Language of document : ECLI:EU:C:2010:575

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR

1er octobre 2010 (*)

«Procédure accélérée»

Dans l’affaire C‑411/10,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Court of Appeal (Civil Division) (England & Wales) (Royaume-Uni), par décision du 12 août 2010, parvenue à la Cour le 18 août 2010, dans la procédure

The Queen, à la demande de:

N. S.,

contre

Secretary of State for the Home Department,

en présence de:

Amnesty International Ltd et The AIRE Centre (Advice on Individual Rights in Europe),

United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR),

Equality and Human Rights Commission,

LE PRÉSIDENT DE LA COUR,

vu la proposition de M. A. Rosas, juge rapporteur,

l’avocat général, Mme V. Trstenjak, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil, du 18 février 2003, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers (JO L 50, p. 1), au regard de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, du protocole (n° 30) sur l’application de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne à la Pologne et au Royaume-Uni, ainsi que de diverses conventions internationales.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant N. S., ressortissant afghan ayant présenté une demande d’asile au Royaume-Uni, au Secretary of State for the Home Department, autorité compétente au Royaume-Uni en matière d’asile et d’immigration. Amnesty International Ltd et The AIRE Centre (Advice on Individual Rights in Europe), de même que le United Nations High Commissioner for Refugees ont été autorisés à intervenir dans la procédure devant la Hight Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court). L’Equality and Human Rights Commission a été autorisée à intervenir dans la procédure devant la Court of Appeal (Civil Division) (England & Wales).

3        La juridiction de renvoi se demande, notamment, si un État membre est tenu, en vertu du droit de l’Union, de faire usage de la possibilité, prévue à l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 343/2003, d’examiner une demande d’asile et d’assumer la responsabilité de l’examen d’une telle demande, lorsque le transfert du demandeur vers l’État membre responsable de l’examen de la demande d’asile au sens dudit règlement, en l’espèce la République hellénique, exposerait ledit demandeur à un risque de violation de ses droits fondamentaux. Si tel est le cas, ladite juridiction s’interroge sur les circonstances dans lesquelles il doit être fait usage de cette possibilité.

4        La juridiction de renvoi demande à la Cour de soumettre l’affaire à une procédure accélérée en application de l’article 104 bis, premier alinéa, du règlement de procédure de celle-ci. Elle invoque, notamment, le grand nombre d’affaires pendantes devant les juridictions du Royaume-Uni, celles d’autres États membres et la Cour européenne des droits de l’homme, l’incertitude quant à la licéité des renvois de demandeurs vers la République hellénique et d’autres États membres, l’objectif de célérité du traitement des demandes d’asile mentionné au quatrième considérant du règlement n° 343/2003, un manque de cohérence entre les pratiques des différents États membres, ainsi que le risque de voir des demandeurs d’asile renvoyés en République hellénique alors que la juridiction de renvoi suppose qu’ils ne disposeraient pas, dans cet État membre, d’un accès satisfaisant à la procédure de demande d’asile.

5        Il résulte de l’article 104 bis, premier alinéa, du règlement de procédure ainsi que de l’article 23 bis du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que, à la demande de la juridiction nationale, le président de la Cour peut exceptionnellement, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de soumettre un renvoi préjudiciel à une procédure accélérée dérogeant aux dispositions de ce règlement de procédure, lorsque les circonstances invoquées établissent l’urgence extraordinaire de statuer sur la question posée à titre préjudiciel.

6        En l’espèce, si la juridiction de renvoi a mis en évidence l’importance que revêt l’issue du litige au principal, elle n’a pas pour autant établi l’urgence extraordinaire à statuer sur ce dernier.

7        En effet, il résulte d’une jurisprudence constante que le nombre important de personnes ou de situations juridiques potentiellement concernées par la décision que la juridiction de renvoi devra rendre après avoir saisi la Cour à titre préjudiciel n’est pas susceptible, en tant que tel, de constituer une circonstance exceptionnelle de nature à justifier le recours à une procédure accélérée (voir en ce sens, notamment, ordonnances du président de la Cour du 21 septembre 2006, KÖGAZ e.a., C‑283/06 et C‑312/06, point 9; du 3 juillet 2008, Plantanol, C‑201/08, point 10; du 3 décembre 2008, Football Association Premier League e.a. et Murphy, C‑403/08 et C‑429/08, point 9; du 23 octobre 2009, Lesoochranárske zoskupenie, C‑240/09, point 11, ainsi que du 16 mars 2010, Affatato, C-3/10, point 14).

8        Par ailleurs, il n’apparaît pas que la juridiction de renvoi soit tenue de statuer dans un délai déterminé ni que la demande d’asile présentée par N. S. le 12 janvier 2009 et le recours juridictionnel que celui-ci a été autorisé à former le 14 octobre 2009 aient fait l’objet d’un traitement urgent.

9        Il convient, en outre, de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour que le seul intérêt des justiciables, certes légitime, à déterminer le plus rapidement possible la portée des droits qu’ils tirent du droit de l’Union n’est pas de nature à établir l’existence d’une urgence extraordinaire au sens de l’article 104 bis, premier alinéa, du règlement de procédure (voir, en ce sens, ordonnances du président de la Cour du 7 mai 2004, Alliance for Natural Health e.a., C‑154/04 et C‑155/04, point 8; du 24 septembre 2004, IATA et ELFAA, C‑344/04, point 9; du 3 avril 2007, Jipa, C‑33/07, point 6, ainsi que du 16 mars 2010, Affatato, précitée, point 13).

10      Enfin, il n’apparaît pas que, pendant la durée de la procédure de renvoi préjudiciel, le requérant doive faire l’objet d’une mesure de détention ou d’une décision d’éloignement du territoire.

11      Dans ces conditions, la demande de la Court of Appeal (Civil Division) (England & Wales) tendant à ce que la présente affaire soit soumise à une procédure accélérée ne saurait être accueillie.

Par ces motifs, le président de la Cour ordonne:

La demande de la Court of Appeal (Civil Division) (England & Wales) (Royaume-Uni) tendant à ce que l’affaire C‑411/10 soit soumise à la procédure accélérée prévue à l’article 104 bis, premier alinéa, du règlement de procédure de la Cour est rejetée.

Signatures


* Langue de procédure: l’anglais.