Language of document : ECLI:EU:T:2014:509

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre) (*)

« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire figurative représentant des bandes parallèles sur une chaussure – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑85/13,

K-Swiss, Inc., établie à Westlake Village, Californie (États-Unis), représentée par Mes R. Niebel et K. Tasma, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. Ó. Mondéjar Ortuño, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Künzli SwissSchuh AG, établie à Windisch (Suisse),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 30 octobre 2012 (affaire R 174/2011-2), relative à une procédure de nullité entre Künzli SwissSchuh AG et K-Swiss, Inc.,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. S. Gervasoni (rapporteur) et L. Madise, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 février 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 23 mai 2013,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 20 août 2013,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 8 décembre 2005, la requérante, K-Swiss, Inc., a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Articles de chaussures ».

4        Cette demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 27/2006, du 3 juillet 2006 et la marque a été enregistrée le 22 août 2007 sous le numéro 4771978.

5        Le 24 février 2009, Künzli SwissSchuh AG a présenté une demande en nullité concernant l’ensemble des produits protégés par l’enregistrement de la marque communautaire, sur le fondement de l’article 51, paragraphe 1, sous a), et de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenus article 52, paragraphe 1, sous a), et article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

6        Par décision du 11 janvier 2011, la division d’annulation a, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, lu en combinaison avec l’article 51, paragraphe 1, sous a), du même règlement, fait droit à la demande en nullité. La division d’annulation a, en particulier, relevé que la marque communautaire contestée, qui se présente sous la forme spécifique d’un motif à cinq bandes, ne constituait pas une « base de départ adéquate » pour remplir la fonction consistant à indiquer l’origine commerciale des produits concernés, que les cinq bandes placées sur la chaussure étaient des formes géométriques de base et qu’elles seraient perçues comme un moyen technique de renforcer la chaussure ou comme un simple élément décoratif courant et imprécis. Elle en a déduit que le consommateur ne leur accorderait que très peu d’attention.

7        Le 20 janvier 2011, la requérante a formé un recours contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 30 octobre 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours a confirmé la décision de la division d’annulation.

9        Dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé, en substance, ce qui suit : en premier lieu, les produits désignés par la marque communautaire contestée sont des articles de chaussures destinés à un nombre potentiellement illimité de consommateurs de toutes les tranches d’âge ; il convient donc d’apprécier le caractère distinctif de la marque demandée en tenant compte de l’attente présumée d’un consommateur moyen, issu du grand public de l’Union européenne, normalement informé et raisonnablement attentif (point 18 de la décision attaquée) ; en deuxième lieu, dans la mesure où les consommateurs moyens n’ont pas l’habitude de présumer l’origine commerciale des produits en se fondant sur des signes qui se confondent avec l’aspect de ces mêmes produits, qu’il s’agisse de signes figuratifs, tridimensionnels ou autres, de tels signes ne sont distinctifs que s’ils divergent de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur (points 19 et 20 de la décision attaquée) ; en troisième lieu, la marque communautaire contestée, qui consiste en la reproduction bidimensionnelle de la forme d’une chaussure comportant cinq bandes parallèles, est dépourvue du caractère distinctif minimal requis étant donné que le signe en cause ne comporte aucun élément le différenciant de l’aspect du produit qu’il désigne (point 21 de la décision attaquée) ; en quatrième lieu, le fait que le produit soit représenté à l’aide d’un trait discontinu ne confère pas un caractère distinctif à l’ensemble de la reproduction, étant donné qu’il s’agit d’un détail mineur qui ne fait pas oublier au consommateur que le signe représente une chaussure (point 22 de la décision attaquée) ; en cinquième lieu, les cinq bandes parallèles constituent une forme géométrique de base, qui apparaît sur la chaussure à l’endroit où les consommateurs de chaussures de sport et de loisirs s’attendent à trouver un élément figuratif ; ces cinq bandes insérées dans la forme d’une chaussure sont par suite banales et courantes pour les fabricants de chaussures de sport et de loisirs (point 22 de la décision attaquée).

10      La chambre de recours a ajouté, notamment, que, même si la marque communautaire contestée était considérée comme un motif bidimensionnel consistant en cinq bandes parallèles disposées sur une partie spécifique de la surface des produits désignés, elle ne possèderait pas le degré minimal de caractère distinctif requis, car ce motif ne diverge pas de façon significative des motifs figurant habituellement sur la partie latérale de ce type de produits et sera perçu comme un simple élément décoratif (point 31 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI et, le cas échéant, l’intervenante, aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante invoque un moyen unique, tiré de la méconnaissance de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

14      À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante que le caractère distinctif d’une marque au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (arrêts de la Cour du 29 avril 2004, Procter & Gamble/OHMI, C‑473/01 P et C‑474/01 P, Rec. p. I‑5173, point 32, et du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk, C‑64/02 P, Rec. p. I‑10031, point 42).

15      Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêts de la Cour Procter & Gamble/OHMI, point 14 supra, point 33, et du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑25/05 P, Rec. p. I‑5719, point 25).

16      Or, la perception du public pertinent est susceptible d’être influencée par la nature du signe dont l’enregistrement a été demandé. Ainsi, dans la mesure où les consommateurs moyens n’ont pas l’habitude de présumer l’origine commerciale des produits en se fondant sur des signes qui se confondent avec l’aspect de ces mêmes produits, de tels signes sont distinctifs au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 seulement s’ils divergent, de manière significative, de la norme ou des habitudes du secteur [voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec. p. I‑9165, points 30 et 31 ; du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi‑Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec. p. I‑551, points 28 et 31, et du 4 octobre 2007, Henkel/OHMI, C‑144/06 P, Rec. p. I‑8109, points 36 et 37 ; arrêt du Tribunal du 15 juin 2010, X Technology Swiss/OHMI (Coloration orange de la pointe d'une chaussette), T‑547/08, Rec. p. II‑2409, point 25].

17      L’élément déterminant pour l’applicabilité de la jurisprudence citée au point 16 ci-dessus n’est pas la qualification du signe concerné en tant que signe figuratif, tridimensionnel ou autre, mais le fait qu’il se confonde avec l’aspect du produit désigné. Ainsi, ce critère a été appliqué, outre aux marques tridimensionnelles (arrêts Procter & Gamble/OHMI, point 14 supra ; Mag Instrument/OHMI, et Deutsche SiSi‑Werke/OHMI, point 16 supra), à des marques figuratives consistant en une reproduction bidimensionnelle du produit désigné (arrêts Storck/OHMI, point 15 supra, et Henkel/OHMI, point 16 supra), ou encore à un signe constitué par un motif appliqué à la surface du produit (ordonnance de la Cour du 28 juin 2004, Glaverbel/OHMI, C‑445/02 P, Rec. p. I‑6267). De même, il ressort de la jurisprudence que les couleurs et leurs combinaisons abstraites ne peuvent se voir reconnaître un caractère distinctif intrinsèque que dans des circonstances exceptionnelles, étant donné qu’elles se confondent avec l’aspect des produits désignés et qu’elles ne sont pas, en principe, utilisées comme moyens d’identification d’origine commerciale (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, Rec. p. I‑3793, points 65 et 66, et du 24 juin 2004, Heidelberger Bauchemie, C‑49/02, Rec. p. I‑6129, point 39).

18      Par ailleurs, dans la mesure où la requérante se prévaut du caractère distinctif de la marque demandée, en dépit de l’analyse de la chambre de recours fondée sur l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits de large consommation, c’est à elle qu’il appartient de fournir des indications concrètes et étayées établissant que la marque demandée est dotée d’un caractère distinctif, étant donné qu’elle est beaucoup mieux à même de le faire, au vu de sa connaissance approfondie du marché (voir, en ce sens, arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 16 supra, point 43, et la jurisprudence citée).

19      Dans la décision attaquée, la chambre de recours s’est fondée sur la jurisprudence citée au point 16 ci-dessus, pour conclure que la marque contestée était dépourvue du caractère distinctif minimal requis (points 19, 20, 21 et 31 de la décision attaquée).

20      Dans ces circonstances, il convient de vérifier, au préalable, si c’est à bon droit que la chambre de recours s’est fondée sur la jurisprudence citée au point 16 ci-dessus. À cette fin, il convient d’examiner si la marque contestée se confond avec l’aspect du produit désigné ou si elle en est, au contraire, indépendante.

21      La marque communautaire contestée consiste en la reproduction bidimensionnelle de la forme d’une chaussure comportant cinq bandes parallèles sur sa partie latérale. Elle ne peut donc être dissociée des produits qu’elle désigne, à savoir des chaussures. Partant, il y a lieu de considérer qu’elle se confond avec l’aspect des produits désignés et que, par conséquent, la jurisprudence citée au point 16 ci-dessus est applicable.

22      Cependant, la requérante, au cours de la procédure devant l’OHMI, a affirmé que la marque contestée était en réalité une « marque de position ».

23      Il convient pourtant de relever, d’une part, que la marque communautaire contestée a été présentée par la requérante dans sa demande d’enregistrement comme étant une marque figurative et, d’autre part, que la demande d’enregistrement ne contient aucune description de la marque qui permettrait de conclure que celle-ci inclurait seulement les cinq bandes parallèles et que la représentation de la chaussure ne serait destinée qu’à préciser le positionnement de ces bandes sur le produit.

24      Quoi qu’il en soit, à supposer même que la marque pour laquelle la protection est demandée se limite aux cinq bandes parallèles mentionnées au point 19 ci-dessus, lesquelles devraient être positionnées sur la partie latérale des chaussures, elle se présenterait alors sous la forme d’un motif destiné à être apposé sur une partie des produits désignés et se confondrait ainsi avec l’aspect de ces produits. La jurisprudence citée au point 16 ci-dessus serait donc également applicable.

25      La conclusion à laquelle le Tribunal est parvenu au point 24 ci-dessus n’est pas susceptible d’être remise en cause par les arguments présentés par la requérante à cet égard.

26      Ainsi, la requérante allègue que, dans le secteur des chaussures de sport et de loisirs, les consommateurs auraient l’habitude de présumer l’origine commerciale des produits en se fondant sur des signes simples, composés de lignes ou de bandes apposées sur les produits, en particulier sur la partie latérale de ceux-ci.

27      Pour établir ses dires, la requérante se fonde, en substance, sur des exemples de marques. Il ressort de ces exemples que certaines entreprises du secteur en cause utilisent des formes géométriques, dont certaines sont composées de lignes, de bandes ou d’autres formes géométriques, pour permettre aux consommateurs d’identifier l’origine commerciale des produits.

28      La requérante se fonde également sur le fait que, dans les lieux de vente, les produits en cause seraient placés sur des étagères de telle manière que les consommateurs verraient d’abord leur partie latérale.

29      Elle allègue enfin que l’application de bandes parallèles sur la partie latérale des chaussures est une pratique ancienne, à laquelle elle-même, ainsi qu’une autre entreprise du secteur, ont recours.

30      Il convient ici de rappeler que la chambre de recours a relevé dans la décision attaquée que le fait de placer des éléments décoratifs sur des chaussures était une pratique courante et que de nombreuses variantes de formes géométriques étaient apposées sur la partie latérale des chaussures. Elle a ajouté que les consommateurs ne considéreraient pas ces éléments comme une indication de l’origine des produits, à moins qu’ils ne les aient conservés en mémoire du fait de l’usage intensif qui en avait été fait en tant qu’identificateurs de l’origine commerciale. Enfin, elle a précisé que le fait que certains signes disposés sur la partie latérale des chaussures, qui ne présentaient pas le caractère distinctif intrinsèque requis pour pouvoir être considérés comme des marques, aient acquis une valeur distinctive par l’usage intensif qui en avait été fait sur le marché, ne permettait pas de conclure que les consommateurs avaient appris à établir un lien entre un signe figurant sur la partie latérale d’une chaussure et un fabriquant déterminé (point 33 de la décision attaquée).

31      Or, les éléments présentés par la requérante (voir les points 27 à 29 ci-dessus), à laquelle il appartient de fournir des indications concrètes et étayées établissant que la marque demandée est dotée du caractère distinctif minimal requis, ne suffisent pas pour démontrer que les motifs sur lesquels s’était fondée la chambre de recours pour décider que la marque contestée se confondait avec l’aspect du produit désigné, motifs rappelés au point 30 ci-dessus, seraient erronés.

32      Par ailleurs, la requérante allègue que les chaussures de sport et de loisirs sont généralement perçues comme étant des articles de mode et que, par conséquent, le public sera enclin à prêter une attention particulière aux détails des modèles et des formes de ces produits en ce qu’ils constituent une indication de leur origine commerciale. Cependant, cette allégation n’est nullement établie.

33      Eu égard aux développements qui précèdent, il convient de conclure que c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé qu’elle pouvait faire application en l’espèce de la jurisprudence citée au point 16 ci-dessus.

34      Par suite, il y a lieu d’apprécier si c’est à tort que la chambre de recours a considéré que la marque contestée était dépourvue du caractère distinctif minimal requis (points 21 et 31 de la décision attaquée).

35      La requérante soutient que le nombre de bandes qu’elle a retenu est inhabituel et que, de plus, ce nombre étant limité, il peut aisément être identifié par les consommateurs.

36      Les éléments ainsi avancés ne permettent pas d’établir que la marque contestée divergerait, de manière significative, de la norme ou des habitudes du secteur, et ce que la marque contestée soit regardée comme une marque figurative constituée de la représentation de profil d’une chaussure sur laquelle cinq bandes apparaissent ou qu’elle soit regardée comme se limitant aux cinq bandes parallèles mentionnées précédemment, lesquelles devraient être positionnées sur la partie latérale des chaussures.

37      La requérante se prévaut par ailleurs du fait que, s’agissant de la sous-catégorie des chaussures de travail et des chaussures de ville, laquelle serait, selon elle, également pertinente pour la présente affaire, il ne serait pas habituel d’apposer des motifs sur leur partie latérale.

38      Il y a lieu de constater que l’argument mentionné au point 37 ci-dessus n’est pas pertinent. En effet, la marque contestée, telle qu’elle résulte de la demande d’enregistrement introduite par la requérante, n’est pas un motif destiné à être apposé sur les produits qu’elle désigne, mais une représentation bidimensionnelle de ces produits.

39      À supposer même que la marque contestée soit regardée comme se limitant aux cinq bandes parallèles mentionnées au point 19 ci-dessus, lesquelles devraient être positionnées sur la partie latérale des chaussures, l’argument de la requérante conforte le fait, s’agissant de la sous-catégorie des chaussures de travail et des chaussures de ville, que le public pertinent n’a pas l’habitude de considérer les motifs appliqués à leur surface comme un élément d’identification de leur origine commerciale.

40      Au surplus, si la circonstance qu’un signe composé d’un motif appliqué à la surface d’un produit diverge, de manière significative, de la norme ou des habitudes du secteur en cause, est une condition nécessaire pour conclure à la distinctivité de ce signe (voir la jurisprudence citée aux point 16 et 17 ci-dessus), elle n’en constitue pas une condition suffisante. Il convient également que le signe en cause soit indépendant de l’apparence du produit qu’il désigne afin, notamment, de ne pas être perçu, par le public pertinent, comme un simple élément décoratif.

41      En effet, pour se voir reconnaître un caractère distinctif, un motif appliqué à la surface d’un produit doit pouvoir être appréhendé sans que soient perçues, en même temps, les caractéristiques intrinsèques du produit, de telle sorte que ce motif pourra être facilement et immédiatement mémorisé par le public pertinent en tant que signe distinctif [voir, en ce sens, ordonnance Glaverbel/OHMI, point 17 supra, points 22 à 24 et 33 à 36 ; arrêt du Tribunal du 9 octobre 2002, Glaverbel/OHMI (Surface d’une plaque de verre), T‑36/01, Rec. p. II‑3887, point 28].

42      Or, en l’espèce, la requérante n’établit pas que les cinq bandes parallèles, appliquées sur la surface externe de chaussures de travail ou de ville, pourraient être appréhendées sans que soient perçues, en même temps, les caractéristiques intrinsèques de ces chaussures. Elle n’établit donc pas que ces cinq bandes pourraient être facilement et immédiatement mémorisées par le public pertinent en tant que signe distinctif.

43      Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu que la marque contestée était dépourvue du caractère distinctif minimal requis (points 21 et 31 de la décision attaquée).

44      La conclusion qui précède n’est pas susceptible d’être remise en cause par les autres arguments présentés par la requérante.

45      En premier lieu, la requérante invoque l’enregistrement de marques communautaires, certaines déposées par elle, qui seraient comparables à la marque contestée et dont le caractère distinctif aurait pourtant été reconnu.

46      Selon la jurisprudence, l’OHMI doit, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement d’une marque communautaire, prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens. Cela étant, les principes d’égalité de traitement et de bonne administration doivent se concilier avec le respect de la légalité. Par conséquent, la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. Cet examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec. p. I‑1541, points 74 à 77).

47      En l’espèce, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a procédé à un examen complet et concret de la marque demandée pour refuser son enregistrement. Au surplus, cet examen a conduit la chambre de recours à retenir à juste titre le motif absolu de refus d’enregistrement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 pour s’opposer à l’enregistrement de la marque demandée.

48      L’examen de la marque en cause n’ayant pu aboutir à un résultat différent, les allégations de la requérante relatives à l’absence de prise en considération de l’enregistrement d’autres marques ne sauraient prospérer.

49      En deuxième lieu, la requérante se prévaut de la circonstance selon laquelle l’existence d’enregistrements de la marque contestée dans huit États membres permettrait d’établir le caractère distinctif de celle-ci.

50      À cet égard, il convient de rappeler que les enregistrements existant dans les États membres ne constituent qu’un fait qui peut être pris en considération dans le contexte de l’enregistrement d’une marque communautaire, la marque dont l’enregistrement est demandé devant être appréciée sur le fondement de la réglementation de l’Union pertinente, et qu’il s’ensuit que l’OHMI n’est ni tenu de faire siennes les exigences et l’appréciation des autorités nationales compétentes, ni obligé d’enregistrer la marque en cause en tant que marque communautaire sur la base de telles considérations (arrêt de la Cour du 24 mai 2012, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli/OHMI, C‑98/11 P, non encore publié au Recueil, point 50).

51      En l’espèce, l’existence d’enregistrements en tant que marque dans huit États membres ne permet pas à la requérante d’établir que la chambre de recours aurait conclu, à tort, à l’absence de caractère distinctif de la marque contestée.

52      En troisième lieu, s’agissant de l’argument selon lequel la chambre de recours a ignoré le fait que l’utilisation d’éléments figuratifs n’était pas habituelle pour tous les modèles de chaussures, il doit être considéré que, si la chambre de recours n’a pas fait expressément référence à d’autres modèles de chaussures que les chaussures de sport et de loisirs, elle n’a pas pour autant entendu limiter son appréciation du caractère distinctif de la marque contestée à ces catégories de chaussures.

53      En effet, au point 18 de la décision attaquée, point dans lequel elle a déterminé le public pertinent, la chambre de recours a rappelé que les produits désignés par la marque contestée étaient des « articles de chaussures » destinés à un nombre potentiellement illimité de consommateurs de toutes les tranches d’âge. Certes, la chambre de recours a centré son analyse sur les chaussures de sport ou de loisirs. Toutefois, la requérante avait elle-même centré sa contestation sur ces produits, en indiquant, dans ses écrits produits lors de la procédure devant la chambre de recours, que la division d’annulation avait, selon elle, retenu à juste titre que le marché des chaussures de sport et de loisirs était le marché pertinent à prendre en considération aux fins de l’appréciation du caractère distinctif de la marque contestée.

54      La requérante avait également développé une argumentation relative au secteur des chaussures de sport et de loisirs, par laquelle elle soutenait que les fabricants de chaussures de sport et de loisirs apposaient sur la surface des chaussures des marques qui avaient également une fonction décorative, de sorte que les consommateurs de ce secteur étaient habitués à percevoir des éléments décoratifs comme des indicateurs de l’origine commerciale des produits (point 10 de la décision attaquée).

55      La chambre de recours a répondu sans préciser si, pour d’autres sous-catégories de produits où de telles pratiques n’étaient pas invoquées par la requérante et n’étaient pas non plus notoirement connues, le public percevrait les cinq bandes parallèles appliquées sur la surface du produit comme ayant un caractère distinctif. Compte tenu de la teneur de la contestation de la requérante, prise dans son ensemble, une telle absence de précision explicite sur ce point n’apparaît pas comme révélant une omission de la part de la chambre de recours.

56      Enfin, en quatrième lieu, la requérante soutient que la chambre de recours aurait méconnu les règles de la charge de la preuve qui s’imposaient à elle.

57      Cependant, selon la jurisprudence citée au point 18 ci-dessus, les allégations de la requérante doivent être écartées comme non fondées.

58      Il résulte de tout ce qui précède que l’ensemble des griefs invoqués par la requérante doivent être écartés et que, par suite, le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

59      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      K-Swiss, Inc. est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Gervasoni

Madise

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juin 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.