Language of document : ECLI:EU:T:2013:49

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

31 janvier 2013 (*)

« Fonds de cohésion – Réduction du concours financier initialement octroyé par le Fonds à cinq projets concernant la mise en place de certaines lignes du réseau ferroviaire à grande vitesse en Espagne – Délai d’adoption d’une décision – Article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement (CE) n° 1164/94 – Article 18, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1386/2002 – Livraisons complémentaires – Travaux ou services complémentaires – Notion de ‘circonstance imprévue’ – Article 20, paragraphe 2, sous e) et f), de la directive 93/38/CEE »

Dans l’affaire T‑235/11,

Royaume d’Espagne, représenté initialement par M. M. Muñoz Pérez et par Mme N. Díaz Abad, puis par Mme Díaz Abad et M. A. Rubio González, abogados del Estado,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes E. Adserá Ribera et D. Recchia, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, à titre principal, une demande d’annulation de la décision C (2011) 1023 final de la Commission, du 18 février 2011, portant réduction de l’aide du Fonds de cohésion aux stades de projet intitulés « Fourniture et installation d’équipement ferroviaire sur la ligne à grande vitesse Madrid-Saragosse-Barcelone-Frontière française. Tronçon Madrid-Lérida » (CCI 1999.ES.16.C.PT.001), « Ligne ferroviaire à grande vitesse Madrid-Barcelone. Tronçon Lérida‑Martorell (plate-forme, 1re phase) » (CCI 2000.ES.16.C.PT.001), « Ligne à grande vitesse Madrid-Saragosse-Barcelone-Frontière française. Accès ferroviaires à la nouvelle gare de Saragosse » (CCI 2000.ES.16.C.PT.003), « Ligne à grande vitesse Madrid-Barcelone-Frontière française. Tronçon Lérida-Martorell. Sous-tronçon X-A (Olérdola‑Avinyonet del Penedés) » (CCI 2001.ES.16.C.PT.007), « Nouvel accès ferroviaire de la ligne à grande vitesse à Levante. Sous‑tronçon La Gineta-Albacete (plate-forme) » (CCI 2004.ES.16.C.PT.014) et, à titre subsidiaire, une demande d’annulation partielle de la même décision en ce qui concerne les corrections apportées par la Commission,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot, président, Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur) et M. A. Popescu, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 mai 2012,

rend le présent

Arrêt

 Réglementation de l’Union européenne

1        Le règlement (CE) n° 1164/94 du Conseil, du 16 mai 1994, instituant le Fonds de cohésion (JO L 130, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1264/1999 du Conseil, du 21 juin 1999 (JO L 161, p. 57), par le règlement (CE) n° 1265/1999 du Conseil, du 21 juin 1999 (JO L 161, p. 62), et par l’Acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO 2003, L 236 p. 33), dispose, en son article 2, paragraphe 1, ce qui suit :

« Le Fonds fournit une contribution financière à des projets qui contribuent à la réalisation des objectifs fixés par le traité sur l’Union européenne, dans le domaine de l’environnement et dans celui des réseaux transeuropéens d’infrastructures de transport dans les États membres dont le produit national brut par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne communautaire, mesurée sur la base des parités du pouvoir d’achat, et qui ont mis en place un programme visant à satisfaire aux conditions de convergence économique visées à l’article [126 TFUE]. »

2        L’article H (« Corrections financières ») de l’annexe II (« Dispositions de mise en application ») du règlement n° 1164/94 prévoit :

« 1. Si, après avoir effectué les vérifications nécessaires, la Commission conclut :

a)      que la mise en œuvre d’un projet ne justifie ni une partie ni la totalité du concours octroyé, y compris en cas de non‑respect d’une des conditions fixées dans la décision d’octroi du concours, et notamment de modification importante affectant la nature ou les conditions de mise en œuvre du projet pour laquelle l’approbation de la Commission n’a pas été demandée ou

b)      qu’il existe une irrégularité en ce qui concerne le concours du Fonds et que l’État membre concerné n’a pas pris les mesures correctives nécessaires,

la Commission suspend le concours alloué au projet concerné et demande, en indiquant ses motifs, que l’État membre présente ses observations dans un délai déterminé.

Si l’État membre conteste les observations formulées par la Commission, l’État membre est invité à une audition par la Commission, au cours de laquelle les deux parties s’efforcent de parvenir à un accord sur les observations et les conclusions qu’il convient d’en tirer.

2. À l’expiration d’un délai fixé par la Commission, dans le respect de la procédure applicable, en l’absence d’accord [dans un délai de trois mois] et compte tenu des observations éventuelles de l’État membre, la Commission décide […] :

[…]

b)      de procéder aux corrections financières requises, c’est-à-dire supprimer totalement ou partiellement le concours octroyé au projet.

Ces décisions doivent respecter le principe de proportionnalité. La Commission, en établissant le montant de la correction, tient compte de la nature de l’irrégularité ou de la modification et de l’étendue de l’impact financier potentiel des défaillances éventuelles des systèmes de gestion ou de contrôle. Toute réduction ou suppression de concours donne lieu à répétition de l’indu.

[…]

4. La Commission arrête les modalités détaillées de mise en œuvre des paragraphes 1, 2 et 3 […] »

3        L’article 18, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1386/2002 de la Commission, du 29 juillet 2002, fixant les modalités d’application du règlement n° 1164/94 en ce qui concerne les systèmes de gestion et de contrôle et la procédure de mise en œuvre des corrections financières relatifs au concours du Fonds de cohésion (JO L 201, p. 5), est libellé comme suit :

« Chaque fois que l’État membre conteste les observations de la Commission et qu’une audition a lieu en application de l’article H, paragraphe 1, deuxième alinéa, de l’annexe II du règlement […] n° 1164/94, le délai de trois mois au cours duquel la Commission peut prendre une décision au titre de l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II dudit règlement commence à courir à partir de la date de l’audition. »

4        La directive 93/38/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des télécommunications (JO L 199, p. 84), définit, en son article 1er, point 7, les « procédures ouvertes, restreintes ou négociées » comme suit :

« […] les procédures de passation appliquées par les entités adjudicatrices et dans lesquelles :

a)      en ce qui concerne les procédures ouvertes, tout fournisseur, tout entrepreneur ou tout prestataire de services intéressé peut soumissionner ;

b)      en ce qui concerne les procédures restreintes, seuls les candidats invités par l’entité adjudicatrice peuvent soumissionner ;

c)      en ce qui concerne les procédures négociées, l’entité adjudicatrice consulte les fournisseurs, les entrepreneurs ou les prestataires de services de son choix et négocie les conditions du marché avec un ou plusieurs d’entre eux. »

5        Selon l’article 4, paragraphe 1, de la directive 93/38, « [p]our passer leurs marchés de fournitures, de travaux et de services ou organiser leurs concours, les entités adjudicatrices appliquent les procédures qui sont adaptées aux dispositions de la présente directive ». Le paragraphe 2 de cette disposition énonce que « [l]es entités adjudicatrices veillent à ce qu’il n’y ait pas de discrimination entre fournisseurs, entrepreneurs ou prestataires de services ».

6        L’article 20, paragraphes 1 et 2, de la directive 93/38 prévoit :

« 1. Les entités adjudicatrices peuvent choisir l’une des procédures définies à l’article 1er, point 7, pour autant que, sous réserve du paragraphe 2, une mise en concurrence ait été effectuée en vertu de l’article 21.

2. Les entités adjudicatrices peuvent recourir à une procédure sans mise en concurrence préalable dans les cas suivants :

[…]

e)      dans le cas de marchés de fournitures pour des livraisons complémentaires effectuées par le fournisseur initial et destinées soit au renouvellement partiel de fournitures ou d’installations d’usage courant, soit à l’extension de fournitures ou d’installations existantes, lorsque le changement de fournisseur obligerait l’entité adjudicatrice à acquérir un matériel de technique différente entraînant une incompatibilité ou des difficultés d’utilisation et d’entretien disproportionnées ;

f)      pour les travaux ou les services complémentaires ne figurant pas dans le projet initialement adjugé ni dans le premier marché conclu et devenus nécessaires, à la suite d’une circonstance imprévue, à l’exécution de ce marché, à condition que l’attribution soit faite à l’entrepreneur ou au prestataire de services qui exécute le marché initial :

–        lorsque ces travaux ou services complémentaires ne peuvent être techniquement ou économiquement séparés du marché principal sans inconvénient majeur pour les entités adjudicatrices ou

–        lorsque ces travaux ou services complémentaires, quoique séparables de l’exécution du marché initial, sont strictement nécessaires à son perfectionnement.

[…] »

 Réglementation nationale

7        Le décret-loi 2/2000, du 16 juin 2000, portant adoption du texte refondu de la loi relative à la passation des marchés publics (BOE n° 148, du 21 juin 2000, p. 21775, ci-après le « TRLCAP »), dans sa version en vigueur à l’époque des faits, prévoyait, en son article 101 (« Modification des contrats de marché »), ce qui suit :

« 1. Une fois le marché conclu, le pouvoir adjudicateur ne pourra introduire de modifications dans les éléments du contrat que pour un motif d’intérêt public, à condition qu’elles soient dues à des nécessités nouvelles ou à des causes imprévues, en le justifiant dûment dans le dossier.

2. Les modifications apportées au marché doivent être formalisées conformément aux dispositions de l’article 54.

3. Outre le rapport visé à l’article 59, paragraphe 2, et le contrôle préalable prévu à l’article 11, paragraphe 2, sous g), le rapport relatif au budget, élaboré par la direction générale du budget du ministère des Finances, est indispensable dans le cadre des modifications, même successives, des marchés, qui entraînent, isolément ou conjointement, des modifications égales ou supérieures à 10 % du prix initial du marché, dès lors que celui-ci est égal ou supérieur à 1 000 000 000 pesetas (6 010 121,04 euros), hors taxe sur la valeur ajoutée. À cette fin, les pouvoirs adjudicateurs transmettent le dossier correspondant à la modification proposée, auquel ils joignent les documents suivants :

a)      un exposé des motifs du directeur chargé des travaux justifiant l’écart à l’origine de la modification et précisant les circonstances non prévues dans le cadre de l’approbation du cahier des charges et, le cas échéant, dans le cadre du projet y afférent, étant entendu que ce document est délivré, pour ce qui est des marchés distincts des marchés de travaux, par le service chargé de la direction et de l’exécution des prestations couvertes ;

b)      un document attestant l’absence de pertinence d’une nouvelle mise en concurrence pour les unités ou prestations faisant l’objet de la modification ;

c)      dans le cadre des marchés de travaux, un rapport de l’Oficina de Supervisión de Proyectos [le bureau chargé de la supervision des projets] sur le caractère approprié de la modification proposée.

La direction générale du budget présente son rapport dans un délai de quinze jours ouvrables.

Les dispositions du présent paragraphe s’appliquent également aux modifications consistant dans le remplacement d’unités faisant l’objet du marché par de nouvelles unités dans des marchés dont le montant est égal ou supérieur à 1 000 000 000 pesetas (soit 6 010 121,04 euros) et aux modifications portant sur 30 %, ou plus, du prix initial du marché, hors taxe sur la valeur ajoutée, indépendamment des répercussions budgétaires auxquelles les modifications ont pu donner lieu ».

8        S’agissant des marchés publics de travaux, l’article 101 du TRLCAP était complété par l’article 146 du TRLCAP (« Modification du contrat de marché de travaux »), qui disposait :

« 1.  Les modifications du contrat de marché de travaux sont obligatoires pour l’entrepreneur dès lors que, conformément aux dispositions de l’article 101, elles entraînent une augmentation, une réduction ou la suppression de parties d’ouvrage ou la substitution d’une catégorie de fabrication par une autre, dès lors que celle-ci fait partie de celles comprises dans le marché. En cas de suppression ou de réduction de travaux, l’entrepreneur n’a pas le droit de réclamer quelque indemnisation que ce soit, sans préjudice des dispositions de l’article 149, sous e).

[…] »

9        En ce qui concerne la modification des marchés publics de fournitures, l’article 189 du TRLCAP prévoyait ce qui suit :

« Lorsque les modifications du marché de fourniture entraînent l’augmentation, la réduction ou la suppression des unités de biens incluses dans ledit marché ou le remplacement de certains biens par d’autres, dès lors que ceux-ci sont compris dans le marché, ces modifications lient l’entrepreneur, sans que ce dernier puisse prétendre, en cas de suppression ou de réduction des unités ou des types de biens, à aucune indemnisation pour ces causes, cela sans préjudice des dispositions de l’article 192, sous c). »

10      S’agissant de la modification des marchés publics de services, l’article 212 du TRLCAP énonçait :

« Lorsque les modifications du marché de services d’entretien entraînent l’augmentation, la réduction ou la suppression d’équipements devant être entretenus ou le remplacement de certains équipements par d’autres équipements, dès lors que ceux-ci sont compris dans le marché, ces modifications lient l’entrepreneur, sans que ce dernier puisse prétendre, en cas de suppression ou de réduction des unités ou types d’équipements, à aucune indemnisation pour ces causes, cela sans préjudice des dispositions de l’article 214, sous c). »

11      Pour ce qui concerne le mécanisme d’exécution de travaux complémentaires, le TRLCAP disposait, en son article 141 (« Procédure négociée sans publicité ») :

« On peut recourir à la procédure négociée sans publicité préalable lorsque l’une des conditions suivantes est remplie, ce qui doit être établi dans le dossier :

[...]

d)      Lorsqu’il s’agit de travaux complémentaires qui ne figurent ni dans le projet ni dans le marché conclu, mais qu’il est devenu nécessaire d’exécuter en raison d’une circonstance imprévue, et dont l’exécution est confiée au maître d’œuvre de l’ouvrage principal, selon les prix régissant le marché initial ou qui, le cas échéant, auront été fixés contradictoirement.

Pour l’application des dispositions de l’alinéa précédent, le marché principal doit remplir les conditions suivantes :

1. Que les travaux ne puissent être techniquement ou économiquement séparés du marché initial sans que cela cause à l’administration des inconvénients majeurs ou que, bien qu’ils puissent être séparés de l’exécution de ce marché, ils soient strictement nécessaires à son exécution.

2. Que les travaux complémentaires à exécuter définis dans le projet correspondant soient constitués, pour 50 % au moins du coût, par des parties d’ouvrage du marché principal.

3. Que le montant cumulé des travaux complémentaires ne dépasse pas 20 % du prix initial du marché.

Les autres travaux complémentaires qui ne réunissent pas les conditions exigées aux alinéas précédents devront faire l’objet d’une passation de marché autonome. »

12      L’exécution de travaux complémentaires était également prévue dans la loi 48/1998, du 30 décembre 1998, relative aux procédures d’adjudication dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des télécommunications (BOE no 313, du 31 décembre 1998, p. 44329), dont l’article 25 (« Procédure sans mise en concurrence préalable ») disposait :

« Sans préjudice des dispositions de l’article 23, paragraphe 1, l’entité adjudicatrice peut recourir à une procédure négociée sans mise en concurrence préalable, dans les cas suivants :

[…]

f)      Lorsqu’il s’agit de travaux ou de services complémentaires ne figurant ni dans le projet initialement adjugé ni dans le premier marché conclu, mais qu’il est devenu nécessaire d’exécuter à la suite d’une circonstance imprévue, à condition que leur exécution soit confiée à l’entrepreneur ou prestataire de services qui exécute le marché initial, et que lesdits travaux ou services ne puissent être séparés techniquement ou économiquement du contrat principal sans causer des inconvénients majeurs à l’entité adjudicatrice ou que, bien qu’ils puissent être séparés de l’exécution du marché initial, ils soient strictement nécessaires à son perfectionnement. »

 Antécédents du litige

13      Par la décision C (2000) 2113, du 13 septembre 2000, telle que modifiée par la décision C (2003) 4240, du 11 novembre 2003, la décision C (2001) 2106, du 11 septembre 2000, telle que modifiée par la décision C (2006) 3333, du 17 juillet 2006, la décision C (2000) 3483, du 29 décembre 2000, telle que modifiée par la décision C (2006) 3333, du 17 juillet 2006, la décision C (2001) 4055, du 27 décembre 2001, telle que modifiée par la décision C (2005) 1021, du 22 mars 2005, et la décision C (2004) 4753, du 3 décembre 2004, telle que modifiée par la décision C (2005) 1019, du 22 mars 2005, la Commission des Communautés européennes a approuvé l’octroi d’un concours financier au titre du Fonds de cohésion aux stades de projet portant les intitulés respectifs suivants :

–        « Fourniture et installation d’équipement ferroviaire sur la ligne à grande vitesse Madrid-Saragosse-Barcelone-Frontière française. Tronçon Madrid–Lérida » (CCI 1999.ES.16.C.PT.001) ;

–        « Ligne ferroviaire à grande vitesse Madrid-Barcelone. Tronçon Lérida‑Martorell (plate-forme, 1re phase) » (CCI 2000.ES.16.C.PT.001) ;

–        « Ligne à grande vitesse Madrid-Saragosse-Barcelone-Frontière française. Accès ferroviaires à la nouvelle gare de Saragosse » (CCI 2000.ES.16.C.PT.003) ;

–        « Ligne à grande vitesse Madrid-Barcelone-Frontière française. Tronçon Lérida-Martorell. Sous-tronçon X-A (Olérdola‑Avinyonet del Penedés) » (CCI 2001.ES.16.C.PT.007) et

–        « Nouvel accès ferroviaire de la ligne à grande vitesse à Levante. Sous‑tronçon La Gineta-Albacete (plate-forme) » (CCI 2004.ES.16.C.PT.014).

14      Pour chacun de ces stades de projet, respectivement par lettre du 23 octobre 2009, par trois lettres du 21 avril 2010 et par lettre du 30 mars 2010, la Commission a adressé au Royaume d’Espagne une proposition de clôture. Chacune de ces propositions incluait des corrections financières pour irrégularités dans l’application de la législation sur les marchés publics.

15      Les autorités espagnoles ayant exprimé leur désaccord avec les propositions de clôture de la Commission par quatre lettres du 13 mai 2010, une audition a été tenue le 23 juin 2010, conformément à l’article H, paragraphe 1, de l’annexe II du règlement n° 1164/94. Au cours de cette audition, un « mémoire des autorités administratives concernant la proposition de correction financière » ainsi qu’une « liste de documents envoyée en réponse à la proposition de correction financière de la Commission européenne relative à la proposition de clôture de projets relevant du Fonds de cohésion » ont été transmis à la Commission.

16      Le Royaume d’Espagne a envoyé des informations supplémentaires à la Commission par lettre du 23 juillet 2010.

 Décision attaquée

17      Le 18 février 2011, la Commission a adopté la décision C (2011) 1023, portant réduction de l’aide du Fonds de cohésion aux stades de projets mentionnés au point 13 ci-dessus (ci-après la « décision attaquée »).

18      Dans la décision attaquée, la Commission a constaté plusieurs irrégularités qui affectaient les stades de projet en question et a réduit de 31 328 947,63 euros le concours total octroyé auxdits stades.

19      Premièrement, en ce qui concerne le stade de projet relatif au tronçon Madrid–Lérida (CCI 1999.ES.16.C.PT.001), la Commission a indiqué que le pouvoir adjudicateur avait conclu 78 marchés principaux complètement attribués audit stade et deux marchés partiellement attribués à celui-ci. Selon la Commission, 21 de ces marchés (sept marchés de travaux, onze marchés de services et trois marchés de fournitures, tous dépassant les seuils prévus par la directive 93/38) ont subi au moins une modification après leur adjudication aux fins d’y ajouter des travaux, des services ou des fournitures additionnels, sans publication préalable, pour un montant total hors taxes de 9 630 700,58 euros. En outre, s’agissant du contrat ON 036/01, le délai minimal pour la soumission des offres n’aurait pas été respecté (considérants 59 et 60 de la décision attaquée).

20      Deuxièmement, s’agissant du stade de projet relatif au tronçon Lérida‑Martorell (plate-forme, 1re phase) (CCI 2000.ES.16.C.PT.001), la Commission a relevé que le pouvoir adjudicateur avait conclu 16 marchés (neuf marchés de travaux et sept marchés de services) qui excédaient le seuil prévu par la directive 93/38. Selon la Commission, sept marchés de travaux et l’ensemble des sept marchés de services ont subi au total 17 modifications après leur adjudication, aux fins d’y ajouter des travaux et des services additionnels par le biais d’une procédure négociée sans publication préalable. La Commission a souligné que des critères d’adjudication irréguliers avaient été utilisés par le pouvoir adjudicateur pour les contrats de travaux ON 003/00, ON 018/99, ON 019/99, ON 001/00 et pour les contrats de services PC 003/99, PC 004/99, PC 005/99, PC 008/99 et PC 009/99. En outre, le rapport accompagnant la déclaration de clôture ferait apparaître une majoration des dépenses inéligibles d’expropriation du stade de projet en cause de 18 091,35 euros. Enfin, les dépenses certifiées dans la demande de paiement final ne correspondraient pas au montant mentionné dans la liste des contrats figurant à l’annexe II du rapport final (472 133 339,03 euros) (considérants 90 à 93 de la décision attaquée).

21      S’agissant, troisièmement, du stade de projet relatif à l’accès ferroviaire à la nouvelle gare de Saragosse (CCI 2000.ES.16.C.PT.003), la Commission a indiqué qu’un marché de travaux (ON 015/000) et trois marchés de services (PC 017/99, PC 018/99 et PC 019/99), tous dépassant les seuils prévus par la directive 93/38, avaient été modifiés après leur adjudication par le biais d’une procédure négociée sans publication préalable. Selon la Commission, le montant total hors taxes de la contribution du Fonds affecté par ces modifications est de 4 408 995,25 euros, correspondant à 6 102 415,75 euros en termes de dépenses (considérant 122 de la décision attaquée).

22      Quatrièmement, en ce qui concerne le stade de projet relatif au sous-tronçon X-A (Olérdola‑Avinyonet del Penedés) (CCI 2001.ES.16.C.PT.007), la Commission a souligné que les deux marchés principaux conclus (à savoir le marché de travaux ON 004/02 et le marché de services PC 023/99, lesquels dépassaient les seuils prévus par la directive 93/38) avaient subi des modifications après leur adjudication sans publication préalable. Selon la Commission, le montant total hors taxes de la contribution du Fonds affecté par ces modifications doit être considéré, eu égard aux clarifications fournies par le Royaume d’Espagne, comme s’élevant à 3 398 634,47 euros, correspondant à 4 703 992,34 euros en termes de dépenses (considérant 131 de la décision attaquée).

23      Enfin, cinquièmement, s’agissant du stade de projet relatif au sous‑tronçon La Gineta-Albacete (plate-forme) (CCI 2004.ES.16.C.PT.014), la Commission relève qu’il y a une différence d’un montant hors taxes de 2 459 430,66 euros entre le montant certifié et le montant figurant dans le rapport final. En outre, selon la Commission, le pouvoir adjudicateur a utilisé le critère irrégulier de l’« expérience » pour l’adjudication du marché de services PC 028/01. Des dépenses inéligibles de 50,10 euros, exposées en dehors de la période d’éligibilité, auraient également été constatées (considérants 139 à 141 de la décision attaquée).

 Procédure et conclusions des parties

24      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 avril 2011, le Royaume d’Espagne a introduit le présent recours.

25      Le Royaume d’Espagne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler la décision attaquée ;

–        à titre subsidiaire, annuler partiellement ladite décision, en ce qui concerne les corrections appliquées aux modifications expressément citées dans la requête, en réduisant de 27 047 647 euros le montant de la correction et,

–        en tout état de cause, condamner la Commission aux dépens.

26      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans sa totalité ;

–        condamner le Royaume d’Espagne aux dépens.

27      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 10 mai 2012.

 En droit

 Sur le premier moyen, tiré du non-respect du délai prévu à l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94

28      Le Royaume d’Espagne fait valoir que la décision attaquée méconnaît les exigences procédurales prévues à l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94, en sorte qu’elle devrait être annulée.

29      Selon le Royaume d’Espagne, cette disposition doit être interprétée en ce sens que, en l’absence d’accord avec l’État membre concerné au cours de l’audition prévue à l’article H, paragraphe 1, de ladite annexe, la Commission dispose d’un délai de trois mois pour adopter une décision portant réduction de l’acompte ou corrections financières. En l’absence d’une telle décision à l’expiration dudit délai, les dépenses effectuées par les autorités nationales devraient être considérées comme correctes. Cette disposition, qui établirait un délai de forclusion, viserait à garantir la sécurité juridique des États membres, la Commission ne procédant pas au versement du solde final de l’aide avant l’adoption de sa décision définitive. En outre, l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1386/2002 prévoirait que le délai de trois mois commence à courir à la date de l’audition. Par ailleurs, le retard dans le paiement des soldes aurait occasionné au Royaume d’Espagne un préjudice financier parfaitement déterminable.

30      En l’espèce, le délai de trois mois aurait commencé à courir le 23 juin 2010, date de l’audition, en sorte que la Commission aurait eu l’obligation d’adopter la décision attaquée au plus tard le 23 septembre 2010. Même à supposer que le délai n’ait commencé à courir qu’après la réception par la Commission des informations complémentaires communiquées par le Royaume d’Espagne le 23 juillet 2010 (voir point 16 ci-dessus), le délai aurait expiré le 23 octobre 2010. Or, la décision attaquée aurait été adoptée le 18 février 2011.

31      Lors de l’audience, le Royaume d’Espagne a affirmé, en réponse à une question du Tribunal, que, d’une part, le délai de trois mois visé à l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94 et, d’autre part, le délai de trois mois visé à l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1386/2002 sont deux délais concomitants qui prennent cours à compter de la date de l’audition. Le premier viserait l’obtention d’un accord avec l’État membre concerné, tandis que le second viserait l’adoption par la Commission d’une décision aux fins de procéder aux corrections financières requises et aurait, partant, été violé.

32      Contrairement à ce que fait valoir le Royaume d’Espagne, le Tribunal a jugé, dans son arrêt du 19 novembre 2008, Grèce/Commission (T‑404/05, non publié au Recueil, point 44, confirmé par l’ordonnance de la Cour du 22 janvier 2010, Grèce/Commission, C‑43/09 P, non publiée au Recueil), que l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94 (voir point 2 ci-dessus) ne prévoyait aucun délai dans lequel la Commission devait arrêter sa décision. Une telle interprétation ressort d’ailleurs explicitement du libellé de cette disposition. Le délai de trois mois auquel il est fait référence concerne la conclusion d’un accord entre la Commission et l’État membre concerné.

33      Si, certes, la version française de l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94 dispose que, « [à] l’expiration d’un délai fixé par la Commission, dans le respect de la procédure applicable, en l’absence d’accord et compte tenu des observations éventuelles de l’État membre, la Commission décide, dans un délai de trois mois : […] », le juge de l’Union européenne a relevé que toutes les versions linguistiques autres que la version française de la disposition en question correspondaient au texte cité au point 2 ci-dessus (arrêt Grèce/Commission, point 32 supra, point 45, confirmé par ordonnance Grèce/Commission, point 32 supra). Or, selon une jurisprudence constante, la nécessité d’une interprétation uniforme des règlements de l’Union exclut de considérer un texte déterminé isolément, mais exige, en cas de doute, qu’il soit interprété et appliqué à la lumière des versions établies dans les autres langues officielles (arrêts de la Cour du 27 février 1997, Ebony Maritime et Loten Navigation, C‑177/95, Rec. p. I‑1111, point 30 ; du 11 novembre 1999, Söhl & Söhlke, C‑48/98, Rec. p. I‑7877, point 46, et du 27 septembre 2001, Bacardi, C‑253/99, Rec. p. I‑6493, point 41 ; arrêt Grèce/Commission, point 32 supra, point 45).

34      À cet égard, ainsi que le souligne à juste titre la Commission, le délai de trois mois fixé par l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94 permet à l’État membre concerné de présenter à la Commission, à la suite de l’audition, des informations complémentaires et à la Commission de tenir compte de telles informations. Ainsi, ce n’est qu’en l’absence d’accord entre la Commission et l’État membre concerné dans un délai de trois mois, et compte tenu des observations éventuelles de l’État membre, que la Commission adopte une décision.

35      S’agissant de l’affirmation du Royaume d’Espagne, formulée lors de l’audience, relative à la coexistence de deux délais de trois mois (voir point 31 ci-dessus), il ne saurait être considéré que coexisteraient deux délais distincts, concomitants, l’un fixé par l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94, qui viserait l’obtention d’un accord avec l’État membre concerné, et l’autre prévu par l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1386/2002, qui viserait l’adoption par la Commission d’une décision aux fins de procéder aux corrections financières requises.

36      Il doit être relevé que l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1386/2002 se limite à fixer la date à partir de laquelle le délai pour la prise de décision en vertu de l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94 commence à courir. À cet égard, ainsi qu’il a été rappelé au point 32 ci-dessus, le juge de l’Union a considéré que l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94 (voir point 2 ci-dessus) ne prévoyait aucun délai dans lequel la Commission devait arrêter sa décision.

37      Or, un règlement d’application, tel que le règlement n° 1386/2002, doit faire l’objet, si possible, d’une interprétation conforme aux dispositions du règlement de base (arrêts de la Cour du 24 juin 1993, Dr Tretter, C‑90/92, Rec. p. I‑3569, point 11 ; du 10 septembre 1996, Commission/Allemagne, C‑61/94, Rec. p. I‑3989, point 52, et du 14 mai 2009, Internationaal Verhuis- en Transportbedrijf Jan de Lely, C‑161/08, Rec. p. I‑4075, point 38). Une interprétation de l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1386/2002 qui impliquerait que la Commission dispose d’un délai de trois mois pour adopter la décision attaquée, eu égard à la jurisprudence rappelée aux points 32 et 33 ci-dessus, ne saurait, dès lors, être retenue.

38      Par ailleurs, l’interprétation de ces dispositions proposée par le Royaume d’Espagne priverait le délai prévu à l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94 de son effet utile, puisqu’il en résulterait que la Commission serait, dans l’hypothèse de l’existence de deux délais distincts et concomitants, dans l’obligation d’adopter une décision au titre de cette disposition dans le délai de trois mois au cours duquel elle tenterait de parvenir à un accord avec l’État membre concerné.

39      Eu égard à ce qui précède, et dès lors que l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1386/2002 se limite à fixer la date à partir de laquelle une décision prise en vertu de l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94 commence à courir, la circonstance, évoquée lors de l’audience, que les versions allemande, danoise, espagnole et néerlandaise de l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1386/2002 font état du délai de trois mois au cours duquel la Commission « doit adopter » ou « adopte » une décision, tandis que la version slovène de celle-ci se réfère, de manière plus générale, à la « décision en vertu de l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II de ce règlement » et que les autres versions linguistiques de cette disposition visent le délai de trois mois au cours duquel la Commission « peut » prendre une décision au titre de l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II dudit règlement » est dépourvue de pertinence en l’espèce.

40      Il s’ensuit que l’argument du Royaume d’Espagne selon lequel la Commission devait adopter la décision attaquée avant le 18 février 2011 doit être rejeté.

41      Il y a donc lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré de l’application erronée de l’article 20, paragraphe 2, de la directive 93/38

42      Le Royaume d’Espagne prétend que c’est à tort que les corrections financières décidées par la Commission sont fondées sur une violation de l’article 20, paragraphe 2, sous e) et f), de la directive 93/38. Il relève qu’il n’a pas procédé à une adjudication de prestations complémentaires, telle que prévue à l’article 20, paragraphe 2, sous e) et f), de la directive 93/38, à l’article 141, sous d), du TRLCAP et à l’article 25, sous f), de la loi 48/1998, dès lors qu’il n’y aurait pas eu de prestations nouvelles, différentes de celles initialement adjugées. Au contraire, le Royaume d’Espagne aurait procédé à une modification des marchés pendant leur phase d’exécution, au sens des articles 101, 146, 189 et 212 du TRLCAP, en modifiant les prestations adjugées sur certains de leurs éléments caractéristiques, mais en maintenant le même marché initialement conclu, ce qui constituerait, selon le droit national, un cas de figure différent de l’adjudication de prestations complémentaires.

43      Selon le Royaume d’Espagne, les modifications des marchés, qui impliqueraient le maintien du marché initialement conclu et se différencieraient donc de l’adjudication de prestations complémentaires, n’exigeraient pas une nouvelle mise en concurrence. De telles modifications ne relèveraient pas du champ d’application de l’article 20, paragraphe 2, sous e) et f), de la directive 93/38, qui, régissant uniquement la phase de passation des marchés, se référerait seulement à l’adjudication de prestations complémentaires, mais non à la modification des marchés, celle-ci se produisant, non dans la phase de passation des marchés, mais dans celle de leur exécution. Ainsi, dans la décision attaquée, la Commission assimilerait erronément le mécanisme de la modification contractuelle, prévu aux articles 101, 146, 189 et 212 du TRLCAP, à celui de l’exécution de travaux complémentaires, prévu à l’article 20 de la directive 93/38, à l’article 141, sous d), du TRLCAP et à l’article 25, sous f), de la loi 48/1998.

44      À titre liminaire, il doit être relevé que, même si le Royaume d’Espagne conteste l’applicabilité, en l’espèce, de l’article 20, paragraphe 2, sous e) et f), de la directive 93/38 aux travaux complémentaires visés par la décision attaquée, il ne conteste pas, dans son recours, d’une part, que le pouvoir adjudicateur devait respecter les dispositions de la directive 93/38 lors de la passation des marchés relatifs aux stades de projet visés par la décision attaquée et, d’autre part, que la violation des dispositions d’une directive peut constituer une irrégularité au sens de l’article H, paragraphe 1, sous b), de l’annexe II du règlement n° 1164/94, comme la Commission l’a rappelé au considérant 57 de la décision attaquée.

45      En premier lieu, il doit être rappelé que, selon l’article 4, paragraphe 1, de la directive 93/38, pour passer leurs marchés de fournitures, de travaux et de services ou organiser leurs concours, les entités adjudicatrices appliquent les procédures qui sont adaptées aux dispositions de cette directive. Selon l’article 4, paragraphe 2, de celle-ci, les entités adjudicatrices veillent à ce qu’il n’y ait pas de discrimination entre fournisseurs, entrepreneurs ou prestataires de services.

46      Ainsi que la Cour l’a itérativement jugé, le principe d’égalité de traitement, qui constitue la base des directives relatives aux procédures de passation des marchés publics, implique une obligation de transparence afin de permettre de vérifier son respect (arrêts de la Cour du 18 novembre 1999, Unitron Scandinavia et 3-S, C‑275/98, Rec. p. I‑8291, point 31 ; du 12 décembre 2002, Universale-Bau e.a., C‑470/99, Rec. p. I‑11617, point 91, et du 17 février 2011, Commission/Chypre, C‑251/09, non publié au Recueil, point 38).

47      Le principe d’égalité de traitement entre les soumissionnaires, qui a pour objectif de favoriser le développement d’une concurrence saine et effective entre les entreprises participant à un marché public, impose que tous les soumissionnaires disposent des mêmes chances dans la formulation des termes de leurs offres et implique donc que celles-ci soient soumises aux mêmes conditions pour tous les compétiteurs (arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Commission/CAS Succhi di Frutta, C‑496/99 P, Rec. p. I‑3801, points 109 et 110).

48      Quant au principe de transparence, qui en constitue le corollaire, il a essentiellement pour but de garantir l’absence de risque de favoritisme et d’arbitraire de la part du pouvoir adjudicateur. Il implique que toutes les conditions et modalités de la procédure d’attribution soient formulées de manière claire, précise et univoque, dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges, de façon, d’une part, à permettre à tous les soumissionnaires raisonnablement informés et normalement diligents d’en comprendre la portée exacte et de les interpréter de la même manière et, d’autre part, à mettre le pouvoir adjudicateur en mesure de vérifier effectivement si les offres des soumissionnaires correspondent aux critères régissant le marché en cause (arrêt Commission/CAS Succhi di Frutta, point 47 supra, point 111).

49      S’agissant des procédures de passation de marché, l’article 20, paragraphe 1, de la directive 93/38 ajoute que les entités adjudicatrices peuvent choisir l’une des procédures définies à l’article 1er, point 7, de cette dernière, à savoir les procédures ouvertes, restreintes ou négociées, pour autant que, sous réserve de l’article 20, paragraphe 2, de la dite directive, une mise en concurrence ait été effectuée en vertu de l’article 21 de la même directive. L’article 20, paragraphe 2, sous e), de la directive 93/38 dispose, à cet égard, que les entités adjudicatrices peuvent recourir à une procédure sans mise en concurrence préalable dans le cas de marchés de fournitures concernant des livraisons complémentaires effectuées par le fournisseur initial et destinées soit au renouvellement partiel de fournitures ou d’installations d’usage courant, soit à l’extension de fournitures ou d’installations existantes, lorsque le changement de fournisseur obligerait l’entité adjudicatrice à acquérir un matériel de technique différente entraînant une incompatibilité ou des difficultés d’utilisation et d’entretien disproportionnées. L’article 20, paragraphe 2, sous f), de cette directive prévoit, en outre, que les entités adjudicatrices peuvent recourir à une procédure sans mise en concurrence préalable pour les travaux ou les services complémentaires ne figurant pas dans le projet initialement adjugé ni dans le premier marché conclu et devenus nécessaires, à la suite d’une circonstance imprévue, à l’exécution de ce marché, à condition que l’attribution soit faite à l’entrepreneur ou au prestataire de services qui exécute le marché initial, d’une part, lorsque ces travaux ou services complémentaires ne peuvent être techniquement ou économiquement séparés du marché principal sans inconvénient majeur pour les entités adjudicatrices ou, d’autre part, lorsque ces travaux ou services complémentaires, quoique séparables de l’exécution du marché initial, sont strictement nécessaires à son perfectionnement.

50      Contrairement à ce que soutient le Royaume d’Espagne, il y a lieu de considérer que l’article 20, paragraphe 2, sous e) et f), de la directive 93/38 s’applique aux modifications des marchés publics décidées lors de leur phase d’exécution.

51      D’une part, ainsi qu’il ressort du libellé même de cette disposition, l’article 20, paragraphe 2, sous e), de la directive 93/38 concerne des livraisons « complémentaires » effectuées par le fournisseur initial, lorsque le changement de fournisseur obligerait l’entité adjudicatrice à acquérir un matériel de technique différente entraînant une incompatibilité ou des difficultés d’utilisation et d’entretien disproportionnées. De telles livraisons complémentaires doivent, dès lors, nécessairement être considérées comme devant être effectuées au cours de la phase d’exécution du marché initial. En outre, l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38 vise spécifiquement les travaux ou services qui ne figurent pas dans le projet initialement adjugé ni dans le premier marché conclu et qui s’avèrent nécessaires, à la suite d’une circonstance imprévue, « à l’exécution [du] marché ».

52      D’autre part, la Cour a souligné que le pouvoir adjudicateur devait observer strictement les règles qu’il avait lui-même fixées non seulement lors de la procédure d’adjudication, mais, plus généralement, jusqu’au terme de la phase d’exécution du marché en cause (arrêt Commission/CAS Succhi di Frutta, point 47 supra, point 115).

53      Le Royaume d’Espagne ne saurait, à cet égard, soutenir que l’arrêt Commission/CAS Succhi di Frutta, point 47 supra, n’est pas transposable en l’espèce. Si, certes, cet arrêt concerne une procédure d’adjudication intervenue dans le cadre de la politique agricole commune, la Cour y a fait application des principes qu’elle avait dégagés dans le cadre du contentieux relatif aux marchés publics.

54      Dans ce contexte, il doit être relevé que, si le pouvoir adjudicateur était autorisé à modifier à son gré, lors de la phase d’exécution du marché, les conditions mêmes de l’adjudication, en l’absence d’habilitation expresse en ce sens figurant dans les dispositions pertinentes applicables, les termes régissant l’attribution du marché, tels que stipulés initialement, seraient dénaturés (arrêt Commission/CAS Succhi di Frutta, point 47 supra, point 120).

55      De plus, une telle pratique entraînerait inéluctablement une violation des principes de transparence et d’égalité de traitement des soumissionnaires, puisque l’application uniforme des conditions d’adjudication et l’objectivité de la procédure ne seraient plus garanties (arrêt Commission/CAS Succhi di Frutta, point 47 supra, point 121).

56      En deuxième lieu, le Royaume d’Espagne ne saurait justifier l’attribution des marchés sans nouvelle mise en concurrence en se fondant sur le fait qu’il se serait conformé aux articles 101, 146, 189 et 212 du TRLCAP, relatifs aux modifications de marchés de travaux, de fournitures et de services.

57      Il doit être souligné, tout d’abord, que les seules exceptions permises à l’application de la directive 93/38 sont celles qui y sont expressément mentionnées (arrêt de la Cour du 21 février 2008, Commission/Italie, C‑412/04, Rec. p. I‑619, point 89 ; voir également, par analogie, arrêts de la Cour du 18 novembre 1999, Teckal, C‑107/98, Rec. p. I‑8121, point 43, et du 11 mai 2006, Carbotermo et Consorzio Alisei, C‑340/04, Rec. p. I‑4137, point 45).

58      Ensuite, selon une jurisprudence constante, les dérogations aux règles visant à garantir l’effectivité des droits reconnus par le traité dans le secteur des marchés publics de travaux doivent faire l’objet d’une interprétation stricte. Sous peine de priver la directive 93/38 de son effet utile, les États membres ne sauraient prévoir des hypothèses de recours à la procédure négociée non prévues par cette directive ou assortir les hypothèses expressément prévues par celle-ci de conditions nouvelles ayant pour effet de rendre le recours à ladite procédure plus aisé (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 13 janvier 2005, Commission/Espagne, C‑84/03, Rec. p. I‑139, point 48, et la jurisprudence citée).

59      Enfin, un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre juridique interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit de l’Union (voir arrêt de la Cour du 27 octobre 2011, Commission/Grèce, C‑601/10, non publié au Recueil, point 41, et la jurisprudence citée).

60      À cet égard, la circonstance, invoquée par le Royaume d’Espagne, que la législation espagnole permette la modification des marchés publics pendant la phase de leur exécution, depuis une époque antérieure à l’adhésion du Royaume d’Espagne à l’Union, est dénuée de pertinence, dès lors que les règles de l’Union dans le domaine des marchés publics s’appliquent à de tels marchés à partir de la date d’adhésion de cet État (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 juin 2008, Pressetext Nachrichtenagentur, C‑454/06, Rec. p. I‑4401, point 28, et la jurisprudence citée).

61      Le Royaume d’Espagne ne saurait non plus prétendre que le mécanisme de modification de marché prévu aux articles 101, 146, 189 et 212 du TRLCAP n’implique pas nécessairement une augmentation des prestations initialement convenues, mais également une réduction ou une suppression de celles-ci. Il est en effet constant que les stades de projet concernés par le présent recours ont fait l’objet de contrats additionnels, qui portaient sur des fournitures, des travaux ou des services complémentaires ne figurant pas dans le projet initialement adjugé ni dans le marché initialement conclu (voir les considérants 59, 90, 122 et 131 de la décision attaquée). L’argument du Royaume d’Espagne est, partant, sans pertinence en l’espèce.

62      En troisième lieu, le Royaume d’Espagne ne saurait soutenir que la possibilité que le pouvoir adjudicateur soit obligé de modifier les spécifications de la prestation adjugée était connue de tous les soumissionnaires au moment où ils ont soumis leur offre, puisqu’elle aurait figuré dans le cahier des charges des différents marchés.

63      Il y a en effet lieu de rappeler que, ainsi que la Cour l’a souligné dans son arrêt Commission/CAS Succhi di Frutta, point 47 supra (points 116, 118 et 125), il est interdit au pouvoir adjudicateur de modifier, à quelque stade de la procédure que ce soit, les conditions de l’adjudication, sous peine de violer le principe d’égalité de traitement entre tous les soumissionnaires ainsi que celui de transparence, ou d’altérer l’économie générale de l’adjudication en modifiant par la suite unilatéralement une des conditions essentielles de celle-ci. Au cas où le pouvoir adjudicateur souhaiterait que, pour des motifs précis, certaines conditions de l’adjudication puissent être modifiées après le choix de l’adjudicataire, il est tenu de prévoir expressément cette possibilité d’adaptation, de même que ses modalités d’application, dans l’avis d’adjudication qu’il a lui-même établi et qui trace le cadre dans lequel la procédure doit se dérouler, de sorte que toutes les entreprises intéressées à participer au marché en aient connaissance dès le départ et se trouvent ainsi sur un pied d’égalité au moment de formuler leur offre.

64      À cet égard, le Royaume d’Espagne soutient que les cahiers des charges relatifs aux adjudications en cause prévoyaient de manière expresse et claire la possibilité de modification du marché, les cas dans lesquels on procéderait à une telle modification et la procédure suivie en pareille hypothèse. Lors de l’audience, le Royaume d’Espagne a précisé, en réponse à une question du Tribunal, que le contenu des clauses figurant dans les cahiers des charges des marchés concernés consistait en un renvoi aux dispositions pertinentes de la législation nationale, en particulier à l’article 101 du TRLCAP, et, s’agissant des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, respectivement aux articles 146, 189 et 212 du TRLCAP.

65      Dans ses écritures, le Royaume d’Espagne cite, à titre d’exemple, d’une part, la clause 25 (« Modification du contenu du marché ») du cahier des clauses administratives particulières du dossier ON 004/02 (considérant 136 de la décision attaquée), qui stipulait que « le pouvoir adjudicateur ne p[ouvai]t apporter des modifications au marché que pour des motifs d’intérêt public et à condition que celles-ci soient motivées par des besoins nouveaux ou des causes imprévues et [devait] dûment motiver son choix dans le dossier (article 101 TRLCAP) ». Elle indiquait également que, « [e]n tout état de cause, les dispositions de l’article 101, paragraphes 2 et 3, et de l’article 146 du texte codifié susmentionné [étaie]nt d’application à la modification du marché ». D’autre part, le Royaume d’Espagne se réfère à la clause 24 (« Prolongation du délai d’exécution ») du cahier des clauses administratives particulières du dossier PC 015/00. Celle-ci disposait :

« Le délai d’exécution des services de consultance et d’assistance faisant l’objet du présent marché pourra être prolongé par accord mutuel entre les parties. En cas de prolongation du délai d’exécution des travaux faisant l’objet du contrôle, [à la] suite […] des modifications ou des prorogations autorisées, la durée du présent marché sera automatiquement prolongée dans la même mesure. »

66      Il doit toutefois être constaté, à l’instar de ce qu’a fait la Commission (considérants 73 à 75 de la décision attaquée), que le seul renvoi aux dispositions pertinentes de la législation nationale dans lesdits cahiers ne saurait satisfaire aux principes d’égalité de traitement et de transparence, rappelés aux points 46 à 48 ci-dessus.

67      S’agissant des exemples de clauses mentionnés par le Royaume d’Espagne dans ses écritures (voir point 65 ci-dessus), il doit être souligné, d’une part, ainsi que le relève à juste titre la Commission, que la clause 25 du cahier des clauses administratives particulières du dossier ON 004/02 permettrait au pouvoir adjudicateur de procéder à une modification du marché initial, certes pour des raisons d’intérêt public motivées par des causes imprévues, mais également par des « nécessités nouvelles ». Or, l’utilisation d’un critère relatif à la seule constatation de nécessités nouvelles permettrait au pouvoir adjudicateur de modifier à son gré, lors de la phase d’exécution du marché, les conditions mêmes de l’adjudication (voir points 54 et 63 ci-dessus). Par ailleurs, la référence à l’article 101, paragraphes 2 et 3, et à l’article 146 du TRLCAP ne saurait non plus garantir le respect des principes susmentionnés, dès lors que ces dispositions se réfèrent, en substance, à des exigences formelles relatives à la procédure à suivre par le pouvoir adjudicateur pour procéder à la modification du marché initial.

68      D’autre part, la clause 24 du cahier des clauses administratives particulières du dossier PC 015/00, qui prévoit une prolongation automatique de la durée du marché de services en cas de prolongation du délai d’exécution des travaux faisant l’objet du contrôle, à la suite des modifications ou des prorogations autorisées, ne saurait, eu égard à son caractère automatique, satisfaire aux principes rappelés aux points 46 à 48 ci-dessus.

69      Par ailleurs, l’argument du Royaume d’Espagne selon lequel il aurait modifié les prestations adjugées concernant certains de leurs éléments caractéristiques, mais en maintenant le même marché initialement conclu, en sorte que la modification du marché initial ne pourrait pas être considérée comme substantielle, ne saurait non plus être retenu. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, en vue d’assurer la transparence des procédures et l’égalité de traitement des soumissionnaires, des modifications apportées aux dispositions d’un marché public pendant la durée de sa validité constituent une nouvelle passation de marché lorsqu’elles présentent des caractéristiques substantiellement différentes de celles du marché initial et sont, en conséquence, de nature à démontrer la volonté des parties de renégocier les termes essentiels de ce marché (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 5 octobre 2000, Commission/France, C‑337/98, Rec. p. I‑8377, points 44 et 46 ; voir, par analogie, arrêt Pressetext Nachrichtenagentur, point 60 supra, point 34).

70      La modification d’un marché public en cours de validité peut être considérée comme substantielle lorsqu’elle introduit des conditions qui, si elles avaient figuré dans la procédure de passation initiale, auraient permis l’admission de soumissionnaires autres que ceux initialement admis ou auraient permis de retenir une offre autre que celle initialement retenue. De même, une modification du marché initial peut être considérée comme substantielle lorsqu’elle étend le marché, dans une mesure importante, à des fournitures, des travaux ou des services non initialement prévus. Une modification peut également être considérée comme substantielle lorsqu’elle change l’équilibre économique du contrat en faveur de l’adjudicataire du marché d’une manière qui n’était pas prévue dans les termes du marché initial (voir, par analogie, arrêt Pressetext Nachrichtenagentur, point 60 supra, points 35 à 37).

71      En l’espèce, les spécifications techniques ayant été modifiées ne sauraient être considérées comme accessoires, mais revêtent une importance majeure, dans la mesure où elles ont notamment porté sur l’exécution de travaux importants (exécution de faux tunnels, d’un viaduc, approfondissement des fondations, renforcement des armatures des blocs techniques, agrandissement des ouvrages d’écoulement des eaux, etc.). Le Royaume d’Espagne ne saurait, dès lors, soutenir que l’ouvrage à exécuter est resté celui qui était initialement prévu, à savoir la ligne de chemin de fer à grande vitesse, ni que les prestations qui ont fait l’objet du marché initialement conclu ont été maintenues sans altération essentielle.

72      Il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, invoqué à titre subsidiaire, tiré d’une erreur de droit dans l’application de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38

73      À titre subsidiaire, le Royaume d’Espagne fait valoir que, dans l’hypothèse où le Tribunal considérerait que la modification d’un marché pendant la phase d’exécution de celui-ci est assimilable à l’adjudication de travaux complémentaires au sens de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38, il conviendrait d’annuler partiellement la décision attaquée, dès lors que la « majeure partie » des prestations supplémentaires décidées par les autorités espagnoles satisferaient aux conditions prévues par cette disposition, en sorte que celles-ci pouvaient être adjugées par procédure négociée sans publicité.

74      À cet égard, le Royaume d’Espagne se réfère, premièrement, aux corrections financières fondées sur le manque de coordination entre les administrations publiques concernées [à savoir, d’une part, les modifications résultant des changements apportés aux plans généraux d’aménagement urbain (ci-après « PGAU ») et, d’autre part, les modifications résultant des demandes adressées à l’entité adjudicatrice par diverses administrations publiques], deuxièmement, aux modifications résultant d’autres circonstances imprévues mises en lumière lors de l’exécution des travaux et, troisièmement, aux modifications des marchés de services.

75      Contrairement à ce que soutiendrait la Commission, les modifications opérées satisferaient à la condition d’imprévisibilité prévue par l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38. En outre, selon le Royaume d’Espagne, l’interprétation stricte qu’il convient de donner à ladite disposition, et qu’il ne conteste pas, ne saurait la priver de toute efficacité. La Commission ne saurait, dès lors, se limiter à formuler à l’égard des preuves et arguments présentés par le Royaume d’Espagne des objections à caractère général, qui ne sont pas liées au cas concret, mais devrait apporter des preuves concrètes que la disposition a été appliquée de manière erronée.

 Sur les griefs relatifs à l’absence de coordination entre les administrations concernées

–       Sur les modifications résultant des changements apportés aux PGAU

76      Le Royaume d’Espagne fait valoir que cinq marchés, visés aux considérants 84, 108, 127 et 136 de la décision attaquée, ont dû être modifiés à la suite de l’approbation, par l’autorité municipale compétente, d’un nouveau PGAU. Les travaux complémentaires n’auraient donc pas résulté d’un manque de coordination entre administrations ni d’une lacune dans les prévisions du pouvoir adjudicateur.

77      La compétence pour adopter le PGAU en Espagne appartiendrait non pas à l’État, qui disposerait d’autres compétences qui affectent l’urbanisme, mais aux communautés autonomes et aux municipalités, qui seraient dotées d’une personnalité juridique propre. Les constructions ferroviaires devraient ainsi tenir compte de la planification urbanistique menée par les municipalités dont le territoire doit être traversé par une voie ferrée, laquelle, une fois approuvée définitivement par la communauté autonome compétente, revêtirait un caractère obligatoire pour les citoyens et l’administration. Lorsque les ouvrages ferroviaires relevant de la compétence de l’État vont au-delà de ce qui constitue l’infrastructure ferroviaire au sens strict, ils devraient se conformer à ce qui est prévu dans la planification urbaine et à ses modifications. Ainsi, la planification urbaine pourrait affecter les travaux liés à la réalisation d’infrastructures ferroviaires qui ne seraient pas des ouvrages ferroviaires au sens strict, mais qui devraient néanmoins être effectués en même temps que ceux-ci.

78      Étant donné, d’une part, que, lors de l’élaboration du projet initial, le pouvoir adjudicateur ne pouvait prévoir quels seraient les instruments de planification urbaine que les mairies situées sur le tracé de la voie ferrée adopteraient et, d’autre part, que l’existence d’un projet de travaux, même en cours d’exécution, ne saurait constituer un élément de nature à conditionner définitivement l’exercice des compétences des mairies concernées en termes de réponse aux besoins de planification urbaine, il serait impossible de considérer que les modifications contractuelles résultant de la modification des nouveaux PGAU sont le résultat d’un manque de coordination entre les administrations compétentes.

79      Ainsi qu’il a été rappelé au point 49 ci-dessus, il ressort de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38 qu’un pouvoir adjudicateur peut, sous certaines conditions, recourir à une procédure sans mise en concurrence préalable pour les travaux ou les services complémentaires ne figurant pas dans le projet initialement adjugé ni dans le premier marché conclu et devenus nécessaires, à la suite d’une circonstance imprévue, à l’exécution de ce marché.

80      À cet égard, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 58 ci-dessus, les dérogations aux règles visant à garantir l’effectivité des droits reconnus par le traité dans le secteur des marchés publics doivent faire l’objet d’une interprétation stricte. En outre, c’est à celui qui entend s’en prévaloir qu’incombe la charge de la preuve que les circonstances exceptionnelles justifiant la dérogation existent effectivement (voir, en ce sens, arrêt Commission/Espagne, point 58 supra, point 48, et la jurisprudence citée).

81      En particulier, s’agissant des dispositions de la directive 93/38, la Cour a précisé que, dans la mesure où il ressortait d’une lecture combinée des paragraphes 1 et 2 de l’article 20 de cette directive que le second de ces paragraphes constituait une dérogation par rapport au premier de ceux-ci, en tant qu’il prévoyait les cas de figure dans lesquels une entité adjudicatrice pouvait recourir à une procédure de passation de marché sans mise en concurrence préalable, il y a lieu de conclure que toutes les dispositions de cet article 20, paragraphe 2, sont d’interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 4 juin 2009, Commission/Grèce, C‑250/07, Rec. p. I‑4369, point 35).

82      En premier lieu, eu égard à la jurisprudence figurant aux points 57 à 59 ci-dessus, le Royaume d’Espagne ne saurait se fonder sur le fait que, en droit espagnol, l’approbation du PGAU relève de la compétence des communautés autonomes et des municipalités et que les projets de constructions ferroviaires doivent tenir compte de la planification urbanistique menée par les municipalités dont le territoire doit être traversé par une voie ferrée pour justifier l’inobservation de l’article 20 de la directive 93/38.

83      S’agissant, par ailleurs, de la référence faite par le Royaume d’Espagne à l’article 160, paragraphe 4, sous e), de la loi 13/96, du 30 décembre 1996, sur les mesures fiscales, administratives et d’ordre social (BOE n° 315, du 31 décembre 1996, p. 38974), lequel se référerait à l’article 244 du texte codifié de la loi sur le régime du sol et l’aménagement urbain, approuvé par le décret législatif 1/1992, du 26 juin 1992 (BOE n° 156, du 30 juin 1992, p. 22238), force est de constater que, selon cette dernière disposition, l’administration ferroviaire ne nécessite pas d’autorisation municipale, sous réserve des cas dans lesquels il faudrait exécuter des travaux publics à caractère urgent ou d’intérêt public exceptionnel qui, s’ils n’étaient pas conformes aux PGAU, justifieraient que soit entamée une procédure se concluant par une résolution du Conseil des ministres espagnol. Or, le Royaume d’Espagne ne prétend pas qu’une telle procédure ait été mise en œuvre en l’espèce.

84      En second lieu, il convient de considérer qu’il appartenait au pouvoir adjudicateur, lors de la phase de rédaction du projet, de déployer toute la diligence requise, et notamment d’obtenir un consensus préalable sur les solutions envisagées avec les municipalités concernées au cours de cette période.

85      Or, force est de constater que le Royaume d’Espagne n’apporte aucune preuve que des contacts préalables à la signature du marché initial aient été établis par le pouvoir adjudicateur avec les municipalités dont le territoire serait affecté par les ouvrages à réaliser dans le cadre des projets en cause. Dès lors que, ainsi que l’affirme le Royaume d’Espagne, les municipalités disposent de compétences d’administration et d’exécution en matière d’urbanisme, il appartenait au pouvoir adjudicateur d’entreprendre les démarches nécessaires afin d’obtenir des informations sur les PGAU en vigueur dans les municipalités concernées et sur les éventuelles modifications que ces dernières envisageaient d’y apporter. En l’espèce, force est de constater que le Royaume d’Espagne n’a pas démontré l’existence d’une quelconque concertation avant la publication de l’avis d’adjudication.

86      Eu égard aux développements qui précèdent, il y a lieu de juger que le Royaume d’Espagne n’a pas démontré que les modifications en cause étaient dues à des circonstances imprévues au sens de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38.

87      Le grief du Royaume d’Espagne doit donc être rejeté.

–       Sur les modifications résultant des demandes adressées à l’entité adjudicatrice par diverses administrations publiques

88      Le Royaume d’Espagne fait valoir que dix marchés, visés au considérant 108 de la décision attaquée, ont dû être modifiés en raison de la nécessité d’accéder aux demandes adressées au pouvoir adjudicateur par différentes administrations publiques du fait des troubles que l’exécution des travaux aurait causés aux intérêts publics qu’il leur appartiendrait de protéger, et ce malgré le fait que les projets initiaux aient été soumis à une évaluation de leur impact sur l’environnement. Les conséquences pratiques de grands travaux publics et leurs effets consécutifs sur les intérêts publics concernés ne se manifesteraient qu’une fois leur exécution commencée, en sorte que la seule manière de concilier l’ensemble des intérêts publics en cause consisterait à procéder à la modification des marchés de travaux en cours d’exécution. Une telle situation n’impliquerait pas, comme le soutient la Commission, un manque de prévision ou de diligence de la part du pouvoir adjudicateur ni l’absence de la consultation requise des intéressés potentiels.

89      En premier lieu, ainsi qu’il a été rappelé aux points 58, 80 et 81 ci-dessus, les dispositions de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38 sont d’interprétation stricte et c’est à celui qui entend s’en prévaloir qu’incombe la charge de la preuve que les circonstances exceptionnelles justifiant la dérogation existent effectivement. En l’espèce, force est de constater que, dans la requête, le Royaume d’Espagne se limite à avancer un argument de nature générale relatif à la nécessité d’accéder à des demandes qui auraient été adressées au pouvoir adjudicateur par différentes administrations publiques. Toutefois, le Royaume d’Espagne n’étaye pas cet argument ni ne précise le caractère imprévu, au sens de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38, des troubles que l’exécution des travaux aurait causés aux intérêts publics qu’il appartiendrait auxdites administrations de protéger.

90      En second lieu, eu égard aux principes rappelés aux points 79 à 81 ci-dessus, il appartenait au pouvoir adjudicateur, lors de la phase de rédaction du projet, de déployer toute la diligence requise, et notamment d’obtenir un consensus préalable sur les solutions envisagées avec les organismes publics ou privés concernés au cours de cette période. Or, si, certes, le Royaume d’Espagne indique que, « dans la plupart des marchés » concernés, les projets initiaux ont été soumis à une évaluation de leur impact sur l’environnement, il ne présente aucun élément permettant de démontrer que ceux-ci ont, à tout le moins, fait l’objet de consultations avec les organismes publics et privés concernés lors de la rédaction de ces projets.

91      Il doit, à cet égard, être souligné, tout d’abord, ainsi que le soulève la Commission, que certains de ces organismes ont émis des avis ou envoyé des demandes seulement après la publication des appels d’offres, ce qui semble indiquer qu’ils n’ont pas été consultés avant la rédaction de ceux-ci.

92      Ensuite, il ressort d’un dossier de presse (Manifiesto del Poblet), remis par les autorités espagnoles à la Commission, lors de l’audition du 23 juin 2010, aux fins de justifier le recours à la procédure négociée sans publication préalable prévue par l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38, que plusieurs organismes publics ont formulé des demandes au pouvoir adjudicateur concernant les projets en cause avant même la publication desdits appels d’offres. Dès lors que de telles demandes sont antérieures à cette publication et à l’attribution des marchés en cause, elles ne sauraient être considérées comme des circonstances imprévues au sens de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38.

93      Enfin, pour ce qui concerne l’argument du Royaume d’Espagne, selon lequel, s’agissant dudit manifeste, « la demande formulée par les municipalités n’a pas été invoquée comme la raison imprévue qui a[vait] justifié la modification du marché, mais comme une circonstance parallèle […], la véritable raison imprévue qui a[vait] déterminé le bien-fondé de la modification du marché [ayant trouvé] son origine dans la modification des conditions géologiques par rapport aux conditions envisagées dans le projet », il y a lieu de considérer qu’il n’est pas étayé par le Royaume d’Espagne. À supposer même que le Royaume d’Espagne se réfère, dans ce contexte, à la prétendue modification des conditions géologiques visée dans la deuxième série de griefs du présent moyen (voir points 96 à 103 ci-après), son argument devrait être rejeté, dès lors que lesdits griefs ne se rapportent pas aux marchés mentionnés au point 78 de la requête. L’argument du Royaume d’Espagne ne saurait, dès lors, prospérer.

94      Il résulte des développements qui précèdent que le Royaume d’Espagne n’a pas démontré que les modifications résultant des demandes adressées à l’entité adjudicatrice par certaines administrations publiques étaient dues à des circonstances imprévues au sens de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38.

95      Les griefs du Royaume d’Espagne doivent donc être rejetés.

 Sur les griefs relatifs aux modifications résultant d’autres circonstances imprévues mises en lumière lors de l’exécution des travaux

96      Le Royaume d’Espagne fait valoir que 28 marchés, visés aux considérants 84, 108, 127 et 136 de la décision attaquée, ont dû être modifiés à la suite d’une « autre série de circonstances d’un autre type, qui ne pouvaient être prévues dans le cadre des projets initiaux y afférents ». En outre, cinq marchés, visés au considérant 108 de la décision attaquée, auraient dû être modifiés en raison du décalage entre la qualité du terrain anticipée au vu des études réalisées et celle effectivement observée, une fois que l’exécution des travaux eut commencé.

97      En premier lieu, force est de constater, s’agissant des 28 marchés mentionnés au point précédent, que le Royaume d’Espagne n’explique ni n’étaye les prétendues circonstances imprévues qui justifieraient le recours à la procédure négociée sans publication préalable, en sorte que, eu égard à la jurisprudence rappelée aux points 80 et 81 ci-dessus, son grief ne saurait prospérer.

98      En second lieu, en ce qui concerne les cinq marchés visés au considérant 108 de la décision attaquée, également mentionnés au point 96 ci-dessus, qui auraient dû être modifiés en raison de la qualité du sol, le Royaume d’Espagne a produit deux études techniques, à savoir, d’une part, une note du 9 mars 2010 rédigée par le Colegio de Ingenieros de Caminos, Canales y Puertos (ordre des ingénieurs des ponts et chaussées espagnol) (ci-après la « note du 9 mars 2010 ») et, d’autre part, un rapport élaboré par l’institut et laboratoire de géotechnique de l’université technologique de Darmstadt (Allemagne) (ci-après le « rapport d’expertise »). Le Royaume d’Espagne se fonde également sur le respect des conditions prévues par la législation nationale.

99      Toutefois, ainsi qu’il a été relevé par la Commission, les observations contenues dans la note du 9 mars 2010 et dans le rapport d’expertise présentent un caractère général, ne sont pas liées au cas concret et ne permettent pas d’établir que les circonstances imprévues justifiant la dérogation existaient effectivement en l’espèce.

100    D’une part, s’agissant de la note du 9 mars 2010, force est de constater que celle-ci comporte un avis général sur les méthodes auxquelles recourt habituellement le pouvoir adjudicateur pour l’élaboration d’études géotechniques concernant la réalisation de projets de plate-forme ferroviaire. Ainsi que le relève à juste titre la Commission, la note du 9 mars 2010 ne contient toutefois pas d’information sur les travaux de prospection et sur les essais qui ont été réalisés sur les terrains sur lesquels il était prévu d’implanter les chantiers en l’espèce, avant la mise en concurrence des marchés initiaux en cause. Elle ne saurait, dès lors, établir l’existence des circonstances imprévues visées à l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38.

101    D’autre part, s’agissant du rapport d’expertise, il doit être relevé que celui-ci est une étude à caractère général de l’interaction entre l’enquête géotechnique et le « risque lié au terrain », et que son auteur s’appuie notamment, à cet égard, sur son expérience relative à des projets d’infrastructures réalisés en Allemagne. Toutefois, le rapport d’expertise ne fournit aucune explication sur les démarches qui ont été entreprises par le pouvoir adjudicateur en l’espèce, lors de la rédaction du projet en cause, aux fins de minimiser un tel risque.

102    À cet égard, et sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur le degré de diligence requise de la part des pouvoirs adjudicateurs dans le cadre de projets tels que ceux en cause en l’espèce, le Royaume d’Espagne ne saurait faire valoir que la note du 9 mars 2010 et le rapport d’expertise établissent que « la technique utilisée par le pouvoir adjudicateur pour la conception du projet initial des contrats a été mise en œuvre avec la plus grande diligence ». En effet, même à supposer que la diligence généralement déployée par le pouvoir adjudicateur ressorte effectivement desdits documents, il n’est pas établi que celui-ci en ait réellement fait preuve, s’agissant spécifiquement des stades de projet en cause en l’espèce.

103    Dès lors que le Royaume d’Espagne ne formule pas le moindre argument visant à contester, de manière spécifique, les conclusions figurant au considérant 108 de la décision attaquée, les griefs soulevés dans le cadre de la présente branche ne sauraient être accueillis.

 Sur les griefs relatifs aux modifications des marchés de services

104    Le Royaume d’Espagne soutient que 21 marchés ont dû être modifiés, dès lors qu’ils auraient été intimement liés à un marché de travaux donné, puisque leur objet se composerait, d’une part, de l’élaboration des projets et, d’autre part, du contrôle et de la réalisation des travaux pendant leur réalisation. Dans un cas tel que celui de l’espèce, dans lequel il aurait été nécessaire d’approuver des modifications de travaux en raison d’événements imprévisibles, il conviendrait d’augmenter en conséquence la durée du délai de prestation du service de contrôle desdits travaux. Le cahier des clauses techniques de ces marchés aurait, dès lors, précisé que, si, une fois expiré le délai prévu pour leur réalisation, les travaux n’étaient pas finis, le marché de services serait prorogé conformément aux conditions prévues dans le cahier des clauses administratives.

105    Il y a lieu de relever, à l’instar de ce qu’a fait la Commission (considérant 84 de la décision attaquée), que la seule référence faite à la prolongation de la durée de l’exécution du marché de travaux lié au marché de services concerné ne constitue pas une circonstance suffisante pour la prolongation du marché de services sans mise en concurrence préalable (voir point 71 ci-dessus). En effet, la seule prorogation des marchés de travaux en cause ne saurait constituer, en elle-même, une circonstance imprévue au sens de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38.

106    En outre, il convient de rejeter l’argument du Royaume d’Espagne fondé sur le fait que les services sur lesquels portait la modification contractuelle s’avéreraient techniquement inséparables de ceux déjà fournis en raison, d’une part, du fait qu’il s’agirait du contrôle des mêmes travaux que ceux faisant précédemment l’objet du contrôle et, d’autre part, du risque d’absence de continuité dans leur fourniture jusqu’à l’acquisition, par le nouvel entrepreneur, des connaissances nécessaires sur la situation des travaux à contrôler. En effet, ainsi que le souligne la Commission sans être contredite par le Royaume d’Espagne, les services en question ne présentent pas de difficultés techniques particulières. En outre, le Royaume d’Espagne n’avance pas d’élément permettant de conclure à l’existence d’une telle complexité des services en cause qui justifierait qu’ils soient confiés à un même prestataire (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 18 mai 1995, Commission/Italie, C‑57/94, Rec. p. I‑1249, point 27, et du 14 septembre 2004, Commission/Italie, C‑385/02, Rec. p. I‑8121, point 21).

107    En tout état de cause, il y a lieu de relever que la clause 24 (« Prolongation du délai d’exécution ») du cahier des clauses administratives particulières du dossier PC 015/00, relative à la prolongation des marchés de services, mentionnée à titre d’exemple par le Royaume d’Espagne (voir point 65 ci-dessus), se réfère expressément à la prolongation du marché de services dans l’hypothèse où le délai d’exécution des travaux faisant l’objet du contrôle serait lui-même prolongé, à la « suite […] des modifications ou des prorogations autorisées ». Or, il résulte des développements qui précèdent que les modifications opérées ne sauraient être considérées comme des modifications ou des prorogations autorisées, en sorte qu’elles ne pouvaient justifier la prolongation automatique du contrat de services concerné.

108    Il s’ensuit que les présents griefs doivent être rejetés ainsi que le moyen dans son ensemble.

109    Il y a lieu, par conséquent, de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

110    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

111    Le Royaume d’Espagne ayant succombé en ses conclusions, il doit être condamné aux dépens, conformément aux conclusions en ce sens de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Royaume d’Espagne est condamné aux dépens.

Truchot

Martins Ribeiro

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 31 janvier 2013.

Signatures

Table des matières


Réglementation de l’Union européenne

Réglementation nationale

Antécédents du litige

Décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré du non-respect du délai prévu à l’article H, paragraphe 2, de l’annexe II du règlement n° 1164/94

Sur le deuxième moyen, tiré de l’application erronée de l’article 20, paragraphe 2, de la directive 93/38

Sur le troisième moyen, invoqué à titre subsidiaire, tiré d’une erreur de droit dans l’application de l’article 20, paragraphe 2, sous f), de la directive 93/38

Sur les griefs relatifs à l’absence de coordination entre les administrations concernées

– Sur les modifications résultant des changements apportés aux PGAU

– Sur les modifications résultant des demandes adressées à l’entité adjudicatrice par diverses administrations publiques

Sur les griefs relatifs aux modifications résultant d’autres circonstances imprévues mises en lumière lors de l’exécution des travaux

Sur les griefs relatifs aux modifications des marchés de services

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’espagnol.