Language of document : ECLI:EU:T:2007:294

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

20 septembre 2007 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale PURE DIGITAL – Motifs absolus de refus – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 40/94 – Caractère distinctif acquis par l’usage – Article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 »

Dans l’affaire T-461/04,

Imagination Technologies Ltd, établie à Kings Langley, Hertfordshire (Royaume-Uni), représentée par MM. M. Edenborough, barrister, P. Brownlow et N. Jenkins, solicitors,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par M. D. Schennen, puis par M. D. Botis, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 16 septembre 2004 (affaire R 108/2004-2), concernant une demande d’enregistrement de la marque verbale PURE DIGITAL comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. M. Jaeger, président, J. Azizi et Mme E. Cremona, juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 1er décembre 2004,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 11 février 2005,

à la suite de l’audience du 13 septembre 2006,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 1er octobre 2001, Imagination Technologies Ltd. (ci-après la « requérante ») a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal PURE DIGITAL. Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9 et 38 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci-après l’« arrangement de Nice »), et correspondent à la description suivante :

–        Classe 9 : « Appareils électriques et électroniques à utiliser avec les systèmes de divertissement multimédia ; appareils d’installation pour recevoir, enregistrer et reproduire le son, la vidéo et les informations numériques ; adaptateurs vidéo numériques et adaptateurs vidéo interactifs à utiliser avec les ordinateurs, appareils vidéo, matériel informatique, logiciel à utiliser avec des applications multimédia et des applications graphiques ; enceintes, amplificateurs, décodeurs, systèmes DVD et de radio numérique ; ordinateurs mobiles de poche et dispositifs de communication ; cartes, cartes son, cartouches ; bandes, disques, cassettes et autres supports pour l’enregistrement des données, du son et de l’image ; système de divertissement embarqué, en l’occurrence dispositifs de navigation embarquée, radios ou vidéos embarquées fonctionnant sur tout système de reproduction embarqué ; pièces, installations et composants électroniques pour tous les produits précités » ;

–        Classe 38 : « Télécommunication d’informations, logiciels, jeux et programmes pour ordinateurs et installations vidéo ; services de messagerie électronique, fourniture d’accès par télécommunication aux bases de données informatiques et à l’Internet »

3        Le 12 décembre 2003, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement, au motif que la marque en cause était descriptive et dépourvue de tout caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c) du règlement n° 40/94. À la lumière des éléments de preuve produits par la requérante, l’examinateur a, en outre, écarté l’application du paragraphe 3 du même article.

4        Le 29 janvier 2004, la requérante a formé un recours contre la décision de l’examinateur.

5        Par décision du 16 septembre 2004 (ci-après la « décision attaquée »), la chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours, confirmant ainsi le refus d’enregistrement de la marque demandée.

 Conclusions des parties

6        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et la décision de l’examinateur ;

–        renvoyer la demande d’enregistrement devant l’OHMI, ou subsidiairement devant la chambre de recours ;

–        condamner l’OHMI aux dépens qu’elle a exposés dans le cadre du présent recours, et aux frais qu’elle a supportés au titre du recours devant la chambre de recours et au titre de la procédure qui s’est déroulée devant l’examinateur.

7        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 Sur la demande d’annulation de la décision de la chambre de recours

 Observations liminaires

8        Il convient d’observer que, bien que la décision attaquée n’indique pas expressément que l’enregistrement de la marque demandée doit être refusé au motif que celle-ci est dépourvue de caractère distinctif et est descriptive, la chambre de recours a affirmé qu’une des questions à traiter en l’espèce était celle d’apprécier si l’examinateur avait refusé à bon droit l’enregistrement de la marque demandée sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement nº 40/94. De plus, il ressort des points 10 à 14 de la décision attaquée que la chambre de recours a confirmé la position de l’examinateur quant aux deux motifs de refus. En particulier, dans la décision attaquée, la chambre de recours conclut que le consommateur percevrait le signe comme indiquant le type de produits et de services visés, ce qui constitue une paraphrase de l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement.

9        Il s’ensuit qu’il y a lieu de considérer que la décision attaquée est fondée, notamment, sur les motifs absolus de refus visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et sous c), du règlement nº 40/94.

10      Au soutien de sa demande d’annulation de la décision attaquée, la requérante soulève trois moyens. Dans le premier moyen, intitulé « Caractère distinctif per se de la marque », la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir considéré la marque demandée comme étant distinctive per se. Il y a lieu d’observer, toutefois, que, en dépit de l’intitulé dudit moyen, la requérante soutient, en réalité, que la marque demandée n’est pas visée par les motifs de refus prévus à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement nº 40/94 et que, contrairement aux constatations de la chambre de recours, la marque n’est pas descriptive pour certains produits mentionnés dans la description des produits et des services relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice. Le premier moyen peut, dès lors, être compris comme étant tiré non seulement de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 (première branche) mais aussi de l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement (deuxième branche). Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’article 38, paragraphe 2, du règlement nº 40/94, en ce que la chambre de recours n’aurait pas pris en considération la possibilité de demander la déclaration prévue dans cette dernière disposition. Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement nº 40/94, en ce que la chambre de recours aurait dû reconnaître que la marque avait acquis un caractère distinctif par l’usage que la requérante en avait fait.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, du règlement nº 40/94

11      En l’espèce, il convient d’examiner, d’abord, si la chambre de recours a fait une application exacte de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94.

 Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c)

–       Arguments des parties

12      La requérante fait valoir, tout d’abord, que l’élément verbal « pure digital » ne peut pas être considéré, dans son ensemble, comme descriptif, étant donné qu’il s’agirait d’une invention lexicale capable de donner à la marque un pouvoir distinctif, conformément à la jurisprudence BABY-DRY (arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec. p. I‑6251, point 44).

13      La requérante soutient, ensuite, que, même en considérant la marque comme descriptive pour certains produits mentionnés dans la description des produits et des services relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice, la chambre de recours n’aurait pas dû refuser l’enregistrement pour tous les produits indiqués dans ladite description. En effet, les produits mentionnés dans la description des produits et des services relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice inclurait des produits qui ne sont pas numériques. Dès lors, par définition, la marque ne serait pas descriptive d’un sous-ensemble de produits faisant partie de ladite description.

14      À cet égard, s’agissant des produits pour lesquels la marque ne serait pas descriptive, la requérante considère que le consommateur ne peut pas être trompé, et que la marque ne viole donc pas l’article 7, paragraphe 1, sous g), du règlement n° 40/94, de sorte que l’objection soulevée par l’OHMI serait injustifiée. Selon la requérante, lorsqu’une marque ayant une quelconque connotation descriptive (telle que orange pour les télécommunications, SHELL pour le pétrole, SWAN pour la bière) est utilisée d’une façon distinctive pour certains produits ou services, elle est, en quelque sorte, trompeuse, car les téléphones ne sont pas orange, SHELL ne vend pas de coquillages, ou les cygnes ne sont pas liés à la bière. En revanche, il ne serait pas prouvé que le terme « pure digital » soit de nature à induire en erreur le consommateur moyen. En tout état de cause, l’OHMI aurait dû donner à la requérante la possibilité d’être entendue sur cette question.

15      Enfin, la requérante fait grief à l’OHMI d’avoir estimé que le caractère descriptif se référait également aux services relevant de la classe 38 de l’arrangement de Nice. En effet, la marque en cause ne pourrait être descriptive que de produits mais non de prestations de services, à la différence, par exemple, de termes élogieux tels que « rapide » ou « efficace », qui pourraient qualifier de façon significative des services.

16      L’OHMI soutient que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « pure digital » était descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94 et estime que les arguments de la requérante doivent, dès lors, être rejetés.

–       Appréciation du Tribunal

17      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement nº 40/94 énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

18      Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94 empêche que les signes ou indications qui y sont visés soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous [voir arrêt du Tribunal du 12 janvier 2005, Deutsche Post EURO EXPRESS/OHMI (EUROPREMIUM), T‑334/03, Rec. p. 65, point 23, et la jurisprudence citée].

19      En outre, les signes visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, sont des signes qui sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne, de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative [arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, point 28].

20      En effet, les signes et les indications visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du consommateur, à désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé (arrêt Procter & Gamble/OHMI, point 12 supra, point 39).

21      Partant, l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être portée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public ciblé (arrêt EUROPREMIUM, point 18 supra, point 26).

22      En l’espèce, les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé sont, notamment, des produits relevant des domaines de l’audiovisuel et de l’informatique (classe 9 de l’arrangement de Nice) et des services de télécommunication liés à l’utilisation d’un ordinateur (classe 38 de l’arrangement de Nice).

23      En ce qui concerne le public pertinent, la chambre de recours ne l’a pas expressément défini dans la décision attaquée. Toutefois, la marque demandée étant composée de deux termes courants de la langue anglaise, examinés dans cette langue par la chambre de recours, et en l’absence de toute contestation des parties à cet égard, il y a lieu de considérer que le public pertinent est le consommateur moyen anglophone ou ayant une connaissance élémentaire de la langue anglaise [arrêts du Tribunal du 30 novembre 2004, Geddes/OHMI (NURSERYROOM), T‑173/03, Rec. p. II‑4165, point 18, et du 8 septembre 2005, CeWe Color/OHMI (DigiFilm et DigiFilmMaker), T‑178/03 et T‑179/03, Rec. p. II‑3105, point 28].

24      En ce qui concerne la signification de l’élément verbal « pure digital », il ressort des points 10 et 11 de la décision attaquée que ce signe se compose de deux mots courants dans la langue anglaise dont le premier, « pure », a une signification suffisamment claire qui ne nécessite pas d’explication et dont le deuxième, « digital », est un terme technique particulièrement utilisé en relation avec les ordinateurs et les télécommunications. Selon la chambre de recours, l’élément verbal ainsi créé suscite immédiatement dans l’esprit du consommateur pertinent l’idée que les produits et services couverts par la marque utilisent la technologie numérique.

25      Quant à la nature du rapport existant entre l’élément verbal « pure digital » et les produits et services concernés, la chambre de recours a considéré, au point 14 de la décision attaquée, que ce terme donnait une indication sur le type de ces derniers et qu’il était donc descriptif.

26      Dès lors, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, il convient d’examiner si l’élément verbal « pure digital », compris en tant qu’allusion à des produits et des services qui utilisent la technologie numérique, présente, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret avec les produits et services pour lesquels l’enregistrement est demandé [arrêt du Tribunal du 26 novembre 2003, HERON Robotunits/OHMI (ROBOTUNITS), T‑222/02, Rec. p. II‑4995, point 38].

27      S’agissant d’abord du terme « digital », force est de constater que, ainsi que l’a relevé à juste titre l’OHMI dans son mémoire en réponse et la chambre de recours au point 10 de la décision attaquée, il se rapporte à « l’utilisation du code binaire pour représenter l’information » et qualifie donc la technologie numérique qui se caractérise par le fait que le signal numérique peut être reproduit précisément sans aucune perte de qualité, contrairement à la reproduction de signal analogique qui entraîne une détérioration de la qualité du signal.

28      S’agissant des produits relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice pour lesquels l’enregistrement a été demandé, le Tribunal observe que la technologie numérique est une caractéristique essentielle de ceux-ci. En effet, le fonctionnement de certains produits tels que les ordinateurs, les logiciels et les décodeurs se fonde sur l’utilisation du code binaire. D’autres produits tels que les supports mémoires des disques compacts ou des disques optiques numériques (ci-après « DVD ») sont, par nature, numériques. En outre, il convient de relever que, dans le domaine de l’électronique destinée au grand public, la technologie numérique est de plus en plus utilisée dans nombre d’applications (radio, télévision, télécommunication). Il y a lieu de constater, également, que, parmi la liste des produits visés dans la demande d’enregistrement, certains d’entre eux changent de nature selon qu’ils utilisent la technologie numérique ou non. Ainsi, une radio ou une télévision analogique ne peut pas capter les émissions destinées à une radio ou à une télévision numérique. Par conséquent, le terme « digital » doit être considéré comme indiquant une caractéristique essentielle de ces produits, à savoir l’utilisation de la technologie numérique, qui est susceptible d’entrer en ligne de compte lors du choix opéré par le public pertinent.

29      De même, s’agissant des services relevant de la classe 38 de l’arrangement de Nice, liés aux programmes informatiques, à la télécommunication et à la radiodiffusion couverts par la demande de marque, le terme « digital » permet au public concerné de déceler immédiatement et sans autre réflexion la description d’une caractéristique fondamentale de ceux-ci, à savoir que la prestation de ces services nécessite l’utilisation de la technologie numérique ou, à tout le moins, que celle-ci est de plus en plus répandue et recherchée par le consommateur.

30      S’agissant ensuite du terme « pure », celui-ci, ainsi que l’ont relevé à juste titre l’examinateur, la chambre de recours, au point 11 de la décision attaquée, et l’OHMI dans son mémoire en réponse, peut être compris comme un adverbe signifiant « purement » ou « seulement » qui qualifie l’intensité du son ou de l’image numérique en ce sens que le terme « pure » indique que le signal est uniquement numérique.

31      Il s’ensuit que le terme « pure » est descriptif en ce que le consommateur pertinent le percevra comme un qualificatif décrivant une caractéristique essentielle des produits et des services visés dans la demande de marque, à savoir que ceux-ci émettent ou utilisent un signal purement numérique.

32      Force est de constater que la requérante n’a ni contesté l’exactitude de la signification retenue par la chambre de recours ni fait valoir que le terme « pure » avait une autre signification. En tout état de cause, il convient de rappeler que, pour relever de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il suffit que le signe verbal, dans l’une au moins de ces significations potentielles, désigne une caractéristique des produits ou des services concernés (arrêt EUROPREMIUM, point 18 supra, point 30).

33      La marque verbale en cause étant composée de plusieurs éléments, il y a toutefois lieu d’apprécier si le caractère descriptif constaté pour les éléments qui la composent, existe aussi pour l’élément verbal considéré dans son ensemble [arrêt du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 27].

34      En l’espèce, il convient d’abord de constater que l’adjectif « pure » est placé avant le terme « digital » dans le respect de la syntaxe de la langue anglaise, de sorte que l’association des termes « pure » et « digital » n’est pas inhabituelle dans sa structure et constitue, au contraire, une expression connue de la langue anglaise pour désigner les produits visés ou présenter leurs caractéristiques essentielles (voir, en ce sens, arrêt Procter & Gamble/OHMI, point 12 supra, points 42 et 43, et arrêt ROBOTUNITS, point 26 supra, point 39). Ainsi que l’a d’ailleurs relevé la chambre de recours au point 12 de la décision attaquée, le signe en cause est « un signe ordinaire, défini et concret duquel le consommateur pertinent peut facilement déterminer la nature des produits et [des] services ». Dès lors, l’argument de la requérante selon lequel l’élément verbal « pure digital » serait une invention lexicale capable de donner à la marque un caractère distinctif doit être rejeté.

35      Il convient d’observer, ensuite, que, ainsi que l’a relevé à juste titre l’OHMI, l’adjonction du terme « pure » ne réduit pas le caractère descriptif attaché au terme « digital ». Au contraire, celle-ci renforce le caractère descriptif en intensifiant une caractéristique essentielle des produits et des services en cause. De même, l’association des termes « pure » et « digital » renforce la signification de chacun de ces mots [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 septembre 2004, Applied Molecular Evolution/OHMI (APPLIED MOLECULAR EVOLUTION), T‑183/03, Rec. p. II‑3113, points 27 et 28].

36      Il s’ensuit que la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 14 de la décision attaquée, que le signe verbal PURE DIGITAL serait perçu par le consommateur comme indiquant le type des produits et des services relatifs à l’ordinateur, à la radiodiffusion et à la communication et non l’origine commerciale de ceux-ci.

37      Il résulte de ce qui précède que l’élément verbal « pure digital », pris dans son ensemble, a un rapport suffisamment concret et direct avec les produits et services visés par la demande d’enregistrement de nature à le faire relever de l’interdiction prévue à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94.

38      Aucun des arguments avancés par la requérante n’est de nature à remettre en cause cette constatation.

39      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la liste des produits relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice, visés dans la demande de marque inclut des produits qui ne sont pas numériques et pour lesquels la marque aurait, dès lors, dû être enregistrée, il y a d’abord lieu de relever que la liste des produits relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice visés dans la demande d’enregistrement ne contient aucune limitation relative à la technologie analogique et que, au contraire, le terme « numérique » y est mentionné trois fois. Dans ces circonstances, il y a lieu de confirmer la décision attaquée en ce qu’elle rejette l’enregistrement pour l’ensemble des produits relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 7 juin 2001, DKV/OHMI (EuroHealth), T‑359/99, Rec. p. II‑1645, point 33].

40      Cet argument doit également être rejeté dès lors que la requérante se borne à indiquer que la chambre de recours n’aurait pas dû refuser l’enregistrement de la marque pour la totalité des produits relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice sans préciser ceux qui, selon elle, ne sont pas numériques et pour lesquels, par conséquent, la marque est enregistrable.

41      À supposer qu’il y ait lieu d’admettre que la requérante se réfère implicitement, à cet égard, aux produits mentionnés dans le cadre du recours qu’elle a introduit contre la décision de l’examinateur, à savoir les « processeurs home cinema, ampli multicanaux, haut-parleurs hi-fi, caissons de basses, haut-parleurs pour home cinema et système sonore et ampli intégrés au home cinema », l’argument ne saurait, en tout état de cause, prospérer. En effet, d’une part, la chambre de recours a considéré à juste titre que les « processeurs home cinema » et « ampli multicanaux » n’apparaissaient pas dans la description des produits pour lesquels l’enregistrement de la marque avait été demandé. Le caractère descriptif d’un signe devant, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence bien établie, être apprécié par rapport aux produits ou aux services concernés [voir arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, Telepharmacy Solutions/OHMI (TELEPHARMACY SOLUTIONS), T‑289/02, Rec. p. II‑2851, points 41 et 42, et la jurisprudence citée], la requérante ne saurait se prévaloir utilement de cet argument.

42      D’autre part, ainsi que l’ont relevé à juste titre la chambre de recours et l’OHMI, l’argument est erroné étant donné que, du point de vue du public pertinent, les systèmes de cinéma à domicile, lesquels sont composés d’un téléviseur, d’un lecteur de DVD, d’un amplificateur et d’enceintes, utilisent la technologie numérique ou, à tout le moins, sont susceptibles de l’utiliser.

43      Partant, l’argument de la requérante doit être rejeté comme non fondé et c’est à juste titre que la chambre de recours a rejeté l’enregistrement de la marque verbale PURE DIGITAL pour l’ensemble des produits relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice.

44      En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel l’OHMI aurait dû lui donner la possibilité d’être entendue sur la question du caractère trompeur de la marque, force est de constater qu’il est inopérant dès lors qu’il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours ne s’est pas appuyée, pour apprécier le caractère descriptif de la marque, sur le motif absolu de refus d’enregistrement tiré du caractère trompeur de la marque visé à l’article 7, paragraphe 1, sous g), du règlement n° 40/94, mais sur le motif que les produits non numériques pour lesquels la marque demandée auraient dû, selon la requérante, être enregistrée ne figuraient pas dans la description des produits et des services visés dans la demande d’enregistrement.

45      En tout état de cause, les exemples cités à cet égard par la requérante, visant à démontrer le caractère trompeur d’une marque dont la connotation descriptive est utilisée de manière distinctive sont dépourvus de pertinence. En effet, la connotation descriptive des marques invoquées (orange, SHELL, SWAN) ne désigne pas une caractéristique essentielle des produits ou des services couverts par celles-ci, à la différence de la connotation descriptive de l’élément verbal « pure digital » qui indique clairement que les produits et services liés à l’ordinateur, la radiodiffusion et à la communication utilisent ou sont susceptibles d’utiliser la technologie numérique.

46      Il résulte de ce qui précède que la deuxième branche du premier moyen tirée de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94 doit être rejetée.

 Sur la première branche, tirée de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94

–       Arguments des parties

47      En premier lieu, la requérante fait valoir que le mot « digital » étant un adjectif, il ne pourrait être qualifié que par un adverbe, à savoir « purely » et non par un adjectif comme « pure ». La construction grammaticale correcte étant alors « purely digital », la marque PURE DIGITAL constituerait ainsi une juxtaposition inhabituelle du point de vue de la syntaxe, conformément à la jurisprudence BABY-DRY (arrêt Procter & Gamble/OHMI, point 12 supra, point 43).

48      En deuxième lieu, la requérante observe que, même en considérant la construction grammaticale « pure digital » comme correcte, la chambre de recours aurait dû reconnaître qu’il ne s’agissait pas d’une expression banale. En effet, même en attribuant à la marque la signification de « rien d’autre que du numérique », elle présenterait néanmoins un caractère distinctif. L’adjectif « pure » ne pouvant en aucune façon qualifier le mot « digital », dès lors qu’un signal électrique ne pourrait être que numérique ou non numérique, il s’ensuivrait en l’espèce que l’utilisation d’un terme ainsi redondant donnerait à la marque, considérée dans son ensemble, une « étincelle de caractère distinctif ».

49      En outre, la requérante conteste que la marque dans son ensemble ne soit pas distinctive en raison de l’absence de caractère distinctif de ses composants individuels. Une telle analyse serait contraire à la jurisprudence issue de l’arrêt de la Cour du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI (C‑329/02 P, Rec. p. I‑8317), selon laquelle l’objet de l’appréciation serait plutôt la marque dans son ensemble. La requérante soutient également que, conformément à cette même jurisprudence, la demande de marque permet indubitablement au public pertinent d’identifier l’origine des produits ou des services et de les distinguer de ceux d’autres entreprises (arrêt SAT.1/OHMI précité, point 41). Cette conclusion se dégagerait également des annexes où les produits de la requérante sont mentionnés revêtus de la marque PURE DIGITAL, dans le contexte d’une liste où figurent des produits similaires identifiés par des marques telles que NORDOST, CYRUS, ATACAMA, ISOTEK, TIVOLI, REVOLVER et PMC.

50      L’OHMI soutient la solution que la chambre de recours a adoptée dans la décision attaquée et conteste les arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

51      Il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement nº 40/94, il suffit qu’un des motifs absolus de refus s’applique pour que le signe litigieux ne puisse être enregistré comme marque communautaire [voir arrêt du Tribunal du 16 mars 2006, Telefon & Buch/OHMI – Herold Business Data (WEISE SEITEN), T‑322/03, Rec. p. II‑835, point 110, et la jurisprudence citée].

52      Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche, tirée de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

53      En tout état de cause, force est de constater que les arguments avancés par la requérante dans la première branche sont manifestement dépourvus de tout fondement.

54      En premier lieu, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, une marque verbale qui est descriptive des caractéristiques de produits ou de services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, est, de ce fait, nécessairement dépourvue de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits ou services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement (voir arrêt WEISE SEITEN, point 51 supra, point 111, et la jurisprudence citée).

55      En deuxième lieu, s’agissant de l’argument tiré de ce que la marque PURE DIGITAL constitue une juxtaposition inhabituelle du point de vue grammatical, conformément à la jurisprudence BABY-DRY, en ce que le mot « digital », en tant qu’adjectif, ne pourrait être qualifié que par un adverbe, de sorte que la construction grammaticale correcte en langue anglaise serait « purely digital », il y a lieu de rappeler, tout d’abord, que le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public concerné [voir arrêt du Tribunal du 31 mai 2006, De Waele/OHMI (Forme d’une saucisse), T‑15/05, Rec. p. II‑1511, point 20, et la jurisprudence citée]. Or, en prenant en considération les produits et services pour lesquels l’enregistrement est demandé aussi bien que la compréhension du signe en cause de la part du public pertinent, les arguments de la requérante sont manifestement dépourvus de pertinence.

56      En effet, le critère de la violation d’une règle grammaticale, dégagé par la Cour dans l’arrêt Procter & Gamble/OHMI, point 12 supra, est un critère formel qui n’est pas décisif afin de déterminer l’existence du caractère distinctif de la marque. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence BABY-DRY, invoquée par la requérante, l’appréciation sur l’aptitude d’un élément verbal tel que « baby-dry » à présenter un caractère distinctif dépend de la réponse à la question de savoir si, du point de vue d’un consommateur de langue anglaise, l’élément verbal en cause peut être compris comme une façon normale de désigner ce produit ou de présenter ses caractéristiques essentielles dans le langage courant. Or, force est de constater que, à la lumière de ce critère, l’élément verbal « pure digital » ne constitue pas une juxtaposition inhabituelle dans sa structure mais, au contraire, une expression connue de la langue anglaise pour designer les produits concernés ou pour présenter leurs caractéristiques essentielles. Au demeurant, les éléments de preuve annexés au mémoire en réponse de l’OHMI confirment que l’expression « pure digital » est utilisée pour désigner des produits du même type que les produits en cause.

57      En troisième lieu, l’argument selon lequel l’adjectif « pure » serait en l’espèce superflu et l’utilisation d’un terme ainsi redondant donnerait à la marque considérée dans son ensemble une « étincelle de caractère distinctif » doit également être rejeté. En effet, ainsi qu’il a été constaté aux points 30 à 34 ci-dessus, l’adjectif « pure » ne réduit absolument pas le caractère descriptif du terme « digital », mais au contraire renforce celui-ci puisque l’association des deux mots renforce la signification de chacun d’eux (arrêt APPLIED MOLECULAR EVOLUTION, point 35 supra). Loin de donner une « étincelle de caractère distinctif » à l’élément verbal « pure digital », l’association des termes « pure » et « digital », ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours, ne fait référence qu’à l’application de la technologie numérique. Elle est donc tout à fait banale et laudative en ce qu’elle se borne à promouvoir l’idée que les produits et services visés n’utilisent que la technologie numérique.

58      En quatrième lieu, s’agissant du tract publicitaire joint par la requérante en annexe à sa requête dans lequel ses produits sont mentionnés revêtus de la marque PURE DIGITAL, à coté d’autres produits similaires, identifiés par des marques telles que NORDOST, CYRUS, ATACAMA, ISOTEK, TIVOLI, REVOLVER et PMC, il suffit de constater que, à la différence de la marque PURE DIGITAL, les marques mentionnées ci-dessus expriment instantanément un caractère distinctif fort, en ce que les termes desdites marques ne présentent aucun lien avec les produits concernés. En revanche, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 11 de la décision attaquée, l’élément verbal « pure digital » ne se rapporte qu’à des caractéristiques essentielles des produits et des services visés et ne permet nullement au consommateur de distinguer l’origine commerciale de ceux-ci.

59      Il ressort de ce qui précède que la première branche du premier moyen doit être également rejetée.

60      Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 38, paragraphe 2, du règlement nº 40/94

 Arguments des parties

61      La requérante soutient que c’est à tort que l’OHMI a ignoré l’offre de déclaration émise conformément à l’article 38, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, en raison du manque de caractère distinctif du terme « digital ». Selon elle, l’inclusion d’un tel terme est de nature à susciter des doutes sur l’étendue de la protection de la marque, et notamment sur la possibilité de décrire des produits et des services comme ayant une nature numérique. Par conséquent, la requérante relève que l’OHMI aurait dû considérer, puis accepter, l’offre de déclaration, de façon à surmonter le préjudice découlant de la situation prévue à l’article 38, paragraphe 2, du règlement n° 40/94.

62      L’OHMI estime que la requérante se méprend tant sur les conditions d’application de l’article 38, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 que sur ses conséquences juridiques. L’OHMI relève que la requérante se borne à mentionner la possibilité d’une telle déclaration, ou bien attend qu’il lui impose ladite déclaration.

 Appréciation du Tribunal

63      Aux termes de l’article 38, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, lorsque la marque comporte un élément dépourvu de caractère distinctif et que l’inclusion de cet élément dans la marque peut créer des doutes sur l’étendue de la protection de la marque, l’OHMI peut demander comme condition à l’enregistrement de la marque que le demandeur déclare qu’il n’invoquera pas de droit exclusif sur cet élément.

64      Il s’ensuit que l’application de cette disposition requiert qu’au moins un des éléments composant la marque demandée soit distinctif. Or, ainsi qu’il a été établi ci-dessus, tant les deux éléments composants la marque demandée, que la marque considérée dans son ensemble, sont dépourvus de tout caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94. Dès lors, il ne saurait être fait grief à l’OHMI de ne pas avoir considéré l’offre de déclaration au sens de l’article 38, paragraphe 2, du règlement nº 40/94.

65      Il résulte de ce qui précède que le deuxième moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement nº 40/94

 Arguments des parties

66      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de la preuve de l’usage, au seul motif que le signe pour lequel l’usage était montré ne correspondait pas exactement à la forme faisant l’objet de la demande d’enregistrement.

67      Premièrement, la requérante invoque une pratique courante, selon laquelle une demande d’enregistrement ayant pour objet une marque dénominative en lettres noires et majuscules comprendrait une demande pour cette marque dénominative en d’autres caractères et couleurs, en minuscule aussi bien qu’en majuscule. En outre, elle soutient qu’une demande ayant pour objet une locution écrite sur une ligne comprendrait la même locution écrite sur deux ou sur plusieurs lignes, tant que les mots ne sont pas séparés artificiellement.

68      Deuxièmement, en raisonnant par analogie par rapport au cas de révocation pour non-usage de la marque visé à l’article 15, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 40/94, la requérante rappelle qu’il est admissible de prouver l’usage d’une variante qui ne diffère pas par des éléments altérant le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée. Dès lors que ledit usage est admissible afin de garder l’enregistrement, il devrait l’être afin de prouver l’acquisition du caractère distinctif. En effet, par définition, les variantes ne pourraient pas différer par des éléments altérant le caractère distinctif de la marque, de sorte que l’usage contribuerait notamment à créer et à renforcer ce caractère distinctif.

69      La requérante soutient que, en l’espèce, il n’y aurait que des différences minimales entre la marque faisant l’objet de la demande d’enregistrement et la marque effectivement utilisée. L’OHMI aurait dû tenir compte de la preuve de l’usage, dès lors que, en aucun cas, les variantes ne différeraient par des éléments altérant le caractère distinctif de la marque dans la forme faisant l’objet de la demande. À titre d’exemple, la requérante indique l’usage qu’elle a fait des signes PURE Digital et PURE DIGITAL, les deux mots étant écrits, dans le second cas, sur deux lignes, en dimensions différentes, parfois en bleu.

70      En outre, la requérante fait grief à l’OHMI d’avoir rejeté la preuve de l’usage – concernant particulièrement les radios numériques – au seul motif que l’usage ne se référait pas à tous les produits et services inclus dans la description des produits pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé. Selon la requérante, la valeur des ventes [effectuée au Royaume-Uni pendant les trois années précédant septembre 2004, soit 30 millions de livres sterling (GBP)] constituerait prima facie la preuve du caractère distinctif acquis par la marque, l’usage démontré étant très important, surtout en ce qui concerne les radios numériques.

71      De surcroît, la requérante fait valoir que l’OHMI n’aurait pas dû rejeter la preuve de l’usage, au seul motif que celui-ci se référait à une période postérieure au dépôt de la demande. L’arrêt du Tribunal du 12 décembre 2002, eCopy/OHMI (ECOPY) (T‑247/01, Rec. p. II‑5301, points 36 à 43), ne pourrait pas être invoqué utilement par l’OHMI, dès lors que, à cette occasion, le Tribunal aurait commis une erreur, en ce qu’il n’aurait pas pris en considération l’article 51, paragraphe 2, du règlement n° 40/94.

72      En effet, ladite disposition n’exigerait pas que l’usage pertinent se réfère à une période postérieure à l’enregistrement de la marque, mais plutôt que, « après son enregistrement », la marque ait acquis un caractère distinctif. De la même manière, une marque pourrait acquérir un caractère distinctif durant la procédure d’enregistrement, de façon à devenir distinctive au moment de l’enregistrement effectif. Cette situation serait, en effet, moins choquante que celle visée à l’article 51 du règlement n° 40/94, où l’usage serait démontré entièrement durant une période postérieure à l’enregistrement. Selon la requérante, il serait illogique, même du point de vue commercial, d’interpréter l’article 51, paragraphe 2, de manière restrictive, en ce sens que l’on pourrait révoquer une marque n’ayant pas de caractère distinctif au moment de la demande, mais qui serait devenue distinctive avant la date de l’enregistrement effectif, tandis que l’on ne pourrait pas révoquer une marque devenue distinctive après cette date.

73      Il s’ensuivrait que le caractère distinctif de la marque devrait être apprécié au moment de l’adoption de la décision. Enfin, la requérante soutient qu’il n’y aurait logiquement pas de différence entre une marque enregistrée par erreur à l’issue d’une procédure rapide et qui devient par la suite distinctive, et une marque enregistrée à l’issue d’une procédure longue au cours de laquelle elle acquiert son caractère distinctif. Dans les deux cas, les marques permettraient au consommateur d’identifier l’origine des produits et des services.

74      L’OHMI conteste les arguments de la requérante et estime que l’appréciation de la chambre de recours est correcte, étant donné que la requérante aurait dû prouver non seulement l’usage du signe en cause, mais également le fait que le consommateur ciblé entendait ledit signe non comme un terme descriptif, mais aussi comme une marque.

 Appréciation du Tribunal

75      En vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, les motifs absolus de refus d’enregistrement visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), dudit règlement ne s’opposent pas à l’enregistrement d’une marque si celle-ci a acquis, pour les produits et services pour lesquels l’enregistrement est demandé, un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait.

76      S’agissant de l’argument de la requérante tiré de l’absence de prise en compte de la preuve de l’usage, au seul motif que le signe pour lequel l’usage était démontré ne correspondait pas exactement à la forme faisant l’objet de la demande d’enregistrement, il suffit de constater que la chambre de recours a rejeté les éléments de preuve relatifs à l’usage de la marque pour des motifs différents, à savoir qu’ils ne démontraient pas que la marque demandée avait acquis un caractère distinctif pour le consommateur, d’une part, et qu’ils se référaient à une période postérieure au dépôt de la demande de marque, d’autre part. Il s’ensuit que l’argument de la requérante est dépourvu de pertinence.

77      S’agissant de l’argument tiré de l’absence de prise en compte des éléments de preuve de l’usage au motif qu’ils se référaient à une période postérieure au dépôt de la demande, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le caractère distinctif d’une marque doit avoir été acquis par un usage antérieur au dépôt de la demande de marque [arrêts du Tribunal ECOPY, point 71 supra, point 36 ; du 13 décembre 2004, El Corte Inglés/OHMI – Pucci (EMILIO PUCCI), T‑8/03, Rec. p. II‑4297, points 71 et 72, et du 15 décembre 2005, BIC/OHMI (forme d’un briquet à pierre), T‑262/04, Rec. p. II‑5959, point 66]. Ainsi qu’il a été exposé dans l’arrêt ECOPY, point 71 supra (points 37 à 39), cette interprétation est la seule compatible avec la cohérence du système des motifs absolus et relatifs de refus en matière d’enregistrement de la marque communautaire selon lequel la date de dépôt de la demande d’enregistrement détermine la priorité d’une marque par rapport à une autre. Cette interprétation permet également d’éviter que le demandeur de marque puisse indûment tirer profit de la longueur de la procédure d’enregistrement afin de prouver que sa marque aurait acquis un caractère distinctif par un usage postérieur au dépôt de la demande.

78      C’est à tort que la requérante estime pouvoir tirer argument de l’article 51, paragraphe 2, du règlement nº 40/94 pour contester le bien fondé de cette interprétation. Cette disposition prévoit que, lorsqu’une marque communautaire a été enregistrée contrairement à l’article 7, paragraphe 1, sous points b) à d), du règlement nº 40/94, elle ne peut toutefois être déclarée nulle si, par l’usage qui en a été fait, elle a acquis après son enregistrement un caractère distinctif. Ladite disposition se justifie en effet en raison de la confiance légitime du titulaire de la marque et sur le fondement de laquelle il a pu effectuer des investissements durant la période écoulée depuis l’enregistrement. En revanche, il n’existe aucune confiance légitime dans le cadre d’une simple demande d’enregistrement de sorte qu’il n’y a pas lieu de prendre en considération l’éventuel usage de la marque postérieur au dépôt de la demande d’enregistrement.

79      Il s’ensuit que c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve produits par la requérante devaient être écartés dans la mesure où ils se rapportaient à la période allant de 2002 à 2004, laquelle est postérieure à la date de la demande d’enregistrement, à savoir le 1er octobre 2001. Par ailleurs, ces éléments de preuve ne permettent pas de tirer des conclusions sur l’usage de la marque tel qu’il se présentait à la date du dépôt de la demande (voir, par analogie, ordonnances de la Cour du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, Rec. p. I‑1159, point 31, et du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, Rec. p. I‑8993, point 41).

80      Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur les autres chefs de conclusions

81      Il résulte de ce qui précède qu’il n’y a plus lieu de statuer sur les chefs de conclusions de la requérante tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de l’examinateur, et, d’autre part, au renvoi de la demande d’enregistrement devant l’OHMI [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 novembre 2006, Camper/OHMI – JC (BROTHERS by CAMPER), T‑43/05, non publié au Recueil, point 99].

82      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

83      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La requérante est condamnée aux dépens.

Jaeger

Azizi

Cremona

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 septembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’anglais.