Language of document : ECLI:EU:T:2022:605

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

5 octobre 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne consistant en une nuance de bleu clair – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Limitation des produits désignés par la demande de marque – Article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 – Exigences de clarté et de précision – Article 33, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 – Obligation de motivation – Article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑168/21,

Magnetec GmbH, établie à Langenselbold (Allemagne), représentée par Mes M. Kloth, R. Briske et D. Habel, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. M. Eberl et E. Markakis, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

Composé, lors des délibérations, de Mmes M. J. Costeira, présidente, T. Perišin et M. P. Zilgalvis (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure, notamment les questions écrites du Tribunal aux parties et leurs réponses à ces questions déposées au greffe du Tribunal, respectivement, le 13 et le 19 avril 2022,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Magnetec GmbH, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 18 janvier 2021 (affaire R 217/2020‑4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 13 février 2019, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’EUIPO, en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

3        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe de couleur suivant :

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4        Dans le formulaire de demande d’enregistrement, le signe demandé a été décrit comme étant une marque de couleur avec la précision suivante : « Bleu clair : RAL 5012 ».

5        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 6, 9 et 17 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 6 : « Alliages ; alliages de métaux non ferreux ; alliages sous forme d’anneaux pour le gainage des câbles du moteur ; alliages de métaux communs ; métaux communs et leurs alliages, y compris acier inoxydable ; alliages de fer ; fourreau en métal pour câbles électriques [gaines] ; métaux communs bruts et mi-ouvrés et leurs alliages, notamment matériaux magnétiques à haute perméabilité initiale, haute perméabilité de saturation ou haute perméabilité maximale, y compris alliages et matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte » ;

–        classe 9 : « Noyaux magnétiques ; composants inductifs pour la dérivation de courants d’ondes ; composants inductifs pour la protection de moteurs; câbles moteur et conducteurs électriques ; gaines de protection de lignes électriques ; housses de protection pour câbles électroniques ; réacteurs en dérivation ; parties d’appareils physiques, chimiques, optiques et électrotechniques, compris dans la classe 9 » ;

–        classe 17 : « Gaines isolantes pour le guipage électrique de câbles ; gaines isolantes pour le guipage électrique de fils ».

6        Le 26 novembre 2019, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement de ladite marque, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

7        Le 27 janvier 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de l’examinateur.

8        La requérante a notamment introduit une demande de limitation des produits couverts par la marque demandée, afin que celle-ci désigne les produits suivants :

–        classe 6 : « Alliages ; alliages de métaux non ferreux ; alliages de métaux communs ; métaux communs et leurs alliages, y compris acier inoxydable ; alliages de fer ; métaux communs bruts et mi-ouvrés et leurs alliages, à savoir matériaux magnétiques à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation, y compris alliages et matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte pour la fabrication d’anneaux ou de formes ovales pour le gainage des câbles du moteur et de réseau » ;

–        classe 9 : « Noyaux magnétiques en matériaux à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation, à savoir alliages et matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte ; composants inductifs pour le filtrage et la dérivation de courants d’ondes ; composants inductifs pour la protection de moteurs ; câbles moteur et conducteurs électriques ; gaines de protection de lignes électriques ; housses de protection pour câbles électroniques ; réacteurs en dérivation ; parties d’appareils physiques, chimiques, optiques et électrotechniques, compris dans la classe 9 » ;

–        classe 17 : « Gaines isolantes pour le guipage électrique et magnétique de câbles, composées de matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte ; gaines isolantes pour le guipage électrique et magnétique de fils, composées de matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte ».

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours et a renvoyé l’affaire à l’examinateur pour apprécier l’existence du caractère distinctif acquis par l’usage de la marque demandée.

10      En particulier, dans un premier temps, la chambre de recours a rejeté comme irrecevable la demande de limitation des produits visés par la marque demandée au motif que cette demande ne satisfaisait pas aux conditions de l’article 33 et de l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001. En substance, elle a estimé que les précisions apportées par la requérante aux libellés des produits « brouillaient les frontières » entre les matériaux bruts et les produits finis.

11      Dans un deuxième temps, la chambre de recours a considéré que l’examinateur n’avait pas pris en considération la demande de la requérante visant à ce que le caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée soit examiné d’abord, étant donné que la requérante avait décidé de ne pas encore invoquer le bénéfice du caractère distinctif acquis par l’usage de ladite marque au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001.

12      Dans un troisième temps, la chambre de recours a estimé que la couleur revendiquée était dépourvue de tout caractère distinctif pour les produits visés par la marque demandée. En particulier, en ce qui concerne le public pertinent, elle a considéré que les noyaux magnétiques relevant de la classe 9 s’adressaient à un public spécialisé faisant preuve de connaissances professionnelles élevées dans le domaine électrotechnique. En revanche, tel ne serait pas le cas des produits relevant des classes 6 et 17, qui viseraient un public plus large.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens, y compris les frais exposés lors de la procédure de recours devant lui.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 33 dudit règlement, et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 33 du même règlement

16      La requérante soutient que sa demande de limitation de la liste des produits couverts par la marque demandée respecte les conditions de l’article 33 et de l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et, par conséquent, doit être considérée comme recevable.

17      L’EUIPO estime que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur et soutient que les modifications demandées provoqueraient des imprécisions et une confusion concernant les limites entre les matériaux bruts et les produits finis correspondants. À cet égard, il explique que, contrairement à ce que soutient la requérante, la classification de Nice opère une distinction claire entre les matières premières et les produits finis. Il ressortirait des remarques générales de ladite classification que les matières premières, brutes ou semi-ouvrées, sont classées, en principe, compte tenu de la matière dont elles sont constituées, tandis que les produits finis sont, en principe, classés selon leur fonction ou leur destination.

18      En outre, l’EUIPO fait remarquer que, s’agissant des produits relevant de la classe 6, la requérante ne s’est pas contentée d’ajouter « à savoir », mais a également ajouté les termes « pour la fabrication d’anneaux ou de formes ovales pour le gainage des câbles du moteur et de réseau ». De même, la requérante n’aurait avancé aucun argument expliquant en quoi le nouveau libellé des produits relevant de la classe 17 serait conforme à l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et à l’article 33 du même règlement.

19      Aux termes de l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, le demandeur peut à tout moment retirer sa demande de marque de l’Union européenne ou limiter la liste des produits ou des services qu’elle contient.

20      De même, en vertu de l’article 33, paragraphe 2, de ce règlement, les produits et les services pour lesquels la protection de la marque est demandée sont désignés par le demandeur avec suffisamment de clarté et de précision pour permettre aux autorités compétentes et aux opérateurs économiques de déterminer, sur cette seule base, l’étendue de la protection demandée.

21      Il ressort de la jurisprudence qu’il ne saurait être fait droit à une limitation des produits si celle-ci est de nature à entraîner une insécurité juridique quant à l’étendue de la protection de la marque. En outre, conformément à l’article 4 du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 31, paragraphe 1, sous c), du même règlement, les produits visés par la demande d’enregistrement doivent être identifiés de façon claire et précise pour être inscrits au registre [voir arrêt du 31 mai 2018, Nosio/EUIPO (MEZZA), T‑314/17, non publié, EU:T:2018:315, point 34 et jurisprudence citée].

22      Il convient également de rappeler qu’il ressort de l’arrêt du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland (C‑363/99, EU:C:2004:86), que, afin d’éviter la persistance d’incertitudes juridiques quant à l’étendue de la protection d’une marque, une limitation ne peut être enregistrée que si elle fait clairement apparaître la liste des produits qui demeurent au registre et ne saurait avoir pour but d’exclure des produits ayant certaines caractéristiques. Une pratique contraire serait de nature à entraîner une insécurité juridique quant à l’étendue de la protection de la marque. Les tiers, en particulier les concurrents, ne seraient pas, en règle générale, informés que, pour des produits ou des services donnés, la protection conférée par la marque ne s’étend pas à ceux de ces produits ou de ces services qui présentent une caractéristique déterminée, et ils pourraient ainsi être amenés à renoncer à utiliser les signes ou les indications composant la marque et descriptifs de cette caractéristique pour décrire leurs propres produits (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, EU:C:2004:86, point 115).

23      En outre, le Tribunal a estimé que la finalité ou la destination d’un produit ou d’un service était une indication pertinente pour apprécier si une limitation demandée devait être prise en compte. À cet égard, il a été jugé que, dans la mesure où le consommateur recherche avant tout un produit ou un service qui pourra répondre à ses besoins spécifiques, la finalité ou la destination du produit ou du service en cause revêt un caractère essentiel dans l’orientation de son choix. Dès lors, dans la mesure où il est appliqué par les consommateurs préalablement à tout achat, le critère de finalité ou de destination est un critère primordial dans la définition d’une sous‑catégorie de produits ou de services [voir arrêt du 8 novembre 2013, Kessel/OHMI – Janssen-Cilag (Premeno), T‑536/10, non publié, EU:T:2013:586, point 43 et jurisprudence citée].

24      En l’espèce, il convient de relever, ainsi qu’il ressort du point 6 de la décision attaquée, que, au titre de la limitation de la liste des produits visés par la marque demandée, la requérante a sollicité devant la chambre de recours les modifications suivantes :

–        la suppression des produits « alliages sous forme d’anneaux pour le gainage des câbles du moteur » et « fourreau en métal pour câbles électriques [gaines] » de la liste des produits relevant de la classe 6 ;

–        le remplacement du terme « notamment » par « à savoir » et l’ajout de la précision « pour la fabrication d’anneaux ou de formes ovales pour le gainage des câbles du moteur et de réseau » en ce qui concerne les produits « métaux communs bruts et mi-ouvrés et leurs alliages, à savoir matériaux magnétiques à haute perméabilité initiale, ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation, y compris alliages et matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte » relevant de la classe 6 ; de surcroît, s’agissant de ces derniers produits, la précision « haute perméabilité de saturation » a été supprimée, tandis que celle de « ainsi que haute induction de saturation » a été ajoutée ;

–        l’ajout de la précision « en matériaux à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation, à savoir alliages et matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte » aux produits « noyaux magnétiques » relevant de la classe 9 ;

–        l’ajout de la précision « filtrage » dans le libellé des produits « composants inductifs pour le filtrage et la dérivation de courants d’ondes » relevant de la classe 9 ;

–        l’ajout de la précision « composées de matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte » aux produits « gaines isolantes pour le guipage électrique et magnétique de câbles » et « gaines isolantes pour le guipage électrique et magnétique de fils » relevant de la classe 17, pour lesquels est également ajoutée la précision « magnétique ».

25      À cet égard, la chambre de recours a considéré que la modification demandée était irrecevable dans la mesure où elle ne satisfaisait pas aux conditions de l’article 33 et de l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001. En particulier, d’une part, la chambre de recours a estimé, en ce qui concerne les produits relevant de la classe 6, qu’il n’apparaissait pas clairement comment un « alliage » pouvait être ensuite défini comme servant « pour la fabrication d’anneaux ». Selon elle, il s’agirait soit du matériau brut « alliage », soit du produit fini « anneaux », fabriqué à partir de l’alliage. D’autre part, s’agissant des produits relevant de la classe 9, la chambre de recours a considéré que le libellé « à savoir alliages et matériaux magnétiques » introduisait une ambiguïté similaire et « brouill[ait] les frontières entre le matériau brut et le produit final », d’autant plus qu’il n’apparaissait pas clairement si la précision « à savoir » se référait aux « noyaux magnétiques » ou aux « matériaux ». De même, elle a estimé qu’il n’apparaissait pas clairement pourquoi un procédé de « refroidissement rapide » dans le cadre de la fabrication pouvait être une caractéristique du produit fini. Elle a ajouté que « les mêmes imprécisions justifieraient de réviser la classe 17 ».

26      En premier lieu, s’agissant des modifications apportées à la liste des produits visés par la marque demandée et consistant en la suppression des produits « alliages sous forme d’anneaux pour le gainage des câbles du moteur » et « fourreau en métal pour câbles électriques [gaines] » relevant de la classe 6, cette demande de limitation ne se heurte manifestement pas aux dispositions de l’article 33, paragraphe 2, du règlement 2017/1001. En effet, la suppression de ces produits de la liste des produits visés par la marque demandée est sans incidence sur la clarté et la précision du libellé des autres produits visés par cette marque.

27      À cet égard, il convient d’ajouter qu’une limitation résultant en la suppression des produits ou des services est admissible même devant le Tribunal. En effet, une limitation opérée conformément à l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, postérieurement à l’adoption de la décision attaquée, peut être prise en considération par le Tribunal lorsque le demandeur se borne strictement à réduire l’objet du litige en retirant certaines catégories de produits ou de services de la liste des produits et des services désignés dans la demande de marque [voir arrêt du 8 mai 2014, Pyrox/OHMI – Köb Holzheizsysteme (PYROX), T‑575/12, non publié, EU:T:2014:242, point 20 et jurisprudence citée].

28      Ainsi, c’est à tort que la chambre de recours a considéré qu’une demande consistant en la suppression des produits visés au point 26 ci-dessus était irrecevable.

29      Il en va de même en ce qui concerne le remplacement de l’adverbe « notamment » par « à savoir » dans la liste des produits relevant de la classe 6, dans la mesure où, de telle manière, la requérante a voulu viser une variante spécifique aux métaux communs bruts et mi-ouvrés et leurs alliages, à savoir ceux qui peuvent être définis comme des « matériaux magnétiques à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation ». Ainsi, les seuls métaux communs bruts et mi-ouvrés et leurs alliages visés par la marque demandée sont les matériaux magnétiques à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation.

30      À cet égard, le Tribunal a déjà jugé que l’expression « à savoir » restreignait le champ de l’enregistrement aux seuls produits spécifiquement énumérés après cette expression [arrêt du 4 octobre 2016, Lidl Stiftung/EUIPO – Horno del Espinar (Castello), T‑549/14, non publié, EU:T:2016:594, point 71].

31      S’agissant de l’ajout, à la liste des produits relevant de la classe 6, de la précision « pour la fabrication d’anneaux ou des formes ovales pour le gainage des câbles du moteur et de réseau » à la spécification des « alliages et matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte », il convient de relever qu’il s’agit de la finalité des alliages et des matériaux magnétiques en question. En conséquence, cette limitation doit également être considérée comme admissible, en application de la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus.

32      En effet, contrairement aux considérations de la chambre de recours, ladite modification ne comporte pas d’ambiguïté dans la mesure où il apparaît que les matériaux bruts (à savoir les alliages et les matériaux magnétiques) sont destinés à la fabrication d’un produit fini (à savoir des anneaux ou des formes ovales pour le gainage des câbles du moteur et de réseau). Par ailleurs, la chambre de recours a reconnu elle-même, au point 9 de la décision attaquée, que les anneaux pouvaient être fabriqués à partir de l’alliage.

33      En outre, il y a lieu de constater que l’argument de l’EUIPO selon lequel les matières premières et les produits finis appartiennent à des classes distinctes de la classification de Nice est dénué de pertinence. En effet, la limitation sollicitée par la requérante ne vise pas à introduire des produits finis dans le libellé des produits relevant de la classe 6, mais, ainsi qu’il ressort du point 32 ci-dessus, de préciser la destination desdits produits.

34      Quant à la possibilité de préciser la destination des produits, la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus ne fait pas de distinction entre les matières premières et les produits finis.

35      Dans ces conditions, c’est à tort que la chambre de recours a considéré comme irrecevable la limitation des produits relevant de la classe 6 en ce qu’elle consiste en la suppression de deux produits, au remplacement de l’adverbe « notamment » par « à savoir » et en l’ajout de la précision « pour la fabrication d’anneaux ou de formes ovales pour le gainage des câbles du moteur et de réseau ».

36      S’agissant, en deuxième lieu, des « noyaux magnétiques » relevant de la classe 9, la limitation visait à ajouter la précision suivante : « en matériaux à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation, à savoir alliages et matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte ».

37      Il y a lieu de rappeler que, d’une part, la chambre de recours a considéré qu’il n’apparaissait pas clairement si la précision « à savoir alliages et matériaux magnétiques » visait les « noyaux magnétiques » ou les « matériaux à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation » et, d’autre part, elle se demandait en quoi un procédé de « refroidissement rapide » dans le cadre de fabrication pouvait être une caractéristique du produit fini.

38      À cet égard, premièrement, la chambre de recours n’a pas expressément remis en cause que la requérante pouvait préciser que les anneaux peuvent être définis comme étant fabriqués à partir de matériaux à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation. En effet, le matériau utilisé pour fabriquer un produit constitue une caractéristique pouvant définir ce dernier. De même, les listes des produits couverts par des marques comportent souvent la préposition « en » indiquant cette caractéristique. À titre d’exemple, il convient de citer les « jantes en alliage », qui apparaissent dans les listes des produits visés par différentes marques [arrêts du 25 novembre 2015, bd breyton-design/OHMI (RACE GTP), T‑520/14, non publié, EU:T:2015:884, point 3, et du 30 janvier 2019, Bekat/EUIPO – Borbet (ARBET), T‑79/18, non publié, EU:T:2019:39, point 5], ou les « roues en alliage » [arrêt du 23 avril 2013, Apollo Tyres/OHMI – Endurance Technologies (ENDURACE), T‑109/11, non publié, EU:T:2013:211, point 7].

39      Partant, il doit être possible, aux fins de la limitation de la liste des produits ou des services au titre de l’article 49, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, de préciser la matière utilisée pour fabriquer des produits à condition que la définition de cette matière soit elle-même claire et précise. Or, les matériaux utilisés pour fabriquer les noyaux magnétiques correspondent, en substance, aux produits visés par la marque demandée relevant de la classe 6 pour lesquels les deux instances de l’EUIPO n’ont pas soulevé d’objections.

40      Deuxièmement, s’agissant de l’emploi de l’expression « à savoir » en l’espèce, elle vise incontestablement les « matériaux à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation » et non pas les « noyaux magnétiques ». Si, en ce qui concerne les produits relevant de la classe 9, la requérante a choisi d’employer l’expression « à savoir » au lieu de celle « y compris » utilisée s’agissant des produits relevant de la classe 6, il ne saurait être soutenu qu’elle entendait introduire une ambiguïté et « brouiller les frontières » entre le matériau brut et le produit final. Il apparaît clairement qu’elle entendait protéger les noyaux magnétiques produits en matériaux à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation, qui, à leur tour, se définissaient comme étant des alliages et des matériaux magnétiques.

41      Troisièmement, s’agissant de la mention du procédé de refroidissement rapide, la chambre de recours a considéré qu’il n’apparaissait pas clairement en quoi celui-ci pouvait être une caractéristique du produit fini. Or, ainsi que l’a notamment fait valoir la requérante, cette mention décrit la méthode de production des alliages et des matériaux magnétiques et, de ce fait, constitue une caractéristique de ces derniers. Par ailleurs, il convient de relever que cette précision figure également dans le libellé des produits relevant de la classe 6 initialement demandés à l’égard desquels l’EUIPO n’a pas soulevé d’objections. Partant, le commentaire de la chambre de recours quant à l’éventuelle non pertinence de cette précision n’est pas fondé.

42      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, en vertu de la jurisprudence, la chambre de recours ne peut pas rejeter une demande de limitation au seul motif que celle-ci se réfère à un critère non pertinent pour définir une sous-catégorie des produits visés par la demande de marque de l’Union européenne, dès lors que cette demande de limitation est en tout état de cause fondée sur un critère essentiel aux fins de la définition d’une sous-catégorie desdits produits (voir, en ce sens, arrêt du 11 décembre 2014, OHMI/Kessel medintim, C‑31/14 P, non publié, EU:C:2014:2436, point 39). Or, en l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 38 et 39 ci-dessus, les autres précisions introduites par la requérante en ce qui concerne les noyaux magnétiques sont pertinentes.

43      S’agissant, en troisième lieu, des produits relevant de la classe 17, la requérante, certes, n’a pas avancé d’arguments concrets pour contester les objections de la chambre de recours, comme le relève à juste titre l’EUIPO. Cependant, force est de constater que, dans la mesure où la chambre de recours s’est limitée à relever que « [l]es mêmes imprécisions justifieraient de réviser la classe 17 », elle est également restée très vague en ce qui concerne ses objections relatives à ces produits. De même, dans la mesure où la précision apportée aux produits relevant de la classe 17, à savoir « composées de matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte », correspond à celle relative aux produits relevant des classes 6 et 9, il y a lieu d’appliquer le raisonnement mené aux points 36 à 42 du présent arrêt et de considérer que cette précision est suffisamment claire et précise pour caractériser les « gaines isolantes pour le guipage électrique et magnétique de câbles » et les « gaines isolantes pour le guipage électrique et magnétique de fils ».

44      En quatrième lieu, il y a lieu de relever que la chambre de recours n’a pas indiqué les motifs pour lesquels elle a refusé certaines modifications apportées par la requérante à la liste initiale des produits visés par la marque demandée.

45      Ces modifications portent, premièrement, sur les produits « métaux communs bruts et mi-ouvrés et leurs alliages, à savoir matériaux magnétiques à haute perméabilité initiale ou haute perméabilité maximale, ainsi que haute induction de saturation, y compris alliages et matériaux magnétiques qui présentent une structure amorphe, partiellement amorphe ou polycristalline par un refroidissement rapide à partir de la fonte » relevant de la classe 6. Dans cette description modifiée, la requérante a enlevé la précision « haute perméabilité de saturation » et a ajouté « ainsi que haute induction de saturation » en ce qui concerne la nature des « matériaux magnétiques ».

46      Deuxièmement, s’agissant des produits « composants inductifs pour le filtrage et la dérivation de courants d’ondes » relevant de la classe 9, les mots « le filtrage et » ont été ajoutés.

47      Troisièmement, en ce qui concerne les « gaines isolantes pour le guipage électrique et magnétique de câbles » et les « gaines isolantes pour le guipage électrique et magnétique de fils » relevant de la classe 17, la requérante a ajouté le terme « magnétique ».

48      À cet égard, il doit être rappelé que, conformément à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation, découlant aussi de l’article 296 TFUE, a fait l’objet d’une jurisprudence constante selon laquelle la motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, de manière à permettre, d’une part, aux intéressés un exercice effectif de leur droit à demander un contrôle juridictionnel de la décision attaquée et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [voir arrêt du 29 juin 2017, Cipriani/EUIPO – Hotel Cipriani (CIPRIANI), T‑343/14, EU:T:2017:458, point 34 et jurisprudence citée].

49      Par ailleurs, la constatation d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation relève de la violation des formes substantielles, au sens de l’article 263 TFUE, et constitue un moyen d’ordre public qui doit être soulevé d’office par le juge de l’Union (arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 67).

50      Toutefois, l’obligation, pour le juge de l’Union, de relever d’office un moyen d’ordre public doit être exercée à la lumière du principe du contradictoire [voir arrêt du 12 décembre 2017, Sony Computer Entertainment Europe/EUIPO – Vieta Audio (Vita), T‑35/16, non publié, EU:T:2017:886, point 48 et jurisprudence citée].

51      En l’espèce, le Tribunal ayant décidé d’examiner d’office le respect, par la chambre de recours, de son obligation de motivation, il a invité les parties à répondre à une question posée dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure prévue à l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal. En particulier, les parties ont été invitées à se prononcer sur la question de savoir si la motivation avancée par la chambre de recours portant sur la limitation en ce qui concerne les produits visés aux points 45 à 47 ci-dessus respectait l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001.

52      À cet égard, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas abordé les limitations visées aux points 45 à 47 ci-dessus et n’a pas indiqué pour quelles raisons elle estimait qu’il existait un manque de clarté de la liste restreinte des produits.

53      L’EUIPO, pour sa part, fait valoir qu’au point 9 de la décision attaquée, la chambre de recours a exposé à suffisance les raisons pour lesquelles elle a rejeté la limitation de la liste des produits. Il estime que cette motivation permet à la requérante de connaître les justifications de la décision attaquée afin de défendre ses droits, et au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité de cette partie de ladite décision.

54      En dépit des justifications avancées par l’EUIPO, force est de constater que la chambre de recours n’a pas motivé son refus de prendre en compte la limitation de la liste des produits visés par la marque demandée en ce qui concerne les modifications relevées aux points 45 à 47 ci-dessus. Partant, le Tribunal n’est pas en mesure d’apprécier si lesdites modifications respectent les conditions visées à l’article 33, paragraphe 2, du règlement 2017/1001. Par conséquent, ladite chambre a violé l’obligation de motivation visée à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du même règlement.

55      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’accueillir le présent moyen et d’annuler la décision attaquée pour autant qu’elle porte sur les produits dont le libellé est modifié par la demande de limitation de la requérante, sans qu’il soit besoin d’examiner la question de savoir si les matières premières et les produits finis sont bien délimitées dans l’arrangement de Nice.

56      Dans ces conditions, l’examen du second moyen portera uniquement sur les produits qui ne sont pas concernés par la demande de limitation de la requérante, à savoir, d’une part, les « alliages, alliages de métaux non ferreux, alliages de métaux communs, métaux communs et leurs alliages, y compris acier inoxydable et alliages de fer » relevant de la classe 6 et, d’autre part, les « composants inductifs pour la protection de moteurs ; câbles moteur et conducteurs électriques ; gaines de protection de lignes électriques ; housses de protection pour câbles électroniques ; réacteurs en dérivation ; parties d’appareils physiques, chimiques, optiques et électrotechniques, compris dans la classe 9 » relevant de la classe 9.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

57      La requérante estime que la marque demandée est suffisamment distinctive tant pour les produits pour lesquels elle a été initialement demandée que pour les produits tels qu’ils ont été précisés à la suite de la demande de limitation présentée devant la chambre de recours. Elle explique que les produits finis potentiels qu’elle fabrique à partir de l’alliage sont des noyaux toroïdaux qui sont montés sur câble et qui empêchent l’apparition d’interférences électromagnétiques dans les moteurs (électriques). Ces produits ne peuvent généralement être installés dans les moteurs ou les câbles de moteur que par des professionnels spécialisés.

58      L’EUIPO soutient que la chambre de recours n’a pas violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 et, par conséquent, conteste les allégations de la requérante. Selon lui, la marque demandée n’est pas distinctive et ne sera pas perçue par le public en tant qu’indication de l’origine commerciale des produits qu’elle vise.

59      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. Le caractère distinctif d’une marque au sens de la disposition précitée signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (voir arrêts du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 34 et jurisprudence citée, et du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 33 et jurisprudence citée).

60      Le caractère distinctif d’une marque doit donc être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (voir arrêt du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 35 et jurisprudence citée).

61      Pour constituer une marque de l’Union européenne au sens de l’article 4 du règlement 2017/1001, des couleurs ou des combinaisons de couleurs doivent remplir trois conditions. Premièrement, elles doivent constituer un signe. Deuxièmement, ce signe doit être susceptible d’une représentation graphique. Troisièmement, ledit signe doit être propre à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises (arrêt du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, EU:C:2003:244, point 23 ; voir également, par analogie, arrêt du 24 juin 2004, Heidelberger Bauchemie, C‑49/02, EU:C:2004:384, point 22).

62      Les couleurs et leurs combinaisons abstraites ne peuvent se voir reconnaître un caractère distinctif intrinsèque que dans des circonstances exceptionnelles, étant donné qu’elles se confondent avec l’aspect des produits désignés et qu’elles ne sont pas, en principe, utilisées comme moyens d’identification d’origine commerciale (voir, par analogie, arrêts du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, EU:C:2003:244, points 65 et 66, et du 24 juin 2004, Heidelberger Bauchemie, C‑49/02, EU:C:2004:384, point 39).

63      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le présent moyen.

64      S’agissant de la détermination du public pertinent, la requérante soutient que les acheteurs des produits en cause sont des professionnels ayant un degré d’attention élevé et des connaissances techniques dans le domaine du génie électrique. Si, en ce qui concerne les produits relevant de la classe 9, la chambre de recours aurait correctement ciblé les clients professionnels sans toutefois poursuivre son examen en se référant de façon conséquente à leur perception, elle se serait fondée sur des faits dénaturés et déformés qui ne correspondent pas à la réalité, en considérant que les produits relevant de la classe 6 s’adressaient non seulement au public professionnel, mais également aux consommateurs finaux.

65      L’EUIPO estime que les produits en cause ne s’adressent pas uniquement à un public professionnel particulier, possédant un niveau d’attention accru et des connaissances techniques dans le domaine électronique. Ainsi, les « métaux communs » relevant de la classe 6 désigneraient des produits avec une large clientèle. En outre, même le public professionnel visé par les produits relevant de la classe 9 ne serait pas aussi restreint que le prétendrait la requérante, car les câbles moteurs seraient utilisés par tous les garages automobiles.

66      En l’espèce, la chambre de recours a relevé, au point 19 de la décision attaquée, que les produits relevant de la classe 9 visés par la marque demandée étaient des noyaux magnétiques servant au guipage électromagnétique et électrique. Il s’agirait de composants spéciaux à insérer dans des machines ou installations (éoliennes) plus vastes et ils seraient utilisés d’une manière qui n’est pas visible pour l’utilisateur. Au vu de ces considérations, la chambre de recours en a déduit que l’appréciation du caractère distinctif de la marque demandée pour ces produits devait dépendre de la perception du public spécialisé de l’ensemble de l’Union chargé de ces machines ou installations qui fera preuve de connaissances professionnelles élevées dans le domaine électrotechnique.

67      Au point 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les conditions techniques spécifiques relevées au point 19 de ladite décision n’étaient pas applicables aux produits visés par la marque demandée relevant de la classe 6. En particulier, elle a fait valoir que les alliages relevant de la classe 6 désignaient tous les alliages tridimensionnels et non pas seulement ceux pour la fabrication de noyaux magnétiques. En conséquence, la chambre de recours a estimé que ces produits seraient intéressants pour un éventail plus large de clients.

68      S’agissant, dans un premier temps, des produits relevant de la classe 6, la chambre de recours a considéré que « ces produits ser[aient] intéressants pour un éventail plus large des clients ». À cet égard, force est de constater que la requérante interprète cette considération comme visant le grand public (voir point 64 ci-dessus).

69      Certes, il y a lieu de relever que la chambre de recours a estimé que le public auquel s’adressaient les produits relevant de la classe 6 n’était pas aussi restreint que celui auquel s’adressaient les noyaux magnétiques relevant de la classe 9. Toutefois, ces considérations ne permettent pas d’établir, de manière claire et non équivoque, si la chambre de recours a considéré que ces produits s’adressaient au grand public ou au public professionnel moins restreint que celui visé par les noyaux magnétiques.

70      En vertu de la jurisprudence citée aux points 48 à 50 ci-dessus, le Tribunal ayant décidé d’examiner d’office le respect, par la chambre de recours, de son obligation de motivation, il a invité les parties à répondre à une question posée dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure prévue à l’article 89 du règlement de procédure. Les parties ont été interrogées sur la question de savoir si les considérations de la chambre de recours selon lesquelles « [c]es produits seront intéressants pour un éventail plus large des clients » respectait l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, ainsi que la jurisprudence citée au point 48 ci-dessus.

71      À cet égard, la requérante fait valoir que, s’agissant du public pertinent, la chambre de recours s’était prononcée uniquement en ce qui concerne les « alliages » relevant de la classe 6 et les « gaines isolantes » relevant de la classe 17, mais n’avait pas examiné le public visé par les autres produits relevant de la classe 6.

72      En revanche, l’EUIPO soutient que la chambre de recours a entériné la décision de l’examinateur qui, dans sa lettre du 19 mars 2019, avait déjà fait remarquer que les produits en cause s’adressaient à des clients commerciaux. Or, la décision de l’examinateur ainsi que sa motivation feraient partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée. Il estime, en conséquence, que la chambre de recours a respecté l’obligation lui incombant en vertu de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001.

73      À cet égard, certes, comme le soutient l’EUIPO, compte tenu de la continuité fonctionnelle entre l’examinateur et la chambre de recours, la décision de l’examinateur ainsi que sa motivation font partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée, contexte qui est connu de la requérante et qui permet au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité [voir arrêt du 8 septembre 2021, Eos Products/EUIPO (Forme d’un récipient sphérique), T‑489/20, non publié, EU:T:2021:547, point 74 et jurisprudence citée].

74      Il convient de relever que, en l’espèce, l’examinateur a soutenu, dans sa lettre du 19 mars 2019, que les produits en cause s’adresseraient à des professionnels ayant des connaissances techniques approfondies et, dans sa décision de refus du 26 novembre 2019, qu’il ne ressortait pas de la liste des produits relevant de la classe 6 que le marché auquel s’adressaient ces produits était très spécifique.

75      Toutefois, ces considérations ne permettent pas, de façon claire et non équivoque, de comprendre si les produits relevant de la classe 6 s’adressent à un cercle plus large de professionnels que celui visé par les noyaux magnétiques relevant de la classe 9 ou le grand public (voir point 69 ci-dessus).

76      Partant, il y a lieu de considérer que la position de la chambre de recours selon laquelle les produits relevant de la classe 6 seraient intéressants pour un éventail plus large des clients ne permet pas, de manière claire et non équivoque, d’établir quel est le public visé par ces produits.

77      Or, conformément à la jurisprudence citée au point 48 ci-dessus, la motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, de manière à permettre, d’une part, aux intéressés un exercice effectif de leur droit à demander un contrôle juridictionnel de la décision attaquée et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision (voir arrêt du 29 juin 2017, CIPRIANI, T‑343/14, EU:T:2017:458, point 34 et jurisprudence citée).

78      De surcroît, dans la mesure où, conformément à la jurisprudence citée au point 60 ci-dessus, le caractère distinctif doit notamment être apprécié par rapport à la perception du public pertinent, la circonstance selon laquelle la chambre de recours n’a pas défini le public pertinent ou l’a défini de manière équivoque est de nature à entacher l’ensemble de son raisonnement en ce qui concerne l’appréciation dudit caractère distinctif. Il en va d’autant plus ainsi que, dans le cas d’une couleur en elle-même, l’existence d’un caractère distinctif avant tout usage ne peut se concevoir que dans des circonstances exceptionnelles, et notamment lorsque le nombre des produits ou des services pour lesquels la marque est demandée est très limité et que le marché pertinent est très spécifique (arrêt du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, EU:C:2003:244, point 66).

79      Il s’ensuit que la chambre de recours a manqué à son obligation de motivation, visée à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de se prononcer sur les allégations de la requérante selon lesquelles les considérations de la chambre de recours ne couvraient pas tous les produits relevant de la classe 6.

80      S’agissant, dans un second temps, des produits visés par la marque demandée relevant de la classe 9, à savoir les « composants inductifs pour la protection de moteurs ; câbles moteur et conducteurs électriques ; gaines de protection de lignes électriques ; housses de protection pour câbles électroniques ; réacteurs en dérivation ; parties d’appareils physiques, chimiques, optiques et électrotechniques, compris dans la classe 9 », il convient de relever que la chambre de recours n’a pas expressément défini le public pertinent visé par ces produits. Elle s’est limitée à mentionner, au point 19 de la décision attaquée, les noyaux magnétiques et a considéré que ceux-ci s’adressaient à un public spécialisé faisant preuve de connaissances professionnelles élevées dans le domaine électrotechnique. Or, ces considérations ne sauraient pas s’appliquer, de manière automatique et sans autre explication, à tous les produits relevant de la classe 9 visés par la marque demandée qui ne correspondent pas aux « noyaux magnétiques ».

81      À cet égard, en vertu de la jurisprudence citée aux points 48 à 50 ci-dessus, le Tribunal ayant décidé d’examiner d’office le respect, par la chambre de recours, de son obligation de motivation, il a invité les parties à répondre à une question posée dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure prévue à l’article 89 du règlement de procédure. Les parties ont été interrogées sur la question de savoir si la chambre de recours a défini le public pertinent visés par les produits relevant de la classe 9, autres que les noyaux magnétiques, et si cette motivation respectait l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001.

82      À cet égard, la requérante estime que la chambre de recours ne s’est pas exprimée sur le public pertinent visé par les produits relevant de la classe 9 à part les « noyaux magnétiques ».

83      L’EUIPO, quant à lui, soutient que, s’agissant des produits mentionnés au point 68 ci-dessus, la chambre de recours a défini le public pertinent en confirmant la décision de l’examinateur selon laquelle ces produits s’adressent à des clients commerciaux.

84      Ces explications ne sauraient toutefois remettre en cause la constatation faite au point 80 ci-dessus selon laquelle la chambre de recours a, en l’espèce, défini expressément le public pertinent uniquement par rapport aux noyaux magnétiques. De même, notamment pour les raisons indiquées au point 78 ci-dessus, l’EUIPO ne saurait utilement se référer à la continuité fonctionnelle entre l’examinateur et la chambre de recours.

85      Il s’ensuit que la chambre de recours a manqué à l’obligation de motivation visée à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001.

86      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’accueillir le second moyen et d’annuler la décision attaquée également en ce qui concerne, d’une part, les « alliages, alliages de métaux non ferreux, alliages de métaux communs, métaux communs et leurs alliages, y compris acier inoxydable et alliages de fer » relevant de la classe 6 et, d’autre part, les « composants inductifs pour la protection de moteurs ; câbles moteur et conducteurs électriques ; gaines de protection de lignes électriques ; housses de protection pour câbles électroniques ; réacteurs en dérivation ; parties d’appareils physiques, chimiques, optiques et électrotechniques, compris dans la classe 9 » relevant de la classe 9.

87      Partant, il y a lieu d’annuler la décision attaquée dans son intégralité.

 Sur les dépens

88      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

89      En outre, la requérante a conclu à la condamnation de l’EUIPO aux dépens qu’elle a exposés devant la chambre de recours. À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Partant, il y a également lieu de condamner l’EUIPO aux dépens indispensables exposés par la requérante aux fins de la procédure devant la chambre de recours.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 18 janvier 2021 (affaire R 217/20204) est annulée.

2)      L’EUIPO est condamné aux dépens.

Costeira

Perišin

Zilgalvis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 octobre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.