Language of document : ECLI:EU:C:2023:937

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ATHANASIOS RANTOS

présentées le 30 novembre 2023 (1)

Affaire C540/22

SN e.a.

contre

Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid

[demande de décision préjudicielle formée par le rechtbank Den Haag, zittingsplaats Middelburg (tribunal de La Haye, siégeant à Middelbourg, Pays-Bas)]

« Renvoi préjudiciel – Libre prestation des services – Articles 56 et 57 TFUE – Détachement de travailleurs – Détachement de ressortissants ukrainiens par une entreprise établie en Slovaquie pour effectuer des travaux aux Pays-Bas – Durée excédant 90 jours sur une période de 180 jours – Obligation pour les travailleurs détachés d’être titulaires d’un permis de séjour aux Pays-Bas – Limitation de la durée de validité du permis de séjour – Montant des droits relatifs à la demande de permis de séjour – Restriction à la libre prestation des services – Raisons impérieuses d’intérêt général – Proportionnalité »






I.      Introduction

1.        Des travailleurs ukrainiens ont été détachés par un prestataire de services slovaque afin d’effectuer des activités aux Pays-Bas. La durée de ces activités a été prolongée, de sorte qu’elle a dépassé 90 jours sur une période de 180 jours. Dans une telle situation, la réglementation néerlandaise prévoit que les ressortissants d’États tiers doivent être titulaires d’un permis de séjour, assorti de conditions de durée de validité de ce permis et d’un coût pour l’obtention de celui-ci.

2.        Une telle réglementation est-elle conforme aux articles 56 et 57 TFUE ? Telle est, en substance, la question posée par le rechtbank Den Haag, zittingsplaats Middelburg (tribunal de La Haye, siégeant à Middelbourg, Pays-Bas).

3.        Cette question amènera la Cour à préciser sa jurisprudence sur le régime applicable aux ressortissants d’États tiers détachés dans l’Union européenne. Si l’exigence d’être titulaire d’un permis de séjour constitue sans aucun doute une restriction à la libre prestation des services, il conviendra d’examiner dans quelle mesure cette restriction peut répondre à une raison impérieuse d’intérêt général et être proportionnée.

II.    Le cadre juridique

4.        L’article 2, paragraphe 1, de la Wet arbeid vreemdelingen (loi sur le travail des étrangers) (2), du 21 décembre 1994, énonce :

« Il est interdit à un employeur de faire accomplir un travail à un ressortissant étranger aux Pays‑Bas sans être titulaire d’une autorisation d’emploi ou sans que ce ressortissant étranger soit titulaire d’un permis unique pour travailler pour cet employeur. »

5.        L’article 1er du Besluit uitvoering Wet arbeid vreemdelingen (arrêté d’exécution de la loi sur le travail des étrangers), dans sa version applicable à la date des faits au principal, prévoit, à son paragraphe 1 :

« L’interdiction visée à l’article 2, paragraphe 1, de la loi sur le travail des étrangers ne s’applique pas à un ressortissant étranger qui, dans le cadre d’une prestation de services transfrontalière, accomplit temporairement un travail aux Pays‑Bas au service d’un employeur établi en dehors des Pays‑Bas, dans un autre État membre de l’Union européenne, un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou la Suisse, à condition que :

a.      le ressortissant étranger remplisse toutes les conditions de séjour, de permis de travail et de sécurité sociale pour accomplir un travail en qualité de travailleur salarié de l’employeur dans le pays où celui‑ci est établi ;

b.      le ressortissant étranger accomplisse un travail analogue à celui pour lequel il est habilité dans le pays où l’employeur est établi ;

c.      le ressortissant étranger soit seulement le remplaçant d’un autre ressortissant étranger qui a accompli un travail analogue si la durée totale de la prestation de services convenue n’est pas dépassée ; et

d.      l’employeur exerce effectivement des activités substantielles au sens de l’article 6, paragraphe 3, sous a), de la Wet arbeidsvoorwaarden gedetacheerde werknemers in de Europese Unie (loi sur les conditions d’emploi des travailleurs détachés dans l’Union européenne) [(3)]. »

6.        L’article 14 de la wet tot algehele herziening van de Vreemdelingenwet (loi portant révision générale de la loi sur les étrangers) (4), du 23 novembre 2000 (ci-après la « loi sur les étrangers de 2000 »), dispose, à son paragraphe 1 :

« Notre Ministre est habilité :

a.      à approuver, à rejeter ou bien à ne pas prendre en considération la demande visant à obtenir un permis de séjour à durée déterminée ;

[...]

3.      L’octroi d’un permis de séjour à durée déterminée est assorti de restrictions relatives à l’objectif pour lequel le séjour est autorisé. D’autres conditions relatives au permis peuvent également être prévues. [...] »

7.        L’article 3.31a, paragraphe 1, du Besluit tot uitvoering van de Vreemdelingenwet 2000 (Vreemdelingenbesluit 2000) (décret sur les étrangers de 2000) (5), du 23 novembre 2000, est libellé comme suit :

« Le permis de séjour ordinaire à durée déterminée peut être délivré sous réserve d’une restriction liée à l’activité exercée dans le cadre de la prestation de services transfrontalière visée à l’article 4.6 de l’arrêté d’exécution de la loi sur le travail des étrangers de 2022, si la notification visée à l’article 8 [du Besluit arbeidsvoorwaarden gedetacheerde werknemers in de Europese Unie (arrêté relatif aux conditions d’emploi des travailleurs détachés dans l’Union européenne)] a été effectuée, en fournissant les informations prescrites dans cet article et à l’article 11, paragraphe 3, [de l’arrêté relatif aux conditions d’emploi des travailleurs détachés dans l’Union européenne]. »

8.        Aux termes de l’article 3.4, paragraphe 1, point i), du décret sur les étrangers de 2000 :

« Les restrictions visées à l’article 14, paragraphe 3, de la [loi sur les étrangers de 2000] sont liées à :

[...]

i.      la prestation de services transfrontalière. »

9.        L’article 8, paragraphes 1 à 3, de la loi sur les conditions d’emploi des travailleurs détachés dans l’Union européenne énonce :

« 1.      Le prestataire de services qui détache un travailleur aux Pays‑Bas est tenu de le notifier par écrit ou par voie électronique à Notre Ministre avant le début de l’activité. La notification du prestataire de services comprend :

a.      son identité ;

b.      l’identité du destinataire des services et celle du travailleur détaché ;

c.      la personne de contact visée à l’article 7 ;

d.      l’identité de la personne physique ou morale responsable du paiement des salaires ;

e.      la nature et la durée prévue de l’activité ;

f.      l’adresse du lieu de travail ; et

g.      les contributions aux régimes de sécurité sociale applicables.

2.      Si le prestataire de services qui détache un travailleur aux Pays‑Bas fournit, avant le début de l’activité, une copie écrite ou électronique de la notification visée au paragraphe 1 au destinataire des services, celle‑ci comprend au moins les informations relatives à son identité et à celle du travailleur détaché, à l’adresse du lieu de travail ainsi qu’à la nature et à la durée de l’activité.

3.      Le destinataire de la prestation vérifie si la copie de la notification visée au paragraphe 2 comprend les informations mentionnées dans ce paragraphe 2 et notifie toute inexactitude ou le défaut de réception de la copie à Notre Ministre, par écrit ou par voie électronique, au plus tard cinq jours ouvrables après le début de l’activité. »

10.      L’article 3, paragraphe 2, de l’arrêté relatif aux conditions d’emploi des travailleurs détachés dans l’Union européenne prévoit :

« Notre Ministre est habilité et tenu, sur demande, de fournir gratuitement au service de l’immigration et des naturalisations les données relatives aux prestataires de services, aux destinataires de services, aux personnes de contact, aux personnes responsables du paiement des salaires et aux travailleurs détachés, qui ont été traitées en relation avec l’article 8 de la loi, y compris le numéro d’identification national, dans la mesure où ces données sont nécessaires aux fins des tâches liées à l’exécution de la loi sur les étrangers de 2000. »

11.      L’article 11, paragraphe 3, de cet arrêté dispose :

« Le prestataire de services qui détache un ressortissant étranger au sens de l’article 1er de l’arrêté d’exécution de la loi sur le travail des étrangers fournit, en plus des données mentionnées à l’article 8, paragraphe 1, de ladite loi, la date de fin de la période d’emploi régulier mentionnée dans le document sur la base duquel ledit ressortissant étranger est autorisé à accomplir un travail en qualité de travailleur salarié dans l’État membre de délivrance. »

12.      En vertu de l’article 3.58, paragraphe 1, point i), du décret sur les étrangers de 2000 et de la partie B5/3.1 de la Vreemdelingencirculaire 2000 (circulaire de 2000 sur les étrangers) (6), du 2 mars 2001, dans sa version applicable à la date des faits au principal, l’Immigratie- en Naturalisatiedienst (service de l’immigration et de la naturalisation, Pays-Bas, ci-après l’« IND ») délivre le permis de séjour relatif à une prestation de services transfrontalière pour une durée de validité égale à la durée de l’activité visée à l’article 1er, paragraphe 2, de l’arrêté d’exécution de la loi sur le travail des étrangers.

13.      L’article 3.34 du Voorschrift Vreemdelingen 2000 (règlement de 2000 sur les étrangers) (7), du 18 décembre 2000, énonce qu’un ressortissant étranger qui n’est pas titulaire d’une autorisation de séjour provisoire valable pour l’objectif visé par la demande de séjour est redevable de droits au titre du traitement d’une demande d’octroi, de modification ou de renouvellement d’un permis de séjour pour la prestation de services transfrontalière.

III. Le litige au principal, les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

14.      Les requérants, de nationalité ukrainienne, sont titulaires d’un permis de séjour temporaire slovaque aux fins d’un emploi. Ils travaillent pour la société slovaque ROBI spol s. r. o., qui les a détachés auprès d’un donneur d’ordre néerlandais, à savoir la société Ivens NV, pour exécuter des activités métallurgiques dans le port de Rotterdam (Pays-Bas). ROBI a, au préalable, notifié à l’Uitvoeringsinstituut werknemersverzekeringen (Institut de gestion des assurances pour les travailleurs salariés, Pays‑Bas) les activités que devaient exercer les requérants et la période pendant laquelle ils devaient les accomplir (8). Par la suite, ROBI a notifié aux autorités néerlandaises que ces activités allaient avoir une durée supérieure à celle prévue à l’article 21, paragraphe 1, de la convention d’application de l’accord de Schengen (9), au terme duquel « [l]es étrangers titulaires d’un titre de séjour délivré par un des États membres peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d’un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pour une durée n’excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours sur le territoire des autres États membres, pour autant qu’ils remplissent les conditions d’entrée visées à l’article 5, paragraphe 1, points a), c) et e), du règlement (CE) no 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) [(10)] et qu’ils ne figurent pas sur la liste de signalement nationale de l’État membre concerné ».

15.      Dans ce contexte, ROBI a introduit auprès de l’IND des demandes afin que chacun des requérants se voient accorder un permis de séjour pour cette prestation de services transfrontalière et pour le traitement desquelles des droits ont été perçus. L’IND, au nom du Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (secrétaire d’État à la Justice et à la Sécurité, Pays-Bas) (ci-après le « secrétaire d’État »), a décidé de délivrer aux requérants des permis de séjour ordinaires à durée déterminée assortis de la restriction relative à la prestation de services transfrontalière, en précisant que le travail en lien avec ces demandes n’était pas subordonné à l’obtention d’une autorisation d’emploi. En outre, la durée de validité de ces permis de séjour a été limitée à la durée de validité des permis de séjour temporaire slovaques aux fins d’un emploi, avec la conséquence qu’elle était inférieure à la durée des activités pour lesquelles les requérants ont été détachés.

16.      Les requérants ont introduit des réclamations contre ces décisions auprès de l’IND, qui a examiné celles-ci au nom du secrétaire d’État. Ces réclamations ont visé l’obligation, en tant que telle, de demander un permis de séjour pour la prestation de services transfrontalière, la durée de validité des permis de séjour délivrés ainsi que les droits dus pour le traitement des demandes de ces permis. Le 16 mars 2021, lesdites réclamations ont été examinées par le comité d’audition administrative de l’IND. Le 7 avril 2021, par 44 décisions distinctes, le secrétaire d’État a déclaré non fondées les réclamations des requérants.

17.      Ces derniers ont formé un recours contre ces décisions devant le rechtbank Den Haag, zittingsplaats Middelburg (tribunal de La Haye, siégeant à Middelbourg, Pays-Bas), la juridiction de renvoi. Devant cette juridiction, les requérants et le secrétaire d’État ont débattu de l’obligation, pour les travailleurs ressortissants d’États tiers employés par un prestataire de services établi dans un État membre de détenir, outre un permis de séjour dans cet État membre, un permis de séjour pour séjourner dans un autre État membre dans le cadre d’une prestation de services transfrontalière après l’expiration de la période de 90 jours visée à l’article 21, paragraphe 1, de la CAAS. Ils ont également discuté de la circonstance selon laquelle la durée des permis de séjour délivrés par les Pays-Bas soit limitée à la durée de validité des permis de séjour slovaques, cette durée étant en outre de deux ans au maximum, ainsi que du montant des droits à acquitter pour le traitement des demandes de permis de séjour aux Pays-Bas.

18.      La juridiction de renvoi souligne que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 septembre 2006, Commission/Autriche (C‑168/04, EU:C:2006:595, points 31 et 32), la Commission européenne a fait valoir que, dans le cadre de la libre prestation des services, tout prestataire de services transmet à ses employés le « droit dérivé » de recevoir un permis de séjour pour la durée nécessaire à la prestation et que la décision relative au droit de séjour (à savoir, dans cette affaire, l’octroi d’un visa) aurait un caractère purement formel et devrait être reconnu de manière automatique.

19.      Cette juridiction se demande si le droit à la libre prestation des services, tel que prévu aux articles 56 et 57 TFUE, ne confère pas également un droit de séjour dérivé aux travailleurs détachés dans le cadre d’une prestation de services transfrontalière. Il ressortirait du point 59 de cet arrêt que tel n’est pas le cas dans la mesure où la matière relative à l’entrée et au séjour des ressortissants d’États tiers sur le territoire d’un État membre, dans le cadre d’un détachement opéré par une entreprise prestataire de services établie dans un autre État membre, n’est pas harmonisée au niveau de l’Union. Néanmoins, selon ladite juridiction, l’obligation découlant de l’article 56 TFUE d’éliminer toute entrave à la libre prestation des services permettrait de soutenir que l’emploi, dans un État membre, de travailleurs ressortissants d’États tiers salariés d’un prestataire de services établi dans un autre État membre, cet emploi étant autorisé dans le cadre de la libre circulation des services, ne saurait être subordonné à la possession d’un permis de séjour individuel, dès lors que cette obligation complique inutilement la prestation de services au moyen du détachement de travailleurs ressortissants d’États tiers.

20.      La juridiction de renvoi relève que, toujours dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 septembre 2006, Commission/Autriche (C‑168/04, EU:C:2006:595, point 20), la Commission a soutenu, en outre, que l’existence d’une double procédure (à savoir, dans cette affaire, celle du visa et celle de la confirmation de détachement) constituait, en elle-même, une restriction disproportionnée au principe de la libre prestation des services. En l’occurrence, la réglementation néerlandaise se caractériserait également par l’existence d’une double procédure dans la mesure où, d’une part, les travailleurs ressortissants d’États tiers détachés aux Pays-Bas par un prestataire établi dans un autre État membre doivent faire l’objet d’une notification par ce prestataire, tandis que, d’autre part, ces travailleurs doivent demander séparément, sur la base des mêmes informations que celles fournies pour cette notification, un permis de séjour aux Pays-Bas.

21.      Selon cette juridiction, de surcroît, si l’exigence d’un permis de séjour n’est pertinente que postérieurement à l’expiration d’une période de 90 jours, une telle exigence aurait l’effet d’une autorisation préalable dans le cas où la prestation de services dépasserait cette période. La circonstance selon laquelle l’IND se borne à vérifier si une notification a été effectuée conformément à l’article 8 de la loi sur les conditions d’emploi des travailleurs détachés dans l’Union européenne et n’impose pas de conditions supplémentaires ne signifierait pas pour autant que cette double procédure n’entraîne pas, dans les faits, une restriction à la libre prestation des services. Le fait que, dans la pratique, il soit statué sur la délivrance d’un permis de séjour dans un bref délai n’y changerait rien.

22.      Ladite juridiction ajoute que le caractère restrictif de la procédure distincte d’obtention d’un permis de séjour pour la prestation de services transfrontalière serait corroboré par le fait que la durée de validité de ce permis est limitée par la réglementation nationale à la durée de l’activité, sans pouvoir dépasser deux années. Si la durée de la prestation de services est plus longue que celle initialement prévue ou le maximum fixé, il y aurait alors lieu de présenter une nouvelle demande d’octroi de permis de séjour ou de prolongation de la durée de validité de celui-ci.

23.      Enfin, pour chaque demande de permis de séjour, le demandeur serait tenu de payer les droits fixés par la réglementation nationale, dont le montant est égal aux droits dus pour l’obtention d’un permis de séjour aux fins d’un emploi tel qu’il peut être accordé aux ressortissants d’États tiers. En revanche, il serait cinq fois plus élevé que les droits dus pour la délivrance d’un certificat de séjour régulier à un citoyen de l’Union. Les montants de ces droits seraient ajustés périodiquement et, pour les requérants, selon leur situation, ils se seraient élevés à 290 ou à 320 euros, tandis que le montant de ceux-ci serait fixé à présent à 345 euros.

24.      Dans ces conditions, le rechtbank Den Haag, zittingsplaats Middelburg (tribunal de La Haye, siégeant à Middelbourg) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      La libre prestation des services garantie par les articles 56 et 57 TFUE comprend‑elle un droit de séjour dans un État membre dérivé de ce droit pour les travailleurs ressortissants de pays tiers qui peuvent être employés dans cet État membre par un prestataire de services établi dans un autre État membre ?

2)      Si cette question appelle une réponse négative, l’article 56 TFUE s’oppose-t-il, dans l’hypothèse où la durée de la prestation de services dépasse trois mois, à l’obligation de demander un permis de séjour pour chaque travailleur individuel en sus de la simple obligation de notification incombant au prestataire de services ?

3)      Si cette question appelle une réponse négative, l’article 56 TFUE s’oppose-t-il :

a)      à une disposition de droit national selon laquelle la durée de validité d’un tel permis de séjour ne peut dépasser deux ans, quelle que soit la durée de la prestation de services ?

b)      à ce que la durée de validité d’un tel permis de séjour soit limitée à la durée de validité du permis de travail et de séjour dans l’État membre dans lequel le prestataire de services est établi ?

c)      au prélèvement de droits à chaque demande (ou chaque demande de renouvellement) dont le montant est égal à celui des droits dus au titre d’un permis ordinaire aux fins de l’exercice d’un emploi par un ressortissant de pays tiers, mais est cinq fois plus élevé que le montant des droits dus au titre d’un certificat de séjour régulier pour un citoyen de l’Union ? »

25.      Des observations écrites ont été déposées par les requérants, les gouvernements néerlandais, belge et norvégien, ainsi que la Commission. Ces mêmes parties, à l’exception du gouvernement belge, ont également présenté des observations orales lors de l’audience de plaidoiries qui s’est tenue le 21 septembre 2023.

IV.    Analyse

26.      Par ses trois questions préjudicielles, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 56 et 57 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale selon laquelle, dans la situation où un prestataire de services établi dans un État membre détache des travailleurs ressortissants d’États tiers dans un autre État membre pour une durée excédant 90 jours sur une période de 180 jours, ces travailleurs soient tenus d’être titulaires d’un permis de séjour individuel dans ce second État membre, dont la durée est limitée à la durée de validité du permis de séjour et de travail accordé dans le premier État membre et, en tout état de cause, à deux ans, et dont l’octroi est soumis à l’acquittement de droits égaux à ceux dus au titre d’un permis ordinaire aux fins de l’exercice d’un emploi par un ressortissant d’un État tiers.

27.      Dans l’affaire au principal, des travailleurs ukrainiens ont été détachés par une société slovaque afin d’effectuer des activités métallurgiques aux Pays-Bas. La réglementation néerlandaise exige que les travailleurs ressortissants d’États tiers soient titulaires d’un permis de séjour lorsque les activités dépassent la durée prévue à l’article 21, paragraphe 1, de la CAAS, soit 90 jours sur toute période de 180 jours. La juridiction de renvoi cherche à savoir si cette réglementation, ainsi que les conditions qu’elle prévoit, relatives à la durée du permis de séjour et au montant des droits à acquitter, sont conformes au droit de l’Union.

28.      À titre liminaire, je relève que, aux termes du considérant 20 de la directive 96/71/CE (11), celle-ci ne porte pas « atteinte aux législations nationales relatives aux conditions d’entrée, de résidence et d’emploi de travailleurs ressortissant de pays tiers ». Dans ces conditions, comme l’a souligné la juridiction de renvoi, la réglementation néerlandaise en cause au principal doit être examinée au regard du traité FUE.

29.      Selon une jurisprudence constante de la Cour, l’activité consistant, pour une entreprise, à mettre à disposition, contre rémunération, de la main-d’œuvre qui reste au service de cette entreprise sans qu’aucun contrat de travail soit conclu avec l’utilisateur constitue une activité professionnelle qui réunit les conditions fixées à l’article 57, premier alinéa, TFUE et doit, dès lors, être considérée comme un service au sens de cette disposition (12). En outre, d’une part, une prestation de services entre deux entreprises établies dans deux États membres différents relève du champ d’application des articles 56 et 57 TFUE et, d’autre part, la circonstance que la mise à disposition de la main-d’œuvre en cause concerne des travailleurs ressortissants d’États tiers est dépourvue d’incidence à cet égard (13).

30.      Il ressort également de la jurisprudence de la Cour que la libre prestation des services, prévue à l’article 56 TFUE, exige non seulement l’élimination de toute discrimination à l’égard du prestataire de services établi dans un autre État membre en raison de sa nationalité, mais également la suppression de toute restriction, même si elle s’applique indistinctement aux prestataires nationaux et à ceux des autres États membres, lorsqu’elle est de nature à prohiber, à gêner ou à rendre moins attrayantes les activités du prestataire établi dans un autre État membre où il fournit légalement des services analogues (14). Par ailleurs, il importe de rappeler que la matière relative au détachement de travailleurs salariés ressortissants d’un État tiers dans le cadre d’une prestation de services transfrontalière n’est pas, à ce jour, harmonisée au niveau de l’Union (15). Il en résulte que, dans cette matière, les États membres disposent d’une marge d’appréciation dans la détermination des conditions applicables à un tel détachement. Toutefois, selon la jurisprudence de la Cour, le contrôle qu’exerce un État membre en ce qui concerne ladite matière ne saurait remettre en cause la liberté de prestation des services de l’entreprise qui emploie ces ressortissants (16).

31.      En l’occurrence, l’affaire au principal concernant des travailleurs ukrainiens détachés, il me paraît utile d’examiner préalablement leur droit d’entrée et de séjour dans l’Union dans la situation actuelle. À cet égard, je relève que, aux termes de l’article 2 de la décision d’exécution (UE) 2022/382 (17), celle-ci s’applique aux « personnes déplacées d’Ukraine le 24 février 2022 ou après cette date, à la suite de l’invasion militaire par les forces armées russes qui a commencé à cette date », au nombre desquelles figurent les ressortissants ukrainiens résidant en Ukraine avant le 24 février 2022, qui peuvent bénéficier de la protection temporaire. Cependant, il y a lieu de noter que, d’une part, eu égard à la date des faits au principal, les requérants sont entrés dans l’Union avant la date du 24 février 2022 et que, d’autre part, et en tout état de cause, ils ne sollicitent pas une protection temporaire.

32.      Par ailleurs, il ressort de l’annexe II du règlement (UE) 2018/1806 (18) que l’Ukraine figure dans la liste des pays tiers dont les ressortissants sont exemptés de l’obligation de visa lors du franchissement des frontières extérieures des États membres pour des séjours dont la durée n’excède pas 90 jours sur toute période de 180 jours. Or, l’affaire au principal concerne l’obligation d’être titulaire d’un permis de séjour aux Pays-Bas après cette durée de 90 jours. Par conséquent, il convient de constater que ces instruments juridiques ne sont pas de nature à conférer une situation spécifique aux requérants au regard de cette obligation de détenir un tel permis de séjour.

33.      Afin de répondre aux interrogations de la juridiction de renvoi, j’examinerai la question de l’existence d’un « droit de séjour dérivé » pour les travailleurs ressortissants d’États tiers détachés dans un État membre puis celle de la conformité à l’article 56 TFUE de la réglementation d’un État membre exigeant que les travailleurs ressortissants d’États tiers détachés soient titulaires d’un permis de séjour lorsque la prestation des services excède une durée de 90 jours sur 180 jours, dans les conditions prévues par cette réglementation.

A.      Sur l’existence d’un « droit de séjour dérivé » pour les travailleurs ressortissants d’États tiers détachés dans un État membre

34.      La juridiction de renvoi cherche à savoir si la libre prestation des services garantie par les articles 56 et 57 TFUE comprend l’attribution d’un « droit de séjour dérivé » pour les travailleurs ressortissants d’États tiers lorsqu’ils sont employés dans un État membre par un prestataire de services établi dans un autre État membre.

35.      À cet égard, il convient de rappeler que la Cour a reconnu, dans certains cas, que des ressortissants d’États tiers, membres de la famille d’un citoyen de l’Union, qui ne pouvaient pas bénéficier, sur le fondement des dispositions de la directive 2004/38/CE (19), d’un droit de séjour dérivé dans l’État membre dont ce citoyen possède la nationalité, pouvaient toutefois se voir reconnaître un tel droit sur le fondement de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, aux termes duquel tout citoyen de l’Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et des conditions prévues par les traités et par les dispositions prises pour leur application (20). Cette considération est tirée d’une jurisprudence constante, selon laquelle, en substance, en l’absence d’un tel droit de séjour dérivé au profit d’un tel ressortissant d’État tiers, le citoyen de l’Union serait dissuadé de quitter l’État membre dont il a la nationalité afin d’exercer son droit de séjour, en vertu de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, dans un autre État membre, en raison du fait qu’il n’a pas la certitude de pouvoir poursuivre dans l’État membre dont il est originaire une vie de famille développée ou consolidée, avec ledit ressortissant d’État tiers, dans l’État membre d’accueil à l’occasion d’un séjour effectif (21).

36.      Cette jurisprudence ne peut s’appliquer par analogie dans le domaine de la libre prestation des services. En effet, tout d’abord, le droit de séjour dérivé conféré au titre de l’article 21, paragraphe 1, TFUE a pour fondement le droit d’une personne physique, citoyen de l’Union, de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres. Or, en l’occurrence, le prestataire de services est une personne morale, qui ne dispose pas d’un droit de séjour dans un autre État membre, duquel dériverait le droit de séjour des travailleurs ressortissants d’États tiers qu’il emploie.

37.      Ensuite, le droit de séjour dérivé du droit de séjour d’un citoyen de l’Union concerne des personnes bien déterminées, à savoir les membres de la famille de celui-ci, avec lesquelles il entretient une relation personnelle et unique. En revanche, un prestataire de services, personne morale, n’est pas lié à des personnes spécifiques pour effectuer la prestation de services. Il peut ainsi engager des travailleurs ressortissants d’États tiers pour commencer la réalisation de la prestation de services, puis ensuite d’autres travailleurs de tels États pour achever celle-ci, tous ces travailleurs retournant dans leur pays d’origine ou de résidence après l’accomplissement de leur mission (22).

38.      Enfin, comme le relève la juridiction de renvoi (23), la Commission a déjà invoqué l’existence d’un « droit de séjour dérivé » pour les travailleurs ressortissants d’États tiers détachés dans un État membre dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 septembre 2006, Commission/Autriche (C‑168/04, EU:C:2006:595). Cependant, cette approche n’a pas été retenue dans cet arrêt. En effet, la Cour a suivi le raisonnement consistant à examiner si la réglementation nationale concernée était conforme à l’article 56 TFUE au regard de sa jurisprudence constante en matière de restriction à la libre prestation des services (24), sans faire mention de l’existence d’un droit de séjour dérivé.

39.      Par conséquent, je suis d’avis que la libre prestation des services garantie par les articles 56 et 57 TFUE ne comprend pas l’attribution d’un « droit de séjour dérivé » pour les travailleurs ressortissants d’États tiers lorsqu’ils sont employés dans un État membre par un prestataire de services établi dans un autre État membre. Cependant, le fait que ces travailleurs ne disposent pas d’un tel droit de séjour dérivé n’exclut pas que, sur une autre base juridique, ils pourraient disposer d’un permis de séjour dans le cadre d’une prestation de services transfrontalière.

B.      Sur la conformité à l’article 56 TFUE de la réglementation d’un État membre exigeant que les travailleurs ressortissants d’États tiers détachés soient titulaires d’un permis de séjour lorsque la prestation des services excède une durée de 90 jours sur 180 jours, dans les conditions prévues par cette réglementation

40.      La juridiction de renvoi souligne que la réglementation néerlandaise en cause au principal se caractérise par l’existence d’une double procédure dans la mesure où, d’une part, les travailleurs ressortissants d’États tiers détachés aux Pays-Bas par un prestataire établi dans un autre État membre doivent faire l’objet d’une notification par ce prestataire, tandis que, d’autre part, ces travailleurs doivent demander séparément, sur la base des mêmes informations que celles fournies pour la notification, un permis de séjour aux Pays-Bas. Cette juridiction exprime des doutes quant à la conformité avec le droit de l’Union de cette double procédure au regard de l’arrêt du 21 septembre 2006, Commission/Autriche (C‑168/04, EU:C:2006:595). À cet égard, il convient de distinguer, d’une part, l’obligation de notification par le prestataire de services et, d’autre part, l’obligation pour les travailleurs ressortissants d’États tiers d’être titulaires d’un permis de séjour dans l’État membre de détachement.

1.      Sur l’obligation de notification par le prestataire de services

41.      S’agissant de l’obligation de notification par le prestataire de services, la Cour a déjà jugé que, dans le cas du détachement de travailleurs d’un État tiers par une entreprise prestataire de services établie dans un État membre de l’Union, une réglementation nationale qui subordonne la fourniture de prestations de services sur le territoire national, par une entreprise établie dans un autre État membre, à la délivrance d’une autorisation administrative constitue une restriction à la libre prestation des services, au sens de l’article 56 TFUE (25).

42.      La Cour a précisé que l’obligation faite à une entreprise prestataire de services de fournir aux autorités de l’État membre de détachement les indications attestant que les travailleurs ressortissants d’États tiers sont en situation régulière, notamment en termes de résidence, d’autorisation de travail et de couverture sociale, dans l’État membre où cette entreprise les emploie, offrirait auxdites autorités, de manière moins restrictive et aussi efficace que l’exigence d’une autorisation de travail, des garanties quant à la régularité de la situation de ces travailleurs et au fait que ceux-ci exercent leur activité principale dans l’État membre où est établie l’entreprise prestataire de services (26). À cet égard, il est certainement dans l’intérêt tant de l’État membre d’accueil que de l’entreprise prestataire d’avoir, préalablement au détachement, l’assurance que les travailleurs ressortissants d’un État tiers sont détachés dans des conditions légales (27).

43.      Selon la Cour, l’obligation de fournir ces indications pourrait consister en une simple déclaration préalable, qui permettrait aux autorités de l’État membre de détachement de contrôler lesdites indications et de prendre les mesures nécessaires en cas d’irrégularité de la situation des travailleurs concernés. En outre, cette obligation pourrait prendre la forme d’une notification succincte des documents requis, notamment lorsque la durée du détachement ne permet pas d’exercer un tel contrôle de manière efficace (28). De même, l’obligation faite à une entreprise prestataire de services de signaler au préalable, aux autorités de l’État membre de détachement, la présence d’un ou de plusieurs travailleurs salariés détachés, la durée prévue de cette présence et la ou les prestations de services justifiant le détachement constituerait une mesure aussi efficace et moins restrictive que l’exigence d’une autorisation de travail. Elle serait de nature à permettre à ces autorités de contrôler le respect de la réglementation sociale de cet État membre pendant la durée du détachement en tenant compte des obligations auxquelles cette entreprise est déjà soumise en vertu des règles de droit social applicables dans l’État membre d’origine. Une telle obligation permettrait auxdites autorités de prendre, le cas échéant, les mesures qui s’imposent au terme de la période prévue de détachement (29).

44.      En l’occurrence, il n’est pas contesté que l’obligation de notification prévue par la réglementation néerlandaise respecte les conditions énoncées par la jurisprudence citée aux points 42 et 43 des présentes conclusions. En ce sens, il ressort de la décision de renvoi que ROBI a notifié au préalable aux autorités néerlandaises les activités que devaient exercer les requérants et la période pendant laquelle ils devaient les accomplir. La juridiction de renvoi a également précisé que l’IND se borne à vérifier si une notification a été effectuée conformément à l’article 8 de la loi sur les conditions d’emploi des travailleurs détachés dans l’Union européenne, sans imposer de conditions supplémentaires (30). Par conséquent, sous réserve des vérifications qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’effectuer, l’obligation de notification par le prestataire de services ne semble pas contraire à l’article 56 TFUE.

2.      Sur l’obligation pour les travailleurs ressortissants d’États tiers d’être titulaires d’un permis de séjour dans l’État membre de détachement

45.      En ce qui concerne l’obligation pour les travailleurs ressortissants d’États tiers d’être titulaires d’un permis de séjour dans l’État membre de détachement, il convient de relever que, en l’occurrence, à la date de la notification effectuée par le prestataire de services, il était prévu que la durée des activités aux Pays-Bas soit inférieure à celle visée à l’article 21, paragraphe 1, de la CAAS. Conformément à cette disposition, étant titulaires d’un permis de séjour aux fins d’un emploi délivré par la République slovaque, ces travailleurs pouvaient circuler librement pour une durée n’excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours sur le territoire des autres États membres, notamment aux Pays-Bas (31).

46.      Cependant, le prestataire de services a par la suite informé les autorités néerlandaises que la durée de ces activités était prolongée, de sorte qu’elles ont dépassé 90 jours, et ce prestataire a demandé que chacun des requérants se voit attribuer un permis de séjour aux Pays-Bas. Il ressort de la décision de renvoi que le secrétaire d’État a fait droit à ces demandes, en limitant la durée de validité des permis de séjour à la durée de validité des permis de séjour slovaques, à savoir pour une durée inférieure à celle des activités pour lesquelles les requérants ont été détachés, et en prélevant des droits pour chacune des demandes de titre de séjour. Les requérants ont contesté, au regard du droit de l’Union, à la fois le principe selon lequel ils avaient l’obligation de demander un permis de séjour, la durée de validité de ces permis ainsi que le montant des droits à acquitter.

47.      À cet égard, comme le reconnaît le gouvernement néerlandais dans ses observations écrites, une réglementation nationale qui subordonne l’exercice de prestations de services sur le territoire national, par une entreprise établie dans un autre État membre, à la délivrance de permis de séjour pour les ressortissants d’États tiers constitue une restriction à cette liberté au sens de l’article 56 TFUE. Toutefois, selon une jurisprudence constante de la Cour, une réglementation nationale qui relève d’un domaine n’ayant pas fait l’objet d’une harmonisation au niveau de l’Union et qui s’applique indistinctement à toute personne ou entreprise exerçant une activité sur le territoire de l’État membre concerné peut, en dépit de son effet restrictif pour la libre prestation des services, être justifiée pour autant qu’elle répond à une raison impérieuse d’intérêt général et que cet intérêt n’est pas déjà sauvegardé par les règles auxquelles le prestataire est soumis dans l’État membre où il est établi, qu’elle est propre à garantir la réalisation de l’objectif qu’elle poursuit et qu’elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre celui-ci (32).

48.      La Cour a précisé que, si le souci d’éviter des perturbations sur le marché de l’emploi constitue, certes, une raison impérieuse d’intérêt général, les travailleurs employés par une entreprise établie dans un État membre et qui sont détachés dans un autre État membre en vue d’y effectuer une prestation de services ne prétendent cependant pas accéder au marché de l’emploi de ce second État, dès lors qu’ils retournent dans leur pays d’origine ou de résidence après l’accomplissement de leur mission. Toutefois, un État membre peut vérifier que l’entreprise établie dans un autre État membre, qui détache sur son territoire des travailleurs d’un État tiers, ne se sert pas de la liberté de prestation des services dans un but autre que l’accomplissement de la prestation concernée. De telles vérifications doivent cependant respecter les limites que pose le droit de l’Union, et notamment celles découlant de la liberté de prestation des services, qui ne peut être rendue illusoire et dont l’exercice ne peut être soumis à la discrétion de l’administration (33).

49.      Par conséquent, si un État membre doit se voir reconnaître tant la faculté de vérifier qu’une entreprise établie dans un autre État membre, fournissant à une entreprise utilisatrice établie dans le premier État membre un service consistant en la mise à disposition de travailleurs ressortissants d’États tiers, ne se sert pas de la liberté de prestation des services à d’autres fins que la fourniture du service concerné, que la possibilité de prendre les mesures de contrôle nécessaires à cet égard, l’exercice de cette faculté ne saurait toutefois permettre à cet État membre d’imposer des exigences disproportionnées (34). Par ailleurs, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 43 des présentes conclusions, les autorités nationales de l’État membre de détachement sont en droit de contrôler le respect de la réglementation sociale pendant la durée du détachement en tenant compte des obligations auxquelles cette entreprise est déjà soumise en vertu des règles de droit social applicables dans l’État membre d’origine.

50.      Selon la juridiction de renvoi, la réglementation néerlandaise en cause se caractériserait par une double procédure, à savoir l’obligation de notification, d’une part, et l’obligation d’être titulaire d’un permis de séjour, d’autre part. Je ne partage pas cette considération, dans la mesure où la notification et l’exigence d’être titulaire d’un permis de séjour interviennent à des stades différents du détachement et ont des objectifs distincts. En effet, si la durée des activités est inférieure à 90 jours sur toute période de 180 jours, seule est nécessaire la notification préalable par le prestataire de services, laquelle consiste à fournir aux autorités de l’État membre de détachement les indications attestant que les travailleurs ressortissants d’États tiers sont en situation régulière, notamment en termes de résidence, d’autorisation de travail et de couverture sociale, dans l’État membre où cette entreprise les emploie (35). L’obligation pour chaque travailleur ressortissant d’un État tiers de détenir un permis de séjour est uniquement liée au dépassement de cette période de 90 jours. En ce sens, l’obligation d’obtenir un tel permis de séjour ne peut être considérée comme équivalent à une exigence d’une autorisation préalable et elle ne peut être source de retards préjudiciables pour le prestataire de services (36).

51.      Dans ses observations écrites, le gouvernement néerlandais a fait valoir que l’obligation de notification par le prestataire de services permet aux autorités néerlandaises de vérifier que la liberté de prestation des services n’est pas utilisée à d’autres fins que la fourniture du service concerné et que la réglementation sociale nationale est respectée pendant le détachement. Toutefois, cette obligation de notification ne régirait pas le droit de séjour des travailleurs ressortissants d’États tiers.

52.      Je relève que, en l’absence de « droit de séjour dérivé » conféré aux travailleurs ressortissants d’États tiers détachés et dans le cas d’un séjour dont la durée excède 90 jours sur toute période de 180 jours, ces travailleurs ne disposent plus alors d’un droit de séjour aux Pays-Bas sur le fondement de l’article 21, paragraphe 1, de la CAAS. Selon le gouvernement néerlandais, l’obligation d’obtenir un permis de séjour aux Pays-Bas après une durée excédant 90 jours sur toute période de 180 jours vise à éviter que ces travailleurs séjournent illégalement dans cet État membre. À cet égard, le considérant 6 du règlement (UE) 2016/399 (37) énonce que « [l]e contrôle aux frontières n’existe pas seulement dans l’intérêt de l’État membre aux frontières extérieures duquel il s’exerce, mais dans l’intérêt de l’ensemble des États membres ayant aboli le contrôle aux frontières à leurs frontières intérieures. Le contrôle aux frontières devrait contribuer à la lutte contre l’immigration illégale et la traite des êtres humains, ainsi qu’à la prévention de toute menace sur la sécurité intérieure, l’ordre public, la santé publique et les relations internationales des États membres » (38). En outre, comme il ressort de l’article 6, paragraphe 1, de ce règlement, les ressortissants des pays tiers peuvent uniquement séjourner sur le territoire de l’espace Schengen pour une durée maximale de 90 jours sur une période de 180 jours (39).

53.      Par ailleurs, dans le cadre de l’application de la décision no 1/80 (40), la Cour a jugé que l’objectif de prévenir l’entrée et le séjour irréguliers constitue une raison impérieuse d’intérêt général (41). Je suis d’avis que cette jurisprudence peut s’appliquer par analogie à la matière relative au détachement de travailleurs ressortissants d’un État tiers dans le cadre d’une prestation de services transfrontalière, laquelle n’est pas, à ce jour, harmonisée au niveau de l’Union (42).

54.      Selon la Commission, l’octroi d’un permis de séjour aux travailleurs ressortissants d’États tiers détachés dans un État membre devrait constituer un acte déclaratoire et non un acte constitutif. Cependant, je considère que, dès lors qu’il appartient aux États membres de réglementer le droit de séjour de ces travailleurs, l’État membre concerné peut opérer des vérifications avant d’accorder un permis de séjour individuel auxdits travailleurs.

55.      Il ressort de la décision de renvoi que, selon le secrétaire d’État, la procédure d’obtention d’un permis de séjour est simple en ce sens que le prestataire de service dispose déjà des documents nécessaires et que le contrôle consiste à vérifier si une notification a été faite et s’il existe un permis de travail, un permis de séjour et un contrat de travail dans l’autre État membre. Dans ses observations écrites, le gouvernement néerlandais fait valoir que, en outre, l’identité du travailleur ressortissant d’un État tiers est vérifiée afin de déterminer si le travailleur mentionné sur le contrat de travail est la même personne que le demandeur du permis de séjour. Les autorités nationales vérifieraient également si ce travailleur représente une menace pour l’ordre public ou la sécurité nationale.

56.      Il appartient à la juridiction de renvoi d’examiner si ces vérifications respectent les limites que pose le droit de l’Union, et notamment celles découlant de la liberté de prestation des services, qui ne peut être rendue illusoire et dont l’exercice ne peut être soumis à la discrétion de l’administration (43). Notamment, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, les motifs liés à l’ordre public ne peuvent être invoqués qu’en cas de menace réelle et suffisamment grave, affectant un intérêt fondamental de la société, et ne sauraient, en outre, servir à des fins purement économiques (44).

57.      Dans l’hypothèse où ces conditions sont remplies, à savoir que les vérifications opérées par l’État membre de détachement respectent le principe de proportionnalité, je suis d’avis que les articles 56 et 57 TFUE ne s’opposent pas à ce qu’un permis de séjour individuel soit demandé pour chaque travailleur ressortissant d’un État tiers détaché dans le cadre d’une prestation de service transfrontalière lorsque cette prestation excède une période de 90 jours sur toute période de 180 jours et que le prestataire de services a rempli son obligation de notification.

3.      Sur la durée de validité du permis de séjour

58.      Il ressort de la décision de renvoi que, selon la réglementation néerlandaise en cause, la durée de validité du permis de séjour délivré à un travailleur ressortissant d’un État tiers détaché aux Pays-Bas est limitée à la durée de validité du permis de travail et de séjour attribué dans l’État membre dans lequel le prestataire de services est établi et que, en tout état de cause, la durée de validité d’un tel permis de séjour ne peut dépasser deux ans, quelle que soit la durée de la prestation de services.

59.      La Commission soutient que la durée de validité maximale de deux ans qui, comme l’a confirmé le gouvernement néerlandais dans ses observations écrites, repose sur le fait qu’un travailleur détaché reste soumis à la réglementation en matière de sécurité sociale de son État membre d’origine, est disproportionnée et qu’une mesure moins restrictive et tout aussi efficace consisterait à faire correspondre la durée du permis de séjour à la durée de la mission, sans imposer une durée maximale. La Commission a ajouté que, en cas de détachement de travailleurs ressortissants d’États tiers, la validité du permis de séjour pourrait également être limitée à la durée de validité des permis de travail et de séjour dont sont titulaires ces travailleurs dans l’État membre d’origine.

60.      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, la notion de « service », au sens du traité FUE, peut couvrir des services de nature très différente, y compris des services qu’un opérateur économique établi dans un État membre fournit de manière plus ou moins fréquente ou régulière, même sur une période prolongée, à des personnes établies dans un ou plusieurs autres États membres. Aucune disposition du traité FUE ne permet de déterminer, de manière abstraite, la durée ou la fréquence à partir de laquelle la fourniture d’un service ou d’un certain type de service dans un autre État membre ne peut plus être considérée comme une prestation de services au sens du traité FUE (45).

61.      Par conséquent, une prestation de service transfrontalière, au sens du droit de l’Union, peut durer plusieurs années (46). Cependant, selon moi, il convient de distinguer la prestation de services, en elle-même, des personnes qui l’exécutent, lesquelles, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour (47), ne prétendent pas accéder au marché de l’emploi de l’État membre de détachement, dès lors qu’ils retournent dans leur pays d’origine ou de résidence après l’accomplissement de leur mission. Certes, dans le cadre du bon fonctionnement du marché intérieur, il est important que les entreprises emploient des personnes compétentes pour effectuer des travaux, ce qui peut impliquer de faire appel à des ressortissants d’États tiers. Cependant, il s’agit d’un « déplacement temporaire » de travailleurs qui sont envoyés vers un autre État membre pour y effectuer des travaux dans le cadre d’une prestation de services de leur employeur (48).

62.      En ce sens, l’article 12, paragraphe 1, du règlement (CE) no 883/2004 (49) énonce que « [l]a personne qui exerce une activité salariée dans un État membre pour le compte d’un employeur y exerçant normalement ses activités, et que cet employeur détache pour effectuer un travail pour son compte dans un autre État membre, demeure soumise à la législation du premier État membre, à condition que la durée prévisible de ce travail n’excède pas vingt-quatre mois et que la personne ne soit pas envoyée en remplacement d’une autre personne détachée ».

63.      Comme l’a jugé la Cour, afin d’éviter qu’une entreprise établie sur le territoire d’un État membre ne soit obligée d’affilier ses travailleurs, soumis normalement à la législation de sécurité sociale de cet État membre, au régime de sécurité sociale d’un autre État membre où ils seraient envoyés pour accomplir des travaux d’une durée limitée dans le temps, cette disposition du règlement no 883/2004 permet à l’entreprise de conserver l’affiliation de ses travailleurs au régime de sécurité sociale du premier État membre (50). Par conséquent, le droit de l’Union prend comme référence la durée de deux ans, laquelle peut être prise en considération (sans que ce soit une obligation) par un État membre pour déterminer la durée maximale d’un permis de séjour.

64.      En effet, lorsque les travailleurs ressortissants d’États tiers sont affectés à une prestation de services d’une longue durée dans l’État membre de détachement ou sont réaffectés à une autre prestation de services dans cet État, il y a lieu de considérer que le déplacement de ces travailleurs n’est plus temporaire et qu’ils accèdent au marché de l’emploi dudit État membre. Il en découle que, dans le cas où la durée de la prestation de services est supérieure à deux ans, l’État membre concerné est en droit d’imposer au prestataire de services de faire appel à d’autres travailleurs, originaires de l’Union ou d’un État tiers.

65.      Par ailleurs, dans le cadre d’un détachement transfrontalier, il appartient à l’État membre dans lequel le prestataire de services est établi de déterminer la durée du droit de séjour en vertu duquel le travailleur ressortissant d’un État tiers a accès au territoire de l’Union. Notamment, cet État membre doit vérifier si les conditions prévues à l’article 6 du règlement 2016/399 sont remplies. C’est seulement lorsque ce travailleur a le droit de séjourner et de travailler dans cet État membre qu’il peut légalement être détaché dans un autre État membre. Partant, l’État membre de détachement est en droit de limiter la durée de validité du permis de séjour délivré à un travailleur ressortissant d’un État tiers détaché à la durée de validité du permis de travail et de séjour attribué dans l’État membre dans lequel le prestataire de services est établi. Comme l’a relevé le gouvernement néerlandais, si cette dernière durée est dépassée, l’État membre de détachement ne peut plus se fonder sur le contrôle effectué par l’État membre d’origine et devrait alors lui-même procéder au contrôle prévu à l’article 6 du règlement 2016/399, ce qui est antinomique avec la notion de « détachement ».

66.      Dès lors, l’article 56 TFUE ne s’oppose pas à ce que la durée de validité du permis de séjour dans l’État membre de la prestation de services soit calquée sur la durée du permis de séjour de l’État membre où le prestataire de services est établi et, en tout état de cause, à deux ans.

4.      Sur le montant des droits à acquitter

67.      En ce qui concerne le montant des droits à acquitter, il ressort de la décision de renvoi que celui-ci est égal à celui des droits dus au titre d’un permis ordinaire aux fins de l’exercice d’un emploi par un ressortissant d’un État tiers. Ce montant serait cinq fois plus élevé que le montant des droits dus au titre d’un certificat de séjour régulier pour un citoyen de l’Union (51).

68.      Lors de l’audience, les requérants ont soutenu que les droits dus pour l’obtention de leurs permis de séjour aux Pays-Bas sont très élevés et qu’ils entravent l’exercice de la libre prestation de services.

69.      À cet égard, je relève que, de façon générale, le droit de l’Union ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui oblige les travailleurs ressortissants d’États tiers, ou leur employeur, à verser des droits pour le traitement de leurs demandes de permis de séjour. Néanmoins, conformément à l’article 56 TFUE, les charges administratives ne doivent pas entraver l’exercice d’activités de prestation de services (52).

70.      S’agissant de l’affaire au principal, de prime abord, le groupe de travailleurs ressortissants d’États tiers exerçant un emploi aux Pays-Bas apparaît comme le plus aisément comparable à celui de travailleurs ressortissants d’États tiers détachés. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si le montant des droits à acquitter pour la délivrance d’un permis de séjour à un travailleur ressortissant d’un État tiers détaché constitue une restriction disproportionnée à la liberté de prestation de services consacrée à l’article 56 TFUE.

71.      Eu égard à tout ce qui précède, j’estime que les articles 56 et 57 TFUE ne s’opposent pas à une réglementation nationale selon laquelle, dans la situation où un prestataire de services établi dans un État membre détache des travailleurs ressortissants d’États tiers dans un autre État membre pour une durée excédant 90 jours sur une période de 180 jours, ces travailleurs soient tenus d’être titulaires d’un permis de séjour individuel dans ce second État membre, dont la durée est limitée à la durée de validité du permis de séjour et de travail accordé dans le premier État membre et, en tout état de cause, à deux ans, et dont l’octroi est soumis à l’acquittement de droits égaux à ceux dus au titre d’un permis ordinaire aux fins de l’exercice d’un emploi par un ressortissant d’un État tiers, pour autant que cette réglementation n’impose pas d’exigences disproportionnées.

V.      Conclusion

72.      Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le rechtbank Den Haag, zittingsplaats Middelburg (tribunal de La Haye, siégeant à Middelbourg, Pays-Bas) de la manière suivante :

Les articles 56 et 57 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale selon laquelle, dans la situation où un prestataire de services établi dans un État membre détache des travailleurs ressortissants d’États tiers dans un autre État membre pour une durée excédant 90 jours sur une période de 180 jours, ces travailleurs soient tenus d’être titulaires d’un permis de séjour individuel dans ce second État membre, dont la durée est limitée à la durée de validité du permis de séjour et de travail accordé dans le premier État membre et, en tout état de cause, à deux ans, et dont l’octroi est soumis à l’acquittement de droits égaux à ceux dus au titre d’un permis ordinaire aux fins de l’exercice d’un emploi par un ressortissant d’un État tiers, pour autant que cette réglementation n’impose pas d’exigences disproportionnées.


1      Langue originale : le français.


2      Stb. 1994, no 959.


3      Stb. 2016, no 219.


4      Stb. 2000, no 495.


5      Stb. 2000, no 497.


6      Stcrt. 2001, no 64.


7      Stcrt. 2001, no 10.


8      Dans ses observations écrites, le gouvernement néerlandais a indiqué que, le 4 décembre 2019, ROBI a notifié aux autorités néerlandaises que ces activités dureraient du 6 décembre 2019 au 4 mars 2020.


9      Convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 et entrée en vigueur le 26 mars 1995 (JO 2000, L 239, p. 19), telle que modifiée par le règlement (UE) no 265/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mars 2010, modifiant la convention d’application de l’accord Schengen et le règlement (CE) no 562/2006 en ce qui concerne la circulation des personnes titulaires d’un visa de long séjour (JO 2010, L 85, p. 1), ainsi que par le règlement (UE) no 610/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013 modifiant le règlement (CE) no 562/2006 du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), la convention d’application de l’accord de Schengen, les règlements (CE) no 1683/95 et (CE) no 539/2001 du Conseil et les règlements (CE) no 767/2008 et (CE) no 810/2009 du Parlement européen et du Conseil (JO 2013, L 182, p. 1) (ci-après la « CAAS »).


10      JO 2006, L 105, p. 1.


11      Directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services (JO 1997, L 18, p. 1).


12      Arrêt du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 40 ainsi que jurisprudence citée).


13      Voir arrêts du 11 septembre 2014, Essent Energie Productie (C‑91/13, EU:C:2014:2206, point 39), et du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 43).


14      Arrêt du 26 février 2020, Stanleyparma et Stanleybet Malta (C‑788/18, EU:C:2020:110, point 17 ainsi que jurisprudence citée).


15      Arrêts du 11 septembre 2014, Essent Energie Productie (C‑91/13, EU:C:2014:2206, point 49), et du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 47). Voir la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux conditions de détachement des travailleurs salariés ressortissants d’un État tiers dans le cadre d’une prestation de services transfrontaliers [COM (99) 3 final], laquelle a été retirée par la Commission.


16      Voir arrêt du 21 septembre 2006, Commission/Autriche (C‑168/04, EU:C:2006:595, point 60 et jurisprudence citée).


17      Décision d’exécution du Conseil du 4 mars 2022 constatant l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’Ukraine, au sens de l’article 5 de la directive 2001/55/CE, et ayant pour effet d’introduire une protection temporaire (JO 2022, L 71, p. 1).


18      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (JO 2018, L 303, p. 39).


19      Directive du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77).


20      Voir, notamment, arrêt du 12 juillet 2018, Banger (C‑89/17, EU:C:2018:570, point 27 et jurisprudence citée).


21      Voir arrêt du 12 juillet 2018, Banger (C‑89/17, EU:C:2018:570, point 28 et jurisprudence citée).


22      Voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 48 ainsi que jurisprudence citée).


23      Voir point 18 des présentes conclusions.


24      Voir, pour un arrêt plus ancien, arrêt du 21 octobre 2004, Commission/Luxembourg (C‑445/03, EU:C:2004:655), portant sur les exigences imposées par l’État membre d’accueil aux entreprises qui détachent sur son territoire des travailleurs salariés ressortissants d’un État tiers.


25      Voir arrêt du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 44 ainsi que jurisprudence citée).


26      Voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 50 ainsi que jurisprudence citée).


27      Arrêt du 19 janvier 2006, Commission/Allemagne (C‑244/04, EU:C:2006:49, point 49).


28      Voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 51 ainsi que jurisprudence citée).


29      Voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 52 ainsi que jurisprudence citée).


30      Voir point 21 des présentes conclusions.


31      Voir conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Commission/Autriche, (C‑168/04, EU:C:2006:135, point 114), selon lequel les travailleurs ressortissants d’États tiers qui étaient détachés en Autriche, pour une période maximale de trois mois, par une entreprise prestataire de services établie dans un autre État membre contractant à la CAAS, n’étaient pas tenus d’obtenir, auprès des autorités autrichiennes, un quelconque visa ou titre de séjour pour accomplir leur mission dans le cadre dudit détachement.


32      Arrêt du 14 novembre 2018, Danieli & C. Officine Meccaniche e.a. (C‑18/17, EU:C:2018:904, point 46 ainsi que jurisprudence citée).


33      Voir arrêt du 11 septembre 2014, Essent Energie Productie (C‑91/13, EU:C:2014:2206, points 51 à 53 et jurisprudence citée).


34      Voir arrêt du 11 septembre 2014, Essent Energie Productie (C‑91/13, EU:C:2014:2206, point 55).


35      Voir point 42 des présentes conclusions.


36      Voir, en ce sens, arrêt du 21 octobre 2004, Commission/Luxembourg (C‑445/03, EU:C:2004:655, point 43).


37      Règlement du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2016, concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO 2016, L 77, p. 1).


38      Mise en italique par mes soins.


39      Voir arrêt du 5 février 2020, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Enrôlement des marins dans le port de Rotterdam) (C‑341/18, EU:C:2020:76, point 58).


40      Décision du conseil d’association du 19 septembre 1980 relative au développement de l’association entre la Communauté économique européenne et la Turquie. Le conseil d’association a été institué par l’accord créant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie, qui a été signé, le 12 septembre 1963, à Ankara par la République de Turquie, d’une part, ainsi que par les États membres de la CEE et la Communauté, d’autre part, et qui a été conclu, approuvé et confirmé au nom de cette dernière par la décision 64/732/CEE du Conseil, du 23 décembre 1963 (JO 1964, 217, p. 3685).


41      Voir arrêt du 3 octobre 2019, A e.a. (C‑70/18, EU:C:2019:823, point 46 ainsi que jurisprudence citée).


42      Voir point 30 des présentes conclusions.


43      Voir arrêt du 11 septembre 2014, Essent Energie Productie (C‑91/13, EU:C:2014:2206, points 51 à 53 et jurisprudence citée).


44      Voir, par analogie, arrêt du 2 mars 2023, PrivatBank e.a. (C‑78/21, EU:C:2023:137, point 62).


45      Arrêt du 2 septembre 2021, Institut des Experts en Automobiles (C‑502/20, EU:C:2021:678, point 35 et jurisprudence citée).


46      Lors de l’audience, les requérants ont donné l’exemple de la construction d’une centrale nucléaire.


47      Voir point 48 des présentes conclusions.


48      Voir, à cet égard, arrêt du 27 mars 1990, Rush Portuguesa (C‑113/89, EU:C:1990:142, point 15).


49      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2004, L 166, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) no 465/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 (JO 2012, L 149, p. 4).


50      Voir arrêt du 3 juin 2021, TEAM POWER EUROPE (C‑784/19, EU:C:2021:427, point 60 et jurisprudence citée).


51      Dans ses observations écrites, le gouvernement néerlandais a néanmoins exposé que, le 1er janvier 2019, le Royaume des Pays-Bas a aligné le montant des droits à acquitter pour la délivrance d’un permis de séjour sur le tarif d’une carte d’identité nationale et que, en conséquence, la Commission a mis fin à la procédure d’infraction qu’elle avait engagée.


52      Voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2014, Essent Energie Productie (C‑91/13, EU:C:2014:2206, point 47).