool et des boissons alcoolisées ; jus de fruits, eaux de table », reproduite ci-après :

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12      À l’appui de ses oppositions, Bitburger Brauerei a invoqué les motifs relatifs de refus visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 40/94.

III –  Décisions de la division d’opposition

13      Par trois décisions rendues le 27 mars 2002, la division d’opposition a rejeté les oppositions formées par Bitburger Brauerei.

14      S’agissant de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, la division d’opposition a tout d’abord considéré que les demandes de marques figuratives communautaires nos 121 608 et 139 634, compte tenu de leur dépôt à la même date que la marque verbale demandée BUD (1er avril 1996), ne pouvaient pas être considérées comme des droits antérieurs au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

15      Par ailleurs, la division d’opposition a considéré que la preuve de l’usage de la marque verbale et figurative allemande n° 505 912 (BIT), dans sa forme enregistrée, n’avait pas été apportée et que la preuve de l’usage des marques verbales et figuratives allemandes nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !) n’avait été apportée que pour la « bière » et la « bière non alcoolique » (pour ces deux marques) et pour les « sous verres à bière, t‑shirts, vestes, verres à bière, ouvre-bouteilles, stylos à bille et tablier de serveur » (pour la marque n° 1 113 784).

16      Tenant compte de ces éléments, la division d’opposition a conclu qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les marques demandées, d’une part, et les marques allemandes verbale n° 39 615 324 (BIT) et verbales et figuratives nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !), d’autre part.

17      À cet égard, la division d’opposition a estimé, en substance, que, malgré le caractère distinctif accru de la marque verbale n° 39 615 324 (BIT) sur le marché allemand et l’identité des produits en cause (pour la classe 32), les différences d’ordre visuel, phonétique et conceptuel entre les signes en cause étaient suffisantes pour exclure tout risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. La division d’opposition a donc conclu à l’absence de risque de confusion, en Allemagne, entre la marque verbale allemande n° 39 615 324 (BIT) et les marques demandées à l’enregistrement. La même conclusion s’imposerait, selon la division d’opposition, s’il devait être tenu compte d’une marque BIT « notoirement connue » en Allemagne, invoquée par Bitburger Brauerei dans le cadre de ses oppositions à l’encontre des deux marques figuratives demandées.

18      Pour ce qui est des marques verbales et figuratives allemandes nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !), la division d’opposition a constaté qu’elles renfermaient des éléments additionnels par rapport à la marque verbale allemande n° 39 615 324 (BIT) et qu’elles étaient, en conséquence, différentes à tous égards des marques demandées. La division d’opposition a donc conclu à l’absence de risque de confusion, en Allemagne, entre les marques verbales et figuratives allemandes nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !) et les marques demandées.

19      S’agissant de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, Bitburger Brauerei estimait, dans le cadre de la marque verbale demandée BUD, que les marques verbales et figuratives n° 505 912 (BIT), n° 704 211 et n° 1 113 784 (Bitte ein Bit !), la marque verbale n° 39 615 324 (BIT) ainsi que la demande de marque figurative communautaire n° 121 608 étaient des marques connues et fondaient l’opposition à ce titre. La division d’opposition a considéré, pour sa part, que la preuve de l’usage de la marque verbale et figurative allemande n° 505 912 (BIT) n’avait pas été apportée et que l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 ne pouvait pas être invoqué. Par ailleurs, concernant la demande de marque communautaire n° 121 608, la division d’opposition a estimé que, compte tenu de son dépôt à la même date que la marque verbale demandée BUD (1er avril 1996), il ne s’agissait pas d’un droit antérieur au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, lu à la lumière de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i), de ce même règlement. Enfin, dès lors que l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 présuppose que les marques en cause soient identiques ou similaires, la division d’opposition a conclu que la marque verbale allemande n° 39 615 324 (BIT) et les marques verbales et figuratives allemandes nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !) ne pouvaient fonder l’opposition au titre de cette disposition.

20      Par ailleurs, dans le cadre des marques figuratives demandées, Bitburger Brauerei invoquait la marque BIT notoirement connue en Allemagne. Dès lors que l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 présuppose que les marques en cause soient identiques ou similaires, la division d’opposition a conclu que le signe BIT ne pouvait fonder l’opposition au titre de cette disposition.

IV –  Décisions de la chambre de recours

21      Le 24 mai 2002, Bitburger Brauerei a formé un recours contre chacune des trois décisions de la division d’opposition.

22      Bitburger Brauerei demandait l’annulation des décisions attaquées dans la mesure où l’opposition avait été rejetée pour les produits compris dans la classe 32.

23      Par trois décisions rendues le 22 juin 2004 (affaire R 453/2002‑2 pour la demande de marque verbale BUD, affaire R 447/2002‑2 pour la demande de marque figurative n° 1 et affaire R 451/2002‑2 pour la demande de marque figurative n° 2), notifiées à Bitburger Brauerei le 29 juin 2004 (ci-après les « décisions attaquées »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté les recours formés à l’encontre des décisions de la division d’opposition.

24      S’agissant, tout d’abord, des deux demandes de marques communautaires invoquées par Bitburger Brauerei à l’encontre de la marque verbale demandée BUD, la chambre de recours a considéré qu’elles ne sauraient être qualifiées de « marques antérieures » au sens de l’article 8, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 40/94 et, partant, fonder les motifs d’opposition visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94. Par ailleurs, dans les trois décisions attaquées, la chambre de recours a considéré, contrairement à la division d’opposition, que la marque verbale et figurative allemande n° 505 912 (BIT) avait fait l’objet d’un usage propre à sauvegarder les droits qui lui sont attachés.

25      En ce qui concerne le risque de confusion, la chambre de recours a conclu qu’un tel risque n’existait pas en Allemagne entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), et ce nonobstant un certain caractère distinctif accru des marques allemandes antérieures et l’identité ou la similitude des produits en cause relevant de la classe 32. L’appréciation de la chambre de recours repose en particulier sur les différences visuelles et phonétiques relevées entre les signes, ainsi que sur l’absence de similitude conceptuelle.

26      Selon la chambre de recours, la même conclusion s’impose – dans une mesure encore plus grande – en ce qui concerne la comparaison des marques demandées et des marques allemandes nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !), qui sont composées de plusieurs mots.

27      S’agissant de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, la chambre de recours a considéré, dans les trois décisions attaquées, que la différence entre les signes était telle qu’il ne pouvait être question d’exploitation du caractère distinctif ou de la valeur des marques antérieures ou de préjudice porté à ceux-ci. La requérante n’aurait pas, de surcroît, expliqué pourquoi une telle exploitation ou un tel préjudice pourrait se produire.

 Procédure et conclusions des parties

28      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure, a invité les parties à répondre à certaines questions et à produire des documents, ce qu’elles ont fait dans le délai imparti.

29      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées à l’audience du 17 janvier 2006.

30      Bitburger Brauerei conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions attaquées ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

31      L’OHMI et Anheuser-Busch concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours ;

–        condamner Bitburger Brauerei aux dépens.

 En droit

I –  Sur le renvoi à certains écrits de procédure devant l’OHMI

32      Anheuser-Busch, à la fin de ses mémoires en réponse, renvoie de façon globale à l’ensemble des arguments, faits et preuves avancés devant l’OHMI dans ses écrits en date des 30 mars 1999, 2 février 2000, 18 juillet 2000, 18 novembre 2002 et 19 août 2003.

33      Il convient de rappeler à cet égard que, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, applicable en matière de propriété intellectuelle en vertu de l’article 130, paragraphe 1, et de l’article 132, paragraphe 1, de ce même règlement, la requête introductive d’instance doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Selon une jurisprudence bien établie, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, doivent figurer dans la requête elle-même [arrêt du Tribunal du 14 septembre 2004, Applied Molecular Evolution/OHMI (APPLIED MOLECULAR EVOLUTION), T‑183/03, Rec. p. II‑3113, point 11].

34      Cette jurisprudence est transposable au mémoire en réponse de l’autre partie à une procédure d’opposition devant la chambre de recours, intervenante devant le Tribunal, en vertu de l’article 46 du règlement de procédure, applicable en matière de propriété intellectuelle conformément à l’article 135, paragraphe 1, deuxième alinéa, de ce même règlement [arrêt du Tribunal du 13 juillet 2004, AVEX/OHMI – Ahlers (a), T‑115/02, Rec. p. II‑2907, point 11].

35      Il s’ensuit que les mémoires en réponse d’Anheuser-Busch, pour autant qu’ils renvoient aux écrits déposés devant l’OHMI, sont irrecevables dans la mesure où le renvoi global qu’ils contiennent n’est pas rattachable aux moyens et aux arguments développés dans les mémoires en réponse.

II –  Sur les renvois à certaines décisions des chambres de recours de l’OHMI

36      À plusieurs reprises dans leurs écritures, Bitburger Brauerei et Anheuser-Busch renvoient à la pratique décisionnelle des chambres de recours de l’OHMI.

37      Il y a lieu de rappeler à cet égard que les décisions que les chambres de recours de l’OHMI sont amenées à prendre, en vertu du règlement n° 40/94, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (arrêts de la Cour du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, non encore publié au Recueil, point 47, et du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, non encore publié au Recueil, point 48).

38      Les renvois effectués par Bitburger Brauerei et Anheuser-Busch sont donc inopérants.

III –  Sur la légalité des décisions attaquées

39      Les recours déposés par Bitburger Brauerei dans les affaires jointes T‑350/04 à T‑352/04 reposent sur deux moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Le second moyen met en avant la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94.

A –  Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

40      Le premier moyen invoqué par Bitburger Brauerei se divise en deux branches.

41      Dans la première branche, Bitburger Brauerei considère que la chambre de recours a commis une erreur en concluant à l’absence de risque de confusion entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT).

42      Dans la seconde branche, Bitburger Brauerei considère que la chambre de recours a commis une erreur en concluant à l’absence de risque de confusion entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !).

1.     Sur la première branche du premier moyen, relative au risque de confusion entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT)

a)     Arguments de Bitburger Brauerei

 Sur le public pertinent

43      Rappelant la jurisprudence relative au risque de confusion, Bitburger Brauerei précise que les marques antérieures sont enregistrées en Allemagne et que les produits en cause sont des produits de consommation courante. Dès lors, Bitburger Brauerei considère que le public ciblé est constitué par le consommateur moyen allemand, qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. S’agissant de l’affirmation contenue dans les décisions attaquées selon laquelle le consommateur de bière moyen connaît en général les marques de bière qui lui plaisent et est capable de distinguer les différentes marques, Bitburger Brauerei relève que, si la chambre de recours a souhaité indiquer en ces termes qu’un niveau d’attention plus élevé devrait être considéré comme existant pour les produits en question, ce raisonnement serait incorrect. En particulier, il serait contraire à l’arrêt du Tribunal du 15 janvier 2003, Mystery Drinks/OHMI – Karlsberg Brauerei (MYSTERY) (T‑99/01, Rec. p. II‑43, point 37), qui aurait retenu que pour les produits « bières » et « boissons non alcooliques », relevant de la classe 32, les consommateurs allemands n’auraient pas un degré d’attention particulièrement élevé.

 Sur le caractère distinctif de la marque BIT

44      Bitburger Brauerei souligne le caractère distinctif élevé de la marque BIT. À cet égard, se référant à l’arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon (C‑39/97, Rec. p. I‑5507), Bitburger Brauerei indique que le caractère distinctif d’une marque découle de ses qualités intrinsèques ou de sa connaissance sur le marché. En l’espèce, la chambre de recours a tout d’abord considéré que le terme « bit » revêt un caractère distinctif normal. Compte tenu de l’utilisation étendue des marques qui aurait été prouvée par Bitburger Brauerei, ce caractère distinctif aurait été renforcé par la notoriété acquise sur le territoire allemand. Selon Bitburger Brauerei, la chambre de recours a dès lors conclu à juste titre que les marques allemandes nos 505 912 et 39 615 324 (BIT) possédaient un caractère distinctif accru. Toutefois, la qualification opérée par la chambre de recours qui a retenu un « certain » caractère distinctif accru ne serait pas correcte. L’utilisation sans interruption depuis des décennies de la marque BIT et le niveau élevé de publicité, prouvés par les documents correspondants, auraient eu pour résultat que, déjà en juillet 1996, BIT était un concept connu par 83,3 % des buveurs de bière allemands, suivant un sondage non orienté, et par 94,8 %, suivant un sondage orienté. Il en résulterait que BIT serait une marque extrêmement bien connue, qui présenterait donc un caractère distinctif accru.

 Sur la comparaison des signes

45      Bitburger Brauerei se concentre sur la comparaison phonétique des signes en cause et conteste, tout d’abord, dans les affaires T‑351/04 et T‑352/04, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les marques figuratives demandées ne peuvent pas être réduites phonétiquement au seul terme « bud ».

46      À cet égard, Bitburger Brauerei considère que la chambre de recours a commis une erreur en concluant que le consommateur moyen pertinent nommerait les marques figuratives demandées American Bud ou Anheuser-Busch Bud.

47      Bitburger Brauerei indique, en premier lieu, que l’appréciation d’un risque de confusion, en cas de marques complexes, ne revient pas à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque, mais qu’il y a lieu, au contraire, d’opérer une telle comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans leur ensemble. Toutefois, cela n’exclurait pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un de ses composants [ordonnance de la Cour du 28 avril 2004, Matratzen Concord/OHMI, C‑3/03 P, Rec. p. I‑3657, point 32, et arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, points 33 et 34]. S’agissant de l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il conviendrait de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants (arrêt MATRATZEN, précité, point 35).

48      Par ailleurs, Bitburger Brauerei estime que la jurisprudence du Tribunal permet de considérer que, dans le cas d’une combinaison de deux mots, il y a un risque de confusion avec une marque antérieure composée d’un seul mot lorsque l’un des composants de la combinaison de mots et la marque antérieure verbale sont identiques ou similaires. Au soutien de cette affirmation, elle invoque l’arrêt du Tribunal du 25 novembre 2003, Oriental Kitchen/OHMI – Mou Dybfrost (KIAP MOU) (T‑286/02, Rec. p. II‑4953, point 39).

49      En l’espèce, Bitburger Brauerei soutient que l’élément dominant des marques figuratives demandées est constitué du terme « bud ». En particulier, s’agissant de la marque figurative demandée n° 1, qui inclut les termes « american » et « bud », Bitburger Brauerei souligne que le terme « american » serait une simple indication de l’origine géographique et serait donc descriptif. Le terme « bud » serait dès lors plus à même de retenir l’attention du public ciblé. S’agissant de la marque figurative demandée n° 2, qui inclut les termes « anheuser-busch » et « bud », Bitburger Brauerei indique que le terme « bud » serait mis en avant au niveau graphique par son positionnement central et par le fait qu’il est entouré de deux flèches (à droite et à gauche). De plus, le terme « bud » s’imposerait au consommateur comme étant le plus simple à prononcer et à mémoriser.

50      Partant de la conclusion selon laquelle l’élément verbal « bud » est l’élément dominant des marques figuratives demandées (affaires T‑351/04 et T‑352/04) et dans la mesure où, par ailleurs, la marque verbale demandée BUD (affaire T‑350/04) est exclusivement composée du mot « bud », Bitburger Brauerei avance des arguments identiques dans les trois affaires et conteste la conclusion des décisions attaquées selon laquelle il n’existerait pas, en l’espèce, de risque de confusion avec les marques antérieures BIT.

51      À cet égard, la chambre de recours, en considérant, d’un point de vue phonétique, que les différences entre « bud » et « bit » étaient suffisantes compte tenu des voyelles « u » et « i », aurait procédé, à tort, à une analyse fragmentée des lettres prises individuellement au lieu d’examiner la prononciation du mot dans son ensemble. Bitburger Brauerei renvoie à cet égard à l’arrêt MYSTERY, point 43 supra (point 46). En l’espèce, les éléments communs aux deux signes seraient quantitativement majoritaires : chaque signe serait composé d’un mot monosyllabique de trois lettres ; l’intonation et le rythme phonétique seraient identiques ; les deux marques commenceraient par la lettre « b », et leur son final se prononcerait de la même façon. Dans ces conditions, il serait incompréhensible que la chambre de recours ait pu conclure, au point 51 des décisions attaquées, qu’il existait des « différences considérables » entre les signes à comparer.

52      Bitburger Brauerei insiste sur le fait que, en allemand, la consonne « d » se prononce comme la consonne « t » lorsqu’elle est placée en fin de mot. Dès lors, la seule différence résiderait dans les voyelles « u » et « i » des signes en cause. Bitburger Brauerei, rappelant qu’il convient de tenir compte de l’impression phonétique globale des signes, souligne que « bit » et « bud » ont une intonation courte et seront prononcés respectivement « bitt » et « butt ». Dans la mesure où les voyelles « i » et « u » seraient entourées par les sons plosifs dominants « b » et « t », Bitburger Brauerei considère que l’impression phonétique globale des signes est déterminée par les consonnes.

53      Dans ces conditions, les éléments communs aux deux signes seraient dominants et le consommateur, qui gardera un souvenir imparfait d’une des deux marques, confondrait les marques en cause compte tenu du fait qu’elles sont monosyllabiques, qu’elles ont le même nombre de lettres et que les sons initiaux et finaux sont identiques. Bitburger Brauerei ajoute que les marques monosyllabiques sont rares dans le secteur de la bière. Dès lors, le consommateur confronté à une marque monosyllabique devrait se souvenir des marques antérieures en cause particulièrement lorsque les marques à comparer coïncident presque intégralement.

54      Enfin, après avoir concentré son argumentation sur la similitude phonétique des signes en cause, Bitburger Brauerei indique que, sur le plan visuel, les éléments graphiques et les éléments verbaux secondaires (en l’occurrence « american » et « anheuser-busch » pour les marques figuratives demandées) n’ont aucune importance au moment d’apprécier le risque de confusion sur le plan visuel. Dans ces conditions, pour les trois marques demandées à l’enregistrement, Bitburger Brauerei soutient que la comparaison visuelle devrait être faite entre les signes « bit » et « bud » qui présenteraient, à tout le moins, une lointaine ressemblance typographique. Les deux signes ont la même initiale « b » et sont constitués de trois lettres. Les lettres « i » et « u » seraient caractérisées par des lignes ascendantes et les lettres « t » et « d » comprendraient un élément de base vertical et une barre horizontale. Il y aurait dès lors, au moins, une lointaine similitude visuelle entre les signes en cause qui serait également suffisante pour caractériser un risque de confusion au regard de l’interdépendance des facteurs en cause.

 Sur le risque de confusion

55      Bitburger Brauerei estime, sur le fondement de l’arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer (C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 28), que la similitude phonétique des signes en cause serait suffisante pour produire un risque de confusion. Elle serait particulièrement importante en l’espèce dans la mesure où les bières, spécialement dans les bars, sont commandées oralement. Bitburger Brauerei renvoie à cet égard à l’arrêt MYSTERY, point 43 supra (point 48), qui a précisé ce qui suit : « [I]l suffit qu’il existe un risque de confusion et non que la confusion soit établie. Dans la mesure où les produits en cause sont aussi consommés sur commande orale, la seule similitude phonétique des signes en cause suffit pour créer un risque de confusion. » Bitburger Brauerei souligne également qu’un facteur de bruit existe dans les bars et que ce facteur affecte la perception phonétique des signes en cause. La chambre de recours n’aurait pas attaché suffisamment d’importance aux conditions spécifiques dans lesquelles les produits en question sont vendus.

56      Sur ce fondement, Bitburger Brauerei considère qu’un risque de confusion existe du seul fait de la similitude des signes en cause résultant des éléments communs qu’ils présentent sur le plan phonétique. Si, de plus, comme en l’espèce, les marques antérieures ont un caractère distinctif supérieur à la moyenne et que les produits en cause sont identiques, Bitburger Brauerei, se référant à l’arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 55 supra (point 21), et aux arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Institut für Lernsysteme/OHMI – Educational Services (ELS) (T‑388/00, Rec. p. II‑4301, point 77), et du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN) (T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 59), estime que les marques antérieures jouissent d’une protection étendue. En particulier, Bitburger Brauerei souligne que la Cour a considéré qu’un caractère distinctif élevé de la marque antérieure plaide pour – et non contre – un risque de confusion.

57      Par ailleurs, Bitburger Brauerei met en avant le fait que la conclusion de la chambre de recours est en contradiction avec l’arrêt du Bundesgerichtshof (Cour suprême fédérale allemande) du 26 avril 2001, Bit/Bud (I ZR 212/98, p. 465 à 470, ci-après l’« arrêt du Bundesgerichtshof »). En particulier, Bitburger Brauerei indique que le Bundesgerichtshof a considéré qu’il existait un risque de confusion phonétique entre les mots « bit » et « bud », dans la mesure où les sons initiaux étaient identiques et que les sons finaux coïncidaient dans la prononciation usuelle de l’allemand. La différence sonore liée à la voyelle des deux mots serait, par ailleurs, compensée par le caractère distinctif supérieur à la moyenne que revêt la marque antérieure et par le fait que les produits couverts sont identiques.

58      Bitburger Brauerei reconnaît que les décisions nationales de justice n’ont pas de force obligatoire dans le cadre des présentes procédures. Toutefois, l’appréciation faite par le Bundesgerichtshof du risque de confusion entre BIT et BUD reposerait précisément sur les règles dégagées par la Cour, en particulier celles relatives à la prise en compte de l’ensemble des circonstances d’une affaire et de l’interdépendance des différents facteurs en cause. Bitburger Brauerei ajoute que la deuxième chambre de recours de l’OHMI a tenu compte, dans une autre affaire, d’un arrêt rendu par une juridiction nationale (décision du 11 septembre 2003, Kabel 1/ARD 1, R 70/2002‑2).

b)     Arguments de l’OHMI et d’Anheuser-Busch

59      L’OHMI et Anheuser-Busch contestent les arguments avancés par Bitburger Brauerei et considèrent, en substance, que la différence visuelle et phonétique ainsi que l’absence de similitude conceptuelle entre les signes en cause sont suffisants pour écarter tout risque de confusion, et ce malgré l’identité ou la similitude des produits en cause.

60      Anheuser-Busch s’oppose, par ailleurs, à la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT) auraient un caractère distinctif élevé. Anheuser-Busch soutient, en particulier, que les documents produits devant les instances de l’OHMI font référence à la marque Bitburger et non pas à la marque BIT. Anheuser-Busch conteste également la pertinence, d’une part, de la déclaration légale d’un des employés de Bitburger Brauerei et, d’autre part, de l’étude de marché réalisée en juillet 1996 pour démontrer la renommée de la marque BIT en Allemagne.

61      Anheuser-Busch insiste, également, sur les caractéristiques du marché allemand de la bière et, en particulier, sur la très forte consommation de ce produit. Anheuser-Busch en déduit que le consommateur moyen allemand de bière est un « expert ».

62      Enfin, l’OHMI souligne que les décisions attaquées s’écartent de l’arrêt du Bundesgerichtshof pour ce qui est de l’appréciation globale du risque de confusion. Anheuser-Busch considère, pour sa part, que les décisions des juridictions nationales ne lient pas l’OHMI ou le Tribunal dans le cadre de l’application du règlement n° 40/94.

c)     Appréciation du Tribunal

63      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, « en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure ».

64      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

65      Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 31 à 33, et la jurisprudence citée].

66      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important [arrêt du Tribunal du 21 avril 2005, Ampafrance/OHMI – Johnson & Johnson (monBeBé), T‑164/03, Rec. p. II‑1401, point 70, et, par analogie, arrêt de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 24]. Les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent, alors, d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (arrêt monBeBé, précité, point 70, et, par analogie, arrêts Canon, point 44 supra, point 18, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 55 supra, point 20).

67      Étant donné que les marques antérieures ont été enregistrées avec effet en Allemagne, le public à prendre en considération aux fins de l’appréciation du risque de confusion est celui de cet État membre.

68      Il convient de souligner également que les produits en cause font normalement l’objet d’une distribution généralisée, allant du rayon alimentation d’un grand magasin aux bars et aux cafés [voir, en ce sens, pour des classes de produits incluant la bière, arrêt du Tribunal du 9 mars 2005, Osotspa/OHMI − Distribution & Marketing (Hai), T‑33/03, non encore publié au Recueil, point 44]. Dans ces conditions, le public ciblé est constitué par le consommateur moyen, qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif [voir, dans une affaire qui concernait également la bière, arrêt MYSTERY, point 43 supra, points 32 et 37, et, dans une affaire qui concernait des boissons alcooliques, arrêt du Tribunal du 15 février 2005, Lidl Stiftung/OHMI − REWE-Zentral (LINDENHOF), T‑296/02, Rec. p. II‑563, point 45].

69      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a pu considérer, en l’espèce, que « le consommateur pertinent des produits concernés est le consommateur moyen allemand » (point 40 de la décision attaquée dans l’affaire T‑352/04 et point 41 des décisions attaquées dans les affaires T‑350/04 et T‑351/04). Pour les mêmes raisons, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle le public pertinent en cause ne serait pas constitué « d’experts » ne peut être qu’approuvée (mêmes points des décisions attaquées).

70      Il y a lieu de rappeler également que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image non parfaite qu’il en a gardée en mémoire (arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 55 supra, point 26).

71      À la lumière des considérations qui précèdent, il convient de vérifier si, comme le soutient Bitburger Brauerei, la chambre de recours a commis une erreur en appréciant le risque de confusion en l’espèce.

 i) Sur la similitude des produits en cause

72      Il y a lieu de rappeler que Bitburger Brauerei a intenté une action devant la chambre de recours contre chacune des décisions de la division d’opposition, uniquement dans la mesure où l’opposition avait été rejetée pour les produits compris dans la classe 32. Ce sont ces mêmes produits qui sont concernés par les présentes affaires.

73      À cet égard, les décisions attaquées retiennent, à juste titre, que « [l]es produits en cause sont identiques ou similaires » (point 40 des décisions attaquées dans les affaires T‑350/04 et T‑351/04 et point 39 de la décision attaquée dans l’affaire T‑352/04). Cette appréciation de la chambre de recours n’est pas contestée par les parties.

 ii) Sur la similitude des marques en cause

74      Il ressort de la jurisprudence que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, en particulier, de leurs éléments distinctifs et dominants (arrêts SABEL, point 66 supra, point 23, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 55 supra, point 25).

 Sur la similitude visuelle des marques en cause

Sur la similitude visuelle entre la marque verbale demandée BUD et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT)

75      La chambre de recours, suivant le raisonnement de la division d’opposition et d’Anheuser-Busch a exposé les considérations suivantes :

« Les deux marques présentent en effet une longueur identique, mais les différences qui les opposent sont plus importantes que leurs similitudes. Les deux marques débutent effectivement par la même lettre, mais diffèrent néanmoins pour le reste. Le consommateur percevra cette différence visuelle. » (Point 42 de la décision attaquée dans l’affaire T‑350/04.)

76      Premièrement, il convient de souligner, comme le relève à juste titre la chambre de recours, que les éléments « bud » et « bit » ont en commun la même lettre initiale, à savoir la lettre « b ».

77      Deuxièmement, comme le relève également à juste titre la chambre de recours, les termes monosyllabiques « bit » et « bud » présentent une longueur identique du fait qu’ils sont composés de trois lettres. Certes, une analyse plus précise permettrait de considérer, comme l’avance Anheuser-Busch, que le signe BUD est en réalité plus long que le signe BIT. Toutefois, une telle différence ne sera pas perceptible par le consommateur moyen allemand.

78      Troisièmement, il est exact, comme la chambre de recours l’indique en substance, que les signes en cause diffèrent dans leurs deux dernières lettres (à savoir « ud » pour la marque verbale demandée BUD et « it » pour les marques allemandes antérieures), même si, comme le soutient Bitburger Brauerei, les lettres en cause ont pour point commun d’être composées, en partie, de barres verticales.

79      Tenant compte de l’ensemble de ces éléments, il convient de considérer que les signes en cause présentent des différences notables tenant en particulier au fait que deux des trois lettres qui les composent sont distinctes. Comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours, ces différences sont plus importantes que les similitudes des signes en cause. Le consommateur pertinent percevra ces différences. Dès lors, il y a lieu de conclure que la marque verbale demandée BUD et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT) présentent un degré de similitude visuelle qui peut être qualifié, tout au plus, de faible. Bitburger Brauerei relève d’ailleurs elle-même, dans ses requêtes, que la similitude visuelle des marques en cause est « lointaine ».

80      Il y a lieu d’ajouter, s’agissant de la marque verbale et figurative allemande antérieure n° 505 912, qui présente un graphisme permettant de réduire encore plus le degré de similitude visuelle avec la marque verbale BUD, que, comme l’a relevé la chambre de recours, cette marque a été utilisée sous des formes différentes par Bitburger Brauerei, dont l’une sans graphisme particulier.

Sur la similitude visuelle entre les marques figuratives demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT)

81      La chambre de recours a émis les considérations suivantes :

« La marque demandée représente une étiquette complexe qui ne peut être réduite au seul mot ‘bud’. Même si ‘bud’ constitue un élément distinctif de la marque, il ne prédomine pas visuellement dans la marque au point que les autres éléments qui la constituent, à savoir la représentation graphique détaillée dans la partie supérieure de la marque ainsi que la composition de couleurs intéressante, en viendraient à être totalement relégués au second plan. Le consommateur perçoit la marque dans sa globalité et en retire une impression générale. Même si l’on réduisait la marque aux éléments verbaux [American Bud ou Anheuser-Busch Bud], il n’en existerait pas moins une différence visuelle importante entre cette combinaison verbale et la marque brève de l’opposante [BIT]. » (Point 42 de la décision attaquée dans l’affaire T‑351/04 et point 41 de la décision attaquée dans l’affaire T‑352/04.)

82      Il convient de relever, tout d’abord, que, si le consommateur moyen perçoit normalement la marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, l’appréciation globale du risque de confusion tient compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants des marques en cause (arrêt SABEL, point 66 supra, point 23) et de ce que, en général, ce sont les caractéristiques dominantes et distinctives d’un signe qui sont plus facilement mémorisées [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI − Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, Rec. p. II‑4359, points 47 et 48, et du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, non encore publié au Recueil, point 39].

83      En l’espèce, il y a lieu de constater que les éléments verbaux « american » et « bud » (marque figurative demandée n° 1) ou « anheuser-busch » et « bud » (marque figurative demandée n° 2) sont situés au centre des marques figuratives demandées. Ils sont, de surcroît, écrits en caractères de grande taille, de couleur bleue sur fond blanc, ce qui fait ressortir visuellement ces termes, et cela d’autant plus que l’arrière plan de la marque demandée est de couleur rouge.

84      Les autres éléments verbaux qui apparaissent sur fond blanc, notamment le nom et l’adresse d’Anheuser-Busch, sont situés en dessous des termes « american » et « bud » (marque figurative demandée n° 1) ou « anheuser-busch » et « bud » (marque figurative demandée n° 2) et sont écrits en caractères beaucoup plus petits. Il en va de même des éléments verbaux qui apparaissent dans la partie supérieure de la marque figurative, en particulier les lettres « ab » qui sont, de surcroît, placées au centre d’un écusson. Le mot « genuine », quant à lui, apparaît deux fois, de chaque côté du rectangle blanc où sont situés les termes « american » et « bud » (marque figurative demandée n° 1) ou « anheuser-busch » et « bud » (marque figurative demandée n° 2). Ce mot est toutefois orienté verticalement, de sorte que sa lecture n’en est pas facilitée.

85      Quant aux éléments figuratifs qui apparaissent dans la partie supérieure de la marque demandée, ils représentent un écusson rehaussé d’une devise. Ces éléments correspondent à des parties décoratives d’une étiquette et ne seront donc pas considérés comme leur composant principal.

86      Dès lors, il y a lieu de considérer que les éléments dominants des deux marques en cause sont constitués par les éléments verbaux « american » et « bud » (marque figurative demandée n° 1) ou « anheuser-Busch » et « bud » (marque figurative demandée n° 2).

87      Dans ce cadre, à supposer qu’il puisse être conclu que le terme « bud » est le seul élément distinctif parmi les éléments verbaux dominants et attire, ainsi, davantage l’attention du public pertinent, il pourrait être considéré, tout au plus, qu’une faible similitude visuelle existe entre les marques figuratives demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), dès lors qu’une faible similitude visuelle a déjà été constatée au point 79 ci-dessus entre la marque verbale demandée BUD et lesdites marques allemandes antérieures.

88      Toutefois, dans l’appréciation visuelle d’ensemble des signes en cause, il y a lieu de relever la nature assez complexe des marques figuratives demandées, qui sont des signes mixtes, composés non seulement des éléments verbaux précités, mais aussi de plusieurs éléments figuratifs de couleurs très variées (voir, dans le même sens, arrêt Fifties, point 82 supra, point 38).

89      Tenant compte de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que les marques figuratives demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT) ne sont pas visuellement similaires.

 Sur la similitude phonétique des marques en cause

Sur la similitude phonétique entre la marque verbale demandée BUD et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT)

90      La chambre de recours a considéré, aux points 43 et 44 de la décision attaquée relative à la marque verbale demandée BUD :

« 43. En ce qui concerne la comparaison phonétique entre les marques, la chambre estime qu’il existe une distance suffisante entre la marque demandée BUD et la marque de l’opposante BIT. Sur le plan phonétique, les voyelles ‘i’ et ‘u’ se distinguent nettement l’une de l’autre. La différence que représente cette lettre dans les termes ‘bud’ et ‘bit’, tous deux composés de trois lettres, suffit pour permettre au consommateur d’établir une distinction.

44. Aucune autre conclusion ne découle de l’arrêt du Tribunal [ELS, point 56 supra]. En l’espèce, le Tribunal de première instance a constaté que ‘e’ et ‘i’ ont une prononciation similaire et qu’il existe une coïncidence totale entre les phonèmes consonnes ‘l’ et ‘s’ des signes (voir point 71). Par contre, les voyelles ‘i’ et ‘u’ (ou ‘a’ dans le cas d’une prononciation anglaise) ne se prononcent pas de la même façon. Il n’y a de surcroît pas de coïncidence totale entre les consonnes. Les différences sont suffisantes lorsque l’on commande les produits en cause dans des lieux de restauration. »

91      Premièrement, il convient de relever que la lettre initiale des signes en cause est identique et que sa prononciation ne diffèrera pas en langue allemande.

92      Deuxièmement, les lettres « i » (dans le signe BIT) et « u » (dans le signe BUD) se prononcent de façon différente en allemand. Cette différence de prononciation n’est pas contestée par Bitburger Brauerei.

93      Troisièmement, les lettres « t » (dans le signe BIT) et « d » (dans le signe BUD) se rapprochent, en l’espèce, dans leur prononciation, même si cette prononciation peut ne pas être strictement identique. Des éléments de preuve ont été fournis à cet égard durant la procédure devant les instances de l’OHMI.

94      Quatrièmement, il convient de souligner que le raisonnement de la chambre de recours ne repose pas sur le simple fait que les lettres « i » et « u » se prononcent de façon différente. La chambre de recours a en effet tenu compte, à juste titre, du fait que les termes « bit » et « bud » étaient « tous deux composés de trois lettres » (point 43 des décisions attaquées). À cet égard, contrairement à l’assertion de Bitburger Brauerei, rien ne permet de considérer que les lettres « i » et « u », qui sont les seules voyelles des signes en cause, tiendraient une place négligeable lors de la prononciation globale des termes « bit » et « bud ».

95      Replacés dans le cadre d’une prononciation globale, les éléments qui précèdent conduisent à constater un degré limité de similitude phonétique entre la marque verbale demandée BUD et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT). Toutefois, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours, la différence de prononciation entre les voyelles « i » et « u » dans les deux signes en cause, composés de trois lettres, est suffisante pour permettre au consommateur pertinent d’établir une distinction sur le plan phonétique.

Sur la similitude phonétique entre les marques figuratives demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT)

96      La chambre de recours a considéré, au point 43 de la décision relative à la marque figurative demandée n° 1 :

« [...] La chambre estime que le consommateur pertinent prononcerait la marque demandée ‘american bud’, ce qui instaure une distance suffisante par rapport à la marque à une syllabe de l’opposante, à savoir ‘BIT’. Cependant, même en admettant que la marque demandée soit réduite au mot ‘bud’, les deux marques conserveraient une distance suffisante entre elles. En effet, sur le plan phonétique, les voyelles ‘i’ et ‘u’ se distinguent nettement l’une de l’autre. La différence que représente cette lettre dans les termes ‘bud’ et ‘bit’, tous deux composés de trois lettres, suffit pour permettre au consommateur d’établir une distinction. »

97      La chambre de recours a considéré, aux points 42 et 43 de la décision relative à la marque figurative demandée n° 2 :

« 42. [...] La chambre estime que le consommateur pertinent prononcerait la marque demandée ‘anheuser busch bud’, ce qui instaure une distance suffisante par rapport à la marque brève de l’opposante, à savoir BIT. La chambre estime qu’il n’existe pas de raison pour laquelle le consommateur moyen abrègerait à l’oral l’appellation ‘anheuser busch bud’ en n’employant que le dernier mot de celle-ci, à savoir ‘bud’. En outre, il n’y a pas de raison pour laquelle le consommateur, même s’il prenait les mots ‘anheuser’ et ‘bush’ pour des noms de famille, négligerait de les prononcer. En effet, les noms de famille sont sans nul doute à même de jouer le rôle de parties d’une marque.

43. Cependant, même en admettant que la marque demandée soit réduite au mot ‘bud’, les deux marques conserveraient une distance suffisante entre elles. En effet, sur le plan phonétique, les voyelles ‘i’ et ‘u’ se distinguent nettement l’une de l’autre. La différence que représente cette lettre dans les termes ‘bud’ et ‘bit’, tous deux composés de trois lettres, suffit pour permettre au consommateur d’établir une distinction. »

98      Par ailleurs, au point 44 des deux décisions attaquées relatives aux marques figuratives demandées, la chambre de recours a ajouté, comme dans le cadre de la décision relative à la marque verbale demandée BUD :

« Aucune autre conclusion ne découle de l’arrêt du Tribunal [ELS, point 56 supra]. En l’espèce, le Tribunal de première instance a constaté que ‘e’ et ‘i’ ont une prononciation similaire et qu’il existe une coïncidence totale entre les phonèmes consonnes ‘l’ et ‘s’ des signes (voir point 71). Par contre, les voyelles ‘i’ et ‘u’ [...] ne se prononcent pas de la même façon. Il n’y a de surcroît pas de coïncidence totale entre les consonnes. Les différences sont suffisantes lorsque l’on commande les produits en cause dans des lieux de restauration. »

99      À titre liminaire, il y a lieu de souligner qu’une marque figurative, en ce qu’elle est composée d’un ou de plusieurs éléments verbaux, est susceptible d’être reproduite phonétiquement [arrêt du Tribunal du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, non encore publié au Recueil, point 49].

100    En l’espèce, à supposer qu’il puisse être conclu que le terme « bud » est le seul élément distinctif parmi les éléments verbaux dominants « american » et « bud », ou « anheuser-busch » et « bud », des marques figuratives demandées, en attirant dès lors davantage l’attention du public pertinent, il pourrait être considéré, tout au plus, compte tenu de la conclusion reprise au point 95 ci-dessus relative à la similitude phonétique entre la marque verbale demandée BUD et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), qu’il existe une similitude phonétique limitée entre les marques figuratives demandées et lesdites marques antérieures. Toutefois, comme cela a été relevé également au point 95 ci-dessus, la différence de prononciation entre les voyelles « i » et « u » dans les deux signes en cause est suffisante pour permettre au consommateur d’établir une distinction sur le plan phonétique.

 Sur la similitude conceptuelle des marques en cause

101    La chambre de recours, au point 45 des décisions attaquées, a considéré qu’il n’y avait pas de similitude conceptuelle entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT).

102    Pour ce qui est des marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), elles sont susceptibles d’avoir plusieurs significations conceptuelles. Anheuser-Busch indique à cet égard que le terme « bit » peut être compris par le public pertinent, soit comme étant une unité utilisée en informatique, soit comme faisant référence à la ville de Bitburg. Ces différentes significations ressortent également de l’étude de marché réalisée à la demande de Bitburger Brauerei et fournie devant les instances de l’OHMI.

103    Pour ce qui est des marques demandées, il convient de souligner tout d’abord que le terme « bud » ne semble pas avoir de signification particulière dans l’esprit du public pertinent. Les parties n’ont apporté aucun élément qui permettrait de contredire cette conclusion.

104    Dès lors, s’agissant de la marque verbale demandée BUD, il y a lieu de considérer qu’elle n’aura pas de signification conceptuelle particulière dans l’esprit du public pertinent.

105    S’agissant des marques figuratives demandées, même si le terme « american » (marque figurative n° 1) pouvait faire penser que les produits en cause ont une origine ou, en tout cas, un caractère américain et les termes « anheuser-busch » (marque figurative n° 2) pouvaient être compris par une partie du public comme faisant référence à l’entreprise qui fabrique les produits en cause, l’association de ces termes avec le terme « bud » n’entraînerait pas de signification conceptuelle particulière. En tout état de cause, aucun élément ne permet de considérer que ces termes, pris ensemble, auraient une signification conceptuelle analogue aux significations conceptuelles envisageables des marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT).

106    Au regard de ces éléments, il y a lieu de considérer que les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT) ne sont pas similaires d’un point de vue conceptuel.

 Conclusion quant à la similitude des marques en cause

107    Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, et en appréciant globalement les marques en cause, il y a lieu de considérer que, compte tenu des différences notables qui séparent les marques en cause, ainsi que l’absence de similitude conceptuelle entre elles :

–        la marque verbale demandée BUD et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), bien que présentant un faible degré de similitude sur les plans visuel et phonétique, sont globalement différentes ;

–        les marques figuratives demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), bien que présentant un faible degré de similitude sur le plan phonétique, sont globalement différentes.

108    Dès lors, il convient de conclure que les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT) ne sont pas similaires.

 iii) Sur le risque de confusion

109    Compte tenu des différences déjà relevées entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), il y a lieu de considérer que, malgré l’existence d’un faible degré de similitude sur les plans visuel et phonétique, il n’existe pas de risque de confusion en l’espèce, et ce nonobstant l’identité ou la similitude des produits en cause, même en présence d’un éventuel caractère distinctif élevé des marques antérieures.

110    Les arguments avancés par Bitburger Brauerei ne sauraient remettre en cause cette conclusion.

111    Premièrement, s’agissant des conditions de vente des produits en cause, et en particulier la question de savoir si ces produits sont commandés essentiellement à l’oral et si un facteur de bruit peut affecter la perception phonétique des consommateurs, il suffit de relever que les arguments avancés par Bitburger Brauerei sont de simples affirmations qui ne reposent sur aucun élément probant qui aurait été fourni, en temps utile, devant les instances de l’OHMI.

112    En outre, Bitburger Brauerei n’a pas fourni la moindre preuve visant à démontrer que ses produits sont généralement vendus d’une manière telle que le public ne perçoit pas visuellement la marque. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, même si les bars et les restaurants sont des filières de vente non négligeables pour les produits de Bitburger Brauerei, il est constant que le consommateur pourra percevoir visuellement les marques en cause dans ces lieux, notamment en examinant la bouteille qui lui sera servie ou par le biais d’autres supports (verres, affiches publicitaires, etc.). De surcroît, et surtout, il n’est pas contesté que les bars et les restaurants ne sont pas les seules filières de vente des produits concernés. En effet, ces produits sont également vendus dans des supermarchés ou d’autres points de vente au détail. Or, force est de constater que, lors des achats qui y sont effectués, les consommateurs pourront percevoir les marques de manière visuelle, les boissons étant présentées sur des rayons [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Simonds Farsons Cisk/OHMI – Spa Monopole (KINJY by SPA), T‑3/04, non encore publié au Recueil, points 57 à 59]. Il s’ensuit que l’argument de Bitburger Brauerei afférant aux conditions de vente des produits concernés doit, en tout état de cause, être écarté.

113    Deuxièmement, pour ce qui est du caractère distinctif élevé des marques antérieures et de la référence faite par Bitburger Brauerei à l’arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 55 supra, il y a lieu de souligner que la Cour a conclu, au point 28 de cet arrêt, que, en fonction du degré de distinctivité des marques antérieures, « [i]l ne saurait être exclu que la seule similitude auditive des marques puisse créer un risque de confusion ». Il ressort de cet arrêt, premièrement, que le cas de figure envisagé par la Cour est une simple possibilité qui doit tenir compte des autres facteurs pertinents du cas d’espèce et, deuxièmement, que la Cour a visé un cas où les marques en cause sont similaires d’un point de vue phonétique. Or, dans les présentes affaires, nonobstant un caractère distinctif éventuellement élevé des marques antérieures, les différences relevées précédemment entre les marques en cause dans le cadre de l’analyse globale du risque de confusion excluent l’existence d’un tel risque entre celles-ci en Allemagne.

114    Troisièmement, quant au fait que la conclusion de la chambre de recours serait en contradiction avec l’arrêt du Bundesgerichtshof, il y a lieu de rappeler, tout d’abord, que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [arrêts du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47, et du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, non encore publié au Recueil, point 46].

115    Par ailleurs, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement n° 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non pas sur la base d’une jurisprudence nationale, même fondée sur des dispositions analogues à celles de ce règlement [arrêts du Tribunal GIORGIO BEVERLY HILLS, point 65 supra, point 53 ; du 4 novembre 2003, Díaz/OHMI – Granjas Castelló (CASTILLO), T‑85/02, Rec. p. II‑4835, point 37, et arrêt a, point 34 supra, point 30].

116    En tout état de cause, il convient de relever que le Bundesgerichtshof a seulement constaté un risque de confusion entre la marque allemande n° 505 912 et une marque figurative identique à la marque figurative demandée n° 1, en se fondant sur la similitude phonétique existant entre les mots « bud » et « bit » desdites marques.

117    Il y a lieu de souligner, en outre, que la chambre de recours a apprécié de manière globale le risque de confusion entre la marque verbale et figurative allemande antérieure n° 505 912 (BIT) et la marque figurative demandée n° 1, et ne s’est pas fondée exclusivement sur leur comparaison phonétique. En effet, cette appréciation globale doit prendre en compte l’ensemble des facteurs pertinents du cas d’espèce et doit se fonder, s’agissant de l’OHMI, sur le seul règlement n° 40/94.

118    Quatrièmement, s’agissant de la référence faite par Bitburger Brauerei, lors de l’audience, à l’arrêt du Tribunal du 23 novembre 2005, Soffass/OHMI – Sodipan (NICKY) (T‑396/04, non encore publié au Recueil), il suffit de relever que le Tribunal, dans cette affaire, n’a pas conclu, contrairement à ce que semble suggérer Bitburger Brauerei, à l’existence d’un risque de confusion entre la marque demandée NICKY et les marques antérieures NOKY. Confirmant en cela la décision de la chambre de recours, qui avait renvoyé l’affaire devant la division d’opposition, le Tribunal a considéré que certains éléments de similitude existaient entre les deux signes précités et qu’une analyse de la similitude des produits en cause aurait dû être menée (voir, notamment, points 38 et 39 de l’arrêt). Le Tribunal a souligné, par ailleurs, que les deux signes en cause avaient en commun la lettre initiale « n » et la terminaison « ky ». Selon le Tribunal, cette terminaison n’étant pas usuelle dans la langue française, elle pouvait être considérée comme l’élément dominant des deux signes qui retient l’attention du consommateur français (point 34 de l’arrêt). Ce cas de figure est différent des présentes affaires.

119    Au vu des éléments qui précèdent, et sans qu’il soit besoin d’examiner les arguments avancés par Anheuser-Busch relatifs à l’importance du caractère distinctif des marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), la première branche du premier moyen soulevé par Bitburger Brauerei doit être rejetée comme non fondée.

2.     Sur la seconde branche du premier moyen, relative au risque de confusion entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !)

a)     Arguments des parties

120    Bitburger Brauerei estime que, compte tenu des considérations de la première branche du premier moyen, relative au risque de confusion entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), il y aurait également une similitude entre les marques demandées et les marques allemandes nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !). Bitburger Brauerei précise à cet égard que le slogan « bitte ein bit ! » est compris par le public comme étant l’abréviation concise d’une commande. Le public serait guidé par le mot « bit », qui dominerait les marques antérieures.

121    L’OHMI estime, au contraire, que les marques allemandes nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !) sont plus éloignées des marques demandées que les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT). Dès lors, s’il n’existe pas de risque de confusion entre ces dernières marques et les marques demandées, il ne pourrait pas non plus y en avoir pour les marques antérieures Bitte ein Bit !

b)     Appréciation du Tribunal

122    Compte tenu de l’appréciation du Tribunal relative au risque de confusion entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), il y a lieu de considérer qu’il n’existe pas, a fortiori, de risque de confusion entre les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !).

123    En effet, les marques allemandes antérieures nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !) comportent des éléments verbaux (« bitte », « ein ») et graphiques (« ! ») supplémentaires ainsi qu’un graphisme particulier par rapport aux marques allemandes verbales antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT). Ainsi, sur le plan visuel, les premières sont encore plus éloignées des marques demandées que les secondes. Par ailleurs, sur le plan phonétique, et à supposer même que les marques allemandes antérieures nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !) puissent être prononcées en faisant référence uniquement au terme « bit », la conclusion du Tribunal ne serait pas différente de celle relative à la première branche du premier moyen. D’un point de vue conceptuel, enfin, les parties n’ont pas apporté d’éléments qui permettent de considérer que les marques en cause présentent un quelconque degré de similitude.

124    Dès lors, appréciées globalement, les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 704 211 et 1 113 784 (Bitte ein Bit !) ne sont pas similaires. Il ne saurait ainsi exister de risque de confusion entre ces marques.

125    Pour ces raisons, la seconde branche du premier moyen soulevé par Bitburger Brauerei doit être rejetée comme étant non fondée.

B –  Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94

1.     Arguments des parties

126    Bitburger Brauerei, rappelant les termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, indique que la chambre de recours a considéré, dans les décisions attaquées, que la différence entre les signes était telle qu’il ne pouvait être question de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures ou d’y porter préjudice.

127    Selon Bitburger Brauerei, la chambre de recours n’a pas tenu compte du degré substantiel de similitude phonétique entre « bit » et « bud ». Il serait certes vrai que, dans les présentes affaires, il y a aussi une identité ou une forte similitude entre les produits en cause. Toutefois, dépassant le texte de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, la Cour aurait considéré que cette disposition s’appliquait également en cas d’identité ou de similitude entre les produits (arrêt de la Cour du 9 janvier 2003, Davidoff, C‑292/00, Rec. p. I‑389).

128    La marque BIT serait une marque renommée en Allemagne, au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94. Cette renommée aurait été prouvée par Bitburger Brauerei durant la procédure devant l’OHMI.

129    La demande d’enregistrement de la marque BUD porterait préjudice au caractère distinctif des marques antérieures, dès l’instant où l’enregistrement d’un signe similaire a été demandé pour des produits identiques et, ainsi, le caractère distinctif de ces marques antérieures s’en trouverait affaibli.

130    L’OHMI soutient que, même si la renommée des marques antérieures a pu être établie, Bitburger Brauerei n’a pas démontré que les signes en cause étaient identiques ou similaires et que les marques demandées tiraient indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures.

131    Par ailleurs, en vertu de l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, l’examen des instances de l’OHMI serait limité aux faits et preuves présentés par les parties. Dès lors, la chambre de recours aurait à bon droit rejeté la demande au titre de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, dès l’instant où Bitburger Brauerei « [n’aurait] pas expliqué pourquoi une telle exploitation ou préjudice devrait se présenter ».

132    Anheuser-Busch indique tout d’abord que l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 exige que les signes en cause soient identiques ou similaires. En l’espèce, et comme il aurait déjà été démontré, les signes en cause ne seraient pas similaires.

133    Ensuite, Anheuser-Busch souligne que la marque antérieure doit être renommée pour profiter de la protection prévue par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94. En l’espèce, Bitburger Brauerei n’aurait pas réussi à démontrer la renommée de la marque BIT.

134    Enfin, Anheuser-Busch considère que les arguments avancés par Bitburger Brauerei ne sont pas suffisants pour démontrer un transfert d’image sur une partie du public pertinent.

2.     Appréciation du Tribunal

135    Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, « [s]ur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans la Communauté et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice ».

136    Cet article repose notamment sur le fait que la marque demandée et la marque antérieure sont identiques ou similaires. Dans la mesure où il a été conclu que les marques demandées et les marques allemandes antérieures nos 505 912 et 39 615 324 (BIT), et nos 704 211 et 1 113 784 (« Bitte ein Bit ! ») n’étaient pas identiques ou similaires, l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 ne saurait fonder l’opposition de Bitburger Brauerei en l’espèce.

137    Il y a dès lors lieu de rejeter le second moyen soulevé par Bitburger Brauerei comme étant non fondé et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

138    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Bitburger Brauerei ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et d’Anheuser‑Busch.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Les recours sont rejetés.

2)      Bitburger Brauerei Th. Simon GmbH est condamnée aux dépens.

Vilaras

Dehousse

Šváby

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 octobre 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Vilaras


* Langue de procédure : l’anglais.