Language of document : ECLI:EU:T:2023:715

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

15 novembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale TIFFANY CRUNCH N CREAM – Enregistrement international de la marque figurative antérieure CRUNCH – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑321/22,

International Foodstuffs Co. LLC, établie à Charjah (Émirats arabes unis), représentée par Me J. Blum, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme J. Hamel, MM. M. Eberl et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Société des produits Nestlé SA, établie à Vevey (Suisse), représentée par Mes A. Jaeger-Lenz, C. Elkemann et J. Thomsen, avocates,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, R. Mastroianni (rapporteur) et I. Gâlea, juges,

greffier : Mme R. Ukelyte, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 27 juin 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, International Foodstuffs Co. LLC, demande l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 21 mars 2022 (affaire R 2136/2020-2) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 20 décembre 2018, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal TIFFANY CRUNCH N CREAM.

3        La marque demandée désignait les produits relevant de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant à la description suivante : « Chocolats ; confiserie ; sucre candi ; biscuits (tous types) ; gâteaux ; pâtes alimentaires ; macaronis ; nouilles ; nouilles instantanées ; spaghetti ; vermicelles ; levure ; poudre à lever ; sauces à salade ; mayonnaise ; vinaigres ; ketchup et sauces (condiments) ; produits de pâte prêts à cuire ; pâte surgelée ; parathas congelés ; crèmes glacées ; desserts congelés non à base de produits laitiers ; desserts de fruits surgelés ; desserts glacés ; café ; thé ; cacao ; sucre ; riz ; tapioca ; sagou ; succédanés du café ; pain ; pâte à pâtisserie ; sirop de mélasse ; sel ; moutarde ; farines faites de céréales ; épices ; jus de viande [sauces] ; infusions à base de plantes ; miel ».

4        Le 6 mai 2019, l’intervenante, la Société des produits Nestlé SA, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée, notamment, sur l’enregistrement international désignant l’Union européenne de la marque figurative reproduite ci-après :

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6        La marque antérieure a été enregistrée le 13 mai 2008 sous le numéro 966515. Elle désigne les produits relevant des classes 29, 30 et 32 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Légumes et pommes de terre (conservés, séchés ou cuits), fruits (conservés, séchés ou cuits), champignons (conservés, séchés ou cuits), viande, volaille, gibier, poisson et produits alimentaires provenant de la mer, tous ces produits sous forme d’extraits, de soupes, de gelées, de pâtes à tartiner, de conserves, de plats cuisinés, surgelés ou déshydratés ; confitures ; œufs ; lait, crème, beurre, fromage et autres préparations alimentaires à base de lait ; succédanés du lait ; boissons à base de lait ; desserts à base de lait et desserts à base de crème ; yoghourts ; lait de soja (succédané du lait), graines de soja conservées pour l’alimentation humaine ; huiles et graisses comestibles ; préparations de protéines pour l’alimentation humaine ; agents blanchissants du café et/ou du thé (succédanés de crème) ; saucisses ; charcuterie, beurre de cacahuètes ; soupes, soupes concentrées, potages, bouillon-cubes, bouillons, consommés » ;

–        classe 30 : « Café, extraits de café, préparations et boissons à base de café ; café glacé ; succédanés du café, extraits de succédanés du café, préparations et boissons à base de succédanés du café ; chicorée ; thé, extraits de thé, préparations et boissons à base de thé ; thé glacé ; préparations à base de malt pour l’alimentation humaine ; cacao et préparations et boissons à base de cacao ; chocolat, produits de chocolat, préparations et boissons à base de chocolat ; confiserie, sucreries, bonbons ; sucre ; gommes à mâcher non à usage médical ; édulcorants naturels ; produits de boulangerie, pain, levure, pâtisserie ; biscuits, gâteaux, cookies, gaufrettes, caramels, desserts compris dans cette classe, poudings ; glaces comestibles, glaces à l’eau, sorbets, confiseries glacées, gâteaux glacés, crèmes glacées, desserts glacés, yoghourts glacés, poudres et liants (compris dans cette classe) pour faire des glaces comestibles et/ou glaces à l’eau et/ou sorbets et/ou confiseries glacées et/ou gâteaux glacés et/ou crèmes glacées et/ou desserts glacés et/ou yoghourts glacés ; miel et succédanés du miel ; céréales pour le petit déjeuner, muesli, corn flakes, barres de céréales, céréales prêtes à la consommation ; préparations de céréales ; riz, pâtes alimentaires, nouilles ; produits alimentaires à base de riz, de farine ou de céréales, également sous forme de plats cuisinés ; pizzas ; sandwiches ; préparations de pâte alimentaire et de pâte à gâteau prêtes à être mises au four ; sauces, sauce de soja ; ketchup ; produits pour aromatiser ou assaisonner les aliments ; épices alimentaires, condiments, sauces à salade, mayonnaises ; moutarde ; vinaigres » ;

–        classe 32 : « Bières ; eaux minérales et autres boissons non alcooliques, sirops, extraits et essences pour faire des boissons non alcooliques, jus de fruits, boissons à base de cacao ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

8        Le 29 septembre 2020, la division d’opposition a fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

9        Le 11 novembre 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Elle a considéré que, en raison de l’identité et de la similitude des produits en cause, du degré à tout le moins faible de similitude visuelle, du degré moyen de similitude phonétique, de l’absence de similitude conceptuelle ainsi que du caractère distinctif accru de la marque antérieure et du niveau d’attention faible à moyen du public pertinent, il existait un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

12      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité des pièces et arguments prétendument présentés pour la première fois devant le Tribunal

13      L’intervenante prétend, dans son mémoire en réponse, que la requérante a présenté, pour la première fois devant le Tribunal, plusieurs nouvelles annexes et nouveaux arguments qui, pour cette raison, doivent être déclarés irrecevables.

14      En premier lieu, selon elle, la requérante a notamment annexé à la requête une série de documents nouveaux correspondant à un extrait du site Internet Wikipédia relatif à l’expression anglaise « cookies and cream » (annexe A.6), une série d’extraits de sites Internet relative à l’expression « cookies and cream » ainsi qu’aux termes « crunch » et « n » (annexes A.7 et A.8) et une publicité française relative à la tablette de chocolat de la marque CRUNCH (annexe A.9).

15      En second lieu, selon l’intervenante, les nouveaux arguments soulevés par la requérante sont ceux afférents, en substance, aux éléments distinctifs et dominants de la marque demandée et de la marque antérieure ainsi qu’à l’appréciation de l’existence du risque de confusion. Plus particulièrement, l’intervenante fait valoir qu’il s’agit des arguments, en ce qui concerne les éléments distinctifs et dominants de la marque demandée, regardant la compréhension par le public pertinent de l’élément « n » et de l’expression « crunch n cream » dans son ensemble, d’une part, ainsi que des éléments « n cream » ou encore « crunch n », pris séparément, d’autre part. Ensuite, s’agissant des éléments distinctifs et dominants de la marque antérieure, l’intervenante fait valoir que la requérante soulève pour la première fois devant le Tribunal le fait que, les éléments figuratifs de cette marque étant proéminents, l’élément verbal « crunch » sera perçu comme ayant un espace ou un point entre les lettres « u » et « n ». S’agissant de l’appréciation d’un risque de confusion entre les marques en conflit, le nouvel argument de la requérante, selon l’intervenante, est celui selon lequel il est inhabituel que la marque principale soit placée au milieu d’une série de mots plutôt qu’au début ou à la fin d’un signe complexe.

16      Lors de l’audience, la requérante a fait valoir, d’une part, en ce qui concerne la recevabilité des nouveaux arguments, que l’appréciation des éléments distinctifs et dominants ainsi que l’impression globale du risque de confusion étaient des questions de droit constituant le fond du recours qui devaient être examinées par le Tribunal. D’autre part, en ce qui concerne la recevabilité des annexes A.6, A.7, A.8 et A.9 de sa requête, elle fait valoir qu’elle a annexé lesdits documents en réponse aux considérations de la chambre de recours dans la décision attaquée sur la perception par le consommateur moyen de l’expression « crunch n cream ».

17      L’EUIPO, quant à lui, a fait valoir, au cours de l’audience, d’une part, que lesdits arguments nouveaux étaient recevables en ce qu’ils étaient liés à une évaluation factuelle que le Tribunal devait prendre en compte dans le cadre de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Toutefois, l’EUIPO souligne qu’il s’agit d’un revirement important dans l’argumentaire de la requérante en ce qu’il ne peut être reproché à la chambre de recours de ne pas avoir pris en compte des arguments qui lui avaient été soumis au préalable. D’autre part, en réponse à une question du Tribunal posée au cours de l’audience sur la recevabilité des annexes A.6, A.7, A.8 et A.9 de la requête, l’EUIPO a fait valoir que l’annexe A.6 était recevable en ce qu’elle était constituée d’une page du site Internet Wikipédia et constituait dès lors un fait bien connu. En ce qui concerne les annexes A.7, A.8 et A.9 de la requête, l’EUIPO soutient qu’elles doivent être considérées comme étant irrecevables étant donné qu’elles n’ont pas été présentées au cours de la procédure devant l’EUIPO.

18      À cet égard, il est vrai que, aux termes de l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal, les mémoires déposés par les parties dans le cadre de la procédure devant le Tribunal ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours.

19      Il y a également lieu de relever que, selon une jurisprudence constante, il découle de l’article 72 du règlement 2017/1001 que le Tribunal est appelé à apprécier la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO en contrôlant l’application du droit de l’Union européenne effectuée par celles-ci eu égard, notamment, aux éléments de fait qui ont été soumis auxdites chambres. Il résulte également de l’article 95, paragraphe 2, dudit règlement qu’il incombe aux parties de fournir en temps utile devant l’EUIPO les éléments de fait dont elles entendent se prévaloir. Ainsi, des faits non invoqués par les parties devant les instances de l’EUIPO ne peuvent plus l’être au stade du recours introduit devant le Tribunal, et ce dernier ne saurait réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui, sauf s’agissant de faits qui auraient dû faire l’objet d’un examen d’office par les instances de l’EUIPO, en vertu de l’article 95, paragraphe 1, de ce règlement [voir, en ce sens, arrêts du 10 novembre 2011, LG Electronics/OHMI, C‑88/11 P, non publié, EU:C:2011:727, points 23 à 26 ; du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 19, et du 29 septembre 2010, Interflon/OHMI – Illinois Tool Works (FOODLUBE), T‑200/08, non publié, EU:T:2010:414, point 11].

20      En premier lieu, s’agissant de la recevabilité des annexes décrites au point 14 ci-dessus, il y a lieu de constater, tout d’abord, que l’annexe A.9 a été produite par la requérante au cours de la procédure devant l’EUIPO. Par conséquent, dès lors que ladite annexe n’a pas été produite pour la première devant le Tribunal, au sens de la jurisprudence citée au point 19 ci-dessus, elle ne saurait être écartée.

21      Ensuite, en ce qui concerne les annexes A.6 et A.7, la requérante tend, par celles-ci, à contester l’appréciation de la chambre de recours figurant au point 54 de la décision attaquée et relative, dans le cadre de l’appréciation des éléments distinctifs et dominants de la marque demandée, à la position distinctive autonome de l’élément « crunch » au sein de la marque demandée, en ce qu’il serait perçu indépendamment des autres éléments « tiffany », « n » et « cream ». Enfin, par l’annexe A.8, la requérante tend à contester l’appréciation de la chambre de recours figurant au point 50 de la décision attaquée, selon laquelle l’élément « crunchy », et non « crunch », est utilisé d’une telle manière qu’il pourrait être perçu comme étant descriptif des produits en cause. Partant, lesdites annexes doivent être considérées comme étant recevables en ce qu’elles sont relatives à des éléments factuels dont il est fait état dans la décision attaquée et qui appartiennent donc au cadre factuel de la procédure devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 5 février 2020, Hickies/EUIPO (Forme d’un lacet de chaussure), T‑573/18, EU:T:2020:32, point 18 et jurisprudence citée].

22      Au vu des considérations qui précèdent, il convient de déclarer les annexes A.6, A.7, A.8 et A.9 de la requête comme étant recevables.

23      En second lieu, s’agissant de la recevabilité des arguments décrits au point 15 ci-dessus, il convient de constater qu’ils se rattachent à ceux portant sur les éléments distinctifs et dominants de la marque demandée et de la marque antérieure ainsi qu’à l’appréciation du risque de confusion, qui ont fait l’objet d’une appréciation par la chambre de recours aux points 51 à 55 et 77 à 79 de la décision attaquée.

24      Partant, il y a lieu de constater que lesdits arguments ne sauraient modifier l’objet du litige devant la chambre de recours au sens de la jurisprudence citée au point 18 ci-dessus et doivent, dès lors, être considérés comme étant recevables.

 Sur le fond

25      La requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

26      Dans le cadre de son moyen unique, elle conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent en l’espèce. En particulier, elle remet en cause les appréciations de la chambre de recours relatives, premièrement, aux éléments distinctifs et dominants des signes en conflit, deuxièmement, à la constatation d’un degré moyen de similitude phonétique, troisièmement, au caractère distinctif accru de la marque antérieure et, quatrièmement, à l’appréciation globale du risque de confusion.

27      Lors de l’audience, la requérante a renoncé à l’argument relatif au caractère distinctif accru de la marque antérieure, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

 Observations liminaires

28      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

29      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

30      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

31      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits ou des services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001  existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

32      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il convient d’examiner le présent recours.

 Sur le public pertinent

33      En l’espèce, la chambre de recours a estimé que les produits en cause s’adressaient au grand public, lequel faisait preuve d’un niveau d’attention pouvant varier de faible à moyen, et que, comme les preuves produites par l’intervenante au cours de la procédure devant l’EUIPO concernaient la France et l’Espagne, c’était le grand public français et espagnol qui devait être pris en considération. Cette appréciation n’a pas été contestée par les parties.

 Sur la comparaison des produits

34      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les produits en cause étaient pour certains identiques et pour d’autres similaires à des degrés divers. Cette appréciation n’a pas été contestée par les parties.

 Sur la comparaison des signes

35      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

36      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

37      Par ailleurs, il y a lieu d’observer que le caractère distinctif plus ou moins élevé des éléments communs à une marque demandée et à une marque antérieure est un des facteurs pertinents dans le cadre de l’appréciation de la similitude des signes [voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2017, Aldi Einkauf/EUIPO – Weetabix (Alpenschmaus), T‑103/16, non publié, EU:T:2017:605, point 47 et jurisprudence citée].

38      En l’espèce, avant de traiter la question de la similitude des marques en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il y a lieu d’examiner l’appréciation des éléments distinctifs et dominants des marques en conflit effectuée par la chambre de recours.

–       Sur les éléments distinctifs et dominants des signes en conflit

39      En premier lieu, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas correctement apprécié les éléments distinctifs et dominants de la marque demandée et qu’elle s’est concentrée essentiellement sur le caractère distinctif de l’élément « crunch ». En effet, selon elle, la chambre de recours n’a pas apprécié le caractère distinctif de l’élément « n » et a arrêté son examen après avoir constaté que l’élément « tiffany » était distinctif, sans examiner, d’une part, si l’un des éléments de la marque demandée était dominant par rapport aux autres et, d’autre part, pourquoi l’élément « crunch » serait perçu par le public pertinent comme étant plus distinctif, comme occupant une position distinctive autonome ou encore comme étant prévalant par rapport à l’élément « tiffany ». Selon elle, ce dernier est l’élément le plus distinctif et dominant de la marque demandée de par son caractère distinctif intrinsèque, sa position au début de ladite marque et la nature et la signification des autres éléments composant la marque demandée. En particulier, la requérante fait valoir que, en raison de sa position et des autres éléments composant la marque demandée, l’élément « crunch » est considéré comme étant descriptif d’une caractéristique des produits en cause de la marque demandée ou comme un mot composant l’expression « crunch n cream ». Selon elle, il est artificiel de décomposer ladite expression anglaise en ce que les consommateurs comprennent que l’élément « n », en tant que référence au mot anglais « and », permet de faire la liaison entre « crunch » et « cream ». Enfin, la requérante soutient que, pour ces raisons, le public pertinent, lorsqu’il est face à une marque débutant par un élément distinctif comme « tiffany » suivi de « crunch n cream », percevra le mot « tiffany » comme la marque elle-même ou comme un mot distinctif et autonome faisant partie d’une marque complexe et les trois mots « crunch », « n » et « cream » comme une expression unique jouant un rôle distinct au sein du signe complexe.

40      En second lieu, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas dûment examiné les éléments distinctifs et dominants de la marque antérieure. En particulier, elle allègue que la chambre de recours n’a pas pris en compte tous les éléments figuratifs de la marque antérieure en ce qu’elle se réfère, au point 55 de la décision attaquée, seulement au « fond bleu » sur lequel apparaît de façon proéminente l’élément distinctif « crunch ». Ainsi, en substance, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas pris en compte tous les éléments composant la marque antérieure, à savoir les éléments figuratifs, et qu’elle a fondé son appréciation sur une autre marque que celle telle qu’enregistrée. Selon elle, il est évident que l’icône triangulaire bleue figurant en bas à droite de la lettre « u » représente un point et que, dès lors, les éléments verbaux de la marque antérieure apparaissent visuellement comme « cru » et « nch » séparés par un espace et un point. En particulier, elle considère que la position et les couleurs desdits éléments contribuent à créer l’image de la marque antérieure que le public gardera en mémoire et que, dès lors, les éléments figuratifs de la marque antérieure ne peuvent être considérés comme de simples éléments décoratifs négligeables.

41      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

42      S’agissant des éléments distinctifs et dominants des signes en conflit, la chambre de recours a considéré que, premièrement, le terme « cream » de la marque demandée était associé aux mots équivalents « crema » en espagnol et « crème » en français et que, dès lors, il avait un caractère distinctif faible pour le public français et espagnol par rapport aux produits en cause relevant de la classe 30. Deuxièmement, s’agissant du terme « tiffany » de la marque demandée, la chambre de recours a considéré qu’il s’agissait d’un prénom doté d’un certain caractère distinctif. Troisièmement, s’agissant du mot « crunch » présent dans les deux marques en conflit, la chambre de recours a considéré qu’il ne s’agissait pas d’un mot anglais de base pouvant dès lors être présumé compris par le public pertinent et qu’il était, par conséquent, distinctif. Enfin, la chambre de recours a considéré que le terme « crunch » conservait une position distinctive autonome dans la marque demandée en tant que mot distinct et que le public pertinent ne percevrait pas l’expression « crunch n cream » dans son ensemble. Dans la marque antérieure, la chambre de recours a considéré que « crunch » était l’élément distinctif qui apparaissait de manière proéminente sur un fond bleu.

43      Selon la jurisprudence, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [voir ordonnance du 3 mai 2018, Siberian Vodka/EUIPO – Schwarze und Schlichte (DIAMOND ICE), T‑234/17, non publiée, EU:T:2018:259, point 38 et jurisprudence citée].

44      En premier lieu, s’agissant des éléments distinctifs et dominants de la marque demandée, il y a lieu de relever, tout d’abord, que les appréciations de la chambre de recours selon lesquelles, d’une part, l’élément « tiffany » de la marque demandée, constitué d’un prénom, est distinctif et, d’autre part, l’élément « cream » de ladite marque a un caractère distinctif faible en ce qu’il est associé à ses équivalents en espagnol et en français (voir point 42 ci-dessus) n’ont pas été contestées par la requérante.

45      Ensuite, s’agissant du caractère distinctif de l’élément verbal « crunch », il convient de rappeler que, d’une part, selon une jurisprudence constante, la compréhension d’une langue étrangère ne peut, en général, être présumée [voir arrêt du 21 mai 2015, Nutrexpa/OHMI – Kraft Foods Italia Intellectual Property (Cuétara MARĺA ORO), T‑271/13, non publié, EU:T:2015:308, point 35 et jurisprudence citée].

46      Dans la mesure où la connaissance de l’anglais par le public espagnol et français n’est pas un fait notoire, il appartenait à la requérante de fournir, dans le cadre de la procédure administrative, des éléments permettant de mettre en exergue la connaissance par le public pertinent d’une langue autre que sa langue maternelle.

47      D’autre part, s’il est vrai qu’une grande partie des consommateurs dans l’Union connaît un vocabulaire élémentaire de l’anglais [voir arrêt du 22 juin 2022, Kubara/EUIPO (good calories), T‑602/21, non publié, EU:T:2022:382, point 33 et jurisprudence citée], il a en revanche été jugé que d’autres termes anglais ou l’une de leur signification ne pouvaient pas être considérés comme faisant partie d’un tel vocabulaire de base [voir, en ce sens, arrêts du 16 octobre 2014, Junited Autoglas Deutschland/OHMI – Belron Hungary (United Autoglas), T‑297/13, non publié, EU:T:2014:893, points 32 et 42, et du 16 février 2017, Jaguar Land Rover/EUIPO – Nissan Jidosha (Land Glider), T‑71/15, non publié, EU:T:2017:82, point 45].

48      Ainsi, il ne saurait être présumé que des termes anglais sont largement connus dans l’Union, à l’exception de certains termes appartenant au vocabulaire élémentaire de cette langue. En l’espèce, le terme anglais « crunch » ne saurait être considéré comme faisant partie du vocabulaire élémentaire de cette langue dont il peut être présumé qu’il est largement connu par des consommateurs dans toute l’Union (voir, par analogie, arrêt du 16 février 2017, Land Glider, T‑71/15, non publié, EU:T:2017:82, point 58).

49      En effet, en ce que le terme anglais « crunch » renvoie à un concept abstrait et non pas à un vocable simple et élémentaire, il ne saurait être présumé qu’un public non anglophone maîtriserait ce terme et en comprendrait distinctement et immédiatement sa signification.

50      Toutefois, lorsqu’un terme anglais a un équivalent dans la langue du public non anglophone et qu’un lien peut être établi par ledit public entre ces termes et leur traduction dans la langue concernée, il y a lieu de considérer que ledit public comprend leur signification [voir arrêt du 15 septembre 2021, Celler Lagravera/EUIPO – Cyclic Beer Farm (Cíclic), T‑673/20, non publié, EU:T:2021:591, point 46 et jurisprudence citée].

51      Or, en l’espèce, il convient de constater que le terme anglais « crunch » ne peut être rapproché par une partie du public pertinent à ses équivalents français et espagnol, à savoir respectivement « croquant » et « crujiente ».

52      Il s’ensuit que la chambre de recours a conclu à juste titre que le terme anglais « crunch » n’avait pas de signification pour le public espagnol et français et était doté d’un caractère distinctif intrinsèque.

53      Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel le prénom Tiffany est l’élément dominant de la marque demandée, au motif que, placé au début de celle-ci, il est immédiatement perçu par le consommateur et est davantage susceptible d’attirer son attention, il y a lieu de constater que le fait qu’un élément soit placé au début d’une marque ne peut avoir pour conséquence, même s’il est plus à même d’attirer l’attention du public pertinent que les éléments qui lui succèdent, de dominer, de ce seul fait, l’impression d’ensemble produite par une marque dans la mémoire de ce public au sens de l’arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker (C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée) [voir, en ce sens, arrêt du 7 octobre 2015, CBM/OHMI – Aeronautica Militare (Trecolore), T‑227/14, non publié, EU:T:2015:760, point 35]. L’argument de la requérante tiré de l’importance particulière prêtée par le consommateur au début d’un signe n’est donc pas concluant et n’indique aucunement, en tout état de cause, que l’élément « tiffany », malgré son caractère distinctif, doive être considéré comme étant l’élément dominant de la marque demandée.

54      Enfin, il y a lieu de constater, à l’instar de l’EUIPO, que l’élément « n » de la marque demandée est distinctif et que les éléments de preuve produits par la requérante dans les annexes A.6 à A.8 ne sont pas suffisants pour démontrer la signification dudit élément et de l’expression « crunch n cream » pour le public pertinent. Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’élément « crunch » possédait une position distinctive et autonome au sein de la marque demandée.

55      En second lieu, s’agissant des éléments distinctifs et dominants de la marque antérieure, il y a lieu de constater que la chambre de recours a pris en compte le signe dans son ensemble en considérant, au point 55 de la décision attaquée, qu’au sein de la marque antérieure l’élément verbal « crunch » était l’élément distinctif qui apparaissait de manière proéminente sur le fond bleu.

56      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, lorsqu’une marque consiste en des éléments à la fois verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le public pertinent fera plus facilement référence aux produits en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [arrêts du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, EU:T:2008:319, point 30, et du 11 décembre 2014, Coca-Cola/OHMI – Mitico (Master), T‑480/12, EU:T:2014:1062, point 49 ; voir également, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37].

57      Par conséquent, à l’instar de l’EUIPO et de l’intervenante, il convient de constater que les éléments figuratifs de la marque antérieure jouent un rôle secondaire par rapport à l’élément verbal « crunch » et n’empêchent, comme le soutient la requérante, pas la lecture de ce dernier.

–       Sur la similitude visuelle

58      Sur le plan visuel, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit coïncidaient par leur élément commun « crunch » et différaient par les éléments « tiffany », « n » et « cream » présents dans la marque demandée et par les éléments figuratifs de la marque antérieure. Ainsi, selon la chambre de recours, l’élément « crunch » présente une position distinctive autonome au sein de la marque demandée et les éléments figuratifs de la marque antérieure n’ont pas d’incidence sur la perception de l’élément verbal « crunch » qui est frappant. Dès lors, les signes présentent à tout le moins un faible degré de similitude visuelle. Cette appréciation n’est pas contestée par les parties.

–       Sur la similitude phonétique

59      La requérante conteste que la marque demandée présente un degré moyen de similitude sur le plan phonétique en ce que la chambre de recours n’a pas tenu compte de l’espace qui se trouve entre les lettres « u » et « n » de l’élément « crunch » de la marque antérieure. En tout état de cause, elle soutient que, même si la suite de lettres « c », « r », « u », « n », « c » et « h » devait se prononcer « crunch », la chambre de recours a conclu à tort à une similitude phonétique moyenne entre les signes en conflit. En effet, selon elle, les marques en conflit diffèrent par trois mots sur quatre et leurs débuts et leurs fins sont différents et seront donc prononcés différemment. En outre, la requérante fait valoir que, compte tenu de la position du mot « crunch » dans la marque demandée, le mot « tiffany », au regard du fait qu’il est le premier que le consommateur entendra ainsi que de son caractère distinctif, aura un impact plus important dans l’esprit du consommateur. Enfin, selon la requérante, comme une seule des six syllabes de la marque demandée, qui se trouve au milieu, est la même que la syllabe de la marque antérieure, la chambre de recours aurait dû considérer que les signes en conflit étaient différents ou présentaient tout au plus un faible degré de similitude sur le plan phonétique.

60      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

61      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré que la prononciation des signes en conflit coïncidait dans la mesure où au sein de la marque demandée était reproduit le seul élément de la marque antérieure, à savoir « crunch ». Par ailleurs, la chambre de recours a précisé que les éléments figuratifs de la marque antérieure n’étaient pas aptes à être prononcés et que les signes en conflit différaient de par la prononciation des éléments « tiffany », « n » et « cream » de la marque demandée. Elle en a conclu que les signes en conflit présentaient un degré moyen de similitude phonétique.

62      À cet égard, il y a tout d’abord lieu de constater à l’instar de la chambre de recours que les signes en conflit coïncident dans la prononciation de l’élément commun « crunch ». Ensuite, ainsi que l’a également relevé à juste titre la chambre de recours, les signes en conflit se distinguent par la prononciation des éléments « tiffany », « n » et « cream » de la marque demandée, qui n’ont pas d’équivalent dans la marque antérieure. Toutefois, ainsi que le relève l’EUIPO, en raison du faible caractère distinctif de l’élément « cream » et du fait que l’élément « n » est court, ceux-ci auront un impact moindre sur la prononciation de la marque demandée.

63      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas pris en compte la différence de prononciation résultant de l’espace entre les lettres « u » et « n » de l’élément « crunch » de la marque antérieure, il y a lieu de constater qu’il semble évident qu’il ne s’agit pas d’un espace séparant le mot en deux mais d’un effet graphique permettant de lire l’élément « crunch » sans en altérer la prononciation.

64      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, au sens strict, la reproduction phonétique d’une marque complexe correspond à celle de tous ses éléments verbaux, indépendamment de leurs spécificités graphiques, qui relèvent de l’analyse du signe sur le plan visuel. Dès lors, aux fins de la comparaison sur le plan phonétique, il n’y a pas lieu de tenir compte de l’élément figuratif de la marque antérieure, lequel ne sera pas prononcé par le public pertinent [voir arrêt du 15 février 2023, Topcart/EUIPO – Carl International (TC CARL), T‑8/22, non publié, EU:T:2023:70, point 72 et jurisprudence citée].

65      En l’espèce, en premier lieu, il y a lieu de constater, à l’instar de l’EUIPO et de l’intervenante, que l’espace présent entre les lettres « u » et « n » de la marque antérieure n’a aucune incidence sur la prononciation de l’élément « crunch » dans son ensemble. En second lieu, il y a lieu de constater que la chambre de recours a considéré à juste titre que, sur le plan phonétique, les éléments graphiques de la marque antérieure n’étaient pas aptes à être prononcés et que les signes en conflit coïncidaient par leur élément commun « crunch » et différaient par la prononciation de trois autres éléments de la marque demandée, à savoir « tiffany », « n » et « cream ». Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que les signes en conflit présentaient un degré de similitude moyen sur le plan phonétique.

–       Sur la similitude conceptuelle

66      La chambre de recours a considéré que, sur le plan conceptuel, aucun des signes pris dans leur ensemble n’avait de signification pour la grande majorité du public pertinent. Elle précise que la seule différence conceptuelle se trouve dans l’élément « cream », qui sera compris, mais que son incidence sera limitée en ce que ledit élément fait référence au concept non distinctif d’un produit crémeux. Cette appréciation n’a pas été contestée par les parties.

 Sur le caractère distinctif accru de la marque antérieure

67      La chambre de recours a considéré qu’il ressortait clairement des éléments de preuve produits par l’intervenante dans le cadre du recours devant l’EUIPO que la marque antérieure avait fait l’objet d’un usage intensif et de longue date dans les territoires français et espagnol et qu’elle était connue sur le marché pertinent où elle jouissait d’une position consolidée parmi les marques dominantes. En particulier, les éléments de preuve mettant en avant les chiffres de vente, les dépenses de marketing et les résultats des enquêtes menées auprès des consommateurs pertinents démontrent que la marque CRUNCH jouit d’une grande notoriété auprès du public pertinent. La chambre de recours en a conclu que le caractère distinctif de la marque antérieure était accru par l’usage qui en avait été fait en France et en Espagne, à tout le moins pour les « produits de chocolat » et les « préparations de céréales », compris dans la classe 30. La requérante ayant renoncé à l’argument relatif au caractère distinctif accru de la marque antérieure (voir point 27 ci-dessus), cette appréciation de la chambre de recours n’a pas été contestée par les parties.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

68      Premièrement, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas pris en considération que les marques en conflit produisaient des impressions d’ensemble très différentes sur le consommateur moyen. Elle a ajouté que la chambre de recours ne consacrait qu’un seul point à l’appréciation globale du risque de confusion et que le raisonnement exposé dans ce point était injustifié, erroné et illogique. En outre, elle fait valoir qu’il est anormal de placer le nom d’une marque au milieu d’une série de mots plutôt qu’au début ou à la fin d’une marque complexe. Cela serait d’autant plus vrai lorsque la marque demandée comprend le mot de liaison « and » représenté en l’espèce par l’élément « n ». Deuxièmement, elle affirme que la chambre de recours n’a pas examiné la marque demandée dans son ensemble et n’a pas accordé d’importance aux autres éléments. Troisièmement, la requérante fait valoir que la marque demandée ne peut pas être considérée comme étant une sous-marque de la marque antérieure juste parce que celles-ci ont un élément en commun. Quatrièmement, la requérante allègue que la chambre de recours a ignoré l’élément « tiffany » dans le cadre de son appréciation globale du risque de confusion et n’aurait, dès lors, pas examiné la marque demandée dans son ensemble. Cinquièmement, la requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours figurant au point 44 de la décision attaquée selon laquelle l’élément « crunch » jouait un rôle autonome et distinctif dans l’ensemble du signe.

69      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

70      La chambre de recours a considéré que, conformément au principe d’interdépendance et compte tenu du degré à tout le moins faible de similitude visuelle, du degré moyen de similitude phonétique et de l’absence de similitude conceptuelle pertinente entre les signes en conflit, il existait un risque de confusion et d’association entre ces signes, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, dans l’esprit du public pertinent, dont le niveau d’attention est faible à moyen.

71      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou services concernés, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services concernés. En application du principe d’interdépendance, il peut exister un risque de confusion, malgré un faible degré de similitude entre les marques en cause, lorsque la similitude des produits ou des services visés par celles-ci est grande [voir arrêt du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, EU:T:2002:262, point 50 et jurisprudence citée].

72      Ainsi qu’il découle du considérant 11 du règlement 2017/1001, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

73      Il résulte des considérations déjà exposées aux points 33 à 66 ci-dessus que, tout d’abord, le public pertinent fait preuve d’un niveau d’attention pouvant varier de faible à moyen pour les produits relevant de la classe 30, visés par les signes en conflit, et que lesdits produits étaient identiques. Ensuite, il a été constaté également que l’élément « crunch », commun aux signes en conflit, devait être considéré comme l’élément verbal distinctif de la marque antérieure. De plus, cet élément est entièrement reproduit dans la marque demandée. Par ailleurs, il a été constaté que la similitude visuelle était à tout le moins faible, que la similitude phonétique était moyenne et qu’il n’y avait pas de similitude sur le plan conceptuel. Enfin, il y a lieu de relever que la marque antérieure jouit d’un caractère distinctif accru en raison de son usage. Dans ces circonstances et compte tenu de la jurisprudence rappelée aux points 71 et 72 ci-dessus, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion pour les produits en cause.

74      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à juste titre que la chambre de recours a rejeté le recours formé par la requérante contre la décision de la division d’opposition au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, de sorte qu’il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

75      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

76      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      International Foodstuffs Co. LLC est condamnée aux dépens.

Spielmann

Mastroianni

Gâlea

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 novembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.